C. LA GESTION DES CRÉDITS ET LES RÉMUNÉRATIONS
1. Les retards de recrutement et les virements des crédits de personnel non utilisés
On constate, pendant la période 1996-2001, d'importantes disponibilités de crédits en 1 ère section (personnel) du budget des EPST, en particulier dans les trois plus grands d'entre eux : CNRS, INRA, INSERM. Cette sous-consommation des crédits de personnel résulte principalement de l'organisation tardive des concours de recrutement des personnels ITA qui entraîne des vacances d'emploi (1100 au CNRS, 400 à l'INRA à fin 2000) ou des recrutements en fin d'année alors que les emplois sont financés en année pleine.
Ce retard dans les recrutements de personnels se traduit, également, par une baisse des effectifs réels des EPST (hors LCPC), en équivalent temps plein (ETP), de plus de 3 % sur la période, le taux d'occupation des postes passant de près de 98 % en 1996 à 95 % à fin 2000. Cette évolution est d'ailleurs inverse de celle des effectifs budgétaires qui ont crû de 1,1 % sur cinq ans (hors LCPC), ce taux recouvrant une période de diminution et de gels d'emplois puis, à partir de 1998, une reprise des créations d'emplois.
En revanche, la Cour a constaté que le taux de consommation des crédits de personnel affiché en fin d'exercice dans les comptes financiers était élevé, puisqu'il se situe en moyenne entre 96 % et 99 % (sauf au LCPC). En réalité, ces taux de consommation seraient inférieurs si, en fin d'année, des virements de crédits n'avaient été autorisés par décision budgétaire modificative de la 1 ère section à la 3 ème section du budget. En effet, les reports de crédits non consommés de première section n'étant pas autorisés, des virements sont opérés, avec l'accord des autorités de tutelle, de la 1 ère à la 3 ème section.
Cette pratique revient, en fait, à reporter des crédits de personnel au profit d'autres dépenses (en général, des dépenses d'informatique ou immobilières) 24 ( * ) .
Cette situation a commencé à se résorber en 2001 à la suite des efforts accomplis en fin d'année pour améliorer les recrutements. Par ailleurs la direction du budget déclare porter désormais une plus grande attention à l'évaluation des crédits de personnel dans les EPST.
2. La rémunération des personnels dirigeants (président, directeur général, secrétaire général, directeurs...)
Il n'existe pas actuellement de statut pour les personnels dirigeants des EPST : présidents d'établissements ou de conseils d'administration, directeurs généraux et secrétaires généraux. Un décret serait en préparation depuis plusieurs années, mais n'a toujours pas abouti.
En l'absence de statut, chaque nouvelle nomination d'un président, d'un directeur général ou d'un secrétaire général donne lieu, avec la direction du budget, à des négociations qui aboutissent fréquemment au versement d'indemnités spécifiques à titre personnel. Les conditions accordées à chaque responsable nommé s'efforcent de tenir compte de l'importance de ses responsabilités liées à la fois à la taille de l'établissement et aux particularités de répartition des pouvoirs prévues par les statuts (parfois amendées par la pratique), mais également des conditions de rémunération et du parcours antérieurs des intéressés.
L'incertitude et les écarts de rémunération ou d'indemnisation sont particulièrement importants pour les présidents 25 ( * ) . Ces différences de traitement résultent de rôles statutaires différents, mais aussi de pratiques acceptées par la direction du budget.
Ainsi l'absence de statut des personnels de direction des EPST amène à traiter au cas par cas les nominations et à adopter des solutions caractérisées par une grande diversité dépourvue de fondements juridiques explicites.
S'il apparaît difficile et même peu souhaitable, compte tenu de la diversité de la taille, des statuts et des responsabilités des différents responsables des EPST, de prévoir un régime indemnitaire unique, il serait néanmoins souhaitable de prévoir quelques principes généraux encadrant les décisions individuelles.
3. Les rémunérations complémentaires fonctionnelles : l'indemnité pour fonction d'intérêt collectif
Les EPST ont la possibilité de verser une indemnité pour fonction d'intérêt collectif aux personnels exerçant des responsabilités particulières de direction, de coordination ou d'animation dans le domaine de la recherche.
Cette indemnité est instituée dans chaque établissement par un décret spécifique. Chaque décret renvoie à un arrêté conjoint des ministres de tutelle, du ministre chargé du budget et du ministre chargé de la fonction publique, la détermination de la liste des fonctions ouvrant droit à l'indemnité et les taux maxima d'attribution de cette indemnité. Les décisions individuelles d'attribution de même que les montants individuels sont arrêtés par les directeurs généraux des établissements.
Mais le nombre d'indemnités autorisées est toujours nettement inférieur au nombre de fonctions de responsabilité. Il en résulte qu'il est fréquemment impossible dans les EPST de donner une contrepartie financière à l'exercice de responsabilités. C'est notamment le cas d'une grande partie des scientifiques qui assurent la fonction essentielle de direction d'une unité de recherche.
4. Les primes de recherche
Les principales primes dont peuvent bénéficier les personnels des ESPST sont la prime de recherche pour les chercheurs et la prime de participation à la recherche scientifique pour les ingénieurs et techniciens. Ces catégories de personnels qui, depuis la mise en extinction des corps d'administration de la recherche, constituent la presque totalité du personnel titulaire des EPST, ne peuvent pas bénéficier d'indemnités pour travaux supplémentaires.
a) La prime de recherche
La prime de recherche a été créée par le décret n° 57-759 du 6 juillet 1957, instituant un fonds de participation à la recherche scientifique, « en vue d'encourager et de récompenser les travaux de recherche scientifique qui encourent à l'avancement de la science » .
Le taux de la prime de recherche, versée aux chercheurs des EPST, est fixé par arrêté du ministre chargé du budget et du ministre chargé de la fonction publique. Il est indexé sur la valeur du point indiciaire de la fonction publique. L'arrêté du 30 novembre 1990 avait fixé le taux annuel de cette prime à 4 915 F. Il a été revalorisé à 912,65 € en 2003.
Bien que le décret du 6 juillet 1957 soit muet sur ce point, la prime de recherche n'est en pratique jamais modulée entre les chercheurs d'un même grade qui reçoivent donc tous le même montant. En revanche, si certains établissements comme le CEMAGREF versent le même montant aux chercheurs des différents corps et grades, d'autres comme le CNRS modulent la prime entre les catégories selon des modalités variables. Ainsi certains établissements (INRA) modulent de manière inverse par rapport au grade (les chargés de recherche touchent des montants supérieurs à ceux des directeurs de recherche).
b) Prime de participation à la recherche scientifique
La prime de participation à la recherche scientifique peut être attribuée, par décision du directeur général de chaque établissement, aux fonctionnaires des corps d'ingénieurs et de personnels techniques des EPST qui participent à des travaux de recherche, à la conception ou à la mise au point de techniques scientifiques nouvelles ou à des activités de soutien de la recherche (cf. décret n° 2002-69 du 15 janvier 2002 fixant le régime de la prime de participation à la recherche scientifique dans certains établissements à caractère scientifique et technologique).
Le taux moyen de la prime est fixé par arrêté interministériel (recherche, fonction publique, budget) en pourcentage d'un indice de référence : 16 % pour les ingénieurs de recherche, 12 % pour les ingénieurs d'études et 8 % pour les assistants ingénieurs, les techniciens de la recherche et les autres catégories de personnel technique. Les attributions individuelles ne peuvent excéder le double du taux moyen et le triple exceptionnellement pour 20 % au maximum de l'effectif.
Les différents textes précisent que la PPRS est, par nature, variable et personnelle et est fixée, annuellement, par le directeur général de chaque établissement en fonction de la contribution apportée par chaque agent. En réalité ces principes ne sont le plus souvent pas respectés. La PPRS est dans la plupart des établissements versée à l'ensemble des agents des corps concernés dans des conditions de modulations individuelles réduites, voire très réduites, 26 ( * ) .
La Cour relève le caractère largement automatique, indépendamment d'une prise en compte des contributions et performance des personnels, des attributions des primes de recherche et de participation à la recherche scientifique.
Elle considère que l'ensemble du dispositif indemnitaire des personnels des EPST mérite d'être réexaminé à la fois du point de vue réglementaire comme des pratiques mises en oeuvre par les établissements.
* 24 Par exemple en 1998 : le transfert, en cours d'exercice, de 92 MF constaté au CNRS, résulte d'économies réalisées sur la masse salariale des personnels affectés aux grands équipements du fait de l'arrêt du programme SATURNE et du gel de celui de SOLEIL. l'IRD a été autorisé à reporter 321 KF de crédits de 1 ère section en 3 ème section pour l'exécution d'un programme scientifique.
* 25 Elles varient, en 2000, d'une absence totale d'indemnités spécifiques dans plusieurs EPST à un traitement de 101 379 € dans le cas de l'IRD et de 110 188 € à l'INRIA (où le président est également directeur général).
* 26 A l'INRA, sauf sujétion spéciale, tous les agents d'un même grade et d'un même échelon perçoivent le même montant de PPRS. Les responsables d'unités ou de services ne sont donc pas invités à proposer des modulations individuelles.