TRAVAUX DE LA
COMMISSION :
AUDITION CONJOINTE DU DIRECTEUR DE CABINET DU
MINISTRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION ET DE LA COUR DES COMPTES DU 13
JUILLET 2004
Présidence de M. Jean Arthuis, président
Séance du 13 juillet 2004
Ordre du jour
Audition de M. Henri Paul , directeur de cabinet du ministre de la culture accompagné de Mme Martine Marigeaud , directeur de l'administration générale au ministère de la culture, et de M. Guy Mayaud , conseiller maître à la Cour des comptes, en présence de Mme Catherine Demier , secrétaire générale adjointe de la Cour des comptes, chargée des relations avec le Parlement
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M. Jean Arthuis, président - Mes chers collègues, l'audition conjointe à laquelle nous allons procéder aujourd'hui est la neuvième de ce genre, résultant de l'application de l'article 58-2° de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, qui prévoit la réalisation, par la Cour des comptes, « de toute enquête demandée par les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances sur la gestion des services ou organismes qu'elles contrôlent ».
A ce titre, la Cour des comptes a transmis à notre commission, en janvier 2004, une « communication » relative à la gestion des personnels du ministère de la culture et de ses établissements publics. Cette communication a également été adressée par voie de référé, au ministre de la culture et de la communication, au ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ainsi que, en copie, au ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
Il m'a semblé, conformément à la procédure déjà suivie, qu'était nécessaire une audition conjointe de M. Henri Paul, directeur de cabinet du ministre de la culture, d'une part, et de Mme Martine Marigeaud, directeur de l'administration générale au ministère de la culture d'autre part, en présence de M. Guy Mayaud, conseiller maître, et de Mme Catherine Demier, secrétaire générale adjointe de la Cour des comptes, chargée des relations avec le Parlement, qui, à ce titre, a contribué au développement d'une coopération efficace entre la Cour des comptes et le Sénat.
La communication de la Cour des comptes souligne, comme l'avait déjà relevé notre collègue Yann Gaillard, rapporteur spécial des crédits de la culture, la difficulté d'évaluation du nombre d'agents relevant directement ou indirectement du ministère et de ses établissements publics. La Cour des comptes analyse notamment l'adéquation entre les personnels disponibles et les besoins dans le secteur de la culture, et note qu'une très grande vigilance s'impose sur la comptabilisation des effectifs des établissements publics du ministère de la culture. Elle examine également les conséquences de la gestion par corps des personnels du ministère et souligne la lourdeur, la complexité et le coût de ce mode gestion. Enfin, elle s'interroge sur le recours croissant aux personnels contractuels de droit public et sur ses implications.
M. Guy Mayaud, conseiller maître de la Cour des comptes, présentera dans un premier temps les conclusions du rapport sur la gestion des personnels du ministère de la culture et de ses établissements publics communiqué à notre commission, puis les représentants du ministre de la culture et de la communication pourront répondre aux observations de la Cour des comptes. Enfin, je vous inviterai, mes chers collègues, à intervenir si vous le souhaitez.
Conformément à l'article 58-2 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, il nous appartiendra à la fin de cette audition de statuer sur la publication du rapport transmis et qui, sur le plan juridique, est une « communication » de la Cour des comptes.
La parole est donc à M. Guy Mayaud pour la présentation du rapport relatif à la gestion des personnels du ministère de la culture et de ses établissements publics.
M. Guy Mayaud - Deux constats principaux s'imposent. En l'état actuel des choses, il n'existe pas de document pouvant offrir une vue consolidée des emplois et des effectifs réels du ministère et de ses établissements publics. De plus, en matière de gestion prévisionnelle des emplois et d'optimisation du rapport entre les effectifs et les tâches à accomplir, le ministère de la culture en est encore aux balbutiements.
Les documents budgétaires, le projet de loi de finances ou la loi de finances, comportent des annexes relatives aux emplois. Les annexes récapitulatives traitent des emplois inscrits au budget du ministère, quelle que soit leur implantation, notamment administration centrale et services déconcentrés, mais aussi les emplois affectés dans les établissements publics à caractère administratif.
La récapitulation générale des emplois budgétaires explicite l'évolution du nombre des emplois d'un budget à l'autre, en distinguant les titulaires et les contractuels. La récapitulation détaillée fournit par chapitre et par article le nombre des emplois budgétés, en distinguant les titulaires et les contractuels. A cet égard, il faut souligner que dans cette récapitulation, dite détaillée, les emplois de l'administration centrale (selon l'intitulé de l'article 52) sont inférieurs d'environ 30 % à la réalité, du fait de l'individualisation des emplois de la filière recherche dans l'article 90. Pour tous les ministères, les emplois de cette filière sont agglomérés pour ordre dans le BCRD.
La dernière récapitulation, qui concerne la seule loi de finances, ventile les emplois budgétaires par corps. Cependant, quelle que soit la récapitulation, il n'est pas tenu compte dans les annexes des emplois non inscrits au budget du ministère, mais dont les titulaires sont juridiquement des agents de l'Etat.
Ainsi en est-il des quelque 1.300 emplois du musée du Louvre, qui, depuis 2003, ne sont plus inscrits au budget du ministère, mais à celui de l'établissement public. Ainsi en sera-t-il prochainement des 1.600 emplois de la Bibliothèque nationale de France.
A fortiori, les annexes ne tiennent pas compte des emplois des établissements publics, qu'ils soient administratifs ou industriels et commerciaux, dont les titulaires ne sont pas des agents de l'Etat mais des agents des établissements publics.
Enfin, les annexes ne tiennent pas compte des contractuels sur crédit, par opposition aux contractuels sur emploi, auxquels le ministère, ses services déconcentrés et ses établissements publics ont recours.
On peut observer que dans la loi de finances, les articles du chapitre 36-60 (subventions aux établissements publics), correspondent aux différents établissements qui sont subventionnés par le ministère de la culture. La loi de finances indique, pour chaque établissement, en regard d'une rubrique « effectifs », la ventilation de ses emplois, selon qu'ils sont payés par l'Etat ou par l'établissement public.
Il ne faut pas se méprendre sur l'expression « emploi payé par l'établissement public », qui signifie que, matériellement, l'établissement public est l'organisme payeur, mais ne signifie nullement que cet établissement finance les traitements et salaires sur ses ressources propres. Une part plus ou moins grande de ces traitements et salaires est financée par l'Etat au travers de subventions. Ainsi, le transfert des emplois du musée du Louvre du budget de l'Etat à celui de l'établissement public a été une opération blanche sur le plan financier.
Le récolement des données, ainsi fournies pour chaque catégorie d'établissement public, permet certes de compléter celles qui figurent dans les annexes récapitulatives, mais c'est un travail très fastidieux.
Le bilan social du ministère, par ailleurs, est un document rétrospectif. Il n'est guère plus satisfaisant que les documents budgétaires. Il comporte certes un tableau récapitulatif, qui intègre les emplois propres des établissements publics administratifs, mais pas ceux des établissements à caractère industriel et commercial. L'absence d'un document permettant de disposer d'une vue d'ensemble consolidée des emplois et des effectifs du ministère et de ses établissements publics caractérise sans doute aussi d'autres ministères. Deux raisons font que cette absence est particulièrement fâcheuse s'agissant du ministère de la culture.
Tout d'abord, le recours aux établissements publics y est très fréquent, et croissant. Au 30 juin 2004, le ministère compte environ 70 établissements publics nationaux, dont 22 écoles d'architecture. Le solde des créations et des suppressions d'établissements publics au cours des dix dernières années est très nettement positif, de l'ordre d'une quinzaine, dont six créations nettes, c'est-à-dire ne résultant pas de l'éclatement d'un établissement public préexistant, ou de la transformation d'un service à compétence nationale ou d'une association. Les effectifs des établissements publics dépendant du ministère de la culture sont près de quatre fois supérieurs à ceux des services centraux et déconcentrés du ministère.
De plus, les frontières entre les sous-ensembles considérés sont poreuses. Des services à compétence nationale deviennent des établissements publics : Musée d'Orsay, Château et Domaine de Versailles. Des associations deviennent des établissements, comme l'Association nationale pour les fouilles archéologiques (AFAN), devenue l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP). Des emplois inscrits au budget de l'Etat sont transférés à des établissements publics : hier le Louvre, demain la Bibliothèque nationale de France.
Pour ces deux raisons, que ce soit dans le cadre budgétaire actuel, ou dans celui de la LOLF à venir en 2006, il me semble nécessaire qu'un document synthétique, annexé à la loi de finances, fournisse la récapitulation de l'ensemble des emplois dont disposent le ministère et ses établissements publics.
Au-delà de cette question, se pose celle, certes plus essentielle, de l'adéquation des effectifs par rapport aux besoins. En termes quantitatifs, l'augmentation des effectifs du ministère et de ses établissements publics, entre 1996 et 2003, s'est élevée à 3.500 personnes environ, dont 1.430 du fait de l'intégration des agents de l'AFAN, transformés en agents de l'INRAP, et 600 du fait de la titularisation de vacataires, dans le cadre des dispositions de résorption de l'emploi précaire.
L'année 1996 est retenue comme point de départ, car c'est l'année au cours de laquelle les services et les écoles d'architecture ont été à nouveau transférés du ministère de l'équipement au ministère de la culture. De plus, les effectifs des contractuels sur crédit, qui ne sont pas individualisés en nombres dans les documents budgétaires, n'ont pas été pris en compte dans le calcul. Selon l'administration générale du ministère, ils n'auraient pratiquement pas varié au cours de la période. Cette stabilité doit être appréciée en tenant compte de la titularisation des quelque 600 vacataires que je viens d'évoquer.
Les effectifs de l'administration centrale correspondant aux emplois budgétaires sont restés stables au cours de la période. Sans les titularisations de vacataires, ils auraient certes diminué. En termes d'effectifs réels, on peut observer qu'une partie des vacataires titularisés a été remplacée par d'autres contractuels sur crédits.
Les effectifs des DRAC ont globalement progressé de 250 unités, ceux des SDAP n'ont pas varié. Les effectifs des établissements publics à caractère administratif ont augmenté d'environ 2.500 unités, dont 1.430 du seul fait de la création de l'INRAP. Ceux des EPIC ont crû d'environ 700 personnes, dont 250 pour la réunion des musées nationaux, 170 pour l'Opéra national de Paris, et 150 pour les EPIC nouvellement créés : Centre national de la danse, Centre national des variétés et du jazz, etc...
Peut-on émettre un jugement rationnel, réellement étayé, sur l'adéquation de ces effectifs par rapport aux besoins de ces différents services ? Ce n'est pas mon avis. En revanche, il est permis de faire état d'un certain nombre d'idées reçues, qui ne sont pas pour autant inexactes. J'en citerai trois.
On s'accorde généralement à considérer que les effectifs des services territorialement déconcentrés sont insuffisants, notamment ceux des DRAC, en raison du développement considérable des actions dites de « partenariat » avec les diverses collectivités territoriales et associations et des diverses mesures de déconcentration qui sont intervenues au cours des dix dernières années, qui ont créé de nombreuses tâches supplémentaires. Par ailleurs, les effectifs réels des DRAC sont très souvent inférieurs à leurs effectifs budgétaires. Pour ce qui est des SDAP, le rapport élaboré à la demande du ministère par le cabinet Deloitte & Touche a montré qu'ils ne sont pas en mesure de faire face aux tâches qui sont les leurs en l'état actuel de la réglementation.
En corollaire, on considère généralement que les effectifs de l'administration centrale sont disproportionnés par rapport aux fonctions qui leur incombent selon la charte de déconcentration de 1992 : la conception, l'animation, l'orientation, l'évaluation et le contrôle.
Enfin, l'évolution récente de la réunion des musées nationaux et sa reprise en main, montre que l'accroissement important des effectifs ces huit dernières années, soit 250 personnes, n'était pas justifié.
Les limites de cette approche sont doubles. En premier lieu, celle-ci n'est pas fondée sur une véritable analyse critique des tâches qui incombent à chaque entité. Les deux exemples qui suivent sont frappants.
La Cour a relevé que plus du tiers des agents des services centraux sont des agents d'exécution de catégorie C. Elle s'est étonnée que l'administration centrale emploie presque autant d'agents de catégorie C que l'ensemble des DRAC. Le ministère a répondu que le recentrage des services centraux sur les fonctions qui leur reviennent ne signifie pas la suppression de toute tâche d'exécution comptable et administrative. Il est clair que ce débat ne peut être tranché qu'à partir d'une analyse détaillée et critique des tâches d'exécution des services centraux.
Par ailleurs, la Cour s'est interrogée sur la procédure, apparemment lourde, de délivrance des licences de spectacle, à la charge des DRAC, et a évoqué l'éventualité d'une procédure déclarative. Le ministère a répondu que la procédure actuelle permet aux DRAC de suivre, dans leur circonscription, toutes les initiatives en matière culturelle. Ici encore, le débat ne pourra être tranché qu'à la suite d'une analyse rigoureuse, sans concession, de l'intérêt réel du maintien d'une telle procédure par rapport à son coût.
Sauf exception, il n'y a pas au ministère de la culture de réflexion approfondie sur les métiers, leur évolution, et sur les actions qu'il faudrait conduire pour améliorer, sur le plan qualitatif, l'adéquation entre les effectifs et les métiers. A ma connaissance, cette problématique n'a été qu'exceptionnellement abordée avant l'année 2000.
L'année 2000 a vu l'élaboration, sous l'égide de l'inspection générale du ministère, d'un rapport remarquable sur les problèmes communs de la gestion des ressources humaines dans les établissements publics du ministère de la culture. Les propositions de ce rapport mettaient notamment l'accent sur l'analyse des métiers et des compétences, et la déconcentration de la gestion des ressources humaines. Elles ont été examinées lors d'une réunion qui s'est tenue en septembre 2000 sous la présidence du directeur de cabinet, et qui a donné lieu à un relevé de décisions. Malheureusement, les décisions portant sur l'analyse des métiers et des emplois types, dont celle de création d'un observatoire des métiers pour leur gestion prévisionnelle, sont restées lettre morte. Plus récemment, l'élaboration du contrat d'objectif et de moyens conclu entre l'Etat et le musée du Louvre a donné lieu à une analyse de l'évolution des qualifications impliquées par les objectifs retenus. Mais cet exemple ne saurait faire illusion en matière de gestion prévisionnelle des emplois et d'optimisation du rapport entre les effectifs et les tâches à accomplir. Le ministère de la culture, comme la plupart des autres ministères, en est encore aux prolégomènes.
M. Jean Arthuis, président - Merci, Monsieur le conseiller maître. Nous allons maintenant entendre M. Henri Paul, directeur de cabinet du ministre de la culture et de la communication.
M. Henri Paul - Etant moi-même membre de la Cour des comptes, je suis quelque peu affligé du ton qu'emploie celle-ci pour exprimer ses constatations. Le ton est vigoureux, la critique parfois acerbe, mais la réalité mérite parfois davantage de nuance.
Néanmoins, il est vrai, selon moi, que les démarches du ministère de la culture et de la communication pour mieux connaître et mieux prévoir les emplois et les effectifs sont en gestation. Quelques progrès ont été accomplis, sur lesquels il convient de mettre l'accent.
Il est vrai qu'aucun document exhaustif ne fournit l'ensemble des effectifs du ministère de la culture. Ce constat est valable pour l'ensemble des ministères français.
Les documents budgétaires ont une forme bien établie. Il n'existe pas de modèle commun à tous. Il est nécessaire de disposer d'un modèle récapitulatif de l'ensemble des effectifs des emplois figurant sur les crédits de l'Etat d'une part, sur ceux des établissements publics d'autre part.
Nous pouvons aujourd'hui nous engager à le produire et vous le fournir dans les meilleurs délais. Nous avons également l'intention de le rééditer à l'avenir, car c'est un outil de pilotage fort utile.
M. Jean Arthuis, président - Il est, en effet, important que le ministre dispose des données qui lui permettent d'y voir clair.
M. Henri Paul - Le document existe. Il serait bon de pouvoir le fournir dans le cadre de la procédure budgétaire, où nous discutons des effectifs de chaque établissement public avec la direction du budget. Le pilotage existe, comme je l'ai dit au moment de la discussion du budget avec les différents établissements publics. Il existe non seulement à l'intérieur de l'administration, mais aussi au sein des ministères. Les documents existent. Cependant, la Cour a raison lorsqu'elle dit qu'il n'existe aucun document exhaustif public récapitulant l'ensemble des emplois.
M. Jean Arthuis, président - Le document interne dont vous parlez pourra être saisi par le rapporteur spécial.
M. Henri Paul - Absolument. Le document sur l'évolution de la répartition des effectifs existe. Nous pouvons le fournir à tous les rapporteurs. Il s'agit d'un outil de pilotage très utile, dont toute administration doit se doter.
Par ailleurs, il est vrai que les contrats d'objectif sont un outil de pilotage pluriannuel. Nous avons d'ailleurs l'intention de nous doter d'un outil de pilotage supplémentaire, entre le ministère et les différentes directions (incluant un engagement pluriannuel sur trois ans), car ces dernières ont besoin de savoir à quelle échéance elles seront dotées, de manière à entrer dans un processus de réforme. Le ministère de la culture, en particulier la direction de l'administration générale, a réalisé d'importants progrès en termes de pilotage et d'outils.
Le projet Rhapsodie est en cours de réalisation au ministère. Il s'agit d'un progiciel de gestion unifiée de l'ensemble des ressources humaines du ministère, consolidées avec celles des établissements publics. Ceci rejoint parfaitement, non seulement le sujet de la LOLF, mais aussi celui de la gestion administrative et la gestion prévisionnelle des emplois. Cet outil unique réunira la gestion des effectifs, la préparation de la paye, la préparation budgétaire, la gestion des chartes d'objectifs, les simulations budgétaires, les simulations démographiques, et les outils de passage aux logiciels de gestion des ressources humaines des établissements publics. Ce projet sera dans sa dernière phase lors du dernier trimestre 2004.
M. Jean Arthuis, président - Ce projet est-il financé par des crédits d'investissement ?
M. Henri Paul - Oui.
M. Jean Arthuis, président - Les régulations budgétaires gênent-elles vos investissements ?
M. Henri Paul - Grâce au gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin, le ministère de la culture a été exonéré de tout gel cette année, y compris pour les investissements informatiques.
M. Jean Arthuis, président - Bien souvent, les crédits informatiques sont touchés par les annulations de crédits.
M. Henri Paul - En ce qui nous concerne, nous avons été exonérés de tout gel.
M. Jean Arthuis, président - C'est justice, vous en aviez besoin.
M. Henri Paul - Nous en avons besoin. Nous avions malheureusement subi un gel des emplois, que nous nous sommes employés à lever. La sous-évaluation de la base des rémunérations au ministère de la culture s'explique notamment par l'application de critères ne tenant pas compte de la réalité des emplois. A ce titre, certaines critiques de la Cour des comptes ne peuvent pas bien s'adapter à notre ministère. En particulier, le nombre de corps représentés au ministère est de 50, dont nous ne gérons, en réalité, pas la totalité.
M. Jean Arthuis, président - Ce nombre élevé de corps ne crée-t-il pas des blocages ? Pouvez-vous identifier des polyvalences ?
M. Henri Paul - Tout d'abord, j'insiste sur le fait que leur nombre exact n'est que de 38. Au ministère de la culture, sont réunis beaucoup de spécialités différentes. De plus, 35 millions d'euros du budget de la recherche (BCRD) sont gérés par le ministère de la culture. Au ministère de la culture, sont présents un nombre considérable de spécialistes. Ceux-ci appartiennent souvent à des corps de petite taille.
M. Jean Arthuis, président - Vous évoquez les crédits du budget de la recherche. Pouvez-vous être plus précis ?
M. Henri Paul - Ces crédits sont présentés dans le BCRD, mais nous les gérons.
En définitive, nous sommes tout à fait d'accord pour opérer des fusions de statuts. Le ministère de la culture émane du ministère des Beaux-Arts. A l'époque de ce dernier, les fonctions de gestion du personnel étaient bien séparées entre les différentes directions du ministère (musées de France, archives, danse, théâtre, etc...), qui avaient une gestion presque autonome de leur personnel.
Le regroupement n'est pas terminé. Par exemple, je ne verrais pas d'objection à ce qu'un certain nombre de corps qui existaient au ministère soient rassemblés en un même corps. Le nombre de corps gérés, à proprement parler, par le ministère est de 38. Un certain nombre de fusions ont déjà été réalisées. Je pense qu'il est possible d'en faire davantage.
M. Jean Arthuis, président - Combien de corps d'inspection le ministère possède-t-il ?
M. Henri Paul - Il en existe de très différents. Certains ne sont pas vraiment des corps d'inspection. Par exemple, l'inspection de la danse, ou celle de la musique, consistent plutôt en l'évaluation de subventions ou de compagnies par des spécialistes. Ce n'est pas le même travail que l'inspection générale des affaires culturelles. Il y a aussi l'inspection générale de l'architecture et du patrimoine.
Au sein du ministère, sont juxtaposées de nombreuses directions très verticales, qu'il est très difficile de faire travailler entre elles. Seul le cabinet peut permettre de faire la synthèse entre les différentes missions. Il est très difficile, par exemple, de faire travailler ensemble la direction des musées de France et la réunion des musées nationaux.
Des fusions de corps ne seraient pas inutiles. La création d'un seul corps d'attachés (DRAC et central) est envisagée.
Au-delà des fusions de corps, se posent des problèmes purement financiers. La masse indemnitaire du ministère de la culture est sensiblement inférieure à celle des autres ministères, y compris à celle des ministères sociaux. Le ministère de la culture est très attractif. Le travail est intéressant, mais en contrepartie, il est mal payé.
Pour que les fusions de corps soient possibles, il est nécessaire de disposer d'une marge de manoeuvre sur le plan indemnitaire. Sans vouloir m'affranchir de certaines délibérations intervenues la semaine dernière avec le secrétaire d'Etat au budget, je peux vous assurer que le ministre de la culture a proposé à son collègue d'entrer dans cette mécanique, à condition qu'un effort soit fait en ce qui concerne les indemnités. C'est un ministère très syndicalisé. Tout mouvement relatif à la gestion de corps demande beaucoup d'efforts, et un peu d'argent.
En d'autres termes, si j'estime que les mesures de fusion de corps sont excellentes, deux petits obstacles demeurent. Premièrement, la masse indemnitaire est assez faible, malgré l'existence de responsabilités énormes dans le cadre de la décentralisation. Deuxièmement, le système de gestion des emplois a besoin d'être un peu amélioré, c'est-à-dire mieux « pyramidé » et basé sur la gestion de corps et une rémunération qui soit davantage liée au mérite, et non au statut.
Enfin, notre ministère est pilote sur le plan de l'application de la LOLF. De ce point de vue, je rends hommage à l'administration du ministère, car nous avons trouvé à notre arrivée une bonne architecture budgétaire, des missions bien dessinées, des objectifs de performance, et même une « ambiance LOLF », qui n'existe pas dans tous les ministères. Cela s'explique notamment parce que le ministère est de petite taille (1.550 agents, pour 27.000 agents en dépendant au total)
M. Jean Arthuis, président - Le tiers des agents sont de catégorie C.
M. Henri Paul - Leur proportion a baissé. Elle était de 36 % en 2001. Elle est aujourd'hui de 30 %. Il est clair qu'il serait souhaitable de la réduire encore. Néanmoins, nous poursuivons un processus d'intégration des contractuels, qui implique 200 à 280 personnes par an, ce qui est peu. Par exemple, lors d'un concours d'agent administratif en 2003, pour 15 postes offerts, il y avait 57 inscrits. Nous sommes obligés d'intégrer bon nombre de personnes en catégorie C. J'estime cependant que les effectifs sont stabilisés.
Sur le plan de la LOLF, l'architecture budgétaire me semble intelligente et satisfaisante. Une place a été ménagée pour le dialogue. Nous allons la développer. Cela conduit notamment à mieux définir le rôle du ministère de la culture dans le pays.
La procédure de délivrance des licences d'autorisation de spectacle a été évoquée précédemment. Ceci soulève la question de la place de l'intermittent. En effet, le statut d'entrepreneur de spectacle lié à l'obtention de cette licence donne le droit d'embaucher des intermittents. Je ne suis pas sûr qu'il soit opportun de proposer le passage d'un système d'autorisation préalable à un système de déclaration. Au contraire, il faut peut-être faire preuve de plus d'autorité que par le passé, être plus directif.
Ceci montre que la place du ministère est à redéfinir sur certains sujets. Le ministère doit s'orienter sur un certain nombre d'actions prioritaires. Dans le cadre de certaines d'entre elles, il nous faudra aussi savoir choisir, et exercer, nos missions et nos prérogatives.
Par conséquent, le ministère va probablement endosser une mission axée sur l'impulsion, l'initiative, l'ingénierie, et certainement l'accroissement des effectifs de catégorie A, et la réduction de la catégorie C. C'est l'avenir, et c'est ce vers quoi tend la LOLF. C'est pourquoi nous avons la ferme intention de développer une fonction de contrôle de gestion très puissante. Il nous faut trouver les moyens de mener à bien cette mission.
M. Jean Arthuis, président - Cela signifie-t-il que vous ne contestez pas vraiment les observations de la Cour des comptes ?
M. Henri Paul - Non. Je cherche à les nuancer. Dans certains cas, nous pouvons apporter des réponses à la Cour. Je peux prendre l'engagement de fournir le document demandé par la Cour. Concernant les créations d'établissements publics nouveaux, le ministre a déjà annoncé aux syndicats qu'elles ne pourraient avoir lieu que lorsqu'elles sont réellement utiles.
La Cour a toujours dénoncé l'Association nationale pour les fouilles archéologiques, comme une gigantesque gestion de fait. Désormais, elle est transformée en établissement public. La Cour devrait s'en réjouir, et non nous blâmer.
Dans d'autres cas, comme à Versailles, il est également utile de créer un établissement public, car ce dernier peut alors se livrer à de nombreuses activités impossibles dans le cadre d'un service à compétence nationale. De même, une audition du président-directeur du Louvre ou du président-directeur du musée d'Orsay vous montrerait que la demande de créations d'établissements publics, et les réalisations du nouvel établissement public du Louvre et celles du nouvel établissement public d'Orsay, sont sans commune mesure avec les moyens dont ils bénéficiaient précédemment.
M. Jean Arthuis, président - Tous ces établissements publics vous rendent-ils compte de leur gestion d'une façon suffisamment claire ?
M. Henri Paul - D'autant plus que nous leur accordons des crédits ! Ils ont donc intérêt à être sincères. S'ils ne le sont pas, nous aurons les moyens d'auditer les résultats de leur gestion. Par ailleurs, lorsqu'il s'agit de recevoir du public, il est important de parler de fréquentation. S'agissant du Louvre, elle est en excellent état et progresse considérablement. S'agissant de Versailles, je pense que le résultat sera le même une fois que le Grand Versailles sera en place. Si certains élus locaux nous demandent la création d'établissements publics pour s'occuper de leurs musées, c'est bien qu'ils espèrent un bénéfice.
M. Jean Arthuis, président - Madame Marigeaud a-t-elle des observations quant à la gestion des ressources humaines ? Depuis quand êtes-vous directrice Madame ?
Mme Martine Marigeaud - Depuis le 14 janvier de cette année.
M. Jean Arthuis, président - Avez-vous trouvé la situation préoccupante lorsque vous avez pris vos fonctions ?
Mme Martine Marigeaud - La situation est certes marquée par des faiblesses, mais aussi par de nombreuses forces positives. Nous avons initié un certain nombre de chantiers. Certains étaient déjà en germe, notamment celui de la typologie des métiers, sur la base d'une étude de l'Ecole des mines. Dès 2005, tous les métiers du ministère de la culture y seront détaillés, ce qui nous permettra d'élaborer des profils et des fiches, et donc de commencer notre gestion prévisionnelle des ressources humaines. Nous avons annoncé un audit de la fonction des personnels du ministère, en liaison avec les objectifs définis par la LOLF. De plus, un autre audit nous aide actuellement à mettre en place notre cahier des charges.
La répartition des tâches, les différents liens avec la DAG et la gestion des DRAC ont aussi été analysés. La LOLF nous fait sentir le besoin de nouvelles fonctions. En particulier, je tiens à souligner le travail accompli par la petite équipe qui a été constituée par mon prédécesseur en matière de contrôle de gestion. L'administration centrale possède désormais cinq contrôleurs de gestion, quasiment professionnels, et nous mettons en place un contrôleur de gestion dans chaque DRAC. Des tableaux de bord sont en cours d'élaboration.
M. Guy Mayaud - J'ai cité la titularisation des agents intervenue dans le cadre de l'INRAP, précisément pour modérer l'opinion que l'on pourrait avoir devant la progression des effectifs. J'estime qu'une progression de 3.500 agents sur huit ans n'a rien d'extravagant. En effet, 1.400 ont trait à la création de l'INRAP, et 600 ont été titularisés dans le cadre du dispositif de résorption de l'emploi précaire.
Par ailleurs, le problème des corps est très compliqué. Il est vrai que le ministère a fait des progrès, notamment pour ce qui est de la fusion des corps administratifs, dans l'administration centrale ou dans les services déconcentrés. Toutefois, l'exercice a ses limites. Cela renforce l'approche que je préconisais tout à l'heure, c'est-à-dire de parler « métier ». Les conventions collectives de l'audiovisuel public sont au moins aussi contraignantes que les dispositions du statut général de la fonction publique. L'approche par les métiers est l'un des moyens de contourner les rigidités qui sont inhérentes aux corps de fonctionnaires et aux statuts d'emplois des contractuels.
Enfin, en matière de LOLF, le ministère de la culture est exemplaire. Il est vrai qu'il est certainement confronté à moins de difficultés que ne peut l'être le ministère de l'éducation nationale. Il n'en reste pas moins que son approche et sa gestion du problème ont été exemplaires.
M. Yann Gaillard, rapporteur spécial - Il est important que la Cour recadre l'ensemble des problèmes, même si c'est avec sévérité, et même si la difficulté du ministère de la culture à entrer dans des cadres prédéfinis peut s'expliquer. Le principal problème du ministère est qu'il est de petite taille et qu'il est donc difficile d'établir des règles générales. De plus, il recouvre une très grande variété d'activités : patrimoine, spectacle vivant, audiovisuel...
En d'autres termes, le fait pour la Cour des comptes de s'interroger sur l'adéquation générale des effectifs par rapport aux missions a trait à l'absence dans le ministère de « missions générales ». Les missions sont très éparpillées, très diverses, posant chacune des problèmes particuliers, et accaparant de façon « exclusive » l'attention du ministre et de ses collaborateurs, ce qui empêche peut-être un certain nombre de réformes de long terme. On notera notamment qu'une année entière a été consacrée au problème des intermittents, sans que le problème ne soit réglé. De même, le débat que nous avons en ce moment sur l'archéologie préventive montre bien qu'il n'y a pas de solution miracle, puisqu'elle n'a pas encore été trouvée.
Le ministère de la culture a un certain nombre d'excuses au fait de ne pas donner l'image d'une gestion carrée, correspondant à une rationalité totale. En effet, par essence, son domaine de compétence est quelque peu irrationnel. Le ministère a affaire à des populations très diverses, très difficiles à gérer, et très peu motivées par les questions budgétaires.
Par ailleurs, il est vrai que le ministère de la culture a très bien joué le jeu de la LOLF. Nous l'avons souligné dans nos derniers rapports budgétaires, notamment parce qu'un chef de mission remarquable s'est attaqué au problème.
Concernant le problème global de la gestion des effectifs, je trouve gênant que le ministère ait tendance à se fragmenter de plus en plus : il se balkanise, il crée de plus en plus d'établissements publics.
J'ai eu l'occasion de réaliser plusieurs audits dans le cadre de mes fonctions à l'inspection des finances. Or les conclusions, même bonnes, auxquelles ces audits arrivent ne sont pas toujours suivies d'effet. Par exemple, il a longtemps semblé préférable de ne pas accorder l'autonomie aux grands musées. Finalement, une nouvelle mission d'inspection a récemment conclu le contraire. Il n'y a pas de vérité absolue, même si, à titre personnel, je reste convaincu qu'il existe une tendance abusive à créer des établissements publics, administratifs ou autres. Par ailleurs, la condamnation à mort de la Réunion des musées nationaux (RMN) est déjà programmée, dès lors que le Louvre, Orsay ou d'autres deviennent des établissements publics. Cela posera un problème dramatique pour trouver un grand lieu d'exposition à Paris. La volonté des directeurs de musées comme le Louvre est de réaliser des expositions sui generis, avec leur catalogue et leur propre lieu d'exposition. Les expositions ont souvent l'inconvénient d'être très difficilement repérables. Cette tendance ne paraît pas satisfaisante, mais elle est très difficile à combattre.
Par ailleurs, je suis d'accord avec la Cour sur le fait que les corps sont trop nombreux. Cela s'explique certes par la présence de nombreuses spécialités différentes. Il faut cependant faire un effort pour mieux les rassembler. De plus, les rapports entre le ministère et ses services extérieurs ne sont pas complètement dominés. Il semble que le pilotage des DRAC ne soit pas suffisant. J'ai l'impression que la situation est de plus en plus différente d'une DRAC à l'autre. Je me suis beaucoup battu, dans le cadre d'un rapport sur le patrimoine, pour arriver à rassembler dans le cadre de la CRMH l'ensemble des fonctions patrimoniales (y compris l'archéologie), mais cela prend plus de temps que prévu.
Les agents de catégorie C sont, quant à eux, trop nombreux. Le problème des vacataires n'est jamais résolu. Au fur et à mesure qu'ils sont intégrés, d'autres sont recrutés. C'est très difficile à contrôler. Cela devrait être un souci permanent pour la direction générale de l'administration du ministère.
Aujourd'hui, les gestionnaires du ministère peuvent constater que l'oeil de la Cour est implacable. Nous allons essayer, modestement, de tirer profit des remarques de la Cour. Je mène, par ailleurs, une mission de contrôle préventive sur l'archéologie, avec l'assistance d'un magistrat de la Cour des comptes dans le cadre de la nouvelle procédure prévue par l'article 58-1 de la LOLF. Sa collaboration sera précieuse, notamment lors du quatrième temps de cette mission relatif aux personnels de l'Institut national des recherches archéologiques préventives.
M. Philippe Marini, rapporteur général - Dans le cadre du projet de loi pour le soutien à la consommation et à l'investissement, un amendement a été adopté par l'Assemblée nationale afin de réformer la redevance d'archéologie préventive.
Je suis particulièrement mécontent du mode de travail du gouvernement sur cette affaire. Ce soir, nous n'avons aucune connaissance précise des objections des administrations et des ministères, sur un dispositif voté par l'Assemblée nationale, et voté par notre commission des finances il y a près d'une semaine. Je ne sais pas quels sont les amendements qui vont nous parvenir. Je ne serai pas en mesure de les expertiser, et de ce fait, je ne donnerai aucun avis.
La semaine dernière, la commission des finances a consacré un long moment à traiter de ce sujet, en s'efforçant de trouver une base de calcul de la redevance d'archéologie préventive qui soit compréhensible. On ne cesse de tenir des réunions interministérielles, dont les résultats, variables, s'effilochent au fil des jours. Des éléments nouveaux apparaissent. Quatre ou cinq amendements pourraient ainsi être présentés par le gouvernement, sur lesquels il sera impossible de donner quelque avis que ce soit. Pourtant, le problème n'est pas nouveau. Les administrations auraient certainement pu s'en saisir plus tôt, et trouver des modalités d'examen qui soient plus satisfaisantes pour le Parlement.
M. Jean Arthuis, président - Je ne peux que m'associer à l'expression de ce mécontentement.
M. Henri Paul - Je n'ai pas de commentaire à donner sur ce sujet, car le ministère de la culture n'est pas pilote du texte, ni même du dépôt des amendements.
M. Yann Gaillard - Une grande opération d'audit de la redevance d'archéologie préventive devait être confiée à un organisme privé. Nous avons tous été pris de court par l'amendement adopté par l'Assemblée nationale.
M. Henri Paul - Nous avons été surpris par les amendements de l'Assemblée nationale. Ensuite, le Sénat s'est, lui aussi, saisi du dossier. Le ministère de la culture se trouve ballotté, au gré d'arbitrages qui ne dépendent pas que de lui, malheureusement.
M. Jean Arthuis, président - Monsieur le directeur, nous sommes devant un problème qui donne de votre ministère une image assez désastreuse. Les acteurs de terrain expriment protestation et incompréhension. S'il faut juger le ministère de la culture en fonction de sa capacité à trouver un système de redevance explicable et justifiable, alors son image est désastreuse.
M. Henri Paul - Comme vous le savez, nous ne sommes pas à l'origine du texte que nous appliquons aujourd'hui. C'est le troisième texte en trois ans sur le sujet. Pour le moment, les amendements ne peuvent pas être expertisés. Le ministère de la culture est totalement d'accord avec les critiques des parlementaires.
M. Jean Arthuis, président - Nous n'apprendrons rien de nouveau à cet égard. Revenons aux questions de M. Yann Gaillard.
M. Henri Paul - Cette année, j'assiste à la naissance de trois établissements publics. A mon arrivée, c'était celle du Jeu de Paume, qui a pour avantage de créer un établissement public à partir de trois organismes qui préexistaient. De plus, celui-ci est situé à Paris. Il est en charge de l'exposition de la photographie.
L'établissement public de la cité de l'architecture, dont le décret de création a été publié il y a peu, constitue un second exemple. Ici encore, un seul établissement public remplace trois unités. Parfois, l'établissement public est un moyen de se recentrer sur une mission principale.
Enfin, l'Opéra comique est aujourd'hui un orphelin de l'Opéra de Paris. Doit-il garder la forme d'une association loi de 1901, tout en étant subventionné par le ministère, et en ayant en réalité une activité de théâtre bien connue ? Peut-être est-il préférable pour lui de devenir un établissement public.
Par ailleurs, le trop grand nombre de corps a été évoqué. Or il y en avait cent, il y a quinze ans, et ils ne sont plus qu'une trentaine aujourd'hui. Le ministère est tout à fait d'accord pour aller plus loin. Des mesures d'accompagnement, notamment indemnitaire, doivent, elles aussi, être prévues.
Le rapport entre le ministère et ses directions régionales est un vrai sujet. Des orientations sont données aux directions régionales, peut-être trop générales. De plus, une directive nationale d'orientation est écrite chaque année par le ministre. Elle fera l'objet d'une évaluation de l'inspection générale du ministère des affaires culturelles. Nous pourrons alors vous donner un avis plus précis sur cet outil.
Par ailleurs, dans le cadre de la réforme de l'Etat, nous créons auprès des préfets de régions des pôles « culture », dont les directeurs des affaires culturelles seront les pilotes. De ce point de vue, le ministère de la culture sera en avance, car il a la chance d'avoir très peu de services départementaux. Autour de ces pôles « culture », il faudra mieux distinguer les missions et les adapter à chaque région.
Enfin, je tiens à rassurer le rapporteur spécial sur la RMN, et sur les galeries nationales du Grand Palais. Non seulement ces dernières ne fermeront pas, mais quel que soit le sort du Grand Palais, le ministre, M. Renaud Donnedieu de Vabres, a bien marqué son intention de garder ce lieu d'exposition unique. Tout récemment, j'ai présidé une réunion qui permet d'associer les grands musées, notamment les grands établissements publics, au programme d'exposition du Grand Palais. La RMN a confié à M. Guy Cogeval, le directeur du musée des Beaux-Arts de Montréal, une opération de programmation des galeries du Grand Palais, qui sera réalisée en concertation avec l'ensemble des présidents des grands établissements. A l'automne, nous serons à même de décider d'une politique de programmation pluriannuelle, avec l'ensemble des grands établissements, y compris Versailles, le centre Pompidou et le Musée d'Orsay.
M. Philippe Marini, rapporteur général - Cette audition a permis d'aborder beaucoup de questions. Toutefois, je souhaite savoir si vous disposez d'éléments prospectifs sur l'évolution des effectifs de l'administration centrale. Je suis assez surpris de constater la proportion des agents de catégorie C en administration centrale. Quelle est la vision de l'évolution pluriannuelle qu'a le ministère des effectifs de l'administration centrale alors que de nombreuses activités culturelles sont désormais entrées dans l'orbite des collectivités territoriales. Les fonctions d'impulsion que doit remplir le ministère de la culture ne nécessitent sans doute plus 1.500 personnes.
M. Henri Paul - Le nombre de fonctionnaires de catégorie C est passé de 36 % en 2001 à 30 % en 2004. Nous souhaitons que l'administration centrale n'augmente pas cette proportion. Si nous en avions la possibilité au prochain budget, nous ne proposerions pas de création de poste nouveau, ni de suppression. Nous sommes d'accord avec l'idée que le ministère soit en charge de l'impulsion et de l'ingénierie, mais nous rencontrons quelques difficultés. La fusion des corps des agents et des adjoints implique un certain coût, et nous sommes aussi sensibles aux besoins de recrutements liés aux contractuels qui travaillent au ministère depuis très longtemps, et doivent bénéficier des effets de la loi Sapin.
M. Jean Arthuis, président - Vous avez 27.000 agents environ aujourd'hui. Pour 2005, la commission des finances attend un nombre significatif de suppressions de postes.
M. Henri Paul - Quelques établissements publics auront besoin de créations de postes, en particulier celui du Quai Branly, qui n'est pas encore en fonction aujourd'hui.
M. Jean Arthuis, président - Les suppressions de postes sont nécessaires, car en tenant compte du rôle d'impulsion joué par les DRAC, qui suscitent le développement d'associations départementales pour la promotion de la musique par exemple, le ministère de la culture a contribué à créer de nombreux emplois, largement pris en charge par les collectivités territoriales.
M. Aymeri de Montesquiou - Tout d'abord, il faut constater que tous les pays n'ont pas forcément de ministère de la culture.
Mon analyse est quelque peu contrastée. J'ai été vraiment séduit, presque impressionné, lorsque le précédent ministre, M. Aillagon, est venu présenter son budget. Il l'a fait d'une manière très bien étayée. Le ton de M. Guy Mayaud n'est pas vindicatif, et ses arguments sont tout à fait convaincants.
Je m'inquiète de l'absence de suites données au rapport prévoyant la mise en place d'un observatoire des métiers du ministère de la culture. Il ne faudrait pas s'abriter derrière la trop grande complexité du ministère. Le ministère de l'agriculture, par exemple, est tout aussi complexe.
Ne pourrait-on pas proposer une organisation type, au lieu d'essayer de trouver des adéquations ? Il faut établir un organigramme puis organiser le ministère en fonction de cet organigramme-type.
De plus, je me suis aussi inquiété d'entendre que les contrôleurs de gestion étaient « quasi professionnels »..., j'aurais souhaité qu'ils le soient totalement.
M. Guy Mayaud - Concernant la question de la spécificité du ministère de la culture, je suis frappé de constater que le regroupement prévu par la LOLF de l'ensemble des activités en trois programmes n'a rien d'artificiel. Il semble couler de source. Le programme patrimoine comporte notamment les monuments nationaux et les archives, les deux autres programmes étant le développement culturel, et les actions de formation et d'enseignement. Cela n'a rien d'artificiel. La dynamique de la LOLF peut entraîner des rationalisations dans ce domaine.
M. Henri Paul - Je précise à Monsieur de Montesquiou qu'il n'y a qu'un seul corps pour les conservateurs, mais qu'il y a des spécialités à l'intérieur du corps des conservateurs. La création de l'Ecole du patrimoine a permis de progresser vers ce type de fusion. Cependant, nous partons de très loin : cent corps il y a quinze ans, trente aujourd'hui. Il faudra aller plus loin. Cela concerne notamment les attachés, et bien sûr les effectifs de catégorie C. Nous avons déjà bien avancé.
M. Jean Arthuis, président - Il ne faut pas hésiter à prendre appui sur des professionnels de gestion pour éclairer les gens de culture, et rendre possibles tous leurs souhaits.
Je remercie la Cour, le cabinet du ministre et la direction de l'administration centrale. Le ministère de la culture n'est pas comme les autres. Il y aurait sans doute beaucoup à dire sur l'organisation des DRAC et leur fonctionnement, et sur la difficulté qu'elles peuvent parfois éprouver à disposer de crédits à la hauteur des espérances qu'elles ont fait naître chez leurs partenaires locaux.
M. Yann Gaillard - Beaucoup de tâches sont reprises, ou peuvent être reprises, par les collectivités locales. Cependant, je suis sénateur, et je ne veux pas contribuer à un transfert de charges indésirable...
M. Jean Arthuis, président - Sur le plan des principes constitutionnels, il n'y a rien à redouter. La compensation se fait sur la base d'une stricte équivalence. La proximité est un gage d'efficacité, sous le contrôle du ministère. J'estime que M. le directeur de cabinet a beaucoup de chance : l'analyse de la situation du ministère par la Cour des comptes, qui pourrait être préoccupante, lui donne l'opportunité de démontrer la capacité d'un haut magistrat opérationnel de donner corps aux recommandations de la Cour. En effet, il n'y a pas de contestation en ce qui concerne les observations des magistrats. J'en remercie particulièrement M. Mayaud.
La Commission est favorable à l'unanimité à la publication du rapport.