CHAPITRE I :

LES GRANDS TRAITS DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN EUROPE ET DE LEUR ÉVOLUTION AU COURS DE LA DERNIÈRE DÉCENNIE

La situation des prélèvements obligatoires en Europe offre un panorama contrasté avec une grande variété des niveaux et des structures de prélèvements .

Dans l'ensemble, les pays européens , qui ont connu ne moyenne un alourdissement du poids des prélèvements, se sont toutefois un peu rapprochés les uns des autres dans les années 1990. Cette convergence, qui reste très limitée, apparaît d'abord comme le résultat d'un rattrapage des pays initialement les moins développés et des nécessités de la réduction des déficits publics , mais peut également être attribuée aux pressions liées à des phénomènes de concurrence fiscale.

Mais, il faut, en préambule de ce rapport, insister à nouveau sur les problèmes de méthode que pose le concept de prélèvements obligatoires. Ces problèmes, qui sont signalés depuis des années, sont récurrents, et on peut regretter que peu de progrès aient été réalisés pour les résoudre. Le niveau et le taux des prélèvements obligatoires occupent pourtant une place très importante dans le débat public et les comparaisons internationales foisonnent avec des enjeux d'image importants. L'encadré ci-après ne mentionne que quelques unes des difficultés que pose un indicateur auquel il apparaît essentiel d'apporter une plus grande robustesse.


PRÉCISIONS DE MÉTHODE

Les données présentées dans ce rapport sont essentiellement issues des Statistiques des recettes publiques de l'OCDE. Sous le terme de « prélèvements obligatoires », l'OCDE regroupe en principe l'ensemble des versements obligatoires ( y compris cotisations sociales) effectués sans contrepartie au profit des administrations publiques .

Les administrations publiques comprennent les autorités supranationales (institutions de l'Union européenne), les administrations centrales, régionales et locales, les entités publiques autonomes (églises dans certains pays), à l'exception des entreprises publiques, et les organismes de Sécurité sociale. Un certain flou existe quant à l'appartenance aux secteurs des administrations publiques de certains organismes d'assurance maladie ou d'assurance retraite. Les mutuelles ne font pas partie des administrations publiques (dans la mesure où l'adhésion y est facultative). Les fonds de pension par capitalisation n'y figurent pas, sauf dans certains pays où ils sont obligatoires et socialement contrôlés (Finlande, par exemple). Les régimes obligatoires y figurent, même s'ils sont juridiquement gérés par le secteur privé (pour la France, Unedic, Arrco, Agirc).

L'expression de « sans contrepartie » exclut en principe les versements qui ouvrent des droits à des prestations proportionnelles aux versements. C'est ainsi que ne sont pas considérées comme prélèvement obligatoire certaines taxes qui sont le paiement d'un service rendu (passeports, redevance radio-télévision, amendes, etc.). Par contre, en dérogation à ce principe, sont comptabilisées dans les prélèvements obligatoires toutes les cotisations obligatoires, même si elles donnent droit à des prestations plus ou moins directement liées aux cotisations versées (en matière de retraite ou de chômage).

Les cotisations volontaires sont exclues des prélèvements obligatoires de même que les cotisations obligatoires mais versées à des organismes extérieurs au secteur des administrations publiques (dans les pays où les salariés sont obligés de s'assurer, mais peuvent le faire auprès de leurs entreprises ou d'une assurance privée). Enfin, les cotisations fictives ne sont pas comptabilisées dans les prélèvements obligatoires : la création d'une caisse de retraite pour les fonctionnaires augmente donc le taux de prélèvement obligatoire.

Les données de l'OCDE sont comptabilisées sur la base des versements effectivement reçus par les administrations. Elles tiennent donc compte des dispositions fiscales particulières : crédit d'impôts, avoir fiscal, par exemple. De façon générale, les recettes sont nettes des dépenses fiscales. Le taux de prélèvement obligatoire est donc plus faible pour les pays qui offrent des ristournes de cotisations sociales au lieu de subventions à l'emploi, des crédits d'impôt aux familles plutôt que des prestations familiales, des primes à l'emploi plutôt des subventions aux travailleurs peu qualifiés, des ristournes à l'impôt sur les sociétés plutôt que des subventions à l'investissement, etc. De même, ce taux est fictivement plus faible dans les pays qui exonèrent les retraites et les chômeurs de cotisations ou d'impôt, mais qui tiennent compte de cette exonération dans le calcul des prestations.


Au terme de la décennie 1990, la France, qui connaissait initialement un très haut niveau de prélèvements obligatoires, a augmenté le poids de ses prélèvements obligatoires, ce qui la place en mauvaise posture pour affronter une concurrence fiscale qui pourrait s'accentuer et nuit à ses performances économiques.

I. LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN EUROPE AUGMENTENT, MAIS AVEC DE FORTES DISPARITÉS ENTRE PAYS


A. GLOBALEMENT, UNE AUGMENTATION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES

En Europe, le poids des prélèvements obligatoires (P.O.) dans le PIB a augmenté de 1,8 point entre 1990 et 2000, passant de 39 à 40,8 points du PIB .

Total des prélèvements obligatoires en pourcentage du produit intérieur brut

Pays

1990

2000

Ecarts

Suède

53,6

53,3

- 0,3

Danemark

47,1

48,4

+ 1,3

Finlande

44,7

46,5

+ 1,8

Belgique

43,2

46,0

+ 2,8

France

43,0

45,5

+ 2,5

Pays-Bas

42,8

41,8

- 1

Luxembourg

40,5

42,0

+ 1,5

Autriche

40,5

43,3

+ 2,8

Italie

38,9

42,3

+ 3,4

Allemagne

36,8 (1)

37,8

+ 1

Royaume-Uni

35,9

37,7

+ 1,8

Irlande

33,5

31,5

- 2

Espagne

33,0

35,3

+ 2,3

Portugal

29,4

34,7

+ 5,3

Grèce

29,3

38,0

+ 8,7

UE pondéré

39,0

40,8

+ 1,8

Japon

30,7

27,1

- 3,6

Etats-Unis

26,7

28,9 (2)

+ 2,2

(1) 1991 ; (2) 1999.

Source : OCDE, Statistiques des recettes publiques , 2001.

Seuls trois des quinze pays européens ont connu une réduction de la part des P.O. dans le PIB : la Suède (- 0,3 point), les Pays-Bas (- 1 point) et l' Irlande (- 2 points). Il est à souligner que ces réductions sont intervenues dans des pays très hétérogènes au regard du poids des P.O.

Dans les douze autres pays , une augmentation plus ou moins marquée du poids des prélèvements est intervenue.

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