c) Articuler l'offre de certification aux besoins de l'économie : clarifier et évaluer
Comme cela a été souligné dans la première partie du présent rapport, l'éclatement des responsabilités en matière de définition des diplômes, titres ou certifications professionnels réduit la lisibilité de l'offre et constitue un frein à l'articulation cohérente des parcours de formation, en formation initiale comme continue.
A la différence d'autres pays, il n'existe pas de référentiels de métiers communs à l'ensemble des acteurs intervenant dans l'élaboration des diplômes ou titres professionnels : chacun des sept ministères certificateurs dispose de ses prérogatives propres, de même que les branches pour ce qui concerne la définition des certifications de qualification professionnelle (CQP).
La situation est différente en Allemagne, par exemple, où la Loi Fédérale a institué 340 « codes de formation » élaborés avec la collaboration active des entreprises et définissant les principaux champs de métiers, qui se déclinent, ensuite, dans l'offre de diplômes. En outre, M. Pierre Boissier, directeur général de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), a cité l'exemple des Pays-Bas, où il existe « un organisme national de gestion des référentiels en charge de la formation initiale professionnelle et de la formation continue. L'organisme national paritaire, comprenant également des représentants de l'État, élabore des référentiels de qualification reconnus par tous. » Ce dispositif permet, d'une part, de mieux articuler les référentiels de formation aux besoins de l'emploi , d'autre part, « de combiner des diplômes impliquant l'acquisition de savoirs fondamentaux délivrés par l'éducation nationale et des diplômes fondés sur la mise en situation de travail. (...) En outre, cet organisme national peut diffuser sa connaissance des contenus de métiers à l'ensemble du réseau d'information et d'orientation. »
A la lumière de ces expériences, il serait souhaitable de parvenir à une plus grande mise en cohérence de l'offre de certification , en partageant les expertises des différents acteurs. Cet effort d'harmonisation, destiné notamment à éviter les doublons et favoriser les équivalences, devrait ainsi limiter la tendance à l'inflation du nombre de titres ou diplômes . Cela passe d'abord par la généralisation d'une concertation interministérielle accrue , en rapprochant les travaux de leurs instances paritaires consultatives 87 ( * ) , pour passer d'une logique de cloisonnement à une logique de complémentarité entre les titres et les filières de formation. Au-delà, comme cela a été souligné lors de l'audition des responsables du ministère de l'éducation nationale, « la logique du guichet unique pourrait utilement être appliquée dans ce domaine » , afin de retrouver une certaine vision globale, dans le respect des spécificités propres à chaque organisme certificateur.
Cette exigence de rationalisation devrait s'accompagner d'une meilleure mise en avant, dans les référentiels, des compétences acquises et sanctionnées par le titre, afin d'en améliorer la lisibilité pour les employeurs.
Il s'agit, enfin, de renforcer l' évaluation de la pertinence et de l'adaptation de l'offre de diplôme ou certifications existante , au regard des débouchés qu'ils offrent .
Cela suppose notamment d'associer plus étroitement les représentants des professions concernées dans la procédure d'habilitation des titres, dans le cadre d'une gestion véritablement paritaire, afin de prendre en compte, comme critère de création, d'évaluation et de révision, les perspectives et les résultats en termes d'insertion professionnelle , comme cela est le cas pour les licences professionnelles. Il serait enfin souhaitable de généraliser la constitution de « dossiers d'opportunités » en vue de la création et de la rénovation des titres ou diplômes, qui pourraient également comporter des recommandations en termes de flux d'entrée en formation.
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Le rapprochement des formations professionnelles, notamment initiales, des besoins des entreprises en personnels qualifiés, est une exigence non seulement pour la compétitivité de notre économie, mais également une exigence de la nation à l'égard de sa jeunesse.
Comme la mission l'a souligné au travers des propositions formulées dans ce présent chapitre, cela nous impose de dépasser tout clivage, de mobiliser l'ensemble des acteurs - éducatifs ou professionnels - et des outils, afin de tendre, dans une approche partagée, vers ces objectifs.
Pour reprendre les propos de Mme Laurence Paye-Jeanneney, administratrice générale du Conservatoire national des arts et métiers, la « réconciliation » des savoirs et des compétences constitue « un formidable enjeu, qui relève également de l'éducation nationale » . Il s'agit toutefois de prolonger cet effort de formation tout au long du parcours professionnel, en vue d'amener chacun à évoluer dans son savoir et ses compétences, en vue de les adapter aux mutations du marché du travail.
* 87 L'article D. 335-36 du code de l'éducation offre pour cela un cadre de concertation à réactiver. Cet article prévoit en effet que « lorsque plusieurs commissions professionnelles consultatives, concernées par la même branche d'activités, ont été constituées auprès de différents ministères, leur regroupement périodique doit être prévu au sein d'une formation commune (...). »