III. OPTIMISER L'APPAREIL DE FORMATION PAR L'INNOVATION ET L'ÉVALUATION
Constatant que l'énergie et le dévouement des acteurs de la formation professionnelle ne parviennent pas à produire tous leurs effets bénéfiques en raison de la fragmentation et l'inadaptation de la logique d'ensemble de l'appareil de formation professionnelle aux besoins de notre temps, la mission s'est attachée à mettre en évidence trois principales voies d'amélioration.
La première est de généraliser la culture, les outils et la pratique de l'évaluation des performances du système de formation : la tâche est difficile mais particulièrement nécessaire.
La seconde consiste à faire connaître les expériences qui réussissent sur le terrain, à en analyser les composantes et à encourager les expérimentations similaires.
Enfin, la mission souligne le caractère essentiel de l'amélioration de l'ingénierie de la formation professionnelle.
A. GÉNÉRALISER LA CULTURE, LES OUTILS ET LA PRATIQUE DE L'ÉVALUATION
La mission d'information a constaté que le contrôle de la formation professionnelle, essentiellement juridique ou financier, est aujourd'hui encore trop éloigné de l'évaluation des performances.
Pourtant cette évaluation est non seulement possible, comme le montrent un certain nombre de travaux, mais également plus nécessaire que jamais.
Au vu de la situation actuelle, la mission d'information estime qu'il conviendrait de dynamiser les moyens existants en les fédérant dans un organisme d'évaluation et de régulation de la formation professionnelle.
1. Aujourd'hui, le contrôle des moyens l'emporte sur l'évaluation des performances
a) Un contrôle de l'État plus axé sur les « moyens mis en oeuvre » que sur les résultats
(1) Les contrôles effectués par la Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) et les directions régionales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DRTEFP)
Le rapport d'information précité de M. Jacques Barrot avait souligné en 1999 le caractère « notoirement insuffisant » du dispositif de contrôle de la formation professionnelle en évoquant la faiblesse des effectifs qui lui sont affectés.
Lors de son audition par la mission d'information, M. Gérard Larcher a signalé que 2 009 contrôles des organismes de collecte et de formation avaient été effectués en 2006 et qu'ils incorporaient « l'observation des bonnes et des mauvaises pratiques » .
Le rapport publié en juin 2006 par la Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP), « Le contrôle de la formation professionnelle en 2003 et 2004 », détaille cette activité :
- des services régionaux de contrôle de la formation professionnelle (SRC), des directions régionales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DRTEFP) ;
- de la Sous-direction du contrôle national de la formation professionnelle (SD-CNFP) de la Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP).
S'agissant du fondement juridique de ce contrôle , on peut observer que l'administration fait référence :
- à une quinzaine d'articles du code du travail (articles L. 991-1, L. 950-1, L. 900-2, L. 900-3, L. 953-1, L. 953-3, L. 953-4, L. 991-2, L. 119-1-1, L. 119-1-2, L. 991-3, L. 983-4, L. 118-2-4 et L. 991-3) pour le suivi de l'activité de la formation professionnelle et des organismes collecteurs de la taxe d'apprentissage ;
- à une seule et unique prescription pour le contrôle de l'utilisation des fonds structurels dans le cadre des conventions du Fonds social européen : « Sans préjudice de la responsabilité de la Commission dans l'exécution du budget général de l'Union européenne, les État s membres assument en premier ressort la responsabilité du contrôle financier de l'intervention. » (paragraphe 1 de l'article 38 du règlement (CE), n° 1260/99 du Conseil du 21 juin 1999 portant dispositions sur les fonds structurels).
Or, d'après les indications recueillies par la mission d'information, environ 80 % des moyens de contrôles sont absorbés par cette dernière tâche.
Ce rapport fait état, au niveau national, d'une décision définitive de redressement d'un organisme collecteur et de deux propositions de redressement au titre d'actions cofinancées par le Fonds social européen. En outre « le contentieux représente 1 % de l'activité des services régionaux » qui rassemblaient au 30 juin 2005 des effectifs représentant 153,1 emplois « équivalents à temps plein » .
Seule la formation professionnelle des fonctionnaires chargés du contrôle fait l'objet d'appréciations qualitatives dans ce document qui évoque un « bilan très satisfaisant » et le jugement positif des quelque cent stagiaires familiarisés :
- avec la complexité croissante du droit de la formation professionnelle ;
- et sensibilisés au risque sectaire, en coordination avec la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES).
Centré tout au long de ses 114 pages sur les éléments quantitatifs, juridiques et financiers de la formation, ce rapport rappelle cependant, dans sa conclusion, que « la durée moyenne des actions de formation tend, depuis plusieurs années, à diminuer » et précise : « les contrôles sur le terrain ont révélé que cette tendance, quand elle n'était pas maîtrisée, pouvait conduire à une dilution de l'action de formation dans des processus de durée plus ou moins indéfinis, qui, outre leur faible efficacité pédagogique, pouvait conduire à une surévaluation des dépenses, au détriment des objectifs de professionnalisation poursuivis. »
La mission d'information, tout en reconnaissant la difficulté de l'appréciation qualitative des formations, estime qu'il s'agit là d'une priorité . Au cours de son audition par la mission d'information le mercredi 7 février 2007, M. Gérard Larcher a indiqué que 2009 contrôles avaient été effectués en 2006 et que, sans se limiter à une simple vérification de régularité, ces contrôles s'étendaient également à l'évaluation des « bonnes et mauvaises pratiques » . Cependant, un certain décalage subsiste entre la volonté exprimée par le ministre et les indications publiées dans les rapports d'activité de ses services de contrôle dont les effectifs demeurent, il est vrai, limités.