C. LES SITES INTERNET DES AMBASSADES PERMETTENT-ILS DE CONFORTER UNE POLITIQUE DE PRÉSENCE LOCALE ?
1. Une information très uniforme, et donc peu locale
La nécessité d'une mise à jour régulière des sites, à laquelle certains postes peinent à faire face, a conduit à une reprise en main partielle de la gestion des sites locaux par l'échelon central. La conséquence est simple les informations sont de moins en moins locales . Or si les informations diffusées sur le plan local ne s'adressent pas de manière spécifique au pays qui est le leur, quel est l'intérêt de disposer d'un site d'ambassade ? Trop de sites d'ambassade s'apparentent aujourd'hui à des sites miroirs du site de l'administration centrale « France diplomatie ».
A la visite, le sentiment qui en découle parfois est celui de sites un peu trop stéréotypés, et au surcroît très institutionnels. Les sites internet des ambassades relaient ainsi de plus en plus d'initiatives venant de Paris (création du haut conseil de la science et de la technologie) ou des actions multilatérales dont les postes à l'étranger ne sont qu'un relais, plutôt que des actions, des coopérations et des initiatives locales.
L'exemple infra , issu du site internet de l'ambassade de France en Autriche, montre la faible part d'informations « locales » présentées en une du site internet.
Est-ce à dire que les ambassades ne disposent pas d'informations susceptibles d'être présentées en ligne ? Compte tenu du nombre d'évènements organisés chaque année par nos postes à l'étranger et du nombre de visites bilatérales, ministérielles, parlementaires, administratives que reçoit une ambassade chaque année, cette hypothèse est peu probable.
Certes, les diplomates et attachés de presse peuvent avoir la légitime sensation que l'écriture de « dépêches » pour le site internet de leur poste constitue un travail long et fastidieux, moins prioritaire que l'écriture des télégrammes à destination de l'administration centrale à Paris.
Dans ses conditions, il faut s'interroger pour savoir comment faire profiter les sites des « contenus » déjà créés par ailleurs par les agents de l'ambassade. Les diplomates écrivent en effet beaucoup... et bien !
S'il n'est évidemment pas concevable de mettre en ligne des télégrammes portant compte-rendu de visites ministérielles, parlementaires ou administratives, il paraît en revanche tout à fait possible d'en extraire des éléments non confidentiels, sans trop d'efforts, pour enrichir les sites des ambassades .
De la même manière, les directions géographiques du Quai d'Orsay pourraient mener une réflexion avec les postes pour définir ce qu'il convient de mieux mettre en avant dans les relations bilatérales avec tel ou tel pays ou « sélectionner » ce qui, dans les positions multilatérales, peut particulièrement intéresser les opinions publiques des pays concernés.
Votre rapporteur spécial invite ainsi les agents en poste à l'étranger à développer leur « réflexe internet », qui est un travail de contact et d'influence majeur. Ainsi, la présentation 8 ( * ) de ce qu'est la communication sur le terrain, en ambassade, mériterait d'être renouvelée :
« Communiquer, cela se fait en répandant des documents, des revues et des dossiers. Cela se fait encore mieux en payant de sa personne. L'ambassadeur est quelqu'un qui écoute et qui parle, si possible dans la langue du pays. En privé aussi bien qu'avec des personnalités. Mais aussi dans des cercles plus larges : universités, colloques et grand public via les média. Il faut à l'ambassadeur un vaste carnet d'adresses. À son arrivée, il rend visite à de nombreuses personnalités et il ne cesse d'en élargir le cercle, dans la capitale et en province. Il doit connaître personnellement la plupart des membres du gouvernement et des hauts fonctionnaires, ainsi que les principaux parlementaires, banquiers, industriels, universitaires, journalistes, syndicalistes, écrivains et artistes. Au bout de quelques mois, il doit savoir quel est l'interlocuteur le plus compétent sur chaque sujet et être en mesure de lui téléphoner. Il lui faut donc nouer des relations plus familières que de simples contacts administratifs. C'est le but des mondanités diplomatiques qui font parfois sourire ou grincer des dents les non-professionnels : on en dit plus un verre en main que dans un bureau officiel. La résidence est essentiellement le cadre et le support de cette action de communication. C'est là qu'un couple ambassadorial peut le mieux s'entraider. Le conjoint de l'ambassadeur, même secondé par un intendant pour mener l'" hôtellerie ", a de quoi faire pour donner à l'accueil de la " maison de France " un " plus " qui servira l'image du pays ».
Une utilisation accrue des nouvelles technologies serait un complément utile à ces formes de contact « traditionnelles », mais au combien nécessaires.
Lors d'une conférence aux Etats-Unis intitulée « NetDiplomacy », en octobre 2000, l'ancien conseiller aux nouvelles technologies auprès du Président Bill Clinton, M. Ira Magaziner considérait que les diplomates consacreraient à terme 80 % de leur temps aux « contacts virtuels » et 20 % aux contacts « interpersonnels ». Il invitait ainsi les diplomates à évoluer dans un métier où le travail de contact a longtemps été consacré aux élites politiques, administratives, économiques et culturelles, et où il faudrait désormais être compris par le plus grand nombre. Le contact avec l'opinion publique est évidemment d'une autre nature que ceux évoqués précédemment. Rappelant que très souvent, le premier contact d'un citoyen étranger avec la culture américaine se faisait à travers le site internet de l'ambassade des Etats-Unis du pays dans lequel il résidait, il soulignait que cette « porte d'entrée » devait être particulièrement soignée.
Le site internet de l'ambassade de France en
Autriche :
une « une » mettant moins en avant les
relations bilatérales que les informations « prêtes
à l'emploi » envoyées par Paris
* 8 Faite sur le site internet France diplomatie.