3. Des objectifs et indicateurs à trop long terme
a) Des difficultés de pilotage de l'action publique inhérentes aux objectifs et indicateurs de trop long terme
Votre commission des finances a jugé inadéquats les objectifs et indicateurs correspondant à l'atteinte de cibles définies à trop long termes , dans la mesure où les indicateurs doivent être disponibles annuellement , pour permettre un pilotage de l'action publique sur la base des résultats obtenus chaque année, comme le développe le Guide de la performance précité :
« Un indicateur doit être disponible annuellement. Exceptionnellement, en raison du coût de production élevé d'une enquête lourde sur une population de bénéficiaires par exemple, l'indicateur peut être renseigné à intervalles plus espacés.
« Un indicateur doit permettre d'effectuer des comparaisons, pour apprécier les résultats obtenus, soit dans le temps (progrès accompli d'une année sur l'autre), soit dans l'espace (comparaison d'un territoire à l'autre), soit encore entre différents acteurs.
« Les comparaisons permettent d'étalonner les résultats obtenus, de déceler les bonnes pratiques et les pistes d'amélioration. Les comparaisons internationales sont utiles, notamment pour établir un diagnostic préalable » 43 ( * ) .
b) Des indicateurs inadéquats car insusceptibles de s'inscrire dans une stratégie pluriannuelle
Votre commission des finances a relevé un certain nombre d'objectifs et d'indicateurs inadéquats car de trop long terme et non disponibles à intervalles annuels réguliers pour permettre un pilotage effectif de l'action publique.
L'atteinte de plusieurs objectifs de la mission « Transports » s'inscrit dans des délais trop éloignés pour améliorer la gestion annuelle des finances publiques . Par exemple, l'indicateur n° 1 « Taux de réalisation de la planification décidée lors du comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) » de l'objectif n° 1 « Réaliser les projets de desserte ferrée, fluviale, intermodale, portuaire et maritime planifiés par l'Etat en maîtrisant les dépenses » du programme « Transports terrestres et maritimes » de la mission « Transports ».
Dans ce cadre, il est vivement regrettable que l'impossibilité de disposer de données annuelles incombe parfois à la construction de l'indicateur ou aux données déjà disponibles.
Ce biais concerne notamment l'indicateur n° 1 (« Indice de satisfaction des victimes d'infractions ») de l'objectif n° 6 (« Développer l'efficacité des dispositifs permettant la défense et l'indemnisation des victimes ») du programme « Accès au droit et à la justice » de la mission « Justice » : il se fonde sur une enquête qui serait réalisée tous les deux ans auprès de 6.000 victimes d'infractions pénales. Un échantillon plus réduit permettrait peut-être de réduire le coût de telles enquêtes et de pouvoir les conduire chaque année.
De même, il n'est prévu qu'une enquête tous les trois ans pour mesurer l'évolution de l'indicateur « Evolution de la production d'ordures ménagères par habitant » de l'objectif n° 4 « Réduire la production de déchets et son impact sur la santé et l'environnement, contrôler les impacts des substances chimiques » du programme « Prévention des risques et des pollutions » de la mission « Ecologie et développement durable ».
Certains indicateurs, déjà renseignés, ne sont toutefois pas disponibles tous les ans , par exemple en ce qui concerne l'indicateur n° 1 (« Part des surfaces sous engagement agro-environnemental ») de l'objectif n° 1 (« Concilier activités économiques et préservation des milieux ») du programme « Gestion durable de l'agriculture, de la pêche et du développement rural » de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ».
Votre commission des finances juge également non satisfaisants les indicateurs qui ne devraient être disponibles que dans des délais trop longs : 4 à 8 ans pour l'indicateur n° 4 « Montant des pénalités financières (refus d'apurement) relatives aux aides versées au cours de la campagne communautaire N / montant des aides versées au cours de la campagne communautaire N (pour 2003, N = campagne 1999) » de l'objectif n° 4 « Mettre en oeuvre les politiques communautaires (premier pilier) dans des conditions optimales de coût et de qualité de service » du programme « Valorisation des produits, orientation et régulation des marchés » de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ». En outre, cet indicateur ne peut être considéré que comme un indicateur indirect de la qualité de la gestion des aides communautaires au cours de l'année considérée N, pour deux raisons :
- d'une part, certaines corrections peuvent être liées au jugement porté par la Commission européenne sur l'organisation même du système de gestion, reposant elle-même sur des choix bien antérieurs à l'exercice au cours duquel les dépenses ont été contrôlées ;
- d'autre part, le montant des corrections notifiées au titre d'une année donnée est fortement dépendant de l'intensité et de l'objet des contrôles réalisés au titre de cet exercice.
Les objectifs ou indicateurs temporaires ne peuvent pas davantage donner lieu à un pilotage de l'action publique, dont la performance serait contrôlée chaque année par le Parlement .
A titre d'illustration, l'objectif n° 7 « Elaborer un dispositif de répartition des effectifs adapté au cadre de la LOLF » du programme soutien de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » a vocation à devenir caduc après 2005 et doit ainsi être supprimé. Dans le même esprit, votre commission des finances est pour le moins surprise qu'ait pu être proposé un indicateur « Respect des étapes de mise en oeuvre de la LOLF » dans la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques ».
Relève également de cette catégorie, bien que de manière moins immédiate, l'indicateur n° 1 « Avancement de la mise en place du réseau de surveillance des eaux de surface au sens de la directive cadre sur l'eau » de l'objectif n° 1 « Construire et mettre en place les outils méthodologiques et les référentiels nécessaires pour atteindre le bon état écologique de l'eau d'ici 2015 » du programme « Gestion des milieux et biodiversité » de la mission « Ecologie et développement durable ». En effet, l'avant-PAP annexé au projet de loi de finances initiale pour 2005 indiquait que la réalisation serait complète en 2006 et qu'il faudrait songer, à partir de 2007, à un indicateur de répartition des masses d'eau.
* 43 Ibid., page 28.