C. L'HYBRIDATION : UNE TECHNOLOGIE VRAISEMBLABLEMENT CLEF À MOYEN ET LONG TERMES
Avec la hausse du prix du pétrole et le lancement très médiatique de la Toyota Prius en Europe, la motorisation hybride a acquis une notoriété inattendue, même si son fonctionnement reste bien souvent mal connu.
Plusieurs questions se posent. Qu'est-ce que l'hybridation ? Quel est son principe de fonctionnement ? Qu'apporte la technologie hybride aujourd'hui ? Quelle est sa diffusion ? Quel est son avenir à moyen et long termes ? Va-t-elle se généraliser ?
1. Le principe et les différents types d'hybridation
L'hybridation consiste à combiner deux énergies pour assurer la propulsion d'un véhicule. On appelle donc hybride tout véhicule qui, en plus de sa source d'énergie primaire, dispose d'un stockage réversible d'énergie sous une seconde forme (hydraulique avec réserve de pression, cinétique avec volant d'inertie, électrique...) 32 ( * ) . Dans la pratique, il s'agit essentiellement du mariage de l'électrique et du thermique, mais cette solution est aussi utilisée pour les voitures à hydrogène qui sont également des hybrides électrique-hydrogène.
L'objectif est de cumuler les avantages des deux modes de motorisation. Sur les véhicules hybrides actuels, la source principale d'énergie est le moteur thermique. L'adjonction d'un moteur électrique et d'une puissante batterie permet d'optimiser le fonctionnement du moteur thermique ou de le remplacer momentanément et donc de réduire la consommation et les émissions. Toute la difficulté est de réussir un fonctionnement bimode harmonieux et pour un coût limité car il ne s'agit pas de la juxtaposition de deux chaînes de tractions fonctionnant en alternance mais de deux chaînes fonctionnant de concert.
Il existe plusieurs niveaux et fonctionnalités d'hybridation du soft au full , généralement dénommés par leur terminologie anglo-saxonne.
Le premier niveau correspond au Stop & start ® de Valeo commercialisé sur la Citroën C3. À l'arrêt, un dispositif électrique, un alterno-démarreur, permet la mise en veille du moteur et le redémarrage après relâchement de la pédale de frein. Ce dispositif permet d'économiser entre 6 et 15 % de carburant (8 g de CO 2 /km en moyenne). Citroën avait fait une première expérience de ce type avec le « Dynavolt » en 1998 sur la Xsara. Un système proche existe sur la Lupo de Volkswagen.
Le second niveau est le freinage récupératif. Il consiste à récupérer l'énergie cinétique du véhicule lorsque la voiture freine ou décélère, au lieu de la dissiper sous forme de chaleur dans les freins. Cette énergie est stockée dans une batterie appropriée et restituée ensuite. Cette opération est dans la pratique très difficile à réaliser.
Une troisième fonctionnalité est l'optimisation du moteur thermique. Le principe est de le faire tourner à son niveau de rendement optimal, de stocker l'énergie dans les batteries lorsqu'elle est excédentaire et de la restituer lorsqu'elle est insuffisante, notamment dans les phases d'accélération. Le moteur électrique permet un surcroît de puissance et évite la surconsommation momentanée de l'accélération au moteur thermique. L'hybridation peut donc également permettre de diminuer la cylindrée du moteur thermique.
Enfin, un véhicule hybride peut être propulsé entièrement en mode électrique sans intervention du moteur thermique (fonction E-drive ® sur la Toyota Prius ).
L'IFP propose ainsi une classification des différents
types d'hybrides et une évaluation des puissances électriques
nécessaires et des économies potentielles en conduite
urbaine :
Type d'hybride |
Fonctions |
Puissance électrique |
Gain en CO 2 |
Stop & Start |
1 - arrêt du moteur au ralenti |
2 kW |
8 % |
Stop & go |
1 + 2 (freinage récupératif) |
3 kW |
13 % |
Mild-Hybrid |
1 + 2+ 3 (downsizing moteur thermique et assistance accélération |
10 kW |
30 % |
Full Hybrid (série ou parallèle |
1 + 2 + 3 + 4 (mode électrique) |
30 kW |
45 % |
Ces estimations faites sur cycle urbain sont favorable aux hybrides qui ont les performances le plus élevées dans cette configuration. Les gains sont en revanche plus faibles sur d'autres types de trajets, comme l'a montré François Badin de l'INRETS :
Ces gains doivent d'ailleurs être évalués au regard de leur coût (Source INRETS) :
Parmi les hybrides les plus aboutis, disponibles à l'achat dans les concessions, se trouvent les modèles produits par les constructeurs japonais Honda et Toyota. Leurs technologies ne sont pas identiques quoiqu'elles permettent désormais des performances comparables.
La principale différence perceptible pour le conducteur est le mode de combinaison du moteur électrique et du moteur thermique. Sur les modèles Toyota, les deux moteurs peuvent fonctionner indépendamment, ce qui permet un mode électrique silencieux tandis que le couplage permanent sur la Honda Civic conduit à la fermeture des soupapes du moteur essence mais pas son arrêt complet.
Techniquement, Toyota a choisi une architecture semi-parallèle tandis que Honda a mis en oeuvre une architecture parallèle.
Le Toyota Hybrid system (THS) est particulièrement complexe. Ce sont deux moteurs/ générateurs électriques qui sont combinés au moteur thermique permettant un fonctionnement en série (cas de la traction électrique) ou en mode parallèle (apport de couple supplémentaire par un moteur électrique) ou à la fois en mode série et en mode parallèle. Pour parvenir à combiner ces différentes situations sans à-coups, une transmission dite « épiccycloïdale » a été développée. C'est ce mécanisme qui permet un découplage entre la propulsion électrique et le thermique, et donc un mode électrique silencieux.
Honda a choisi une architecture parallèle, c'est-à-dire que le moteur thermique et le moteur électrique partagent le même arbre, ce qui permet d'additionner les couples mais impose un rapport fixe entre leurs régimes. Cette architecture est combinée avec une boîte de transmission continûment variable (CVT) par courroie métallique. Commercialisé pour la première fois en 1999 sur le coupé Insight (2 places, carrosserie en aluminium, 90 g CO 2 / km), le système IMA (integrated motor assist) a été étendu sur la Honda Civic en 2004.
Moteur électrique
Moteur Honda-IMA - Source : F.Badin INRETS, 2005
Tableau des performances comparées de la Toyota Prius et de la Honda Civic de nouvelle génération :
Toyota Prius |
Honda Civic |
|
Moteur thermique |
1,5 l, 77 CV |
1.3 l, 95 CV, 123 Nm |
Moteur électrique |
50 kW, 68 CV |
15 kW, 103 Nm |
Puissance totale |
115 CV à 4.000 tr/min |
115 CV, 170 Nm à 2.500 tr/min |
Consommation |
4,3 l/100 km |
4,6 l/100 km |
Rejets de CO2 |
104 g/km |
109 g/km |
Autonomie électrique |
- 5 km |
- 5 km |
Entre les deux constructeurs le point commun est cependant l'utilisation d'une électronique de haute puissance puisque le passage au mild hybrid nécessite de dépasser les 60 V. La Toyota Prius se situe, elle, à 500 V.
* 32 Cf. Franck Vangraefschepe et Pascal Megazzi, IFP, Note Panorama 2005 « Véhicules hybrides, quel avenir ? ».