b) L'encadrement préventif des supporters
Le « fan coaching » est un programme mis en place en Belgique, qui a pour objet de réaliser un travail éducatif en profondeur ciblé directement sur les spectateurs à risque (prévention offensive) et d'assurer l'encadrement des supporters des noyaux durs à l'occasion des manifestations sportives 51 ( * ) . Des « Fan projekts », inspirés du programme belge ont également vu le jour en Allemagne.
Le programme s'articule autour de quatre axes principaux :
- l'encadrement préventif et l'accompagnement physique du noyau dur de supporters par les éducateurs à l'occasion de tous les matchs . L'objectif est d'assurer une présence institutionnelle au sein du groupe de supporters et de constituer ainsi un canal de communication entre les supporters et l'autorité (forces de l'ordre et responsables des clubs). Cet encadrement permet aussi, par une position privilégiée au coeur des évènements, de désamorcer certains incidents dès leur genèse. De même, par leur simple présence, les « fans coaches » induisent un contrôle social informel qui engendre un comportement positif du responsable du groupe. En Angleterre, chaque club professionnel (soit 96 clubs) est suivi par un policier référent toute la semaine . Il s'agit donc d'un travail à plein temps de physionomistes, qui connaissent et reconnaissent les supporters hors du stade et dans le stade. Leur rôle est de prévenir les conflits, de collecter des informations sur les groupes, et éventuellement de réunir des preuves (grâce à un équipement vidéo) du comportement délictueux de certains supporters.
En France, la LFP préconise que les clubs assurent l'encadrement de leurs supporters en déplacement dès que le nombre dépasse la cinquantaine.
Vos rapporteurs recommandent que la police nationale envoie des policiers en permanence dans les clubs à risque, ces policiers étant connus des groupes de supporters afin de jouer un rôle préventif : déminer les situations conflictuelles avant qu'elles ne deviennent violentes et réunir des informations afin d'empêcher les bagarres. |
Les moyens humains sont un aspect essentiel de la lutte contre le hooliganisme. En Angleterre, environ 200 policiers travaillent à plein temps sur cette question. Ils sont une poignée en France... 52 ( * )
Vos rapporteurs estiment que l'utilisation de policiers référents pourrait permettre, grâce à l'amélioration de l'information fournie et à leur rôle de prévention, de diminuer les effectifs de forces de l'ordre mis en place autour des stades les jours de match, et donc de diminuer les dépenses. En Angleterre, de nombreuses rencontres se déroulent ainsi aujourd'hui en l'absence de toute présence policière.
- l'organisation d'activités pédagogiques et sportives . L'objectif est d'apporter une alternative à l'inactivité urbaine des hooligans. Une des idées centrales du « fan coaching » est que le sport constitue un moyen idéal pour les éducateurs d'établir un premier contact et de créer une relation différente au sport ;
- la mise en place de maisons des supporters, situées sur le site du stade, permettant l'accueil des supporters la semaine en soirée et les jours de matchs à domicile. Ils constituent, selon Manuel Comeron, une alternative à leur fréquentation de quartiers ou de cafés criminogènes et permettent aux jeunes de participer à la vie de groupe sous encadrement socio-éducatif. Cet aspect en France est géré par les clubs, ce qui semble tout à fait pertinent. En effet, ils permettent à certaines associations d'utiliser des locaux dans les stades, selon les relations qu'ils ont avec elles, ce qui facilite la constitution d'un réseau de sociabilité potentiellement préventif de violence par les supporters ;
- la réinsertion sociale représente aussi un volet important du programme belge.
La LFP a bien compris l'intérêt de la prévention et a donc mis en place un panel d'incitations aux comportements vertueux telles que :
- l'adoption de la charte éthique du football en 2002 ;
- la systématisation des poignées de mains avant le coup d'envoi des matchs entre les joueurs, les entraîneurs, les arbitres et les délégués ;
- la création du championnat de France des tribunes dont l'objectif est d'encourager le caractère festif des matchs en incitant le public à créer des animations. Les sommes attribuées aux clubs doivent être dédiées aux actions de leurs supporters ;
- la création d'un hymne contre le racisme ;
- la formation des « speakers », devenus « animateurs » afin d'éviter tout dérapage consécutif à leur intervention.
Ces actions sont très utiles mais un dialogue direct avec les associations de supporters est nécessaire afin d'éviter les débordements inopinés de leurs membres lors des matchs. Ce dialogue passe par la structuration, difficile, des associations de supporters.
* 51 Ce programme a notamment été décrit aux rapporteurs par Sébastien Buron, auteur d'un mémoire sur le hooliganisme, auditionné par la commission le 18 avril 2007.
* 52 M. Michel Lepoix, coordinateur national chargé du football, et son adjoint M. Jean-Luc Pécharman, auditionné par la Commission, jouent notamment un rôle essentiel de coordination dans la lutte contre le hooliganisme en s'appuyant sur l'ensemble des services de l'État (Renseignements généraux, préfecture de police et préfectures) et les acteurs du monde du football (fédération, ligue, clubs et... supporters).