ROUMANIE
par Mme Larisa TUGUI
de
la faculté de Droit, Université de Bucarest
et du
collège juridique franco-roumain d'Études européennes de
Bucarest
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SOMMAIRE
Liste des abréviations
I - La notion d'autorité administrative autonome en Roumanie
1. Le fondement constitutionnel des autorités administratives autonomes
2. Traits particuliers des autorités administratives autonomes
II - La diversité institutionnelle des autorités administratives autonomes en Roumanie
1. Les entités de régulation et de surveillance des marchés
A . La régulation du domaine de l'audiovisuel
le Conseil National de l'Audiovisuel
B . Les autorités de régulation financière
la Banque Nationale de Roumanie
la Commission Nationale des Valeurs Mobilières
la Commission de Surveillance des Assurances
la Commission de Surveillance du Système des Pensions Privées
C . La régulation du domaine de l'énergie
l'Autorité nationale de Réglementation dans le Domaine de l'Énergie
D . La régulation de la concurrence
le Conseil de la Concurrence
2. Les entités ayant une mission d'évaluation et d'expertise
A . L'évaluation dans le domaine de la formation des adultes
le Conseil National pour la Formation Professionnelle des Adultes
B . L'évaluation de la qualité de l'enseignement supérieur
l'Agence Roumaine d'Assurance de la Qualité dans l'Enseignement Supérieur
3. L'autorité de contrôle dans le domaine électoral
l'Autorité Électorale Permanente
4. Les entités intervenant dans le domaine de la sécurité nationale
A . L'autorité de coordination dans le domaine de la défense et de la sécurité
Le Conseil suprême de Défense du Territoire
B . Les différents services de renseignements
le Service de Renseignements Extérieurs
le Service de Garde et Protection
le Service Roumain des Renseignements
le Service de Télécommunications Spéciales
5. Les entités ayant pour mission la protection des droits et des libertés publiques
Le Collège National pour l'Étude des Archives de la Securitate
L'Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel
Conclusions
LISTE DES ABRÉVIATIONS
AAA autorité administrative autonome
AEP l'Autorité Électorale Permanente
ANRE l'Autorité Nationale de Réglementation dans le Domaine de l'Énergie
AMF l'Autorité des Marchés Financiers
ANS l'Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel
ARACIP l'Agence Roumaine pour la Qualité de l'Enseignement Secondaire (préuniversitaire)
ARACIS l'Agence Roumaine pour la Qualité de l'Enseignement Supérieur
BEC le Bureau électoral central
BNR la Banque Nationale de Roumanie
CE la Commission Européenne
CCR le Conseil de la Concurrence
CNA le Conseil National de l'Audiovisuel
CNEAA le Conseil National pour l'Évaluation Académique et pour l'Accréditation
CNFPA le Conseil National pour la Formation Professionnelle des Adultes
CNSAS le Collège National d'Étude des Archives de la Securitate
CNVM la Commission Nationale des Valeurs Mobilières
COSA le Conseil pour les Référentiels d'Emploi et Attestation
CSA la Commission de Surveillance des Assurances
CSAT le Conseil Suprême de Défense du Territoire
CSSPP la Commission de Surveillance du Système des Pensions Privées
JAI Justice et Affaires Internes
M.O. le Moniteur Officiel de la Roumanie
OUG ordonnance d'urgence du Gouvernement
SIE le Service de Renseignements Extérieurs
SPP le Service de Garde et de Protection
SRI le Service Roumain de Renseignements
STS le Service de Télécommunications Spéciales
UE l'Union Européenne
I - La notion d'autorité administrative autonome en Roumanie
1. Le fondement constitutionnel des autorités administratives autonomes
Le concept d'autorité administrative autonome (dorénavant : AAA) est une notion juridique nouvelle dans le droit roumain, née au début des années 1990. Elle a été consacrée par la Constitution de la Roumanie de 1991, aux articles 116 et 117 (devenus 115 et 116, après les révisions apportées à la Constitution en 2003 570 ( * ) ) :
« Chapitre V : L'Administration publique
Première section : L'administration publique centrale spécialisée
Article 116 : La structure
(1) Les ministères sont organisés uniquement en subordination au Gouvernement.
(2) D'autres organes spécialisés peuvent être organisés en subordination au Gouvernement ou aux ministères ou comme autorités administratives autonomes .
Article 117 : La création
(1) Les ministères sont constitués, organisés et fonctionnent conformément à la loi.
(2) Le Gouvernement et les ministères, après l'avis de la Cour des comptes, peuvent constituer des organes spécialisés qui leur sont subordonnés, uniquement si la loi leur reconnaît cette compétence.
(3) Des autorités administratives autonomes peuvent être créées par une loi organique . [n.s.] »
L'Assemblée constituante roumaine de 1991 légitime ainsi la création au sein de l'État de nouvelles autorités, qui, tout en étant des autorités administratives centrales, ne sont pas assujetties au Gouvernement. Il s'agit d'une exception au principe classique de la subordination de l'administration centrale au Gouvernement, principe inscrit à l'article 102 la Constitution de la Roumanie, en vertu duquel le Gouvernement « exerce la direction générale de l'administration publique » :
« Chapitre III : Le Gouvernement
Article 102 : Le rôle et la structure
(1) Le Gouvernement, conformément à son programme de gouvernement accepté par le Parlement, assure la mise en oeuvre de la politique intérieure et extérieure du pays et il exerce la direction générale de l'administration publique ».
2. Traits particuliers des autorités administratives autonomes
L'originalité des AAA résulte donc de leur appartenance à l' administration publique centrale spécialisée et de leur autonomie , deux éléments auxquels nous essayons de prêter plus d'attention dans ce qui suit.
- La place des AAA au sein de l'administration
Les autorités administratives autonomes sont des organes administratifs. Instituées par le législateur, elles sont pourvues de personnalité juridique et font partie de l'administration de l'État et même de son administration centrale. Elles sont des organismes parallèles aux départements ministériels, s'inscrivant au sein de l'administration centrale spécialisée, conformément aux prévisions de l'article 116 (2) de la Constitution. Cette précision est importante parce qu'elle distingue ces entités des autorités de l'administration publique locale qui ont été qualifiées elles aussi d'autonomes par l'article 121 (2) de la Constitution :
« Section 2 : L'administration publique locale
Article 119 : Les principes de base
L'administration publique dans les unités administratives et territoriales est fondée sur le principe de l'autonomie locale et sur celui de la décentralisation des services publics.
Article 120 : Les autorités communales et urbaines
(1) Les autorités de l'administration publique, par lesquelles se réalise l'autonomie locale dans les communes et dans les villes, sont les conseils locaux élus et les maires élus, dans les conditions fixées par la loi.
(2) Les conseils locaux et les maires agissent, dans les conditions fixées par la loi, comme autorités administratives autonomes et ils règlent les affaires publiques des communes et des villes ».
En tant que structures administratives, ces autorités relèvent du pouvoir exécutif et se distinguent à ce titre des autorités qui ne peuvent pas être rattachées au pouvoir exécutif. Cette question, qui ne ferait pas débat dans un régime stricte de séparation des pouvoirs, devient particulièrement épineuse, lorsqu'on admet qu'il existe des autorités indépendantes de contrôle qui « ne s'encadrent dans aucun des trois pouvoirs - le législatif, l'exécutif ou le juridictionnel, mais contribuent au bon fonctionnement et au équilibre de ceux-ci » 571 ( * ) . Cette approche souple du principe de la séparation des pouvoirs qui gagne aujourd'hui la doctrine roumaine et vise des institutions comme l' Avocat du Peuple (institution du type Ombudsman ) 572 ( * ) , la Cour des Comptes ou le Conseil Législatif remet ainsi en cause la nature administrative de ces entités, et dilue la notion d'autorités administratives autonomes.
- L'autonomie des AAA :
La question fondamentale du statut des ces autorités, qui les distingue des autres entités administratives, est caractérisée essentiellement par leur non soumission au pouvoir hiérarchique des ministères ou du Gouvernement. Placées « hors hiérarchie », ces autorités ne peuvent pas recevoir d'ordre d'aucun autre sujet et ne sont pas assujetties au contrôle administratif hiérarchique.
Tout comme les ministères, les autorités administratives autonomes relèvent du domaine de la loi ; plus précisément, le pouvoir constituant roumain précise qu'une AAA ne peut être créée que par loi organique. Ainsi, conformément à l'article 117 (3) cité ci-dessus, « des autorités administratives autonomes peuvent être instituées par loi organique », ce qui exige, en vertu de l'article 76 (1), que la loi soit adoptée à la majorité absolue des membres des deux Chambres.
Par exception à la règle générale, l'Exécutif pourrait intervenir également dans le domaine des autorités administratives autonomes en faisant recours aux ordonnances d'urgence. Cette possibilité résulte de l'article 115 (5) de la Constitution révisée, article relatif à la délégation législative, qui permet au Gouvernement d'émettre des ordonnances d'urgence dans le domaine des lois organiques. Après des vifs débats de la doctrine et une jurisprudence de la Cour Constitutionnelle qui avait admis une telle pratique, la Loi de révision de la Constitution adoptée en 2003 a admis expressément la possibilité de l'adoption des ordonnances d'urgence dans le domaine des lois organiques (et implicitement dans celui des autorités administratives autonomes), mais a limité en même temps le recours aux ordonnances d'urgence aux « circonstances extraordinaires dont la réglementation ne peut être ajournée », conformément à article 115 (4) de la Constitution 573 ( * ) .
II - La diversité institutionnelle des autorités administratives autonomes en Roumanie
Sous le nom d' autorités administratives autonomes on regroupe aujourd'hui, selon l'acception plus ou moins large qu'on donne à cette notion, environ une quinzaine d'organismes, entités nouvelles, hétérogènes et complexes. Apparues à partir des années 1990, dans le processus de la consolidation de la démocratie et de la transition à une économie du libre marché, ces autorités se caractérisent plutôt par leur diversité. La diversité des missions et des pouvoirs impartis aux AAA, l'hétérogénéité de leurs statuts et les degrés d'autonomie différents dont elles disposent - ce sont les éléments clefs que nous essayerons de présenter dans cette seconde partie de la présente étude.
La présentation des AAA se fera en suivant la nature de leur mission : les instances de régulation des marchés, les entités ayant essentiellement une mission d'évaluation ou de contrôle, l'Autorité Électorale Permanente, les entités intervenant dans le domaine de la sécurité nationale et les entités ayant pour mission la protection des droits et des libertés publiques.
2. Les entités de régulation et de surveillance des marchés
Dans le processus de transition à une économie de marché, un nombre important de AAA ont été créées assurant la régulation des secteurs de l'audiovisuel, financier, du marché de l'énergie ou assurant le respect des règles du jeu de la concurrence.
A. La régulation du domaine de l'audiovisuel :
le Conseil National de l'Audiovisuel
L'audiovisuel a été un des premiers domaines d'élection des autorités administratives autonomes ; dès 1992, le secteur de l'audiovisuel a été mis sous l'obédience du Conseil National de l'Audiovisuel (CNA) 574 ( * ) , qualifié expressément par le législateur d'« autorité publique autonome sous contrôle parlementaire ».
Conformément à la loi, le CNA est « le gardien de l'intérêt public dans le domaine de la communication audiovisuelle » (traduit littéralement) et dispose à ce titre de pouvoirs étendus de réglementation, autorisation, contrôle et sanction dans les secteurs public et privé de la radiotélévision. En tant qu'« autorité unique de réglementation dans le domaine des services des programmes audiovisuels », il est chargé d'émettre, dans l'application de la loi, des décisions à caractère réglementaire concernant en particulier : l'information correcte de l'opinion publique, la défense de la langue roumaine, le respect du pluralisme, la protection des mineurs, le respect de la dignité de la personne humaine, les politiques de non discrimination, le droit de réplique, la publicité, le téléachat, le parrainage, les campagnes électorales radiotélévisées et les responsabilités culturelles des radiodiffuseurs. Le CNA est habilité à remettre des licences audiovisuelles, à accorder des autorisations de retransmission et à assurer le contrôle de l'activité des fournisseurs des services de radiodiffusion et des opérateurs de câble. Il a aussi le droit de sanctionner les manquements à la loi de l'audiovisuel, les sanctions susceptibles d'être infligées étant : des amendes contraventionnelles (allant jusqu'à 500 millions lei, soit environ 13 500 euros), l'obligation du radiodiffuseur de transmettre pendant 10 minutes ( entre 19,00 heures et 19,10) ou même pendant 3 heures ( entre 18,00 et 21,00 heures) rien que le texte de la décision de sanction, la réduction à moitié du délai de validité de la licence ou le retrait de la licence dans les cas les plus graves (en cas d'incitation à la haine ethnique, raciale ou religieuse, par exemple) 575 ( * ) .
Le CNA comprend 11 membres nommés par le Parlement, dont 3 sont proposés par le Sénat, 3 par la Chambre des Députés, 2 par le Président de la Roumanie et 3 par le Gouvernement. Le pouvoir de proposition dévolu au Président de la Roumanie et au Gouvernement n'est pas pourtant de nature à créer un rapport de subordination au Pouvoir exécutif, la loi mentionnant expressément que : « les membres du CNA sont les gardiens de l'intérêt public et ne représentent pas l'autorité les ayant proposés ». En plus, seul le Parlement pourrait les révoquer, en deux cas spécifiques : en cas d'incapacité d'accomplir leurs fonctions, incapacité qui se prolongerait plus de 6 mois, et en cas de condamnation pénale. D'autres éléments organiques sont également importants pour garantir l'indépendance du CNA : la longue durée du mandat (portée de 4 à 6 ans à l'occasion de la révision de la loi de l'audiovisuel, en octobre 2003), le régime d'incompatibilités ou la compétence légale reconnue au CNA d'établir et d'approuver son propre règlement intérieur.
Le CNA dispose d'autonomie budgétaire et bénéficie, au-delà des fonds qui lui sont alloués du budget de l'État, de revenus propres extrabudgétaires.
Le contrôle de l'activité du CNA s'exerce par le Parlement : le rapport annuel d'activité du CNA est analysé dans les commissions parlementaires de spécialité, et aussi, sur la demande de ces commissions, d'autres rapports d'activité sont rédigés et soumis à l'analyse parlementaire. La loi prévoit qu'en cas de rejet de leur rapport annuel au niveau des commissions parlementaires, les membres du Conseil doivent « assumer leur responsabilité pour la réalisation du programme des mesures arrêté par le Parlement » (article 20 alinéa 5). La possibilité pour le Conseil d'être révoqué par le Parlement, mesure évoquée lors du dernier débat législatif, a été repoussée ; par là, on considère que l'indépendance du Conseil est désormais bien établie.
B. Les autorités de régulation financière :
la Banque Nationale de Roumanie
la Commission Nationale des Valeurs Mobilières
la Commission de Surveillance des Assurances
la Commission de Surveillance du Système des Pensions Privées
Dans le domaine financier , le recours aux autorités administratives autonomes a été largement pratiqué. Composé des trois secteurs distincts (les secteurs : bancaire, boursier et des assurances), le système financier est réglementé et surveillé individuellement par trois autorités administratives autonomes : la Banque Nationale de Roumanie (BNR), la Commission Nationale des Valeurs Mobilières (CNVM) et la Commission de Surveillance des Assurances (CSA) 576 ( * ) .
Une précision immédiate mérite d'être apportée : la supervision du secteur bancaire, caractérisé par une croissance rapide et une évolution constante au cours des années 90, n'a pas été confiée à une autorité de régulation distincte, sur le modèle de la Commission bancaire française, mais relève de la compétence exclusive de la Banque Nationale de Roumanie 577 ( * ) . Qualifiée expressément par le législateur d'« institution publique indépendante », la BNR assume, conformément à son statut 578 ( * ) , les fonctions traditionnelles d'une banque centrale, concernant la politique monétaire et les devises, mais elle agit aussi en tant qu'autorité de régulation du secteur bancaire, par l'autorisation, la réglementation et la surveillance prudentielle des institutions de crédit. C'est de ce point de vue que nous incluons la BNR dans la catégorie des autorités administratives autonomes 579 ( * ) .
Quant à la Commission Nationale des Valeurs Mobilières (CNVM) et à la Commission de Surveillance des Assurances (CSA), elles sont des institutions relativement nouvelles, créées en 1994, respectivement en 2000 et qualifiées expressément par le législateur d'« autorités administratives autonomes » 580 ( * ) . Les objectifs fondamentaux de la CNVM sont de créer le cadre législatif nécessaire au développement des marchés réglementés 581 ( * ) , de promouvoir la confiance des investisseurs dans ces marchés et dans les instruments financiers, ainsi que la protection des opérateurs et des investisseurs contre les pratiques déloyales, frauduleuses et abusives 582 ( * ) . Quant à la CSA, sa mission principale est d'assurer l'application de la loi des assurances, dans le but de « protéger les droits des assurés et de promouvoir la stabilité de l'activité des assurances en Roumanie ».
Afin de remplir leurs missions, les trois autorités de régulation sont dotées de nombreux pouvoirs d'autorisation, de réglementation, de surveillance et de sanction à l'égard des établissements de crédit (BNR), des personnes juridiques agissant sur le marché de capitaux et sur les marchés réglementés de marchandises (CNVM), des sociétés d'assurance, de réassurance et des courtiers d'assurance (CSA).
Elles sont des institutions collégiales, comprenant :
- la CNVM et la CSA : 5 membres, choisis à raison de leur compétence financière et juridique,
- la BNR : 9 membres (le conseil d'administration de la BNR).
Les membres de ces trois autorités sont nommés par le Parlement pour un mandat de 5 ans (qui peut être « prorogé » dans le cas de la BNR, « renouvelé une seule fois » dans le cas de la CNVM, ou simplement « renouvelé » dans le cas de la CSA). Ils sont soumis aux règles d'incompatibilité prévues par la loi (voir le Tableau 1 ) et ne peuvent être révoqués que dans les limites fixées par la loi.
La BNR, la CSA et la CNVM jouissent aussi d'une indépendance financière particulièrement forte. Le nouveau statut de la BNR adopté en 2004 renforce considérablement son indépendance financière, permettant au conseil d'administration d'approuver le budget annuel de la BNR et limitant le contrôle de la Cour des Comptes aux opérations commerciales effectuées par la BNR 583 ( * ) . La CNVM et la CSA disposent, quant à elles, des ressources propres extrabudgétaires, constituées, en principal, des taxes de fonctionnement payés par les sociétés d'assurance et les courtiers d'assurances dans le cas de la CSA ou des revenus de la valeur des offres publiques d'acquisition, qui détiennent le poids le plus important dans la structure des revenus de la CNVM.
Enfin, le pouvoir de ces entités d'élaborer et d'approuver leurs propres règlements intérieurs est aussi une garantie d'indépendance particulièrement importante.
Le contrôle sur leur activité est exercé par le Parlement, auquel elles présentent annuellement un rapport sur les activités développées.
À ces trois autorités de régulation financière s'ajoute la Commission de Surveillance du Système des Pensions Privées (CSSPP), qui s'est séparée en juin 2005 de la CSA. Instituée par l'ordonnance d'urgence du Gouvernement n o 50/2005 584 ( * ) , la Commission de Surveillance a été qualifiée expressément d'« autorité administrative autonome , à personnalité juridique, soumise au contrôle du Parlement ».
Elle a été chargée de réglementer, surveiller et contrôler le nouveau système des pensions privées, dans le but de protéger les intérêts des participants aux fonds des pensions. À cette fin, elle est dotée d'un pouvoir d'autorisation à l'égard des sociétés intéressées à administrer les fonds de pensions privés, est compétente pour exercer le contrôle de la contribution des employeurs aux fonds de pensions privées, vérifier la mise en place, l'évidence et la gestion des fonds, arbitrer les conflits intervenus entre un adhérent et l'administrateur des pensions privées et appliquer les sanctions prévues par la loi.
La Commission de Surveillance partage de nombreux points communs avec les autres AAA de régulation financière en ce qui concerne sa composition (elle comprend 5 membres, nommées par le Parlement pour un mandat de 5 ans, à raison de leur qualification professionnelle), le régime d'incompatibilités (v . Tableau 1 ), les conditions de révocation des membres (ses membres ne pourront être révoqués que par le Parlement, en cas de manquement grave aux obligations qui leur reviennent) et les ressources dont elle disposent (des ressources propres, extrabudgétaires, provenant des taxes pour les autorisations et les avis donnés, des contributions régulières sous forme de taxes de fonctionnement, versées annuellement, etc.).
Un rapport d'activité annuel, rendant compte de son activité et de l'exécution du budget, est présenté devant le Parlement, ou bien, sur demande des commissions de spécialité du Parlement, d'autres rapports d'activité sont adressés au Parlement.
C. La régulation du domaine de l'énergie
l'Autorité nationale de Réglementation dans le Domaine de l'Énergie
Étant donné l'acception qu'on donne à la notion d'autonomie, parmi les entités qui se rangent dans la catégorie des AAA, il y a aussi l 'Autorité Nationale de Réglementation du domaine de l'Énergie (ANRE), créée en 1998 et qualifiée par la loi de l'énergie électrique d'« institution publique autonome, à personnalité juridique, fonctionnant dans la coordination du ministère de ressort » 585 ( * ) . Sa mission principale est de développer un marché national d'énergie, compétitif et intégré au marché interne européen, et de soutenir le processus de restructuration et de privatisation des secteurs de production et de distribution de l'énergie électrique. À cette fin, elle dispose de pouvoirs de réglementation, d'autorisation et de contrôle dans le domaine de l'énergie électrique et thermique. Depuis décembre 2000, l'ANRE est passée sous la tutelle du ministère de l'industrie et des ressources, élément peu compatible avec le statut d'autonomie.
L'ANRE dispose de nombreuses attributions, parmi lesquelles : a) elle élaboré des dispositions du droit dérivé régissant le secteur de l'électricité ; b) elle octroie, modifie, suspend ou retire aux opérateurs économiques les autorisations d'entrée sur le marché de l'énergie et délivre les licences d'exercice de leur activité en Roumanie ; c) elle établit les tarifs applicables aux consommateurs captifs et les prix et tarifs pratiqués entre les acteurs économiques du secteur de l'énergie électrique, notamment en matière de transport et de distribution d'énergie (où il y a un monopole naturel) ; d) elle établit les contrats-cadre de fourniture ; e) elle saisit le Conseil de la Concurrence en cas de non-respect par les opérateurs économiques des règles de la concurrence.
Le Premier ministre nomme le président et le vice-président du ANRE, sur la proposition du ministre du ressort (actuellement le ministre de l'Industrie et des Ressources), pour un mandat de 5 ans. Pour renforcer l'objectivité dans les activités de réglementation, la loi prévoit la constitution d'un comité de réglementation formé du président et du vice-président de l'ANRE, ainsi que de 3 membres, nommés par le ministre du ressort pour un mandat de 5 ans. Les membres du comité de réglementation sont soumis aux règles d'incompatibilités prévues par la loi (voir le Tableau 1 ) et ne peuvent être révoqués qu'en respectant les prévisions de la loi.
L'ANRE est indépendante sur le plan financier : son financement est assuré intégralement des revenus propres extrabudgétaires, obtenus des tarifs pour l'octroi des licences et autorisations, ainsi que des contributions des organismes internationaux ou des agents économiques.
L'ANRE fonctionne sur la base d'un règlement intérieur propre, approuvé par arrêté du Gouvernement. Conformément aux prévisions de la loi, l'ANRE est tenue, d' informer le ministère du ressort sur l'activité développée, par des rapports annuels qui sont rendus publiques.
D. La régulation de la concurrence :
le Conseil de la Concurrence
Outre les autorités de régulation sectorielles qui viennent d'être présentées, il y a aussi le Conseil de la Concurrence (CCR), créé par la Loi de la concurrence n o 21/1996 586 ( * ) en tant qu'« autorité administrative autonome », chargée de veiller au respect des règles de la concurrence par tous les acteurs économiques, quel que soit leur secteur d'activité. Un temps, le Conseil de la Concurrence a fonctionné en parallèle avec l'Office de la Concurrence (un organisme subordonné au Gouvernement), mais en décembre 2003, les deux ont fusionné et le Conseil de la Concurrence est devenu l'unique autorité compétente dans le domaine de la concurrence et des aides d'État 587 ( * ) .
- En matière de concurrence :
Le Conseil de la Concurrence est chargé de lutter contre les pratiques anticoncurrentielles, contre l'abus de position dominante et les concentrations économiques réalisées par fusions ou acquisitions qui conduisent à la restriction ou à la dénaturation de la concurrence. En même temps, le CCR peut autoriser des concentrations économiques et accorder des dispenses pour des cas individuels d'accords, décisions d'association ou pratiques concertées. Il peut se saisir d'office et effectuer des investigations inopinées et, en cas de violation des règles de la concurrence, il peut infliger des amendes très lourdes (allant jusqu'à 1 % ou 10% du chiffre d'affaires du dernier exercice financier, en fonction de « la gravité, de la durée des manquements constatés et de leur conséquences sur la concurrence »). Le Conseil de la Concurrence émet aussi un avis conforme sur les projets d'actes normatifs qui peuvent avoir un impact anticoncurrentiel et propose la modification de tels actes.
- En matière d'aides d'État :
En outre, le Conseil de la Concurrence est responsable du contrôle d'aides d'État qui peuvent fausser la concurrence et qui sont incompatibles avec l'acquis communautaire. Conformément à la loi sur les aides d'État 588 ( * ) , « toute aide publique prévue dans les projets d'actes normatifs ou administratifs - lois, ordonnances, ordonnances d'urgence, arrêtés du Gouvernement, etc. - doit être notifiée au Conseil de la Concurrence et ne peut être octroyée qu'avec l'autorisation de celui-ci ». Le Conseil de la Concurrence surveille aussi les aides d'États en cours et rédige un Rapport annuel concernant les aides d'État accordées en Roumanie ; le rapport est transmis à la Commission Européenne, et publié au Moniteur Officiel de la Roumanie dans le but d'assurer la transparence dans ce domaine 589 ( * ) . Mais, des progrès importants sont encore à attendre, prouvant l'application correcte de la législation sur les aides d'État ; en ce sens, il convient de noter que le dernier rapport de la Commission Européenne soulignait que « les résultats obtenus par le Conseil de la Concurrence en matière du respect de la législation sur les aides d'État doivent être sensiblement améliorés. Le CCR doit adopter une approche plus dynamique à cet égard et mieux examiner les mesures d'aide. Actuellement, la législation n'est pas appliquée à la lettre et l'analyse des décisions portant sur les aides d'État devrait être améliorée de façon substantielle » 590 ( * ) .
Le Conseil comprend 7 membres (1 président, 2 vice-présidents et 4 conseillers de concurrence), nommés par décret présidentiel, sur proposition du Gouvernement. L'exécutif a donc le pouvoir exclusif de nomination des membres du Conseil, ce qui tend à diminuer la garantie d'indépendance du Conseil par rapport au Pouvoir en place. Pour assurer son indépendance, la loi précise, tout comme pour le CNA, que : les membres du Conseil de Concurrence ne représentent pas l'autorité qui les a nommés et sont indépendants dans la prise de leurs décisions. Le mandat des membres est de 5 ans, renouvelable une seule fois, et ils ne peuvent être révoqués que par l'autorité les ayant nommés (le Président de la Roumanie) dans deux circonstances seulement : en cas de manquement grave à la loi de la concurrence et en cas de condamnation pénale. En plus, la loi prévoit que : « le président, les vice-présidents et les conseillers de concurrence doivent avoir une indépendance réelle et jouir d'une haute réputation professionnelle et probité civique. Pour se faire nommer membre du Conseil de la Concurrence, outre une formation par des études supérieures, sont requises : une haute compétence professionnelle, une bonne réputation et une ancienneté de 10 ans minimum dans une activité économique, commerciale, juridique, ou spécifiquement dans le domaine des prix et de la concurrence ».
Le Conseil de la Concurrence peut disposer librement sur son organisation interne, étant compétent pour élaborer et adopter son propre règlement intérieur. Il élabore aussi le projet de son propre budget, prévu distinctement dans le budget d'État. Enfin, il est tenu de rédiger et publier un rapport annuel sur l'activité qu'il déroule et sur la mesure dans laquelle les agents économiques et les autorités publiques ont respecté les lois de la concurrence.
2. Les entités ayant une mission d'évaluation et d'expertise
Une catégorie particulière d'autorité autonome est représentée par les entités ayant comme mission l'évaluation et l'expertise . Il s'agit du Conseil National pour la Formation Professionnelle des Adultes (CNFPA) - qualifié expressément par le législateur d'« autorité administrative autonome à personnalité juridique » et de l'Agence Roumaine pour l'Assurance de la Qualité dans l'Enseignement Supérieur (ARACIS) qui est une « institution publique indépendante , d'intérêt national, à personnalité juridique ».
A. L'évaluation dans le domaine de la formation des adultes
le Conseil National pour la Formation Professionnelle des Adultes
Le CNFPA est né en juillet 1999 591 ( * ) , en réponse aux besoins toujours nouveaux du marché d'emploi roumain et conformément aux exigences de l'UE.
En dépit de sa qualification d'autorité administrative autonome , il ne disposait, en vertu de la loi de 1999, que d' un rôle consultatif , étant chargé de donner son avis sur les projets d'actes normatifs concernant la formation professionnelle des adultes. C'est seulement à partir de décembre 2003 que le CNFPA a incorporé le Conseil pour les Référentiels d'Emploi et Attestation (COSA, un organisme subordonné au Gouvernement), parvenant ainsi à jouir, au-delà de sa fonction consultative, d'un pouvoir décisionnel dans l'élaboration des référentiels de formation, l'autorisation des fournisseurs de formation professionnelle et l'autorisation des centres d'évaluation des compétences.
Le CNFPA est un organisme tripartite , formé des représentants de l'administration publique centrale, des patronats et des syndicats - les partenaires sociaux le plus en mesure d'anticiper l'évolution du marché du travail, des emplois et des compétences et d'assurer la qualité de la formation professionnelle continue. Les membres de cet organisme ne sont pas soumis aux régimes d'incompatibilités. Ils gardent la qualité d'employés des institutions ou des unités dont ils proviennent et peuvent être révoqués par les autorités les ayant désignés. En plus, le ministère du ressort (le Ministère de l'Emploi, de la Solidarité et de la Famille) détient un droit de regard sur le contenu du secteur de la formation professionnelle des adultes et a la compétence d'approuver le règlement intérieur pour l'organisation et le fonctionnement du CNFPA. Le ministère d'affiliation approuve même les crédits budgétaires qui lui sont octroyés, en dépit du fait que le CNFPA a sa personnalité juridique.
B. L'évaluation de la qualité de l'enseignement supérieur
L'Agence Roumaine pour la Qualité de l'Enseignement Supérieur
L' ARACIS est, quant à elle, la plus récente AAA qui fera l'objet de notre étude ; elle est un organisme dont l'objet d'activité est d'assurer une bonne qualité de l'éducation. Cette Agence a été instituée par un acte normatif complexe, l'ordonnance d'urgence du Gouvernement n o 75, issue en juillet 2005 592 ( * ) . La complexité de cette ordonnance vient du fait que deux organismes sont nés, les deux chargés de l'évaluation externe de l'éducation : l'ARACIS, chargée d'évaluer les établissements d'enseignement supérieur et qualifiée d'« institution publique indépendante » et l'ARACIP, chargée d'évaluer les établissements de l'enseignement secondaire (préuniversitaire) et placée « sous la coordination du Ministère de l'Education ». Composée de deux départements (le Département pour l'Accréditation et le Département pour l'Assurance de la Qualité), l'ARACIS incorpore le Conseil national pour l'évaluation académique et pour l'accréditation (CNEAA, un organisme créé en 1993, subordonné au Parlement) 593 ( * ) , étant la seule institution nationale 594 ( * ) habilitée à évaluer les établissements d'enseignement supérieur , évaluation nécessaire à ces établissements en vue de leur accréditation ou de l'obtention d'un financement. Un premier doute pourrait naître : dispose-t-elle vraiment de l'autorité nécessaire pour être qualifiée comme étant une autorité administrative autonome ? Pour notre part, nous avons répondu par l'affirmative, l'incluant dans la même catégorie que le CNFPA et son prédécesseur, le CNEEA, qualifié par la doctrine comme étant une AAA 595 ( * ) .
Conformément à article 19 de l'Ordonnance d'urgence du Gouvernement par laquelle est né cet organisme, l'ARACIS est dirigée par un Conseil formé de 15 membres, faisant partie du corps didactique de l'enseignement supérieur. Au moment de sa création, le fonctionnement de l'ARACIS est assuré par un Conseil intérimaire dont les membres sont nommés comme suit : a) 8 membres seront proposés par le Ministère de l'Éducation et de la Recherche ; b) 7 des membres seront proposés par la Conférence Nationale des Recteurs. Le président et le vice-président du Conseil sont nommés par ordre du ministre de l'Éducation et de la Recherche, dans un délai de 30 jours depuis l'entrée en vigueur de l'OUG portant sur la création de l'ARACIS. Le Conseil intérimaire ainsi nommé est tenu d'organiser le concours pour l'occupation des postes prévus dans l'organigramme de l'ARACIS ; les candidats pour ces postes ne devront pas cumuler des positions didactiques dans l'enseignement supérieur ; en plus, huit des positions de membre du Conseil seront publiés pour être occupés par concours. L'activité du nouveau conseil qui en résultera (et qui procède à élire son président et son vice-président) se déroule pour un mandat de trois ans. Les membres du Conseil ne peuvent pas détenir en parallèle des dignités publiques, ni la fonction de recteur. Le Conseil de l'ARACIS se renouvelle tous les trois ans par l'organisation d'un concours professionnel pour huit de ses membres.
L'ARACIS est indépendante du point de vue financier : elle dispose d'un budget propre et se finance intégralement des revenus extrabudgétaires, provenant des contrats de prestation de services pour l'évaluation de la qualité, des taxes d'autorisation et d'accréditation des établissements d'enseignement supérieur, des taxes d'évaluation externe de la qualité etc.
À la différence du CNEEA, l'ARACIS ne se subordonne ni au Parlement, ni au Gouvernement. Elle est tenue en revanche de publier annuellement un Rapport d'activité et d'élaborer, périodiquement, des rapports d'autoévaluation de la qualité de sa propre activité dans la vue de sa soumission à l'évaluation externe des agences similaires d'autres pays.
3. L'autorité de contrôle dans le domaine électoral
l'Autorité Électorale Permanente
L'Autorité Électorale Permanente (AEP) est l'une des AAA nouvellement créés par suite des modifications apportées à Loi Électorale 596 ( * ) , mise en place le 1 er juillet 2004. Elle est la première structure électorale permanente en Roumanie, destinée à améliorer le fonctionnement du système électoral qui, jusqu'en 2004, était géré exclusivement par des bureaux électoraux agissant uniquement à l'intérieur des délais d'une période électorale.
Qualifiée expressément par le législateur d'« institution administrative autonome à personnalité juridique et à compétence générale » , l'AEP a reçu le mandat d'assurer l'application unitaire, « dans l'intervalle entre deux périodes électorales », des dispositions légales concernant l'organisation et le déroulement des élections et d'autres consultations à caractère national ou local. Elle remplit essentiellement une mission de contrôle , étant chargée de superviser les opérations spécifiques qui relèvent des organismes d'État, comme la dotation des circonscriptions de vote avec la logistique nécessaire, la mise à jour des listes électorales, l'impression des cartes d'électeurs, etc. Elle doit aussi publier, après chaque scrutin, une Carte Blanche, comportant une analyse du processus des élections qui vient de se dérouler, se rapportant dans cette analyse au taux de participation au scrutin, au déroulement des élections, en signalant les dysfonctionnements constatés et les résultats définitifs. L'AEP peut aussi élaborer des propositions pour l'amélioration et le perfectionnement du système électoral (qu'elle soumet au Gouvernement pour qu'il exerce son droit d'initiative législative), adopte des arrêtés et des instructions obligatoires pour tous les organismes et les autorités ayant des attributions électorales, et dispose d'un pouvoir de sanction administrative dans les limites prévues par la loi 597 ( * ) .
En dépit des prévisions de la Loi électorale, qui prévoit que l'AEP fonctionne seulement « entre deux périodes électorales » 598 ( * ) , une série d'attributions de l'AEP ne peuvent se dérouler qu'à l'intérieur de la période électorale comme par exemple : - veiller aux modalités de choisir les locaux pour les circonscriptions de vote et pour les bureaux électoraux (à l'article 29, alinéa b) ; - assurer le monitoring et le contrôle en ce qui concerne l'établissement des listes électorales permanentes et leur actualisation, ainsi que les conditions de conservation des registres contenant ces listes électorales permanentes, et la manière dans laquelle se réalise les communications prévues par la loi, dûment enregistrées dans les listes électorales, dans les délais prévus (article 29, alinéa f) ; - dix jours avant les élections, donne avis favorable - avec interdiction de changement - aux logiciels dont on fait l'acquisition par mise aux enchères réalisée conformément aux dispositions légales en vigueur et, sur demande, met ces logiciels à la disposition des partis inscrits dans la compétition électorale (article 29, alinéa u), ou met ces logiciels à la disposition de qui de droit, en cas de constat d'une contravention (l'article 99 alinéa f ). En effet, il n'y a pas de séparation nette entre les attributions du Bureau Central Électoral (BEC), qui agit à l'intérieur de la période électorale et celles de l'autorité autonome récemment créée ( éléments pris en compte par le rapport de la Mission OSCE/ ODIHR pour l'évaluation des élections présidentielles et parlementaires de 2004).
L'AEP est dirigée par un président, à rang de ministre, nommé par décision commune de la Chambre des Députés et du Sénat, sur la proposition des groupes parlementaires. La loi prévoit que le président de l'AEP soit assisté par deux vice-présidents, à rang des secrétaires d'État, nommés l'un par le Président de la Roumanie, et l'autre par le Premier Ministre. La durée du mandat est de 8 ans (renouvelable une seule fois) et pendant cette période, le président et les vice-présidents de l'AEP ne peuvent être révoqués de leur fonction que pour des raisons à validité prouvée. Pour garantir leur indépendance envers le Pouvoir politique, la loi prévoit que le président et les vice-présidents de l'AEP ne peuvent pas être membres d'un parti politique. Pourtant, cette incompatibilité n'empêche pas que les dirigeants de l'AEP soient nommés par seul le parti au Pouvoir, dès lors que le Président de la Roumanie, le Premier Ministre et la majorité parlementaire ont une même couleur politique. Ainsi, comme le rapport de la Mission OSCE/ ODIHR pour l'évaluation des élections présidentielles et parlementaires de 2004 le constate, « la méthode actuelle de nomination des membres de l'AEP remet en cause la composition multilatérale de cette institution, et même son impartialité » 599 ( * ) . Les choses sont d'autant plus graves que, à l'intérieur des périodes électorales, le président et les vice-présidents de l'AEP deviennent d'office, conformément à la Loi électorale, membres du Bureau Electoral Central (BEC) ayant plein droit d'exprimer leur vote à côté des juges et des représentants des partis politiques qui font partie du BEC ; de même, certains analystes politiques ont protesté contre le fait que la présence dans le BEC du président et des vice-présidents de l'AEP « fait d'une manière non démocratique pencher la balance des décisions prises par cette institution - BEC, en favorisant le parti de gouvernement ».
L'AEP est autonome sur le plan financier, étant compétente pour élaborer, avec la consultation du ministère des Finances, son propre projet de budget qu'elle transmet au Gouvernement pour approbation et pour l'incorporation au projet du budget de l'État. Elle présente annuellement un rapport au Parlement, rendant compte de son activité.
4. Les entités intervenant dans le domaine de la sécurité nationale
Une catégorie particulière d'AAA est représentée par les entités intervenant dans le domaine de la sécurité nationale. Dans ce domaine, particulièrement sensible pour la vie politique, deux institutions ont été qualifiées expressément par le législateur d'autorités administratives autonomes. Il s'agit du Conseil suprême de la Défense du Territoire (CSAT), qui, en vertu de l'art. 1 er de la Loi n° 415/2002 est « l' autorité administrative autonome investie, conformément à la Constitution, avec l'organisation et la coordination unitaire des activités qui portent sur la défense du pays et la sécurité nationale » et du Service des Renseignements Extérieurs (SIE), un organisme central spécialisé qui, en vertu de l'art. 5 de sa loi organique, « est organisé et fonctionne en tant qu' autorité administrative autonome ».
D'autres organismes spécialisés aussi ont été qualifiés d'autorités administratives autonomes par la doctrine , à raison notamment de leur subordination au Parlement. Il s'agit du Service Roumain de Renseignements (SRI), du Service de Télécommunications Spéciales (STS) et du Service de Garde et Protection (SPP).
A. L'autorité de coordination dans le domaine de la défense et de la sécurité :
Le Conseil Suprême de Défense du Territoire
Le CSAT est apparu, avec cette dénomination, immédiatement après la chute du régime Ceau°escu en décembre 1989, par suite de la dissolution du Conseil de la Défense dans sa forme communiste et du Département de la Sécurité de l'État, la police politique de l'ancien régime. Consacré par la Constitution de 1991, qui s'est bornée à mentionner que le Conseil suprême de Défense du Territoire assure l'organisation et la coordination de manière unitaire les activités qui portent sur la défense du territoire et la sécurité nationale , le CSAT a été qualifié expressément par le législateur d' autorité administrative autonome seulement en 2002, par la Loi n° 415/2002 600 ( * ) .
Mais l'autonomie du CSAT par rapport au Gouvernement ne peut être que relative, compte tenu du fait que les membres du CSAT sont pour la plupart des membres du Gouvernement. Conformément à la Loi n° 415, le CSAT est composé de 10 membres (des membres de droit), 6 d'entre eux sont des ministres (détenant les portefeuilles de la Défense, des Internes, des Affaires Externes, de la Justice, de l'Industrie et des Finances), 2 sont les directeurs des services des renseignements (les chefs du SRI et du SIE), deux autres sont : le chef de l'État Majeur Général et le conseiller présidentiel pour les problèmes de sécurité nationale. Le Président de la Roumanie est le président du CSAT et le Premier Ministre en est le vice-président, la nature gouvernementale de l'activité du CSAT devenant ainsi plus prégnante.
Conformément à la loi 415, « l'activité du CSAT est soumise à l'examen et au contrôle parlementaire » (art. 2). La loi précise que ce contrôle est réalisé par l'examen des rapports d'activité, obligatoirement présentés chaque année ou à la demande des commissions permanentes de spécialité du Parlement ou, encore, chaque fois qu'il est jugé nécessaire. Les rapports du CSAT sont présentés seulement en séance commune des deux Chambres (art. 2 corroboré avec l'art. 62 alinéa 2 de la Constitution), ce qui implique que beaucoup d'aspects, classifiés, ne pourront pas être examinés. Mais la pratique a mis en évidence aussi une autre voie du contrôle, le contrôle parlementaire sur les membres du CSAT, qui sont soumis, en tant que membres du Gouvernement et chefs des services secrets, au contrôle parlementaire. En vertu de leurs fonctions, ils peuvent être interpellés n'importe quand devant les commissions parlementaires de spécialité pour être
questionnés sur tout problème dans le ressort de leur fonction, y compris de leur activité dans le CSAT 601 ( * ) .
Notons aussi qu'en vertu de l'art. 3 de la loi 415, les arrêtés du CSAT sont obligatoires pour les autorités de l'administration publique et pour les institutions publiques auxquelles ces arrêtés font référence. Conformément à la loi, les institutions concernées répondent par des mesures prises afin de mettre en oeuvre les arrêtés du CSAT.
B. Les différents services de renseignements
le Service de Renseignements Extérieurs
le Service Roumain de Renseignements
le Service de Garde et Protection
le Service de Télécommunications Spéciales
Après décembre 1989, les services nationaux des renseignements ( SRI et SIE ), mais aussi STS (un organisme central de spécialité chargé d'assurer la confidentialité dans l'utilisation des télécommunications spéciales par les autorités publiques de Roumanie) et SPP (l'organisme de spécialité chargé d'assurer la protection des dignitaires roumains et étrangers) ont été soustraits à l'autorité du Gouvernement et placés sous un contrôle parlementaire , la volonté du législateur étant d'éviter leur politisation. Ces entités, instituées par des lois organiques spéciales 602 ( * ) , sont indépendantes par rapport au Gouvernement, sous l'aspect de leur responsabilité. Le contrôle de leur activité est exercé par les commissions parlementaires pour la défense, l'ordre public et la sécurité nationale. Le contrôle parlementaire de l'activité de cet organisme a été consacré par la Constitution de 1991 qui prévoit que les Chambres se réunissent en séance commune pour nommer, sur proposition du Président de la Roumanie, les directeurs des services de renseignements et exercer le contrôle sur l'activité de ces services (lettres g et h de l'art. 65 al. 2 révisé) 603 ( * ) . Le contrôle de l'activité du SRI et du SIE est exercé par deux commissions parlementaires spéciales, formées de 7 députés et 2 sénateurs et, respectivement, de 3 députés et 2 sénateurs. Les Commissions sont autorisées à vérifier la légalité de l'activité développée par les deux services, examinant aussi les plaintes concernant les manquements à la loi. En même temps, les Commissions parlementaires soumettent au contrôle la manière de dépenser les fonds budgétaires octroyés à ces services de renseignements.
Le CSAT dispose aussi, en vertu de son rôle constitutionnel, du droit d' organiser et de coordonner l'activité de ces entités : le CSAT en est informé de manière permanente sur la manière dont ces services ont accompli leurs missions, et il approuve leurs règlements intérieurs, examine leurs rapports annuels d'activité etc. Conformément à la loi, les directeurs du STS et du SIE sont nommés par le CSAT sur la proposition du Président de la Roumanie, tandis que le directeur du SPP est nommé par le Président de la Roumanie sur la proposition du CSAT. Le directeur du SRI est désigné par la Parlement, sur proposition du Président de la Roumanie.
5. Les entités ayant pour mission la protection des droits et des libertés publiques
Le Collège National pour l'Étude des Archives de la Securitate
L'Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel
Une catégorie plus réduite des AAA, mais très importante, est constituée par les entités ayant pour mission la protection des droits et des libertés publiques : le Collège National pour l'Étude des Archives de la Securitate (CNSAS) et l'Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel (ANS).
Le Collège National pour l'Étude des Archives de la Securitate (CNSAS) a été créé par la loi n° 187/1999 dans le but d'assurer le droit de chaque citoyen de connaître la manière dont l'ancienne Securitate , la police politique du régime communiste jusqu'en 1989, a influencé sa vie. Le rôle du CNSAS est de faciliter l'accès de tout citoyen roumain ou étranger qui a eu après 1945 la citoyenneté roumaine au dossier personnel se trouvant dans les archives de la Securitate , en tant que police politique 604 ( * ) et de démasquer les anciens agents et collaborateurs de la Securitate qui ont déployé des activités de police politique. Par ailleurs, le CNSAS est habilité à donner son avis, sur demande du tout citoyen roumain intéressé, sur la qualité d'agent ou de collaborateur de la Securitate (en tant que police politique) des personnes qui postulent à des fonctions éligibles ou qui se portent candidates pour être élues ou nommées à l'une des dignités ou fonctions publiques prévues par la loi. L'avis du CNSAS est obligatoire pour les candidats à une des fonctions : Président de la Roumanie, député, sénateur, membre du Gouvernement, secrétaire d'État, sous-secrétaire d'État, secrétaire général adjoint au Gouvernement et aux ministères et assimilés à ces fonctions 605 ( * ) .
La loi n° 187/1999, intitulée « Loi assurant l'accès au dossier personnel et le dévoilement de la Securitate en tant que police politique », distingue entre « la Securitate » et « la Securitate en tant que police politique », refusant ainsi de considérer la Securitate en principe et dans son intégralité comme une structure répressive. La loi définit ainsi la « police politique » : « toutes les structures de la Securitate , créées en vue de l'instauration et du maintien du pouvoir totalitaire communiste, ainsi que pour la suppression ou la limitation des droits fondamentaux de l'homme » (article no 5 (1)). Elle définit aussi les termes d'« agent de renseignements » (officier) et de « collaborateur » (informateur) de la Securitate , deux catégories par lesquelles l'activité de l'ancienne Securitate est tenue pour une structure de la police politique.
Les décisions du CNSAS sur la qualité des personnes soumises à l'investigation doivent respecter le principe du contradictoire et peuvent être contestées d'abord au Collège et ensuite à la Cour d'Appel (qui statue en premier et en dernier ressort). Les communications restées définitives (pour ne pas avoir été contestées ou par suite d'une sentence de la Cour d'appel), ainsi que les noms secrets et les fonctions remplies par les officiers et les sous-officiers de la Securitate qui ont déployé des activités de police politique sont publiées au Moniteur Officiel de la Roumanie (conformément aux prévisions de l'art. 17 de la loi 187) 606 ( * ) .
Le CNSAS est, conformément à la loi, un « organisme autonome, à personnalité juridique, soumis au contrôle du Parlement ». Son statut est précisé d'une manière plus claire par son règlement intérieur, adopté par le Parlement le 16 mai 2000, qui le qualifie d'« autorité autonome de l'administration centrale spécialisé » 607 ( * ) . Le Parlement nomme tous les 11 membres du Collège du CNSAS, sur la proposition des groupes parlementaires, conformément à la configuration politique des deux Chambres. Le mandat des membres du Collège est de 6 ans, dépassant ainsi la durée du mandat parlementaire (qui est de 4 ans), élément de nature à leur conférer une plus grande indépendance par rapport à l'autorité de nomination.
Le Conseil est tenu de présenter un rapport annuel au Parlement rendant compte de son activité, mais, en pratique, cette obligation n'a pas été toujours respectée. Le CNSAS élabore le projet de son propre budget, qu'il soumet au Gouvernement pour l'inclure dans le budget d'État.
L'Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel
Le recours à une autorité administrative autonome s'est également imposé dans le domaine de l'informatique et de la protection des données à caractère personnel. Pour assurer l'alignement aux standards et aux pratiques des institutions de l'Union Européenne, en mai 2005, une nouvelle entité a été créée : l'Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel 608 ( * ) , qualifiée expressément par le législateur d'« autorité publique, à personnalité juridique, autonome et indépendante par rapport à toute autorité de l'administration publique, ou par rapport à toute personne physique ou juridique du domaine privé » . Conformément à son statut, l'Autorité Nationale de Surveillance (ANS) a comme objectif la protection des droits et des libertés fondamentales de la personne physique, et en particulier du droit à la vie intime, familiale et privée, eu égard au traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données.
Elle reprend les attributions qui avaient été confiées à l'institution de l'Avocat du Peuple 609 ( * ) , en vertu de la Loi n o 677/2001, relative à la protection des données à caractère personnel et la libre circulation de ces donnés . La création d'une autorité de surveillance distincte répond aux observations adressées par la Commission Européenne à la Roumanie concernant le faible niveau d'implémentation des règles en matière de protection des données à caractère personnel.
En octobre 2004, le rapport régulier de la Commission européenne sur les progrès réalisés par la Roumanie sur la voie d'adhésion mentionnait : « il n'y a eu aucune initiative législative en ce qui concerne la protection des données à caractère personnel. Pour ce qui est des capacités de mise en oeuvre et des capacités administratives , contrairement à ce qui avait été annoncé en juin 2003, c'est-à-dire qu'on va monter à 20 le nombre de postes de la direction chargée de la protection des droits individuels concernant le traitement des données à caractère personnel (direction qui fait partie de l'office du Médiateur roumain), les effectifs sont restés en réalité inchangés, soit de 14 personnes. La direction a assuré un certain nombre d'actions informatives pour aider à mieux comprendre les droits et obligations découlant de la loi roumaine de 2001 en matière de protection des données. Selon le Médiateur, elle a enregistré 379 notifications d'opérations de données à caractère personnel durant la période examinée et 44 notifications des données de ce type à l'étranger. Durant la même période, 808 opérateurs de données à caractère personnel ont été enregistrés ». Le rapport conclut par apprécier que : « les textes de loi majeurs sont déjà en place. Toutefois, les progrès dans l'application des règles de protection des données à caractère personnel n'ont été que restreints. La mise en oeuvre de ces règles pose problème : les activités de mise en oeuvre sont bien en deçà des niveaux enregistrés dans les États membres actuels et les postes supplémentaires n'ont été remplis durant la période examinée ».
Le statut de cette nouvelle AAA est constitué de manière à répondre aux exigences communautaires en la matière 610 ( * ) . Pour remplir la mission dont elle a été investie, l'ANS dispose d'un éventail large d' attributions : elle reçoit et soumet à l'analyse les déclarations des opérateurs, effectue des contrôles préalables et autorise la création de fichiers, reçoit des réclamations, pétitions et plaintes concernant les opérations de traitement des données à caractère personnel et communique aux pétitionnaires les suites données à leurs demandes. Elle est chargée d'émettre des décisions et des instructions à caractère normatif, dispose d'un pouvoir d'investigation étendu, qu'elle exerce par suite à
des plaintes reçues ou de manière inopinée 611 ( * ) . L'ANS peut aussi infliger des sanctions pécuniaires et obliger les opérateurs de cesser le traitement des données ou de procéder à la destruction du traitement de données, en cas où l'on constate la violation de la loi.
L'indépendance de l'Autorité Nationale de Surveillance est garantie tant du point de vue juridique et organisationnel, que financier. Conformément à la loi, elle « ne peut être soumise à aucun mandat impératif ou représentatif, et ne peut pas être tenue à se soumettre aux instructions ou aux dispositions d'aucune autre autorité ».
Elle est dirigée par un président, à rang de secrétaire d'État, assisté par un vice-président, nommés par le Sénat pour un mandat de 5 ans. Afin de garantir l'impartialité et l'indépendance du président et du vice-président de l'ANS, la loi soumet ces fonctions à un régime d'incompatibilité très strict (voir le Tableau 1 ), et exige que ces postes soient occupés par des personnes reconnues pour leur probité civique, avec une solide compétence professionnelle (l'expérience professionnelle requise est de 10 ans minimum dans le domaine juridique). L'ANS jouit également d'une autonomie financière : elle élabore son propre projet de budget, qu'elle transmet au Gouvernement pour être inclu au projet du budget d'État. Conformément à la loi, les objections du président au projet de budget élaboré par le Gouvernement sont présentées devant le Parlement pour être solutionnées.
Indépendante par rapport à l'administration publique et au secteur privé, l'Autorité Nationale de Surveillance est néanmoins soumise à un contrôle parlementaire, étant tenue de présenter annuellement au Sénat des rapports d'activité. Le Sénat approuve également le règlement intérieur de l'Autorité Nationale de Surveillance.
CONCLUSION
Les autorités administratives autonomes reprennent une partie des attributions communément confiées à l'administration, mais vont au-delà, cumulant des pouvoirs de réglementation, d'autorisation, d'investigation et même de sanction.
Un nombre croissant d'autorités administratives autonomes disposent d' une fonction normative 612 ( * ) , ayant un pouvoir réglementaire spécialisé et subordonné au respect tant des lois et des ordonnances que des arrêtés du Gouvernement. Conformément à la loi n o 24/2000 concernant les normes de technique législative pour l'élaboration des actes normatifs, les actes des autorités administratives autonomes sont émis seulement sur la base et dans l'exécution des lois, des arrêtés et des ordonnances de Gouvernement. Ils entrent en vigueur à partir de leur publication au Moniteur Officiel de la Roumanie.
Le pouvoir de sanction attribué aux AAA est aussi important. Il s'agit notamment d'un pouvoir de sanction administrative, non pénale, comprenant une gamme large de sanctions, allant depuis le simple avertissement écrit jusqu'aux amendes contraventionnelles et à la suspension ou retrait d'autorisation. Lorsque les faits constatés sont constitutifs d'une infraction pénale, les AAA peuvent saisir les instances judiciaires ou les organes de poursuite pénale.
Les lois constitutives affirment généralement l' autonomie de ces autorités, et évitent à employer le terme d' indépendance 613 ( * ) . L'indépendance impliquerait en effet que ces autorités n'aient de compte à rendre à personne, ce qui n'est pas vrai : les AAA sont autonomes par rapport à l'exécutif, mais placée sous un contrôle parlementaire. Mais leur indépendance réelle dépend moins des proclamations légales que des garanties effectives d'indépendance dont elles disposent. Ces garanties sont destinées à écarter les influences de tous ordres, et spécialement celles du Pouvoir politique. Il y a en cinq types : la personnalité juridique, des garanties qui tiennent au statut personnel des membres (relatives à leur nomination, à la nature de leur mandat , à la cessation de leurs fonctions, au régime d'incompatibilités), la collégialité, les garanties financières et les garanties tenant à l'organisation interne de ces entités (voir le Tableau des données organiques , ci-dessous, en Annexes). Ainsi :
Les autorités administratives autonomes disposent toutes de la personnalité juridique , ce qui leur permet d'ester en justice et être elles-mêmes directement attaquées, ainsi que de gérer leur budget et leur patrimoine.
Le Parlement détient le plus souvent le pouvoir de nomination des membres des autorités administratives autonomes, ce qui renforce considérablement leur autonomie à l'égard du Gouvernement. La désignation des membres des AAA ne relève du pouvoir exécutif que dans un nombré limité des cas 614 ( * ) .
Pour qu'une protection correcte et efficace soit garantie, les membres des AAA doivent être en général des personnalités qualifiées et avoir une expérience professionnelle étendue (allant de 5 ans - pour les membres de la CNVM et de la CSA à 10 ans - pour les membres du Conseil de la Concurrence et de l'Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel).
La durée de la nomination est fixée, en général à 5 ou à 6 ans , mais exceptionnellement, elle peut être réduite à 3 ans ou aller jusqu'à 8 ans. Le mandat des membres est renouvelable, en général une seule fois 615 ( * ) .
Les membres des autorités administratives autonomes ne sont pas irrévocables ; pourtant, il ne peut pas être mis fin à leurs fonctions que dans les cas et les conditions prévues par la loi. Conformément au principe du contrarius actus , seule l'autorité qui avait fait leur nomination est en droit de les révoquer, en vertu d'une procédure similaire à la procédure de désignation.
Pour éviter le conflit d'intérêts, les membres des AAA sont assujettis à des régimes d'incompatibilités stricts, prévus par les lois spéciales de création de ces entités. Il leur est en général interdit d'être membres d'un parti politique, de détenir un intérêt direct ou indirect à une société commerciale qui pourrait générer un conflit d'intérêts et même d'exercer toute autre activité publique ou privée.
En plus, les dirigeants des AAA qui sont assimilés aux fonctions de ministre et de secrétaire d'État 616 ( * ) sont soumis aux règles d'incompatibilité spécifiques à ces fonctions 617 ( * ) .
La composition collégiale est aussi une caractéristique commune à toutes ces autorités, assurant leur indépendance et objectivité. La collégialité est elle-même très diversifiée, le nombre des membres variant de 5 à 15.
Du point de vue financier , l'autonomie de ces autorités est garantie par le fait qu'elles disposent de leur propre budget, inscrit au budget de l'État. En tant qu'ordonnateurs principaux des crédits, les dirigeants des autorités administratives autonomes élaborent chaque année l'avant-projet de leur budget qu'ils soumettent à l'approbation du Gouvernement pour être ensuite incorporé au projet du budget de l'État 618 ( * ) . En général, les AAA bénéficient d' une forme de financement mixte , pouvant bénéficier, outre les allocations budgétaires, des ressources propres, extrabudgétaires. Un nombre croissant des AAA ne dépendent en rien des crédits budgétaires et se financent exclusivement des revenus propres extrabudgétaires, formées des taxes et des cotisations perçues auprès des établissements contrôlés ou des personnes bénéficiaires de leurs services 619 ( * ) .
Dans la majorité des cas, les AAA sont compétentes pour établir et approuver leurs règlements intérieurs d'organisation et de fonctionnement . Mais, ce pouvoir, commun aux autorités de régulation des marchés financiers, ne peut pas être généralisé à toutes les AAA, pouvant être attribué aussi bien à l'exécutif ou au législatif, ce qui rejoint plutôt l'idée de contrôle (voir le Tableau 2 , ci-dessous, en Annexes). On constate donc que l'autonomie des AAA n'atteint pas toujours le même degré.
Un dernier aspect à signaler touche au contrôle des AAA. L'autonomie, caractérisée par leur non soumission à un contrôle administratif hiérarchique n'exclut pas d'autres formes de contrôle. Comme tout autre organisme administratif, les autorités administratives autonomes ne sont pas exemptes du contrôle parlementaire, financier et juridictionnel.
En règle générale, les autorités administratives autonomes sont tenues à rendre compte de leur activité devant le Parlement , dont la légitimité démocratique ne peut pas être contestée. Le fondement juridique du pouvoir de contrôle dont dispose le Parlement est l'art 111 (1) de la Constitution, en vertu duquel : « le Gouvernement et les autres organes de l'administration publique , dans le cadre du contrôle parlementaire de leur activité, sont tenus à présenter les informations et les documents requis par la Chambre des Députés, le Sénat ou les commissions parlementaires par l'intermédiaire de leurs présidents ». Les lois constitutives des autorités administratives autonomes prévoient en général la manière dont s'exerce le contrôle, mettant à la charge des AAA l'obligation de présenter au Parlement, annuellement ou sur demande, des rapports d'activité.
En pratique, une autre voie de contrôle se dessine aussi à travers le pouvoir de nomination des membres des AAA et le pouvoir d'approbation de leur règlement intérieur, appartenant soit au pouvoir législatif, soit au pouvoir exécutif (voir les Tableaux 1 et 2, ci-dessous, en Annexes).
En outre, l'activité des AAA est soumise au contrôle financier du Ministère des Finances Publiques, qui exerce un contrôle financier préventif délégué et de la Cour des comptes, qui exerce le contrôle ultérieur de l'exécution du budget et est la seule autorité compétente pour octroyer, après la vérification des comptes, la décharge de gestion.
Du point de vue de la légalité, les AAA sont également soumises à un contrôle juridictionnel . Les actes administratifs et les actes administratifs-juridictionnels émis par les AAA peuvent faire l'objet d'un recours contentieux. Dans le cadre du système judiciaire roumain, on distingue un seul ordre de juridiction. Le contentieux de l'administration est confié aux sections spécialisées au niveau des tribunaux de grande instance , des cours d'appel , et de la Haute Cour de Cassation et de Justice . Conformément au code de procédure civile et à la loi de contentieux administratif 620 ( * ) , les actes administratifs émis par les autorités administratives publiques centrales [telles les autorités administratives autonomes] relèvent en premier ressort des sections de contentieux administratif et fiscal des cours d'appel. Ils sont soumis au principe du double degré de juridiction, le jugement rendu par la cour d'appel étant susceptible de recours devant la Section de contentieux administratif et fiscal de la Haute Cour de Cassation et de Justice, à moins qu'une loi spéciale ne prévoie une autre procédure.
Tableau 1 : Les données organiques
AAA |
Nombre de Membres |
Instances de nomination des membres |
Durée du mandat |
Qualification professionnelle requise |
Régime d'incompatibilités |
le Conseil National de l'Audiovi-suel (CNA) |
11 |
le Parlement, sur proposition du Président de la Roumanie(2), Gouvernement (3), Chambre des Députés (3) et Sénat (3) |
6 ans |
(sans mention expresse dans le texte de la loi) |
Pour être compatible avec la fonction de membre du CNA, une personne ne doit pas : - exercer toute autre fonction publique ou privée, sauf les fonctions didactiques ; - être membre d'un parti politique ; - détenir des actions ou des parts sociales à une société commerciale, si cela engendre un conflit d'intérêts |
la Banque Nationale de Roumanie (BNR) |
9 |
le Parlement |
5 ans ; avec possibilité de prorogation |
Les membres du Conseil d'administration de la BNR ne peuvent pas : - être députés ou sénateurs ; - être membres d'un parti politique ; - faire partie de l'autorité judiciaire ou de l'administration publique ; |
|
la Commission Nationale des Valeurs Mobilières (CNVM) |
7 |
le Parlement |
5 ans ; renouvelable une fois |
5 ans dans le domaine économique ou juridique |
Pour être compatible avec la fonction de membre de la CNVM, une personne ne doit pas : - être membre d'un parti politique ; - être déclarée en faillite ; - avoir des mentions dans son casier judiciaire ; - exercer une autre fonction rémunérée, publique ou privée, exceptées les fonctions : universitaire ; conseil ; expert auprès d'une autorité publique ou d'un organisme international ; - avoir des liens de mariage ou de parenté (jusqu'au 3 e degré) avec le Président de la Roumanie, les présidents des deux Chambres, les membres du Gouvernement, le gouverneur de la BNR ou le président de la CSA ; - être membre du conseil d'administration, directeur exécutif, censeur, auditeur ou actionnaire significatif d'une personne juridique d'un domaine supervisé par la CVVM, la CSA ou par la BNR ; |
la Commission de Surveillance des Assurances (CSA) |
5 |
le Parlement |
5 ans ; renouvelable |
5 ans dans l'activité financière-bancaire et/ou d'assurances et réassurances |
Les membres de la CSA ne peuvent pas : - être membres d'un parti politique ; - exercer une autre fonction rémunérée, publique ou privée sauf les fonctions dans l'enseignement supérieur ; - être membres du conseil d'administration, censeurs, ou actionnaires significatifs des personnes juridiques supervisées par la CSA ; - être déclarés en faillite ou avoir fait partie de la direction d'une société du domaine financier qui, sous n'importe quelle forme, a cessé son activité et n'a pas respecté ses obligations à l'égard des tiers ; - avoir des mentions dans leur casier judiciaire ; |
Commission de Surveillance du Système des Pensions Privées (CSSPP) |
5 |
le Parlement |
5 ans ; renouvelable une fois (à l'exception du mandat du président et du vice-président qui sont de 6 et 5 ans.) |
5 ans dans l'activité financière-bancaire, d'assurances, investissements, juridique, législative ou exécutive dans le domaine |
Les membres de la CSSPP ne peuvent pas : - être membres d'un parti politique durant la période de l'exercice de leur mandat ; - être membres, eux-mêmes ou leur famille, du conseil d'administration, ou actionnaires significatifs des sociétés commerciales qui ont un lien commercial et/ou juridique avec les personnes juridiques qui font l'objet de la surveillance de la Commission ; - avoir fait partie de la direction d'une société commerciale ayant cessé, sous n'importe quelle forme, son activité et n'ayant pas respecté ses obligations à l'égard des tiers, ou étant déclarée en faillite ; - avoir de mentions dans le casier judiciaire ou fiscal ; - avoir des condamnations pénales ; - avoir des liens de mariage ou de parenté (jusqu'au 3 e degré) avec le Président de la Roumanie, les présidents des deux Chambres, les membres du Gouvernement, le gouverneur de la BNR ou les présidents de la CSA ou de la CNVM ; |
L'Autorité nationale de Réglementation du Domaine de l'Énergie (ANRE) |
5 |
le Premier Ministre, sur proposition du ministre de ressort |
5 ans |
La qualité de membre du comité de réglementation est incompatible avec l'exercice de toute autre activité à caractère commercial, fonctions ou dignités publiques, sauf les fonctions didactiques dans l'enseignement supérieur ; |
|
Conseil de la Concurrence (CCR) |
7 |
le Président de la Roumanie, sur proposition du Gouvernement |
5 ans ; renouvelable une fois |
10 ans dans les domaines : économique, commercial, des prix et de la concurrence ou juridique |
Est incompatible avec la charge de membre du CCR : - toute autre activité professionnelle ou de conseil et toute autre fonction publique, sauf les fonctions didactiques dans l'enseignement supérieur ; - la participation à la direction ou à l'administration d'une entité publique ou privée ; - la qualité d'expert ou d'arbitre ; - la qualité de membre d'un parti politique ou autres formations politiques ; |
le Conseil National pour la Formation Professionnelle des Adultes (CNFPA) |
15 |
le Premier Ministre (5), syndicats (5), patronats (5) |
4 ans ; renouvelable |
||
l'Agence Roumaine pour la Qualité de l'Enseignement Supérieur (ARACIS) |
15 |
le Ministère de l'Éducation et de la Recherche |
3 ans |
Les membres du Conseil de l'ARACIS ne peuvent pas détenir en parallèle des dignités publiques, ni la fonction de recteur. Les candidats pour les 8 positions de membre du Conseil, postes occupés par concours, ne devront pas cumuler des positions didactiques dans l'enseignement supérieur. |
|
l'Autorité Électorale Permanente (AEP) |
dirigée par un président, assisté par deux vice-présidents |
le Parlement (le président), le Président de la Roumanie (1 vice-président), le Premier Ministre (1 vice-président) |
8 ans renouve-lable une fois |
le président doit être une personnalité, ayant une formation et une expérience dans le domaine juridique ou administratif |
Le président et les vice-présidents de l'AEP ne peuvent pas être membres d'un parti politique ; |
le Collège National d'Étude des Archives de la Securitate (CNSAS) |
11 |
le Parlement |
6 ans ; renouvelable une fois |
Ne peuvent pas être membres du collège du CNSAS : - les anciens agents et collaborateurs des organes roumains de la Securitate ou des services secrets étrangers, ou d'autres structures internes ou étrangères de renseignements, ainsi que d'autres organisations qui ont déployé ou qui déploient des activités contraires aux droits et aux libertés fondamentales de l'homme ; - les personnes ayant subi des condamnations pour des infractions de droit commun, même amnistiées ou réhabilitées ; - les personnes ayant été ou étant membre d'un parti politique ; |
|
Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel (ANS) |
dirigée par un président et un vice-président |
le Sénat |
5 ans ; renouvelable une fois |
10 ans dans le domaine juridique |
La qualité de président ou de vice-président est incompatible avec : - l'exercice de toute autre activité publique ou privée, sauf les fonctions didactiques ; - la qualité de membre d'un parti politique ou d'autres structures politiques (à l'intérieur du mandat) ; - la détention des actions ou parts sociales à une société commerciale du domaine de supervision de l'Autorité Nationale de Surveillance |
(Remarque : SIE, SRI, STS et SPP ont un statut à part)
Tableau 2 : Modalité d'approbation du règlement intérieur de chaque autorité autonome
L'autorité administrative autonome |
L'autorité chargée de l'approbation
|
le Conseil suprême de Défense du Territoire (CSAT) |
autodétermination |
le Conseil National de l'Audiovisuel (CNA) |
autodétermination |
la Banque Nationale de Roumanie (BNR) |
autodétermination |
la Commission Nationale des Valeurs Mobilières (CNVM) |
autodétermination |
la Commission de Surveillance des Assurances (CSA) |
autodétermination |
la Commission de Surveillance du Système des Pensions Privées (CSSPP) |
autodétermination |
le Conseil de la Concurrence (CCR) |
autodétermination |
L'Autorité nationale de Réglementation dans le Domaine de l'Énergie (ANRE) |
le Gouvernement |
le Conseil National pour la Formation Professionnelle des Adultes (CNFPA) |
le Gouvernement |
l'Agence Roumaine pour la Qualité de l'Enseignement Supérieur (ARACIS) |
le Gouvernement |
l'Autorité Électorale Permanente (AEP) |
le Gouvernement |
le Collège National d'Étude des Archives de la Securitate (CNSAS) |
le Parlement |
l'Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel |
le Sénat |
Tableau 3 : Fonds budgétaires octroyés à certaines AAA (en milliards ROL621 ( * ))
ANNÉE |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
CNA |
- |
25,5 |
30,2 |
61,3 |
72,5 |
69,2 |
Conseil de la Concurrence |
11,0 |
40,7 |
34,9 |
46,1 |
56,3 |
234 |
CNSAS |
45,0 |
68,3 |
74,5 |
83,1 |
87,5 |
88,6 |
AEP |
- |
- |
- |
- |
54 |
73,2 |
Sources : la Loi n° 76/ 2000 pour l'approbation du budget d'État pour l'année 2000 ;
la Loi n° 216/ 2001 pour l'approbation du budget d'État pour l'année 2001 ;
la Loi n° 743/ 2001 pour l'approbation du budget d'État pour l'année 2002 ;
la Loi n° 631/ 2002 pour l'approbation du budget d'État pour l'année 2003 ;
la Loi n° 507/ 2003 pour l'approbation du budget d'État pour l'année 2004 ;
la Loi n° 511/ 2004 pour l'approbation du budget d'État pour l'année 2005.
ROYAUME-UNI
par M. Guy SCOFFONI
professeur à
l'Université Paul Cézanne Aix-Marseille III
_______
Au Royaume-Uni, les organismes publics à caractère « indépendant » font parti du paysage politique depuis plus de deux siècles, comme par exemple le « Bureau du Commerce » (Board of Trade). Sous diverses appellations, sans définition officielle, de manière parfois improvisée par les pouvoirs publics britanniques, ces organismes se sont multipliés.
Dans la période contemporaine, on a même pu parler dans ce pays de « quango explosion » 622 ( * ) , ces « quangos » (« quasi autonomous non-governmental organisations»), constituant toutefois seulement une des désignations du phénomène.
En effet, la vague de réorganisation administrative baptisée « New Public Management » (NPM) a placé au rang de priorité les techniques de délégation, démembrement et contractualisation, entraînant le transfert de fonctions d'entités publiques traditionnelles, vers de nouvelles catégories d'organismes spécialisés « quasi autonomes ». Cette évolution implique dans le même temps, l'introduction de nouvelles techniques de management public et de procédure provenant du secteur privé 623 ( * ) .
Après avoir analysé le développement de ces « autorités administratives indépendantes » dans le cadre britannique (I), il convient d'en préciser les principales modalités d'organisation (II).
I - Le développement des organes administratifs indépendants (Non Departemental Public Bodies)
Le système britannique se caractérise par un large démembrement des structures administratives depuis deux siècles. Seront successivement présentées l'évolution des institutions administratives au niveau central et les difficultés d'identification des organismes de type « Autorités administratives indépendantes » au Royaume-Uni.
1. L'évolution des institutions administratives britanniques au niveau central
A. Dès les XVII ème et XVIII ème siècles, apparaissent en Grande-Bretagne certains organismes autonomes (« Quasi-Independent Boards ») pour assurer certaines tâches qui n'étaient pas perçues à l'époque comme de nature « gouvernementale ». Des préoccupations de légitimité et de responsabilité ont toutefois souvent conduit à leur absorption par des départements ministériels.
De même, certaines organisations caritatives ont pu assumer des missions d'intérêt général à la même époque et au XIX ème siècle, des organismes privés remplissaient déjà en Grande-Bretagne des fonctions « gouvernementales ».
Ces données historiques permettent de mieux situer le développement du phénomène des organismes indépendants dans ce pays.
Elles expliquent notamment la multiplication sensible, antérieurement aux autres expériences européennes, de ces organes « indépendants ou semi indépendants ».
B. Au Royaume-Uni le système politique majoritaire (« winner takes all ») favorise la libre création de tels organismes et les démembrements de l'administration.
Les gouvernements successifs vont au cours du XX ème siècle modeler à leur façon ce phénomène, modifiant le régime d'organismes « autonomes » existants ou en créant de nombreux n'entrant dans aucun cadre préconçu. D'autres disparaissent comme le « Physical Training and Recreation Council ».
Une grande diversité de structures et une pléthore d'organismes plus ou moins autonomes caractérisent donc l'Administration moderne au Royaume-Uni, au niveau central comme au niveau local.
Si dans une perspective comparative, il est nécessaire de se limiter au niveau central, les structures administratives britanniques se présentent pour l'essentiel de la manière suivante :
- Une vingtaine de départements ministériels ;
- Cent vingt Agences exécutives (« Next Steps agencies »), rattachées à un département ministériel, elles sont chargées de l'exécution des tâches d'Administration quotidienne ;
- Plusieurs centaines d'établissements du service national de santé (« National Health Service Trusts ») ;
- Plusieurs dizaines d'entreprises publiques (« Public Corporations ») ;
Mille deux cents (ou plus) organismes publics extérieurs à un département ministériel (« Non-departmental Public Bodies » N-DPB). Comprenant principalement :
• Trois cents NDPB
« exécutifs » (c'est-à-dire chargés
seulement de tâches d'exécution et non de réglementation ou
d'élaboration de politiques administratives).
• Sept cents organismes consultatifs.
• Soixante-quinze
« Tribunals » (Organes spécialisés à
compétence juridictionnelle, composé de juges non
professionnels).
• Plusieurs dizaines d'organes de
régulation ou de contrôle.
Un terme illustre en particulier la complexité et l'éparpillement du phénomène administratif britannique, celui de « Quangos » (Quasi Autonomous non-Governmental Organisations). Il recouvre en effet au Royaume-Uni un ensemble disparate de situations.
Aucune définition officielle n'a jamais pu être formulée. La qualification de « quango » varie d'un gouvernement à un autre et d'un auteur à un autre avec une forte connotation « politique » souvent, selon que l'on entend limiter ou non le champ de la sphère publique et amorcer une diminution du nombre d'organismes publics ou d'agents publics.
En février 1988, Madame Thatcher présenta le rapport rédigé par les membres du « Efficiency Unit », organe situé au sein du « Cabinet Office » et intitulé « Improvising Management in Government : The Next Steps » 624 ( * ) .
Il était recommandé dans ce cadre de confier toutes les tâches d'exécution au quotidien « Executive Functions » à des agences situées au sein des ministères, ceux-ci devant se concentrer ainsi sur les missions de politique administrative (« Policy functions »).
Cette nouvelle orientation gouvernementale a entraîné la création de nombreux organismes dotés d'une autonomie d'exécution variable.
Le statut de ces « Agences » reste incertain, notamment quant à leur responsabilité à l'égard du Parlement. Un consensus s'est toutefois dégagé pour maintenir les liens traditionnels de responsabilité politique par l'intermédiaire du ministère concerné face au Parlement.
Cette multiplication d'éléments « autonomes » d'Administration centrale, combinée aux effets des politiques de privatisation, a accentué toutefois l'éparpillement et la confusion nés du développement des quangos.
Même en écartant la problématique des quangos au niveau local, le phénomène demeure au niveau central extrêmement divers et confus.
Au Royaume-Uni aujourd'hui, le terme « quango » semble s'appliquer de manière hétéroclite à des entités publiques des plus diverses telles que :
• Des organes de régulation comme l'OFCOM
(Office of Gas and Electricity Markets)
• Des organismes de santé
dépendant du National Health Service (« Trusts »)
• Des entreprises publiques comme la BBC
(British Broadcasting Corporation)
• des associations d'intérêt public
comme les « Housing Associations » ou les
« Fundholding Doctors »
• des organes consultatifs comme les
« Training and Enterprise Councils », « Sports
Councils », « Research Councils » ou encore le
« Committee on Standards in Public Life ».
Selon certains auteurs, cette liste est sans fin 625 ( * ) et on voit même parfois classées parmi les quangos, des écoles subventionnées, des associations caritatives voire certaines autorités de police. On est presque amené à considérer de surcroît que toute entité qui apparaîtrait ni entièrement publique, ni entièrement privée pourrait être qualifiée de « quango ». Ainsi de tels organes « quasi-autonomes » se sont multipliés, dans la période contemporaine, dans les secteurs de la santé ou de l'éducation.
Il apparaît en définitive clairement que l'ensemble de ces quangos ne sauraient être assimilés, dans une perspective comparative à des autorités ou agences administratives indépendantes.
Les critères d'identification dégagés à partir des expériences américaine ou européennes continentales permettent de resserrer le champ de tels organes au Royaume-Uni.
2. Les éléments d'identification des organismes administratifs indépendants au Royaume-Uni
S'il n'existe aucun recensement officiel d'organismes équivalents aux « Independent Regulatory Agencies » américaines ou aux « Autorités Administratives Indépendantes » françaises, il est possible de retrouver dans le cadre britannique des organismes plus ou moins équivalents.
A. Deux critères principaux qualifient en droit comparé un organe réglementaire indépendant : un élément organique résultant de l'indépendance garantie par sa composition ou son contrôle et un élément matériel lié à une mission suffisante de régulation.
Sur cette base, peuvent être identifiés un certain nombre d'organismes, sans attacher d'importance déterminante à leur qualification particulière, qu'il s'agisse notamment de « quangos » ou de « Non Departmental Public Bodies » (NDPB). Certains quangos ou certains NDPB peuvent répondre aux exigences de qualification d'organes réglementaires indépendants mais, en aucun cas, l'ensemble d'une catégorie.
Cela ne doit pas surprendre du fait, on l'a souligné, de l'important démembrement de l'Administration centrale britannique conduisant selon certaines études à recenser plus de cinq mille organismes extra gouvernementaux.
L'usage croissant de « Non Departmental Public Bodies » dans le cadre des réformes du « New Public Management » a multiplié en effet, le nombre de ceux restant directement liés à un ministère de tutelle, empêchant d'utiliser cette expression « NDPB » pour qualifier des autorités administratives indépendantes au Royaume-Uni.
Par référence au modèle américain et pour favoriser la comparaison avec des expériences européennes continentales, on retiendra ainsi la qualification d'« Agences Réglementaires Indépendantes » (Independent Regulatory Agencies) suivant en cela certaines études comparatives britanniques 626 ( * ) .
B. Le champ des « Agences Réglementaires indépendantes »
Dans le cadre des organes dotés d'un pouvoir de régulation disposant d'une indépendance fonctionnelle, on peut dégager deux grandes catégories de situations.
Le premier groupe est constitué par les Agences chargées de la régulation des marchés.
Le deuxième groupe réunit l'ensemble des organes indépendants chargés de promouvoir des objectifs plus généraux d'intérêt public.
a) Les « Agences » régulatrices de marchés
Elles apparaissent très caractéristiques de l'évolution du dernier quart de siècle, résultant plus particulièrement du mouvement de privatisation. Pour chaque type d'industries privatisées alors, a été institué un organe de régulation, le législateur britannique cherchant ainsi à maintenir un minimum d'encadrement public et à protéger les intérêts des consommateurs.
Entrent dans cette catégorie :
- Un organe à compétence générale : la « Competition Commission » créée sous une autre forme en 1948 et réaménagée ainsi en 1998. Il s'agit d'une sorte d'équivalent britannique du Conseil de la Concurrence en France ;
- Secteur des Télécommunications : « Office of Telecommunications » (OFTEC) de 1984 ;
- Secteur de l'Energie : « Office of Gas and Electricity Markets » (OFGEM) de 1989, réaménagé en 2000 ;
- Secteur de l'Eau : « Office of Water Services » (OFWAT) de 1989 ;
- Secteur des Transports : « Office of Rail regulator » de 1993 et « Strategic Rail Authority » de 1999 ;
- Secteur des Médias : « Independent Television Commission » de 1990. Cet organe, institué sous une première forme dès 1954, peut être rapproché du Conseil supérieur français de l'audiovisuel ;
- Secteur des Marchés Financiers : « Financial Services Authority » instituée en 1986 et réaménagée en 1997.
Outre le fait qu'ils ont été institués par des lois spéciales, notamment liées à la privatisation d'un secteur, ces organes ont en commun de veiller au respect d'une libre concurrence, à l'application de dispositifs divers d'autorisations, permis ou licences en étant chargés parfois du contrôle des prix ou tarifs. Même si leur statut est défini en général par la loi, ils disposent le plus souvent d'une large capacité d'auto organisation, leurs interventions étant légitimées par les exigences de protection du consommateur 627 ( * ) .
La solution d'un organe de régulation séparé, par secteur d'activité, a ainsi été préférée à celle qui consistait à confier l'ensemble des tâches à un organe généraliste, comme l'« Office of Fair Trading » (OFT) ou la « Monopolies and Mergers Commission » (MMC). Ces deux organes de régulation générale, qui fonctionnaient antérieurement à la privatisation, coexistent donc avec les « Agences » spécialisées.
Un des paradoxes de ces réformes menées par des gouvernements conservateurs au nom d'une réduction de la sphère publique, aura été en définitive de mettre en place le plus important dispositif de régulation depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale 628 ( * ) .
b) Les « Agences » dotées de missions d'intérêt général
Ce second groupe d'organes « indépendants » apparaît plus hétérogène dans la mesure où sont prises en charges des missions d'intérêt général dépassant le seul cadre économique.
On relèvera pour illustration de cette catégorie, les organes intervenants en particulier dans les matières suivantes :
- Domaine de l'Environnement : « Environment Agency » de 1986 ;
- Domaine de la sécurité alimentaire : « Food Standards Agency » de 1999 ;
- Protection de la vie privée : « Data Protection Registrar, instituée sous une première forme en 1984 et réaménagée en 2000 (sorte d'équivalent britannique de la Commission nationale de l'informatique et des libertés en France) ;
- Protection de l'égalité et lutte contre la discrimination : « Commission for Racial Equality » et « Equal Opportunities Commission ».
Dans l'ensemble, ces organismes dont les fonctions ont été généralement renforcées dans la décennie 1990-2000, bénéficient en vertu de lois spéciales, de délégations de pouvoir leur permettant de définir certaines règles ou standards, de délivrer des autorisations ou licences ou de réguler la circulation de certaines données ou informations.
II - Les modalités d'organisation et de contrôle des « agences réglementaires indépendantes »
La création et la définition des fonctions des Agences réglementaires indépendantes constituent une illustration classique de délégation de pouvoir à des institutions non démocratiquement représentatives.
C'est en ces termes que la doctrine britannique pose le problème de l'intervention de ces organes dans le système administratif : Ils sont créés par la loi, distincts des départements exécutifs et dirigés par des agents non élus.
Des pouvoirs de régulation sous diverses formes leur sont accordés mais en même temps ils se trouvent soumis au contrôle de représentants élus ou de juges629 ( * ).
Il convient de reprendre successivement les modalités d'organisation de ces « Agences » et les conditions du contrôle exercé sur elles.
1. Les modalités d'organisation des « Agences réglementaires indépendantes »
Trois points seront analysés. Après une présentation de leur composition et des fonctions qui leur sont dévolues, sera abordée la question de leurs pouvoirs et modes d'intervention.
A. La composition des organes « indépendants »
Elle est définie de manière particulière par la loi instituant l'« Agence ». quelques traits communs néanmoins peuvent être dégagés :
La compétence de nomination des dirigeants de l'« Agence » est généralement accordée par la loi au ministre, sans exigence de confirmation parlementaire.
Dans les années 1980-1990, la majorité des organes indépendants étaient dirigés par un responsable unique. D'autres faisaient toutefois l'objet d'une direction collégiale, comme la « General Competition Authority », la « Commission for Racial equality ou l'« Equal Opportunities Commission ». Elles sont ainsi dirigées par un « Bureau » avec à sa tête un directeur (« Chairpersonn »). L'évolution désormais tend de plus en plus vers la désignation de commissions pluralistes ou autres formules collégiales de direction. Ainsi le « Utilities Act » de 2000 organise une Commission de l'Energie (Board of Energy), dirigé par un organe collégial.
Le système politique majoritaire strict a longtemps favorisé la désignation au Royaume-Uni d'organes dirigeants uniques alors que le multipartisme rendait plus souvent nécessaire dans les États européens continentaux la formation d'organes collégiaux pour mieux refléter les équilibres du système et offrir des garanties d'indépendance.
Le Royaume-Uni semble donc se rapprocher désormais sur ce point de ses voisins continentaux.
En ce qui concerne enfin la sélection et l'origine des membres dirigeants (« Regulators »), un certain contraste apparaît dans la mesure où au Royaume-Uni, il s'agit le plus souvent d'experts non partisans ou personnalités indépendantes. (À l'inverse, dans les pays européens continentaux, la tradition dominante est plutôt celle de nomination de personnalités politiques, anciens ministres ou parlementaires, facilement identifiables généralement à un parti politique donné).
Des professeurs d'Université ont ainsi été nommés à la tête d'Agence de régulation de certains services publics : Par exemple le Professeur Steven Littlechild (OFFER) ou le Professeur Sir Bryan Carsberg (OFTEC).
B. Les fonctions exercées
Elles apparaissent au Royaume-Uni de plusieurs types :
1°) Selon la doctrine britannique, la fonction principale des organes indépendants de régulation est une fonction de légitimation stratégique. En matière de régulation économique, les difficultés d'une intervention directe des élus sont multiples : prendre des engagements qui soient crédibles pour les autres acteurs, faire des choix stratégiques impopulaires ou répondre aux demandes d'organisations supranationales.
Les délégations à des « Agences indépendantes » permettent ainsi de répondre à ces différentes pressions et d'assister efficacement les niveaux politiques. Cette fonction légitimante, de renforcement de la crédibilité de la régulation, serait particulièrement importante tant pour les investisseurs potentiels que pour les électeurs, consommateurs ou groupes d'intérêt public 630 ( * ) .
En matière de régulation sociale, les Agences indépendantes peuvent également contribuer à légitimer des interventions politiquement controversées. Ainsi la promotion de l'égalité raciale ou hommes-femmes qui suscitait l'hostilité dans une part importante de l'électorat, fut-elle confiée à des organes indépendants, la « Commission for Racial Equality » et la « Equal Opportunities Commission ». Cela a permis aux gouvernements britanniques de s'engager dans les choix sociaux ou d'éthique politique, tout en déléguant les difficiles missions d'exécution.
Plus largement, l'intervention de tels organes peut éviter aux niveaux politiques d'assumer l'impopularité des certaines situations : Ainsi après les privatisations, les Agences indépendantes de régulation ont-elles dû assumer l'impact des augmentations de tarifs de certains « services publics économiques ».
2°) L'intervention d'Agences indépendantes est ensuite justifiée par les nécessités de prise en charge de domaines complexes de régulation et la prise de décisions de plus en plus techniques.
Ainsi à partir de la décennie 1980-1990, la libéralisation des marchés a multiplié les exigences de régulation dans des conditions très « sophistiquées » d'intervention.
Dans le cas des services publics (eau, énergie, communications, transports...), les « régulateurs » ont dû s'emparer de questions telles que la prévention d'abus de positions dominantes, les coûts de l'interconnexion de réseaux, la définition de régimes de fixation de tarifs ou de standards de contrôle.
L'ensemble de ces décisions nécessitaient des niveaux élevés d'expertise scientifique. La crise de la « vache folle » a ainsi exigé des appréciations techniques particulièrement délicates de la part d'Agences de sécurité alimentaire (« Food Standards Agency ») ou d'environnement (« Environment Agency ») et de multiples arbitrages entre groupes d'intérêt des plus divers.
La complexité des interventions dans cet ensemble de secteurs a légitimé la délégation à des Agences indépendantes, dotées de la compétence et de l'expertise nécessaires, de pouvoir de régulation que les représentants élus, organes gouvernementaux ou leurs agents publics « généralistes », ne pouvaient plus assumer efficacement.
De ce point de vue, la doctrine britannique reconnaît l'influence du modèle américain sur le développement d'Agences indépendantes au Royaume-Uni, depuis quelques décennies.
La création de l'Office des Télécommunications (OFTEC) a été par exemple, directement inspirée par l'expérience américaine de la « Federal Communications Commission » 631 ( * ) .
Au total, les fonctions complexes de régulation exercées et la compétence de ces « Agences » indépendantes, leur ont permis de développer leur rôle et d'accroître leur place dans le système britannique.
Forts de leur capacité d'acquérir et traiter l'information ou d'entretenir des rapports réguliers avec l'ensemble des parties intéressées, ces organes indépendants ont pu régulièrement accroître l'impact de leurs pouvoirs d'intervention formels.
C. Les pouvoirs conférés
Ces pouvoirs varient selon les organes concernés, les `Agences indépendantes de régulation des secteurs de « services publics économiques » apparaissant dotés de pouvoirs plus importants que ceux des « Agences d'intérêt général ».
Les régulateurs de marchés ou activités économiques (« Utility Regulators ») disposent en particulier d'une gamme variée de compétences :
• Pouvoir de réglementation et de
décision unilatérale dans l'application des règles de
concurrence ou de fixation des tarifs par exemple.
• Pouvoir de sanction permettant notamment la
régulation des restructurations d'opérateurs économiques
ou le blocage d'opérations de fusion ou de participations
financières contraires à l'intérêt public.
Si les « Agences d'intérêt général » peuvent disposer de certaines de ces compétences, le législateur leur confère une moindre portée souvent. Ainsi la « Commission for Racial Equality » ou l'« Equal Opportunities Commission » disposent de certains pouvoirs d'exécution de la réglementation anti-discrimination mais ne peuvent agir directement dans la gestion de situations individuelles. Elles ne peuvent, le plus souvent, qu'assister la personne concernée qui souhaite intenter une action en justice.
En revanche tous les organes indépendants de régulation peuvent être aujourd'hui considérés comme possédant des pouvoirs d'orientation de politique administrative (« Policy Powers »).
Par leur expertise, elles pèsent sur les choix stratégiques ; par les nouvelles procédures qu'elles introduisent (audiences publiques - « Public hearing », enquêtes, communications de documents), elles modifient le processus de décision.
Elles permettent surtout à de nouveaux acteurs d'entrer dans l'espace de régulation (« Regulatory Space ») : Concurrents économiques, sociétés étrangères, groupements d'usagers.
Elles contribuent ainsi, en particulier, à un mouvement croissant de « judiciarisation » de la vie publique, un peu à l'instar des États-Unis, en multipliant l'intervention de règles ou de procédures formelles là où dominaient auparavant des procédures informelles.
La meilleure illustration de ce phénomène se trouve sans doute dans la nouvelle régulation des marchés financiers, incluant celui de la « City » à Londres.
2. Les modalités du contrôle exercé
Deux formes de contrôle exercé soit indirectement sur les membres des Agences indépendantes ou leur budget, soit directement sur leurs actes peuvent être combinés.
A. Les éléments de contrôle indirect
En ce qui concerne le contrôle sur les personnes, il peut résulter du pouvoir de nomination des membres dirigeants des Agences indépendantes qui appartient au gouvernement. L'expérience britannique montre toutefois que les personnes nommées ne sont pas dans une très large majorité rattachées à un parti (une étude a montré qu'entre 1990 et 2001, un seul membre d'Agence avait eu, avant sa nomination, une activité politique 632 ( * ) ) et que ce pouvoir de nomination n'est donc pas en général utilisé comme une arme de contrôle politique.
Il en va de même le plus souvent du pouvoir de renouvellement des fonctions dans la mesure où, au Royaume-Uni, les membres d'Agences indépendantes sont nommés pour des périodes relativement limitées.
Les études statistiques révèlent par ailleurs que durant la période 1990-2001, cinq personnes seulement sur trente-trois membres dirigeants d'Agences ont quitté leur fonction avant leur terme.
Relativement au domaine budgétaire, le gouvernement détient pour l'essentiel la clé des allocations de crédit aux Agences indépendantes et pourrait chercher à utiliser ces pouvoirs budgétaires pour contrôler ou influencer l'organisme. Ces crédits qui proviennent généralement des finances de l'État font l'objet d'une inscription annuelle mais l'expérience britannique montre là encore que les pouvoirs publics ne semblent pas utiliser une telle arme à des fins de contrôle politique ou pour réduire l'indépendance présumée de l'Agence.
Ces budgets, comme le nombre des personnels des Agences, demeurent d'ailleurs relativement modestes. (Cf. Annexe 2, p. 360)
B. Les éléments de contrôle direct
Il peut d'abord s'agir d'un contrôle interne. Ainsi, dans certains cas, le ministre peut accepter ou rejeter les « recommandations » des directeurs des agences indépendantes. Le gouvernement pourrait ainsi demander au Parlement de modifier le statut d'un organisme dans un but de contrôle ou de pressions diverses.
De manière générale, ces types d'intervention apparaissent exceptionnels dans le cadre britannique. Le faible usage des possibilités de contrôle ex-post souligne donc encore l'autonomie des Agences indépendantes. Leurs décisions restent toutefois soumises au contrôle de légalité mis en oeuvre par les juridictions britanniques.
Le Royaume-Uni apparaît, ainsi aujourd'hui comme une bonne illustration de la place conquise par ces « Agences indépendantes » dans un système européen. Ayant su imposer leur indépendance face au pouvoir politique, elles ont conforté leurs compétences de régulation en montrant aux décideurs élus, les avantages stratégiques (assumer certaines décisions impopulaires, par exemple) que ceux-ci pourraient retirer de leur intervention « autonome ».
* 570 La Constitution de la Roumanie, approuvée par référendum national le 8 décembre 1991, a été modifiée et complétée par la Loi de révision n o 429/2003, approuvée par le référendum national du 18-19 octobre 2003 ; la constitution actuelle est entrée en vigueur le 29 octobre 2003 (publiée dans le Monitorul Oficial, le journal officiel de Roumanie, I ère Partie, n o 758 du 29 octobre 2003). La Constitution de la Roumanie a été republiée par le Conseil Législatif en accord avec les stipulations de l'article 152 de la Constitution, avec dénominations et numérotation réactualisées (l'article 152 devenant, dans la forme republiée, article 156).
* 571 Mihai Constatinescu, Ioan Muraru, Antonie Iorgovan, Revizuirea Constituþiei României - Explicaþii °i comentarii (Sur la Révision de la Constitution. Explications et commentaires), Editions Rosetti, Bucarest, 2003, p. 122. Dans le même sens : N. Cochinescu, « Natura juridicã a Curþii de Conturi » (La nature juridique de la Cour des Comptes), in : Revista Dreptul, n o 6, 1995, p. 48-55 ; Dana Apostol Tofan, Drept Administrativ (Droit administratif), tome I er , Editions All Beck, Bucarest, 2003, p. 19-20.
* 572 L'Avocat du Peuple, à la différence du Médiateur de la République, son homologue français, ne pourrait pas être rattaché à l'administration à raison de sa nomination , qui ne relève pas de l'exécutif, mais du Parlement.
* 573 En application de l'article 115 de la Constitution, le Gouvernement peut se substituer au Parlement et légiférer par voie d'ordonnance d'urgence. Depuis 1996, le Gouvernement a fait une application particulièrement étendue, sinon abusive, de ce mécanisme, qui a obscurci la transparence du processus législatif et contribué à instaurer une situation d'instabilité législative. En réponse aux nombreuses critiques que ce sujet suscite, la révision constitutionnelle d'octobre 2003 a redéfini les conditions dans lesquelles le recours à des OUG est possible : les anciennes dispositions prévoyaient qu'il était possible de donner une ordonnance d'urgence dans des « conditions exceptionnelles », tandis qu'en vertu de la Constitution révisée, il est possible d'y recourir dans des « circonstances extraordinaires dont la réglementation ne peut être ajournée». Mais, en l'absence de définition claire de ce que recouvre la notion de « circonstances extraordinaires », il se pourrait que cette révision constitutionnelle n'ait que peu d'effet dans la pratique (rapport CE/2004) . Pour ce qui est du sujet qui nous intéresse, il faut observer que l'exécutif n'a pas hésité à adopter des ordonnances d'urgence intervenant dans le domaine des AAA, que ce soit avant la loi de révision de la Constitution (ex. : l'OUG no 25/2002 sur l'adoption des Statuts de la CNVM), ou après (ex. : l'OUG du 10 juin 2005, instituant la Commission de Surveillance du Système des Pensions Privées, ainsi que la récente OUG n o 75/2005 de 12 juillet 2005, portant sur la création de l'Agence Roumaine pour la Qualité de l'Enseignement Supérieur).
* 574 La Loi de l'audiovisuel n° 48/1992, remplacée par la Loi n° 504/2002 (destinée notamment à transposer la Directive européenne « télévision sans frontières ») et modifiée par la Loi n° 402/2003.
* 575 Par ailleurs, il convient de mentionner que le CNA exerce effectivement ce pouvoir de sanction dont il a été investi : il met en jeu ses grands moyens d'intervention, non seulement par des prises de position et des débats assez vifs dans l'espace public, mais aussi en agissant parfois de manière spectaculaire ; par exemple, en 2004, il a infligé une amende de 500 millions lei à une chaîne privée de télévision pour l'émission roumaine de type Big Brother à cause du caractère de cette série télévisée potentiellement nuisible à l'éducation « mentale et morale des mineurs » (alinéa premier, article 39 de la Loi de l'audiovisuel n° 504/ 2002) ; de même, en 2002, l'autorisation d'une chaîne de télévision privée, ayant une couverture nationale, a été retirée pour avoir permis à son invité, lors d'une émission en direct, de tenir un discours considéré comme étant incitant à la haine raciale.
* 576 La proposition de réunir, au sein d'un même organisme de surveillance, les fonctions de contrôle de la BNR, de la CNVM et de la CSA, à l'instar de l'AMF française, a été débattue au début de cette année, mais elle a été repoussée. Les trois institutions de contrôle fonctionnent actuellement sur la base d'un protocole de collaboration, signé le 3 avril 2002.
* 577 L'autorisation des banques et leur réglementation sont réalisées par un département spécialisé de la BNR : la Direction de Réglementation et d'Autorisation (composée de 62 personnes) ; la surveillance bancaire est exercée par la Direction de Surveillance (composée de 107 personnes).
* 578 Les principales réglementations applicables sont : la Loi sur le Statut de la BNR n° 312/2004 qui vise à harmoniser le statut de la banque centrale avec l'acquis communautaire et la Loi bancaire n o 58/1998 qui prévoit les attributions de la BNR dans le domaine de la surveillance bancaire.
* 579 Dans une situation semblable se trouve la Banque d'Espagne, qui est à la fois Banque Centrale et agence de supervision bancaire (Dr. Andrès Betancor Rodriguez, « L'expérience espagnole en matière d'administrations indépendantes », publiée dans le Rapport public de 2001 du Conseil d'État sur les autorités administratives indépendantes).
* 580 Leurs lois constitutives sont : la Loi n° 52/1994 portant sur les valeurs mobilières et les bourses des valeurs et, respectivement, la Loi n° 32/2000 sur les sociétés d'assurances et la surveillance des assurances (modifiée par la Loi n° 403/2004). Dans un contexte de crise sur les marchés de capitaux roumains (crise concrétisée surtout par la chute de quelques fonds d'investissements dans les années 1990), le statut de la CNVM adopté en vertu de la Loi 52/1994 a été abrogé par l'OUG n° 25/2002 portant adoption du nouveau statut de la CNVM.
* 581 La Bourse de valeurs de Bucarest a été le premier marché réglementé, constitué en Roumanie en 1995. Un marché secondaire privé, RASDAQ (un marché hors côte, selon le modèle américain NASDAQ) s'est ouvert en septembre 1996, permettant de négocier les actions provenant du programme de privatisation de masse.
* 582 Le nouveau statut de la CNVM adopté en 2002 élargit les missions qui lui sont imparties, mentionnant aussi : la promotion du fonctionnement correct et transparent des marchés réglementés, la prévention de la manipulation du marché, l'adoption des mesures nécessaires pour éviter l'apparition du risque systémique sur les marchés réglementés et la prévention des situations où l'égalité d'information et de traitement des investisseurs serait mise en question.
* 583 Conformément à l'article 41 de la Loi n o 312/ 2004 : « Le budget annuel des revenus et des dépenses est approuvé par le Conseil d'Administration de la Banque Nationale de Roumanie et son exécution est vérifiée selon les pratiques et les procédures de contrôle et d'audit interne ». La même loi prévoit que « Le Gouverneur présente au Parlement le rapport annuel de la BNR, qui comprend les activités de la BNR, les situations financières annuelles et le rapport d'audit, débattues, sans les faire soumettre au vote, en séance plénière de deux Chambres ».
* 584 La création d'une autorité indépendante, chargée de réglementer et de surveiller les fonds des pensions privées, a été prévue par le législateur fin 2004, quand une réforme d'envergure du système des pensions a été initiée, par l'adoption des deux lois portant sur les fonds des pensions privées obligatoires et les fonds privés facultatifs (« le deuxième » et « le troisième pilier »). Conformément à ces lois, la mise en place effective de la nouvelle autorité de régulation aurait dû avoir lieu le 1 er janvier 2007, date butoir choisie par le législateur pour confier la régulation du système des pensions à un département spécialisé dont l'activité se déroule au cadre de la CSA. Mais, comme les réformes en Roumanie vont à un train moins rapide que l'on ne l'ait voulu, l'exécutif actuel a décidé de devancer certaines mesures. Aussi, pour ne pas attendre 2007, le 10 juin 2005, il a adopté une ordonnance d'urgence pour la création et l'organisation de la Commission de Surveillance du Système des Pensions Privées (publiée au M.O n° 509/15 juin 2005).
* 585 L'ANRE a été créée par l'OUG n° 29/1998 concernant la constitution, l'organisation et le fonctionnement de l'Autorité Nationale de Réglementation du domaine de l'Énergie, abrogée par la loi de l'énergie électrique n° 318/2003 visant à harmoniser la législation roumaine aux règles communautaires en la matière.
* 586 La Loi de la concurrence n o 21/1996 a été modifiée par la Loi n o 538/2004 et par l'OUG n o 121/2003 (qui fait transférer la plus grande partie des attributions de l'Office de la Concurrence au Conseil de la Concurrence ; approuvée avec des modifications par la loi n o 184/2004).
* 587 Conformément au rapport CE/2004, par suite à cette réorganisation, 350 postes ont été accordés au Conseil de la Concurrence, représenté désormais dans les 41 départements du pays, ainsi que dans la ville de Bucarest.
* 588 Le cadre légal apportant réglementation aux aides octroyées par l'État est la Loi no 143/1999 relative aux aides d'État, modifiée par la Loi no 603/2003 et par l'OUG no 94/2004, les dernières modifications ayant pour but l'harmonisation continue avec la législation communautaire européenne.
* 589 Après le rapport annuel de 2003, qui reflète les progrès enregistrés par la Roumanie dans le domaine de la politique de la concurrence, dans la perspective de l'intégration du pays dans les structures européennes, le Conseil a présenté deux rapports annuels sur les aides d'État, en septembre 2004 et mai 2005.
* 590 Les inquiétudes exprimées par la Commission européenne dans son rapport régulier issu en octobre 2004 ont conduit à prévoir des mécanismes spécifiques relativement au contrôle des aides d'État et à prévoir des mesures spéciales de sauvegarde dans le Traité d'adhésion. Le chapitre de la Concurrence a été un des deux derniers chapitres des négociations en vue de l'adhésion (l'autre étant le chapitre de la Justice et Affaires Internes), clôturés provisoirement en décembre 2004, sous réserve d'une clause de sauvegarde spéciale. Cette clause prévoit que le Conseil pourra décider, sur la proposition de la Commission, de reporter l'adhésion de la Roumanie d'une année, à janvier 2008, en cas de manquement dans des secteurs spécifiques liés à la concurrence, en particulier en matière d'aides d'État, et à la JAI. La clause de sauvegarde spéciale requiert seulement la majorité qualifiée des voix pour être activée, étant donc plus forte que la clause de sauvegarde générale qui prévoit que la décision sur le report éventuel de l'adhésion doit être prise à l'unanimité. En octobre 2005, la Commission présentera son rapport de monitoring montrant si les progrès enregistrés par la Roumanie sont jugés suffisants. Ce rapport fait partie de la documentation sur la base de laquelle la Commission prendra la décision de recommander ou non le report de l'adhésion.
* 591 La loi no 132/1999 pour la création, l'organisation et le fonctionnement du Conseil National pour la Formation Professionnelle des Adultes ; modifiée par la loi no 53/2003 (qui a réalisé la fusion CNFPA - COSA) et republiée au M.O. no 68 du 27 janvier 2004. Le 7 décembre 2004, la loi 132/1999 a été modifiée et complétée par la loi n° 599/2004, attribuant au CNFPA le rôle d'Autorité Nationale pour les Qualifications.
* 592 L'ordonnance d'urgence du Gouvernement n o 75/2005, visant à garantir la qualité de l'éducation ; publiée, au M.O. 642 de 20 juillet 2005.
* 593 L'article 20 précise que « l'ARACIS reprend le patrimoine, tous les droits et obligations, l'infrastructure logistique, le personnel technique et la base de données du Conseil national pour l'évaluation académique et l'accréditation (CNEEA). Les fonctions du CNEEA sont transférées au Département d'accréditation dans le cadre de l'ARACIS ».
* 594 L'évaluation externe des établissements d'enseignement supérieur peut être effectuée aussi par des agences internationales. « Conformément au principe de la subsidiarité, les institutions roumaines d'enseignement supérieur accréditées [n.s] ont le droit de solliciter l'évaluation externe de la qualité soit par l'ARACIS, soit par une agence inscrite au registre européen des agences d'assurance de la qualité dans l'enseignement supérieur, agrée par l'ARACIS » (l'art. 23 de l'OUG n o 75/2005). Ainsi, les universités roumaines auront la possibilité de s'adresser à une agence européenne, le résultat de l'évaluation étant reconnu sur le plan interne par l'ARACIS. Mais il faut remarquer que seules les institutions qui ont été déjà accréditées par l'ARACIS peuvent faire appel aux autres agences en vue de l'évaluation.
* 595 Prof. dr. Tudor DRGANU, « Tendinþa de limitare a rolului în stat a Guvernului prin multiplicarea exageratã a autoritãþilor centrale autonome ale administraþiei publice, II » (La tendance à limiter le rôle du Gouvernement au niveau de l'État par la multiplication exagérée des autorités centrales autonomes de l'administration publique, II), in : Revista de Drept Comercial (Revue de Droit Commercial), n° XI/2001, p. 29.
* 596 L'AEP a été créée en juillet 2003, par la Loi n o 286, modifiant et complétant la Loi n o 68/1992 pour l'élection de la Chambre des Députés et du Sénat ; en septembre 2004 (deux moins avant les dernières élections qui ont eu lieu en Roumanie), la Loi électorale a été ré-adoptée, devenant la Loi n o 373 / 2004 pour l'élection de la Chambre des Députés et du Sénat.
* 597 L'AEP peut infliger des amendes contraventionnelles pour certains manquements à la loi électorale, comme par exemple : l'inscription multiple sur plusieurs listes électorales, la continuation de la propagande électorale après la fin de la campagne électorale, ainsi que pour les conseils indiquant de voter ou non avec un parti, une alliance politique ou un candidat indépendant, conseils qui seraient donnés aux électeurs le jour même des élections, dans les locaux des circonscriptions de vote ou dans le périmètre prévu par la loi autour de ces locaux, etc. (articles 97, 98, 99 de Loi n o 373 / 2004).
* 598 Au sens de la loi, la période électorale est « l'intervalle de temps qui commence à partir de l'annonce faisant publique la date des élections et finit avec la publication des résultats des élections ».
* 599 Tous les membres de l'AEP ont été nommés par le parti du Pouvoir en place au moment de sa constitution.
* 600 Les auteurs d'une étude récente consacrée à cette institution [« Consiliul Suprem de Apãrare a Þãrii - principalul instrument de decizie in politica de securitate a României `Le Conseil suprême de Défense du Territoire - le principal instrument de décision dans la politique de sécurité de la Roumanie', étude parue en 2005 sous l'égide de l'Institut pour les Politiques Publiques] considèrent pourtant que « la définition du CSAT en tant que autorité administrative autonome a aussi des sources constitutionnelles ». Les auteurs de cette étude se basent sur le fait que le texte relatif au CSAT est inscrit dans la section I de la loi fondamentale, intitulée « l'Administration publique centrale spécialisée » du chapitre V intitulé « l'Administration publique ». « La nature précise d'AAA résulte de la corroboration avec l'art. 116 de la Constitution, qui prévoit que des organismes de spécialité de l'administration publique centrale peuvent être organisés soit dans la subordination du Gouvernement ou des ministères, soit en tant qu'autorités administratives autonomes. Quoi qu'il en soit, de l'économie des textes constitutionnels et organiques, il est clair que l'intention du législateur est de placer le CSAT dans une position d'autonomie par rapport au Gouvernement », conclut cette étude.
* 601 Le Parlement a, par exemple, exercé ce droit de contrôle sur le ministre des Affaires étrangères, membre de droit du CSAT, lui demandant des explications concernant le problème de la participation de la Roumanie avec les pays alliés aux opérations militaires à caractère préventif, problème qui a été discuté dans la séance du CSAT de 28 février 2005 (l'Institut pour les Politiques Publiques - Consiliul Suprem de Apãrare a Þãrii - principalul instrument de decizie in politica de securitate a României).
* 602 Les lois constitutives de ces organismes sont : la Loi n° 14/1992 concernant l'organisation et le fonctionnement du Service Roumain des Renseignements, la Loi n°92/1996 concernant l'organisation et le fonctionnement du Service de Télécommunications Spéciales, la Loi n° 1/1998 concernant l'organisation et le fonctionnement du Service de Renseignements Extérieurs, la Loi n° 191/1998 concernant l'organisation et le fonctionnement du Service de Garde et Protection (modifiée et complétée par l'OUG n° 103/2002, approuvée avec des amendements par la Loi n° 67/2003) et la Loi n° 415/2002 concernant l'organisation et le fonctionnement du Conseil suprême de Défense du Territoire.
* 603 À l'art. 62 (g), la Constitution prévoyait, avant sa révision de 2003, que les chambres se réunissaient en séance commune « pour nommer, sur proposition du président de la Roumanie, le directeur du Service Roumain de Renseignements et exercer le contrôle sur l'activité de ce service ».
* 604 Conformément à l'article premier de la loi 187, « tout citoyen roumain ou étranger qui a eu la citoyenneté roumaine après 1945 a le droit d'accès à son propre dossier élaboré par les organes de la Securitate, en tant que police politique. Ce droit est exercé sur demande et se réalise par la lecture directe du dossier et la délivrance des copies d'après les documents du dossier et les écrits justifiants compris dans le dossier. La personne respective, sujet du dossier d'où il résulte sa poursuite par les organes de la Securitate de l'État, a également le droit d'apprendre, sur demande, l'identité des agents de la Securitate et des collaborateurs ayant contribué avec leurs renseignements à l'élaboration du dossier respectif ». Conformément à l'art. 13 de la même loi, les pétitionnaires peuvent aussi demander au CNSAS de leur délivrer des attestations relativement à leur collaboration ou non collaboration avec la Securitate, d'après le cas.
* 605 En vue de la vérification des candidats aux élections, le CNSAS reçoit les listes des candidats du Bureau Central Électoral (BEC) ou local, dans un délai de 24 heures à partir de la date ou les candidatures ont été déposées. CNSAS informe la personne visée par la demande de vérification. La loi prévoit aussi que les vérifications cessent si la personne soumise à l'investigation renonce à la candidature ou à la nomination. Les résultats de la vérification sont publiés au Moniteur Officiel de la Roumanie et mises à la disposition des médias.
* 606 Conformément à l'art. 17 (2) de la loi n° 187/1999, dans la période octobre 2003 - juin 2004, 7 listes ont été publiées au Moniteur Officiel, comportant 68 noms d'officiers et sous-officiers de la Securitate qui ont déployé des activités de police politique.
* 607 L'arrêté du Parlement n° 17 de 16 mai 2000 pour l'adoption du Règlement d'organisation et de fonctionnement du Conseil National pour l'Étude des Archives de la Securitate en tant que Police Politique ; publié au M.O. 244 de 2 juin 2000.
* 608 La Loi n° 102/ 2005 relative à la création, à l'organisation et au fonctionnement de l'Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel ; publiée au M.O. 391 du 9 mai 2005.
* 609 L'Avocat du Peuple a soutenu la création d'une autorité distincte de surveillance et a avisé favorablement le projet de loi initié par le Gouvernement, considérant que « l'exercice des attributions prévues par la Loi n° 677/2001 par une institution du type Ombudsman ne correspond pas au rôle traditionnel de celui-ci, ni aux systèmes de protection des données à caractère personnel des États membres » (dans Le rapport d'activité de l'Avocat du Peuple pour l'année 2004).
* 610 La loi organique de l'Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel assure la transposition de la Directive 95/46/ CE relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et la libre circulation de ces données et tient compte de la Convention n° 108 du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel (adoptée à Strasbourg le 28 janvier 1981 et ratifiée par la Roumanie par la Loi n° 682/2001).
* 611 Conformément à l'art. 27 de la Loi n° 677/2001, « l'autorité de surveillance, en exerçant ses attributions d'investigation, peut demander à l'opérateur tout renseignement concernant le traitement des donnés à caractère personnel et peut vérifier tout document ou enregistrement relatif au traitement des données à caractère personnel. Le secret d'État et le secret professionnel ne peuvent pas être invoqués pour empêcher l'exercice des attributions accordées par la loi à l'autorité de surveillance. Quand la protection du secret d'État et du secret professionnel est invoquée, l'autorité de surveillance a l'obligation de garder le secret ».
* 612 Par exemple : la Banque Nationale de la Roumanie, qui, étant une autorité de régulation bancaire, occupe une place particulière au sein des AAA ; il s'agit aussi des autorités autonomes récemment créées : l'Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel et la Commission de Surveillance du Système des Pensions Privées, mais aussi d'autres AAA comme : le Conseil National de l'Audiovisuel (CNA), la Commission Nationale des Valeurs Mobilières (CNVM), la Commission de Surveillance des Assurances (CSA) le Conseil de la Concurrence (CCR). Toutes ces autorités disposent d'un pouvoir réglementaire.
* 613 Sans que cela soit toujours le cas, la loi se réfère, par exemple, à l'indépendance de membres du Conseil de Concurrence dans la prise des décisions ; qualifie la BNR d'« institution publique indépendante », et l'Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel d'« autonome et indépendante au regard de toute autre autorité de l'administration publique, ainsi que de toute autre personne physique ou juridique du domaine privé ».
* 614 Une seule AAA est composée intégralement des membres désignés par l'exécutif. Il s'agit des sept membres du Conseil de la Concurrence, nommés par le Président de la Roumanie, sur proposition du Gouvernement. Sont aussi nommés par l'exécutif : les deux vice-présidents de l'AEP, 5 des 15 membres du CNFPA, les membres de l'ARACIS et de l'ANRE. Aussi, 5 des 11 membres du CNA sont proposés par l'exécutif. Le CSAT représente un cas singulier, étant composé intégralement des membres de droit, pour la plupart membres du Gouvernement et présidé par le Président de la Roumanie.
* 615 Pourtant, un mandat non renouvelable renforcerait l'indépendance des membres des AAA à l'égard de leurs autorités de nomination.
* 616 Les lois constitutives des AAA prévoient expressément que sont assimilés à la fonction de ministre les présidents du CNA, du Conseil de la concurrence, de l'AEP et de l'Autorité Nationale de Surveillance du Traitement des Données à Caractère Personnel, ainsi que les directeurs du SRI, SIE et SPP. Conformément à la loi, les membres du CNA sont assimilés à la fonction de secrétaire d'État, ainsi que les vice-présidents du Conseil de la concurrence (les conseillers de concurrence étant assimilés à la fonction de sous-secrétaire d'État).
* 617 Le conflit d'intérêts et le régime d'incompatibilités dans l'exercice des dignités publiques et des fonctions publiques sont réglementés par la Loi no 161/2003 concernant la garantie de la transparence dans l'exercice des dignités publiques, des fonctions publiques et dans le milieu d'affaires, la prévention et la sanction de la corruption. Conformément aux prévisions de cette loi, les personnes qui exercent des dignités publiques et des fonctions assimilés à celles de ministre, secrétaire d'état ou sous-secrétaire d'État dans le cadre des autorités et institutions soumises exclusivement au contrôle parlementaire doivent déposer une déclaration d'intérêts au Secrétaire général de la Chambre des Députés.
* 618 Pour plus de détails sur la procédure budgétaire, voir la Loi des finances publiques n° 500/2002.
* 619 Il s'agit notamment de la CNVM, de la CSA et de la Commission de Surveillance du Système des Pensions Privées.
* 620 L'article 3, alinéa 1er, du Code de procédure civile et l'article 10 de la Loi du contentieux administratif no 554/ 2004.
* 621 Les sommes sont exprimées en ROL = « lei anciens » ; la dénomination de la monnaie nationale de cette année ayant introduit aussi le « leu nouveau » (RON) ou le « leu lourd » dont la valeur est de 10000 lei anciens. En 2003, 2004, le rapport entre l'euro et le « leu ancien » a varié entre 1/35000 et 1/ 40.000.
* 622 V. Not. C. Greve, M. Flinders, S. Van Thiel, « Quangos-What's in a name ? Defining Quango from a comparative perspective. Governance, International Journal of Policy and Administration, Vol. 12, April 1999, p. 129.
* 623 Cf. F. Ridley, « The new Public Management in Europe : Comparative Perspectives », Public Policy and Administration 11/1, 1996, p. 16.
* 624 K. Jenkins, K. Caines et A. Jackson, « Improvising Management in Government : The Next Steps », Report to the Prime Minister, london, HMSO, 1988.
* 625 Cf ; C. Greve, M. Flinders et S. Van Thiel, préc., p. 136.
* 626 V. Note M. Thatcher, « The third Force ? » Independent Regulatory Agencies and Eleected Politicians In Europe », Governance : An International Journal of Policy, Administration and Institutions, vol. 18, n°3, Juillet 2005, p. 347
* 627 Cf. M. Moran, « That cher and financial Regulation », Political quaterly, 59, 1988,p. 20.
* 628 Cf. B. W. Hogwood, « The Machinery of Government » (1974-1997), Political Studies, 1997, XLV, p.704.
* 629 V. Not. M. Thatcher, « Delegation to Independent Regulatory Agencies : Pressures, Fonctions and Contextual Mediation », West European Politics, Vol. 25, n° 1, January 2002, p. 125.
* 630 V. Not. G. Majone, « The Regulatory State an its legitimacy Problems », West European Politics, 22-1, 1999, pp. 1-24.
* 631 Cf. M. Thatcher, « The politics of Telecommunications », Oxford University Press, 1999.
* 632 Cf. M. Thatcher, « The Third Force ? Independent Regulatory Agencies and Elected Politicians in Europe », Governance, Vol. 18, n° 3, July 2005, p. 357. Cf. Annexe 2.