B. DES PRÉLÈVEMENTS SOCIAUX CROISSANTS
Si la France reste dans le peloton de tête en matière de taux de prélèvements obligatoires, cela résulte notamment de la dynamique des prélèvements sociaux , qui occupent une place croissante. Dans le cadre du présent rapport, votre rapporteur général a souhaité aborder deux questions essentielles : la dynamique des prélèvements sociaux d'une part, le partage des prélèvements entre l'Etat et la sécurité sociale d'autre part.
1. Une hausse des prélèvements sociaux inéluctable en l'absence de profondes réformes de structure
a) Des prélèvements sociaux représentant plus de la moitié des prélèvements obligatoires en 2006
(1) L'évolution des prélèvements sociaux
Les prélèvements sociaux constituent une part prépondérante des prélèvements obligatoires et représenteront en 2006 plus de la moitié de ceux-ci : 22,1 % du produit intérieur brut (PIB), soit 388,7 milliards d'euros, pour un total de prélèvements obligatoires égal à 44 % du PIB (775,1 milliards d'euros) .
On rappellera que la contribution sociale généralisée devrait rapporter 76,45 milliards d'euros en 2006, contre 57,48 milliards d'euros pou l'impôt sur le revenu.
Le tableau suivant retrace l'évolution des prélèvements sociaux depuis 2001.
Evolution du taux de prélèvements sociaux
(en points du PIB)
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
|
Prélèvements sociaux |
21,4 |
21,4 |
21,6 |
20,5 |
20,9 |
22,1 |
Evolution effective |
0 |
0,1 |
- 0,2 |
0,1 |
1,2 |
|
Dont contribution de l'évolution spontanée |
0 |
0,1 |
0 |
0,3 |
0,1 |
|
Dont contribution des changements de périmètre |
0 |
0 |
0,9 |
0 |
1,1 |
Source : rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, projet de loi de finances pour 2006
On relève que cette évolution tient à trois facteurs :
- l' évolution spontanée , qui s'est révélée globalement neutre sur cette période ;
- les mesures nouvelles , comprises notamment dans la loi portant réforme des retraites 12 ( * ) et la loi relative à l'assurance maladie 13 ( * ) , qui ont systématiquement conduit à un accroissement du taux de prélèvements sociaux ;
- les changements de périmètre , qui concernent la prise en charge des exonérations de cotisations sociales : celle-ci incombait jusqu'en 2003 au Fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC). Ce fonds ayant été budgétisé dans le cadre des lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2004, les allègements de charges sociales ont alors été imputés sur le budget du travail, avant que le gouvernement ne décide, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2006, de transférer cette charge à la sécurité sociale, en contrepartie de l'affectation de recettes fiscales.
Il convient, en outre, de souligner que la catégorie « ASSO », à laquelle on se réfère dans le tableau précédent pour apprécier l'évolution et le poids des prélèvements sociaux, ne donne pas une vision complète de ces derniers dans la mesure où plusieurs organismes liés à la sécurité sociale sont considérés comme des « organismes divers d'administration centrale » (ODAC) : la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES), le Fonds de réserve des retraites (FRR), la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA). D'après le rapport du gouvernement sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, le montant des prélèvements obligatoires perçus par ces trois organismes s'est élevé à 7,15 milliards d'euros 14 ( * ) en 2004 .
Votre rapporteur général relève également que la suppression de l'avoir fiscal, à laquelle votre commission des finances s'était opposée, devrait entraîner, en 2006, une perte de recettes de 550 millions d'euros pour la sécurité sociale, dont 400 millions d'euros pour le régime général, selon le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2005.
(2) Les principales mesures du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006
Plusieurs mesures contenues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 devraient contribuer à accroître le poids des prélèvements sociaux. Les principales mesures, qui pèseront sur les ménages et les entreprises, sont les suivantes :
- la soumission aux prélèvements sociaux des intérêts produits par les plans d'épargne logement de plus de 10 ans dès la dixième année : cette mesure, qui ne constitue pas une augmentation des prélèvements obligatoires mais simplement une anticipation de leur perception, devrait avoir pour conséquence une augmentation du rendement de la CSG d'environ 860 millions d'euros en 2006 ;
- la mise en place d'une taxe exceptionnelle sur l'industrie pharmaceutique , qui devrait rapporter 300 millions d'euros ;
- l'extension de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S) au secteur public relevant du secteur marchand, qui devrait représenter une recette de 140 millions d'euros ;
- différentes mesures modifiant le régime des exonérations de cotisations sociales , qui devraient rapporter 185 millions d'euros (fin de l'abattement existant pour le temps partiel, réduction du seuil des exonérations sur les indemnités de rupture du contrat, assujettissement des chambres d'hôtes aux cotisations sociales) ;
- enfin, le relèvement du taux de la taxe versée par les mutuelles au Fonds CMU , considéré comme un ODAC, qui devrait générer un produit de 170 millions d'euros .
Ces mesures devraient donc représenter un surcroît de recettes de 1,66 milliard d'euros, soit moins de 0,1 point de PIB.
Si le projet de loi de financement de la sécurité sociale contient ainsi des mesures accroissant le taux de prélèvements obligatoires, cela tient à la nécessité de faire face à une situation des finances sociales particulièrement dégradée.
Signalons que le gouvernement a par ailleurs annoncé l'augmentation de 0,2 point des cotisations sociales vieillesse - cette mesure d'ordre réglementaire étant prévue dans le cadrage financier de la réforme des retraites - ainsi que l'augmentation provisoire de 0,1 point du taux de la cotisation patronale affectée à la branche « accidents du travail - maladies professionnelles » (AT-MP).
Au total, le rapport du gouvernement sur les prélèvements obligatoires et leur évolution estime que la hausse des prélèvements sociaux résultant de mesures nouvelles représentera 3,21 milliards d'euros en 2006 , comme l'indique le tableau qui suit.
Incidence des principales mesures nouvelles sur les prélèvements sociaux en 2006
(en millions d'euros )
Mesures |
Montant |
PLFSS 2006 |
1 660 |
Hausses de cotisations au régime général |
1 300 |
Hausses de cotisations décidées par les partenaires sociaux |
280 |
Hausses de cotisations décidées par les partenaires sociaux |
- 30 |
Autres mesures Sécurité sociale (*) |
3 210 |
Total |
3 210 |
Source : rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution, projet de loi de finances pour 2006
(*) Il s'agit notamment de l'impact sur les cotisations sociales et sur la CSG du changement de mode de recouvrement des indépendants et de l'incidence sur les prélèvements sociaux de la suppression de l'avoir fiscal
* 12 Loi n° 2003-775 du 21 août 2003.
* 13 Loi n° 2004-810 du 13 août 2004.
* 14 Le montant est même supérieur et atteint plus de 8 milliards d'euros si l'on inclut dans ce champ le Fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie, aujourd'hui englobé dans la CNSA. Toutefois, ainsi que l'a souligné à plusieurs reprises votre commission des finances, le positionnement de cette CNSA, annoncée comme une cinquième branche de la protection sociale, demeure ambigu. De la même manière, le Fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie (Fonds CMU), qui a perçu 269,5 millions d'euros de prélèvements obligatoires en 2004, est comptabilisé comme un ODAC.