RÉPUBLIQUE TCHÈQUE

par M. Karel KLIMA
professeur à l'Université
de la Bohême occidentale à Pilsen

_______

Introduction

Le passage à la démocratie pluraliste en 1990 a représenté un changement essentiel du système constitutionnel, y compris l'adoption de la nouvelle Constitution de la République tchèque en 1993. La Déclaration des droits fondamentaux et des libertés de l'homme, adoptée en 1991, forme une partie intégrante des bases constitutionnelles de la république. Celle-ci a permis l'acceptation de l'État dans le système du Conseil d'Europe et également le caractère obligatoire de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés pour la République tchèque.

La réalisation de la nouvelle Constitution a engendré la création progressive de certaines institutions - des organes (administratifs) de droit public que nous ne pouvons pas classer intégralement dans le système du pouvoir exécutif donc dans la fonction publique gérée d'une manière centralisée par le gouvernement de la République tchèque. Même que nous les appelons organes administratifs, ils profitent d'un certain degré d'indépendance .

Les institutions administratives indépendantes sont des institutions créées par la loi pour effectuer la gestion d'un secteur ou pour accomplir une activité (le contrôle, la surveillance, le monitoring, etc.). Elles sont munies des moyens des pouvoirs publics - elles peuvent infliger des objectifs, décider des droits de personnes physiques et morales, contrôler (y compris l'activité de l'État) et sanctionner. Elles sont positionnées en dehors de la hiérarchie de la fonction publique (sauf la subordination au gouvernement). Elles agissent dans l'intérêt public et sont financées par le budget de l'État. Elles fonctionnent complètement indépendamment de la fonction publique, donc aucun autre organe du pouvoir de l'État ne peut leur infliger des tâches, les contrôler ou même les sanctionner.

La décision des organes évalués, s'ils décident des droits des personnes physiques ou morales en accordant des licences ou des sanctions, est soumise au contrôle judiciaire de la juridiction administrative.

D'après les fonctions des institutions administratives indépendantes infligées par les lois, nous pouvons dire que ces institutions exercent dans le secteur constitutionnel pour assurer les droits de l'homme, les libertés civiques et les droits économiques .

I - Secteur de la protection des droits civiques et de l'homme

1. Le défenseur public des droits - le médiateur

A. La position du défenseur public des droits dans le système constitutionnel

La loi numéro 349/1999 sur le défenseur public des droits a créé l'institut qui, dans de nombreux systèmes constitutionnels démocratiques, exerce le rôle d'une institution prenant parti en cas de violation grave de la position de droit privé de l'homme et du citoyen .

En République tchèque, la conception de l'institution du défenseur public des droits (ci-dessous seulement, médiateur) est construite de façon analogue surtout à l'institution de l'ombudsman traditionnelle dans les systèmes continentaux européens. Dans ce sens, le médiateur protège les personnes par rapport aux agissements des autorités, au cas où ceux-ci seraient contradictoires au droit ou non-conformes aux principes démocratiques. L'activité du médiateur participe donc à la protection des droits fondamentaux et des libertés (d'après le sens de la Déclaration)

La protection des droits et des libertés par le médiateur est conçue d'une manière très large, concernant les droits et les intérêts légitimes des personnes quand ceux-ci sont décidés par les organes des pouvoirs publics . D'après la loi, la compétence du médiateur touche également les ministères et les autres autorités administratives. La Banque nationale tchèque (en tant que bureau administratif), le Conseil pour les émissions radiophoniques et télévisuelles, les communes exerçant la fonction publique, la Police de la République tchèque, l'Armée de la République tchèque, le Service pénitentiaire de la République tchèque, y compris leurs établissements, les établissements socio-éducatifs et préventifs ainsi que les caisses d'assurances-maladie publiques.

La loi retire de la compétence du médiateur : le Parlement de la République tchèque, le président de la République tchèque, le gouvernement de la République tchèque, la Cour des comptes de la République tchèque, les services de renseignements de la République tchèque, les enquêteurs de la Police de la République tchèque, le ministère public et les tribunaux (sauf les organes de gestion des tribunaux).

Le médiateur est élu par la Chambre des députés pour un mandat de 6 ans. Les candidats sont proposés par le président de la république et par le Sénat : chacun propose deux candidats.

Le médiateur est responsable envers la Chambre des députés. Il ne peut pas être destitué, excepté les cas où il exerce une activité incompatible à sa fonction.

B. La compétence du Défenseur public

Chaque personne, même celle qui est dépourvue de liberté individuelle, a le droit de consulter le médiateur par écrit ou inscrire sa déposition sous forme de procès verbal.

La suggestion pour l'activité du médiateur peut être déposée par :

- une personne physique ou morale,

- un député, un sénateur ou bien une chambre du Parlement de la République tchèque suite à une déposition leur étant adressée,

- l'initiative du médiateur.

Dans le cadre de sa fonction , le médiateur est habilité à entrer, au su des responsables des bureaux, dans les espaces de bureaux et ceci même sans avertissement préalable.

Les bureaux sont obligés sur demande du médiateur et dans le délai établi de :

- fournir des informations et des explications,

- présenter les dossiers demandés,

- effectuer les preuves proposées par le médiateur,

- communiquer, par écrit, la position à l'égard des questions de faits et des questions juridiques,

- effectuer les opérations de surveillance proposées par le médiateur.

Tous les organes et personnes de l'administration publique sont obligés, dans le cadre de leur compétence, d'apporter leur soutien au médiateur durant ses investigations.

Le procédé du médiateur en cas de découverte de la violation des règlements ou d'autres erreurs est, d'après la loi, défini de façon suivante :

- le médiateur demande au bureau concerné de se prononcer envers ses découvertes sous un délai de 30 jours,

- si le médiateur s'aperçoit que les mesures prises sont suffisantes, il les communique au plaignant ainsi qu'à l'autorité concernée.

Dans le cas contraire le médiateur donne, par écrit, son point de vue final, comprenant des mesures correctives, au bureau concerné et au plaignant.

Le médiateur peut proposer surtout les mesures correctives suivantes :

- le lancement de la procédure sur la révision de la décision, de l'action ou du procédé du bureau concerné,

- l'exécution d'une action pour éliminer l'inactivité,

- le lancement d'une procédure disciplinaire ou analogue à celle-ci,

- l'engagement des poursuites pour un fait criminel, pour une infraction ou pour un autre délit administratif,

- l'attribution d'un dédommagement ou l'application du droit légitime au dédommagement.

Le bureau concerné est obligé, sous un délai de 30 jours, de communiquer au médiateur les mesures correctives qui ont été prises. Si le bureau concerné n'accomplit pas cette obligation ou si les mesures prises ne sont pas suffisantes, le médiateur informe un bureau supérieur ou le gouvernement. Il peut également informer le public.

Chaque année, avant la fin du mois de mars, le médiateur présente un rapport écrit global sur son activité durant l'année écoulée à la Chambre des députés. Au moins une fois tous les trois mois le médiateur soumet des informations sur son activité et un rapport sur les affaires particulières, où les mesures correctives prises n'ont pas été suffisantes, à la Chambre des députés. Il préconise aussi des recommandations quant aux règlements juridiques dans le sens de l'initiative pour la publication d'un changement ou pour l'annulation d'un règlement juridique ou interne.

2. Le bureau pour la protection des données personnelles

A. La position du bureau

Le bureau pour la protection des données personnelles est un organe indépendant qui, dans son activité, obéit à la loi numéro 101/2 000 sur la protection des données personnelles .

Le sens de la loi sur la protection des données personnelles est le droit de protection du citoyen concernant les interventions non autorisées dans sa vie privée et personnelle par le rassemblement non autorisé, par la publication ou par un autre abus des données personnelles. Ce droit est garanti par la Déclaration des droits fondamentaux et des libertés. Dans la société actuelle, sous l'influence du développement de technologies d'information, ce droit est de plus en plus menacé, voir violé.

Le bureau est un organe indépendant. Son responsable est nommé par le président de la république suite à la proposition du Sénat. Dans son activité, il procède d'une manière indépendante et il n'obéit qu'aux lois et aux autres prescriptions juridiques. La seule façon d'intervenir dans l'activité du Bureau n'est possible que sur la base de la loi. L'activité du bureau est financée par une partie indépendante du budget de l'État de la République tchèque.

B. Les compétences du bureau

Le bureau assume les compétences suivantes :

- la surveillance de l'observation des devoirs stipulés par la loi pendant le traitement des données personnelles,

- la gestion d'enregistrements des avis faits d'après le § 16 et du registre des traitements des données personnelles autorisées (ci-dessous seulement registre),

- l'acceptation des suggestions et des plaintes des citoyens sur l'inobservation de cette loi,

- le traitement et l'accessibilité au public du rapport annuel sur son activité,

- les autres compétences stipulées par la loi,

- le débat sur les infractions et les autres délits administratifs. Il inflige des amendes d'après cette loi.

3. Le conseil pour les émissions radiophoniques et télévisuelles

A. La position de l'institution

Le conseil pour les émissions radiophoniques et télévisuelles est établi par la loi numéro 231/2001 en tant que bureau administratif assumant la fonction publique dans le secteur des émissions radiophoniques et télévisuelles ainsi que dans celui des émissions achetées.

Le conseil est formé par 13 membres qui sont nommés et destitués par le Premier ministre suite à une proposition de la Chambre des députés. Leurs mandats durent 6 ans.

Le conseil décide suite à une majorité absolue des voix de ses membres. Ses décisions sont donc indépendantes et ne sont pas liées aux directives des autres institutions.

B. La compétence du Conseil

Le conseil est un bureau administratif qui exerce la fonction publique dans le secteur des émissions radiophoniques et télévisuelles (ci-dessous seulement « émissions ») ainsi que dans celui des émissions achetées et en plus :

- il surveille la sauvegarde et le développement de la pluralité de l'offre des programmes et des informations dans le secteur des émissions et des émissions achetées.

- il suit l'indépendance du contenu des émissions et des émissions achetées,

- il surveille l'observation des prescriptions juridiques dans le secteur des émissions et des conditions établies dans la décision sur l'octroi de la licence ou dans la décision sur l'enregistrement. Il suit également l'observation de la loi numéro 40/1995 sur la régulation de la publicité, quant à la publicité diffusée par les émissions radiophoniques et télévisuelles et au sponsoring dans les émissions radiophoniques et télévisuelles,

- il accorde, change et annule les licences pour l'exercice d'émissions,

- il accorde, change et annule les décisions sur l'enregistrement de l'exercice des émissions achetées,

- il gère les enregistrements des exploitants des émissions et des exploitants des émissions achetées,

- il avertit l'exploitant d'émissions et celui d'émissions achetées en cas de violation des devoirs stipulés par la loi numéro 231/2001 ou des conditions de la licence accordée et il lui fixe un délai pour remédier à cet état des choses,

- il inflige des sanctions en cas de violation des conditions de la loi,

- avec ses points de vue et ses propositions il participe à la création des principes de la politique d'État de la République tchèque par rapport aux émissions et à la conception de leur développement,

- il publie les décisions du tribunal sur le moyen correctif et sur la plainte contre la décision du Conseil.

Le conseil dispose de son propre budget, il présente la proposition de celui-ci et le compte final au Ministère des finances et à l'organe concerné de la Chambre des députés.

Le conseil présente le rapport annuel sur son activité et sur la situation dans le secteur des émissions à la Chambre des députés . Le Conseil a le droit d'émettre au gouvernement et aux organes de la fonction publique son opinion et de demander leur coopération quant aux émissions. Le gouvernement et les organes de la fonction publique coopèrent avec le Conseil quant aux affaires des émissions et ils sont dans l'obligation, quant aux affaires des émissions, de demander systématiquement la position du Conseil et, dans la mesure de leurs compétences, fournir impérativement au Conseil la coopération nécessaire.

II - Secteur de la protection des droits et des libertés économiques

1. Le bureau pour la protection de la compétition économique

A. La position dans le système constitutionnel

Actuellement la protection de la compétition économique de la République tchèque est, au niveau institutionnel, assurée par le Bureau pour la protection de la compétition économique basé à Brno. Ce Bureau a commencé à fonctionner, sous cette appellation depuis le 1 er novembre 1996 . Il a continué dans les activités de l'ancien Ministère pour la compétition économique dont les compétences ont été entièrement conservées.

L'adaptation juridique de la protection de la compétition économique en République tchèque provient du droit de compétition de la CE, et, spécialement, de l'article 81 et du Contrat suivant sur la création de la CE. La première mention du droit de cartel dans les pays tchèques se trouve dans le § 4 de la loi autrichienne de coalition numéro 43 de 1870. D'après cette loi, les contrats des artisans conclus dans le but d'augmenter les prix de marchandises au préjudice des clients n'avaient pas d'efficacité juridique.

Le Bureau est l'organe central de la fonction publique, complètement indépendant dans son activité de décision. Aucun autre organe de la fonction publique comprenant le gouvernement ne peut intervenir dans les décisions de celui-ci, donc son contrôle politique est exclu. Il est pourtant lié aux décisions du gouvernement qui fixent les tâches législatives et non législatives.

Le président nommé par le président de la république suite à la proposition du gouvernement pour un mandat de 6 ans est en tête du Bureau. Le président ne peut cumuler que deux mandats. Le président ne peut être membre d'aucun parti ou mouvement politique. Le président peut être destitué de sa fonction par le président de la république, s'il n'exerce pas sa fonction pendant plus que six mois d'affilés, s'il ne respecte pas l'impartialité et l'indépendance du Bureau concerné ou s'il perturbe gravement la dignité de sa fonction.

B. La compétence du bureau

La compétence du Bureau et la position de son président sont données par la loi numéro 273/1996, sur la compétence du Bureau pour la protection de la compétition économique d'après la loi numéro 187/1999. Celui-ci doit créer des conditions pour le soutien et la protection de la compétition économique, exercer la surveillance durant les adjudications des commandes publiques et du soutien publique et effectuer les autres compétences stipulées par les lois spéciales .

Le devoir le plus important de ce Bureau par rapport au gouvernement de la République tchèque est de lui fournir des rapports annuels sur son activité. Ceux-ci sont présentés régulièrement depuis 1993 chaque 30 mai au plus tard et traitent de l'activité législative du Bureau concerné, de l'activité dans le secteur de la protection de la compétition économique, de la situation du milieu de compétition sur les marchés les plus importants, de l'activité dans le secteur de la surveillance sur les adjudications des commandes publiques et des plaintes contre les décisions du président du Bureau et de l'accomplissement des engagements pris envers le Bureau de l'Accord européen et des autres contrats internationaux ainsi que de la coopération avec les autres Bureaux de compétition.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page