N° 95

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 29 novembre 2006

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (1) sur le projet de loi n° 93 (2006-2007) tendant à promouvoir l' égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives et sur les propositions de loi :

- n° 51 rectifiée (2004-2005) de Mme Valérie LÉTARD et plusieurs de ses collègues tendant à instaurer la parité dans les fonctions exécutives municipales et à faciliter l' exercice de ces fonctions ;

- n° 147 (2004-2005) de Mme Gisèle GAUTIER tendant à établir la parité entre les femmes et les hommes dans les exécutifs des collectivités territoriales élues au scrutin de liste ;

- n° 226 (2004-2005) de Mme Nicole BORVO COHEN-SEAT et ses collèges du groupe communiste républicain et citoyen tendant à appliquer la loi sur la parité à l'ensemble des élections municipales ainsi qu'au sein des exécutifs municipaux ;

.../...

Par Mme Catherine TROENDLE,

Sénateur.

(1) Cette délégation est composée de : Mme Gisèle Gautier, présidente ; Mme Paulette Brisepierre, M. Yvon Collin, Mme Annie David, M. Patrice Gélard, Mmes Gisèle Printz, Janine Rozier, vice-présidents ; M. Yannick Bodin, Mme Yolande Boyer, M. Jean-Guy Branger, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, M. David Assouline, Mmes Brigitte Bout, Claire-Lise Campion, Monique Cerisier-ben Guiga, M. Gérard Cornu, Mmes Isabelle Debré, Sylvie Desmarescaux, Muguette Dini, Josette Durrieu, M. Alain Gournac, Mmes Françoise Henneron, Christiane Hummel, Christiane Kammermann, Bariza Khiari, M. Serge Lagauche, Mmes Elisabeth Lamure, Hélène Luc, M. Philippe Nachbar, Mme Anne-Marie Payet, M. Jacques Pelletier, Mmes Catherine Procaccia, Esther Sittler, Catherine Troendle, M. André Vallet.

Élections et référendums.

- n° 269 (2004-2005) de M. Jean-Louis MASSON relative à l' élection des conseillers généraux et remplaçant les cantons par des circonscriptions cantonales calquées sur les intercommunalités à fiscalité propre ;

- n° 323 (2004-2005) de Mme Gisèle GAUTIER tendant à accroître la place des femmes dans le collège électoral des sénateurs ;

- n° 505 (2004-2005) de M. Jean-Louis MASSON tendant à rétablir le scrutin proportionnel avec obligation de parité dans les départements élisant trois sénateurs ;

- n° 88 (2005-2006) de M. Jean-Louis MASSON introduisant une obligation de candidature préalable et le respect d'un seuil de parité pour les élections municipales dans les communes de moins de 3.500 habitants ;

- n° 136 (2005-2006) de M. Jean-Louis MASSON relative aux communes de plus de 3.500 habitants et tendant à instaurer une obligation de parité pour l' élection des adjoints au maire , à organiser la désignation des délégués dans les intercommunalités à fiscalité propre selon une représentation proportionnelle avec obligation de parité , à assurer la représentation des listes minoritaires dès le premier tour des élections municipales et à clarifier les choix au second tour ;

- n° 153 (2005-2006) de Mme Muguette DINI visant à renforcer la parité dans les élections municipales, cantonales, législatives, sénatoriales et dans les exécutifs locaux et établissements publics de coopération intercommunale ;

- n° 169 (2005-2006) de M. Jean-Louis MASSON tendant à instaurer une obligation minimale de parité pour l' élection des sénateurs dans les départements où le scrutin majoritair e est appliqué ;

- n° 207 (2005-2006) de M. Jean-Louis MASSON tendant à instaurer des pénalités financières réellement dissuasives à l'encontre des partis politiques ne respectant pas l' article 4 de la Constitution en ce qui concerne l' égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux ;

- n° 326 (2005-2006) de M. Jean-Louis MASSON tendant à favoriser les progrès de la parité lors des élections législatives et des élections sénatoriales au scrutin majoritaire ;

- n° 374 (2005-2006) de M. Jean-Louis MASSON tendant à instaurer une obligation de parité pour l'élection des vice-présidents de conseils régionaux , à assurer la représentation des listes minoritaires dès le premier tour des élections régionales et à clarifier les choix au second tour ;

- et n° 44 (2006-2007) de M. Jean-Louis MASSON tendant à renforcer la parité entre les hommes et les femmes dans la vie politique en reprenant les orientations évoquées par le Président de la République en janvier et septembre 2006.

Mesdames, Messieurs,

À l'occasion de ses voeux de début d'année, en janvier 2006, M. Jacques Chirac, Président de la République, a souhaité que soit franchie une « étape nouvelle pour la parité » entre les femmes et les hommes. À cette fin, il a proposé que soit instituée une obligation de parité dans les exécutifs des communes de plus de 3 500 habitants, dans les exécutifs des conseils régionaux, ainsi que dans la désignation des délégués des communes au sein des structures intercommunales, et que soient considérablement renforcées, pour devenir véritablement dissuasives, les sanctions financières prévues à l'encontre des partis politiques ne respectant pas la parité des candidatures aux élections législatives.

La présentation d'un projet de loi tendant à mettre en oeuvre ces mesures a ensuite été annoncée lors de la journée internationale des femmes, le 8 mars 2006, par Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, puis à nouveau évoquée publiquement à deux reprises par le Président de la République, au cours de sa traditionnelle interview télévisée du 14 juillet et de son entretien radiophonique sur Europe 1, le 18 septembre 2006.

Le projet de loi tendant à promouvoir l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, déposé sur le bureau du Sénat le 28 novembre 2006, reprend les propositions formulées par le Président de la République, à l'exception de celles concernant les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ; il tend en outre à doter les conseillers généraux d'un suppléant de sexe différent, appelé à remplacer le titulaire en cas de décès de ce dernier.

La commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, saisie au fond de ce projet de loi, a immédiatement souhaité recueillir l'avis de votre délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, en application des dispositions de l'article 6 septies de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires. Elle avait également tenu à saisir votre délégation, dès le 8 février 2006, de dix propositions de loi concernant toutes le thème de la parité en politique, déposées par certain(e)s de nos collègues, appartenant à différents groupes politiques 1 ( * ) .

A la suite de cette saisine, votre délégation a entrepris, depuis le mois de mai 2006, un important cycle d'auditions et une réflexion d'ensemble sur ce thème. Au cours de 13 réunions, elle a entendu au total 29 personnes, dont notamment les représentants de la plupart des associations d'élus et des principales formations politiques, ainsi que deux ministres : Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, le 27 juin 2006, et M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales, le 29 novembre 2006.

Par ailleurs, des représentants de votre délégation ont été reçus par M. Dominique de Villepin, Premier ministre, en association avec des représentants de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes de l'Assemblée nationale, dans le cadre d'une réunion tenue à Matignon le 28 novembre 2006, au cours de laquelle le Premier ministre a présenté le projet de loi adopté le matin même en conseil des ministres, en présence de Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité.

A l'issue de ses travaux, votre délégation constate que l'application de la loi sur la parité du 6 juin 2000 a permis de réelles avancées concernant la représentation des femmes en politique, tout en laissant subsister des insuffisances concernant en particulier les assemblées élues au scrutin uninominal, les exécutifs des collectivités territoriales et les structures intercommunales.

Outre les mesures figurant dans les propositions et le projet de loi dont la délégation a été saisie, de très nombreuses suggestions lui ont été présentées pour faire progresser la place des femmes en politique, concernant toutes les élections, nationales ou locales, et tous les niveaux de responsabilité.

Au vu d'un examen approfondi de l'ensemble de ces propositions, votre délégation vous propose d'approuver le projet de loi aujourd'hui soumis au Sénat, tout en vous présentant un certain nombre de recommandations complémentaires tendant à assurer une meilleure représentation des femmes en politique.

I. LA LOI DU 6 JUIN 2000 A PERMIS DE RÉELLES AVANCÉES EN FAVEUR DE LA PARITÉ, MAIS LAISSE SUBSISTER DES INSUFFISANCES

A. LE DISPOSITIF JURIDIQUE ACTUELLEMENT APPLIQUÉ EN FAVEUR DE LA PARITÉ : UN RÉGIME POUR L'ESSENTIEL ISSU DE LA LOI DU 6 JUIN 2000, RENDUE POSSIBLE PAR LA RÉVISION CONSTITUTIONNELLE DE 1999

Le droit en vigueur comporte d'ores et déjà un ensemble de dispositions contraignantes ou incitatives tendant à favoriser la parité en politique.

Rendues possibles par la révision constitutionnelle du 8 juillet 1999, ces dispositions résultent pour l'essentiel de la loi du 6 juin 2000 tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives.

1. Un préalable : la révision constitutionnelle du 8 juillet 1999

Une révision de notre Constitution était un préalable nécessaire à toute mesure législative comportant une distinction entre candidats en raison de leur sexe.

En effet, le Conseil constitutionnel avait censuré à deux reprises de telles dispositions, considérant qu'elles étaient contraires aux principes constitutionnels résultant de l'article 3 de la Constitution et de l'article VI de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789.

Dans sa décision n° 82-146 DC du 18 novembre 1982, le Conseil constitutionnel avait ainsi annulé une disposition prévoyant l'obligation pour les listes de candidats aux élections municipales dans les communes de plus de 3 500 habitants de ne pas comporter plus de 75 % de personnes du même sexe.

Se référant à l'article 3 de la Constitution, relatif à l'universalisme du suffrage 2 ( * ) , et à l'article VI de la Déclaration de 1789, relatif au principe d'égalité 3 ( * ) , le Conseil constitutionnel avait considéré que « la qualité de citoyen ouvre le droit de vote et l'éligibilité dans des conditions identiques à tous ceux qui n'en sont pas exclus pour une raison d'âge, d'incapacité ou de nationalité, ou pour une raison tendant à préserver la liberté de l'électeur ou l'indépendance de l'élu ; que ces principes à valeur constitutionnelle s'opposent à toute division par catégories des électeurs ou des éligibles ; qu'il en est ainsi pour tout suffrage politique, notamment pour l'élection des conseillers municipaux » .

Il en avait déduit que « la règle qui, pour l'établissement des listes soumises aux électeurs, comporte une distinction entre candidats en raison de leur sexe [était] contraire aux principes constitutionnels ci-dessus rappelés » .

Le Conseil constitutionnel avait ensuite confirmé cette jurisprudence dans sa décision n° 98-407 DC du 14 janvier 1999 en censurant une disposition prévoyant que « chaque liste assure la parité entre candidats féminins et masculins » aux élections régionales.

Devant le constat d'une présence encore très insuffisante des femmes au sein des institutions publiques, une révision constitutionnelle s'avérait donc indispensable pour autoriser l'adoption de mesures législatives contraignantes permettant une mise en oeuvre effective du principe d'égal accès des femmes et des hommes aux mandats et fonctions électives.

A l'issue de débats longs et passionnés, le Parlement réuni en Congrès a finalement approuvé définitivement, le 28 juin 1999, la loi constitutionnelle relative à l'égalité entre les femmes et les hommes 4 ( * ) .

Fruit d'un compromis entre les rédactions proposées par le Gouvernement, l'Assemblée nationale et le Sénat, le texte ainsi adopté modifiait à la fois l'article 3 et l'article 4 de la Constitution.

a) La modification de l'article 3 de la Constitution

L'article 3 de la Constitution, relatif à la souveraineté nationale et au suffrage universel, a été complété par une phrase ainsi rédigée : « La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives » .

Dans sa décision n° 2000-429 DC du 30 mai 2000, le Conseil constitutionnel a interprété cette rédaction comme ouvrant la possibilité pour le législateur d'adopter des dispositions revêtant soit un caractère incitatif, soit un caractère contraignant , sous réserve de leur conciliation avec les autres règles et principes de valeur constitutionnelle.

Le Conseil a en effet considéré qu' « il ressort des dispositions (...) de l'article 3 de la Constitution, éclairées par les travaux préparatoires de la loi constitutionnelle (...) du 8 juillet 1999, que le constituant a entendu permettre au législateur d'instaurer tout dispositif tendant à rendre effectif l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ; qu'à cette fin, il est désormais loisible au législateur d'adopter des dispositions revêtant soit un caractère incitatif, soit un caractère contraignant ; qu'il lui appartient toutefois d'assurer la conciliation entre les nouvelles dispositions constitutionnelles et les autres règles et principes de valeur constitutionnelle auxquels le pouvoir constituant n'a pas entendu déroger » .

b) La modification de l'article 4 de la Constitution

À l'initiative du Sénat, l'article 4 de la Constitution, relatif au rôle des partis politiques, a également été complété par la révision constitutionnelle du 8 juillet 1999.

Ainsi, il précise désormais que les partis et groupements politiques « contribuent à la mise en oeuvre du principe [d'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives] dans les conditions déterminées par la loi » .

Dans sa décision précitée du 30 mai 2000, le Conseil constitutionnel a admis que cette disposition, combinée avec la nouvelle rédaction de l'article 3 de la Constitution, pouvait servir de fondement à une « modulation de l'aide publique allouée aux partis et groupements politiques » destinée à « inciter ces partis et groupements à mettre en oeuvre le principe d'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux » .

2. Le régime électoral issu de la loi du 6 juin 2000

La loi n° 2000-493 du 6 juin 2000 tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ensuite complétée par une loi organique spécifique à l'outre-mer 5 ( * ) , a constitué la première étape de la mise en oeuvre concrète des principes énoncés par la révision constitutionnelle du 28 juin 1999.

Cette loi concerne essentiellement les élections au scrutin de liste , pour lesquelles elle a prévu des obligations de parité des candidatures au moment de la formation des listes. Elle a en outre institué un dispositif de sanctions financières applicables aux partis ne respectant pas la parité des candidatures aux élections législatives.

a) Les scrutins de liste à deux tours : élections municipales dans les communes de plus de 3 500 habitants et élections régionales

Pour les élections municipales dans les communes de plus de 3 500 habitants et les élections régionales, la loi du 6 juin 2000 précitée a prévu l'application de la parité par groupe de 6 candidats :

au sein de chaque groupe entier de 6 candidats dans l'ordre de présentation sur chaque liste, doit figurer un nombre égal de candidats de chaque sexe, quel que soit leur ordre dans la liste ;

au sein de l'ensemble de chaque liste, l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un.

Cependant, la loi n° 2003-327 du 11 avril 2003, qui a ultérieurement réformé le mode de scrutin des élections régionales en instituant notamment des sections départementales, a abandonné la parité par groupe de 6 candidats pour imposer une stricte alternance d'un candidat de chaque sexe au sein de chaque section départementale d'une liste de candidats, en application de l'article L. 346 du code électoral 6 ( * ) .

En revanche, la parité des listes par groupe de 6 candidats s'applique toujours pour les élections municipales dans les communes de plus de 3 500 habitants , conformément à l'article L. 264 du code électoral.

Par ailleurs, il est à noter que le texte voté en 2000 par l'Assemblée nationale selon la procédure du « dernier mot », déféré au Conseil constitutionnel, prévoyait initialement l'abaissement de 3 500 à 2 500 habitants du seuil à partir duquel s'appliquerait le scrutin proportionnel avec obligation de parité des listes. Toutefois, cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel qui, dans sa décision précitée du 30 mai 2000, a considéré qu'elle aurait privé de son fondement constitutionnel le dispositif de limitation du cumul des mandats prévu par l'article LO. 141 du code électoral, aux termes duquel « le mandat de député est incompatible avec l'exercice de plus d'un des mandats énumérés ci-après : conseiller régional, conseiller à l'Assemblée de Corse, conseiller général, conseiller de Paris, conseiller municipal d'une commune d'au moins 3 500 habitants » . Dans sa décision n° 2000-427 DC du 30 mars 2000, le Conseil constitutionnel avait en effet précédemment jugé que l'existence d'un seuil de 3 500 habitants pour la détermination du mode de scrutin municipal conditionnait la constitutionnalité de ce dispositif prévu par la loi organique n° 2000-594 du 5 avril 2000 relative aux incompatibilités entre mandats électoraux.

b) Les scrutins de liste à un tour : élections sénatoriales à la proportionnelle et élections européennes

Pour les élections européennes , ainsi que pour les élections sénatoriales dans les départements où elles ont lieu à la proportionnelle , la loi du 6 juin 2000 a institué le principe d'une stricte parité des listes avec alternance d'un candidat de chaque sexe :

chaque liste est composée alternativement d'un candidat de chaque sexe ;

l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe ne peut être supérieur à un.

La loi du 11 avril 2003 précitée, qui a ultérieurement modifié le mode de scrutin applicable aux élections européennes en instituant 8 circonscriptions électorales, a maintenu le principe d'une stricte alternance des candidats de chaque sexe 7 ( * ) , appliqué au niveau de la liste de chaque circonscription.

S'agissant des élections sénatoriales, le principe de la parité des listes n'a pas été remis en cause 8 ( * ) , mais son champ d'application a été modifié dans la mesure où la loi du 30 juillet 2003 a rétabli l'application du scrutin majoritaire dans les départements élisant trois sénateurs, alors qu'en 2000 il avait été prévu que la représentation proportionnelle s'y appliquerait. Dans ces départements, la représentation proportionnelle a donc été mise en oeuvre lors des élections sénatoriales de septembre 2001, mais non plus lors de celles de septembre 2004.

c) Une modulation de l'aide publique aux partis politiques en fonction des candidatures présentées aux élections législatives

En ce qui concerne les élections législatives, qui se déroulent au scrutin majoritaire, la loi du 6 avril 2000 n'a pas prévu de mesures contraignantes imposant la parité comme pour les élections au scrutin de liste, mais seulement un dispositif incitatif reposant sur une pénalisation financière des partis politiques ne respectant pas l'objectif de parité des candidatures.

Il convient de rappeler qu'en application des articles 8 et 9 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, la dotation publique affectée au financement des partis et groupements politiques est divisée en deux fractions égales :

une première fraction destinée aux partis et groupements en fonction de leurs résultats aux élections législatives ;

et une seconde fraction spécifiquement destinée aux partis et groupements représentés au Parlement.

La première fraction est attribuée aux partis et groupements politiques qui ont présenté des candidats dans au moins 50 circonscriptions lors du dernier renouvellement de l'Assemblée nationale 9 ( * ) , à l'exception des formations spécifiques de l'outre-mer 10 ( * ) . Elle est répartie proportionnellement au nombre de suffrages obtenus au premier tour de ces élections législatives par chacune des formations concernées.

La seconde fraction est attribuée aux partis et groupements politiques bénéficiaires de la première fraction proportionnellement au nombre de parlementaires (députés et sénateurs) qui ont déclaré au Bureau de leur assemblée s'y être inscrits ou s'y rattacher.

Pour favoriser la représentation des femmes à l'Assemblée nationale, la loi du 6 juin 2000 précitée a institué une modulation de la première fraction en fonction de la proportion de candidats présentée par chaque parti : lorsque, pour un parti ou groupement politique, l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe ayant déclaré se rattacher à ce parti ou groupement, lors du dernier renouvellement de l'Assemblée nationale, dépasse 2 % du nombre total de ces candidats, le montant de la première fraction qui lui est attribué est diminué d'un pourcentage égal à la moitié de cet écart rapporté au nombre total de ces candidats 11 ( * ) , en application de l'article 9-1 de la loi du 11 mars 1988 précitée.

En application de ce dispositif, plus un parti s'écarte de l'objectif de parité des candidatures aux élections législatives, plus le montant de l'aide qui lui est versée diminue et plus il est donc pénalisé financièrement.

Ce dispositif a été institué pour favoriser la parité aux élections législatives ; en revanche, il est à souligner que la loi du 6 juin 2000 n'a rien prévu pour favoriser la parité aux élections cantonales qui se déroulent également au scrutin uninominal, alors même que les conseils généraux sont traditionnellement des « bastions masculins ».

Par ailleurs, au titre des dispositions diverses, la loi du 6 juin 2000 a rendu obligatoire la mention du sexe des candidats dans les déclarations de candidature aux élections cantonales, législatives et sénatoriales se déroulant au scrutin uninominal, ce qui permet d'établir des statistiques sexuées des candidatures.

Enfin, un rapport d'évaluation de la loi du 6 juin 2000 doit être présenté au Parlement tous les trois ans ; le premier rapport établi en application de cette loi a été présenté par le ministère de la parité et de l'égalité professionnelle en mars 2005.

Etait également prévue la présentation annuelle d'un rapport sur les actions entreprises en faveur de la parité politique, et plus particulièrement les campagnes institutionnelles visant à promouvoir la parité et le développement de la citoyenneté, mais ce rapport ne semble pas avoir été publié.

* 1 Le 22 novembre 2006, la commission des lois a en outre saisi la délégation de quatre autres propositions de loi déposées ultérieurement par notre collègue Jean-Louis Masson sur ce même sujet.

* 2 Qui était alors ainsi rédigé :

« La souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum.

« Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice.

« Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret.

« Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques. »

* 3 Aux termes duquel : « Tous les citoyens étant égaux (aux yeux de la loi) sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. »

* 4 Loi constitutionnelle n° 99-569 du 8 juillet 1999

* 5 Loi organique n° 2000-612 du 4 juillet 2000 tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats de membres des assemblées de province et du congrès de la Nouvelle-Calédonie, de l'assemblée de Polynésie française et de l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna.

* 6 L'obligation de stricte parité des listes s'applique désormais également pour les élections à l'Assemblée de Corse, dotée d'un statut particulier (cf. article L.370 du code électoral).

* 7 Cf. article 9 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977.

* 8 Cf. article L. 300 du code électoral.

* 9 En application de la loi n° 2003-327 du 11 avril 2003, à compter du prochain renouvellement de l'Assemblée nationale, la première fraction ne sera attribuée qu'aux partis et groupements ayant obtenu chacun au moins 1 % des suffrages exprimés dans au moins 50 circonscriptions.

* 10 À compter du prochain renouvellement de l'Assemblée nationale, ces formations ne pourront prétendre à la première fraction que si leurs candidats ont obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés dans l'ensemble des circonscriptions où ils se sont présentés.

* 11 Toutefois, cette diminution n'est pas applicable aux formations spécifiques à l'outre-mer lorsque l'écart entre le nombre de candidats de chaque sexe qui s'y sont rattachés n'est pas supérieur à un.

Page mise à jour le

Partager cette page