d) Une discrimination Nord-Nord tout aussi importante
Votre groupe de travail souhaite ici indiquer que si la problématique des délocalisations dans les industries de main d'oeuvre conduit à privilégier une analyse comparant les avantages respectifs des pays industrialisés et des pays émergents au regard de ces critères de coûts, la réalité actuelle de la mondialisation est toujours très largement, et pour longtemps encore, dominée par les mouvements de capitaux réalisés entre les pays du Nord . On rappellera ainsi, à titre d'exemples, que sur la période 2001-2003, les investissements directs (IDE) aux Etats-Unis ont, à eux seuls, représenté trois fois les IDE en Chine et qu'en 2002, ce dernier pays et le nôtre ont bénéficié du même montant d'IDE entrants (56 milliards d'euros contre 54,7).
Dans ce contexte, si l'on raisonne de manière globale, le coût du travail, la productivité, les charges fiscales, les frais d'installation et les coûts de production ont aussi une importance considérable dans les choix de localisation entre différents Etats industriels . Ceux-ci, d'ailleurs, définissent chacun des stratégies publiques visant à favoriser l'accueil des IDE, au même titre que les pays émergents. Au-delà des mesures fiscales, sociales ou destinées à améliorer les infrastructures territoriales décidées au plan national ou local, ils confient à des structures ad hoc le soin de réaliser un véritable marketing territorial pour « vendre » aux investisseurs étrangers le site national : tel est en France, par exemple, le rôle de l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII). La politique d'attractivité du territoire engagée par le Gouvernement est donc essentielle : si nulle augmentation de la durée globale du travail ou diminution des charges sociales ne serait à l'évidence suffisante pour rendre comparables les niveaux français et chinois dans ces domaines, de telles inflexions s'avèrent en revanche indispensables dans le cadre de la concurrence territoriale s'exerçant entre notre pays et les autres nations développées .
Cette importance de l'attractivité différentielle entre les pays développés est au reste démontrée par une étude comparative publiée le 10 mars 2004 par le cabinet KPMG (70 ( * )). Etablie à partir de 27 éléments de coûts sensibles à l'emplacement pour 17 secteurs d'activité et types d'entreprises dans 121 villes couvrant 11 pays industrialisés, ce qui représente plus de 30.000 points de données comparés sur une période de dix ans, cette analyse établit un classement des nations observées en termes d'attractivité. En tête de celui-ci figurent le Canada et l'Australie, qui ont des coûts globaux des entreprises inférieurs respectivement de 9 % et de 8,5 % à ceux des Etats-Unis, lesquels constituent l'étalon de référence. Viennent ensuite la Grande-Bretagne (- 2,4 %), puis un groupe formé par l'Italie (- 1,3 %), la France et le Luxembourg (- 0,9 %). Alors que l'Islande et les Pays-Bas ont des structures de coûts un peu supérieures à celle des Etats-Unis (respectivement + 3,3 % et + 4,0 %), l'Allemagne (+ 13,9 %) et surtout le Japon (+ 23,8 %) se caractérisent par un différentiel de compétitivité très important. Ce classement synthétique est complété par des analyses sectorielles très détaillées constituant la matière de l'étude de KPMG, qui observe que, parmi les pays de la zone euro, la France a enregistré la meilleure amélioration en termes de compétitivité des coûts, en raison principalement d'une modération des coûts de la main d'oeuvre et des avantages sociaux. |
* (70) Choix concurrentiels. Guide à l'intention des PDG sur les coûts des entreprises à l'échelle internationale - KPMG - 2004.