Rapport d'information n° 343 (2002-2003) de MM. Joël BOURDIN , Philippe MARINI , fait au nom de la délégation du Sénat pour la planification, déposé le 10 juin 2003
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- INTRODUCTION
-
CHAPITRE I :
LES GRANDS TRAITS DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN EUROPE ET DE LEUR ÉVOLUTION AU COURS DE LA DERNIÈRE DÉCENNIE - I. LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN EUROPE AUGMENTENT, MAIS AVEC DE FORTES DISPARITÉS ENTRE PAYS
- A. GLOBALEMENT, UNE AUGMENTATION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
- B. DES EXPLICATIONS LIÉES AU CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET AUX CONTRAINTES PESANT SUR LES FINANCES PUBLIQUES
- II. DES SITUATIONS TRÈS CONTRASTÉES, LA FRANCE HANDICAPÉE
- A. UNE DISPERSION DES NIVEAUX DE PRÉLÈVEMENTS QUI, MÊME LÉGÈREMENT RÉDUITE, RESTE IMPORTANTE
- 1. Une légère réduction de la dispersion des taux de pression fiscale
- 2. La France dans le groupe des pays les plus mal placés
- B. LA STRUCTURE DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN EUROPE, PEU DE CHANGEMENTS EN DIX ANS ET DES PROFILS TRÈS DISPARATES
-
CHAPITRE II :
L'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS,
DES SYMPTÔMES DE CONCURRENCE FISCALE,
LA FRANCE MAL PLACÉE - I. UNE BAISSE DES TAUX LÉGAUX UN ÉLARGISSEMENT DE L'ASSIETTE
- A. L'ALLEMAGNE, UNE RÉDUCTION DES TAUX, UN ÉLARGISSEMENT DE L'ASSIETTE.
- B. LE ROYAUME-UNI, UNE FISCALITÉ PROGRESSIVE ET MODÉRÉE
- C. L'ESPAGNE, UNE BAISSE LIMITÉE DES TAUX, LE MAINTIEN DE RÈGLES D'ASSIETTE DIVERSIFIÉES
- D. L'ITALIE, UN PROCESSUS ÉVOLUTIF DE REMISE EN ORDRE
- E. LES PAYS-BAS, UN PAYS DE CONTRASTES
- II. DES RÉFORMES AUX EFFETS NUANCÉS ; UN PANORAMA DE CONCURRENCE FISCALE OÙ LA FRANCE EST MAL PLACÉE
- A. UNE STABILITÉ GLOBALE
- B. UNE CONCURRENCE FISCALE ?
- 1. La réduction des taux légaux d'imposition semble s'être accompagnée, le plus souvent, mais pas systématiquement, d'un allégement de la pression fiscale
- 2. Les baisses des taux légaux d'imposition, symptômes d'une volonté de concurrence fiscale qui en comporte de nombreux autres ?
- 3. La France, un espace peu attractif
-
CHAPITRE III :
UNE ACCENTUATION DE LA PRESSION DES PRÉLÈVEMENTS SUR LES MÉNAGES - I. DES RÉFORMES POURSUIVANT UN DOUBLE OBJECTIF DE RÉDUCTION DES TAUX D'IMPOSITION ET D'ÉLARGISSEMENT DES ASSIETTES
- II. UN ALOURDISSEMENT MOYEN DU POIDS DE L'IMPÔT SUR LE REVENU ET UNE ACCENTUATION DE SA PROGRESSIVITÉ
- A. LA FRANCE EST LARGEMENT RESTÉE À L'ÉCART DU PROCESSUS DE BAISSE DES TAUX MOYENS D'IMPOSITION
- B. UNE AUGMENTATION DE LA PRESSION FISCALE SUR LE REVENU DES MÉNAGES
- C. UNE GRANDE VARIÉTÉ DES SITUATIONS NATIONALES
- D. UNE PROGRESSIVITÉ ACCRUE
-
CHAPITRE IV :
LES COTISATIONS SOCIALES,
UNE VARIABLE EFFICACE DES POLITIQUES D'EMPLOI ?
- I. UN OBJECTIF ASSEZ LARGEMENT PARTAGÉ, LA RÉDUCTION DU COÛT DU TRAVAIL
- II. UN BILAN À NUANCER
- A. UNE AMORCE DE DÉCRUE DES CHARGES PESANT SUR LE TRAVAIL
- B. UNE GRANDE DIVERSITÉ DES SITUATIONS NATIONALES
- C. ELÉMENTS D'ÉVALUATION
-
CHAPITRE V :
INCITER AU TRAVAIL,
UNE PRÉOCCUPATION COMMUNE, DES DISPOSITIFS PLUS OU MOINS EFFICACES - I. UN OBJECTIF COMMUN, INCITER AU TRAVAIL PEU QUALIFIÉ EN LUTTANT CONTRE LES TRAPPES À INACTIVITÉ
- A. UN DIAGNOSTIC À LA PERTINENCE RELATIVE...
- B. ... MAIS ÉTAYÉ PAR DES DONNÉES ARITHMÉTIQUES PEU CONTESTABLES
- II. DES RÉFORMES DIFFÉRENTES PAR LEUR CONTENU ET PAR LEUR IMPACT
- A. PRÉSENTATION DES TROIS DISPOSITIFS
- B. DES DISPOSITIFS QUI DIFFÈRENT SENSIBLEMENT
- 1. Des efforts financiers très disparates, des niveaux de « prestation » très inégaux
- 2. Un traitement différent du temps partiel
- 3. Une prise en compte variable de la dimension familiale
- 4. Des modalités d'administration différentes
- C. DES DISPOSITIFS AUX EFFETS TRÈS VARIABLES
- CHAPITRE VI :
-
L'IMPOSITION DES REVENUS DU CAPITAL - I. UNE FISCALITÉ FRANÇAISE RELATIVEMENT FAVORABLE POUR LES REVENUS D'INTÉRÊT
- II. UNE FISCALITÉ FRANÇAISE PARTICULIÈREMENT LOURDE POUR LES REVENUS DES ACTIONS
- A. UNE SITUATION AMBIGUË DANS LE CAS DE L'IMPOSITION DES DIVIDENDES
- 1. Une imposition des dividendes particulièrement lourde pour les personnes imposées au taux supérieur de l'impôt sur le revenu, selon l'OFCE
- 2. Une analyse remise en cause par le commissariat général du Plan dans le cas des revenus moyens
- B. POUR L'IMPOSITION DES PLUS-VALUES, LA SITUATION DE LA FRANCE EST COMPARATIVEMENT DÉFAVORABLE, TANT PAR SA STRUCTURE QUE PAR SON TAUX
- III. LA FRANCE FAIT PARTIE DES PAYS OÙ LES REVENUS D'INTÉRÊT SONT LES PLUS PRIVILÉGIÉS PAR RAPPORT AUX REVENUS DES ACTIONS
-
CHAPITRE VII :
LES RÉFORMES DE LA FISCALITÉ LOCALE EN EUROPE - I. DES FISCALITÉS LOCALES TRÈS DIFFÉRENTES D'UN PAYS À L'AUTRE
- A. DES COLLECTIVITÉS LOCALES D'IMPORTANCE ET D'AUTONOMIE FINANCIÈRE VARIABLES
- 1. Le modèle « européen » : des collectivités locales au faible poids financier et à faible autonomie fiscale
- 2. Les pays d'Europe du nord : des collectivités locales au fort poids financier et à forte autonomie fiscale
- 3. Le « modèle français » : des collectivités locales au faible poids financier et à forte autonomie fiscale
- B. DES ASSIETTES VARIABLES
- II. LES RÉFORMES DE LA FISCALITÉ LOCALE EN EUROPE
- A. UNE TENDANCE EN TROMPE-L'oeIL À LA RÉDUCTION DU POIDS FINANCIER DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
- 1. Une tendance générale à la réduction du poids financier des collectivités territoriales
- 2. Les pays où le poids financier des collectivités locales est faible ont connu une évolution inverse
- B. L'ABSENCE DE RÉFORME FISCALE D'ENVERGURE
- EXAMEN DU RAPPORT PAR LA COMMISSION DES FINANCES ET LA DÉLÉGATION POUR LA PLANIFICATION
-
ANNEXE :
ÉTUDE DE L'OFCE
« LES RÉFORMES FISCALES EN EUROPE 1992-2001 »
- LES SOCIÉTÉS TRANSFRONTALIÈRES (SOCIÉTÉ MÈRE RÉSIDENTE EN FRANCE) : SOURCES D'IMPOSITION
N°
343
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003
Annexe au procès-verbal de la séance du 10 juin 2003
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) et de la délégation du Sénat pour la planification (2) sur les réformes fiscales intervenues dans les pays européens au cours des années 1990 ,
Par MM.
Philippe MARINI et Joël BOURDIN,
Sénateurs.
(1)
Cette commission est composée de :
M. Jean Arthuis,
président
; MM. Jacques Oudin, Gérard Miquel, Claude
Belot, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Aymeri de
Montesquiou,
vice-présidents
; MM. Yann Gaillard, Marc
Massion, Michel Sergent, François Trucy,
secrétaires
; M.
Philippe Marini,
rapporteur général
; MM. Philippe
Adnot, Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Jacques Baudot,
Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste
Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin,
Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Thierry Foucaud, Yves
Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Hubert Haenel, Claude Haut,
Roger Karoutchi, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant,
François Marc, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann,
René Trégouët.
(2) Cette délégation est composée de
: M. Joël
Bourdin,
président ;
Mme Évelyne Didier,
MM. Serge Lepeltier, Marcel Lesbros, Jean-Pierre Plancade,
vice-présidents ;
MM. Pierre André, Yvon Collin,
secrétaires
; MM. Gérard Bailly, Joseph
Kerguéris, Patrick Lassourd, Michel Pelchat, Daniel Percheron, Roger
Rinchet, Gérard Roujas, Bruno Sido
.
Impôts et taxes. |
INTRODUCTION
Le
présent rapport sur les réformes fiscales intervenues en Europe
au cours de la dernière décennie du siècle
précédent est, avant tout, destiné à mettre
à la disposition du Sénat, et du public en général,
les résultats d'une étude commandée par la Commission des
Finances du Sénat et la Délégation du Sénat pour la
planification.
Même si les rapporteurs ne partagent pas la totalité de leurs
points de vue, il faut remercier les chercheurs de l'Observatoire
français des conjonctures économiques d'avoir relevé le
défi d'une présentation systématique des réformes
des prélèvements obligatoires réalisées sur notre
continent.
Des réformes ? Le mot est sans doute un peu trop fort car la
première conclusion
marquante qui ressort de l'étude
est bien que la multiplicité des mesures adoptées ne fait pas
en soi réforme
. L'analyse peine en effet à identifier un
remodelage de grande ampleur orienté vers la poursuite d'objectifs
clairement identifiés dans les pays étudiés, pour la
période sous revue. On en comprend les raisons qui, au-delà des
difficultés intrinsèques de toute réforme, semblent
fondamentalement liées à deux phénomènes
caractéristiques de la période : une croissance
économique lente dans ses débuts et, à de rares exceptions
près, des dépenses publiques en hausse, quand seule une
maîtrise de ces dépenses favoriserait une réforme
ambitieuse et durable des prélèvements. L'absence de grands
bouleversements des systèmes de prélèvements obligatoires
est évidemment un motif de déception pour tous ceux qui, comme
vos rapporteurs, s'inquiètent de l'effet nocif, sur les plans
économique mais aussi social, de prélèvements excessifs.
Cette déception vaut tout particulièrement pour notre pays.
On ne peut pour autant caractériser la période comme une
période d'immobilisme fiscal. Des réaménagements fiscaux
se sont additionnés qui, dans l'ensemble, ont partagé une
inspiration commune - mais dont la logique n'a, de loin, pas
été poussée à son terme - : supprimer les
excès des différentes catégories de
prélèvements pour une plus grande neutralité de
l'impôt et une meilleure compétitivité fiscale.
Une plus grande neutralité des prélèvements ?
Cette logique peut traduire parfois un certain renoncement à
l'utilisation de la fiscalité à des fins d'incitation, elle
semble surtout la conséquence d'une contrainte de financement
résultant des diminutions de taux nominaux d'imposition mises en oeuvre
et ne doit pas être considérée comme d'application
systématique. Au cours des années 90, les pays européens
ont aussi souhaité manier leurs prélèvements à des
fins structurelles, qu'il s'agisse des incitations adressées aux acteurs
du marché du travail pour résoudre certains des graves
problèmes posés par la situation de l'emploi en Europe, ou qu'il
s'agisse de poursuivre un objectif de compétitivité fiscale.
Celui-ci est sans doute le deuxième élément qui a pu
structurer les réaménagements fiscaux entrepris. Il invite
à s'interroger sur
l'existence en Europe d'un processus de
concurrence fiscale
dont votre commission des finances avait pu
démonter les ressorts dans un précédent rapport
1
(
*
)
. Même si elle
débouche sur des résultats nuancés, l'analyse des
réformes entreprises ne peut manquer d'en souligner la dimension
essentiellement nationale, contrepartie de l'absence de progrès dans
l'harmonisation fiscale européenne, non plus que l'inspiration
compétitive qui anime les pays européens. Celle-ci n'a pas pu
s'épanouir complètement et c'est sans doute un effet inattendu
des contraintes du Pacte de stabilité et de croissance que d'avoir
contenu les concurrences fiscales en Europe.
Cependant, certains Etats ont pris de l'avance et la compétition fiscale
en Europe, très vive pour certains prélèvements, n'a pas
fini d'être un sérieux sujet de préoccupation, d'autant que
l'Union européenne est exposée à un processus de
globalisation auquel ses composantes s'ajustent en ordre
dispersé.
CHAPITRE I :
LES GRANDS
TRAITS DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN EUROPE ET DE LEUR
ÉVOLUTION AU COURS DE LA DERNIÈRE DÉCENNIE
La
situation des prélèvements obligatoires en Europe offre un
panorama contrasté
avec une grande variété des
niveaux
et des
structures
de
prélèvements
.
Dans l'ensemble,
les pays européens
, qui ont connu ne moyenne un
alourdissement du poids des prélèvements, se sont toutefois
un
peu rapprochés
les uns des autres dans les années 1990. Cette
convergence, qui reste très limitée, apparaît d'abord comme
le résultat d'un
rattrapage
des pays initialement les moins
développés et des
nécessités de la
réduction des déficits publics
, mais peut également
être attribuée aux pressions
liées à des
phénomènes de
concurrence
fiscale.
Mais, il faut, en préambule de ce rapport, insister à nouveau sur
les problèmes de méthode que pose le concept de
prélèvements obligatoires. Ces problèmes, qui sont
signalés depuis des années, sont récurrents, et on peut
regretter que peu de progrès aient été
réalisés pour les résoudre. Le niveau et le taux des
prélèvements obligatoires occupent pourtant une place très
importante dans le débat public et les comparaisons internationales
foisonnent avec des enjeux d'image importants. L'encadré ci-après
ne mentionne que quelques unes des difficultés que pose un indicateur
auquel il apparaît essentiel d'apporter une plus grande robustesse.
PRÉCISIONS DE MÉTHODE
Les
données présentées dans ce rapport sont essentiellement
issues des
Statistiques des recettes publiques
de l'OCDE. Sous le terme
de « prélèvements obligatoires », l'OCDE
regroupe en principe
l'ensemble des versements obligatoires (
y compris
cotisations sociales)
effectués sans contrepartie au profit des
administrations publiques
.
Les administrations publiques comprennent les autorités supranationales
(institutions de l'Union européenne), les administrations centrales,
régionales et locales, les entités publiques autonomes
(églises dans certains pays), à l'exception des entreprises
publiques, et les organismes de Sécurité sociale. Un certain flou
existe quant à l'appartenance aux secteurs des administrations publiques
de certains organismes d'assurance maladie ou d'assurance retraite. Les
mutuelles ne font pas partie des administrations publiques (dans la mesure
où l'adhésion y est facultative). Les fonds de pension par
capitalisation n'y figurent pas, sauf dans certains pays où ils sont
obligatoires et socialement contrôlés (Finlande, par exemple). Les
régimes obligatoires y figurent, même s'ils sont juridiquement
gérés par le secteur privé (pour la France, Unedic, Arrco,
Agirc).
L'expression de « sans contrepartie » exclut en principe
les versements qui ouvrent des droits à des prestations proportionnelles
aux versements. C'est ainsi que ne sont pas considérées comme
prélèvement obligatoire certaines taxes qui sont le paiement d'un
service rendu (passeports, redevance radio-télévision, amendes,
etc.). Par contre, en dérogation à ce principe, sont
comptabilisées dans les prélèvements obligatoires toutes
les cotisations obligatoires, même si elles donnent droit à des
prestations plus ou moins directement liées aux cotisations
versées (en matière de retraite ou de chômage).
Les cotisations volontaires sont exclues des prélèvements
obligatoires de même que les cotisations obligatoires mais versées
à des organismes extérieurs au secteur des administrations
publiques (dans les pays où les salariés sont obligés de
s'assurer, mais peuvent le faire auprès de leurs entreprises ou d'une
assurance privée). Enfin, les cotisations fictives ne sont pas
comptabilisées dans les prélèvements obligatoires :
la création d'une caisse de retraite pour les fonctionnaires augmente
donc le taux de prélèvement obligatoire.
Les données de l'OCDE sont comptabilisées sur la base des
versements effectivement reçus par les administrations. Elles tiennent
donc compte des dispositions fiscales particulières : crédit
d'impôts, avoir fiscal, par exemple. De façon
générale, les recettes sont nettes des dépenses fiscales.
Le taux de prélèvement obligatoire est donc plus faible pour les
pays qui offrent des ristournes de cotisations sociales au lieu de subventions
à l'emploi, des crédits d'impôt aux familles plutôt
que des prestations familiales, des primes à l'emploi plutôt des
subventions aux travailleurs peu qualifiés, des ristournes à
l'impôt sur les sociétés plutôt que des subventions
à l'investissement, etc. De même, ce taux est fictivement plus
faible dans les pays qui exonèrent les retraites et les chômeurs
de cotisations ou d'impôt, mais qui tiennent compte de cette
exonération dans le calcul des prestations.
Au terme de la décennie 1990, la France, qui connaissait initialement un
très haut niveau de prélèvements obligatoires, a
augmenté le poids de ses prélèvements obligatoires, ce qui
la place en mauvaise posture pour affronter une concurrence fiscale qui
pourrait s'accentuer et nuit à ses performances
économiques.
I. LES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN EUROPE AUGMENTENT, MAIS AVEC DE FORTES DISPARITÉS ENTRE PAYS
A. GLOBALEMENT, UNE AUGMENTATION DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES
En Europe, le poids des prélèvements obligatoires (P.O.) dans le PIB a augmenté de 1,8 point entre 1990 et 2000, passant de 39 à 40,8 points du PIB .
Total des prélèvements obligatoires en pourcentage du produit intérieur brut
Pays |
1990 |
2000 |
Ecarts |
Suède |
53,6 |
53,3 |
- 0,3 |
Danemark |
47,1 |
48,4 |
+ 1,3 |
Finlande |
44,7 |
46,5 |
+ 1,8 |
Belgique |
43,2 |
46,0 |
+ 2,8 |
France |
43,0 |
45,5 |
+ 2,5 |
Pays-Bas |
42,8 |
41,8 |
- 1 |
Luxembourg |
40,5 |
42,0 |
+ 1,5 |
Autriche |
40,5 |
43,3 |
+ 2,8 |
Italie |
38,9 |
42,3 |
+ 3,4 |
Allemagne |
36,8 (1) |
37,8 |
+ 1 |
Royaume-Uni |
35,9 |
37,7 |
+ 1,8 |
Irlande |
33,5 |
31,5 |
- 2 |
Espagne |
33,0 |
35,3 |
+ 2,3 |
Portugal |
29,4 |
34,7 |
+ 5,3 |
Grèce |
29,3 |
38,0 |
+ 8,7 |
UE pondéré |
39,0 |
40,8 |
+ 1,8 |
Japon |
30,7 |
27,1 |
- 3,6 |
Etats-Unis |
26,7 |
28,9 (2) |
+ 2,2 |
(1)
1991 ; (2) 1999.
Source : OCDE,
Statistiques des recettes publiques
, 2001.
Seuls
trois des quinze pays européens
ont connu une
réduction de la part des P.O. dans le PIB
: la
Suède
(- 0,3 point), les
Pays-Bas
(- 1 point) et l'
Irlande
(- 2 points). Il est
à souligner que ces réductions sont intervenues dans des pays
très hétérogènes au regard du poids des P.O.
Dans les
douze autres pays
, une
augmentation
plus ou moins
marquée du poids des prélèvements est
intervenue.
B. DES EXPLICATIONS LIÉES AU CONTEXTE ÉCONOMIQUE ET AUX CONTRAINTES PESANT SUR LES FINANCES PUBLIQUES
Plusieurs situations semblent pouvoir être distinguées.
Les « nouveaux entrants du Sud »
,
c'est-à-dire les pays ayant adhéré dans les années
80,
qui étaient aussi ceux dans lesquels le poids des
prélèvements était le plus bas, ont connu une nette
augmentation des prélèvements
. Tel est le cas pour la
Grèce et le Portugal, et, à moindre degré, pour l'Espagne.
Dans ces pays, l'augmentation des prélèvements obligatoires peut
être mise en relation avec un processus de développement et
l'adoption progressive d'un modèle social à l'européenne.
En outre, à l'exception notable du Royaume-Uni,
il
paraît exister une certaine corrélation entre l'ampleur de
l'augmentation des prélèvements obligatoires et le niveau des
déficits publics
. En effet, les pays qui ont le plus accru leurs
P.O. sont aussi ceux qui ont connu à un moment donné les plus
forts déficits publics.
Capacité ou besoin (-) de financement des administrations
des pays industrialisés
|
||||||||
|
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
France |
- 1,6 |
- 2,2 |
- 3,8 |
- 5,7 |
- 5,8 |
- 4,9 |
- 4,1 |
- 3,0 |
Allemagne |
- 2,1 |
- 3,1 |
- 2,6 |
- 3,2 |
- 2,4 |
- 3,3 |
- 3,4 |
- 2,7 |
Royaume-Uni |
- 0,9 |
- 2,3 |
- 6,2 |
- 7,9 |
- 6,8 |
- 5,5 |
- 4,8 |
- 1,9 |
Italie |
- 11,1 |
- 10,1 |
- 9,6 |
- 9,5 |
- 9,2 |
- 7,7 |
- 6,7 |
- 2,7 |
Belgique |
- 5,5 |
- 6,3 |
- 6,9 |
- 7,1 |
- 4,9 |
- 3,9 |
- 3,2 |
- 2,1 |
Pays-Bas |
- 5,1 |
- 2,9 |
- 3,9 |
- 3,2 |
- 3,8 |
- 4,0 |
- 2,3 |
- 1,4 |
Espagne |
- 4,1 |
- 4,2 |
- 3,8 |
- 6,9 |
- 6,3 |
- 7,3 |
- 4,6 |
- 2,6 |
UE à 15 |
- 3,5 |
- 4,2 |
- 5,1 |
- 6,1 |
- 5,4 |
- 5,0 |
- 4,2 |
- 2,4 |
UEM |
- 4,2 |
- 4,5 |
- 4,7 |
- 5,5 |
- 5,0 |
- 4,9 |
- 4,2 |
- 2,6 |
Source : Rapport économique, social et financier. Projet
de loi de finances pour 1999.
L'Italie, la Belgique et la France relèvent de ce diagnostic que
semblent venir confirmer
a contrario
les Pays-Bas et, surtout,
l'Allemagne qui a connu des déficits historiques plus
modérés.
Cette corrélation doit être mise en rapport avec les
nécessités induites par le processus de qualification pour
l'euro, qui a imposé aux pays une réduction plus ou moins
importante des déficits publics en fonction des situations de
départ, réduction largement, quoique inégalement selon les
pays, obtenue par une hausse du « taux de pression
fiscale ».
Variation des recettes publiques
(en points de PIB) |
|
|
Recettes publiques |
Allemagne |
1,4 |
Autriche |
1,4 |
Belgique |
2,6 |
Danemark |
- 1,1 |
Espagne |
0,6 |
Finlande |
- 1,3 |
France |
1,9 |
Grèce |
19,7 |
Irlande |
- 3,9 |
Italie |
2,7 |
Luxembourg |
- 1,7 |
Pays-Bas |
- 1,3 |
Portugal |
4,3 |
Royaume-Uni |
2,0 |
Suède |
- 3,0 |
UE 15 |
1,7 |
* Niveau
de 2001 moins niveau de 1990. Ensemble des recettes publiques.
Source : OCDE,
Perspectives économiques
, décembre
2001
Enfin, une relation négative entre la croissance et
l'évolution du poids des prélèvements obligatoires semble
se dégager.
Plus la croissance est élevée, moins le poids des
prélèvements obligatoires dans le PIB s'accroît.
Produit intérieur brut des principaux pays de la zone euro
|
||||||||||||||
|
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
Moyenne annuelle 1990/2000 |
Augmentation du taux de PO 1990/2000 (1) |
|
France |
2,6 |
1,0 |
1,3 |
- 0,9 |
1,8 |
1,9 |
1,0 |
1,9 |
3,3 |
3,2 |
3,2 |
1,8 |
+ 2,5 |
|
Allemagne (2) |
5,7 |
5,0 |
2,2 |
- 1,1 |
2,3 |
1,7 |
0,8 |
1,4 |
2,1 |
3,2 |
3,2 |
2,2 |
+ 1 |
|
Italie |
2,0 |
1,4 |
0,8 |
- 0,9 |
2,2 |
2,9 |
1,1 |
2,0 |
1,8 |
1,6 |
2,9 |
1,6 |
+ 3,4 |
|
Espagne |
3,8 |
2,5 |
0,9 |
- 1,0 |
2,4 |
2,8 |
2,4 |
3,9 |
4,3 |
4,0 |
4,1 |
2,7 |
+ 2,3 |
|
Pays-Bas |
4,1 |
2,3 |
2,0 |
0,8 |
3,2 |
2,3 |
3,0 |
3,8 |
4,1 |
3,9 |
3,9 |
3 |
- 1 |
|
Belgique |
2,8 |
1,9 |
1,6 |
- 1,5 |
3,0 |
2,6 |
1,2 |
3,4 |
2,4 |
2,7 |
4,0 |
2,2 |
+ 2,8 |
|
Zone euro |
3,6 |
2,4 |
1,4 |
- 0,8 |
2,3 |
2,2 |
1,4 |
2,3 |
2,8 |
2,6 |
3,4 |
2,1 |
ND |
|
Royaume-Uni |
0,7 |
- 1,5 |
0,1 |
2,3 |
4,4 |
2,8 |
2,6 |
3,5 |
2,6 |
2,3 |
3,0 |
2,1 |
+ 1,8 |
|
1. En
points de PIB.
|
II. DES SITUATIONS TRÈS CONTRASTÉES, LA FRANCE HANDICAPÉE
Malgré un certain rapprochement, le paysage des prélèvements obligatoires en Europe présente de forts contrastes avec des niveaux et des structures des prélèvements très différents selon les pays.
A. UNE DISPERSION DES NIVEAUX DE PRÉLÈVEMENTS QUI, MÊME LÉGÈREMENT RÉDUITE, RESTE IMPORTANTE
1. Une légère réduction de la dispersion des taux de pression fiscale
Si, entre 1990 et 2000, la dispersion des taux de P.O. s'est plutôt réduite, l'Europe reste caractérisée par d'importants écarts de niveaux de prélèvements obligatoires.
Evolution des écarts à la moyenne des
prélèvements obligatoires en Europe
(en points de PIB) |
|||
|
1990 |
2000 |
Variation |
Suède |
+ 14,6 |
+ 12,5 |
- 2,1 |
Danemark |
+ 8,1 |
+ 7,6 |
- 0,5 |
Finlande |
+ 5,7 |
+ 5,2 |
- 0,5 |
Belgique |
+ 4,2 |
+ 4,7 |
+ 0,5 |
France |
+ 4 |
+ 4,7 |
+ 0,7 |
Pays-Bas |
+ 3,8 |
+ 1 |
- 2,8 |
Luxembourg |
+ 1,5 |
+ 1,2 |
- 0,3 |
Autriche |
+ 1,5 |
+ 2,5 |
+ 1 |
Italie |
- 0,1 |
+ 1,5 |
+ 1,6 |
Allemagne |
- 2,2 |
- 3 |
- 0,8 |
Grande-Bretagne |
- 3,1 |
- 3,1 |
0 |
Irlande |
- 5,5 |
- 9,3 |
- 3,8 |
Espagne |
- 6 |
- 5,5 |
+ 0,5 |
Portugal |
- 9,6 |
- 6,1 |
+ 3,5 |
Grèce |
- 9,7 |
- 2,8 |
+ 6,9 |
En 1990,
huit pays enregistraient un taux de prélèvements obligatoires
supérieur à la moyenne européenne, et sept pays un taux
inférieur. En 2000, hormis l'Italie, dont le taux de
prélèvements est désormais supérieur à la
moyenne, la composition de ces deux groupes de pays n'a pas changé. Le
premier groupe est constitué des pays suivants : Suède,
Danemark, Finlande, Belgique, France, Pays-Bas, Luxembourg, Autriche et Italie.
Quant au second groupe, il rassemble toujours l'Allemagne, la Grande-Bretagne,
l'Irlande, l'Espagne, le Portugal et la Grèce.
Dans ce panorama marqué par une certaine stabilité des
positions, il faut toutefois mettre en évidence le resserrement des
situations
.
Les écarts à la moyenne sont moins amplement dispersés en
2000 que dix ans plus tôt. La Suède occupe toujours le premier
rang en termes de taux de prélèvements obligatoires mais celui-ci
n'excède plus le taux moyen que de 12,5 points contre 14,6 en 1990.
De la même manière, le Danemark, toujours en deuxième
position, s'est un peu rapproché du taux moyen. Cinq des huit pays du
premier groupe ont connu un tel processus, seuls de ces cinq pays, la Belgique,
la France et l'Autriche augmentant leur décrochage par rapport au taux
de PO moyen entre 1990 et 2000. Dans le second groupe, celui des pays qui
connaissaient en 1990 un taux de prélèvements inférieur
à la moyenne, seul un pays - l'Allemagne - a accentué
l'écart entre son taux de PO et le taux de PO moyen.
2. La France dans le groupe des pays les plus mal placés
Il
n'en reste pas moins que, même raccourcie, l'échelle des taux de
prélèvements obligatoires en Europe continue de présenter
des degrés nettement marqués.
Les deux cas extrêmes, la Suède et l'Irlande, exceptés,
plusieurs groupes de pays se détachent :
• un premier groupe
composé du
Danemark
, de la
Finlande
, de la
Belgique
et de la
France
, où le
taux de prélèvements est nettement (de + de 4,5 points)
supérieur à la moyenne ;
• un deuxième groupe
avec l'
Autriche
,
l'
Italie
, le
Luxembourg
et les
Pays-Bas
, dont les taux de
prélèvements ne sont qu'un peu supérieurs à cette
moyenne ;
• trois pays, la
Grande-Bretagne
, l'
Allemagne
et la
Grèce
, où les taux de PO sont assez sensiblement
inférieurs à celle-ci ;
• enfin, deux pays, l'
Espagne
et le
Portugal
qui, même
s'ils se sont rapprochés du taux moyen, restent très
éloignés de ce dernier.
Cette situation correspond assez étroitement aux niveaux relatifs des
dépenses publiques dans les Etats européens.
Dépenses publiques en 2000
(en points de PIB)
Belgique |
49,9 |
Allemagne |
45,6 |
Grèce |
44,7 |
Espagne |
39,9 |
France |
53,2 |
Irlande |
33,3 |
Italie |
46,5 |
Luxembourg |
41,2 |
Pays-Bas |
45,3 |
Autriche |
51,8 |
Portugal |
44,8 |
Finlande |
48,4 |
Danemark |
53,3 |
Suède |
58,4 |
Royaume-Uni |
37,7 |
UE 15 |
45,8 |
Il existe cependant quelques nuances liées à l'existence de soldes publics différents et de ressources publiques alternatives aux prélèvements obligatoires.
Ecarts
entre les dépenses publiques
et les prélèvements
obligatoires en 2000
(en points de PIB)
Belgique |
+ 3,9 |
Allemagne |
+ 7,8 |
Grèce |
+ 6,7 |
Espagne |
+ 4,6 |
France |
+ 7,7 |
Irlande |
+ 1,8 |
Italie |
+ 4,2 |
Luxembourg |
- 0,8 |
Pays-Bas |
+ 3,5 |
Autriche |
- 8,5 |
Portugal |
+ 10,1 |
Finlande |
+ 1,9 |
Danemark |
+ 4,9 |
Suède |
+ 5,1 |
Royaume-Uni |
0 |
Ces
nuances ne sont pas négligeables, comme le montre le tableau ci-avant.
L'écart existant entre les dépenses publiques et les
prélèvements obligatoires constitue un indice de la
soutenabilité des finances publiques
. En effet, plus cet
écart est grand, plus le socle de financement du secteur public
apparaît dépendant de recettes non fiscales dont la
récurrence est moins avérée que pour les recettes
fiscales. Par ailleurs, quand il s'accompagne d'un plus fort déficit
public, il engendre des charges d'intérêt qui sont susceptibles,
en fonction des conditions comparées de la croissance et du coût
de la dette, d'enclencher un effet boule de neige de l'endettement qui creuse
mécaniquement le besoin de financement public.
De ces différents points de vue,
la situation de la France
apparaît très inquiétante
. Avec
un très haut
niveau de ses dépenses publiques
, malgré
le poids
très élevé de ses prélèvements
obligatoires
, notre pays est l'un des pays d'Europe que
l'écart
très important entre ses prélèvements et ses
dépenses publics
désigne tout particulièrement comme
étant confronté à
un sérieux problème de
soutenabilité de ses finances publiques
.
B. LA STRUCTURE DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES EN EUROPE, PEU DE CHANGEMENTS EN DIX ANS ET DES PROFILS TRÈS DISPARATES
1. Peu de changements...
La
structure moyenne des prélèvements obligatoires en Europe n'a que
légèrement évolué en dix ans.
Sur fond d'augmentation globale, le poids des impôts sur les biens, sur
le patrimoine et sur le revenu des ménages s'est alourdi ; celui de
l'impôt sur les sociétés s'est également accru, mais
dans de moindres proportions. En revanche, la pression exercée par les
cotisations sociales a été très légèrement
allégée.
La hiérarchie des prélèvements demeure, malgré
tout, inchangée en 2000 par rapport à ce qu'elle était dix
ans plus tôt.
Poids des prélèvements obligatoires
dans le PIB de l'UE (en % du PIB)
|
1990 |
2000 |
Variation
|
Total |
39 |
40,8 |
+ 1,8 |
dont : |
|
|
|
Impôts sur le revenu des ménages |
9,6 |
10,1 |
+ 0,5 |
Impôts sur les sociétés |
2,7 |
3,0 |
+ 0,3 |
Cotisations sociales |
12,8 |
12,5 |
- 0,3 |
Impôts sur le patrimoine |
1,8 |
2,4 |
+ 0,6 |
Impôts sur les biens 1) |
11,1 |
11,8 |
+ 0,7 |
1. Les
impôts sur les biens comportent principalement, outre les très
nombreuses formes d'accises, la TVA.
Source : OCDE,
Statistiques des recettes publiques
, 2001.
Les cotisations sociales demeurent la source de recettes publiques la plus
importante, suivies par les impôts sur les biens et les impôts sur
les revenus des ménages. Les parts respectives des impôts sur les
sociétés et des impôts sur le patrimoine, bien qu'en
augmentation, arrivent loin derrière.
Par rapport à la structure fiscale des Etats-Unis, l'Europe
présente la particularité principale de taxer beaucoup plus
lourdement les biens et les salaires à travers les cotisations
sociales.
Le poids des prélèvements sur les biens et services est plus
élevé en Europe de 7,1 points de PIB et celui sur les salaires
(les cotisations sociales) de 5,6 points de PIB.
En revanche, les Etats-Unis connaissent un niveau de prélèvements
sur les revenus des ménages et sur le patrimoine supérieur
à ce qu'il est en Europe, de 1,7 point et 0,7 point de PIB
respectivement.
L'alourdissement des prélèvements obligatoires aux Etats-Unis,
qui, entre 1990 et 2000, a été plus élevé qu'en
Europe - 2,7 points de PIB contre 1,8 point de PIB - s'est
manifesté par une sensible augmentation de l'imposition des revenus des
ménages américains qui a atteint 1,9 point de PIB.
2. Des profils très disparates
En
dépit d'un certain rapprochement des structures nationales des
prélèvements obligatoires, le paysage européen reste
marqué, en ce domaine, par de nettes disparités.
Un certain rapprochement des structures des prélèvements s'est
opéré, comme le montre la variation, au cours des années
1990, des écarts de position nationale par catégorie de
prélèvements, par rapport à la moyenne
européenne.
Ecarts à la moyenne en 1990 par pays et par grande catégorie de prélèvements (en points de PIB) |
|||||||||||
|
Impôts sur les biens |
Impôts sur le revenu des ménages |
Impôts sur les sociétés |
Cotisations sociales |
Impôts sur le patrimoine |
||||||
Allemagne |
- 0,6 |
+ 0,2 |
- 1 |
+ 0,5 |
- 0,6 |
||||||
Autriche |
+ 1,6 |
- 1,1 |
- 1,3 |
+ 0,5 |
- 0,7 |
||||||
Belgique |
+ 0,3 |
+ 4,3 |
- 0,3 |
+ 1,5 |
- 0,6 |
||||||
Danemark |
+ 4,7 |
+ 15,2 |
- 1,2 |
- 11,4 |
+ 0,2 |
||||||
Espagne |
- 1,7 |
- 2,4 |
+ 0,2 |
- 1 |
0 |
||||||
Finlande |
+ 3,5 |
+ 7,6 |
- 0,7 |
- 3,1 |
- 0,7 |
||||||
France |
+ 1,1 |
- 5 |
- 0,4 |
+ 6,1 |
+ 0,9 |
||||||
Grèce |
+ 2 |
- 5,5 |
- 1,1 |
- 3,9 |
- 0,4 |
||||||
Irlande |
+ 3,1 |
+ 1,1 |
- 1,1 |
- 7,8 |
- 0,2 |
||||||
Italie |
- 0,2 |
+ 0,6 |
+ 1,2 |
0 |
- 0,9 |
||||||
Luxembourg |
- 0,8 |
0 |
+ 3,7 |
- 1,7 |
+ 1,6 |
||||||
Pays-Bas |
+ 0,2 |
+ 1 |
+ 0,5 |
+ 3,2 |
- 0,2 |
||||||
Portugal |
+ 1,8 |
- 4,9 |
- 0,4 |
- 4,8 |
- 1 |
||||||
Suède |
+ 2,3 |
+ 11 |
- 1 |
+ 1,8 |
+ 0,1 |
||||||
Grande-Bretagne |
0 |
+ 0,4 |
+ 1,5 |
- 6,7 |
+ 1,1 |
||||||
Total des écarts |
23,4 |
60,3 |
15,6 |
54 |
9,2 |
||||||
Ecarts à la moyenne en 2000 par pays et par grande catégorie de prélèvements (en points de PIB) |
|||||||||||
|
Impôts sur les biens |
Impôts sur le revenu des ménages |
Impôts sur les sociétés |
Cotisations sociales |
Impôts sur le patrimoine |
||||||
Allemagne |
- 1,2 |
- 0,5 |
- 1,2 |
+ 2,3 |
- 1,5 |
||||||
Autriche |
+ 0,5 |
- 0,5 |
- 1 |
+ 2,3 |
- 1,8 |
||||||
Belgique |
- 0,1 |
+ 4,2 |
+ 0,7 |
+ 1,7 |
- 0,9 |
||||||
Danemark |
+ 3,9 |
+ 15,2 |
- 0,7 |
- 10,3 |
- 0,8 |
||||||
Espagne |
- 1,3 |
- 2,5 |
0 |
- 0,1 |
- 0,2 |
||||||
Finlande |
+ 1,8 |
+ 5 |
+ 2,4 |
- 0,6 |
- 1,3 |
||||||
France |
+ 0,1 |
- 1,8 |
+ 0,1 |
+ 4 |
+ 0,6 |
||||||
Grèce |
+ 1,9 |
- 5,1 |
+ 1,4 |
- 1 |
- 0,4 |
||||||
Irlande |
+ 0,6 |
- 0,4 |
+ 0,9 |
- 8,3 |
- 0,6 |
||||||
Italie |
+ 0,1 |
0 |
- 0,5 |
- 0,5 |
- 0,6 |
||||||
Luxembourg |
0 |
- 2,5 |
+ 4,2 |
- 1,8 |
+ 2,0 |
||||||
Pays-Bas |
0 |
- 3,8 |
+ 1,2 |
+ 3,9 |
- 0,2 |
||||||
Portugal |
+ 2,4 |
- 4,3 |
+ 0,9 |
- 3,8 |
- 1,3 |
||||||
Suède |
- 0,5 |
+ 8,7 |
+ 0,7 |
+ 2,7 |
- 0,5 |
||||||
Grande-Bretagne |
+ 0,4 |
+ 0,7 |
+ 0,7 |
- 6,5 |
+ 2 |
||||||
Total des écarts |
14,8 |
55,2 |
16,6 |
49,8 |
14,7 |
S'agissant des impôts sur les biens et services
,
l'écart entre les pays les plus éloignés de la moyenne par
le haut (le Danemark) et le bas (l'Espagne) s'est amenuisé entre 1990 et
2000 (il était alors de 5,2 points contre 6,4 points en 1990).
Hormis le Portugal, les écarts positifs de taxation se sont
réduits, tandis que, excepté l'Allemagne, les écarts
négatifs ont connu un même phénomène. Le total des
écarts à la moyenne, indice grossier des disparités de
taxation, se réduit très sensiblement, révélant une
convergence des systèmes d'imposition des biens st services que les
progrès réalisés en matière d'harmonisation
réglementaire de la TVA expliquent largement.
S'agissant des impôts sur le revenu des ménages
, un
même processus de convergence peut être décelé,
même s'il a atteint une ampleur plus limitée. Il est en
correspondance avec le processus de
rapprochement du poids relatif des
cotisations sociales
.
De façon surprenante, les deux catégories d'imposition qui ont,
à l'inverse, connu une accentuation de la disparité des
prélèvements nationaux sont ceux considérés comme
les plus susceptibles de converger en raison de la mobilité
présumée de leurs assiettes, à savoir l'imposition des
sociétés et celle du patrimoine.
Il n'en demeure pas moins que ces impôts sont ceux qui connaissent la
dispersion la plus faible, ce qui correspond bien à l'intuition d'une
harmonisation naturelle des systèmes de prélèvements sur
des ressources mobiles dans un espace de liberté des flux.
Cette appréciation étant fondée sur des données
très agrégées, on peut établir que les
années 90 ont été marquées par un rapprochement des
systèmes fiscaux des Etats membres, qu'il ait été
organisé comme en matière d'imposition des biens et services ou
qu'il ait résulté d'une somme de décisions
étatiques individuelles plus ou moins discrétionnaires.
L'essentiel reste que le panorama de la structure des systèmes
fiscaux européens est, en 2000 comme en 1990, fort éclaté.
Structure des recettes fiscales selon l'assiette des taxes en % du PIB (1990)
|
ALL |
AUT |
BEL |
DAN |
ESP |
FIN |
FRA |
GRC |
IRL |
ITA |
LUX |
PB. |
PRT |
SUE. |
RU |
UE |
EU 1 |
Impôts sur le revenu
|
11,5 |
10,3 |
16,2 |
27,6 |
10,2 |
19,3 |
6,9 |
5,8 |
12,4 |
14,2 |
16,0 |
13,8 |
7,6 |
22,3 |
14,1 |
12,4 |
11,9 |
9,8 |
8,5 |
13,9 |
24,8 |
7,2 |
17,2 |
4,6 |
4,1 |
10,7 |
10,2 |
9,6 |
10,6 |
4,7 |
20,6 |
10,0 |
9,6 |
9,9 |
|
1,7 |
1,4 |
2,4 |
1,5 |
2,9 |
2,0 |
2,3 |
1,6 |
1,7 |
3,9 |
6,4 |
3,2 |
2,3 |
1,7 |
4,2 |
2,7 |
2,0 |
|
Prélèvement sur les salaires
|
13,3 |
15,7 |
14,3 |
1,7 |
11,8 |
9,7 |
19,7 |
9,1 |
5,4 |
12,9 |
11,1 |
16,0 |
8,0 |
15,9 |
6,1 |
13,1 |
6,8 |
13,3 |
13,3 |
14,3 |
1,4 |
11,8 |
9,7 |
18,9 |
8,9 |
5,0 |
12,8 |
11,1 |
16,0 |
8,0 |
14,6 |
6,1 |
12,8 |
6,8 |
|
0,0 |
2,4 |
0,0 |
0,3 |
0,0 |
0,0 |
0,8 |
0,2 |
0,4 |
0,1 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
1,3 |
0,0 |
0,3 |
0,0 |
|
Impôt sur le patrimoine |
1,2 |
1,1 |
1,2 |
2,0 |
1,8 |
1,1 |
2,7 |
1,4 |
1,6 |
0,9 |
3,4 |
1,6 |
0,8 |
1,9 |
2,9 |
1,8 |
3,0 |
Impôts sur les Biens et services
|
9,5 |
12,7 |
11,4 |
15,8 |
9,4 |
14,6 |
12,2 |
13,1 |
14,2 |
10,9 |
10,3 |
11,3 |
12,9 |
13,4 |
11,1 |
11,1 |
4,5 |
5,9 |
8,4 |
7,1 |
8,7 |
5,2 |
8,7 |
7,9 |
7,2 |
6,9 |
5,7 |
4,8 |
7,1 |
5,8 |
8,0 |
6,1 |
6,6 |
0,0 |
|
2,4 |
2,5 |
2,1 |
4,7 |
1,9 |
4,3 |
2,7 |
3,5 |
5,7 |
3,0 |
4,1 |
2,5 |
4,1 |
3,9 |
3,5 |
2,9 |
1,3 |
|
Autres |
0,0 |
0,5 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,1 |
1,4 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,1 |
0,1 |
0,2 |
0,1 |
1,5 |
0,5 |
0,0 |
Total |
35,6 |
40,5 |
43,2 |
47,1 |
33,2 |
44,7 |
42,9 |
29,3 |
33,5 |
38,9 |
40,9 |
42,8 |
29,4 |
53,6 |
35,8 |
38,9 |
26,2 |
1.
Etats-Unis.
Source : OCDE,
Statistiques des recettes publiques
, 2001.
Structure des recettes fiscales selon l'assiette des taxes en % du PIB (2000, sauf (1))
|
ALL |
AUT |
BEL |
DAN |
ESP |
FIN |
FRA |
GRC |
IRL |
ITA |
LUX |
PB. |
PRT |
SUE. |
RU |
UE |
JAP |
EU 2 |
Impôts sur le revenu
|
11,4 |
12,3 |
18,1 |
28,5 |
9,9 |
20,5 |
11,4 |
10,4 |
13,6 |
14,2 |
15,0 |
10,5 |
9,9 |
22,5 |
14,5 |
13,2 |
9,1 |
14,2 |
9,6 |
9,6 |
14,3 |
25,3 |
6,6 |
15,1 |
8,3 |
5,0 |
9,7 |
10,1 |
7,6 |
6,3 |
5,8 |
18,8 |
10,8 |
10,1 |
5,7 |
11,8 |
|
1,8 |
2,0 |
3,7 |
2,3 |
3,0 |
5,4 |
3,1 |
4,4 |
3,9 |
2,5 |
7,4 |
4,2 |
4,0 |
3,7 |
3,7 |
3,0 |
3,5 |
2,4 |
|
Prélèvement sur les salaires
|
14,8 |
17,5 |
14,2 |
2,4 |
12,4 |
11,1 |
17,4 |
11,7 |
4,3 |
12,0 |
10,7 |
16,4 |
8,7 |
17,5 |
6,3 |
12,8 |
10,0 |
6,9 |
14,8 |
14,8 |
14,2 |
2,2 |
12,4 |
11,1 |
16,5 |
11,5 |
4,2 |
12,0 |
10,7 |
16,4 |
8,7 |
15,2 |
6,3 |
12,5 |
10,0 |
6,9 |
|
0,0 |
2,7 |
0,0 |
0,2 |
0,0 |
0,0 |
0,9 |
0,2 |
0,1 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
2,3 |
0,0 |
0,4 |
0,0 |
0,0 |
|
Impôt sur le patrimoine |
0,9 |
0,6 |
1,5 |
1,6 |
2,2 |
1,1 |
3,0 |
2,0 |
1,8 |
1,8 |
4,4 |
2,2 |
1,1 |
1,9 |
4,4 |
2,4 |
2,8 |
3,1 |
Impôts sur les Biens et services
|
10,6 |
12,3 |
11,7 |
15,7 |
10,5 |
13,6 |
11,9 |
13,7 |
12,4 |
11,9 |
11,8 |
11,8 |
14,2 |
11,3 |
12,2 |
11,8 |
5,1 |
4,7 |
6,9 |
8,3 |
7,4 |
9,5 |
6,2 |
8,1 |
7,5 |
8,4 |
7,1 |
6,6 |
5,9 |
7,3 |
8,1 |
7,3 |
7,0 |
7,3 |
2,4 |
0,0 |
|
2,8 |
2,5 |
2,3 |
5,1 |
2,7 |
4,3 |
2,9 |
4,0 |
4,5 |
2,7 |
5,1 |
3,5 |
4,6 |
3,5 |
4,0 |
3,3 |
1,9 |
1,5 |
|
Autres |
0,2 |
0,5 |
0,5 |
0,2 |
0,4 |
0,1 |
1,8 |
0,2 |
0,2 |
2,4 |
0,2 |
0,7 |
0,4 |
0,2 |
0,2 |
0,6 |
0,1 |
0,0 |
Total |
37,8 |
43,3 |
46,0 |
48,4 |
35,3 |
46,5 |
45,5 |
38,0 |
32,3 |
42,3 |
42,0 |
41,7 |
34,3 |
53,3 |
37,7 |
40,8 |
27,1 |
28,9 |
1.
Année 1999 pour l'Irlande, le Portugal et les Etats-Unis.
2. Etats-Unis.
Source : OCDE, Statistiques des recettes publiques, 2001.
Le poids des
impôts sur le revenu des ménages
varie
beaucoup selon les pays. Il reste exceptionnellement élevé dans
les pays nordiques ainsi qu'en Belgique. Il est relativement faible dans les
pays du sud et aux Pays-Bas, la France ayant, au cours des années 90,
rapproché sa situation, caractérisée par un faible niveau
comparé de l'impôt sur le revenu, de la moyenne européenne,
en particulier du fait de l'instauration de la contribution sociale
généralisée (CSG), classée par les
« comptables nationaux » dans les impôts sur le
revenu des ménages..
En dépit d'un glissement vers la contribution sociale
généralisée (classée comme impôt sur le
revenu) du financement des régimes sociaux, la France conserve la
première place au regard du
poids des cotisations sociales
. Pour
cette catégorie de prélèvements, le total des
écarts à la moyenne est élevé (presque autant que
pour l'impôt sur le revenu), ce qui témoigne d'une grande
disparité des situations nationales.
Dans un cas seulement, le Danemark, le faible niveau des cotisations sociales
compense le haut niveau de l'impôt sur le revenu. Mais, sinon aux
Pays-Bas et, à un moindre degré, en France, ce mécanisme
de vases communicants paraît faire défaut ailleurs. La
Suède, avec un haut niveau d'impôt sur le revenu connaît
aussi un haut niveau de cotisations sociales, tout comme la Belgique.
Inversement, en position médiane ou inférieure à la
moyenne au regard de l'impôt sur le revenu, l'Espagne, la Grèce,
l'Irlande, le Luxembourg, l'Italie, le Portugal et la Grande-Bretagne
connaissent aussi un niveau relativement modeste des cotisations sociales.
Les situations des pays sont beaucoup plus proches pour les trois autres
catégories de prélèvements. Les
impôts sur les
biens
ne sont réellement comparativement très
élevés qu'au Danemark et au Portugal pour des motifs
différents, le poids important de la consommation dans le PIB de ce
dernier pays, celui des accises dans le premier. Pour
l'impôt sur les
sociétés
, seuls la Finlande et le Luxembourg se
détachent, par le haut et, l'Allemagne et l'Autriche, par le bas. Pour
les
impôts sur le patrimoine
, ils ne sont relativement
élevés qu'au Luxembourg et en Grande-Bretagne.
Cette dispersion des structures des prélèvements obligatoires se
confirme si l'on considère non plus les assiettes des
prélèvements mais leur répercussion économique
immédiate.
Structure des recettes fiscales selon leur répercussion économique immédiate en % du PIB (1999)
|
ALL |
AUT |
BEL |
DAN |
ESP |
FIN |
FRA |
GRC |
IRL |
ITA |
LUX |
PB. |
PRT |
SUE |
RU |
UE |
Revenu des ménages |
17,4 |
18,2 |
20,0 |
27,6 |
11,7 |
17,6 |
14,9 |
12,1 |
11,6 |
15,1 |
15,0 |
21,5 |
9,6 |
23,1 |
15,1 |
15,9 |
Revenu des entreprises |
1,8 |
1,8 |
3,6 |
3,0 |
2,8 |
4,2 |
2,9 |
3,2 |
3,9 |
3,3 |
7,3 |
4,2 |
4,0 |
3,2 |
3,8 |
2,9 |
Coût du travail |
7,3 |
10,1 |
8,8 |
0,7 |
8,4 |
9,3 |
12,4 |
5,4 |
2,7 |
8,7 |
4,7 |
2,5 |
5,0 |
13,9 |
3,5 |
7,4 |
Autres coûts de production |
0,1 |
0,2 |
0,4 |
0,1 |
0,3 |
0,2 |
1,9 |
0,1 |
0,2 |
1,9 |
2,0 |
0,3 |
0,0 |
0,1 |
0,2 |
0,5 |
Prix des produits |
10,2 |
11,8 |
10,6 |
15,6 |
9,7 |
14,0 |
11,9 |
13,0 |
11,8 |
10,8 |
11,5 |
10,8 |
14,0 |
10,9 |
11,1 |
11,2 |
Divers |
0,9 |
1,8 |
2,2 |
3,4 |
2,2 |
1,1 |
1,9 |
3,3 |
2,0 |
3,4 |
1,4 |
2,8 |
1,7 |
1,0 |
2,6 |
2,5 |
Total |
37,7 |
43,9 |
45,7 |
50,4 |
35,1 |
46,3 |
45,8 |
37,1 |
32,3 |
43,3 |
41,8 |
42,1 |
34,3 |
52,2 |
36,3 |
40,5 |
Source : OCDE,
Statistiques des recettes publiques
, 2001.
Les impôts sur les produits apparaissent relativement homogènes.
En revanche, l'imposition du revenu des ménages et les
prélèvements sur les salaires sont nettement contrastés.
La France, on doit y insister, pénalise très fortement les
salaires puisqu'elle n'est devancée que par la Suède au regard
des prélèvements sur le travail.
3. Une centralisation très variable selon les pays
La répartition des prélèvements entre les types d'administration est très différenciée selon les pays.
Répartition des
prélèvements selon l'administration perceptrice,
en % du total
des recettes
En 1997 |
CE 1) |
Adm. centrales |
Etats fédérés |
Adm. locales |
Séc. Sociale |
Allemagne |
1,5 |
29,2 |
22,0 |
7,9 |
39,3 |
Autriche |
1,4 |
51,2 |
9,4 |
10,1 |
27,9 |
Belgique |
1,9 |
34,9 |
23,6 |
4,4 |
35,0 |
Danemark |
1,1 |
62,4 |
-- |
31,5 |
4,1 |
Espagne |
1,9 |
46,7 |
-- |
16,9 |
34,5 |
Finlande |
1,2 |
54,8 |
-- |
22,7 |
26,6 |
France |
1,2 |
42,5 |
-- |
10,0 |
45,1 |
Grèce |
1,8 |
67,6 |
-- |
1,1 |
29,5 |
Irlande |
2,2 |
85,0 |
-- |
1,8 |
11,1 |
Italie |
1,1 |
61,0 |
-- |
9,4 |
26,6 |
Luxembourg |
1,2 |
67,0 |
-- |
5,7 |
25,3 |
Pays-Bas |
2,3 |
54,7 |
-- |
2,7 |
40,0 |
Portugal |
1,8 |
65,0 |
-- |
6,6 |
26,5 |
Royaume-Uni |
1,7 |
76,9 |
-- |
4,1 |
17,3 |
Suède |
1,0 |
61,8 |
-- |
30,3 |
8,8 |
Etats-Unis |
-- |
45,0 |
19,1 |
12,0 |
23,9 |
Japon |
-- |
36,7 |
-- |
26,1 |
37,2 |
1.
Communautés européennes. Cette colonne représente les
prélèvements affectés au financement du budget des
Communautés européennes.
Source : OCDE,
Statistiques des recettes publiques
, 2001.
Dans deux des trois pays fédéraux (Belgique et Allemagne), le
poids de la fiscalité des Etats est extrêmement fort, de l'ordre
de
10 %
du PIB, supérieur à celui des Etats-Unis et
dans les pays scandinaves, la fiscalité locale est très
importante (de 10 à 15 % du PIB).
Le poids des impôts perçus par les administrations centrales va de
11 % du PIB en Allemagne à plus de 25 % (Danemark, Irlande,
Royaume-Uni, Suède).
Les recettes propres de la Sécurité sociale sont très
faibles dans certains pays où elle est financée par le budget de
l'Etat, totalement (Danemark, Suède) ou partiellement (Royaume-Uni,
Irlande). Au contraire, elles sont très fortes dans les modèles
bismarkiens (France, Pays-Bas, Belgique, Allemagne).
Les pays européens s'étagent entre les pays très
centralisés où le gouvernement central prélève plus
des 2/3 du total des recettes (Irlande, Royaume-Uni, Grèce, Portugal,
Luxembourg, Danemark) et des pays peu centralisés pour des raisons
diverses : Allemagne, en raison du poids des
Länder
, Belgique
en raison de sa division linguistique, France en raison du poids des recettes
de la Sécurité sociale, Suède en raison du poids des
communes.
CHAPITRE
II :
L'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS,
DES
SYMPTÔMES DE CONCURRENCE FISCALE,
LA FRANCE MAL
PLACÉE
Le
contour des prélèvements sur les entreprises
est
très
difficile
à dessiner. A des
prélèvements directs
particulièrement
dispersés selon qu'ils touchent les sociétés ou des
entreprises individuelles, les entreprises en général ou les
entreprises évoluant dans un secteur donné, effectués au
niveau national ou au niveau local, il faut ajouter des
prélèvements plus indirects
qui, établis sur les
propriétaires de l'entreprise ou sur ses créanciers, affectent de
façon significative la vie des entreprises.
D'importants progrès de méthode restent à entreprendre
pour asseoir plus solidement la catégorie des prélèvements
sur les entreprises et les comparaisons présentées dans ce
chapitre le sont sous cette importante réserve.
Tout comme pour les prélèvements obligatoires en
général,
l'imposition des entreprises
ne semble
pas
avoir connu de nettes modifications
en Europe. C'est du moins la conclusion
à laquelle invite la considération des évolutions
relatives au poids de l'impôt sur les sociétés dans le PIB.
Ce résultat est de nature à
étonner
si on se
réfère aux
analyses théoriques
qui
établissent un risque élevé de
concurrence fiscale
en matière d'imposition des entreprises.
Aussi bien, un raffinement de l'analyse s'impose et la prise en compte d'autres
données conduisent à des conclusions sensiblement
différentes.
Il convient d'abord de relever qu'une stratégie de
baisse des taux
légaux d'imposition
des sociétés a été
partagée par la plupart des pays européens. Si, en pratique,
cette stratégie n'a pas toujours été suivie d'une baisse
de la pression fiscale, on ne peut pour autant la considérer comme
relevant d'un simple affichage.
Dans la plupart des pays, elle semble avoir débouché sur des
allégements fiscaux effectifs. Par ailleurs, elle témoigne, en
soi, d'une détermination compétitive qui, même si ses
résultats concrets, appréhendés globalement, sont ambigus,
semble animer de nombreuses pratiques fiscales concurrentielles à
dimension microéconomique.
A défaut de pouvoir entièrement étayer les
préoccupations engendrées par la perspective d'une
intensification de la concurrence fiscale, les données disponibles
montrent que les pays européens sont inégalement attractifs de ce
point de vue et que la France occupe une position peu favorable.
I. UNE BAISSE DES TAUX LÉGAUX UN ÉLARGISSEMENT DE L'ASSIETTE
Comme
pour les prélèvements sur les revenus des ménages,
l'imposition des sociétés a évolué dans le sens
d'une diminution des taux légaux et, souvent, d'une extension de
l'assiette d'imposition.
Une
très forte baisse des taux légaux
d'imposition des
sociétés est intervenue en Europe entre 1986 et 2001 avec, en
moyenne, un allégement de près de 30 % par rapport au taux
observé en 1986.
TAUX NOMINAUX DE L'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS
|
1986 |
1991 |
1995 |
1998 |
2001 |
Différence 1986-2001 |
Différence 1991-2001 |
Allemagne |
56,0 |
50/36 |
45/30 |
45/25 |
25,0 |
- 31,0 |
- 25/- 11 |
Autriche |
50,0 |
30,0 |
34,0 |
34,0 |
34,0 |
- 16,0 |
+ 4 |
Belgique |
45,0 |
39,0 |
39,0 |
39,0 |
39,0 |
- 6,0 |
0 |
Danemark |
50,0 |
38,0 |
34,0 |
34,0 |
30,0 |
- 20,0 |
- 8 |
Espagne |
35,0 |
35,0 |
35,0 |
35,0 |
35,0 |
- 0,0 |
0 |
Finlande |
33,0 |
23,0 |
25,0 |
28,0 |
29,0 |
- 4,0 |
+ 6 |
France |
45,0 |
42,0 |
33,3 |
41,6 |
36,4 |
- 8,6 |
- 5,6 |
Grèce |
49,0 |
46,0 |
35/40 |
35/40 |
35,0 |
- 9,0 |
- 11 |
Irlande |
50,0 |
43,0 |
40,0 |
32,0 |
20,0 |
- 30,0 |
- 23 |
Italie |
36,0 |
36,0 |
36,0 |
37,0 |
36,0 |
- 0,0 |
0 |
Luxembourg |
40,0 |
33,0 |
33,0 |
30,0 |
30,0 |
- 10,0 |
- 3 |
Pays-Bas |
42,0 |
35,0 |
35,0 |
35,0 |
35,0 |
- 7,0 |
0 |
Portugal |
42/47 |
36,0 |
36,0 |
34,0 |
32,0 |
- 15,0 |
- 4 |
Royaume-Uni |
35,0 |
34,0 |
33,0 |
31,0 |
30,0 |
- 5,0 |
- 4 |
Suède |
52,0 |
30,0 |
28,0 |
28,0 |
28,0 |
- 24,0 |
- 2 |
Union européenne |
44,3 |
36,7 |
35,1 |
34,9 |
32,0 |
- 12,4 |
- 4,7 |
Etats-Unis |
46,0 |
34,0 |
35,0 |
35,0 |
35,0 |
- 11,0 |
+ 1 |
Japon |
50,0 |
50,0 |
47,5 |
46,4 |
46,4 |
- 3,6 |
- 3,6 |
Note
: Le taux est celui de l'impôt du
gouvernement central et la moyenne pour l'Union européenne est non
pondérée.
Source
: OCDE
Ce mouvement s'est
nettement modéré au cours de la
décennie 1990-2000
avec même, dans quelques cas, un
renversement de tendance (Autriche, Finlande).
Toutefois, c'est bien la baisse des taux d'imposition qui constitue la
caractéristique essentielle des réformes de l'impôt sur les
sociétés intervenues en Europe dans le proche passé.
Parallèlement, dans de nombreux pays, les régimes d'imposition
dérogatoires ont été banalisés, qu'il s'agisse du
régime des amortissements, des provisions ou encore des
bénéfices distribués. Pour autant, outre l'existence dans
tous les pays de procédures exceptionnelles (voir le II), certains pays
ont emprunté la voie d'une diversification des modalités
d'imposition des entreprises.
A. L'ALLEMAGNE, UNE RÉDUCTION DES TAUX, UN ÉLARGISSEMENT DE L'ASSIETTE.
En Allemagne , les taux d'imposition ont été continûment réduits au cours de la période et cette tendance se poursuit dans la réforme récemment adoptée.
IMPOSITION DES BÉNÉFICES
Impôt sur les bénéfices |
Autres |
Incitations fiscales/exonérations |
Avant 2001 |
|
|
1988-1994
1
:
|
Taxe
professionnelle :
|
Amortissements
:
linéaire ou
dégressif. Accéléré : certains types
d'investissement seulement.
|
Janvier 2001 |
|
|
Taux uniforme de 25 % (26,375 % 2 ) Suppression de l'imputation et remplacement par système du demi revenu. |
Pas de modification |
Pertes :
--
ordinaires : report en arrière
|
1.
Introduction de la surtaxe de solidarité de 5,5 % introduite en
1993.
2. Y compris surtaxe de solidarité.
Dans le nouveau système, les bénéfices des entreprises
sont imposés au niveau de l'entreprise et les dividendes sont
imposés au niveau de l'actionnaire ; le crédit d'impôt
disparaît. En contrepartie, le taux d'imposition des
bénéfices est uniforme à 25 %, soit un taux
d'imposition total de 39,3 % en incluant la surtaxe de solidarité
et la taxe professionnelle assise sur les bénéfices, contre
52,3 % (bénéfices réinvestis) et 43,6 %
(bénéfices distribués) en 2000. Il n'y a plus
d'élimination complète des doubles-impositions ; seule la
moitié des dividendes reçus par les actionnaires (personnes
physiques) est incluse dans leur base imposable et les dividendes
interentreprises ne sont plus soumis à l'impôt. Mais,
l'exonération des dividendes versés par des filiales
étrangères
détenues à hauteur de plus de
10 % par des sociétés résidentes est désormais
étendue à l'ensemble des dividendes en provenance de
sociétés non résidentes
.
C'est également pour compenser la suppression du système
d'imputation complète que le gouvernement a modifié le
régime d'imposition des
plus-values de cessions de participation
.
Les plus-values peuvent en effet être considérées comme des
profits accumulés, ayant déjà été soumis
à l'impôt sur les sociétés, si bien que leur
taxation au moment de la cession de participation induirait une double taxation.
L'exonération des plus-values s'appliquait déjà dans le
cas des cessions de participations étrangères depuis 1994 pour
les participations supérieures à 10 % du capital. Pour le
gouvernement, cette mesure permet donc aussi de traiter désormais de
manière équivalente les investissements en Allemagne et à
l'étranger et d'éviter la multiplication de
sociétés holding dans d'autres pays européens.
Avec cette réforme, il s'agit de
renforcer l'attractivité
fiscale
du territoire allemand.
Combinée à cette inspiration, la
poursuite d'une plus grande
neutralité fiscale
marque la réforme. La
base d'imposition
est élargie par la
suppression d'un certain nombre de règles
dérogatoires en matière d'amortissements et de provisions.
L'application d'un taux uniforme d'imposition des bénéfices
est plus favorable au réinvestissement des bénéfices,
puisque les bénéfices non distribués étaient
auparavant imposés à un taux supérieur à celui des
bénéfices distribués. La réforme vise donc à
accroître le taux d'autofinancement des entreprises, jugé trop
faible en comparaison internationale.
Pour préciser les ordres de grandeur, des simulations ont
été réalisées par le
Conseil des Sages
en
novembre 2001. Ces simulations distinguent 3 modes de financement
(autofinancement, émission d'actions, endettement) et 5 types
d'investissement (intangibles, bâtiments, machines, placements
financiers, stocks) et permettent notamment de mesurer l'impact de la
réforme sur le taux moyen effectif d'imposition, entendu comme le taux
d'imposition que supporte un investissement type qui rapporterait avant
impôt une rentabilité de 20 % (voir chapitre sur la
réforme de l'imposition des bénéfices).
La baisse du taux d'imposition légal se traduit par
une baisse du
taux moyen effectif d'imposition
(tous types d'investissement et tous types
de financement confondus) de
3,2 points
. Elle est
plus faible que la
réduction du taux d'imposition légal (
13 points pour les
bénéfices non distribués, 4,3 points pour les
bénéfices distribués) en raison du
durcissement du
régime d'amortissement
. Alors qu'avant réforme le taux
d'imposition était supérieur en cas d'autofinancement,
l'harmonisation des taux conduit à aligner le taux d'imposition moyen
d'un investissement type financé par autofinancement sur celui d'un
investissement type financé par émission d'action (38,8 %).
Le taux d'imposition moyen reste en 2001 le plus élevé des
grands pays européens
.
B. LE ROYAUME-UNI, UNE FISCALITÉ PROGRESSIVE ET MODÉRÉE
Au Royaume-Uni , la fiscalité des entreprises a subi d'importantes modifications depuis 10 ans.
LES PRINCIPAUX AMÉNAGEMENTS DE LA FISCALITÉ DES
ENTREPRISES
AU ROYAUME-UNI
Réduction de 33 à 30 % du taux d'imposition des
bénéfices
(- 3,3 milliards de livres en 2000-2001,
- 3,75 en 2001-2002).
Suppression du remboursement du crédit d'impôt versé
aux actionnaires exonérés
(+ 5,4 milliards).
Suppression de l'
Advance Corporation Tax
(ACT), pré-paiement de
l'impôt sur les bénéfices lors du versement des dividendes,
et introduction d'un paiement trimestriel pour les grandes entreprises
(+ 2 milliards).
Taxation des services publics privatisés
.
Introduction d'une fiscalité portant sur l'utilisation
industrielle et commerciale
d'énergie
dans le but de
réduire les émissions de CO2.
Mesures spécifiques pour les PME
(- 1,2 milliard de livres en
2001-2002) : taux réduit, crédit d'impôt pour la
R&D, réductions d'impôts pour les employés
bénéficiant d'options ; création d'un taux 0 à
partir de 2002 pour les petits bénéfices (265 millions de livres
en 2003-2004).
Le Royaume-Uni, qui connaissait des
taux d'imposition des
sociétés les plus bas de l'OCDE
,
a poursuivi les
allégements de taux
. Malgré cette situation, la
part des
recettes tirées de l'impôt des sociétés dans le PIB
est
supérieure à celle des autres pays du G7
. Le taux
applicable aux PME a été réduit de 23 à 20 %
(jusqu'à 300 000 livres de bénéfices) en 2000 et
à 19 % en avril 2002. Au 1
er
avril 2000, un taux
réduit de 10 % jusqu'à 10 000 livres de
bénéfices a également été introduit, ce taux
a été abaissé à 0 au 1
er
avril 2002.
Aujourd'hui, l'imposition des bénéfices est progressive.
La création, dans le budget 2002, du taux 0 pour l'impôt des
sociétés qui déclarent moins de 10 000 livres de
bénéfices imposables est particulièrement débattue.
Elle peut être une source d'évasion fiscale pour des personnes
qui, se constituant en société, peuvent échapper à
l'imposition à concurrence de 10 000 livres de
bénéfices. En se constituant en société, un
travailleur indépendant peut se verser un traitement de 4 615
livres, représentant le plafond de l'abattement de l'impôt sur le
revenu, et réaliser des bénéfices de 10 000 livres,
qu'il s'attribuera sous forme de dividendes, en échappant à toute
imposition. Il devient donc possible de faire échapper un revenu de
15 000 livres à toute imposition, un salarié, avec le
même revenu, devant acquitter 3 827 livres d'impôt sur le
revenu et de cotisations sociales. Le budget estime que le coût de la
mesure sera de 265 millions de livres (0,23 point de PIB) en 2003-2004 et de
450 millions en 2004-2005 (0,39 point de PIB), estimant que la proportion de
personnes qui se constitueront en société sera faible.
L'
Institute for Fiscal Studies
(Blow
et al.
, 2002) estime pour sa
part que la mesure est potentiellement coûteuse, jugeant vraisemblable
que 50 % des travailleurs indépendants décident de se
constituer en société ce qui leur permettrait d'économiser
plus de 500 livres d'impôt par an et représenterait un coût
budgétaire de 1,2 milliard de livres (de 2,5 si tous les travailleurs
indépendants se constituaient en société).
IMPOSITION DES BÉNÉFICES EN 2000-2001
Bénéfice annuel, en £ |
Taux marginal |
Taux moyen |
< 10 000 |
10 |
10 |
10 001 - 50 000 |
22,5 |
10 à 20 |
50 001 - 300 000 |
20 |
20 |
300 001 - 1 500 000 |
32,5 |
20 à 30 |
> 1 500 000 |
30 |
30 |
Sources : HM Treasury, Budget, Adam et al. (2001).
La diminution des taux légaux d'imposition a été plus
que compensée par la suppression du remboursement de l'avoir fiscal sur
les dividendes.
Outre un objectif financier
, la suppression du remboursement du
crédit d'impôt est
destinée à stimuler
l'investissement
: dans l'ancien système, les
bénéfices distribués à des actionnaires
exonérés étaient au total moins taxés que les
bénéfices non distribués, incitant à des versements
de dividendes au détriment de l'autofinancement.
C. L'ESPAGNE, UNE BAISSE LIMITÉE DES TAUX, LE MAINTIEN DE RÈGLES D'ASSIETTE DIVERSIFIÉES
L'
Espagne
s'est inscrite dans le
même processus
de
réduction des taux légaux
d'imposition des
sociétés.
Elle se
singularise
par rapport à l'Allemagne et au Royaume-Uni
- où les cours sont plus faibles - par le
maintien
,
voire la
création
, de nombreux
crédits
d'impôts
(investissements à l'étranger, en R&D,
dépenses de formation professionnelle, investissements culturels,
investissements pour préserver l'environnement, investissements
liés à Internet).
Le taux général est de 35 %, mais il existe un taux
réduit de 30 %.
LES TAUX D'IMPÔT SUR
LES SOCIÉTÉS SELON LE CHIFFRE D'AFFAIRES
ET LE
BÉNÉFICE EN 2001
Chiffre d'affaires (euros) |
Bénéfice (euros) |
Taux |
< 5 000 000 |
< 90 000 |
30 % |
< 5 000 000 |
> 90 000 |
35 % |
> 5 000 000 |
> 0 |
35 % |
Source : Ministerio de economia y hacienda.
Par ailleurs, depuis 2002, les entreprises alimentant un fonds de pension de
retraite pour leurs travailleurs peuvent déduire 10 % des fonds de
leur base imposable et les limites d'apports de fonds pour la constitution de
plans de retraites privés sont assouplies.
D. L'ITALIE, UN PROCESSUS ÉVOLUTIF DE REMISE EN ORDRE
L'
Italie
a longtemps suivi un
parcours inverse
à celui de la majorité des pays européens, qui ont
réalisé d'importantes baisses du taux de l'imposition sur les
sociétés financées par l'élargissement de la base
imposable.
En effet, de 1980 à 1997 le
taux légal est réduit de 10
points
dans la
moyenne des pays européens
, tandis qu'
en
Italie
il
augmente
de
17 points
. Le taux d'imposition sur le
bénéfice des sociétés passe de 36,25 %
à 53,2 %. En
1993
un impôt sur le patrimoine net
d'entreprise a été introduit, d'abord temporairement, puis de
façon définitive. En
1995
, la «
loi
Tremonti
» rend déductible de l'IS les dépenses
d'investissements en biens d'équipement, mais il ne s'agit que d'une
mesure conjoncturelle. Ce n'est qu'en
1996
qu'a été
introduite une
réforme plus structurelle
. En
1998
,
année de son entrée en vigueur, la
différence entre le
taux italien
et le
taux moyen européen
est devenu
inférieur à
6 points
.
La réforme se donnait quatre objectifs principaux :
1°) Simplification de la relation entre le contribuable et le
système fiscal ;
2°) Décentralisation par un transfert de la responsabilité
de certaines dépenses et des recettes afférentes aux
administrations locales ;
3°) Baisse du taux légal et élargissement de la base
imposable ;
4°) Neutralité de l'imposition.
Le paysage fiscal d'avant la réforme comportait,
outre l'IS à
37 %,
une
multiplicité d'impôts sur les
entreprises
, levés à tous les niveaux administratifs :
ILOR
, impôt local sur le bénéfice d'entreprise (de
16,2 %) ;
ICIAP
, impôt municipal sur les
entreprises ;
impôt sur le patrimoine net
des entreprises
(0,75 % du capital, soit un prélèvement sur les profits
entre 5 et 10 %) ; cotisation au système de santé
assise sur les rémunérations des salariés, payée
par les salariés (1 %) et l'employeur (11,46 %).
L'objectif de simplification a été atteint par la substitution
à ces différents impôts supplémentaires locaux d'un
impôt unique, l'
IRAP
(impôt régional sur
l'activité productive). Son
assiette
est originale et
très large
puisque constituée de la
valeur
ajoutée
. Par conséquent, le taux de l'IRAP (4,25 %) est
faible. Son introduction répond aussi à un objectif de
neutralité
par rapport aux facteurs de production, car tous (y
compris le capital) sont imposés au même taux. La réforme
de 1998 a atteint son objectif de baisser le taux d'imposition des
bénéfices à recettes constantes. Avec la substitution de
l'IRAP à l'ILOR, le taux d'imposition des profits s'est réduit de
53,2 à 41,25 %. Par ailleurs, le financement du système de
santé en a été modifié dans un sens moins
assurantiel et plus contributif, les recettes d'IRAP se substituant en partie
aux cotisations sociales pour financer le système de santé.
L'IRAP, dont les recettes financent 40 % des dépenses courantes des
régions, a également permis d'abandonner partiellement les
transferts de l'administration centrale en faveur de l'autonomie fiscale. Le
renforcement progressif de l'autonomie permettra aux régions d'augmenter
le taux de l'IRAP (à ce jour d'un point au maximum) en plus du taux
actuel fixé par l'Etat et de le moduler selon les secteurs.
Par ailleurs, l'
impôt sur les sociétés
a
été profondément réformé. L'introduction de
la
Dual Income Tax
(DIT), aujourd'hui suspendue, appelle malgré
tout l'attention par son originalité. Elle avait substitué au
taux unique de 37 % de l'IS deux taux d'imposition :
un taux allégé (19 %) est appliqué à la
rentabilité « ordinaire » du capital investi.
Celle-ci se calcule en appliquant un taux d'intérêt calculé
sur la base du taux des obligations publiques et privées (actuellement
7 %) au patrimoine net, c'est-à-dire aux variations d'actifs
réalisés au cours d'une période de
référence ;
un taux plus élevé (37 %) est appliqué aux
bénéfices supplémentaires.
Le
taux moyen de l'impôt dépend du poids relatif des deux
composantes des profits
. La DIT introduit ainsi un
prélèvement progressif
sur le revenu d'entreprise
basé sur le taux de rentabilité du capital utilisé.
Le système est proche des systèmes scandinaves. L'idée
d'imposer les revenus du capital à un taux proportionnel et
inférieur à celui appliqué au revenu du travail, ainsi que
le partage des bénéfices en deux composantes, est commune aux
deux systèmes.
Cette réforme a été guidée par des
considérations d'efficacité : réduire le taux
marginal d'imposition des bénéfices et
faire face à la
concurrence fiscale
par la baisse du taux moyen, trop élevé
par rapport aux niveaux européens.
La loi de finances pour 2001 a prolongé cette réforme par la
baisse d'un point (de 37 à 36 %) du taux ordinaire sur les
bénéfices résiduels. Le
taux d'imposition
est
aujourd'hui de
32,5 % en moyenne
, mais il doit diminuer
jusqu'à 25 %, à mesure du déclassement des actifs
constitués avant 1996 et du renforcement de la part des actifs
assujettis au taux de 19 %.
In fine
, le taux d'imposition total (comprenant l'IRAP) varie de
23,25 % (un des plus bas d'Europe), pour les entreprises
bénéficiant entièrement de la DIT à un maximum de
40,25 %, le plus élevé en Europe.
La réforme fiscale de 1997-98 a permis de réduire le coût
relatif du financement sur fonds propres des nouveaux investissements et
placé l'Italie parmi les pays qui offrent des dispositions fiscales
généreuses aux nouveaux investissements.
Toutefois, le nouveau gouvernement a modifié le système en cause
en accentuant sa dimension incitative. La loi
« Tremonti-bis » prévoit l'exclusion de la base de
l'impôt sur les sociétés (IS) de 50 % du volume des
investissements et des dépenses en formation (dans la limite de
20 % de la masse salariale), excédant la moyenne des 5
dernières années. Ces mesures sont conjoncturelles et concernent
les investissements effectués en 2001 et en 2002.
La loi « Tremonti-bis » crée une segmentation du
prélèvement entre entreprises avec la coexistence de trois taux
d'imposition.
Elle assurerait la transition vers une réforme complète de la
fiscalité annoncée au cours de la campagne électorale, qui
envisage, outre la suppression de la DIT, la baisse du taux de l'IS à
33 % et l'élargissement de la base imposable pour inclure
partiellement les dividendes et les plus-values des participations
substantielles. La proposition de réforme introduit une limitation de la
déductibilité des intérêts pour
rééquilibrer la perte de neutralité du système.
Le programme électoral comprenait aussi l'abolition de l'
IRAP
,
censé augmenter à l'excès les prélèvements
sur les bénéfices (33 % de DIT plus 5 % d'impact moyen
de l'IRAP). Mais le coût de sa disparition (2,3 points de PIB en 2000),
et le problème du financement des régions, ont
réorienté le gouvernement vers une redéfinition graduelle
de la base imposable. La dernière proposition comprend l'exclusion de la
masse salariale de la base imposable. Une simulation estime le montant de la
réduction d'impôt à 60 % (1,6 point de PIB).
E. LES PAYS-BAS, UN PAYS DE CONTRASTES
Aux
Pays-Bas
, l'imposition des sociétés n'a pas fait l'objet
de réformes spécifiques dans les années 1990. Elle repose
sur un système dual. Les bénéfices sont imposés
à un taux de 35 %, un taux réduit de 30 % étant
appliqué aux « petits bénéfices ».
Plusieurs dispositifs sont mis en place pour compenser la double imposition. En
particulier, les dividendes interentreprises tirés de participations
substantielles dans des entreprises néerlandaises ou
étrangères sont exonérés de l'impôt.
Le taux d'imposition effectif moyen (celui que supporte un investissement
type), qui rapporterait avant impôt une rentabilité de 20 %,
se situe avec 31 % dans la moyenne européenne et est donc
supérieur à celui de l'Irlande et des pays du Nord de l'Europe.
En revanche, un certain nombre de dispositifs du droit fiscal des
sociétés sont très favorables à l'implantation de
holdings
aux Pays-Bas. Les entreprises faisant partie d'un groupe
international peuvent ainsi constituer des réserves spéciales
allant jusqu'à 80 % du
revenu financier
qualifié
(essentiellement intérêts et royalties), et les
gains en
capital
tirés de participations substantielles (5 % et plus du
capital) dans d'autres entreprises, néerlandaises ou
étrangères, sont exonérés de l'impôt sur les
sociétés.
II. DES RÉFORMES AUX EFFETS NUANCÉS ; UN PANORAMA DE CONCURRENCE FISCALE OÙ LA FRANCE EST MAL PLACÉE
Les recettes tirées de l'imposition société n'ont pas reculé malgré les baisses de taux mises en oeuvre par les Etats. On pourrait en déduire que la concurrence fiscale, prévisible en théorie, a épargné l'Europe. Cette conclusion serait erronée. La prise en compte de nombreux indicateurs micro-économiques et l'absence de progrès substantiels dans l'harmonisation des prélèvements sur les entreprises en Europe convergent vers le diagnostic de l'existence d'une concurrence fiscale, que la France est mal placée pour affronter.
LES MÉTHODES DE COMPARAISON DES CHARGES
PESANT SUR
LES ENTREPRISES
De
nombreuses méthodes de comparaison des charges pesant sur les
entreprises ont été développées. Outre la
comparaison des
taux légaux
d'imposition, on peut distinguer deux
grands types de méthodes : celles qui sont fondées sur des
taux apparents
d'imposition
rapportant
des
recettes
fiscales
effectives à leurs
assiettes économiques
(type IS/EBE - impôt sur les sociétés rapporté
à l'excédent brut d'exploitation) et celles qui sont
fondées sur des
taux simulés
- taux effectifs moyens ou
marginaux - portant sur
des investissements fictifs
.
La
comparaison des taux légaux
est limitée par l'existence
d'une grande diversité des règles d'assiette en matière de
fiscalité des entreprises et par celle des autres
prélèvements pesant sur les entreprises.
La comparaison des
taux apparents de taxation
consiste souvent à
analyser le poids dans le PIB des recettes d'impôt sur les
sociétés. Mais, cet indicateur de pression fiscale apparente, est
sensible au partage de la valeur ajoutée. Aussi est-il
préférable de rapporter les recettes fiscales à un
indicateur du revenu des entreprises, l'excédent net d'exploitation
(ENE) en règle générale.
Ce deuxième indicateur peut être amélioré de deux
manières : d'une part, seul le revenu des entreprises soumises
à l'IS devrait être pris en compte, et non l'ENE de l'ensemble de
l'économie. D'autre part, d'autres impôts - notamment la taxe
professionnelle en France - doivent être intégrés dans la
charge fiscale pesant sur les entreprises. On définit ainsi le
taux
implicite
de
taxation
, rapport de l'ensemble de la charge fiscale
pesant sur les entreprises au revenu des entreprises soumises à l'IS.
A côté de ces
indicateurs macroéconomiques
, des
indicateurs microéconomiques
sont proposés. Il s'agit de
calculer des taux d'imposition en appliquant la législation fiscale
à des cas-types d'entreprises ou d'investissements.
Cette seconde catégorie d'indicateurs, les
taux effectifs
d'imposition
, a pour objectif de permettre les comparaisons internationales
de pression fiscale en se fondant uniquement sur les paramètres de
législation fiscale. Il s'agit d'une méthode qui reste assez
largement expérimentale. Par conséquent, les résultats sur
lesquels elle débouche doivent être considérés avec
beaucoup de précautions. Leurs calculs sont généralement
complexes dans la mesure où ils dépendent du type
d'investissement considéré. Plus précisément, il
faut formuler une hypothèse sur le bien financé (matériel,
bâtiment...), les différents biens ouvrant droit à des
amortissements différents, et sur les modalités de son
financement (autofinancement, émission d'actions, emprunt), celles-ci
ayant des traitements comptables et fiscaux différents.
Il s'agit dans tous les cas de comparer la charge fiscale pesant sur un
investissement d'un rendement donné. Cette méthode peut
être appliquée à une
entreprise
, elle
débouche alors sur l'élaboration de
taux effectifs moyens
d'imposition
. Elle peut être appliquée à un
investissement marginal
et débouche alors sur la mise en
évidence de «
coins fiscaux
marginaux
».
A. UNE STABILITÉ GLOBALE
Comme
pour l'imposition du revenu des ménages, la baisse des taux
légaux d'imposition ne s'est pas toujours traduite par un recul des
recettes tirées par les Etats de la taxation des entreprises.
La considération des
taux apparents d'imposition
des
sociétés conduit à mettre en évidence une
stabilité globale
et une
faible dispersion
.
Le poids de l'impôt sur les sociétés (IS) exprimé en
points de PIB est relativement proche. Seuls se distinguent, l'Autriche et
l'Allemagne (avec des recettes nettement inférieures à la
moyenne), le Luxembourg et, dans une moindre mesure, le Royaume-Uni (avec des
recettes d'IS légèrement supérieures à l'ensemble
des autres pays). Au cours de la décennie 1990, le poids de l'IS - qui
s'était beaucoup accru dans les années 80 - n'a que
légèrement progressé dans l'ensemble des pays de l'UE.
Cette
progression
est en grande partie due aux évolutions
conjoncturelles et aux
conditions de partage de la valeur ajoutée
entre les salaires et les profits, au bénéfice de ceux-ci. En
outre, elle laisse à penser que les
modifications structurelles
opérées dans les pays membres au cours des dernières
années
se sont compensées
.
Impôt sur les sociétés en % du PIB
|
1980 |
1990 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001* |
2002* |
Autriche |
1,4 |
1,3 |
1,8 |
1,8 |
1,8 |
1,7 |
1,7 |
1,8 |
1,8 |
Allemagne |
1,8 |
1,8 |
1,7 |
1,9 |
1,9 |
2,0 |
2,1 |
1,9 |
1,9 |
Belgique |
2,2 |
2,4 |
3,1 |
3,5 |
3,6 |
3,5 |
3,5 |
3,5 |
3,4 |
Danemark |
1,5 |
2,6 |
3,4 |
3,7 |
3,6 |
3,6 |
3,5 |
3,5 |
3,5 |
Espagne |
1,2 |
3,1 |
2,1 |
2,1 |
2,1 |
2,1 |
2,1 |
2,1 |
2,1 |
Finlande |
1,2 |
2,0 |
3,0 |
3,7 |
3,7 |
3,7 |
3,8 |
3,6 |
3,5 |
France |
2,1 |
2,4 |
1,9 |
2,2 |
2,7 |
2,9 |
2,9 |
2,8 |
2,8 |
Grèce |
0,5 |
1,7 |
2,2 |
2,4 |
2,9 |
3,2 |
3,3 |
3,3 |
3,2 |
Irlande |
1,5 |
2,2 |
3,6 |
3,7 |
3,7 |
3,7 |
3,5 |
3,4 |
3,3 |
Italie |
2,4 |
3,7 |
4,2 |
4,3 |
3,9 |
4,1 |
4,1 |
3,9 |
3,9 |
Luxembourg |
7,6 |
6,6 |
6,9 |
8,3 |
8,3 |
8,2 |
8,2 |
8,0 |
7,6 |
Pays-Bas |
3,0 |
3,4 |
4,1 |
4,6 |
4,5 |
4,5 |
4,4 |
4,2 |
4,2 |
Portugal |
0,9 |
2,5 |
2,7 |
2,8 |
2,8 |
2,9 |
3,0 |
3,1 |
3,1 |
RU |
2,9 |
4,1 |
3,8 |
4,3 |
4,7 |
4,7 |
4,8 |
4,7 |
4,7 |
Suède |
1,2 |
2,0 |
3,1 |
2,8 |
2,9 |
2,9 |
2,8 |
2,7 |
2,6 |
Europe |
2,2 |
2,9 |
2,7 |
3,0 |
3,1 |
3,2 |
3,2 |
3,2 |
3,1 |
*
Estimations/Prévisions.
Sources : Commission européenne/Eurostat.
La part de l'impôt sur les sociétés dans les recettes
fiscales, qui s'était réduite entre 1970 et 1986, s'est
renforcée depuis.
Part de l'IS dans les recettes fiscales
|
1970 |
1975 |
1980 |
1986 |
1991 |
1995 |
1997 |
Allemagne |
8,1 % |
6,9 % |
7,9 % |
8,4 % |
6,3 % |
4,4 % |
5,9 % |
Belgique |
6,9 % |
7,3 % |
5,7 % |
5,8 % |
5,4 % |
6,6 % |
7,5 % |
Espagne |
8,2 % |
8,2 % |
7,9 % |
10,7 % |
9,8 % |
8,7 % |
9,6 % |
France |
8,7 % |
8,3 % |
8,0 % |
7,9 % |
7,6 % |
8,3 % |
9,3 % |
Grèce |
1,7 % |
3,6 % |
3,9 % |
4,1 % |
5,3 % |
7,8 % |
7,4 % |
Italie |
6,8 % |
6,4 % |
7,9 % |
10,7 % |
9,8 % |
8,8 % |
9,6 % |
Pays-Bas |
6,7 % |
7,7 % |
6,6 % |
7,3 % |
7,3 % |
7,4 % |
10,5 % |
Portugal |
14,5 % |
8,8 % |
7,9 % |
5,5 % |
9,7 % |
8,2 % |
11,0 % |
Royaume-Uni |
8,7 % |
6,2 % |
8,4 % |
10,6 % |
9,4 % |
9,4 % |
12,1 % |
Source : OCDE, calculs des auteurs
B. UNE CONCURRENCE FISCALE ?
Les
variations concernant les
taux apparents d'imposition
ne confirment pas
totalement l'existence d'un processus de
concurrence fiscale
que les
analyses théoriques conduisent à redouter tout
particulièrement en matière de prélèvements sur les
entreprises.
Pour autant, des
indicateurs
plus
micro-économiques
délivrent un message différent et plus conforme aux
intentions concurrentielles qui semblent avoir fondé les baisses des
taux légaux d'imposition des sociétés.
1. La réduction des taux légaux d'imposition semble s'être accompagnée, le plus souvent, mais pas systématiquement, d'un allégement de la pression fiscale
Les
effets des modifications des taux légaux d'imposition ont varié
considérablement selon les pays. Leur traduction en termes de
taux
effectifs moyens d'imposition
n'est pas mécanique.
|
Taux nominaux |
Taux effectifs moyens d'imposition |
||||
|
1991 |
1999 |
Variations |
1991 |
1999 |
Variations |
Allemagne |
50/36 |
25 |
-25/-11 |
38 |
46,1 |
+8,1 |
Autriche |
30 |
34 |
+4 |
n.d. |
n.d. |
n.d. |
Belgique |
39 |
39 |
0 |
45,7 |
33,1 |
-12,6 |
Espagne |
35 |
35 |
0 |
34,9 |
12,1 |
-22 ,8 |
France |
42 |
36,4 |
-5,6 |
45 |
50,2 |
+5,2 |
Italie |
36 |
36 |
0 |
40,4 |
27,3 |
-13,1 |
Pays-Bas |
35 |
35 |
0 |
58,4 |
50,4 |
-8 |
Portugal |
36 |
32 |
-4 |
39,1 |
25,9 |
-13,2 |
Royaume-Uni |
34 |
30 |
-4 |
16,5 |
19 |
+2,5 |
Les
changements apportés aux
taux légaux
de l'impôt sur
les sociétés peuvent s'accompagner d'évolutions des
taux effectifs moyens d'imposition
de sens contraire.
Les baisses de taux intervenues en France, en Allemagne et au Royaume-Uni n'ont
pas empêché les taux effectifs moyens de s'accroître dans
ces pays. Ce résultat paradoxal traduit l'effet de
l'élargissement de l'assiette fiscale, dont on a souligné la
concomitance avec les baisses de taux nominaux qui sont intervenues dans ces
pays. On rappelle ici que les taux effectifs moyens d'imposition comprennent,
non seulement l'impôt sur les sociétés, mais aussi les
impôts sur les revenus engendrés par l'activité des
entreprises, en particulier l'imposition des entrepreneurs individuels et des
dividendes.
2. Les baisses des taux légaux d'imposition, symptômes d'une volonté de concurrence fiscale qui en comporte de nombreux autres ?
Les
progrès du « marché unique » européen
ont suscité des réflexions parallèles sur l'importance
pour des Etats européens de s'entendre sur des règles de
coordination fiscale en matière d'imposition des sociétés.
Une attention particulière a été portée aux
perspectives d'optimisation fiscale des grandes entreprises et aux
régimes dérogatoires appliqués par les Etats.
L'application de fait du principe d'imposition dans le pays de la source,
associé à une correction imparfaite des doubles impositions et
à la coexistence d'une
pluralité de régimes
d'imposition dans l'UE,
permet aux grandes entreprises de minimiser leurs
charges d'imposition.
L'existence de
régimes
ou, le plus souvent, de
pratiques
dérogatoires
renforce cette éventualité. La Commission
en a dénombré plus de 200 et l'étude de l'OFCE analyse
certaines des voies d'optimisation fiscale, qu'il s'agisse de profiter des
régimes dérogatoires d'imposition des
« holdings », de mobiliser les techniques de transferts des
bénéfices telle que la technique des prix de transferts, ou
encore d'offrir des régimes favorables à l'accueil de
sièges sociaux.
Face à cette situation,
une certaine réaction
s'est
produite à
l'initiative de la Commission
. Mais, force est de
reconnaître que
le Conseil
, c'est-à-dire les Etats membres,
qui constituent l'échelon politique des institutions européennes,
n'a pas réellement progressé
vers l'adoption de solutions.
La Commission s'est engagée dans deux démarches
complémentaires pour contenir la concurrence fiscale dans le domaine de
l'imposition directe des entreprises. La première a consisté
à éliminer les sources de concurrence fiscale
déloyale ; la seconde, nettement plus ambitieuse, à proposer
plusieurs pistes alternatives d'élimination des pratiques d'optimisation
fiscale.
Jusqu'à présent, seule la première démarche a
reçu des prolongements au sein du Conseil.
Le Conseil Ecofin de décembre 1997 a adopté une série de
mesures destinée à lutter contre la concurrence fiscale
dommageable, ainsi que le principe de l'élaboration d'un code de bonne
conduite.
Encore doit-on souligner la modestie de la portée de la décision
du Conseil.
L'accord entre les pays porte non pas sur la concurrence fiscale
elle-même mais uniquement sur les formes déloyales de celles-ci
avec une acception assez étroite. Plus précisément, est
considéré comme contraire au code de bonne conduite, le fait que
subsistent dans un Etat membre des traitements fiscaux
préférentiels, c'est-à-dire favorisant une
catégorie d'entreprises au détriment des autres.
En revanche, en l'état, le fait qu'un Etat membre pratique une
imposition très basse, mais généralisée, n'est pas
considéré comme relevant du domaine de la lutte contre la
concurrence fiscale déloyale. Enfin, le
code de bonne conduite
n'est
pas contraignant juridiquement
.
Dans ce contexte, il n'est pas étonnant que les schémas
d'harmonisation proposés par la Commission pour contrer l'optimisation
fiscale en matière d'impôt sur les entreprises soient
restés jusqu'à présent dépourvus de prolongement au
sein du Conseil.
LES QUATRE PISTES PROPOSÉES PAR LA COMMISSION POUR
ÉLIMINER L'OPTIMISATION EN MATIÈRE DE FISCALITÉ DES
ENTREPRISES
Dans un
rapport d'octobre 2001, la Commission propose quatre pistes pour contrer
l'optimisation fiscale en matière d'imposition des entreprises.
Elles présentent un « crescendo » en termes
d'abandon de souveraineté par les Etats membres.
Première piste : un bénéfice imposable
consolidé calculé selon les règles de l'Etat de
résidence.
Les sociétés résidentes des Etats membres ont la
possibilité de calculer le revenu imposable résultant de leurs
opérations dans les Etats membres,
selon les règles
d'imposition des sociétés de l'Etat membre où leurs
quartiers généraux sont installés (l'Etat de
résidence).
Selon un principe de reconnaissance mutuelle, un Etat
membre accueillant un investissement en provenance d'un autre Etat membre
participant au système s'engage à accepter les règles de
cet autre Etat, l'Etat de résidence, pour la détermination de la
base imposable située sur son territoire. Dans ce mécanisme,
chaque Etat de résidence administre son propre système et les
bénéfices imposables qu'il détermine sont ensuite
répartis entre les Etats selon une règle commune, en vue d'y
être imposés aux taux en application dans ces Etats.
Deuxième piste : un bénéfice imposable
consolidé calculé selon des règles européennes.
Cette fois, les sociétés calculent le revenu imposable lié
à leurs opérations dans les Etats membres
selon des
règles communes établies au niveau de l'UE
.
Troisième piste : un impôt sur le revenu des
sociétés
.
Le bénéfice imposable est calculé
selon des
règles communes mais le taux d'imposition applicable à cette base
est, lui aussi, commun
.
Piste 4 : une assiette unique harmonisée de l'impôt sur
les
entreprises
dans l'Union européenne
.
Des règles communes président au calcul du bénéfice
imposable et remplacent les codes fiscaux nationaux. Ce système nouveau
s'applique à
toutes les entreprises
dans tous les Etats membres
et remplace les systèmes nationaux.
On peut souligner que cette forme d'inertie européenne tranche avec les
modèles, logiquement plus fédéraux en vigueur en
Amérique du Nord. Aux Etats-Unis, par exemple, outre l'impôt
fédéral, le système en vigueur en matière
d'imposition des sociétés au niveau des Etats
, marie les
deux concepts de consolidation - regroupement et compensation des bases
imposables d'entités juridiquement distinctes d'un même groupe -
et de répartition de la base consolidée entre les Etats, pour y
être imposée aux taux en vigueur dans ces Etats.
La répartition y repose sur la pondération de trois
critères - la propriété, les ventes et la masse salariale
-, les poids étant déterminés par l'Etat selon les
règles duquel la consolidation est opérée.
En conclusion, il apparaît que le
défaut de progrès
notables
vers une
harmonisation coopérative
des règles
d'imposition des entreprises en Europe constitue une autre face de
phénomènes de concurrence fiscale
qui, jusqu'à
présent peu décelables à partir d'une observation
macroéconomique, trouvent dans
l'existence de règles
nationales à géométrie variable et dans les
allégements des conditions d'imposition
consentis par les Etats, un
terrain fertile et une concrétisation empirique.
3. La France, un espace peu attractif
Comme l'avait déjà souligné le rapport de votre commission des finances consacré à la concurrence fiscale déjà cité, la France présente une attractivité fiscale insuffisante par rapport à ses voisins européens.
a) En France, un taux de taxation élevé
Sur la
base du critère du
taux implicite de taxation des
entreprises
2
(
*
)
, la
France apparaît comme le deuxième pays le moins bien placé.
Elle n'est « précédée » que par
l'Italie, pays pour lequel ce ratio n'a qu'une signification limitée en
raison du nombre relativement faible d'entreprises assujetties à
l'impôt sur les sociétés, du fait des particularités
structurelles des entreprises italiennes, souvent individuelles.
Par ailleurs, alors que dans de nombreux pays, une réduction de la
pression fiscale est intervenue, la France a parcouru un chemin inverse.
Taux implicites de taxation des entreprises
|
1970 |
1975 |
1980 |
1986 |
1991 |
1995 |
1997 |
Allemagne |
18,9 % |
22,4 % |
26,9 % |
21,2 % |
16,5 % |
12,0 % |
12,7 % |
Belgique |
26,5 % |
41,0 % |
43,1 % |
27,2 % |
24,2 % |
29,6 % |
32,6 % |
Espagne |
6,8 % |
9,2 % |
8,3 % |
9,0 % |
13,9 % |
8,3 % |
12,5 % |
France |
36,1 % |
54,9 % |
76,1 % |
50,4 % |
44,6 % |
51,4 % |
55,1 % |
Grèce |
1,0 % |
2,2 % |
3,4 % |
5,0 % |
6,4 % |
9,3 % |
10,1 % |
Italie |
29,1 % |
31,4 % |
39,9 % |
52,7 % |
74,7 % |
57,9 % |
68,0 % |
Pays-Bas |
20,0 % |
32,2 % |
26,3 % |
20,8 % |
22,4 % |
21,8 % |
29,2 % |
Portugal |
19,1 % |
18,7 % |
13,9 % |
11,2 % |
23,6 % |
18,4 % |
25,5 % |
Royaume-Uni |
37,7 % |
58,4 % |
50,9 % |
52,6 % |
65,3 % |
41,1 % |
50,8 % |
Source : Economie et Prévision n° 156, 2002-5
«
La concurrence fiscale sur le bénéfice des
entreprises : théories et pratiques
», Bretin -
Guimbert - Madiès.
Les enseignements tirés de cet indicateur doivent être
considérés avec une certaine prudence en raison des
problèmes de méthode évoqués plus haut et de
décalages dans le temps entre les recettes et l'assiette prises en
compte pour le construire. Les variations de la valeur de cet indicateur d'une
année sur l'autre témoignent de la nécessité de
croiser les taux implicites de taxation avec d'autres éléments de
mesure.
Le recours à des
indicateurs microéconomiques
, appliquant
les législations fiscales nationales à des cas-types
d'entreprises, enrichit le diagnostic, même si ces indicateurs construits
à partir de données extrêmement difficiles à
exploiter doivent être considérés avec prudence, d'autant
qu'ils ne reflètent souvent pas une situation générale.
Il vient confirmer les handicaps de la France
.
Tel est le cas pour les
taux effectifs moyens d'imposition
des
entreprises
3
(
*
)
. Ce taux est
particulièrement élevé en France.
Taux effectifs moyens d'imposition des entreprises
|
1991 |
1999 |
Allemagne |
38,0 % |
46,1 % |
Belgique |
45,7 % |
33,1 % |
Espagne |
34,9 % |
12,1 % |
France |
45,0 % |
50,2 % |
Italie |
40,4 % |
27,3 % |
Pays-Bas |
58,4 % |
50,4 % |
Portugal |
39,1 % |
25,9 % |
Royaume-Uni |
16,5 % |
19,0 % |
Norvège |
22,1 % |
8,4 % |
Suisse |
45,9 % |
32,0 % |
Canada |
34,0 % |
42,6 % |
Etats-Unis |
39,1 % |
49,2 % |
Japon |
53,5 % |
52,1 % |
Maximum |
58,4 % |
52,1 % |
Médiane |
40,4 % |
33,1 % |
Minimum |
16,5 % |
- 9,6 % 1) |
Coeur UE |
40,7 % |
37,7 % |
Périphérie UE |
38,7 % |
9,5 % |
1. Ce
taux correspondrait à celui de la Grèce et s'expliquerait par un
aménagement du régime d'imposition des dividendes combinant une
imposition à taux 0 et le remboursement d'un avoir fiscal.
Source : Bretin (2000).
Une particularité française est de tenir beaucoup moins compte
du résultat des entreprises que ses concurrents.
Ainsi, si les prélèvements sont à peu près
identiques en France et en Allemagne pour les entreprises
bénéficiaires - et comparativement élevés par
rapport au Royaume-Uni -, l'Allemagne connaît une législation
fiscale mieux adaptée aux performances de ses entreprises.
Taux
d'imposition de cas-types d'entreprises (en % de la valeur
ajoutée)
- entreprises bénéficiaires -
|
France |
Royaume-Uni |
Allemagne |
Etats-Unis |
Japon |
|
|
New York |
Texas |
||||
Total des prélèvements hors IS : |
3,1 |
0,6 |
2,3 |
1,5 |
1,4 |
3,6 |
- impôt local sur les sociétés |
- |
- |
- |
1,4 |
- |
2,3 |
- taxe professionnelle |
2,9 |
- |
2,4 |
- |
- |
- |
- taxe sur les immobilisations |
0,2 |
0,6 |
0,2 |
0,1 |
1,4 |
1,3 |
Impôt sur les sociétés national |
4,9 |
3,6 |
5,5 |
4,9 |
5,0 |
4,1 |
Total des prélèvements |
8,0 |
4,2 |
8,2 |
6,4 |
6,4 |
7,7 |
- entreprises déficitaires -
|
France |
Royaume-Uni |
Allemagne |
Etats-Unis |
Japon |
|
|
New York |
Texas |
||||
Total des prélèvements hors IS : |
3,3 |
1,0 |
0,7 |
0,2 |
1,2 |
1,4 |
- impôt local sur les sociétés |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
- taxe professionnelle |
2,9 |
- |
0,4 |
- |
- |
- |
- taxe sur les immobilisations |
0,4 |
1,0 |
0,4 |
0,2 |
1,2 |
1,4 |
Impôt sur les sociétés national |
0,4 |
- |
- |
- |
- |
- |
Total des prélèvements |
3,7 |
1,0 |
0,7 |
0,2 |
1,2 |
1,4 |
Cette
analyse fait l'hypothèse d'un coût salarial identique.
Législations 1998.
Source : Fouillat (1999)
Le poids des prélèvements sur les entreprises sans lien avec
leurs résultats est particulièrement important en France et
explique ces différences.
La considération des
coins fiscaux marginaux
4
(
*
)
sur le capital confirme ces
résultats.
En France, en 1999, le
coin fiscal marginal
d'un investissement
constitué de machines, de bâtiments et de stocks, et
financé conjointement par autofinancement, par émission d'actions
et par emprunt, est de 2,8 %. Ce coin correspond à l'écart
de rendement entre un investissement marginal avant impôt (6,2 %) et
après impôt (3,4 %).
Non seulement le coin fiscal marginal est élevé en France mais
encore, au contraire de la plupart des partenaires européens, il a connu
une augmentation.
Coins fiscaux marginaux sur le capital
|
1991 |
1999 |
Variations 1999/1991 |
Allemagne |
1,0 % |
1,2 % |
+ 0,2 % |
Belgique |
1,3 % |
1,2 % |
- 0,1 % |
Espagne |
1,9 % |
2,6 % |
+ 0,7 % |
France |
2,1 % |
2,8 % |
+ 0,7 % |
Grèce |
0,2 % |
1,1 % |
+ 0,9 % |
Italie |
3,1 % |
2,3 % |
- 0,8 % |
Pays-Bas |
2,1 % |
2,1 % |
0 |
Portugal |
1,3 % |
1,0 % |
- 0,3 % |
Royaume-Uni |
2,0 % |
2,0 % |
0 |
Norvège |
2,3 % |
2,0 % |
- 0,3 % |
Suisse |
1,7 % |
1,2 % |
- 0,5 % |
Canada |
3,8 % |
4,3 % |
- 0,5 % |
Etats-Unis |
3,0 % |
2,4 % |
- 0,6 % |
Japon |
2,7 % |
2,3 % |
- 0,4 % |
Source : Bretin (2000).
b) Le point de vue de la localisation des filiales
Enfin,
la France est très mal classée dans la hiérarchie des pays
fiscalement attrayants pour la localisation de filiales de
sociétés-mères situées dans les autres pays
européens.
Les
taux moyens d'imposition
de l'investissement dans une filiale
installée en France d'une société-mère
localisée dans un autre pays européen sont
particulièrement peu favorables à des implantations
réalisées sur le sol français.
Classement, en termes de taux effectifs moyens d'imposition, du
territoire français au sein de l'UE en fonction du pays d'origine de la
société-mère qui décide d'implanter une filiale
dans l'un des quinze pays de l'UE
Pays d'origine de la société-mère qui décide d'implanter une filiale dans l'un des pays de l'UE |
Classement du territoire français au sein des quinze pays de l'UE susceptibles d'accueillir la filiale |
Allemagne |
14/15 |
Autriche |
13/15 |
Belgique |
14/15 |
Espagne |
13/15 |
Finlande |
14/15 |
France |
13/15 |
Grèce |
10/15 |
Irlande |
14/15 |
Italie |
14/15 |
Luxembourg |
13/15 |
Pays-Bas |
13/15 |
Portugal |
11/15 |
Royaume-Uni |
14/15 |
Suède |
13/15 |
Note : les taux effectifs sont calculés à partir
de la législation fiscale de 1999 et sur la base d'une hypothèse
de rendement de l'investissement égal à 20 %.
Dans le cas où une multinationale, dont la
société-mère est italienne, décide d'implanter une
nouvelle filiale dans l'un des quinze pays européens, la France arrive
en quatorzième position si l'on compare les
taux effectifs moyens
d'imposition des quinze pays de l'UE susceptibles d'accueillir la nouvelle
filiale.
Source : calcul des auteurs.
CHAPITRE III :
UNE ACCENTUATION DE LA PRESSION DES
PRÉLÈVEMENTS SUR LES MÉNAGES
Il
n'y a pas eu, en Europe, de grande réforme de l'imposition des revenus
des ménages
. Cependant, des tentatives, inscrites souvent dans une
perspective pluriannuelle, et fréquemment remises en cause au gré
des alternances politiques ou des retournements du cycle économique, ont
été faites pour
réduire les taux nominaux
d'imposition
. Elles se sont le plus souvent
accompagnées de
mesures d'élargissement de l'assiette d'imposition afin de les
financer
, mais aussi
d'
assurer une plus grande neutralité
et équité de l'impôt sur le revenu.
Le
bilan
de ces mesures reste
décevant
.
La pression
fiscale sur le revenu des ménages, qui avait déjà beaucoup
progressé dans la période antérieure, s'est encore
accentuée
et, compte tenu d'
un renforcement de la
progressivité
, certaines catégories de population ont
été plus touchées que d'autres.
I. DES RÉFORMES POURSUIVANT UN DOUBLE OBJECTIF DE RÉDUCTION DES TAUX D'IMPOSITION ET D'ÉLARGISSEMENT DES ASSIETTES
Des réformes sont intervenues, articulées autour d'une baisse des taux légaux d'imposition et d'élargissement de l'assiette.
A. LES RÉFORMES DANS QUELQUES PAYS EUROPÉENS
De
façon générale, les réformes mises en oeuvre en
Europe durant les dix dernières années
ont visé
à
réduire les taux d'imposition marginaux, censés
décourager le travail ou l'épargne
.
Cette
baisse
s'est
souvent accompagnée de mesures
d'élargissement de la base imposable
, par la suppression de certains
abattements ou crédits d'impôt.
Souvent, les réformes
ont visé à améliorer la situation des familles avec
enfants
, compte tenu des problèmes de natalité en Allemagne
et dans les pays d'Europe du Sud et des problèmes de pauvreté au
Royaume-Uni.
Une telle orientation a été prise
en Allemagne
, où
la réforme fiscale engagée par le gouvernement Schröder vise
à élargir la base imposable afin de permettre une baisse des taux
d'imposition. Le
taux le plus bas
a été ramené de
25,9 % en 1998
à
19,9 % en 2002
; il
devrait baisser à 15 % en 2005. Le
taux maximum
,
déjà passé de
53 % à 48,5 %,
doit
baisser à
42 %.
Les
principales données de la réforme de l'IRPP en
Allemagne
|
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
Cumul |
Taux maximum |
53 |
51 |
48,5 |
48,5 |
47 |
47 |
42 |
- 11 points |
Taux minimum |
23,9 |
22,9 |
19,9 |
19,9 |
17 |
17 |
15 |
- 8,9 points |
Minimum
non imposable
|
6681 |
6902 |
7206 |
7235 |
7426 |
7426 |
7664 |
+ 11 % |
Source : ministère des Finances allemand.
La baisse du taux maximum est importante (- 11 points) ainsi que celle du taux
minimum, qui est toutefois plus réduite (- 8,9 points). En outre, une
hausse du plancher d'imposition est prévue. Toutefois, elle devrait
être inférieure à la hausse du salaire moyen sur la
période, ce qui devrait se traduire par une augmentation du nombre des
contribuables.
En Espagne
, plusieurs réformes sont intervenues allant dans ce
même sens.
Une réforme
en 1992
a eu pour but d'élargir l'assiette
fiscale et d'inciter à l'épargne de long terme. Elle a
été financée par l'intégration dans l'assiette de
nouvelles sources de revenus, comme les avantages en nature.
En 1997
, le nombre de tranches de l'IRPP a été
réduit de 16 à 10. La réforme de l'impôt sur le
revenu des personnes physiques mise en oeuvre
en 1999
a poursuivi
plusieurs objectifs : réduire la charge fiscale et approfondir les
mesures encourageant le travail ; accroître la neutralité
envers les divers types de revenus et placements ; remplacer un ensemble
d'exonérations par un revenu minimal exonéré ;
abaisser le coût de perception de l'impôt.
Les taux marginaux ont été réduits de 56 à
48 % pour la tranche supérieure et de 20 à 18 % pour la
tranche inférieure, tandis que le nombre de tranches a diminué de
10 à 6.
Le revenu fictif des logements occupés par leurs propriétaires
n'est plus imposable, au nom de la simplification.
Le seuil à partir duquel il faut remplir une déclaration a
été relevé à 21.000 € (au lieu de 7.200 €
en 1998), ceci devant réduire de 5 millions le nombre de
déclarations (soit d'environ un tiers du total des déclarations).
Selon les estimations officielles, ces réformes ont
entraîné une baisse de la pression fiscale totale de 11 %
(voir le tableau ci-dessous). Les contribuables auraient ainsi
bénéficié d'une réduction d'impôts de
4,85 milliards d'euros en 1999, concentrée sur les revenus
comparativement faibles.
Effets
de la réforme espagnole de 1999 de l'IRPP
Revenu (en euros) |
Contribuables concernés (en %) |
Réduction de la charge fiscale au titre de l'IRPP (en %) |
< 12 020 |
60,3 |
29,7 |
12 02018 030 |
19,8 |
15,0 |
18 03030 051 |
14,3 |
8,3 |
> 30 051 |
5,6 |
6,2 |
Total |
100,0 |
11,1 |
Source : Ministerio de economia y hacienda
La situation des
Pays-Bas
apparaît assez typique des
problèmes que les aménagements fiscaux de l'impôt sur le
revenu ont eu pour objectif de résoudre. Ce pays a connu depuis 1990 une
nette érosion de l'assiette d'imposition sous le double-effet de
réaménagements ponctuels et des adaptations de comportement des
ménages face au système fiscal.
En 1998 l'abattement forfaitaire avait presque doublé, afin d'assurer le
maintien du pouvoir d'achat des travailleurs payés au salaire minimum et
des bénéficiaires de prestations durant une période
où ces salaires et prestations avaient progressé plus lentement
que les prix à la consommation. 11,5 % des titulaires de revenus
n'acquittaient pas d'impôt sur le revenu en 1998, contre 9 % en
1990. Comme le rappelle l'OCDE, la base d'imposition a été
également entamée par l'augmentation des déductions au
titre des primes d'assurance-vie et par la déduction illimitée
des versements d'intérêts hypothécaires, si bien qu'est
devenu nécessaire un alourdissement de la pression fiscale pesant sur un
large éventail de salariés. De fait, le taux marginal pour un
célibataire s'élevait rapidement de 35,75 % au niveau
minimum à 50 % pour l'ouvrier moyen, ce qui a pu inciter les
individus à substituer les loisirs au travail en recherchant des emplois
à temps partiel. La
conjonction de taux marginaux
élevés
et de
prestations sous conditions de ressources
dissuade les prestataires (et leurs conjoints) de rechercher un emploi
rémunéré
et pour rééquilibrer les
incitations, les autorités ont augmenté
régulièrement l'abattement forfaitaire pour frais professionnels.
C'est dans ce contexte qu'une réforme est intervenue, ordonnée
autour d'
un élargissement de l'assiette
et d'une
réduction des taux légaux
, destinés à
renforcer les incitations à travailler.
Cette réforme n'est que partiellement financée et
l'allégement fiscal net devrait s'élever à
2,3 milliards d'euros.
Financement de la réforme fiscale de
2001
|
|||
Ressources |
Emplois |
||
Limitation des déductions fiscales |
4,4 |
Réduction des taux d'imposition |
7,0 |
Relèvement du taux de la TVA |
2,0 |
Crédit d'impôt sur le revenu du travail |
3,6 |
Relèvement des taxes environnementales |
1,7 |
|
|
Impôt sur le revenu imputé du patrimoine |
0,2 |
|
|
Total |
8,3 |
|
10,6 |
Source : Ministère des Finances. |
On peut
observer qu'un crédit d'impôt unique, destiné à
renforcer les incitations à rechercher du travail, au montant
forfaitaire de 697 euros, est introduit. Il n'est pas prévu qu'il
soit réduit progressivement en fonction de l'augmentation des gains,
afin de minimiser l'impact du niveau élevé des taux marginaux
effectifs.
En outre, une réduction des taux est prévue : la
première tranche d'imposition sera dédoublée tandis que le
taux marginal supérieur sera ramené de 60 à 52 pour
cent.
B. LES RÉFORMES EN FRANCE
En
France
, l'imposition des revenus des ménages présente la
forte particularité de combiner un
impôt fortement
progressif,
l'
IRPP
(impôt sur le revenu des personnes
physiques)
avec
, depuis les années 1990,
une imposition
proportionnelle
qui est
assise sur l'ensemble des revenus
mais qui,
compte tenu de la corrélation existant entre le niveau du revenu des
ménages et sa diversification, touche davantage les revenus relativement
les plus élevés.
L'élargissement de l'assiette d'imposition a permis une
réduction, quelque peu chaotique, des taux nominaux de l'IRPP.
L'impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP), progressif, a
été complété par la création de la
contribution sociale généralisée (CSG) en 1991 et de la
contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) en 1996
,
impôts proportionnels, affectés respectivement à la
Sécurité sociale et au remboursement de la dette de celle-ci.
La CSG avait pour objectif d'élargir la base de financement de la
Sécurité sociale et s'est traduite par un alourdissement sensible
de la taxation de l'épargne
. La CSG et la CRDS étant
considérées comme des impôts sur le revenu (IR),
la part
de l'imposition des revenus des ménages dans le PIB a très
fortement augmenté au cours des années 90, passant de 4,6 %
du PIB en 1990 à 8,5 % en 2001. L'IRPP
stricto sensu
n'a pas
augmenté : il représentait 3,8 % du PIB en 1990 et
3,7 % en 2001
.
L'adjonction à l'IRPP de la CSG et de la CRDS
peut être
assimilée à un processus d'élargissement de la base
taxable qui
a permis de contenir l'augmentation des taux marginaux
d'imposition sur le revenu
sans toutefois prévenir une
très forte augmentation du taux apparent d'imposition des revenus
.
Évolution du taux apparent d'impôt sur le revenu
|
1980 |
1985 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
Impôt sur le revenu |
7,3 |
7,8 |
7,6 |
8,0 |
8,3 |
8,3 |
8,4 |
8,2 |
8,6 |
9,2 |
12,7 |
13,1 |
13,2 |
Note : il s'agit de l'impôt sur le revenu au sens de la
Comptabilité nationale (y compris CSG-CRDS) en pourcentage du revenu
disponible brut.
Source : Comptes nationaux.
Celui-ci est
passé de 7,6 à 13,2 %
du revenu
disponible des ménages en 10 ans.
LES PRINCIPALES MODIFICATIONS APPORTÉES À
L'IRPP EN FRANCE
Les
principales modifications de la taxation des revenus des ménages depuis
le début des années 1990 ont été les
suivantes :
- Une importante réforme en 1994 a simplifié un impôt
très complexe et réduit de moitié le nombre de tranches
passées de 12 à 6.
- Les baisses de taux à la fin de la décennie.
- Une forte diminution des avantages familiaux pour les foyers aisés en
1999.
- Une grande instabilité des nombreux mécanismes
d'allégement d'IRPP (dont le nombre a augmenté pendant la
première moitié de la décennie et s'est
légèrement réduit depuis 1995).
- Une réduction des avantages dont bénéficie
l'assurance-vie, des mesures en faveur de l'épargne longue et/ou
risquée, mais une diminution des seuils en deçà desquels
les revenus d'épargne sont exonérés (voir le chapitre sur
l'imposition de l'épargne).
- La création de la PPE en 2001, impôt négatif conditionnel
à l'exercice d'une activité professionnelle et très
fortement individualisé (voir le chapitre V).
La
réforme de 1994
a réduit le produit de l'IRPP de 19
milliards de francs (2,9 milliards d'euros) selon les estimations du moment,
soit un peu plus de 6 % du rendement de l'IRPP.
En 1997
, le
gouvernement Juppé a mis en oeuvre un plan de réduction de
l'ensemble des taux de l'IRPP, qui devait aboutir au bout de 5 ans
à une baisse d'un quart de l'IRPP. Seule la première phase de ce
plan a été effectuée, car la nouvelle majorité
parlementaire a suspendu le plan. Toutefois, après une stabilisation des
taux pendant trois ans, qui a abouti en 1999 à des recettes record
compte tenu du dynamisme des revenus en 1998, le gouvernement Jospin a
engagé
à partir de 2000
un plan de baisse de l'ensemble du
barème sur quatre ans.
Ce plan a, à son tour, été révisé lors de la
dernière alternance.
Même si ses modalités ont été modifiées au
gré des alternances politiques, une baisse des taux marginaux
d'imposition a donc été mise en oeuvre.
Les taux d'IRPP
Années 1 |
1974 à 1981 |
1982 à 1985 |
1986 |
1987 à 1992 |
1993 à 1995 |
1996 à 1998 |
1999 |
2000 |
2001 2 |
2002 |
« 2000
|
« 2002
|
1 ère tranche |
5 |
5 |
5 |
5 |
12 |
10,5 |
9,5 |
8,25 |
7,5 |
7,05 |
7 |
7 |
2 e tranche |
10 |
10 |
10 |
9,6 |
25 |
24 |
23 |
21,75 |
21 |
19,74 |
20 |
20,5 |
3 e tranche |
15 |
15 |
15 |
14,4 |
35 |
33 |
33 |
31,75 |
31 |
29,14 |
28 |
30,5 |
4 e tranche |
20 |
20 |
20 |
19,2 |
45 |
43 |
43 |
41,75 |
41 |
38,54 |
35 |
40,5 |
5 e tranche |
25 |
25 |
25 |
24 |
50 |
48 |
48 |
47,25 |
46,75 |
43,94 |
41 |
46,5 |
6 e tranche |
30 |
30 |
30 |
28,8 |
56,8 |
54 |
54 |
53,25 |
52,75 |
49,58 |
47 |
52,5 |
7 e tranche |
35 |
35 |
35 |
33,6 |
|
|
|
|
|
|
|
|
8 e tranche |
40 |
40 |
40 |
38,4 |
|
|
|
|
|
|
|
|
9 e tranche |
45 |
45 |
45 |
43,2 |
|
|
|
|
|
|
|
|
10 e tranche |
50 |
50 |
50 |
49 |
|
|
|
|
|
|
|
|
11 e tranche |
55 |
55 |
55 |
53,9 |
|
|
|
|
|
|
|
|
12 e tranche |
60 |
60 |
58 |
56,8 |
|
|
|
|
|
|
|
|
13 e tranche |
|
65 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
1 Il
s'agit de l'année du revenu, l'impôt est payé
l'année suivante.
2 Ces taux ne prennent pas en compte la réduction de 5 % de
l'impôt sur le revenu soumis au barème, mise en oeuvre à
l'automne 2002 par la nouvelle majorité.
3 « 2000 Juppé » correspond aux taux prévus
pour 2000 dans le plan pluriannuel de réduction des taux de l'IRPP dont
la première étape a été mise en place en 1996 et
qui a été interrompu en 1997 par la nouvelle majorité.
« 2002 Fabius » est le barème applicable aux revenus
de 2002 annoncé en 2000 par le ministre des finances de l'époque,
modifié par la nouvelle majorité.
Source : Piketty (1999), projets de lois de
finances.
II. UN ALOURDISSEMENT MOYEN DU POIDS DE L'IMPÔT SUR LE REVENU ET UNE ACCENTUATION DE SA PROGRESSIVITÉ
Les
objectifs intermédiaires
des réformes - baisse des
taux marginaux, élargissement de l'assiette -
ont, en
général, été atteints
.
Cependant, plusieurs constats doivent être mis en évidence :
- celui, d'abord, du
maintien d'une grande variété des
situations nationales
;
- celui, ensuite, d'une
légère accentuation de la pression
fiscale
sur le revenu des ménages ;
- celui, enfin, d'une
accentuation de la progressivité
de
l'imposition du revenu des ménages.
A. LA FRANCE EST LARGEMENT RESTÉE À L'ÉCART DU PROCESSUS DE BAISSE DES TAUX MOYENS D'IMPOSITION
Si les taux moyens d'imposition ont généralement été abaissés en Europe, la France se singularise par le fait que cette baisse n'a été significative que pour les revenus inférieurs au revenu moyen. Dès celui-ci dépassé, c'est un alourdissement de la pression des prélèvements qu'il faut constater.
1. Une baisse des taux moyens d'imposition
Les données rassemblées par l'étude de l'OFCE conduisent globalement au constat qu' une baisse des taux moyens d'imposition 5 ( * ) est intervenue dans de nombreux pays européens .
Evolution entre 1989 et 2001 des taux moyen d'imposition du revenu des ménages en Europe, par pays et par tranche de revenu
(couple marié, deux enfants, deux revenus salariaux
la femme
travaille et gagne 70 % du salaire du mari)
Niveau du salaire/SMO 1 |
0,7 |
1 |
2 |
3 |
5 |
|||||
1989 |
2001 |
1989 |
2001 |
1989 |
2001 |
1989 |
2001 |
1989 |
2001 |
|
Allemagne |
39 |
33,2 |
41 |
40,2 |
46 |
48,0 |
47 |
48,7 |
50 |
48,6 |
Belgique |
40 |
39,9 |
46 |
46,4 |
56 |
56,4 |
61 |
62,2 |
67 |
66,0 |
Danemark |
41 |
33,1 |
44 |
37,2 |
55 |
48,0 |
59 |
52,9 |
62 |
56,8 |
Espagne |
29 |
30,6 |
34 |
33,9 |
41 |
40,3 |
41 |
40,2 |
41 |
40,7 |
France |
40 |
23,5 |
42 |
40,0 |
46 |
47,9 |
49 |
51,0 |
53 |
54,9 |
Italie |
35 |
38,0 |
37 |
42,8 |
43 |
49,8 |
46 |
53,0 |
50 |
56,0 |
Pays-Bas |
41 |
27,1 |
46 |
32,0 |
51 |
41,1 |
53 |
43,6 |
57 |
46,7 |
Royaume-Uni |
29 |
19,0 |
33 |
25,2 |
36 |
32,2 |
38 |
36,1 |
40 |
40,3 |
1.
SMO : salaire moyen ouvrier. Le SMO était de l'ordre de
140 000 francs bruts en 2001.
Source : Calculs de l'OFCE d'après OCDE, Les impôts sur les
salaires, 2000-2001, 2002.
2. Une baisse qui n'a pas été uniforme
a) A peu près partout, une réduction des prélèvements sur les très bas revenus
La baisse des taux moyens d'imposition des ménages n'a pas été uniforme . Elle a varié , d'une part, selon les pays , d'autre part, selon le niveau du revenu des ménages (appréhendé à partir d'une fraction du salaire moyen ouvrier - SMO -.)
Evolution du taux moyen d'imposition du revenu des ménages en Europe entre 1989 et 2001 par pays et par tranche de revenu
Niveau du salaire/SMO |
0,7 |
1 |
2 |
3 |
5 |
Allemagne |
- 5,8 |
+ 0,8 |
+ 2 |
+ 1,7 |
- 1,4 |
Belgique |
- 0,1 |
+ 0,4 |
+ 0,4 |
+ 1,2 |
- 1 |
Danemark |
- 7,9 |
- 6,8 |
- 7 |
- 6,1 |
- 5,2 |
Espagne |
+ 1,6 |
- 0,1 |
- 0,7 |
- 0,8 |
- 0,3 |
France |
- 16,5 |
- 2 |
+ 1,9 |
+ 2 |
+ 1,9 |
Italie |
+ 3 |
+ 5,8 |
+ 6,8 |
+ 7 |
+ 6 |
Pays-Bas |
- 13,9 |
- 14 |
- 9,9 |
- 9,4 |
- 10,3 |
Royaume-Uni |
- 10 |
- 7,8 |
- 3,8 |
- 1,9 |
+ 0,3 |
En dehors de la Belgique et de l'Espagne où les taux n'ont presque pas varié, la plupart des pays ont assez nettement réduit les taux d'imposition des plus bas revenus . L'Italie fait exception puisque le taux d'imposition a augmenté pour cette tranche de revenu, comme d'ailleurs pour toutes les autres.
b) Pour les autres catégories de revenus, une grande diversité des évolutions
Seul
autre pays à avoir enregistré une augmentation significative de
la pression fiscale sur les
revenus les plus élevés
,
la
France
partage avec l'Italie et l'Allemagne une tendance haussière
pour les taux d'imposition appliqués aux revenus dépassant le
seuil de deux fois le salaire moyen ouvrier.
En
France
, les revenus du bas de l'échantillon ont
bénéficié d'un allègement fiscal très
massif. Mais, cette évolution n'a que peu profité aux autres
ménages. Pour les titulaires d'un revenu équivalant au salaire
moyen ouvrier, l'avantage est minime, au-delà, la pression fiscale a
été accentuée. Pour les autres pays, les taux d'imposition
ont nettement diminué dans leur ensemble.
Plusieurs expériences nationales peuvent être distinguées
en fonction de la structure des évolutions de pression fiscalo-sociale
par strate de revenus.
Au
Danemark
et aux
Pays-Bas
, la réduction de la pression
fiscale est à la fois de grande ampleur et distribuée
uniformément.
Au
Royaume-Uni
, la réduction de la pression fiscale est conforme
à un modèle progressif, maximale pour les plus bas revenus, elle
décroît régulièrement pour s'annuler pour les
revenus les plus élevés.
En
Allemagne
, seules les strates extrêmes de revenu sont
concernées. La pression fiscale est accrue dès le revenu moyen.
Ces différences d'approches sont l'une des expressions d'une
disparité très grande des systèmes de
prélèvements sur le revenu des ménages en
Europe.
B. UNE AUGMENTATION DE LA PRESSION FISCALE SUR LE REVENU DES MÉNAGES
La
baisse des taux moyens d'imposition n'a souvent pas connu de prolongement dans
une réduction effective de la pression fiscale sur les ménages
appréhendée à partir des données très
agrégées de la Comptabilité nationale. De fait, le poids
des impôts sur le revenu dans le PIB s'est alourdi de 0,7 point de
PIB. La France enregistre le record de hausse en raison de la substitution de
prélèvements considérés comme des impôts sur
le revenu (CSG et CRDS) à des cotisations sociales.
Sur une longue période, entre 1970 et 2000, la part de l'impôt
sur le revenu dans le PIB a nettement augmenté
, en lien avec
l'accroissement des dépenses publiques, mais aussi en raison du
rattrapage effectué par les pays du Sud (Espagne, Italie, Grèce,
Portugal).
La forte hausse du poids de l'impôt sur le revenu en France s'explique,
quant à elle, par la substitution de la CSG-CRDS à des
cotisations sociales salariés.
Mais, sur une période plus récente (1990-2000), malgré
la volonté proclamée de réduire les taux d'imposition, on
ne peut encore constater de baisse du poids de l'impôt sur le revenu.
Le poids moyen des impôts sur le revenu des ménages en Europe a
enregistré un
léger alourdissement
estimé à
0,7 point de PIB
pour l'OCDE et s'établit à environ 10
points de PIB et 24 % des recettes fiscales.
Impôts sur le revenu des ménages en Europe
|
En % du PIB |
Variation 1990-2000 |
(1) |
|||
|
1970 |
1980 |
1990 |
2000 |
2000 |
|
Autriche |
7,2 |
9,2 |
8,5 |
9,6 |
+ 1,1 |
22,2 |
Allemagne |
8,8 |
9,8 |
9,0 |
9,6 |
+ 0,6 |
25,3 |
Belgique |
8,7 |
15,4 |
13,9 |
14,3 |
+ 0,4 |
31,1 |
Danemark |
19,6 |
22,9 |
24,8 |
25,3 |
+ 0,5 |
52,4 |
Espagne |
1,9 |
4,7 |
7,2 |
7,2 |
0 |
19,5 |
Finlande |
12,8 |
14,0 |
17,2 |
15,1 |
- 2,1 |
19,5 |
France |
3,8 |
4,7 |
4,6 |
8,3 |
+ 3,7 |
18,3 |
Grèce |
2,0 |
3,6 |
4,1 |
5,0 |
+ 0,9 |
13,1 |
Irlande |
5,5 |
10,0 |
10,7 |
9,9 |
- 0,8 |
31,5 |
Italie |
2,8 |
7,0 |
10,2 |
10,1 |
+ 0,1 |
23,9 |
Luxembourg |
6,7 |
10,9 |
9,5 |
7,6 |
- 1,9 |
18,1 |
Pays-Bas |
9,9 |
11,4 |
10,6 |
6,3 |
- 4,3 |
15,1 |
Portugal |
n.d. |
n.d. |
4,7 |
6,0 |
+ 1,3 |
17,4 |
Royaume-Uni |
11,7 |
10,4 |
10,0 |
10,8 |
+ 0,8 |
28,6 |
Suède |
19,8 |
19,5 |
20,6 |
18,8 |
- 1,8 |
35,2 |
UE 15 |
7,1 |
8,7 |
9,2 |
9,9 |
+ 0,7 |
24,1 |
(1)
En % des recettes fiscales
Source : OCDE, Statistiques des Recettes publiques, 2001
Une augmentation de la pression fiscale sur le revenu des ménages
s'est ainsi produite en dépit des mesures adoptées pour
réduire les taux marginaux d'imposition.
Ce phénomène s'explique d'abord par la caractéristique
progressive des systèmes fiscaux. Les gains réels de revenu des
ménages se sont combinés à la progressivité de
l'impôt pour en accroître le poids dans le PIB.
Compte tenu de la progression des revenus réels, la baisse des taux
marginaux n'a pas réduit le rendement de l'impôt. Mais,
l'élargissement des assiettes d'imposition et des pratiques, quelque peu
opaques, comme le défaut d'indexation intégrale des seuils sur
l'inflation, sont également à l'origine de l'augmentation de la
pression fiscale sur les ménages.
Dans ce panorama, deux pays font exception : le Luxembourg et les
Pays-Bas, où au début des années 1990 certaines
prestations sociales sont passées d'un financement par l'impôt
à un financement par des cotisations sociales.
Le poids de l'imposition du revenu a beaucoup diminué dans ce pays de
4,3 points de PIB
de
1990 à 2000
, grâce au
transfert du financement de certaines prestations sociales de l'impôt aux
cotisations sociales, substitution qui apparaît comme originale en
Europe.
Les réformes de l'imposition du revenu réalisées aux Pays-Bas
1. La
réforme de 1990 : le transfert du financement de certaines
prestations de l'impôt aux cotisations sociales
|
|||||
|
L'imposition du revenu aux Pays-Bas (2001) |
|
|||
|
|
« Boîte » 1 |
« Boîte » 2 |
« Boîte » 3 |
|
Base imposable |
Revenus du travail |
Dividendes, intérêts et gains en capital provenant d'une participation substantielle |
Patrimoine net mondial |
||
Taux d'imposition |
Quatre
tranches :
|
Prélèvement à la source libératoire de 25 % |
1,2 % de l'actif net (1) |
||
(1) Imposition du rendement fictif (4 % net) du patrimoine net mondial (moyenne de la valeur du patrimoine au 1er janvier-31 déc.) à un taux de 30 % |
|||||
La
France a d'ores et déjà
de facto
assez largement recours
à l'imposition cédulaire du revenu, notamment par le biais du
prélèvement libératoire sur les intérêts.
Source : rapport de l'OFCE |
C. UNE GRANDE VARIÉTÉ DES SITUATIONS NATIONALES
L'imposition des revenus des ménages est agencée en
Europe selon des modalités nationales très variables.
Appréhendée à partir du seul IRPP, la taxation des
ménages apparaît relativement en retrait en France. Mis, cet
indicateur est trompeur.
Tous prélèvements confondus, la France appartient au groupe
des pays où la pression fiscale sur les ménages est la plus
forte.
1. D'importantes disparités
Les
modifications apportées à l'imposition du revenu des
ménages peuvent, pour certaines, avoir répondu à des
préoccupations communes, elles n'en ont pas été pour
autant coordonnées. Chaque pays a poursuivi des objectifs propres, ce
qui est conforme au principe de souveraineté fiscale des Etats. Ainsi,
si,
globalement
,
une réduction des taux d'imposition est
intervenue, cette tendance ne se vérifie pas partout et les situations
nationales restent très contrastées
.
Même si les comparaisons internationales rencontrent quelques
difficultés de méthode (voir encadré ci-dessous),
l'imposition du revenu des ménages est marquée par une
réelle dispersion
.
Les
comparaisons internationales du poids de l'impôt sur le revenu des
ménages soulèvent plusieurs difficultés :
|
En 2000,
le poids de l'impôt sur le revenu
stricto sensu
va de
5 %
du PIB
en
Grèce
à
25,3 %
au
Danemark
; soit, de 13 % des recettes fiscales en Grèce
à 52 % au Danemark.
Deux types de pays s'écartent
fortement de la moyenne
:
-
les pays scandinaves
(Danemark, Finlande, Suède), où
l'impôt sur le revenu est très important, en particulier parce
qu'il finance le système de protection sociale, qui donne à tous
les résidents des prestations uniformes d'un montant relativement
élevé ;
-
les pays du Sud
(Espagne, Grèce, Portugal), marqués par
des structures fiscales où les impôts indirects sont très
importants et où l'impôt sur le revenu ne joue qu'un rôle
mineur.
La considération des
taux moyens effectifs d'imposition
des
ménages par tranche de revenu confirme cette dispersion.
Taux
moyen d'imposition en 2001 (couple marié, deux enfants, deux revenus
salariaux, la femme travaille et gagne 70 % du salaire du
mari)
1
Niveau du salaire/SMO |
0,7 |
1 |
2 |
3 |
5 |
|||||
a |
b |
a |
b |
a |
b |
a |
b |
a |
b |
|
Allemagne* |
0 |
33,2 |
9,5 |
40,2 |
27,1 |
48,0 |
34,6 |
48,7 |
40,3 |
48,6 |
Autriche* |
1,6 |
25,1 |
13,8 |
35,7 |
27,7 |
43,8 |
35,6 |
45,4 |
41,4 |
46,9 |
Belgique* |
20,8 |
39,9 |
28,2 |
46,4 |
39,1 |
56,4 |
49,9 |
62,2 |
48,9 |
66,0 |
Danemark** |
28,5 |
33,1 |
32,5 |
37,2 |
43,9 |
48,0 |
49,1 |
52,9 |
53,0 |
56,8 |
Espagne* |
3,3 |
30,6 |
7,9 |
33,9 |
16,9 |
40,3 |
21,0 |
40,2 |
29,2 |
40,7 |
France* |
6,6 |
23,5 |
11,2 |
40,0 |
16,9 |
47,9 |
21,5 |
51,0 |
27,5 |
54,9 |
Italie* |
13,4 |
38,0 |
16,9 |
42,8 |
25,8 |
49,8 |
30,3 |
53,0 |
34,5 |
56,0 |
Pays-Bas** |
12,4 |
27,1 |
15,5 |
32,0 |
30,1 |
41,1 |
37,9 |
43,6 |
43,6 |
46,7 |
Royaume-Uni** |
12,8 |
19,0 |
16,1 |
25,2 |
21,5 |
32,2 |
26,8 |
36,1 |
32,2 |
40,3 |
Suède** |
26,2 |
42,8 |
29,0 |
46,1 |
37,0 |
53,1 |
41,4 |
57,4 |
48,4 |
63,4 |
1.
Les coefficients 0,7, 1, 2, 3 et 5 se rapportent au salaire moyen ouvrier dans
chacun des pays concerné
.
a) IR/salaire net
b) (IR + cotisations sociales - prestations familiales) / salaire super brut.
Dans le cas français, la CSG/CRDS figure dans l'impôt sur le
revenu.
* Donne droit à une retraite proportionnelle
** Donne droit à une retraite forfaitaire
Source : Calculs des auteurs d'après OCDE,
Les impôts sur
les salaires, 2000-2001
, 2002
Etant entendu que le diagnostic sur les taux moyens d'imposition du revenu des
ménages diffère selon l'indicateur choisi, l'
approche
« étroite »
où l'on rapporte les
seuls
impôts sur le revenu
au revenu disponible (colonne
a
du
tableau qui précède) - qui est un indicateur du poids des
impôts sur le revenu au sens juridique -, est l'approche qui met en
évidence
la plus
forte dispersion
des situations
nationales.
Pour un couple au
niveau du salaire moyen
, l'imposition s'étage
de
7,9 % en Espagne
à
32,5 % au Danemark
.
Les taux moyen d'imposition sur les
revenus les plus
élevés
vont de
27,5 % en France
à
53 % au Danemark
et,
sur les revenus les plus faibles
de
l'échantillon choisi
6
(
*
)
, de
0 % en Allemagne
à
28,5 % au Danemark
.
Ces données sont à mettre en relation - plus ou moins
étroite - avec la variété des caractéristiques des
régimes d'imposition du revenu en Europe.
Caractéristiques de l'impôt sur le revenu en 2001
|
Seuil de paiement* |
Nombre de tranches |
Taux maximum |
Atteint pour*... |
Allemagne |
0,31 |
Infinité |
48,5 |
1,93 |
Autriche |
0,57 |
5 |
50 |
2,78 |
Belgique |
0,47 |
7 |
60,6 |
2,84 |
Danemark |
0,16 |
3 |
59 |
1,06 |
Espagne |
0,50 |
6 |
48 |
5,04 |
Finlande |
0,35 |
6 |
55,2 |
2,20 |
France |
0,67 |
6 |
53,25 |
2,74 |
Grèce |
0,67 |
5 |
45 |
5,43 |
Irlande |
0,27 |
2 |
44 |
0,98 |
Italie |
0,16 |
5 |
46,4 |
3,69 |
Luxembourg |
0,43 |
17 |
47,2 |
2,68 |
Pays-Bas |
0,21 |
4 |
60 |
1,93 |
Portugal |
0,53 |
5 |
40 |
4,66 |
Royaume-Uni |
0,32 |
3 |
40 |
1,78 |
Suède |
1,11 |
2 |
55,4 |
1,79 |
Japon |
0,27 |
4 |
37 |
5,27 |
Etats-Unis |
0,23 |
5 |
39,6 |
9,56 |
* En
salaire moyen ouvrier, cas du célibataire.
Sources : OCDE,
Les impôts sur les salaires, 2000-2001,
2002;
European Tax Handbook,
2001, calculs des auteurs.
Si la plupart des pays font payer l'impôt à la plupart des
ménages, d'autres ont un seuil d'imposition élevé :
Grèce, France et Suède.
La plupart des pays ont un barème d'imposition à plusieurs
tranches. L'Allemagne fait exception avec un taux marginal croissant de
façon continue. Le nombre de tranches va de 2 en Suède à
17 au Luxembourg
Le taux maximum est généralement de l'ordre de 50 %.
Toutefois, il n'est que de 40 % au Portugal et au Royaume-Uni ; il
est proche de 60 % au Danemark, en Belgique et aux Pays-Bas. Par ailleurs,
ce taux est parfois atteint très vite (Irlande, Danemark), parfois pour
des revenus élevés (Italie, Portugal, Espagne, Grèce).
Si une
« approche élargie »
(colonnes
b
du tableau page 63) rapportant le total des
prélèvements net des prestations familiales au coût
salarial total - qui permet, en particulier, de neutraliser les biais
liés à la répartition des prélèvements entre
impôts sur le revenu et cotisations sociales - conduit à de
réelles nuances
, elle ne modifie pourtant pas le diagnostic d'une
variété des situations nationales d'imposition des revenus des
ménages.
Les différences sont moins nettes mais restent des écarts
significatifs dans les prélèvements directs sur le revenu des
ménages.
2. Deux modèles ?
Les
données figurant dans le rapport de l'OFCE conduisent à
distinguer schématiquement deux modèles, comme l'indique le
graphique ci-après :
- un premier modèle, où
la désincitation à
maximiser son revenu est faible
, correspondant aux pays où une
faible proportion des ménages (correspondant à ceux gagnant au
moins 5 fois le salaire ouvrier moyen) est soumise au taux maximum, qui est
inférieur à 50 % (Europe du sud, Etats-Unis, Japon) ;
- un second modèle, où
la désincitation à
maximiser son revenu est élevée,
correspondant aux pays
où le taux maximum concerne une forte proportion des ménages
(ceux gagnant de 1 à 2 fois le salaire ouvrier moyen), et est
supérieur à 55 % (Scandinavie).
La France se rapproche de ce second modèle
(avec un taux marginal
maximal d'imposition de 53,25 % en 2001, à partir de trois fois le
revenu moyen ouvrier environ).
L'imposition du revenu y est donc plus
désincitative que dans la plupart des autres pays européens.
Le pays où la désincitation est la plus faible est les
Etats-Unis
. Dans ce pays, le taux maximal d'imposition (de 40 %) ne
concerne que les personnes gagnant au moins
10 fois
le salaire moyen
ouvrier, ce qui correspond à un seuil bien plus élevé que
ce que l'on peut observer dans l'Union européenne (en Grèce, pays
européen où ce seuil est le plus élevé, il est de 5
fois le salaire moyen ouvrier). Au Royaume-Uni et en Irlande la
désincitation à travailler est plus forte qu'aux Etats-Unis
puisque si le taux d'imposition maximal est faible (de l'ordre de 40 %), il
concerne une proportion importante de ménages (à partir de 1 ou 2
fois le salaire moyen ouvrier).
Les taux d'imposition dans l'Union européenne (2001)
(seuil
d'imposition au taux maximum,
en % du salaire moyen ouvrier)
(taux maximum, en % du revenu)
Source : d'après le rapport de l'OFCE (calculs des auteurs d'après OCDE, Les impôts sur les salaires, 2000-2001, 2002)
D. UNE PROGRESSIVITÉ ACCRUE
La progressivité des prélèvements sur les ménages s'est presque partout accentuée en Europe, mais nulle part cette accentuation n'a été plus marquée qu'en France où l'imposition des ménages était déjà l'une des plus concentrées en Europe.
1. Un phénomène particulièrement marqué en France
Le tableau ci-dessous récapitule les évolutions des écarts de taxation entre différents niveaux de revenu 7 ( * ) .
Evolution de la progressivité des
prélèvements sur le revenu des ménages
(couple marié, deux enfants, deux revenus salariaux
la femme
travaille et gagne 70 % du salaire du mari)
Niveau du salaire/SMO 1 |
Ecarts des taux moyens d'imposition par strate de revenu |
||||||||
|
5 - 0,7 |
5 - 1 |
3 - 1 |
||||||
|
a
|
b
|
b - a |
a
|
b
|
b - a |
a
|
b
|
b - a |
Allemagne |
+11 |
+16,4 |
+5,4 |
+9 |
+8,6 |
-0,4 |
+6 |
+8,5 |
+2,5 |
Belgique |
+27 |
+26,1 |
-0,9 |
+21 |
+19,6 |
-1,4 |
+15 |
+15,8 |
+0,8 |
Danemark |
+21 |
+23,7 |
+2,7 |
+18 |
+19,6 |
+1,6 |
+15 |
+15,7 |
+0,7 |
Espagne |
+12 |
+10,1 |
-1,9 |
+7 |
+6,8 |
-0,2 |
+7 |
+6,3 |
-0,7 |
France |
+13 |
+31,4 |
+18,4 |
+11 |
+14,9 |
+3,9 |
+7 |
+11 |
+4 |
Italie |
+15 |
+18 |
+3 |
+13 |
+13,2 |
+0,2 |
+9 |
+10,2 |
+1,2 |
Pays-Bas |
+16 |
+19,6 |
+3,6 |
+11 |
+14,7 |
+3,7 |
+7 |
+11,6 |
+4,6 |
Royaume-Uni |
+11 |
+21,3 |
+10,3 |
+7 |
+15,1 |
+8,1 |
+5 |
+10,9 |
+5,9 |
1.
SMO : salaire moyen ouvrier
Source : Calculs de l'OFCE d'après OCDE, Les impôts sur les
salaires, 2000-2001, 2002.
Le tableau montre qu'une
accentuation de la progressivité
de
l'imposition des revenus des ménages s'est produite dans la plupart des
pays. Cette tendance a été la
plus forte si l'on
considère les très hauts revenus et les plus bas revenus
(inférieurs au salaire moyen ouvrier).
En effet, si
les taux marginaux supérieurs ont été
abaissés
, ils l'ont été
moins que les taux du bas
du barème
.
Dans quelques pays
dont la
France
et l'
Italie
,
l'allégement de la pression fiscale sur les bas revenus a
été financé par une accentuation des
prélèvements sur les revenus dépassant le salaire
moyen
. Pour ces pays, la progressivité s'accentue mais cette
accentuation est plus forte pour les revenus atteignant 3 fois le salaire moyen
que pour les revenus plus élevés.
La progressivité du système d'imposition des revenus varie
cependant beaucoup d'un pays à l'autre et selon l'indicateur
adopté pour le mesurer.
Estimée à partir d'un
indicateur
« étroit »
comprenant les
prélèvements hors cotisations, la
progressivité
apparaît
très forte
en Allemagne, en Autriche, en
Belgique et aux Pays-Bas. Elle est plus limitée en France, en Italie et
au Royaume-Uni. Cependant, pour la France, les résultats sont
biaisés par le champ des données de l'étude qu ne
comprennent pas les revenus inférieurs à 0,7 fois le SMO, qui
échappent à l'IRPP. En les réintégrant, la
progressivité ressortirait nettement plus accusée.
Taux
moyen d'imposition du revenu des ménages en Europe
Taux moyen
1
par tranches de salaire
Niveau du salaire/SMO |
Allemagne |
Autriche |
Belgique |
Danemark |
Espagne |
France |
Italie |
Pays-Bas |
Royaume-Uni |
Suède |
0,7 |
0 |
1,6 |
20,8 |
28,5 |
3,3 |
6,6 |
13,4 |
12,4 |
12,8 |
26,2 |
1 |
9,5 |
13,8 |
28,2 |
32,5 |
7,9 |
11,2 |
16,9 |
15,5 |
16,1 |
29 |
2 |
27,1 |
27,7 |
39,1 |
43,9 |
16,9 |
16,9 |
25,8 |
30,1 |
21,5 |
37 |
3 |
34,6 |
35,6 |
49,9 |
49,1 |
21 |
21,5 |
30,3 |
37,9 |
26,8 |
41,4 |
5 |
40,3 |
41,4 |
48,9 |
53 |
29,2 |
27,5 |
34,5 |
43,6 |
32,2 |
48,4 |
1. Taux moyen « étroit » : Impôt sur le revenu / salaire net. |
||||||||||
Écarts : |
||||||||||
5 - 1 |
40,3 |
39,8 |
28,1 |
24,5 |
25,9 |
20,9 |
21,1 |
31,2 |
19,4 |
22,2 |
3 - 1 |
34,6 |
34 |
29,1 |
20,6 |
17,7 |
14,9 |
16,9 |
25,5 |
14 |
15,2 |
Appréciée à partir d'un
indicateur
« élargi »
(avec les cotisations), la
progressivité
des mécanismes d'imposition des revenus des
ménages est dans tous les pays, sauf la France,
moins
accusée
que lorsqu'on la mesure à partir du seul impôt
sur le revenu des ménages.
La prise en compte des
cotisations sociales
, en général
proportionnelles,
tasse l'échelle des prélèvements
.
La
France
et le
Royaume-Uni
se singularisent
avec une
progressivité plus forte
qui est
liée aux
allégements différenciés de prélèvements
mis en place dans ces pays.
La France apparaît comme le pays qui pratique le système de
prélèvements sur le revenu des ménages le plus progressif
de l'échantillon
. Aux effets des allégements
spécifiques de cotisations sociales s'ajoutent ceux de l'introduction et
de l'augmentation des taux de la CSG qui frappe plus lourdement les
ménages à revenus élevés en raison de la part des
revenus financiers dans leur revenu global.
Longtemps présenté comme peu progressif, notre système
de prélèvements sociaux a « muté »
vers une logique de plus en plus progressive.
Taux
moyen d'imposition du revenu des ménages en Europe
Taux moyen
1
par tranches de salaire
|
Allemagne |
Autriche |
Belgique |
Danemark |
Espagne |
France |
Italie |
Pays-Bas |
Royaume-Uni |
Suède |
0,7 |
33,2 |
25,1 |
39,9 |
33,1 |
30,6 |
23,5 |
38 |
27,1 |
19 |
42,8 |
1 |
40,2 |
35,7 |
46,4 |
37,2 |
33,9 |
40 |
42,8 |
32 |
25,2 |
46,1 |
2 |
48 |
43,8 |
56,4 |
48 |
40,3 |
47,9 |
49,8 |
41,1 |
32,2 |
53,1 |
3 |
48,7 |
45,4 |
62,2 |
52,9 |
40,2 |
51 |
53 |
43,6 |
36,1 |
57,4 |
5 |
48,6 |
46,9 |
66 |
56,8 |
40,7 |
54,9 |
56 |
46,7 |
40,3 |
63,4 |
Écarts : |
||||||||||
5 - 1 |
15,4 |
21,8 |
26,1 |
23,7 |
10,1 |
31,4 |
18 |
19,6 |
21,3 |
20,6 |
3 - 1 |
15,5 |
20,3 |
22,3 |
19,8 |
9,6 |
27,5 |
15 |
16,5 |
17,1 |
14,6 |
1. Taux
moyen « élargi » : Impôts sur le revenu +
cotisations sociales - prestations familiales/salaire super brut. Le salaire
super brut comprend le salaire direct + les cotisations sociales employeurs et
salariés.
L'ensemble de ces développements portent sur des niveaux de revenus
dépassant le seuil de déclenchement de l'impôt
personnalisé sur le revenu (l'impôt sur le revenu des personnes
physiques en France).
L'inclusion dans l'analyse de l'ensemble des
ménages accentue la progressivité des systèmes
d'imposition du revenu en Europe, en particulier en France
.
La situation de la France est, en effet, éloquente.
L'IRPP y est
très fortement concentré sur les hauts revenus
. Cette
situation est constante malgré l'instabilité des règles de
calcul de l'impôt sur le revenu, dont témoignent la succession de
ses réformes, et la multiplicité des régimes
dérogatoires. Elle résulte de
la structure du
barème
mais aussi de ce que
la moitié des foyers fiscaux
ne paye pas l'IRPP
du fait de l'étroitesse de l'assiette de
prélèvement.
Répartition de l'impôt sur le revenu (y compris PPE)
par déciles en 2002
Déciles |
1 |
2 |
3 |
4 |
5 |
6 |
7 |
8 |
9 |
10 |
Total |
Impôt payé en 2000 |
0,0 |
0,0 |
0,1 |
1,0 |
2,2 |
3,6 |
5,6 |
8,7 |
14,6 |
64,2 |
100 |
Impôt payé en 2003
|
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,4 |
1,6 |
2,9 |
4,7 |
7,9 |
13,8 |
68,7 |
100 |
Impôt payé en 2003
|
-0,2 |
-1,7 |
-2,4 |
-1,7 |
-0,9 |
2,5 |
4,3 |
7,6 |
14,9 |
75,9 |
100 |
1.
PPE : Prime pour l'emploi
Note : En 2000, les 10 % de ménages ayant les revenus les plus
élevés payaient 64,2 % de l'impôt sur le revenu
encaissé par l'Etat. En 2003, les 10 % de ménages ayant les
revenus les moins élevés ont perçu une aide
équivalant à 0,2 % du total recettes d'impôts sur le
revenu, tandis que les 10 % les plus aisés ont payé un IRPP
équivalant à 75,9 % de ce total.
Source : Notes bleues de Bercy, septembre 2001, PLF 2002.
L'introduction de la prime pour l'emploi n'a fait qu'accroître encore
cette concentration, comme le montre le tableau ci-avant.
Aux effets des seuils et du barème, il faut ajouter l'impact des
pratiques suivies en matière d'indexation des différentes
tranches sur l'évolution de la progressivité de l'IRPP.
Si, en théorie, il existe une indexation des tranches sur l'inflation,
il faut préciser que, de 1993 à 2001, le premier seuil du
barème a été nettement plus augmenté que
l'inflation (+2,5 % par an en moyenne pour une inflation moyenne de
1,4 %), en raison de la forte hausse de 1997 (+11,3 %). Les cinq
autres seuils, au contraire, ont été légèrement
sous-indexés (+1,1 % en moyenne entre 1993 et 2001). Cet effet de
ciseaux, favorable aux foyers imposés dans les tranches les plus basses
et défavorable aux foyers imposés dans les tranches les plus
hautes, a accentué encore la progressivité du
prélèvement et amputé l'impact de la baisse des taux
nominaux marginaux de l'IRPP pour les revenus au-delà de la
première tranche.
2. La nécessité d'un renversement de tendance
L'OFCE
indique, à juste titre, qu'«
une tendance commune vers
l'atténuation de la progressivité de l'impôt se dessine
maintenant au sein des pays européens. En France le taux marginal
supérieur est redescendu à 54 % en 1996 et a ensuite
été réduit à 52,5 %, l'Espagne et l'Allemagne se
sont engagés à une baisse progressive du taux supérieur de
11 points respectivement sur la période de 1997 à 2003 et de 2000
à 2005. L'Italie est la pointe du processus d'affaiblissement de la
progressivité par une réforme, qui met en place un barème
à deux tranches avec un taux supérieur à 33 %. Cette
évolution suit l'abaissement massif des taux supérieurs de
l'impôt sur le revenu mis en place depuis le début des
années 1980 aux Etats-Unis. Ce taux, relevé par l'administration
Clinton, a été ultérieurement baissé par
l'administration Bush. L'évolution fut similaire au Royaume-Uni de 1979
à 1988 avec une baisse du taux marginal supérieur de 98 %
à 40 %, non remise en cause par les travaillistes
».
Dans ce contexte, la France doit poursuivre la diminution de ses taux
supérieurs d'imposition et renverser son habitude de recourir à
l'accentuation de la pression fiscale sur les revenus intermédiaires
à laquelle elle s'est trop souvent laissée aller dans les
années récentes.
CHAPITRE IV :
LES
COTISATIONS SOCIALES,
UNE VARIABLE EFFICACE DES POLITIQUES
D'EMPLOI ?
Même si les pays européens connaissent des situations
très différentes au regard des cotisations sociales, une certaine
communauté d'inspiration combinant un objectif d'amélioration de
la compétitivité et de réduction du « coin
socio-fiscal » a orienté les mesures prises en la
matière.
Des allégements de cotisations, qu'ils soient généraux ou
ciblés, ont été mis en oeuvre. Leur efficacité,
toujours délicate à apprécier, doit, globalement,
être reconnue. Mais, leur impact ultime doit être
nuancé.
I. UN OBJECTIF ASSEZ LARGEMENT PARTAGÉ, LA RÉDUCTION DU COÛT DU TRAVAIL
La baisse du coût du travail dans l'optique d'une lutte contre le chômage a justifié une série d'allégements de cotisations sociales dans différents pays européens. L'objectif est à la fois d'augmenter la compétitivité et de réduire le « coin sociofiscal » 8 ( * ) censé décourager l'embauche et la participation au marché du travail.
A. DES ALLÉGEMENTS GÉNÉRAUX ET CIBLÉS DE COTISATIONS
Dans de
nombreux pays, une
baisse générale des cotisations
est
intervenue et elle a alors porté sur les cotisations employeurs qui sont
supposées avoir l'impact le plus direct sur le coût du travail.
Tel fut le cas en Allemagne, en Espagne, en Italie, aux Pays-Bas et en France.
Plus nombreux encore sont les pays ayant choisi
des baisses ciblées
de cotisations
.
Les allégements spécifiques et leurs cibles sont
présentés dans le tableau ci-après.
Allègements spécifiques de cotisations sociales en Europe
|
Allègement bas salaires |
Autres allègements spécifiques |
Montant |
en %PIB |
Autriche |
Non |
non |
-- |
-- |
Belgique |
Oui |
salariés âgés, jeunes, réduction du temps de travail |
2,9 Md € |
1,1 |
Danemark |
Non |
non |
-- |
-- |
France |
Oui |
Réduction du temps de travail |
7,6 Md € |
1,0 |
Finlande |
Non |
petites entreprises, entreprises intensives en main d'oeuvre |
non disp. |
non disp. |
Allemagne |
non (en projet) |
non (en projet) |
-- |
-- |
Grèce |
Oui |
nouveaux embauchés |
non disp. |
non disp. |
Italie |
Oui |
catégories à fort taux de chômage, PME, régions défavorisées (Italie du Sud), jeunes |
autour de 350 Md €, par an |
> 0,1 |
Irlande |
|
|
|
|
Pays-Bas |
Oui |
chômeurs de longue durée |
1,1 Md €, par an |
0,3 |
Portugal |
Non |
jeunes, chômeurs, handicapés, retraités en activité partielle, footballeurs professionnels |
non disp. |
non disp. |
Espagne |
Non |
+ 65 ans, transformations de CDD en CDI particulièrement pour les femmes |
non disp. |
non disp. |
Suède |
Non |
non |
-- |
-- |
Royaume-Uni |
Oui |
non |
1,0 Md €* |
0,25 |
*
L'évaluation de l'ampleur de l'allègement pour le Royaume-Uni est
faite par rapport à la situation de 1997. En 1997, le système
anglais était anti-progressif du fait de l'existence de seuil. La
comparaison avec les autres pays est donc délicate.
Sources : Plans nationaux pour l'emploi (version 2002 sauf France et
Italie, version 2001), OCDE, MISSOC, Peer Review et différentes sources
nationales.
Les cibles des allégements spécifiques sont diverses.
Si ces allégements portent souvent sur les bas salaires, tous les pays
européens n'ont pas emprunté cette voie. Dans un certain nombre
de pays, les cibles ont été choisies directement en fonction de
caractéristiques des populations bénéficiaires non
liées au salaire, les chômeurs, mais aussi parfois des
salariés déterminés en fonction de leur âge ou de
leur appartenance géographique ou sectorielle.
L'ampleur des allégements spécifiques
dans les
différents pays varie aussi beaucoup. La Belgique et la France avec des
mesures représentant environ 1 point de PIB se distinguent par le
haut. Aux Pays-Bas et au Royaume-Uni, les allégements spécifiques
sont nettement plus modestes. Il est probable qu'il existe dans les situations
nationales d'emploi et dans l'existence des salaires minimaux plus ou moins
élevés une explication à ces différences. Mais ce
n'est pas toujours le cas puisque l'Allemagne avec un haut taux de
chômage n'a encore que projeté de mettre en oeuvre des
allégements spécifiques.
APERÇU SUR LES ALLÉGEMENTS
SPÉCIFIQUES
DE COTISATIONS SOCIALES EN EUROPE
En
Belgique
, une
réduction forfaitaire
des cotisations
sociales employeurs, augmentée pour les publics de moins de 25 ans et de
plus de 50 ans fait suite aux réductions de charges entreprises dans les
années 1980, puis sur les bas salaires en 1993. Une réduction
supplémentaire est prévue à partir de 2001 pour les
chômeurs de plus de 45 ans (plan activa). En outre, une
réduction de charges sociales salariés
(8 % de revenu
en plus pour les salaires bas) est intervenue à partir de 2000 et il
existe une
aide forfaitaire unique
en cas de
réduction de la
durée du travail
(800 euros par heure réduite par
salarié, non permanente), puis permanente (de 250 à 600 euros par
salarié par an selon l'ampleur de la réduction). Avec, au total,
31 millions d'euros, cette aide représente un dispositif de faible
ampleur.
En
Finlande
, la réduction de charges a été
modulée. Elle va de 0,1 point pour les petites entreprises à 0,35
pour les grandes. Par ailleurs, une réduction de 0,65 point pour
les entreprises intensives en main-d'oeuvre a été mise en place.
En
Grèce
, la réduction de charges employeurs concerne les
bas salaires
(2 points de réduction pour les salaires
inférieurs à 580 euros par mois), avec une suppression dans le
cas des salaires les plus bas. Une réduction de charges employeurs est
prévue dans le cas d'une
nouvelle embauche
.
En
Italie
, jusqu'en 2000 il existait une aide forfaitaire (de 4 100
euros à 5 100 euros) pour l'
embauche nouvelle
en CDI avec un
plafond annuel. L'aide était versée en une seule fois. Les
PME
seules étaient éligibles au dispositif. Depuis, un dispositif
supplémentaire a été introduit pour les
zones à
fort taux de chômage
(1 500 euros) et en 2000, le dispositif
antérieur a été étendu à toutes les PME,
devenant une aide mensuelle (413 euros) pour une durée de 3 ans (soit 14
868 euros pour trois années).
Aux
Pays-Bas
, depuis 1996, le SPAK est un allègement forfaitaire
de cotisations sociales employeurs sur les
bas salaires
(jusqu'à
1,15 salaire minimum) qui réduit (en 2000) de 10 % le coût
salarial. L'allègement et le seuil sont proportionnels à la
durée du travail. Le t-SPAK est, quant à lui, un
allègement entre 115 et 130 % du salaire minimum pour ceux qui ont
bénéficié avec le même employeur du SPAK. Pour les
chômeurs de longue durée nouvellement embauchés
, un
allègement supplémentaire pendant 4 ans est possible, doublant le
SPAK.
Au
Portugal
, il existe une exonération de cotisations sociales
patronales pendant une année pour les groupes ciblés lors de la
transformation d'un CDD en CDI. Pour les travailleurs handicapés, le
taux de cotisations patronales est de 12,5 au lieu de 23,7 %, pour les
footballeurs il est de 17,5.
Au
Royaume-Uni
,
en dessous d'un seuil de salaires
(environ 609
euros par mois),
il n'y a pas de cotisations sociales salariés ou
employeurs
. Le taux est ensuite constant et s'applique au salaire moins le
seuil. Passé un second seuil (+ de 4 000 euros par mois), le taux des
cotisations employeurs redevient nul. Auparavant, avant 1997, en dessous d'un
seuil (environ 400 € par mois) il n'y avait ni cotisations sociales
ni ouverture de droits et, au-delà du seuil, la montant des cotisations
sociales était de 5 % du salaire plus 10 % du salaire moins le
seuil.
La
réforme
intervenue au Royaume-Uni apparaît ainsi
singulière
puisqu'elle
combine incitation au travail des
« peu qualifiés »
et
allégement des
cotisations dues par les plus hauts revenus
.
B. LA SITUATION EN FRANCE
Dans
ce panorama, la situation française apparaît assez
singulière
: les baisses généralisées de
cotisations sociales ont été l'occasion d'une nette modification
de la logique de financement du système social ; quant aux
allégements ciblés, ils sont, depuis la réduction du temps
de travail, moins consacrés à résoudre des
problèmes particuliers d'intégration au marché du travail
qu'à compenser la hausse du coût salarial unitaire par tête
induite par cette politique.
En France, le taux de cotisation apparent qui rapporte les versements au titre
des cotisations sociales à la masse salariale brute a été
réduit, légèrement pour les cotisations patronales, plus
substantiellement pour les cotisations salariés.
Taux de cotisations apparents
|
1980 |
1985 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
Cotisations patronales |
30,4 |
33,1 |
32,7 |
32,2 |
32,9 |
33,1 |
33,3 |
32,5 |
32,7 |
32,7 |
32,5 |
32,7 |
31,5 |
Cotisations salariés |
12,4 |
14,8 |
17,1 |
17,0 |
17,4 |
17,8 |
18,1 |
18,1 |
18,4 |
17,4 |
13,5 |
13,6 |
13,6 |
Note : il s'agit des cotisations versées respectivement
par les sociétés non financières et par les
salariés en pourcentage de la masse salariale brute.
Source : Comptes nationaux.
Cet allégement a été financé par la création
de ressources nouvelles, la CSG, la CRDS, la TGAP et par l'augmentation de
divers droits dont ceux taxant les tabacs, mesures qui se sont traduites par un
élargissement de la base de contribution
à la protection
sociale et, ainsi, par une
modification de la logique du financement
dans un sens
moins assurantiel
et
plus contributif
.
Les taux de CSG - CRDS
Assiette |
Revenus de remplacement 1 |
Autres revenus |
|||||||||
Bénéficiaire |
CNAF 2 |
FSV 3 |
Maladie |
Total CSG |
CRDS |
CNAF 2 |
FSV 3 |
Maladie |
Total CSG |
CRDS |
|
Février 1991 |
1,1 |
0,0 |
0,0 |
1,1 |
0,0 |
1,1 |
0 |
0 |
1,1 |
0,0 |
|
Juillet 1993 |
2,4 |
0,0 |
0,0 |
2,4 |
0,0 |
2,4 |
0 |
0 |
2,4 |
0,0 |
|
1994 |
1,1 |
1,3 |
0,0 |
2,4 |
0,0 |
1,1 |
1,3 |
0 |
2,4 |
0,0 |
|
Février 1996 |
1,1 |
1,3 |
0,0 |
2,4 |
0,5 |
1,1 |
1,3 |
0 |
2,4 |
0,5 |
|
1997 |
1,1 |
1,3 |
1,0 |
3,4 |
0,5 |
1,1 |
1,3 |
1 |
3,4 |
0,5 |
|
1998 |
1,1 |
1,3 |
3,8 |
6,2 |
0,5 |
1,1 |
1,3 |
5,1 |
7,5 |
0,5 |
|
2001 |
1,1 |
1,15 |
3,95 |
6,2 |
0,5 |
1,1 |
1,15 |
5,25 |
7,5 |
0,5 |
1. Les
revenus de remplacement sont les pensions de retraite et d'invalidité,
ainsi que les allocations chômage et préretraite. Les titulaires
de minima sociaux ou du minimum vieillesse sont exonérés. Les
personnes non imposables titulaires de pensions de retraite ou
d'invalidité ou d'allocations chômage ou de préretraites,
sont exonérées si leur revenu fiscal de référence
est inférieur à un certain seuil (6819 euros pour la
première part du quotient) et taxés au taux réduit de
3,8
%
si leur revenu fiscal est supérieur à ce
seuil ;
2. Branche famille de Régime général de
Sécurité sociale ;
3. Fonds de solidarité vieillesse.
Source : Rapports de la Commission des Comptes de la
Sécurité Sociale.
Deux conséquences s'ensuivent :
Le financement de la sécurité sociale est en effet de plus en
plus assuré par l'impôt
.
Le financement des Administrations de Sécurité Sociale
|
1980 |
1985 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
Dépenses et recettes des Administrations de Sécurité sociale (en % du PIB) |
|
|
|
|
|||||||||
Dépenses |
20,1 |
22,6 |
21,9 |
22,4 |
23,2 |
24,2 |
24,2 |
24,2 |
24,4 |
24,4 |
24,0 |
23,9 |
23,5 |
Recettes |
21,2 |
23,1 |
22,1 |
22,2 |
22,7 |
23,3 |
23,6 |
23,6 |
23,9 |
23,9 |
23,9 |
24,1 |
24,1 |
Structure du financement (en % des recettes totales) |
|
|
|
|
|
|
|
||||||
Cotisations sociales |
82,3 |
81,4 |
84,4 |
83,5 |
82,7 |
80,8 |
78,6 |
78,3 |
77,7 |
75,4 |
66,7 |
67,2 |
66,6 |
Impôts |
0,5 |
1,2 |
1,6 |
2,9 |
3,5 |
4,8 |
7,1 |
7,1 |
7,2 |
9,8 |
18,9 |
19,1 |
21,6 |
Autres |
17,2 |
17,5 |
14,0 |
13,5 |
13,8 |
14,5 |
14,3 |
14,6 |
15,1 |
14,7 |
14,3 |
13,8 |
11,7 |
Source : Comptes nationaux.
Le système de financement de la protection sociale est devenu de plus
en plus progressif.
L'alourdissement de la CSG a davantage amputé
les revenus les plus élevés du fait de leur composition qui
comprend des revenus du travail et, en proportion non négligeable, des
revenus nouvellement taxés : les revenus financiers.
Cette accentuation de la progressivité s'explique par ailleurs par le
fait que
la France a également conduit une politique active
d'allégements ciblés de cotisations sociales, dont la
finalité a été radicalement modifiée après
la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail.
Dès le 1
er
juillet 1993 ont été mises en place
des exonérations dégressives de cotisations patronales pour les
salaires mensuels inférieurs à 1,2 SMIC avec pour objectif de
réduire le coût du travail, jugé responsable du
chômage des travailleurs les moins qualifiés. Les baisses de
cotisations ont été étendues jusqu'à 1,3 SMIC et
fortement renforcées en 1995.
Le taux de cotisations patronales au
niveau du SMIC est passé, en plusieurs étapes, de 40 % au
début des années 1990 à 22 % en 1996
.
|
|
Les dispositifs d'allègements de charges patronales sur les bas salaires :
-
1
er
juillet 1993 : exonérations de cotisations
d'allocations familiales pour les salaires inférieurs à 1,1 SMIC
(5,4 points) ; réduction de moitié entre 1,1 et 1,2 SMIC.
Réduction pour un SMICard : 5,4 points.
|
|
1 er juillet 1993 |
5,4
points jusqu'à 1,1 SMIC
|
1 er janvier 1995 |
5,4
points jusqu'à 1,2 SMIC
|
1 er septembre 1995 |
18,2
points au niveau du SMIC
|
1 er octobre 1996 |
18,2
points au niveau du SMIC
|
1 er octobre 1998 |
18,2
points au niveau du SMIC
|
1 er février 2000 |
26
points au niveau du SMIC
|
La
réduction du temps de travail a modifié la logique des
dispositifs précédents.
Les
réductions de cotisations patronales
pour les
entreprises
ayant signé un accord de réduction du temps de travail
(RTT)
ont été
amplifiées
. Les entreprises dans lesquelles
un accord a été signé bénéficient d'une
baisse de cotisation annuelle de 4 000 francs (610 euros) pour chaque
salarié (quel que soit son niveau de salaire) et de réductions
dégressives qui sont plus élevées que les
réductions prévues par le dispositif Juppé et concernent
les salariés gagnant jusqu'à 1,8 SMIC. En régime de
croisière, le coût de l'aide forfaitaire était
estimé à 6,1 milliards d'euros et l'extension de la ristourne
dégressive devait coûter 3,8 milliards d'euros. Aujourd'hui, le
taux normal
de
charges sociales et fiscales
sur les salaires
payées par les entreprises est d'environ
45 %
(
en dessous
du plafond de Sécurité sociale
), mais il est seulement de
18 %
ou
26 %
pour les salariés au SMIC
,
selon que leur entreprise a signé un accord de réduction du temps
de travail ou
non.
Mais, avec la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail, une
part importante des allégements spécifiques de cotisations
sociales ne correspond plus à un objectif de réduction du
coût du travail de catégories de population données, mais
à la nécessité de compenser le surcoût salarial
occasionné par la mesure de diminution de la durée du travail.
Une
nouvelle modification
du dispositif d'allègements de charges
patronales en trois étapes,
de 2003 à 2005
, est
prévue. Les aides conditionnelles à la mise en place d'un accord
de réduction du temps de travail sont supprimées et la ristourne
« Juppé » est étendue progressivement. A
terme, l'allègement concernera les salaires inférieurs à
1,7 SMIC, ce qui constitue une extension du champ des
bénéficiaires aux salaires compris entre 1,3 et 1,7 SMIC. Le
niveau d'allègement sera supérieur à son niveau
actuel : le taux de cotisations patronales sera réduit de 26 points
au niveau du SMIC contre 18,2 jusqu'en 2002, et à 1,3 SMIC, la ristourne
sera de 11,5 points de cotisations contre 0 avec le dispositif
« Juppé ». Un des corollaires importants de cette
réforme est la perte, pour les entreprises ayant passé des
accords de RTT, de l'aide forfaitaire dont elles bénéficiaient
pour chaque salarié, quel que soit le niveau de
rémunération. Pour les bas salaires, la ristourne aura tendance
à augmenter, même dans les entreprises qui
bénéficiaient des aides « Aubry ». Ce nouveau
dispositif n'est plus conditionné par une réduction du temps de
travail. Il n'est pour autant pas un pas supplémentaire vers un
allégement net des charges salariales. En effet, il s'inscrit dans un
contexte marqué par une très nette hausse du SMIC horaire et il
vise à compenser cette hausse.
Selon les estimations disponibles, la hausse du coût du travail pour un
salarié au SMIC à 39 heures passerait, ainsi, grâce au
nouveau régime d'allégements, de 11,4% à 4,61 %
après allégements sur la période 2003-2005.
II. UN BILAN À NUANCER
L'impact socio-économique des mesures d'allégements de charges sociales doit être nuancé. Certes, une décrue des charges pesant sur le travail a été amorcée et elle a contribué à préserver ou créer des emplois. Cependant, au-delà des questions que pose l'évaluation quantitative de leurs résultats intermédiaires, il faut s'interroger, d'une part sur les impacts complets de ces mesures, d'autre part, sur leur cohérence avec le contexte économique et social.
A. UNE AMORCE DE DÉCRUE DES CHARGES PESANT SUR LE TRAVAIL
Au cours de la décennie écoulée, le poids des cotisations sociales dans le PIB est resté remarquablement stable en Europe.
Recettes de cotisations sociales
en % du
PIB
|
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
90-2000 |
Autriche |
13,3 |
13,4 |
14,0 |
14,5 |
14,9 |
15,1 |
15,1 |
15,2 |
15,1 |
15,1 |
14,9 |
+1,6 |
Belgique |
14,2 |
14,8 |
15,0 |
15,3 |
15,1 |
14,7 |
14,6 |
14,5 |
14,4 |
14,4 |
14,1 |
-0,1 |
Allemagne |
13,3 |
14,1 |
14,3 |
14,5 |
14,8 |
14,9 |
15,0 |
15,2 |
15,0 |
14,9 |
14,8 |
+1,5 |
Danemark |
1,4 |
1,4 |
1,5 |
1,6 |
1,6 |
1,5 |
1,6 |
1,6 |
1,5 |
2,1 |
2,2 |
+0,8 |
Espagne |
11,8 |
11,9 |
12,6 |
12,7 |
12,5 |
11,9 |
11,7 |
11,8 |
11,9 |
12,2 |
12,3 |
+0,5 |
Finlande |
9,7 |
11,2 |
10,7 |
11,8 |
12,3 |
12,4 |
12,2 |
11,6 |
11,6 |
11,9 |
11,2 |
+1,5 |
France |
18,9 |
18,9 |
19,1 |
19,1 |
18,8 |
18,7 |
18,8 |
18,4 |
16,3 |
16,6 |
16,4 |
-2,5 |
Royaume-Uni |
6,1 |
6,1 |
6,2 |
5,9 |
6,1 |
6,1 |
6,1 |
6,0 |
6,4 |
6,1 |
6,3 |
+0,2 |
Grèce |
8,9 |
8,6 |
8,5 |
9,6 |
9,6 |
9,8 |
9,7 |
10,9 |
11,2 |
11,4 |
11,4 |
+2,5 |
Irlande |
5,0 |
5,2 |
5,3 |
5,3 |
5,1 |
4,7 |
4,4 |
4,2 |
4,0 |
4,1 |
4,2 |
-0,8 |
Italie |
12,8 |
13,0 |
13,2 |
13,6 |
12,9 |
13,0 |
14,6 |
14,8 |
12,5 |
12,3 |
12,0 |
-0,8 |
Luxembourg |
11,1 |
11,2 |
11,7 |
11,7 |
11,2 |
11,3 |
11,1 |
10,6 |
10,3 |
10,7 |
10,6 |
-0,5 |
Pays-Bas |
16,0 |
16,9 |
17,5 |
17,4 |
17,6 |
17,6 |
16,5 |
17,2 |
16,2 |
16,7 |
16,2 |
+0,2 |
Portugal |
8,0 |
8,3 |
8,3 |
8,3 |
8,4 |
8,8 |
8,3 |
8,5 |
8,6 |
8,7 |
8,9 |
+0,9 |
Suède |
14,6 |
15,1 |
14,5 |
13,2 |
13,2 |
13,9 |
14,9 |
15,0 |
14,8 |
13,2 |
15,2 |
+0,6 |
Union européenne |
12,8 |
13,1 |
13,4 |
13,5 |
13,5 |
13,5 |
13,7 |
13,5 |
12,7 |
12,6 |
12,4 |
-0,4 |
USA |
6,8 |
6,9 |
6,8 |
6,7 |
6,8 |
6,8 |
6,7 |
6,7 |
6,7 |
6,8 |
|
0 |
Source : Statistiques des recettes publiques 2001, Economic
outlook n° 70.
Cependant, après avoir augmenté de près de 1 point de PIB
jusqu'en 1996, un mouvement de reflux est intervenu et les cotisations sociales
représentaient, en 2000, 12,4 points de PIB, soit 0,4 point de moins
qu'en 1990.
La
stabilité moyenne
, sur la période, du poids des
cotisations sociales se vérifie assez fidèlement dans chaque pays
européen. De fait,
seuls deux Etats ont connu des mouvements
significatifs
(et de sens contraire), la
France
et la
Grèce
, où la part des cotisations sociales dans le PIB a
respectivement diminué et augmenté de 2,5 points de PIB. En
France, cette évolution résulte largement de la substitution
d'impôts à des recettes de cotisations sociales dans un contexte
où le poids des prélèvements totaux sur le revenu des
ménages a été alourdi.
Cette stabilité a été obtenue malgré une hausse
du poids des dépenses sociales brutes
dans le PIB, qui est
passé de 25,5 % à 27,5 % du PIB
9
(
*
)
.
En effet,
les cotisations n'ont cessé de perdre de l'importance
comme source de financement au cours des années 1990. Elles
représentaient alors 66 % des recettes totales et ne
s'élèvent plus en 1999 qu'à 60,5 % de l'ensemble.
Une restructuration du financement de la protection sociale est intervenue.
Deux pays européens doivent être distingués pour l'ampleur
de la baisse de la part du financement des dépenses sociales brutes
réservée aux cotisations : la France où elle est
passée de 80 % à 67 % ; l'Italie où elle
est passée de 70 % à 58 %. Mais,
partout en
Europe
,
cette restructuration
du financement de la protection
sociale a
favorisé une amorce de décrue des charges sociales
sur le travail
observée dans la seconde partie des années 90.
Ces tendances sont imputables à des choix de financement qui
répondent à des objectifs de politique publique principalement
axés sur la lutte contre le chômage
(v.
infra
)
.
B. UNE GRANDE DIVERSITÉ DES SITUATIONS NATIONALES
Le niveau des cotisations sociales est, en Europe, près du double de ce qu'il est aux Etats-Unis et les pays européens témoignent eux-mêmes d'une forte disparité de ce point de vue.
Cotisations des employeurs et des salariés par rapport aux coûts salariaux dans les Etats membres en 1990, 1994 et 1999
40
35
30
25
20
15
10
5
0
40
35
30
25
20
15
10
5
0
En % des coûts salariaux (rémunération des salariés)
B DK D EL E F IRL I L NL A P FIN S UK EU-15
Cotisations des employeurs Cotisations des salariés
Source : Commission européenne
Plusieurs catégories de pays peuvent être
distinguées :
la Belgique, la Grèce, la
France
et les Pays-Bas, où les
charges sociales sont comparativement élevées ; elles y
atteignent environ 35 % des coûts salariaux ;
l'Allemagne, l'Italie, l'Autriche et la Finlande, où ce taux atteint
30 % ;
les autres pays de l'Union européenne où, avec d'importantes
inégalités, les charges sociales représentent moins d'un
quart des coûts salariaux.
Ces disparités tiennent, pour partie,
à des niveaux
différents de socialisation des systèmes de protection sociale.
Niveau et
répartition des dépenses courantes de protection sociale par
fonction, 1999
(En % du PIB)
|
B |
DK |
D |
EL |
E |
F |
IRL |
I |
L |
NL |
A |
P |
FIN |
S |
UK |
UE |
Maladie |
1,1 |
0,9 |
1,5 |
0,8 |
1,0 |
0,7 |
0,6 |
0,7 |
0,7 |
2,4 |
1,1 |
0,4 |
1,2 |
2,1 |
0,7 |
1,1 |
Santé |
5,3 |
4,7 |
6,5 |
5,3 |
4,7 |
7,4 |
5,0 |
5,1 |
4,7 |
5,2 |
6,3 |
6,2 |
4,8 |
6,1 |
5,6 |
6,0 |
Invalidité |
2,4 |
3,5 |
2,2 |
1,6 |
1,5 |
1,7 |
0,7 |
1,5 |
3,0 |
3,1 |
2,4 |
2,4 |
3,7 |
3,8 |
2,6 |
2,2 |
Vieillesse/survivants |
11,3 |
10,9 |
12,0 |
12,5 |
9,0 |
12,7 |
3,5 |
15,6 |
8,8 |
10,3 |
13,1 |
8,7 |
9,1 |
12,8 |
11,7 |
12,1 |
Famille/enfants |
2,4 |
3,7 |
3,0 |
1,9 |
0,4 |
2,8 |
1,8 |
0,9 |
3,3 |
1,1 |
2,9 |
1,0 |
3,3 |
3,4 |
2,3 |
2,2 |
Chômage |
3,2 |
3,2 |
2,1 |
1,4 |
2,5 |
2,1 |
1,6 |
0,5 |
0,5 |
1,6 |
1,5 |
0,7 |
2,9 |
2,6 |
0,8 |
1,7 |
Logement |
0,0 |
0,7 |
0,2 |
0,8 |
0,2 |
0,9 |
0,5 |
0,0 |
0,1 |
0,4 |
0,1 |
0,0 |
0,4 |
0,8 |
1,6 |
0,6 |
Exclusion sociale |
0,6 |
1,0 |
0,6 |
0,5 |
0,1 |
0,4 |
0,3 |
0,0 |
0,2 |
1,5 |
0,3 |
0,3 |
0,5 |
0,8 |
0,2 |
0,4 |
Administration |
1,2 |
0,8 |
1,0 |
0,8 |
0,5 |
1,2 |
0,7 |
0,7 |
0,5 |
1,3 |
0,5 |
0,9 |
0,7 |
0,5 |
0,9 |
0,9 |
Autres |
0,7 |
0,0 |
0,5 |
0,0 |
0,1 |
0,3 |
0,0 |
0,2 |
0,2 |
1,1 |
0,3 |
2,1 |
0,0 |
0,0 |
0,2 |
0,4 |
Total |
28,2 |
29,4 |
29,6 |
25,5 |
20,0 |
30,3 |
14,7 |
25,3 |
21,9 |
28,1 |
28,6 |
22,9 |
26,7 |
32,9 |
26,6 |
27,5 |
Source :
Commission européenne
- La protection
sociale en Europe - 2001
Mais, elles sont aussi le reflet
d'options différentes de financement
de la protection sociale
.
Financement des principaux risques dans les pays de l'Union
européenne
|
Maladie et maternité |
Vieillesse |
Chômage |
Famille |
Accident travail |
Belgique |
CS + Etat + IA |
CS + Etat + IA |
CS + Etat + IA |
CS + Etat + IA |
CS + Etat + IA + ass. |
Danemark |
IA |
IA + CS (comp.) |
CS |
IA |
CS |
Allemagne |
CS |
CS + Etat |
CS + IA |
IA |
CS |
Grèce* |
CS + Etat |
CS + Etat après 1993 |
CS |
CS |
CS |
Espagne |
CS + IA |
CS |
CS |
IA |
CS |
France |
CS + IA |
CS + IA |
CS + Etat |
CS + IA |
CS |
Irlande |
CS + Etat |
CS + Etat |
CS + Etat |
IA |
CS + Etat |
Italie |
CS |
CS |
CS |
CS |
CS |
Luxembourg |
CS + Etat |
CS + Etat |
IA |
CS + IA |
Etat + ass. |
Pays-Bas |
CS |
CS |
CS |
Etat |
- |
Norvège |
CS + IA |
CS + IA |
CS + IAs |
IA |
CS |
Autriche |
CS + Etat |
CS + Etat |
CS + Etat |
principalement IA |
CS + Etat |
Portugal |
CS + IA |
CS |
CS |
CS |
CS + ass. |
Finlande |
CS + IA |
CS + IA |
CS + IA |
IA |
CS |
Suède |
CS + IA |
CS + Etat |
CS + Etat |
IA |
CS |
Royaume-Uni |
CS + IA |
CS |
CS + Etat |
IA |
IA |
* Pour
les assurés après 1993, le système de cotisations sociales
est remplacé par un système tripartite salarié, employeur,
état.
Notes : CS signifie financement par les cotisations sociales, IA
financement par impôt affecté, Etat financement par inclusion dans
le budget général ou subvention de l'Etat récurrente ou
exceptionnelle. Les parts des différentes sources de financement ne sont
pas indiquées et peuvent varier d'un type de risque à l'autre ou
d'un pays à l'autre.
Source : MISSOC, Communauté européenne.
Ainsi, le poids des cotisations sociales dans le PIB est plus bas au
Royaume-Uni qu'en France d'environ 10 points, mais cet écart est
partiellement le résultat d'une structure de financement
différente. Les dépenses de santé (6 % du PIB) sont
presque entièrement financées par l'impôt au Royaume-Uni
(le budget du National Health Service), alors qu'elles le sont, pour une part
importante, par les cotisations sociales en France (54 %).
Toutefois, la différence entre le pois des cotisations ne s'explique
qu'en partie par cette différence dans les modalités de
financement, l'autre partie s'expliquant par des dépenses de
santé plus faibles au Royaume-Uni qu'en France (de 4 points de PIB).
Si, ainsi, on ne peut déduire des données relatives aux seules
cotisations sociales de conclusions sur le coût de la protection sociale,
il est, en revanche, possible d'y voir le poids exercé par les
dépenses de protection sociale sur les salaires.
C'est précisément ce poids que de nombreux pays européens
ont essayé de réduire afin de favoriser l'emploi.
C. ELÉMENTS D'ÉVALUATION
L'
évaluation
de l'efficacité des mesures de
baisse des charges sociales est une
entreprise très
délicate
. Même s'il convient de se féliciter des nets
progrès de méthode réalisés en ce domaine, qui est
désormais un classique des processus d'évaluation des politiques
publiques, le raffinement des méthodes n'est pas tel qu'elles puissent
être totalement conclusives.
L'examen d'une controverse récente, occasionnée par la parution
d'une évaluation relative aux allégements de charges sociales sur
les « bas salaires »
10
(
*
)
a abondamment illustré les difficultés
de l'évaluation. On s'y réfère ici moins pour ce motif que
pour souligner quelques données fondamentales.
Quelques mots sur l'évaluation des politiques
d'allégements
de charges sociales
Les
évaluations de l'impact des mesures de réductions de charges
sociales sont confrontées à des difficultés de
méthode, qui peuvent être présentées comme suit.
Il faut d'abord
isoler
l'effet
des allégements de
charges
de l'effet sur l'emploi
des autres facteurs susceptibles
d'intervenir
(les « facteurs contextuels »).
Il faut également tenir compte des
effets induits
.
Le
premier problème
est particulièrement ardu à
résoudre dans la mesure où les politiques d'allégements de
charges, qu'elles soient ciblées ou générales,
s'appliquent souvent de façon indiscriminée.
Il n'existe donc pas le plus souvent de
« groupe-témoin » dont les comportements puissent
être comparés avec le « groupe-sujet »,
c'est-à-dire le groupe des bénéficiaires de la mesure. Au
demeurant, lorsque ce groupe existe, les différentes
« variables de contrôle » qui permettent de
distinguer les deux catégories utiles aux comparaisons doivent
être soigneusement sélectionnées.
Le recours à des méthodes alternatives, telles les enquêtes
d'opinion, est une voie envisageable mais dont les résultats appellent
une certaine prudence.
La question des
effets induits
est elle aussi épineuse. On peut
la décliner en trois sous-questions. Comment les allégements
sont-ils financés et avec quels effets ? Existe-t-il des effets de
destructions d'emplois à côté des effets de
créations d'emplois, du fait, par exemple, d'un changement des
conditions de concurrence ? Au-delà des résultats
immédiats en termes de créations d'emplois, l'impact des emplois
créés est-il entièrement favorable ou doit-on prendre en
compte des données complémentaires qui tendent à
atténuer l'utilité des emplois créés ? Par
exemple : des « trappes à bas salaires »
apparaissent-elles ? L'emploi évolue-t-il vers des emplois peu
qualifiés ?
La multiplicité et l'importance de ces difficultés ne doivent pas
être considérées comme des arguments contre
l'évaluation - sans évaluation, comment
décider ? - mais bien plutôt comme des défis
à relever.
La capacité des évaluations réalisées à
affronter ces difficultés est en tout cas un critère certain de
leur qualité.
Les
évaluations empiriques
de l'efficacité en termes
d'emploi des allègements de charges sociales sont assez peu concluantes,
du fait des difficultés de méthode (v. ci-dessus) que rencontrent
ces travaux, et les
évaluations
a priori
, sur la base de
modèles microéconomiques ou macroéconomiques concluent
à des fourchettes d'estimations importantes (de 100.000 à 500.000
par exemple pour la France).
Dans ces conditions, la mise en évidence par l'étude
susmentionnée d'un très fort effet des mesures
d'allégements de charges sociales mises en oeuvre entre 1994 et 1997 a
provoqué une réelle controverse.
En un mot, alors que, selon une évaluation concomitante
11
(
*
)
, l'élasticité de
l'emploi non-qualifié à son coût avait été
estimée à 0,6, - une baisse du coût du travail non
qualifié de 1 point entraîne une augmentation de l'emploi
non-qualifié de 0,6 point -, les résultats de l'étude
en cause s'éloignaient beaucoup de cette évaluation avec une
élasticité supérieure à 2.
Sans entrer dans le détail technique de cette controverse, on peut
rappeler les éléments essentiels du débat. Ils contiennent
en effet les données fondamentales d'une politique dont le succès
apparaît conditionné à un contexte favorable.
Mais, il faut aller au-delà et s'interroger sur d'éventuels
effets pervers de certaines formes d'allégements de charges
sociales.
1. Les allégements de charges, quels effets sur l'emploi ?
Les enchaînements à l'oeuvre dans l'évaluation de Crépon et Desplatz, ainsi que les principales critiques qu'elle a suscitées, offrent une vision complète des conditions d'efficacité des politiques d'allégements de charges sociales.
DES ALLÈGEMENTS DES COTISATIONS EMPLOYEURS SUR LES BAS
SALAIRES,
POUR QUOI FAIRE ?
1°)
Réduire spécifiquement les cotisations employeurs sur les plus
bas salaires est justifié par trois arguments* :
-- Il existe actuellement un problème spécifique de chômage
pour les travailleurs non qualifiés : ceux-ci sont
particulièrement concurrencés par les productions des pays
à bas salaires ; ils sont les victimes du progrès technique et de
la substitution du capital au travail qui font disparaître leurs emplois
dans l'industrie et dans certains services. Au contraire, les salariés
qualifiés sont proches du plein emploi. Toute relance se heurterait au
manque de personnel qualifié avant qu'un niveau d'emploi satisfaisant ne
soit atteint pour l'ensemble des salariés.
-- Une cause essentielle du chômage en France est le niveau du SMIC (et
du RMI) qui empêcherait une baisse suffisante du salaire des non
qualifiés. De nombreux travailleurs non qualifiés ont une
productivité du travail inférieure au coût du SMIC, charges
comprises, et ne sont employables que si ce coût est diminué. La
baisse des cotisations sociales employeurs est socialement
préférable à la baisse du SMIC, puisque le niveau de vie
des travailleurs non qualifiés n'est pas affecté.
-- Une mesure ciblée est plus efficace en terme d'emplois gagnés
à coût budgétaire donné qu'une mesure globale. Il
coûte moins cher de réduire de 10 % le coût d'un
salarié au SMIC que le coût d'un cadre.
En sens inverse, les allègements bas salaires sont peu utiles si le
chômage est essentiellement dû à une demande insuffisante,
si les possibilités de substitution entre travail qualifié et
travail non qualifié sont faibles, si le chômage frappe toutes les
catégories de salariés, et que le taux de chômage plus fort
des non qualifiés s'explique par le fait qu'en situation de sous-emploi
généralisé, les actifs diplômés occupent des
postes pour lesquels ils sont surqualifiés.
La mesure fait courir deux risques. Si elle est peu efficace, elle doit
être financée : un financement par hausse des impôts portant
sur les ménages peut entraîner une baisse de la demande et
augmenter le « chômage keynésien ». Les
entreprises sont incitées à créer des emplois non
qualifiés (ce qui est nuisible si le degré de qualification de la
population active tend à augmenter) et à refuser toute hausse de
salaire et toute évolution de carrière pour les salariés
qui occupent ces emplois, puisque la hausse de leur salaire, qui fait perdre
les allègements de cotisations, est très coûteuse : c'est
la trappe à bas salaires.
2°) Les allègements de cotisations sociales sur les bas salaires
jouent par deux canaux. Si la mesure n'est pas financée
ex ante
par une hausse des autres charges portant sur les entreprises, jouent les
canaux macroéconomiques habituels : baisse des coûts des
entreprises, donc baisse des prix, donc hausse de la demande par gain de
compétitivité, hausse des investissements (du fait de
l'amélioration des profits des entreprises), hausse de la consommation
(grâce à la baisse des prix). Selon les modèles
macroéconomiques
français, une réduction induisant
une baisse de 1 % du coût salarial des entreprises du secteur
marchand (soit un coût
ex ante
de 30 milliards de francs)
aboutirait à une hausse de l'emploi de l'ordre de 70 000 à 80 000
au bout de 5 ans. Par ailleurs, même si la mesure est financée
ex ante
, jouent les effets de substitution, les entreprises sont
incitées à utiliser plus de travailleurs non qualifiés,
dont le coût relatif a diminué, en utilisant moins de travailleurs
qualifiés ou de capital. Globalement, la demande se déplace vers
les produits à fort contenu en main-d'oeuvre non qualifiée, au
détriment des produits à fort contenu en capital ou en
main-d'oeuvre qualifiée.
Supposons que les entreprises emploient 30 % de travailleurs non
qualifiés et 70 % de travailleurs qualifiés (dont le
coût du travail est le double). Introduisons un allègement de 10 %
du coût du travail des non qualifiés (soit
ex ante
une
baisse de 1,5 % du coût moyen du travail) financés par une
hausse de 1,8 % du coût du travail des qualifiés. Si
l'élasticité de substitution entre les deux catégories de
travailleurs est de 0,7, l'emploi des travailleurs non qualifiés
progresse de 7 % ; celui des travailleurs qualifiés diminue de
1,2 %. Globalement, l'emploi augmente de 1,3 %. Les coûts de
production des entreprises, donc a priori les prix, ne sont pas
affectés.
* Voir E. Malinvaud (1998), H. Sterdyniak et P.Villa (1998) ou J.-P. Fitoussi (2000).
a) Des allégements de charges permettent de réduire le chômage classique
Les
controverses suscitées par l'étude ici examinée ne doivent
pas éloigner de l'essentiel. Dès lors que, pour des
salariés donnés, leur coût du travail apparaît
supérieur à leur productivité, une réduction de ce
coût est favorable à l'emploi.
Dans les pays à prix du travail administré comme la France,
où le SMIC s'impose comme un plancher de rémunération
comparativement élevé, une solution alternative à une
baisse du SMIC consiste à réduire les charges sociales qui lui
sont attachées.
La totalité des exercices d'évaluation concluent à
l'efficacité de telles mesures et ils ne diffèrent que sur le
nombre d'emplois qu'elles créent.
Les créations d'emplois engendrées par les allégements de
charges sociales seraient le produit de deux enchaînements
complémentaires :
des effets de substitutions
,
entre salariés
avec une
déformation de la structure de la main-d'oeuvre au profit des
populations bénéficiaires des allégements, ainsi
qu'
entre facteurs de production
, la baisse du coût relatif du
travail par rapport au capital engendrant
per se
un enrichissement de la
croissance en emplois ;
des
effets de volume
, la baisse des prix entraînant une
augmentation de la demande, du volume de la production et donc de l'emploi.
Un troisième effet théorique est souvent cité :
l'amélioration de la profitabilité qui résulte de la
baisse des coûts de production. L'étude sous revue le mentionne,
mais sans trop y insister. Les raisons de cette relative discrétion sont
probablement les suivantes :
- plus la profitabilité s'améliore à prix constants moins
instantanément
les créations d'emplois sont fortes
puisqu'alors le redressement de la profitabilité résulte d'une
accélération des gains de productivité ;
- l'étude ne conclut pas, sur l'échantillon d'entreprises
observées, à une significative augmentation du taux de marge, ce
qui est par ailleurs nécessaire pour extérioriser
à la
fois
une forte progression de l'emploi et une forte augmentation de la
production ;
- enfin, l'étude met en évidence un effet rapide sur l'emploi des
mesures d'allégement alors que l'amélioration de la
profitabilité n'a pas d'effets très immédiats ;
Les créations d'emplois résulteront de la combinaison d'un
accroissement du rythme de croissance économique et d'effets de
substitution entre travail qualifié et travail non-qualifié
particulièrement marqués dans l'industrie.
Evaluation des taux de croissance imputables
|
||
Variables |
Industrie |
Tertiaire |
Effectifs salariés |
2,62 |
3,44 |
Coût moyen du travail |
- 3,10 |
- 4,36 |
Part des non qualifiés 1) |
0,7 |
0,7 |
Part des jeunes 1) |
- 0,23 |
- 0,50 |
Part des jeunes non qualifiés 1) |
- 0,14 |
- 0,30 |
Intensité capitalistique |
- 1,41 |
- 1,61 |
Productivité du capital |
0,73 |
1,36 |
Productivité du travail |
- 0,69 |
- 0,25 |
Taux de marge |
- 0,34 |
0,16 |
Coût unitaire de production |
- 2,44 |
- 3,48 |
Valeur ajoutée |
1,94 |
3,19 |
1.
Augmentation en point de la part de la population sous revue dans le total de
la population active.
Source : Economie et Statistique n° 348, 2001-8
Selon l'étude, l'augmentation de la valeur ajoutée en volume
résultant des allégements de charges atteint 2 % dans
l'industrie et 3,2 % dans le tertiaire. Les effectifs salariés
totaux s'accroissent un peu plus vite (2,6 % dans l'industrie et 3,4% dans
le tertiaire). Il y a enrichissement de la croissance en emplois. Mais celui-ci
reste modéré. Si au total l'augmentation de la part des
non-qualifiés dans la population employée est
modérée (0,7 point), ce qui traduit des effets de
substitution assez modestes entre travail qualifié et travail
non-qualifié, la croissance de l'emploi non-qualifié est
cependant rapide.
Dans l'industrie
, où le taux de croissance des effectifs est
estimé à 2,6%, la variation de la part des non-qualifiés
atteint 0,7 point. Compte tenu de la part initiale des
non-qualifiés qui est de 22%, on évalue à 5,8% le taux de
croissance de l'emploi non qualifié imputable au dispositif (2,6 +
0,7/0,2). Pour les qualifiés, le taux de croissance des effectifs est de
1,8 %. Leur part dans la main-d'oeuvre totale recule donc.
Dans le tertiaire
, où la part des non-qualifiés est
initialement de 30%, les taux de croissance par qualification sont
estimés à 5,7% pour les non-qualifiés et à 2,5%
pour les qualifiés.
On en déduit des créations ou sauvegardes d'
emplois
non-qualifiés
de 70 000 dans l'industrie et de 150 000
dans le tertiaire. Les créations d'
emplois qualifiés
s'élèveraient quant à eux à 80 000 dans
l'industrie et à 160 000 dans le tertiaire. Au total, il
résulterait des allégements sous revue
220 000 créations
ou maintiens d'emplois
non-qualifiés
, et
240 000 créations ou maintiens
d'emplois qualifiés
, dans l'économie.
L'effet de substitution est important dans l'industrie et, même de second
ordre, non négligeable dans le tertiaire.
b) Des enchaînements dont l'efficacité est subordonnée à des données de contexte
Au-delà des aspects techniques des critiques suscitées par l'évaluation en cause - elles concernent la mesure de l'augmentation en volume de la production des entreprises bénéficiaires des allégements de charges ou encore la prise en compte du temps partiel -, il faut retenir deux enseignements essentiels des observations que cette évaluation a provoquées.
(1) Quel bouclage financier ?
Il
apparaît tout d'abord que l'efficacité des politiques
d'allégements de charges sociales dépend étroitement des
conditions de leur bouclage financier.
Si, dans l'étude mentionnée, la perte de recettes sociales
ex
ante
est plus que compensée
ex post
par les recettes
engendrées par les créations d'emplois et par les
économies réalisées sur les transferts sociaux, ce
résultat, très inhabituel est, pour tout dire, fragile. De
façon générale, les évaluations soulignent que le
besoin de financement
ex post
est inférieur au besoin de
financement
ex ante
mais n'en font pas moins apparaître un besoin
de financement
ex post
. Dans ces conditions, il apparaît essentiel
que celui-ci puisse être couvert sans que la logique d'allégement
des prélèvements obligatoires soit remise en cause.
A cet égard, les réductions de cotisations sociales,
entreprises en Europe dans la seconde partie des années 90, pourraient
n'être que très transitoires si les pays européens devaient
se montrer incapables de maîtriser la dynamique de leurs transferts
sociaux.
(2) De l'importance d'être cohérent
Un
second enseignement essentiel est que pour produire leur plein effet, les
allégements de charges sociales doivent améliorer la
compétitivité de leurs bénéficiaires.
On peut en tirer deux premières conclusions :
la première pour mettre en évidence que les
effets nets
des allégements sont moins importants que les effets
appréhendés auprès de leurs bénéficiaires
directs
puisque l'amélioration de compétitivité que
ceux-ci connaissent se produit au détriment de leurs concurrents ;
la deuxième pour rappeler que
les
politiques de
désinflation compétitive conduites de façon concomitante
par les Etats en Europe,
dont les allégements de charges sociales
constituent l'une des facettes,
se neutralisent partiellement les unes les
autres
.
Mais il convient surtout de relever qu'il n'est pas cohérent ni
responsable de conduire une politique économique susceptible de grever
le coût du travail et de poursuivre un objectif de baisse de ce
coût.
Une telle combinaison qu'a illustrée la politique économique et
sociale du précédent gouvernement revient à tenter de
remplir le tonneau des Danaïdes sans gain pour l'emploi et en
épuisant les sources de financement de la protection sociale.
Il
apparaît particulièrement dangereux de se placer en situation de
devoir compenser les hausses du coût de travail provoquées par des
mesures comme les 35 heures par des réductions de charges sociales.
Celles-ci, quoique insuffisantes pour contenir l'aggravation du coût du
travail provoquée par des décisions anti-économiques,
sapent l'assise financière de la protection sociale
. C'est toute
l'histoire du FOREC.
2. Les « trappes à bas salaires », un effet pervers à surveiller
Les
allègements de charges sociales sur les bas salaires créent
potentiellement des «
trappes à bas
salaires
» : le taux de charges sociales est plus faible
pour les salaires les plus bas, ce qui peut inciter les entreprises à
maintenir des salaires bas et des structures de qualifications
privilégiant les postes à salaires peu élevés.
Ce risque ne doit pas être négligé. Il revêt deux
visages, tous deux susceptibles d'écorner la valeur du travail, qu'il
convient de restaurer dans notre pays :
d'une part, celui de la démotivation de salariés dont les
perspectives de progression de leurs revenus sont amoindries ;
d'autre part, celui de la démotivation de salariés qui, quoique
plus qualifiés, obtiennent une rémunération
indifférenciée.
Toutefois, ce
risque est plus ou moins élevé
selon les
modalités d'allégements. Les
exonérations
dégressives
de cotisations sociales ont pour effet de rendre
très coûteuses
les
hausses de salaire
. Quand une
entreprise augmente le salaire d'un salarié au SMIC, une hausse
très forte des cotisations patronales intervient. Au niveau du SMIC, le
taux de cotisations patronales est de 26,2 % contre, environ, 45 %
hors ristourne dégressive. Une augmentation du salaire brut de 10 %
se traduit par une augmentation du coût du travail de 15,2 %. Le
taux marginal de cotisations varie selon les dispositifs une fois les seuils
d'allégements dépassés. Hors ristourne, une augmentation
du salaire mensuel brut (SB) de 113 euros coûte 165 euros à
l'entreprise. Avec la ristourne « Juppé »,
l'entreprise doit débourser 216 euros pour augmenter le SB de 113
euros ; le taux marginal de cotisation patronale est de 92 %. Pour
les entreprises bénéficiant de la ristourne
« Aubry », la trappe à bas salaire est plus
faible : le taux marginal de cotisations patronales est de 80 %. Pour
ces entreprises, l'effet de trappe à bas salaire joue jusqu'à 1,8
SMIC contre seulement 1,3 SMIC pour les entreprises ne
bénéficiant que de la ristourne
« Juppé ».
Ces effets pervers sont moins accusés lorsque la réduction de
charge est
forfaitaire
, c'est-à-dire lorsque le montant de
réduction est indépendant du salaire (c'est le cas du nouveau
système belge, ou d'une partie du système français pour
les 35 heures). Une autre solution consiste à définir des seuils
en deçà desquels le taux de cotisations est plus bas (ou nul),
à la condition que les marches soient nulles, c'est-à-dire que le
taux au-delà du seuil s'applique au salaire diminué du seuil,
comme dans le système anglais après les réformes
initiées en 1997. Dans les cas des réductions forfaitaires ou
à seuil, le taux marginal des cotisations sociales reste
modéré, au niveau du taux moyen de cotisations, au lieu
d'être très élevé (comme dans le système
français ou néerlandais où il est supérieur
à 100 % dans certains cas).
Dans ce contexte, une récente évaluation
a posteriori
sur
données microéconomiques réalisée par Crépon
et Desplatz a suscité une réelle controverse. Elle conclut
à un effet important et rapide des baisses de charges sur les bas
salaires mises en oeuvre entre 1994 et 1996 avec 460.000 emplois
créés entre 1994 et 1997.
CHAPITRE V :
INCITER
AU TRAVAIL,
UNE PRÉOCCUPATION COMMUNE, DES DISPOSITIFS PLUS OU MOINS
EFFICACES
L'une
des rares orientations communes qui semble traverser les réformes des
prélèvements obligatoires entreprises en Europe au cours des
années écoulées est celle qui a consisté à
développer l'incitation au travail en s'efforçant de lutter
contre les « trappes à inactivité ».
En effet, de nombreux pays européens ont adopté des mesures
visant à accroître le taux d'activité des personnes les
moins qualifiées. Les mesures les plus significatives ont
été prises au Royaume-Uni et en France, qui, à l'image de
l'
Earned
Income Tax Credit
(EITC) américain adopté
dès 1975, ont mis en place un dispositif de crédit d'impôt.
Le contenu des dispositifs varie toutefois assez nettement avec un impact
également différencié selon certaines évaluations
externes récentes.
I. UN OBJECTIF COMMUN, INCITER AU TRAVAIL PEU QUALIFIÉ EN LUTTANT CONTRE LES TRAPPES À INACTIVITÉ
Un
objectif commun aux pays européens les a incités à
modifier leur régime fiscal afin de lutter contre les trappes à
inactivité des « peu qualifiés ».
Même si son exactitude est débattue, le diagnostic de la
responsabilité d'un phénomène de trappes à
inactivité dans l'importance du chômage en Europe s'est
imposé, étayé par l'existence de taux d'imposition
effectifs élevés en cas de reprise d'emploi par les
« peu qualifiés ».
A. UN DIAGNOSTIC À LA PERTINENCE RELATIVE...
La
notion de trappe à inactivité renvoie à la situation dans
laquelle un individu, chômeur ou inactif, n'est pas incité
financièrement à prendre un emploi, parce que la
rémunération à laquelle il pourrait prétendre
serait à peine supérieure, voire inférieure, aux revenus
de transferts qu'il perçoit en restant inoccupé.
Un certain nombre d'éléments arithmétiques viennent donner
quelque crédit à l'existence d'un tel phénomène.
Toutefois, plusieurs considérations doivent être gardées
à l'esprit, qui conduisent à conserver une attitude prudente
à l'égard de ce concept.
En premier lieu, on ne saurait passer du constat de l'existence de taux
d'emploi
12
(
*
)
et taux
d'activité
1
relativement faibles pour des « peu
qualifiés » à la conclusion de l'existence, pour les
populations concernées, d'un fort chômage volontaire.
C'est le cas pour le taux d'emploi dont la principale variable explicative est
la demande de travail. Les très fortes créations d'emplois
observées, en France, à la fin des années 90 ont
montré la vigueur des liens positifs entre demande d'emploi et taux
d'emploi des non qualifiés.
Mais c'est probablement aussi vrai du taux d'activité qui, mesurant la
participation au marché du travail (soit comme personne occupée,
soit comme personne à la recherche d'un emploi) est
a priori
un
indicateur plus pertinent pour mesurer l'impact dissuasif du système
fiscalo-social sur la volonté de trouver un travail. On observe en effet
que cet indicateur varie de façon indépendante par rapport aux
caractéristiques nationales des systèmes redistributifs. En
revanche, une corrélation assez robuste semble exister entre son niveau
et celui du taux d'emploi, qui pourrait attester l'existence de
phénomènes de découragement des populations en cause
devant la persistance du chômage.
Plus globalement, on ne peut que constater la thèse selon laquelle le
système redistributif entraîne l'apparition de trappes à
inactivité repose sur
un modèle de rationalité
étroite
où les choix ne seraient motivés que par la
comparaison entre les gains associés à l'emploi et les revenus
sociaux nets d'impôt. Or un tel modèle exclut, par
définition, une série de considérations qu'un
modèle de rationalité complète recommande de prendre en
compte. Ces considérations peuvent comprendre le fait que l'emploi n'est
pas seulement un moyen de subvenir à des besoins matériels
immédiats, que sont associés des avantages de long terme à
la prise d'un emploi (en termes de retraite future plus importante ou de
formation et d'expérience professionnelle pouvant sensiblement
améliorer sa situation professionnelle dans le futur), ou encore que les
structures sociales, l'existence de revenus occultes ou d'autres
phénomènes socio-économiques peuvent jouer.
En bref, sans rejeter le cadre théorique expliquant
l'éventualité de trappes à inactivité, un spectre
complet d'analyse conduit plutôt à s'interroger sur l'ampleur d'un
tel phénomène.
Une étude de Laroque et Salanié (2000) a proposé une
décomposition du non emploi. Ils estiment que pour 57 %, il s'agit
de non emploi volontaire. Cet ordre de grandeur reste toutefois incertain. Par
exemple, l'analyse qui le sous-tend exclut le temps partiel. Or, la plupart des
travailleurs à temps partiel (le plus souvent des femmes) n'auraient pas
intérêt à travailler étant donné les faibles
salaires qu'ils perçoivent relativement au RMI et autres allocations
associées à l'inactivité. De plus, ils sont souvent en
situation de sous-emploi involontaire (ils souhaiteraient travailler
davantage). Ainsi, les exclure de l'analyse sous-estime le chômage
involontaire et surestime le chômage volontaire. Du reste, le pouvoir
explicatif du modèle utilisé semble relatif dans la mesure
où la décision de rechercher un emploi telle qu'elle y est
représentée dépend en grande partie de facteurs
inexpliqués.
B. ... MAIS ÉTAYÉ PAR DES DONNÉES ARITHMÉTIQUES PEU CONTESTABLES
Malgré ces réserves, les données
arithmétiques viennent conforter l'idée que la prise d'un emploi
est souvent peu attrayante financièrement.
Dans le cas français, la comparaison entre les revenus tirés du
Revenu minimum d'insertion (RMI) et les revenus tirés d'un emploi
payé au niveau du SMIC présente la situation suivante pour
l'année 2000.
Gains mensuels à la reprise d'activité (en francs) |
||
|
du RMI à ½ SMIC |
du RMI à 1 SMIC |
Célibataire sans enfant |
- 149 |
1 782 |
Couple 2
enfants
|
- 1 479 |
779 |
Couple 2
enfants
|
2 097 |
4 088 |
Source : OFCE (2001) |
Ces données ne sont pas propres à la France comme le montrent les informations ci-après extraites de l'étude de l'OFCE figurant en annexe.
Taux effectifs d'imposition
de la reprise d'un emploi en 1997
(le travailleur principal a le niveau de salaire moyen 1)
Travailleur principal : |
Du
chômage
2
|
Du chômage de longue durée 4 à l'emploi à temps partiel 5 |
Travailleur secondaire : |
Non emploi 3 |
Non emploi |
Allemagne |
80 |
115 |
Autriche |
76 |
135 |
Belgique |
68 |
109 |
Danemark |
84 |
118 |
Espagne |
78 |
159 |
Finlande |
88 |
152 |
France |
76 |
133 |
Grèce |
54 |
104 |
Irlande |
68 |
60 |
Italie |
63 |
84 |
Luxembourg |
87 |
198 |
Pays-Bas |
89 |
134 |
Portugal |
79 |
174 |
Royaume-Uni |
72 |
93 |
Suède |
88 |
154 |
Eu15 |
77 |
128 |
Etats-Unis |
68 |
102 |
1.
SMO : Salaire moyen ouvrier, calculé comme le salaire moyen brut
d'un adulte travaillant à plein temps dans le secteur manufacturier.. En
Espagne, par exemple, le salaire minimum correspond à 50 % du SMO
alors qu'en France en 1998, le SMIC représente 60 % du SMO
(Joumard, 2001).
2. 1
er
mois de chômage du travailleur principal qui
était employé au niveau du SMO. Il reçoit le montant
d'allocation chômage de base plus éventuellement des aides
sociales pour personne à charge et pour le loyer.
3. Le travailleur secondaire ne perçoit aucune allocation chômage.
4. On suppose que le chômeur de longue durée reçoit une
aide sociale s'il est en fin de droit d'allocation chômage.
5. Le temps partiel est supposé correspondre à un salaire de
40 % du SMO.
Lecture du tableau : En France, 76 % du salaire du temps plein est
perdu en impôt et réduction de transferts sociaux. Un taux
effectif d'imposition supérieur à 100 % indique que le
ménage perd de l'argent lors du passage au temps partiel, ce qui est,
par exemple, le cas en France lorsque le travailleur principal passe du
chômage de longue durée au temps partiel.
Source : OCDE,
Benefit systems and Work Incentives,
(1999)
.
Le tableau évalue l'imposition effective qui pesait en 1997 sur la
transition emploi/non emploi au sein du couple. La première colonne du
tableau donne le montant de salaire retiré quand, dans un couple, une
personne est non employée et ne perçoit aucune aide
particulière et que le travailleur principal passe du chômage
(indemnisé) à l'emploi à temps plein (au salaire moyen).
En moyenne pour l'Europe des 15 en 1997, 77 % du salaire individuel est
retiré dans le cas de la prise d'un emploi à plein temps. Ceci
est le résultat de l'interaction entre l'impôt et le retrait des
allocations chômage. Les Pays-Bas (tout comme la Finlande et la
Suède) retirent un taux plus élevé, de 89 %, alors
qu'en France, il est de 76 %.
La deuxième colonne concerne l'imposition de la reprise d'un emploi
à temps partiel du travailleur principal qui était au
chômage de long terme. Dans ce cas, il n'existe pratiquement aucune
incitation financière à prendre un emploi à temps partiel
dans aucun pays (à l'exception de l'Irlande avec un taux de 60 %).
La moyenne européenne est de 128 %, cette transition est donc
fortement pénalisée. L'Italie et le Royaume-Uni ont un taux
élevé qui reste inférieur à 100 %, mais dans
tous les autres pays et en particulier en France, le taux est très
élevé, indiquant une forte désincitation des individus
dans des situations précaires à prendre un emploi à temps
partiel.
II. DES RÉFORMES DIFFÉRENTES PAR LEUR CONTENU ET PAR LEUR IMPACT
La
plupart des pays européens ont pris des mesures destinées
à accroître l'incitation au travail. Mais ces mesures
diffèrent nettement par leur contenu.
Dans de nombreux pays, les mesures fiscales d'incitation au travail des
personnes peu qualifiées, présentées en annexe de ce
rapport, ont simplement consisté à réduire les
prélèvements sur les revenus du travail les plus modestes :
les taux d'imposition marginaux minima ont été baissés,
des abattements ou des exonérations ont été mis en place.
Des mesures plus substantielles ont été adoptées dans
quelques pays dont la France et le Royaume-Uni, qui ont mis en oeuvre des
dispositifs inspirés de l'impôt négatif à l'image de
l'EITC américain.
Ces trois dispositifs apparaissent cependant très
différents.
A. PRÉSENTATION DES TROIS DISPOSITIFS
1. L'Earned Income Tax Credit
L'
EITC
figure dans le code des impôts des Etats-Unis
depuis 1975. Le dispositif a été progressivement élargi et
renforcé, et la dépense consentie au titre de l'EITC a
été d'environ
32 milliards de dollars
en 2000.
Un foyer sur cinq, soit vingt millions de foyers, bénéficie de
l'
EITC
et 80 % des foyers éligibles touchent effectivement
cette prestation.
L'
EITC
n'est appliqué qu'aux foyers dans lesquels au moins une
personne travaille. Tout bénéficiaire de l'
EITC
doit, de
plus, satisfaire à certaines conditions de ressources, qui varient en
fonction de sa situation familiale. Le barème de la prestation
dépend aussi du nombre d'enfants à charge : en 1999, le
crédit maximum pour un foyer sans enfants s'élève à
347 dollars, tandis qu'il vaut 2 312 dollars pour un foyer avec
au moins deux enfants.
Le graphique ci-dessous retrace le profil de la prestation. Dans une
première phase, le montant de l'
EITC
augmente proportionnellement
avec le revenu ; il est ensuite constant jusqu'à un certain
seuil ; puis il décroît, jusqu'à s'annuler à
partir d'un certain niveau de revenu.
Le barème de l' EITC selon la structure du foyer en 1999
Montant du
crédit d'impôt
(
en dollars
)
Revenu annuel (en $)
Source : Bontout (2000)
En pratique, le montant de l'
EITC
est déduit du montant
d'impôt sur le revenu fédéral dû par son
bénéficiaire ; si l'
EITC
est supérieur au
montant de l'impôt, la différence fait l'objet d'un versement
direct au bénéficiaire. Actuellement, 80 % environ des
dépenses fédérales liées à l'
EITC
correspondent à des versements directs aux ménages.
2. Le Working Families Tax Credit
Le
WFTC
britannique est de création récente, puisqu'il a
été instauré en 1999. Il se substitue à un
dispositif beaucoup moins généreux, le
Family
Credit
, qui existait depuis 1992. La création du
WFTC
répondait à une double préoccupation : relever le
niveau de vie des familles à faibles revenus et les inciter à
l'activité.
Le coût budgétaire du
WFTC
a été de l'ordre
de
5 milliards de livres
en 2001, pour 1 269 000
bénéficiaires recensés au 31 mai 2001.
Le
WFTC
est un mécanisme de crédit d'impôt en faveur
des familles avec enfants. Ses règles d'attribution sont relativement
complexes, puisqu'il dépend à la fois du nombre d'heures
travaillées, des revenus et du patrimoine déclaré par le
ménage, et des caractéristiques de la famille (nombre d'enfants
à charge, âge des enfants et mode de garde). Deux conditions
principales d'éligibilité sont requises : d'une part, l'un
des adultes du foyer doit exercer une activité, salariée ou
indépendante, d'une durée d'au moins 16 heures par
semaine ; d'autre part, le foyer ne doit pas disposer d'un patrimoine
(hors logement principal) d'une valeur supérieure à
8 000 £.
Le graphique ci-dessous renseigne sur le barème du
WFTC
. Le cas
de figure retenu est celui d'un couple mono-actif,
rémunéré au salaire minimum, et ayant deux enfants de
moins de 11 ans. Aucune allocation n'est versée lorsque la durée
du travail hebdomadaire est inférieure à 16 heures. Elle est
constante pour une durée de travail comprise entre 16 et 25 heures.
Puis, l'allocation décroît.
Montant du WFTC (en livres sterling),
en fonction du revenu
net d'activité.
Source : Delarue, 2000
Chaque enfant à charge donne droit à une majoration, dont le
montant croît avec l'âge des enfants. Une majoration
éventuelle peut être versée pour compenser les frais de
garde d'enfants, dans la limité d'un plafond.
3. La Prime pour l'emploi
La Prime
pour l'emploi (PPE), instituée par une loi du 30 mai 2001, est
le dernier-né des trois dispositifs.
En 2001, 8 millions de foyers ont touché la PPE, pour un
coût total de 2,5 milliards d'euros
. Puis, la prime a
été doublée par anticipation dès 2001 (pour sa
composante variable) et son régime a été modifié en
faveur des emplois à temps partiel en 2003.
La prime pour l'emploi ne concerne que les foyers fiscaux dans lesquels une
personne au moins exerce une activité, et dont le revenu
déclaré à l'impôt sur le revenu est inférieur
à un plafond, variable selon la taille du foyer. Son montant moyen
était de 288 € en 2001 et 255 € en 2002.
Le graphique ci-après présente le barème de la PPE
versée en 2001, selon quatre configurations familiales avant
aménagement du dispositif en faveur du temps partiel. On observe que la
prime est nulle jusqu'à un seuil de revenu de 0,3 SMIC.
Au-delà de ce seuil, la prime croît avec le revenu au rythme de
2,2 %. Elle atteint son maximum au niveau d'un SMIC à temps plein,
puis décroît au taux de 5,5 %. Pour un célibataire
sans enfant, la prime disparaît à partir d'un niveau de revenu de
1,4 SMIC.
Montant de la prime pour l'emploi versée en 2001
(en
euros)
Source : INSEE (2002)
B. DES DISPOSITIFS QUI DIFFÈRENT SENSIBLEMENT
En dépit d'une inspiration commune, les trois dispositifs étudiés présentent des différences sensibles.
1. Des efforts financiers très disparates, des niveaux de « prestation » très inégaux
En
premier lieu, les montants financiers en jeu sont très
différents
. Les Etats-Unis consacrent 32 milliards de dollars
(à peu près autant d'euros) à l'
EITC
chaque
année. Le Royaume-Uni dépense 5 milliards de livres, soit
environ 8,1 milliards d'euros, au titre du
WFTC
. La PPE
représente un budget de 2,5 milliards d'euros (en 2001). Le
WFTC
représente donc un effort financier trois fois plus
important que la PPE. Une comparaison avec les Etats-Unis suppose de tenir
compte de la différence de population : si l'on admet que le
rapport entre la population française et la population américaine
est approximativement de un à cinq, l'effort financier consenti au titre
de l'
EITC
reste environ deux fois et demi plus important que l'effort
financier consenti au titre de la PPE.
Les mécanismes de crédit d'impôt se distinguent
également par les populations ciblées
. Le
WFTC
ne
concerne qu'un ménage britannique sur vingt. L'
EITC
est
perçu par un ménage américain sur cinq, et la PPE touche
un ménage français sur quatre. Le crédit d'impôt
britannique est donc celui qui, rapporté à la population,
représente la dépense budgétaire la plus importante, mais
aussi la plus concentrée. A l'opposé, le crédit
d'impôt français, qui représente déjà une
dépense moindre, exerce ses effets de manière très diffuse.
Conséquence logique des deux observations précédentes,
le gain financier d'un bénéficiaire du
WFTC
est beaucoup
plus significatif que celui d'un bénéficiaire de la PPE
. P.
Cahuc (2002) calcule que, pour un foyer bi-actif au SMIC avec au moins un
enfant, la PPE versée en 2001 a représenté 4,4 % de
leur revenu déclaré. Par contraste, le montant maximal de l'aide
qui peut être perçue au titre du
Working Families Tax
Crédit
représente 160 % du revenu déclaré
du bénéficiaire. Toutefois, l'aide apportée par le
WFTC
est, en pratique, amputée des deux tiers par la
réduction d'autres prestations sociales, ce qui n'est pas le cas pour la
PPE française. Mais, même en tenant compte de cet important
correctif, le système britannique reste nettement plus
généreux que celui adopté par la France (le gain net est
supérieur à 50 % du revenu déclaré).
L'
EITC
occupe une position intermédiaire, quoique plus proche du
niveau britannique que du niveau français : le montant maxima de
l'
EITC
peut représenter jusqu'à 40 % du revenu
déclaré de son bénéficiaire.
2. Un traitement différent du temps partiel
La PPE
française se distinguait des dispositifs étrangers par une
orientation très nette en faveur du travail à temps plein qui
demeure, même si elle a été un peu atténuée.
Avant l'aménagement de 2003, les deux tiers des foyers
bénéficiaires de la PPE travaillaient à temps plein, et le
montant de la PPE était maximum au niveau d'un SMIC à temps
plein. Au Royaume-Uni, le
WFTC
commence à décroître
à partir de la vingt-cinquième heure de travail hebdomadaire pour
les personnes percevant le salaire minimum. Aux Etats-Unis, le montant de
l'aide est généralement proportionnel à la durée du
travail, et on observe que les célibataires et les couples mariés
sans enfant, qui sont employés au salaire minimum à temps plein,
n'ont généralement pas droit à l'
EITC
.
Cette orientation de la PPE reflète le souci de conserver au travail
à temps plein son statut de norme sociale de référence.
Les systèmes français et britanniques partagent cependant un
objectif commun : ne pas encourager la création d'emplois à
temps très partiel. Cette préoccupation explique la
présence d'un seuil en deçà duquel aucune aide n'est
versée. Ce seuil correspond à 16 heures de travail
hebdomadaire au Royaume-Uni, pour un salarié percevant le salaire
minimum, et à environ 11,5 heures de travail hebdomadaire en
France.
3. Une prise en compte variable de la dimension familiale
Le
WFTC
présente la particularité de n'être
octroyé qu'aux familles avec enfants, ce qui en fait un instrument de
politique de l'emploi, mais aussi de politique familiale. Aux Etats-Unis, le
champ de l'
EITC
a été progressivement élargi, de
sorte qu'il est, depuis 1994, versé à tous les travailleurs, sous
condition de revenus, y compris les célibataires sans enfant. Le montant
du crédit d'impôt est cependant beaucoup plus important pour les
familles avec enfants.
Par comparaison, la prise en compte des charges de famille au titre de la PPE
apparaît assez limitée. Mais il faut rappeler que le
système de prestations familiales est beaucoup plus
développé en France que dans les pays anglo-saxons. La PPE reste
donc, prioritairement, un outil de subvention à l'emploi, et non un
instrument de redistribution au profit des familles.
4. Des modalités d'administration différentes
L'une
des caractéristiques du
WFTC
tient à son mode de gestion
particulier. Alors que la PPE et l'
EITC
sont versés directement
par l'administration fiscale, le
WFTC
est versé au salarié
par son employeur, par le biais de la feuille de paie. L'administration fiscale
britannique examine les conditions d'éligibilité du loyer du
demandeur, et calcule les droits éventuels. Puis, elle communique
à l'employeur la somme qu'il doit verser au salarié, sous forme
de complément de rémunération, ou de baisse des
prélèvements au titre de l'impôt sur le revenu.
P. Cahuc (2002) considère que ce mode de gestion améliore la
lisibilité du dispositif, puisque les salariés perçoivent
immédiatement une amélioration de leur salaire net
résultant de l'application du crédit d'impôt. Dans la
mesure où la lisibilité du dispositif conditionne pour partie son
efficacité, la France aurait intérêt, selon cet auteur,
à s'inspirer du modèle britannique.
C. DES DISPOSITIFS AUX EFFETS TRÈS VARIABLES
En raison de son ancienneté, mais aussi du développement plus abouti des démarches d'évaluation des politiques publiques aux Etats-Unis, les effets de l' EITC sont bien mieux connus que ceux de ses équivalents britannique et français. Cependant, les évaluations externes, dont il faut saluer l'initiative, permettent d'établir des différences très sensibles d'impact entre les trois dispositifs aussi bien en termes d'incitation au travail que de redistribution des revenus.
1. Effets sur l'incitation au travail
Il importe au préalable de rappeler la distinction entre effet revenu et effet de substitution. Un accroissement du salaire net, qui peut résulter de l'instauration d'un crédit d'impôt, rend le travail plus attractif, dans la mesure où il augmente le pouvoir d'achat de chaque heure travaillée. Ceci incite à substituer du travail au temps libre afin de profiter du revenu obtenu grâce au travail (effet de substitution). Mais l'augmentation du salaire a aussi pour effet d'augmenter le revenu total à nombre d'heures travaillées donné. Cette augmentation du revenu total peut inciter à travailler moins (effet revenu). On observe qu'effet revenu et effet de substitution jouent en sens contraire, ce qui rend l'impact d'une hausse de salaire sur l'offre de travail a priori indéterminée.
a) Evaluation de l'EITC
Les
effets de l'
EITC
sur l'offre de travail dépendent beaucoup de la
situation de ses bénéficiaires et doivent être
distingués son effet sur le taux d'activité et son effet sur le
nombre d'heures travaillées par les personnes occupant
déjà un emploi.
Pour les personnes seules passant du non-emploi à l'emploi, la
perspective d'un revenu plus élevé du fait de l'
EITC
fournit sans ambiguïté une incitation au travail. Cependant, pour
les couples bi-actifs, l'
EITC
peut induire une incitation opposée
pour le second salaire. En effet, l'augmentation de revenu du couple peut le
faire passer dans la phase de sortie de l'
EITC
. Dans la phase de sortie,
toute hausse des revenus salariaux est partiellement compensée par une
baisse du revenu tiré de l'
EITC
(qui équivaut à une
taxation du salaire au taux marginal de 60 %).
Pour les personnes déjà actives et dans la phase d'entrée
du dispositif, l'effet sur le nombre d'heures travaillées est
généralement positif, l'effet de substitution dominant l'effet
revenu. Pour les personnes dans la phase intermédiaire (plateau), seul
un effet revenu subsiste, produisant en théorie une incitation à
réduire le nombre d'heures travaillées. Dans la phase de sortie,
les effets revenu et substitution négatifs s'ajoutent, produisant
à nouveau une incitation à réduire le nombre d'heures
travaillées.
Au vu de ses propriétés incitatives, l'EITC devrait donc avoir
pour effet d'augmenter les taux d'activité des personnes seules, mais
éventuellement de les diminuer pour les seconds salaires des couples
bi-actifs, l'effet sur le nombre d'heures travaillées étant
positif dans la phase d'entrée puis négatif dans les phases de
plateau et de sortie du dispositif.
Cette analyse
a priori
des effets incitatifs de l'
EITC
est
confirmée par les évaluations empiriques réalisées
ex post
.
Les résultats disponibles confirment l'important
effet incitatif de
l'
EITC
à la reprise d'emploi pour les foyers mono-actifs avec
enfants
. Une estimation de Scholz (1996) suggère que la
réforme de l'
EITC
de 1993 aurait induit, entre 1993 et 1996, une
hausse du taux d'activité des familles monoparentales de 65,5 %
à 72,1 % (146 millions d'heures).
En revanche, l'
EITC
a un
effet désincitatif sur
l'activité des femmes mariées
. SCHOLZ (1996) estime que la
réforme de 1993 aurait induit, pour les seconds salaires des familles
biparentales, une baisse de leur taux d'activité représentant une
perte de 8,9 millions d'heures travaillées.
L'
EITC
semble avoir un effet faiblement négatif sur le volume
d'heures travaillées par les personnes occupant déjà un
emploi
, mais cet effet est plus que compensé par son impact sur le
passage de l'inactivité à l'emploi.
b) Evaluation du WFTC
Comme
pour l'
EITC
, les effets incitatifs du
WFTC
dépendent de la
position du bénéficiaire.
Le
WFTC
exerce un fort effet incitatif à la prise d'un emploi
d'une durée supérieure à 16 heures par semaine,
puisqu'il accroît sensiblement le gain financier qui y est
associé. De même, il incite les personnes dont la durée du
travail hebdomadaire est inférieure à 16 heures à
augmenter le nombre d'heures travaillées, afin d'entrer dans le
dispositif.
Pour les ménages qui se situent dans la partie forfaitaire du
WFTC
(plateau), le versement d'un fort revenu de transfert devrait
exercer, en théorie, un effet désincitatif sur l'offre de travail
(effet revenu négatif).
Pour ceux qui se situent dans la partie dégressive du dispositif, chaque
gain supplémentaire au titre des revenus du travail est partiellement
compensé par la diminution de l'allocation perçue au titre du
WFTC
. Ceci devrait, en principe, avoir un effet désincitatif sur
l'offre de travail. Toutefois, l'existence d'une majoration éventuelle
pour garde d'enfant peut inciter à l'activité des personnes qui,
en raison d'une contrainte de liquidité, n'avaient pas la
possibilité de faire garder leurs enfants, et renonçaient de ce
fait à exercer une activité, ou se contentaient d'une
activité réduite. L'effet total du
WFTC
apparaît
donc ici incertain.
Pour les couples bi-actifs, le
WFTC
devrait avoir un effet
désincitatif sur l'offre de travail
. Le
WFTC
devrait, en
particulier, décourager l'activité des femmes dont le conjoint
travaille. En effet,
l'augmentation par le
WFTC
du revenu disponible
de non-activité pour une personne dont le conjoint travaille ne l'incite
pas à l'activité (effet revenu négatif).
Rappelons enfin que le
WFTC
ne prétend pas régler à
lui seul la totalité du problème des trappes à
inactivité, puisqu'il n'est versé ni aux personnes seules ni aux
couples sans enfants.
Peu d'études ont été réalisées, à ce
jour, pour tenter d'évaluer les effets
ex post
du dispositif.
Une étude de Blundell
et al
. (2000) tente d'évaluer les
effets nets du
WFTC
, par rapport au dispositif antérieur du
Family Credit
. Globalement, le nombre d'entrées sur le
marché du travail engendrées par le
WFTC
devrait
être de l'ordre de 44 000 selon cette étude. Rapporté
aux 28,2 millions de personnes employées au Royaume-Uni en 2001, cela
représente une variation de + 0,15%. Au vu du coût net du
WFTC
par rapport au
Family Credit
qui est de 2,7 milliards
de livres, le coût de chaque entrée supplémentaire sur le
marché du travail est de 60 000 livres.
L'impact du
WFTC
sur l'emploi est donc modeste, et le rapport
coût/efficacité est peu favorable.
c) Evaluation de la PPE
Une
analyse
a priori
de la structure de la PPE montre qu'elle pourrait
avoir, comme l'
EITC
ou le
WFTC
, des effets incitatifs ou
désincitatifs sur l'offre de travail, selon la position du
bénéficiaire.
La PPE devrait accroître la participation au marché du travail des
individus sans emploi, puisqu'elle augmente le gain financier associé
à la reprise d'un emploi.
L'effet incitatif de la PPE est cependant indéterminé pour les
personnes qui perçoivent un revenu d'activité compris entre 0,3
et 1 SMIC. Effet revenu et effet de substitution jouent en sens contraire, ce
qui rend délicate toute appréciation de l'effet net de la mesure.
Pour les personnes dont le revenu est compris entre 1 et 1,4 SMIC (ou 2,1 SMIC
pour les couples monoactifs), la PPE exerce un effet désincitatif sur
l'offre de travail (effet revenu et de substitution jouent dans le même
sens).
La PPE devrait exercer un effet désincitatif sur le travail du second
conjoint dans les couples biactifs. L'activité du second conjoint peut
entraîner la perte d'une partie de la prime (fin de la majoration
forfaitaire pour conjoint inactif), voire de la totalité de la prime si
les revenus du conjoint sont assez importants.
Il est encore trop tôt pour que des évaluations
ex post
complètes des effets de la prime pour l'emploi sur les taux
d'activité puissent être produites. Cependant, un certain nombre
d'évaluations externes sont disponibles.
Ainsi, Laroque et Salanié (2001) ont proposé une simulation des
effets de la PPE sur l'emploi des femmes (avec le barème initialement
prévu pour 2003 rétropolé pour l'année 1999). Ils
étudient un effectif de référence qui comprend
5 290 000 personnes, parmi lesquelles 2 732 000 occupent un
emploi.
Les résultats restent modestes
. Ils estiment que, pour
cette population, la PPE devrait entraîner l'entrée sur le
marché du travail de 9 000 personnes supplémentaires, dont
4 000 pour des emplois à temps partiel (le nombre de personnes
employées augmente ainsi de + 0,33 %). De manière plus
précise, la PPE ferait passer 16 000 femmes du non-emploi
à l'emploi, dont 6 000 à temps partiel, et 10 000
à temps plein ; dans le même temps, 2 000 femmes
travaillant à temps plein choisissent le temps partiel, et
5 000 autres arrêtent de travailler ; enfin,
2 000 femmes travaillant à mi-temps passent à temps
plein, et autant quittent la population active.
En appliquant le barème de 2003, le coût budgétaire de la
PPE, pour cette population, est environ de 1,2 milliard d'euros. Chaque
nouvelle entrée sur le marché du travail serait donc acquise au
prix d'une dépense de 140 000 euros, ce qui représente
une dépense pour le moins importante.
Une étude de Bassanini
et al.
(1999) suggère que
l'efficacité des mécanismes de crédit d'impôt
pourrait être moindre dans les pays, comme la France, qui se
caractérisent par un éventail de salaires resserré, des
salaires de réserve élevés
13
(
*
)
, et des prélèvements importants sur les
revenus du travail. Dans ces pays, en effet, le crédit d'impôt est
plus coûteux à financer pour atteindre un effet incitatif
donné. Le financement du crédit d'impôt suppose d'augmenter
les prélèvements pesant sur une partie de la population
déjà fortement taxée ; dès lors,
l'effet
global pourrait être une diminution du nombre d'heures
travaillées, et une réduction du produit global
.
Cahuc (2002) rappelle également qu'
une mesure visant à
augmenter l'offre de travail, alors que la demande de travail reste
inchangée, risque d'avoir pour effet d'aggraver le
déséquilibre du marché du travail.
On peut toutefois
supposer que l'introduction de la PPE, qui vient soutenir le pouvoir d'achat
des ménages, aura pour effet de modérer les revendications
salariales, à court et moyen terme. Une modération salariale
prolongée est susceptible d'augmenter la demande de travail
émanant des entreprises. Il n'existe cependant aucune
modélisation permettant d'estimer la portée d'un tel
effet.
2. Des effets redistributifs très différents
Si l'impact des mécanismes de crédit d'impôt sur le fonctionnement des marchés du travail apparaît relativement modeste, les effets redistributifs de ces dispositifs sont, en revanche, beaucoup plus significatifs et très différents.
a) L'EITC est un instrument efficace de réduction de la pauvreté aux Etats-Unis
Une
étude américaine de 1998
14
(
*
)
indique que, sans l'
EITC
, 34,5 millions
de personnes vivraient sous le seuil de pauvreté aux Etats-Unis, soit un
taux de pauvreté de 12,7 %. L'adjonction des revenus tirés
de l'
EITC
fait passer 4,3 millions au-dessus du seuil de
pauvreté, et ramène ainsi le taux de pauvreté à
11,1 %.
L'
EITC
a, d'autre part, permis de compenser, partiellement,
l'augmentation des écarts de salaire observée aux Etats-Unis au
cours des deux dernières décennies. Liebman (1997) calcule ainsi
que, entre 1976 et 1996, la part des revenus perçue par le
cinquième de la population le moins bien payé est tombée
de 4,4 à 3,7 %, tandis que celle perçue par les 5 % les
mieux payés est passée de 16,6 à 21,4 %. Dans le cas
des ménages avec enfants, l'
EITC
compense la baisse des revenus
à hauteur de 29 % pour le premier quintile de la population, et de
9% pour le deuxième quintile.
b) Le WFTC est un instrument de redistribution au profit des familles
Comme l'illustre le graphique suivant, le WFTC apporte un soutien significatif aux familles aux revenus les plus modestes. Les gains financiers les plus importants concernent les deux premiers déciles de la distribution des revenus. Le deuxième décile est le plus touché, car les ménages du premier décile sont souvent sans emploi, ou sans enfant, et ne bénéficient donc pas du WFTC .
c) Les effets de la PPE sont plus modestes et se diffusent assez largement dans l'échelle des revenus
Près de 80 % du montant global de la PPE
bénéficie à la moitié la moins aisée de la
population, mais les effets de la PPE se diffusent assez haut dans
l'échelle des revenus.
Cette diffusion vers le haut de la distribution des revenus s'explique par deux
raisons. En premier lieu, le plafond d'éligibilité, pour chaque
apporteur de revenu d'activité, est assez élevé. Le seuil
de 1,4 SMIC correspond, à peu près, au passage du sixième
au septième décile de niveau de vie. En second lieu, cet effet de
diffusion s'explique aussi par
l'hétérogénéité des revenus au sein des
couples. Pour un couple de concubins, dont la déclaration à
l'impôt sur le revenu est séparée, il se peut que l'un des
deux membres bénéficie de la prime, quand bien même le
revenu du partenaire est d'un niveau élevé.
Cela dit, comme l'illustre le graphique ci-après, la PPE
bénéficie principalement aux déciles deux à quatre
de la distribution du revenu.
Le premier décile de revenu est relativement tenu à l'écart du profit de la prime. Cela s'explique par la composition particulière de cette population, qui comprend beaucoup de chômeurs ou d'inactifs, non éligibles à la prime pour l'emploi.
CHAPITRE VI :
L'IMPOSITION DES REVENUS DU CAPITAL
Dans son rapport d'information de 1997 sur la fiscalité de l'épargne 15 ( * ) , notre ancien collègue Alain Lambert, alors rapporteur général de la commission des finances, soulignait que la fiscalité de l'épargne était en France particulièrement lourde, quand on la comparait à celle des autres pays européens. Il en déduisait que le risque de sortie de capitaux était important, et proposait sept principes devant guider la fiscalité de l'épargne.
La doctrine de la commission des finances du Sénat en matière de fiscalité de l'épargne, selon le rapport Lambert de 1997
« Premier principe :
l'épargne est
importante
: sans épargne, pas d'investissement, sans investissement
pas de croissance durable.
« Deuxième principe :
l'opposition capital / travail est
stérile
; si tant est qu'un rééquilibrage de la
fiscalité du capital par rapport à la fiscalité du travail
soit souhaitable, ce rééquilibrage doit se faire en diminuant les
prélèvements sur les revenus du travail et non pas en augmentant
ceux supportés par le capital.
« Troisième principe :
une taxation supplémentaire
de l'épargne ne permet pas de relancer la consommation.
Il ne sert
à rien d'invoquer des alibis économiques pour justifier des
mesures qui n'ont d'autre objet que de faire rentrer des recettes dans les
caisses de l'État. Seule la confiance permet de modifier le partage
épargne-consommation. Or, on ne rétablit pas la confiance en
augmentant les impôts.
« Quatrième principe :
il vaut mieux essayer d'agir sur la
structure de l'épargne que sur son volume.
La fiscalité est
impuissante à modifier le volume de l'épargne, en revanche elle
est très influente sur la structure de l'épargne, c'est à
dire sur l'orientation des placements.
« Cinquième principe : la fiscalité de l'épargne
doit assurer la
neutralité entre actifs de même nature
(par
exemple tous les titres de taux doivent être traités de la
même manière, quelque soit le support).
« Sixième principe : la fiscalité de l'épargne
doit prendre en compte la
durée
de l'engagement d'épargne,
et favoriser les titres de
fonds propres
plutôt que les titres de
dettes.
« Septième principe : le législateur doit assurer un
cadre fiscal stable
et s'abstenir de prendre des mesures
rétroactives ».
Source : Alain Lambert, rapport d'information du Sénat n°82 sur la fiscalité de l'épargne (1997-1998)
Le
diagnostic d'une fiscalité de l'épargne particulièrement
lourde en France est malheureusement toujours d'actualité. Comme le
souligne l'OFCE, «
la France est le seul pays à avoir
augmenté l'imposition des revenus de l'épargne
»
durant la décennie 1990, le taux d'imposition sur les revenus de
l'épargne ayant alors «
augmenté de près de
10 points.
»
Non seulement la fiscalité de l'épargne en France est lourde,
mais en plus elle présente, plus que dans les autres pays, une
structure économiquement inappropriée
: si la plupart
des pays européens taxent davantage les revenus d'
actions
que les
revenus d'
intérêt
, cette caractéristique est
particulièrement marquée
en France.
I. UNE FISCALITÉ FRANÇAISE RELATIVEMENT FAVORABLE POUR LES REVENUS D'INTÉRÊT
La
fiscalité française est relativement peu élevée
dans le cas des
revenus d'intérêt
.
Selon l'OFCE, «
seule l'Espagne applique un taux réellement
élevé. L'Allemagne et le Luxembourg sont des cas particuliers. En
effet, l'imposition à l'IR n'est réellement effective que si le
pays qui l'applique possède les moyens de la faire respecter, à
savoir une obligation de déclaration à l'administration fiscale
par les établissements payeurs. Dans ces deux pays, l'absence de
système d'information aboutit à l'application en pratique de la
retenue à la source. Celle-ci est en l'occurrence nulle pour le
Luxembourg. (...) Au total, le Luxembourg présente donc, devant la
Suisse, le régime le plus favorable. Pour les autres (à
l'exclusion de l'Espagne) les taux varient selon les pays entre 15 % et 25
%.
»
Les principales caractéristiques de la fiscalité des revenus
d'intérêt indiquées par l'OFCE sont
synthétisées par le graphique ci-après.
L'imposition des intérêts sur les obligations d'Etat
en Europe, selon l'OFCE (2001)
Taux marginal de prélèvement, au taux supérieur de
l'impôt sur le revenu
(en %)
(1) Base d'imposition de 4 % de la valeur de marché des actifs (actions
ou obligations), taux d'imposition de 30 %
(2) Au Royaume-Uni existe un barème progressif : 20 % et 32,5 %.
(3) Le taux ici pris en compte pour l'impôt sur le revenu est le taux
maximal.
Source : d'après les données figurant dans le rapport de
l'OFCE
Reposant sur la notion de
taux marginal de prélèvement
effectif (cf. encadré ci-après)
, ainsi que sur des
hypothèses différentes de celles de l'OFCE
16
(
*
)
, un récent rapport du
commissariat général du Plan
17
(
*
)
confirme globalement cette analyse, comme l'indique
le graphique ci-après.
Le taux marginal de prélèvement effectif
Dans une étude
18
(
*
)
réalisée pour l'observatoire de l'épargne
européenne, dont un résumé figure en annexe du
récent rapport du commissariat général du Plan sur la
place des actions dans la patrimoine des ménages (2002)
19
(
*
)
, MM. Thierry Laurent et
Yannick L'Horty comparent les régimes d'imposition de l'épargne
de douze Etats en recourant à la notion de
taux marginal de
prélèvement effectif
.
Cette notion se définit comme le taux de prélèvement
effectué sur les revenus
réels
de l'actif. Ainsi, elle
prend en compte le fait que, les revenus imposés étant les
revenus nominaux, selon les hypothèses d'un rendement nominal de 5 % et
d'un taux d'inflation de 2 %, un
taux d'imposition marginal
de
60
%
correspond à un
taux marginal de prélèvement
effectif
de
100 %
20
(
*
)
.
L'imposition des revenus des obligations dans certains Etats
européens, selon le commissariat général du Plan (2001)
Taux marginal de prélèvement
effectif
, pour un revenu
moyen
(en % du rendement réel )
Selon les hypothèses d'un rendement nominal avant imposition de 5 %
et d'une inflation de 2 %.
(1) En Suède le taux dépasse 100 % du fait de l'importance
des taxes locales.
Source : Commissariat général du Plan, La place des
actions dans le patrimoine des ménages, mesure et comparaisons
internationales (contribution de Th. Laurent et Y. L'Horty), décembre
2002
II. UNE FISCALITÉ FRANÇAISE PARTICULIÈREMENT LOURDE POUR LES REVENUS DES ACTIONS
A. UNE SITUATION AMBIGUË DANS LE CAS DE L'IMPOSITION DES DIVIDENDES
Les différentes études comparatives sur l'imposition des dividendes en Europe conduisent à des conclusions ambiguës dans le cas de la France.
1. Une imposition des dividendes particulièrement lourde pour les personnes imposées au taux supérieur de l'impôt sur le revenu, selon l'OFCE
Selon
l'OFCE, qui considère des ménages imposés au taux
supérieur
de l'impôt sur le revenu, les
dividendes
seraient taxés en France de manière particulièrement
lourde.
Selon l'OFCE, «
la charge fiscale supportée par
l'actionnaire dès lors que l'on considère l'IS comme un
pré-paiement est relativement proche dans les divers pays. Elle varie
entre 43 % et 53 %
».
Ainsi, «
seule la France se distingue pour les contribuables dont
le taux marginal est celui de la dernière tranche du barème par
un taux d'imposition sur les dividendes de près de 63 %.
»
Le graphique ci-après, élaboré à partir des
données figurant dans le rapport de l'OFCE, synthétise les
différentes modalités d'imposition des dividendes.
L'imposition des dividendes en Europe, selon l'OFCE (2001)
Taux marginal de prélèvement, au taux supérieur
de l'impôt sur le revenu
(en %)
(1) Base d'imposition de 4 % de la valeur de marché des actifs (actions
ou obligations), taux d'imposition de 30 %
(2) Sans tenir compte des systèmes d'abattements
(3) Participations non qualifiées
(4) 52,75 % + prélèvements sociaux de 10 %
Source : d'après les données figurant dans le rapport de
l'OFCE
Dans le cas de la France, l'OFCE souligne les effets néfastes de la
fiscalité sociale sur l'épargne.
Les effets néfastes de la fiscalité sociale sur l'épargne, selon l'OFCE
« Contrairement à l'impôt sur le revenu, la fiscalité sociale sur l'épargne connaît très peu de régimes dérogatoires puisque seules six catégories de produit d'épargne réglementée sont exonérées. Cette augmentation de la fiscalité sociale permet de réduire l'écart de taxation entre revenus d'épargne et revenus du travail, mais elle porte atteinte à la compétitivité des produits d'épargne français ».
2. Une analyse remise en cause par le commissariat général du Plan dans le cas des revenus moyens
Le
rapport précité du commissariat général du
Plan
21
(
*
)
conduit
cependant à nuancer cette analyse.
Sur la base on l'a vu du
taux marginal de prélèvement effectif
(
cf. page
116
du présent rapport)
et
d'hypothèses différentes
de celles de l'OFCE
22
(
*
)
, ce rapport suggère que
l'imposition des dividendes en France serait
proche de la moyenne
constatée en Europe, comme l'indique le graphique ci-après.
L'imposition des dividendes dans certains Etats européens,
selon le commissariat général du Plan (2001)
Taux marginal de prélèvement
effectif
, pour un revenu
moyen
(% du rendement réel )
Selon les hypothèses d'un rendement nominal avant imposition de 5 % et
d'une inflation de
2 %.
(1) Le fait qu'en Suède les taux dépassent 100 % provient de
l'importance des taxes locales dans ce pays.
Source : Commissariat général du Plan, La place des actions
dans le patrimoine des ménages, mesure et comparaisons
internationales (contribution de Th. Laurent et Y. L'Horty), décembre
2002
Cette divergence provient du fait que le Plan suppose que la taxation se fait
pour un revenu de niveau
moyen
, alors que l'OFCE l'envisage pour la
tranche supérieure
de l'impôt sur le revenu. Elle permet de
mettre en évidence le rôle essentiel des hypothèses
retenues, quand il s'agit de comparer les prélèvements entre
pays.
B. POUR L'IMPOSITION DES PLUS-VALUES, LA SITUATION DE LA FRANCE EST COMPARATIVEMENT DÉFAVORABLE, TANT PAR SA STRUCTURE QUE PAR SON TAUX
En ce
qui concerne l'imposition des
plus-values
, il convient de
considérer, outre le taux généralement pratiqué, sa
structure générale et les choix économiques qui la
sous-tendent.
La France est dans une situation comparativement défavorable, par son
taux
, mais aussi par sa
structure.
Tout d'abord, parmi les pays étudiés par l'OFCE (qui il est vrai
ne comprennent pas ici la Suède), elle a le
taux
de taxation des
plus-values réalisées sur les participations non
substantielles
23
(
*
)
de
long terme
le plus élevé
(
26 %
avec les
prélèvements sociaux), comme l'indique le graphique
ci-après.
La taxation des plus-values non substantielles de long terme en Europe (2001)
(en %)
Remarque : les données fournies par l'OFCE pour le Royaume-Uni ne
permettent pas de calculer un taux d'imposition significatif, dans la
mesure où ces plus-values sont soumises à l'impôt sur
le revenu (dont le taux maximal est de 40 %), mais avec de nombreux
abattements.
Source : d'après les données figurant dans le rapport de
l'OFCE
Ensuite, la France est également dans une situation défavorable
du fait de la
structure
de sa fiscalité des plus-values. De
nombreux Etats distinguent différents types de plus-values, selon deux
critères :
- le caractère spéculatif de la plus-value ;
- le montant de participation, les plus-values substantielles étant dans
certains cas davantage taxées.
La France est l'un des rares Etats à appliquer un
taux uniforme
,
comme l'indique le tableau ci-après, ce qui l'empêche d'orienter
le marché des actions dans un sens qu'elle jugerait optimal. On peut
rappeler à cet égard que, selon le sixième principe
défini par le rapport Lambert de 1997, «
la
fiscalité de l'épargne doit prendre en compte la durée de
l'engagement d'épargne
».
Les différentes logiques de taxation des plus-values en Europe (2001)
|
Plus-values de court terme (« spéculatives ») davantage taxées que les plus-values de long terme |
||
Oui |
Non |
||
Plus forte taxation des plus-values portant sur des cessions de participations importantes |
Oui |
Allemagne*, Luxembourg*, Belgique* (1) (plus-values de long terme exonérées) |
Pays-Bas, Italie |
Non |
Espagne, Royaume-Uni* (imposition décroissante en fonction de la durée de détention) |
Suisse
(exonération totale)
|
*
Pays soumettant les plus-values au barème de l'impôt sur le
revenu
Pays fiscalement le plus intéressant selon l'OFCE
(phénomènes de fraude exceptés)
(1) En Belgique, choix entre IR et taux de 33 % pour les cessions
d'opérations « spéculatives »
(2) Imposition au taux de 16 %, soit 26 % avec les prélèvements
sociaux
Source : d'après les données figurant dans le rapport de
l'OFCE
Sur la base on l'a vu du
taux marginal de prélèvement effectif
(
cf. page
116
du présent rapport)
et
d'hypothèses différentes de celles de l'OFCE de celles de
l'OFCE
24
(
*
)
, un
récent rapport du commissariat général du Plan
25
(
*
)
confirme globalement cette
analyse
26
(
*
)
, comme
l'indique le graphique ci-après.
L'imposition des plus-values dans certains Etats
européens, selon le commissariat général du Plan (2001)
Taux marginal de prélèvement
effectif
, pour un revenu
moyen
(en % du rendement réel )
Plus-values de court terme
Plus-values de long terme
Selon
les hypothèses d'un rendement nominal avant imposition de 5 % et d'une
inflation de 2 %.
(la droite en pointillés correspond à l'égalité
des taux d'imposition)
(1) Le fait qu'en Suède les taux dépassent 100 % provient de
l'importance des taxes locales.
Source : Commissariat général du Plan, La place des
actions dans le patrimoine des ménages, mesure et comparaisons
internationales (contribution de Th. Laurent et Y. L'Horty), décembre
2002
Ainsi, selon l'OFCE, «
la Suisse et les pays où la non
déclaration permet la fraude
sont les pays les plus favorables en
ce qui concerne ce type d'imposition
». En revanche, la situation
de la
France
est
défavorable
pour les plus-values
réalisées sur les participations non substantielles de long terme.
L'imposition des plus-values selon la mission commune d'information du Sénat sur l'expatriation (2001) 27 ( * ) : prendre en compte l'érosion monétaire ?
« La mission estime qu'il importe de tenir compte de
l'érosion monétaire qui affecte les titres des entreprises. En
effet, le code général des impôts prévoit un
abattement pour tenir compte de l'érosion monétaire en
matière de vente d'un immeuble. Il convient d'élargir ce
régime aux ventes de titres mobiliers. »
Ce point de vue est également celui de l'OFCE, qui estime que, d'une
manière générale, l'imposition des revenus de
l'épargne devrait porter sur le revenu réel et non sur le revenu
nominal. En effet, un taux d'inflation élevé peut rendre un taux
libératoire excessif : «
avec un taux d'inflation de 6 %
et un taux d'intérêt nominal de 9 %, un prélèvement
de 25 % correspond à un taux d'imposition de 75 %
».
III. LA FRANCE FAIT PARTIE DES PAYS OÙ LES REVENUS D'INTÉRÊT SONT LES PLUS PRIVILÉGIÉS PAR RAPPORT AUX REVENUS DES ACTIONS
Si dans la plupart des pays de l'Union européenne les revenus d'intérêt sont moins taxés que les revenus des actions, cela est particulièrement net en France.
A. L'ÉTAT DES LIEUX
Comme le
résume l'OFCE, «
se sont développées dans
tous les pays de l'UE des formules de taxation privilégiées des
revenus d'intérêt, à des taux libératoires,
inférieurs pour la quasi-totalité des épargnants à
leur taux d'imposition à l'impôt sur le revenu. Par contre, les
dividendes sont souvent taxés à l'IR, avec restitution de l'IS
versé par une formule d'avoir fiscal. Les plus-values, qui
représentent théoriquement la contrepartie des profits non
distribués, supportent généralement le seul taux de l'IS ;
elles sont parfois aussi taxées spécifiquement. Au total, la
taxation des revenus des actions est généralement nettement plus
forte que celle des revenus d'intérêt, alors même que les
pays européens souhaitaient développer l'épargne à
risque
».
Cet écart est «
particulièrement important en
France
», comme le graphique ci-après permet de le mettre
en évidence.
L'imposition des dividendes et des intérêts sur les
obligations d'Etat
dans certains Etats européens, selon l'OFCE
(2001)
Taux marginal de prélèvement, au taux supérieur de
l'impôt sur le revenu
(en %)
Taux
d'imposition
des dividendes
Taux
d'imposition des intérêts
sur obligations d'Etat
En
cas d'imposition à l'IR, on suppose que celle-ci se fait au taux maximal
(la droite en pointillés correspond à l'égalité
des taux d'imposition)
(1) Sans tenir compte du système d'abattements
Source : d'après les données figurant dans le rapport de
l'OFCE
Le rapport précité du commissariat général du
Plan
28
(
*
)
, qui repose sur
la notion de
taux marginal de prélèvement effectif
(cf.
page
116
du présent rapport), confirme globalement cette
analyse, comme l'indique le graphique ci-après. Selon ce rapport, la
France se situe parmi les pays qui surtaxent le plus les revenus des dividendes
par rapport à ceux des obligations (bien moins cependant que les
Etats-Unis).
L'imposition des dividendes et des intérêts sur les
obligations d'Etat
dans certains Etats européens, selon le
commissariat général du Plan (2001)
Taux marginal de prélèvement
effectif
, pour un revenu
moyen
(en % du rendement réel )
Taux
marginal effectif de
prélèvement des dividendes
Taux
marginal effectif de
prélèvement des obligations
Selon
les hypothèses d'un rendement nominal avant imposition de 5 % et d'une
inflation de 2 %.
(la droite en pointillés correspond à l'égalité
des taux d'imposition)
(1) Le fait qu'en Suède les taux dépassent 100 % provient de
l'importance des taxes locales.
Source : Commissariat général du Plan, La place des
actions dans le patrimoine des ménages, mesure et comparaisons
internationales (contribution de Th. Laurent et Y. L'Horty), décembre
2002
Comme le graphique ci-avant le montre dans le cas du Danemark, la surtaxation
des revenus des actions par rapport à ceux des obligations n'est pas
inévitable. Ainsi, l'OFCE indique que «
les pays nordiques
et la Grèce ont évolué vers une imposition plus neutre des
revenus du capital mobilier. Ces pays appliquent ce que l'on appelle le
système dual : les dividendes, les intérêts et les
plus-values sont imposés à un taux unique, les revenus du travail
étant imposés selon un barème progressif. La Finlande par
exemple accorde un avoir fiscal qui supprime totalement la double imposition et
impose au même taux les profits des sociétés et les revenus
du capital (29 %). Les Pays-Bas ont opté pour une imposition sur la
richesse
29
(
*
)
. La
Grèce exonère totalement les dividendes au niveau de
l'actionnaire et impose un taux unique sur des deux formes de profit
(distribué ou non) de 35 % au niveau de la firme.
»
La fiscalité des revenus financiers a donc, dans la plupart des pays
européens, des effets pervers, en infléchissant la structure de
détention de l'épargne dans un sens économiquement non
optimal. Ainsi, les entreprises sont incitées à se financer par
la dette plutôt que par l'émission d'actions. La France est, avec
l'Italie, le pays où ce déséquilibre de l'épargne
des ménages est le plus marqué, comme le montre le graphique
ci-après.
Affectation de l'épargne des ménages en 1999
Source : OFCE (V. Oheix, B. Séjourné « Les portefeuilles des ménages européens : des choix initiaux à l'affectation finale », Revue d'économie financière, n° 64)
B. INSTAURER UN PRÉLÈVEMENT LIBÉRATOIRE À TAUX UNIQUE ?
La structure inappropriée de l'épargne française a été critiquée par notre collègue Alain Lambert, dans son rapport d'information précité (1997) 30 ( * ) .
Fiscalité et structure de l'épargne en France, selon le rapport Lambert de 1997
1. Un
modèle franco-allemand japonais
« [La structure de l'épargne financière
française] correspond à un modèle de comportement des
placements des ménages caractéristique du "modèle
franco-allemand-japonais", dans lequel les ménages détiennent
directement très peu d'actions et d'obligations et partagent
essentiellement leurs richesses entre liquidités (bancaires) et
assurance-vie, celle-ci détenant surtout des obligations. Ce
modèle s'oppose au modèle anglo-saxon, dans lequel les
ménages ont assez peu de liquidités et peu d'obligations ; ils
détiennent directement de gros portefeuilles d'actions, et une partie
considérable de leur patrimoine dans les assurance-vie et les fonds de
pension ; ces derniers investissent essentiellement en actions ».
2. La nécessité de la neutralité fiscale et de la prise
en compte de la durée de l'engagement d'épargne
« Une fiscalité cohérente de l'épargne doit
normalement, s'assigner deux principes directeurs : la neutralité et la
prise en compte de la durée de l'engagement d'épargne.
« La théorie économique enseigne (...) que la
neutralité de la fiscalité conditionne l'allocation optimale du
capital en fonction des rendements déterminés par les
marchés, ces derniers prenant en compte les différences de risque
et de liquidité qui existent entre les différents types de
rendement. L'objectif de neutralité devrait donc conduire, d'une part,
à viser un traitement identique pour des mêmes classes d'actifs
(les titres de taux, les titres de capital, les liquidités...) et,
d'autre part, à ne pas perturber l'apparition d'une hiérarchie
normale des rendements, notamment en fonction du niveau de risque assumé
par l'épargnant.
« L'épargne stable, c'est à dire celle qui accepte de
s'engager ex ante pour une durée de moyen et long terme, permet aux
entreprises de constituer des fonds propres les mettant à l'abri des
fluctuations économiques et à l'État de disposer d'un
marché liquide et profond sur lequel s'appuyer pour financer ses
déficits. En regard, l'utilité économique de
l'épargne liquide est moindre puisqu'elle ne permet pas le financement
de crédits à l'économie, sauf à ce que le
système bancaire soit en mesure d'exercer pleinement sa fonction de
transformation des dépôts en crédits à long terme.
Dans le système français cette utilité est encore
amoindrie du fait de la gestion administrée des taux
d'intérêt des livrets défiscalisés qui, lorsqu'ils
se situent à un taux supérieur à celui du marché de
l'argent à court terme, renchérissent le financement des secteurs
auxquels ils sont pourtant censés bénéficier ».
Source : Alain Lambert, rapport d'information du Sénat n°82 sur la fiscalité de l'épargne (1997-1998)
La
neutralité fiscale et la prise en compte de la durée de
l'engagement d'épargne constituent deux des sept principes constituant
la doctrine de la commission des finances du Sénat en matière
d'épargne, telle qu'elle a été définie par le
rapport Lambert
31
(
*
)
.
Dans ces conditions, l'instauration pour tous les revenus de l'épargne
d'un
prélèvement libératoire à taux unique
,
inférieur à celui de l'impôt sur le revenu, mérite
d'être envisagée. Cette éventualité est
brièvement évoquée par l'OFCE dans son rapport.
Les autres inconvénients de la fiscalité de l'épargne en Europe, selon l'OFCE
I.
Les problèmes de coordination entre Etats européens
La diversité de la fiscalité des revenus du capital en Europe
peut inciter certains contribuables à déterminer les pays dans
lesquels ils investissent en fonction de considérations fiscales.
1. Le secret bancaire (qui concerne surtout les revenus
d'intérêts) : un problème en voie de
résolution ?
Tout d'abord, la majorité des pays de l'UE pratiquent le secret
bancaire
32
(
*
)
, ce qui
permet à certains contribuables de frauder afin de ne pas acquitter
l'impôt dans leur pays de résidence.
Ce système
bénéficie surtout aux revenus
d'intérêt
, qui sont exonérés pour les non
résidents (alors que les dividendes sont soumis à un
prélèvement à la source). Selon l'OFCE, «
de
fait, un épargnant français qui achète des obligations en
Allemagne ou en Belgique et qui ne les déclare pas à
l'administration fiscale française est totalement exonéré
sur ces revenus
».
Cette situation a été dénoncée en 1997 par notre
collègue Alain Lambert
33
(
*
)
.
En 1998, la commission européenne a proposé de mettre en place un
«
régime de coexistence
», les Etats membres
pouvant choisir entre l'application d'une retenue à la source sur les
revenus des non résidents ou l'adhésion à un
système d'échange d'information avec les administrations fiscales
des pays de l'Union européenne. L'objectif à terme est que tous
les Etats adoptent la solution de l'échange d'informations. Au conseil
européen de Feira (juin 2000), les Etats membres se sont engagés
à adopter avant fin de 2002 une directive mettant en oeuvre ces
dispositions.
Après la conclusion d'un accord avec la Suisse, le conseil « Ecofin
» a
adopté
, le 3 juin 2003, une
directive
qui
prévoit d'instaurer un échange d'informations à partir du
1er janvier 2005 pour 12 des 15 pays de l'Union européenne
34
(
*
)
.
2. Le problème de la double imposition (dans le cas des
dividendes)
En outre, dans le cas des dividendes, un contribuable s'acquittant de ses
impôts dans son pays de résidence peut être doublement
imposé : une première fois dans le pays où il a
réalisé son investissement, une seconde fois dans son pays de
résidence.
La
fraude fiscale
tend à réduire ce
phénomène. L'OFCE cite à cet égard le cas d'un
épargnant français qui disposerait d'actions au
Luxembourg
35
(
*
)
.
En l'absence de fraude, les Etats s'efforcent de réduire la double
imposition grâce à des
conventions
. Cependant, comme la
France, l'Espagne et l'Italie sont les seuls pays à rembourser
l'avoir fiscal
, dans la plupart des cas «
l'impôt
effectivement remboursé est au mieux le taux de retenue à la
source
».
L'OFCE estime que «
seule
la généralisation du
système de l'avoir fiscal aux résidents et aux non
résidents
pour l'ensemble des pays de l'UE peut permettre une
application totale du principe de résidence et supprimer les
inefficacités (traitements différentiés des
investissements selon leur origine) générés par
l'hétérogénéité des systèmes
actuels
».
II. Taxer les plus-values latentes ?
L'OFCE estime enfin que la taxation des plus-values devrait concerner les
plus-values latentes
, et non seulement les plus-values
réalisées.
Il faut néanmoins souligner à cet égard que la taxation
des plus-values latentes pourrait être
contraire au droit
communautaire
quand elle s'applique aux sorties de capitaux. Ainsi, le
décret d'application de l' «
exit tax
»,
ou « herse fiscale », mise en place en France en 1998 pour
décourager le transfert à l'étranger du patrimoine de
contribuables voulant échapper à l'impôt de
solidarité sur la fortune, pourrait être annulée pour
excès de pouvoir par le Conseil d'Etat
36
(
*
)
.
CHAPITRE VII :
LES
RÉFORMES DE LA FISCALITÉ LOCALE EN EUROPE
Les collectivités locales européennes ont un poids financier et une autonomie financière très variables d'un pays à l'autre. Après la forte opposition suscitée en 1990 par l'instauration au Royaume-Uni de la Community charge (dite Poll tax ) 37 ( * ) , aucune réforme d'envergure de la fiscalité locale n'a été réalisée, même si des réformes significatives ont eu lieu dans certains pays, en particulier en Italie, en France et en Espagne.
I. DES FISCALITÉS LOCALES TRÈS DIFFÉRENTES D'UN PAYS À L'AUTRE
A. DES COLLECTIVITÉS LOCALES D'IMPORTANCE ET D'AUTONOMIE FINANCIÈRE VARIABLES
Le poids et l'autonomie fiscale des collectivités locales varient fortement en Europe, comme l'indique le graphique ci-après.
Poids
et autonomie fiscale des collectivités locales en Europe
(en %)
Autonomie
fiscale
(recettes fiscales propres locales/
recettes locales
totales)
(1999)
Poids
financier
(dépenses publiques locales/PIB)
(2000)
Remarques :
- Dans les Etats fédéraux - Allemagne, Belgique, Autriche -,
Dexia ne classe pas les Etats fédérés parmi les
collectivités locales.
- Sont ici considérés comme recettes fiscales propres les
impôts locaux et les taxes locales votées additionnellement
à un impôt national, mais pas les impôts répartis
entre collectivités sans que celles-ci puissent en fixer le taux.
Source : Dexia, Les finances locales dans les quinze pays de l'Union
européenne, 2002
En règle générale, plus le poids des collectivités
locales est important, plus leur autonomie fiscale l'est également,
comme l'indique le graphique ci-avant. Cette règle doit cependant
être fortement nuancée, dans la mesure où la
corrélation est nulle si l'on ne prend pas en compte les pays
scandinaves.
On peut, schématiquement, distinguer trois groupes de pays
38
(
*
)
.
1. Le modèle « européen » : des collectivités locales au faible poids financier et à faible autonomie fiscale
La
plupart des Etats européens - situés dans l'ellipse en bas
à gauche du graphique - ont des collectivités locales peu
autonomes fiscalement et au faible poids financier.
Ainsi, le taux d'autonomie fiscale des collectivité locales varie
d'environ 8 % des recettes pour les Pays-Bas à 27 % pour l'Espagne, et
le poids financier de 2,2 % du PIB pour la Grèce à 15,2 % pour
les Pays-Bas.
L'Allemagne appartient à ce groupe, si l'on considère que les
Länder
, en tant qu'Etats fédérés, ne sont pas
des collectivités locales. Les dépenses des
Länder
ont été de 13,8 points de PIB en 2000. Il convient cependant de
souligner que leur autonomie fiscale est très faible, ceux-ci n'ayant
pas de possibilité de fixer les taux des impôts qu'ils
perçoivent.
2. Les pays d'Europe du nord : des collectivités locales au fort poids financier et à forte autonomie fiscale
Les pays
scandinaves - situés dans l'ellipse en haut à droite du graphique
- ont des collectivités locales à la fois très autonomes
fiscalement (avec une autonomie fiscale de 50 % pour le Danemark et 57 % pour
la Suède) et au poids financier important (respectivement 30,6 % et
23,9 % du PIB pour ces deux pays).
Comme l'indique l'OFCE, cette double caractéristique des
collectivités locales scandinaves s'explique
«
essentiellement parce qu'elles ont, dans ces pays, la charge de
l'éducation, y compris la rémunération des enseignants,
et, dans certains cas, de la santé
».
3. Le « modèle français » : des collectivités locales au faible poids financier et à forte autonomie fiscale
La
France, la Belgique et le Luxembourg - situés dans l'ellipse en haut
à gauche du graphique - se caractérisent à la fois par un
faible poids financier des collectivités locales (de 5,7 % du PIB pour
le Luxembourg à 9,8% du PIB pour la France), et par une forte autonomie
fiscale des collectivités locales (de 32 % des recettes dans le cas du
Luxembourg à 57 % dans celui de la France).
La forte autonomie fiscale des collectivités territoriales
françaises a récemment acquis une valeur constitutionnelle. En
effet, depuis la loi constitutionnelle du 28 mars 2003, le nouvel article 72-2
de la constitution prévoit que «
les recettes fiscales et
les autres ressources propres des collectivités territoriales
représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une
part déterminante de l'ensemble de leurs ressources
».
Il faut néanmoins souligner à cet égard que, comme
l'indique le tableau ci-après, le taux d'autonomie fiscale des
collectivités territoriales en France a eu tendance à se
réduire ces dernières années, suscitant une
rigidité accrue des budgets et une pénalisation des
collectivités territoriales disposant d'une économie
dynamique.
|
Taux d'autonomie fiscale* des collectivités territoriales en France |
|
||||||
|
|
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
|
|
|
|
|
|
|
|
||
Communes |
49,3% |
49,9% |
48,5% |
46,1% |
42,5% |
nd |
||
|
|
|
|
|
|
|
||
Départements |
58,0% |
59,6% |
56,5% |
55,9% |
52,3% |
51,3% (1) |
||
|
|
|
|
|
|
|
||
Régions |
57,8% |
57,6% |
48,7% |
50,2% |
41,7% |
37,3% (1) |
||
|
nd : non
disponible
|
|
Source : direction générale des collectivités locales
Par ailleurs, si l'on prend en considération la faculté de fixation de l'assiette des impôts locaux, jusqu'à la révision constitutionnelle précitée, l'autonomie fiscale des régions françaises était moindre que celles de plusieurs de leurs homologues européennes, comme l'indique le tableau ci-après.
Source : Nicolas Painvin, in Jean Arthuis, Fiscalité locale : quelles pistes pour la réforme ?, rapport d'information du Sénat n°289 (2002-2003)
L'autonomie fiscale des régions en Europe, selon Fitch Ratings
La loi
constitutionnelle du 28 mars 2003 placera donc les régions
françaises au même niveau que leurs homologues italiennes et
espagnoles. En effet, selon l'article 72-2 de la Constitution, la loi peut
désormais autoriser les collectivités territoriales à
«
fixer l'assiette et le taux
» des impositions de toutes
natures, «
dans les limites qu'elle détermine
».
La fiscalité propre est le mode de financement qui assure aux
collectivités locales la plus grande autonomie, comme l'indique le
tableau ci-après.
Comparaison des différents modes de financement des
collectivités territoriales :
synthèse des jugements
exprimés par les personnalités auditionnées par la
commission des finances à l'automne 2002
Mode de financement |
Exemples européens |
Principaux avantages |
Inconvénients |
Dotations |
|
Prévisibilité |
Tendance à l'augmentation |
Partage d'un impôt d'Etat |
Allemagne, Royaume-Uni |
Simplicité de la répartition, faibles coûts de gestion, absence de cercle vicieux entre taux élevés et sous-développement économique |
Absence de
véritable responsabilité fiscale locale, conduisant à une
faible légitimité politique
|
Fiscalité propre |
France |
Responsabilisation des collectivités territoriales
|
Risque de
cercle vicieux entre taux élevés et sous-développement
économique
|
Source : Jean Arthuis, Fiscalité locale : quelles pistes pour la réforme ?, rapport d'information du Sénat n°289 (2002-2003)
B. DES ASSIETTES VARIABLES
A
l'occasion de son audition par votre commission des finances à l'automne
2002, M. Hansjörg Blöchliger, administrateur principal à
l'OCDE, a communiqué des évaluations de la part des
différents types d'impôt dans les recettes fiscales des
collectivités locales.
Ces informations sont synthétisées, dans le cas des pays
européens, par le graphique ci-après.
La
part des différents types d'impôts locaux dans les recettes
fiscales des collectivités locales
Source : OCDE
1. Les taxes foncières, un impôt important en Europe latine et exclusif dans les îles britanniques
Tous les
pays européens disposent de taxes foncières, sauf la Suède
et la Grèce. Cependant celles-ci ne représentent une part
importante des recettes fiscales des collectivités locales que dans
certains pays : Europe latine (de 22 % pour l'Espagne à 52 % pour
la France), Pays-Bas (63 %) et, surtout, Royaume-Uni et Irlande (100 %).
Selon l'OFCE, «
en dehors du Royaume-Uni qui recourt à la
valeur vénale, la plupart s'appuient sur une valeur locative, dont les
révisions sont, presque toujours, coûteuses, donc peu
fréquentes
».
Le Royaume-Uni a abandonné toute imposition locale des entreprises (tant
en ce qui concerne les impôts fonciers qu'en ce qui concerne l'imposition
de l'activité économique), afin de garantir la neutralité
de la fiscalité sur l'implantation des entreprises. En revanche, en
Irlande l'imposition foncière des entreprises est la principale
ressource fiscale des collectivités locales.
2. Les impôts sur les revenus et les bénéfices, presque exclusifs dans les pays scandinaves
La part
des impôts sur les revenus et les bénéfices dans les
recettes fiscales locales est particulièrement importante en
Suède (100 %) et dans les autres pays de la péninsule scandinave
(entre 91 % et 96 %).
Certains Etats imposent les revenus des personnes physiques. Selon l'OFCE, tel
est le cas de sept pays européens : l'Allemagne, la Belgique, le
Danemark, l'Espagne, la Finlande, le Portugal et la Suède.
3. Autres types d'impôts locaux
La part des impôts indirects est particulièrement élevée dans les pays d'Europe latine (de 11 % pour la France à 35 % pour l'Espagne), en Allemagne, en Autriche, en Belgique et dans les Pays-Bas (de 34 % à 38 %), ainsi qu'en Grèce, seul pays où ces impôts représentent une part majoritaire des recettes fiscales des collectivités locales (51 %), le reste provenant d'impôts sur les salaires.
II. LES RÉFORMES DE LA FISCALITÉ LOCALE EN EUROPE
A. UNE TENDANCE EN TROMPE-L'oeIL À LA RÉDUCTION DU POIDS FINANCIER DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
1. Une tendance générale à la réduction du poids financier des collectivités territoriales
Comme l'indique le graphique ci-après, la part des dépenses publiques locales dans le PIB a eu tendance à se réduire au cours des années récentes dans la plupart des pays européens, à l'exception de l'Irlande, de l'Espagne, du Portugal et, de manière moins importante, de la France.
L'évolution du poids financier des collectivités
locales en Europe de 1994 à 2000
(dépenses publiques
locales/PIB, évolution en points)
N.B.
Dans les Etats fédéraux - Allemagne, Autriche, Belgique -, ces
chiffres prennent en compte les Etats fédérés.
Source : rapport de l'OFCE (Dexia, 1997, 2002)
2. Les pays où le poids financier des collectivités locales est faible ont connu une évolution inverse
Les données fournies par l'OFCE suggèrent que les différences d'évolution s'expliquent en partie par celles du poids financier des collectivités locales, comme l'indique le graphique ci-après.
Le
poids financier des collectivités territoriales en 1994 et son
évolution de 1994 à 2000
(poids financier :
dépenses publiques locales/PIB, en %)
Evolution
en points,
1994-2000
Poids financier, 1994
N.B. Ces
chiffres prennent en compte les Etats fédérés (Allemagne,
Autriche, Belgique).
Source : d'après le rapport de l'OFCE (Dexia, 1997, 2002)
Ainsi, les pays où le poids financier des collectivités locales
était le plus élevé en 1994 (Finlande, Suède,
Danemark) l'ont depuis réduit.
Inversement, ceux où il était le plus faible (comme la France)
l'ont, en règle générale, augmenté depuis. Il
existe néanmoins quelques exceptions puisque le Royaume-Uni et, surtout,
le Luxembourg, ont réduit le poids financier de leurs
collectivités locales alors que celui-ci était déjà
parmi les plus faibles en 1994.
L' « acte II » de la décentralisation
actuellement en cours en France correspond donc à la tendance
européenne
, les pays où le poids des collectivités
locales est faible s'efforçant d'accroître celui-ci, afin de
permettre une administration plus proche des citoyens.
B. L'ABSENCE DE RÉFORME FISCALE D'ENVERGURE
En revanche, aucune réforme fiscale d'envergure n'a été réalisée dans les années 1990.
1. La fiscalité locale des personnes physiques
Tel est
tout d'abord le cas en matière de fiscalité locale des personnes
physiques.
Comme le rappelle l'OFCE, «
le seul bouleversement d'envergure --
l'introduction, au Royaume-Uni, de la Poll tax, ou Community charge,
impôt forfaitaire local sur toutes les personnes physiques majeures, par
le gouvernement Thatcher en 1990 --, s'était
révélé suffisamment désastreux sur le plan
politique pour calmer les ardeurs des plus fervents
réformateurs
».
On peut également rappeler qu'en France une loi votée en 1990 par
l'Assemblée nationale se proposait de remplacer la part
départementale de la taxe d'habitation par une taxe
départementale sur le revenu des personnes sur le mode des centimes
additionnels à l'impôt sur le revenu des personnes physiques.
Plusieurs réformes significatives méritent cependant d'être
évoquées :
- en France, l'allégement des impôts locaux sur les ménages
(1999-2001), avec notamment la réduction de la taxe d'habitation ;
- en Espagne, la cession aux communautés autonomes (qui,
désormais, assurent le financement des dépenses de santé)
d'une part plus importante d'impôts nationaux (impôt sur le revenu,
TVA) et l'instauration pour elles de la possibilité de créer
leurs propres taxes, et par conséquent d'en fixer l'assiette et le taux
(cf. encadré ci-après).
La réforme de la fiscalité locale en Espagne, selon
Fitch
Ratings
« Les évolutions en matière de fiscalité locale
qui sont intervenues en Espagne ont été marquées par 4
étapes principales.
1982-1987 : Les communautés autonomes participent aux recettes de l'Etat
(
Participaciones en Ingressos del Estado
, PIE) en fonction du coût
effectif des compétences décentralisées.
1987-1995 : La PIE est révisée et évolue vers une
répartition selon des critères objectifs (démographie,
effort fiscal régional). Par ailleurs, en 1992, les communautés
obtiennent une part de 15% de l'IRPP collecté sur leur territoire.
1996-2001 : A partir de 1997 et progressivement jusqu'à 2001, les
régions reçoivent une tranche supplémentaire de 15% de
l'IRPP (avec autonomie sur le taux national de +/- 20%). L'impôt sur les
jeux leur est par ailleurs confié.
A partir de 2002 : Le cadre réglementaire applicable aux
communautés autonomes est régulièrement
renégocié et a été renouvelé le 27 juillet
2001 (modifications applicables en janvier 2002). Les nouveaux accords se
traduisent globalement par un accroissement de l'autonomie fiscale des
communautés en prévoyant :
- une hausse de la responsabilité fiscale régionale : les
recettes des collectivités locales vont devenir plus dépendantes
des taxes locales. Les régions recevront désormais :
- 33% du produit de l'impôt sur le revenu.
- 35% des recettes de TVA.
- 40% des taxes sur les carburants, le tabac et l'alcool ainsi que la
totalité de l'impôt sur le patrimoine et de la taxe sur les
immatriculations automobiles.
Les communautés autonomes disposent par ailleurs de la faculté de
créer leurs propres taxes et par conséquent d'en
déterminer l'assiette et d'en fixer le taux. A titre d'exemple,
l'Estrémadure a créé un impôt sur les
dépôts bancaires. La Catalogne a créé un impôt
sur les grandes surfaces et les Baléares envisagent la création
d'une taxe de séjour.
La modification de la structure des recettes de la plupart des régions
espagnoles : en juillet 2001, les impôts représentent environ 29%
des recettes courantes des régions espagnoles et cette part doit
croître à hauteur de 50% à partir de 2002.
Les régions qui sont le plus susceptibles de bénéficier de
cette autonomie fiscale accrue sont celles qui disposent de bases fiscales
dynamiques et importantes.
Selon Fitch, le système actuel présente les faiblesses suivantes :
- L'autonomie sur les taux des impôts d'état est faible bien que
les communautés puissent jouer sur les abattements et les
dégrèvements (ex: enfants à charge).
- La volatilité des impôts de flux pèsera sur les
communautés. En effet, l'IRPP est fortement lié au cycle
économique et la part des impôts indirects (sans autonomie)
augmente.
- Le remplacement des anciennes dotations par la quote-part d'impôts
d'état est calculé sur la seule base de 1999. On a mesuré
le produit (pro forma) des 33% de l'IRPP et des 35% de TVA sur l'assiette de
1999; soit X ce produit. On a compensé la différence entre X et
les dotations supprimées (base 1999) par une dotation nouvelle. Le
risque est que si 1999 était une année faste pour la
fiscalité, on minore la dotation de remplacement versée
dorénavant. Enfin, la collecte des impôts d'état reste
centralisée. »
Source : Nicolas Painvin (directeur du département Finances publiques
de l'Agence Fitch Rating)s, in Jean Arthuis, Fiscalité locale : quelles
pistes pour la réforme ?, rapport d'information du Sénat
n°289 (2002-2003)
2. L'imposition locale des entreprises
De
même, dans le cas de l'imposition locale des entreprises, plusieurs
réformes méritent d'être évoquées :
- en Allemagne, la « taxe professionnelle »,
précédemment assise sur les immobilisations et la masse
salariale, à l'instar de la taxe professionnelle française,
repose désormais sur les bénéfices ;
- en Italie, depuis 1998 les régions reçoivent les recettes d'une
taxe additionnelle à l'impôt sur le revenu, ainsi que l'IRAP
(impôt sur le revenu des activités productives), qui repose sur la
valeur ajoutée (cf. encadré ci-après).
La réforme de la fiscalité locale en Italie, selon
Fitch
Ratings
« Jusqu'en 1997, 85% des revenus des régions italiennes
étaient constitués de transferts. A partir de 1998, cette
proportion a commencé à décroître rapidement au
profit des impôts dont la part dans les recettes totales est brusquement
passée de 12% à 45% ! Ce développement de la
fiscalité locale est la conséquence directe des lois «
Bassanini » et la loi sur le fédéralisme fiscal en 2000, qui
ont introduit des changements fiscaux majeurs pour les régions à
statut ordinaire.
Ces lois ont en effet créé, au profit des régions, une
taxe additionnelle à l'impôt sur le revenu (IRPEF :
Imposta sul
Reditto delle Persone Fisiche
) composée d'un taux fixe (0,9% en
2000) et d'un taux variable (dans la limite de 0,5% supplémentaire). Les
régions à statut ordinaire ont vu également leur part dans
la taxe sur les carburants augmenter et bénéficient de la
possibilité d'augmenter de 10% le tarif national de la taxe sur
l'équivalent de la carte grise.
Les régions reçoivent par ailleurs un impôt régional
sur l'activité productive (IRAP :
Imposta Regionale sulle
Attività Produttive
) qui a été créé en
1998. Son assiette est constituée de la valeur ajoutée nette hors
amortissement (salaires, charges financières et profits) sur les
entreprises, les commerces, les entreprises agricoles, les professions
libérales, l'Etat et les collectivités publiques. En 2001, les
régions avaient la possibilité d'augmenter le taux normal,
fixé à 4,25%, dans la limite de 1% (soit un taux maximum de 5,25%
) En 2001, le produit de l'IRAP était au total de EUR 25,6 milliards
soit environ un tiers des recettes réelles de fonctionnement des
régions. Celles-ci disposent par ailleurs de la faculté de fixer
des taux d'imposition différenciés selon les catégories
d'entreprises. A titre d'exemple, le Latium a choisi d'imposer plus lourdement
les grandes entreprises du secteur chimique.
Ce mouvement s'est poursuivi en 2001 avec la loi Amato qui a eu pour effet
d'accroître les pouvoirs fiscaux des régions, notamment celui de
créer et de percevoir leurs propres taxes. Cette loi a ouvert la voie
à une révision de la Constitution, confirmée par
referendum le 7 octobre 2001. Selon cette loi, les régions participent
dès lors au partage du produit fiscal perçu sur leur territoire
(pour l'instant à travers la TVA dont 38,5% va aux régions et qui
a remplacé en 2001 les transferts de l'état en matière de
santé). Avec la TVA, le gouvernement central institue un fonds de
péréquation pour les régions les plus démunies
(l'effet péréquatif est total en 2001 puis dégressif,
jusqu'à disparaître en 2013). Par ailleurs, la Commission
Régionale de Contrôle et le Commissaire, instances nommées
par le Premier ministre pour contrôler les activités des
régions, sont supprimées.
Aujourd'hui certaines incertitudes demeurent quant à l'application de
ces nouvelles règles. En effet, s'il semble que les régions aient
le droit d'augmenter sans limite la surtaxe sur le revenu des personnes
physiques, cette question ne fait pas l'unanimité. Par ailleurs, le
gouvernement Berlusconi, inquiet du non-respect de la promesse
électorale de baisse des impôts (l'état diminue ses
impôts mais les régions les augmentent) veut «congeler»
l'autonomie financière des régions. Enfin, la Constitution ne
détermine et ne garantit pas les ressources des régions, qui sont
déterminées par la Loi de Finances. L'Etat dispose donc en la
matière d'un pouvoir discrétionnaire (les régions
ordinaires ne sont pas représentées en tant que telles au
Parlement ou auprès du gouvernement).
En résumé, les régions italiennes ont
réalisé un véritable « bond en avant » en termes
d'autonomie fiscale et financière en passant d'un financement par le
biais de transferts à un financement majoritairement fiscal assorti de
la possibilité d'augmenter les taux et, depuis 2001, de créer
leurs propres taxes. La principale limite à l'autonomie
financière régionale qui tenait jusqu'en 2001 à l'absence
d'une véritable liberté en matière de dépenses --
très largement affectées au secteur de la santé -- a
désormais disparu. Mais les conditions d'acquisition de l'autonomie sont
loin d'être idéales car elles n'ont pas été
suffisamment programmées. Le transfert des compétences dans un
premier temps puis, dans un deuxième temps, des ressources a fait
apparaître des déséquilibres plus ou moins persistants.
Enfin, l'autonomie fiscale est obérée par une certaine «
incertitude du droit » illustrée par la surtaxe IRPEF qui n'a pas
été clairement interprétée et qui risque
aujourd'hui d'être « congelée » par l'Etat. Il est
également question d'abolir l'IRAP, jugé contre-productif
économiquement ; or l'IRAP est la principale ressource offrant une
autonomie. »
Source : Nicolas Painvin (directeur du département Finances publiques
de l'Agence Fitch Rating)s, in Jean Arthuis, Fiscalité locale : quelles
pistes pour la réforme ?, rapport d'information du Sénat
n°289 (2002-2003)
Comme le souligne l'OFCE, si ces assiettes (bénéfices ou valeur
ajoutée) apparaissent économiquement mieux fondées, elles
présentent cependant deux inconvénients : elles sont plus
difficilement localisables, et leurs recettes sont plus sensibles à la
conjoncture.
EXAMEN DU RAPPORT PAR LA COMMISSION DES FINANCES ET LA DÉLÉGATION POUR LA PLANIFICATION
A
l'occasion d'une réunion commune, la commission et la
délégation pour la planification ont entendu une
communication
de
M. Joël Bourdin, président de la
délégation pour la planification
, et de
M. Philippe
Marini, rapporteur général de la commission des finances
, sur
les
réformes fiscales intervenues dans les Etats européens au
cours des années 90.
M. Jean Arthuis, président
, a souligné que, pour la
première fois, la commission des finances et la délégation
pour la planification se réunissaient de manière conjointe. Il a
précisé que la commission des finances avait déjà
publié deux rapports d'information sur la fiscalité en Europe,
respectivement en 1990 et en 1999, s'appuyant chacun sur une étude de
l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Il a
ajouté que la présente étude, sur les réformes
fiscales intervenues dans les Etats européens au cours des années
90, que l'OFCE venait de remettre à la commission et à la
délégation pour la planification, était donc la
troisième réalisée sur ce thème pour le
Sénat, et s'est félicité de la qualité de cette
collaboration.
A titre liminaire, après avoir souligné l'imprécision de
la notion de prélèvements obligatoires,
M. Joël Bourdin,
président de la délégation pour la planification,
a
indiqué que ce taux s'était accru, en Europe, de 1,8 point de
PIB, seuls, deux Etats - l'Irlande et les Pays-Bas - l'ayant diminué. Il
a estimé que ce phénomène provenait du fait que certains
Etats du sud de l'Europe, en retard de développement, avaient
considérablement augmenté leur pression fiscale, et que les Etats
européens avaient dû réduire leurs déficits publics
afin de satisfaire aux critères de convergence fixés par le
traité sur l'Union européenne. Il a ajouté que la France
était, avec la Belgique, l'Etat dont le taux de
prélèvements obligatoires était le plus
élevé, à l'exception des Etats scandinaves.
M. Joël Bourdin, président de la délégation pour
la planification,
a également considéré qu'aucun Etat
européen n'avait réalisé de réforme importante de
sa fiscalité, si l'on définissait l'expression
« réforme » comme recouvrant un ensemble de mesures
destinées à modifier sensiblement soit le niveau, soit
l'architecture des prélèvements obligatoires, dans le cadre de la
poursuite d'objectifs clairement énoncés.
Il a ajouté qu'un paradoxe était que l'augmentation du poids des
prélèvements obligatoires dans le PIB des Etats de l'Union
européenne s'était accompagnée d'une diminution des taux
légaux de prélèvement, aussi bien dans le cas de
l'impôt sur les sociétés que dans ceux de l'impôt sur
le revenu, voire de la taxe sur la valeur ajoutée, qui n'entrait pas
dans le champ de l'étude. Il a estimé que ce
phénomène provenait, d'une part, de la structure de la croissance
économique, et, d'autre part, de l'élargissement des bases
d'imposition.
Enfin,
M. Joël Bourdin, président de la délégation
pour la planification
, a estimé que les réductions de
cotisations sociales avaient, en France, pour objectif, moins de réduire
le coût du travail que de compenser la hausse de celui-ci,
suscitée par la réduction du temps de travail et les
augmentations du SMIC.
M. Philippe Marini, rapporteur général,
a estimé
que la « globalisation » de l'économie rendait
d'autant plus nécessaire pour la France de pouvoir faire face, dans des
conditions favorables, à la concurrence fiscale de ses partenaires. Il a
jugé que le « benchmarking », ou
« étalonnage », réalisé par l'OFCE,
suggérait que la situation n'était pas favorable à la
France, que l'on considère le taux de prélèvements
obligatoires, la fiscalité du revenu, celle de l'épargne, celle
des entreprises ou celle du travail.
Il a indiqué que la France avait l'une des fiscalités les plus
lourdes de l'Union européenne, avec un taux de
prélèvements obligatoires de 45,5 % du PIB en 1999 et de 45 % du
PIB en 2001. Il a rappelé que, selon les simulations du Centre
d'observation économique (COE) de la chambre de commerce et d'industrie
de Paris réalisées pour la commission à l'occasion du
débat d'orientation budgétaire pour 2001, il avait
été établi qu'une diminution des
prélèvements obligatoires, compensée par une diminution
équivalente des dépenses publiques, pourrait être
bénéfique à la croissance, en particulier si cette
diminution concernait l'impôt sur le revenu et les cotisations sociales.
Il a indiqué qu'une telle réforme avait été mise en
oeuvre aux Pays-Bas, où le taux de prélèvements
obligatoires avait baissé de 2,6 points de 1991 à 2001, revenant
de 41,8 % à 39,2 % du PIB, essentiellement du fait d'une baisse des
impôts directs sur les ménages (moins 4,8 points de PIB) et des
cotisations sociales (moins 0,8 point de PIB), la réduction
supérieure des dépenses publiques ayant permis, globalement, une
amélioration du solde public structurel.
M. Philippe Marini, rapporteur général,
a
considéré que la fiscalité française était
également mal conçue. Il a affirmé que, sur la base du
critère du taux implicite de taxation des entreprises, la France
apparaissait comme le deuxième Etat le moins bien placé en
Europe. Il a également estimé que l'impôt sur le revenu
était, en France, à la fois parmi les moins productifs, et les
plus désincitatifs, son taux maximum figurant parmi les plus
élevés, et parmi ceux concernant la plus grande proportion de
ménages. Il a considéré que la fiscalité
française était également parmi les plus inadaptées
en ce qui concernait l'épargne, la surtaxation des revenus des actions
par rapport à ceux des obligations, qui existait dans la plupart des
Etats européens, étant, en France, particulièrement
marquée. Enfin, il a jugé qu'en France une part importante des
allégements spécifiques de cotisations sociales pouvait
être imputée, moins à un objectif de réduction du
coût du travail des actifs les moins qualifiés, qu'à la
nécessité de compenser le surcoût salarial
occasionné par la diminution de la durée du travail.
M. Philippe Marini, rapporteur général,
a
considéré que l'harmonisation des fiscalités des Etats de
l'Union européenne était nécessaire, mais que, la
politique fiscale pouvant être considérée comme
l'expression de la souveraineté fiscale des Etats, la vitesse de cette
harmonisation en était nécessairement affectée. Il a
rappelé que, lors de son audition par la commission le 27 mai 2003, M.
Pedro Solbes, commissaire européen chargé des affaires
économiques et monétaires, avait indiqué que les mesures
en matière d'harmonisation fiscale ne devraient, selon lui, être
prises à la majorité qualifiée que dans le cas des
impositions indirectes affectant le marché intérieur. Il a
estimé que les aspects institutionnels de l'harmonisation fiscale
n'avaient pas été suffisamment abordés par la convention
sur l'avenir de l'Europe. Il a néanmoins salué l'adoption par le
Conseil « Ecofin », le 3 juin dernier, d'un
« paquet fiscal », comportant notamment une directive sur
la fiscalité de l'épargne, prévoyant d'instaurer un
échange d'informations entre administrations fiscales.
En conclusion,
M. Philippe Marini, rapporteur général,
a
souligné l'intérêt de travaux tel celui
réalisé par l'OFCE, et la nécessité, pour la
France, de réformer sa fiscalité afin que la concurrence fiscale
ne joue pas en sa défaveur.
Un large débat s'est alors engagé.
M. Jean Arthuis, président
, a estimé que l'harmonisation
fiscale européenne était insuffisante. Il a en particulier
évoqué la récente suppression, par l'Italie, de ses droits
de mutation.
M. Jacques Oudin
a considéré que la réduction du
taux de prélèvements obligatoires était difficile pour les
grands Etats, que certains prélèvements obligatoires
pourraient être utilement transformés en redevances, que
l'efficacité des administrations publiques devait être
améliorée, et que certaines dépenses publiques, comme
celles en matière d'infrastructures de transports, favorisaient le
développement économique.
M. Maurice Blin
s'est interrogé sur la part de l'impôt sur
le revenu dans les ressources fiscales et s'est demandé si la
fiscalité française favorisait trop la demande par rapport
à l'offre. Il a considéré que l'importance des
dépenses relatives à la politique de l'emploi n'empêchait
pas la France d'avoir un taux de chômage élevé, et que la
fiscalité des Etats de l'Union européenne ne leur permettait pas
d'affronter la concurrence fiscale des Etats-Unis dans des conditions
favorables.
Evoquant le cas de distorsions économiques suscitées par les
différences entre les systèmes fiscaux français et
espagnol,
M. Auguste Cazalet
a fait état de son pessimisme quant
à la possibilité d'une réelle harmonisation fiscale entre
Etats européens.
M. Gérard Bailly, membre de la délégation pour la
planification,
a estimé que les nouvelles charges des
collectivités territoriales, telles que l'allocation
personnalisée d'autonomie, allaient susciter une augmentation de leurs
prélèvements obligatoires, alors que le contexte
budgétaire incitait à une réduction des dotations et
subventions de l'Etat aux collectivités territoriales.
M. Jean Arthuis, président
, a estimé que l'harmonisation
fiscale en Europe était très insuffisante. Il a
considéré que la France se caractérisait à la fois
par un taux de prélèvements obligatoires élevé et
par un solde public fortement déficitaire, et que la seule grande
réforme fiscale qu'elle avait réalisée ces
dernières années était l'instauration de la contribution
sociale généralisée (CSG). Il a en outre jugé que,
dans une économie globalisée, l'impôt permettant
d'affronter la concurrence fiscale dans les meilleures conditions était
celui sur la consommation, cette dernière n'étant pas
délocalisable.
En réponse aux différents intervenants,
M. Joël Bourdin,
président de la délégation pour la planification
, a
indiqué que quatre Etats avaient réduit leur taux de
prélèvements obligatoires de 1990 à 2000 (la Suède,
les Pays-Bas, l'Irlande et le Japon). Il a estimé que la proposition de
transformer certains prélèvements obligatoires en redevances
était intéressante, et que l'impact des différents types
d'investissement sur la croissance était difficile à
évaluer.
Continuant à répondre aux questions posées,
M. Philippe
Marini, rapporteur général
, a estimé que la
décentralisation était susceptible de réduire le taux de
prélèvements obligatoires.
MM. Philippe Marini, rapporteur
général, Jean Arthuis, président
,
et Yann Gaillard,
ont déploré l'échec de la tentative de réforme
de l'administration fiscale menée par le précédent
gouvernement.
M. Philippe Marini
a indiqué que la part de
l'imposition du revenu dans le PIB était en France plus faible que dans
la plupart des autres Etats européens, et a estimé que la
fiscalité française était excessivement favorable à
la demande, et pas assez à l'offre. Dans le cas de l'impôt sur les
successions, il a renvoyé au récent rapport d'information
(n° 65, 2002-2003) réalisé par la commission sur
« la fiscalité des mutations à titre
gratuit ». Il a, enfin, estimé que l'éventualité
d'une augmentation du taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée ne
devait pas être écartée.
La commission et la délégation pour la planification ont
décidé de publier l'étude de l'OFCE
,
précédée d'un texte de présentation,
sous la
forme
d'un
rapport d'information
commun à la commission et
à la délégation pour la planification.
ANNEXE :
ÉTUDE DE L'OFCE
« LES
RÉFORMES FISCALES EN EUROPE 1992-2001 »
Rapport pour le Sénat
Les réformes fiscales en Europe 1992-2001
Le 28 juin 2002
Les réformes fiscales en Europe 1992-2001
Introduction
par
Réjane Hugounenq, Jacques Le Cacheux et Henri Sterdyniak
157
Partie 1 : Fiscalité européenne, l'état des lieux
Chapitre
1 : Fiscalité européenne, l'état des lieux 175
par Réjane Hugounenq et Henri Sterdyniak
Partie 2 : Les objectifs des réformes fiscales
Chapitre 2. 1 : L'imposition des bénéfices 191
par Réjane Hugounenq
Chapitre 2. 2 : L'impôt sur le revenu 209
par Henri Sterdyniak et Paola Veroni
Chapitre 2. 3 : L'imposition des revenus du capital 237
par Réjane Hugounenq
Chapitre 2. 4 : Les mesures d'incitation au travail des personnes non
qualifiées 254
par Hélène Périvier
Chapitre 2. 5 : Les cotisations sociales 292
par Xavier Timbeau
Chapitre 2. 6 : La fiscalité locale 301
par Jacques Le Cacheux
Chapitre 2. 7 : La fiscalité écologique 311
par Jacques Le Cacheux
Partie 3 : Les réformes nationales
Chapitre 3.
1 : Les réformes fiscales en Allemagne 317
par Odile Chagny
Chapitre 3. 2 : Les réformes fiscales en France 334
par Gaël Dupont
Chapitre 3. 3 : Les réformes fiscales au Royaume-Uni 364
par Gaël Dupont et Catherine Mathieu
Chapitre 3. 4 : Les réformes fiscales en Italie 388
par Paola Veroni
Chapitre 3. 5 : Les réformes fiscales en Espagne 418
par Sabine Le Bayon
Chapitre 3. 6 : Les réformes fiscales aux Pays-Bas 436
par Odile Chagny
INTRODUCTION
Depuis
1992, la plupart des pays de l'Union européenne ont
procédé à de nombreuses modifications de leurs
législations fiscales, dont certaines, de par leur ampleur et leur
cohérence, méritent le nom de réformes fiscales.
Disparates, ces changements ont toutefois été influencés
par des situations macroéconomiques similaires ou des impératifs
communs : ainsi, de 1992 à 1997, la majorité des pays
européens ont-ils dû augmenter leurs impôts pour restaurer
la situation de leurs finances publiques et satisfaire aux critères
définis à Maastricht alors même que le ralentissement de
l'activité avait tendance à réduire les rentrées
fiscales ; de 1998 à 2001, au contraire, la croissance
retrouvée et la réduction des charges d'intérêt ont
permis des baisses sensibles de fiscalité
39
(
*
)
.
Les orientations des politiques économiques ont évolué :
dans de nombreux pays, la priorité est maintenant d'améliorer la
compétitivité et l'attractivité du
site de production
national
et de rétablir les incitations à travailler
plutôt que d'étendre la redistribution et les dépenses
publiques. Toutefois, la part des prélèvements obligatoires et
des dépenses publiques dans le PIB n'a, jusqu'à présent,
pas été sensiblement réduite et les principaux attributs
du « modèle social européen » n'ont, nulle
part, été sérieusement remis en cause. Aucun pays n'a
réalisé la
Grande réforme
, modifiant fortement le
niveau et la structure des prélèvements ; dans la plupart
des cas, les réformes sont restées ponctuelles, de sorte que leur
cohérence n'est guère visible.
Enfin, tous les pays sont confrontés à des défis
similaires : financer un niveau important de dépenses publiques
dans une situation de mondialisation croissante ; rendre la fiscalité
plus favorable à l'emploi et plus écologique ;
préparer l'alourdissement des dépenses de retraites. Toutefois,
des stratégies différentes apparaissent : certains pays
mettent l'accent sur la réduction des taux marginaux
élevés de prélèvements sur les hauts revenus ;
d'autres s'attachent à rendre rentable le travail pour les non
qualifiés ; certains réduisent les charges salariales pesant
sur les bas salaires. Des dispositifs originaux ont été mis en
place dans plusieurs pays, tels le
Working Family Tax Credit
au
Royaume-Uni,
l'Imposition Régionale sur les Activités
Productives
en Italie, la taxation cédulaire aux Pays-Bas, etc.
La réalisation du marché unique, au 1
er
janvier 1993
avait déjà été l'occasion d'une réflexion
sur les orientations fiscales dans l'UE et sur les possibilités de
l'harmonisation (Sterdyniak
et alii
, 1991). La préparation de
l'Union économique et monétaire, puis le passage à la
monnaie unique ont, à nouveau, obligé les pays à repenser
leur fiscalité.
A priori
, ils avaient le choix entre
l'harmonisation négociée et le libre jeu de la concurrence
fiscale. Faute d'accord et en raison des risques perçus comme plus
grands, l'attention a été portée sur les impôts
assis sur les facteurs les plus mobiles : impôts sur les
sociétés, impôts sur les revenus du capital des
ménages, impôts sur les contribuables les plus riches. Compte tenu
de la disparité des points de vue et des intérêts
nationaux, compte tenu de l'exigence d'unanimité en matière
fiscale pour des décisions communes à l'échelle
communautaire, l'harmonisation n'a pu aboutir à une situation
satisfaisante sur la plupart des dossiers. De grands choix n'ont pas
été faits au niveau européen : faut-il
généraliser ou supprimer l'avoir fiscal ? Quelle
fiscalité pour les groupes européens ? La plupart des
dossiers restent en chantier. Seul celui de la fiscalité des revenus du
capital semble progresser. Les réformes fiscales des années 1990
ont été conduites isolément par chaque pays, sans
stratégie européenne d'ensemble.
Ce rapport fait le point sur l'évolution des systèmes fiscaux des
principaux pays européens tout au long des années 1990 et sur la
situation actuelle, près de dix ans après la nouvelle
étape d'ouverture des frontières induite par le marché
unique. Il confronte les différentes expériences nationales
relatives aux domaines qui ont fait l'objet de préoccupations communes
tout au long de la décennie. Le premier est la lutte contre le
chômage et l'utilisation pour ce faire, de la fiscalité. De
nombreuses pistes ont été utilisées pour rendre les
systèmes fiscaux plus favorables à l'emploi : la
réduction des cotisations sociales, celles-ci étant
remplacées par un prélèvement sur l'ensemble des revenus
des ménages, par une taxe sur la valeur ajoutée ou par des taxes
écologiques ; la baisse des cotisations sociales concentrée
sur les bas salaires ; la mise en oeuvre de mécanismes proches de
l'impôt négatif pour réduire la désincitation au
travail des non qualifiés. Une deuxième préoccupation
concerne la taxation des entreprises multinationales dans un monde de plus en
plus globalisé. Faut-il appliquer la taxation à la source ou
à la résidence ? Comment rendre compatible l'autonomie
nationale en la matière et la nécessité d'une
cohérence européenne pour la taxation des entreprises
transnationales ? Des problèmes similaires se posent pour la
taxation des revenus du capital des ménages, la question de la taxation
des dividendes et de l'avoir fiscal faisant le pivot entre les deux
préoccupations. Une troisième préoccupation est celle de
la fiscalité écologique : les nouvelles contraintes
imposées par la nécessité de réduire les
consommations d'énergie, d'éviter les émissions de gaz
polluants peuvent-elles être prises en compte par une taxation
écologique ? Celle-ci fournit-elle un second dividende en
permettant de réduire la taxation portant sur le travail ou est-il vain
de prétendre courir deux lièvres à la fois ? Enfin,
à un niveau plus national, se pose la question de l'organisation de la
fiscalité locale. Peut-on concilier l'autonomie des collectivités
locales avec le souci de redistribution et d'égalité des citoyens
face aux services publics à l'échelle nationale ?
Le rapport évalue aussi les risques de concurrence fiscale et l'urgence
de l'harmonisation. Nous présenterons, sur ces points, les
récentes propositions de la Commission en matière d'harmonisation
fiscale. Mais, nous nous interrogerons également sur l'évolution
souhaitable du système fiscal européen. Comment créer un
cadre harmonisé permettant de préserver la liberté de
chaque pays de maîtriser le niveau de ses dépenses publiques et
son niveau de redistribution ?
L'évolution du taux de prélèvement obligatoire et des
structures fiscales
Les années 1990 ont été marquées par une succession
de réformes fiscales, plus ou moins ambitieuses, dans l'ensemble des
pays membres. Ceux-ci ont d'abord tous été confrontés
à la nécessité d'augmenter leur niveau de
prélèvements obligatoires (Partie 1 et tableau 1) pour faire face
à des situations financières relativement dégradées
et mettre un terme à la montée des déficits et des
endettements publics résultant de la faible croissance du début
des années 1980 et du début des années 1990. L'ouverture
des frontières en 1993 n'a pas affecté cette
évolution : contrairement aux effets attendus de l'ouverture des
frontières en l'absence d'harmonisation, non seulement les taux de
prélèvement n'ont pas diminué dans l'ensemble des pays
mais ont plutôt eu tendance à augmenter, même si le rythme
de croissance s'est infléchi au cours des années 1990 par rapport
à la décennie précédente : le montant des
recettes fiscales des pays de l'UE est ainsi passé de 38,9 % du PIB
en 1990 à 40,8 % en 2000 (graphique 1). Jusqu'à
présent donc, la concurrence fiscale n'a pas privé les pays
européens de ressources. Les pays du Sud en rattrapage (Grèce,
Portugal) ont augmenté massivement leur taux de
prélèvement obligatoire. Certains pays ont pu réduire le
leur grâce à une croissance vigoureuse (Irlande, Finlande) ou
à la réduction de leurs dépenses publiques (Danemark,
Pays-Bas, Suède).
Graphique 1 : Evolution des taux de prélèvement en pourcentage du PIB
Source : OCDE,
Statistiques des recettes publiques
, 2001
Globalement, les années 1990-2001 ont été une
période d'assainissement budgétaire, marquée par une
hausse des taux de prélèvement obligatoire, une
légère baisse du taux de dépense publique et une nette
amélioration des soldes publics courants, et un peu moindre des soldes
primaires (hors charges d'intérêt sur la dette publique) :
globalement, l'effort budgétaire (mesuré par l'évolution
du solde primaire) a représenté 2,5 points de PIB.
Les quinze pays membres peuvent être classés en trois
catégories : huit pays ont réussi à obtenir une nette
baisse du poids des dépenses publiques ; deux ont connu une forte
hausse des dépenses publiques, qui correspond en fait à un
rattrapage (Grèce, Portugal) ; la configuration moyenne --
stabilité ou légère hausse des dépenses, et nette
hausse des recettes -- se retrouve dans cinq pays, dont les plus grands
(Allemagne, France, Royaume-Uni, Belgique, Autriche). La tendance à la
convergence du niveau des dépenses persiste, mais reste lente.
Globalement, pour l'ensemble de l'UE 15, la croissance des dépenses
publiques a été de 1,6 % l'an de 1990 à 2001, en
terme réel (pour une croissance du PIB de 2 %).
Tableau 1 : Evolution des finances publiques de 1990 à 2001*
En points de PIB |
Recettes publiques |
Dépenses primaires |
Solde Primaire |
Intérêts |
Solde public |
Allemagne |
1,4 |
1,1 |
0,2 |
0,8 |
- 0,5 |
Autriche |
1,4 |
- 0,9 |
2,3 |
0,0 |
2,3 |
Belgique |
2,6 |
0,8 |
1,8 |
- 4,9 |
6,7 |
Danemark |
- 1,1 |
- 2,2 |
1,0 |
- 2,0 |
3,0 |
Espagne |
0,6 |
- 3,1 |
3,7 |
- 0,4 |
4,2 |
Finlande |
- 1,3 |
- 2,6 |
1,3 |
2,8 |
- 1,5 |
France |
1,9 |
0,8 |
1,1 |
0,5 |
0,6 |
Grèce |
19,7 |
6,2 |
13,5 |
- 2,2 |
15,7 |
Irlande |
- 3,9 |
- 4,1 |
0,2 |
- 5,8 |
6,0 |
Italie |
2,7 |
- 3,3 |
6,0 |
- 4,3 |
10,3 |
Luxembourg |
- 1,7 |
- 3,1 |
1,5 |
1,1 |
0,4 |
Pays-Bas |
- 1,3 |
- 6,5 |
5,1 |
2,6 |
2,5 |
Portugal |
4,3 |
6,0 |
- 1,6 |
- 4,9 |
3,3 |
Royaume-Uni |
2,0 |
- 0,2 |
2,1 |
- 0,5 |
2,6 |
Suède |
- 3,0 |
- 4,2 |
1,2 |
1,2 |
0,0 |
UE15 |
1,7 |
- 0,8 |
2,5 |
- 0,9 |
3,4 |
* Niveau
de 2001 moins niveau de 1990.
Source : OCDE,
Perspectives économiques
, décembre
2001.
La période d'assainissement budgétaire est-elle
achevée ? La réponse à cette question dépend
de l'appréciation que l'on peut porter sur la conjoncture
récente. L'Europe, avec un taux de chômage de 7,8 %
était-elle, en 2001, proche de son niveau de production potentielle,
comme l'écrivent l'OCDE et la Commission européenne, ou
disposait-elle encore de marges de croissance au-delà de son rythme
potentiel ? La réponse dépend aussi de l'objectif : un
solde public nul, ou même excédentaire pour préparer la
hausse des retraites ? Un solde primaire nul (ce qui correspond à
peu près à la stabilité de la dette publique par rapport
au PIB) ? En fait, douze pays avaient en 2001 un solde primaire positif de
plus de 2,5 points de PIB (dont sept dépassaient ou atteignaient un
excédent de 4 points) ; la France et le Portugal avaient des
excédents primaires de l'ordre de 1,5 point. Seule, l'Allemagne
était juste à l'équilibre primaire. Le solde primaire de
l'UE 15 est excédentaire de 2,3 points de PIB en 2001. Jugée
à l'aune de cet indicateur, la politique budgétaire a donc
largement retrouvé des marges de manoeuvre ; pourtant,
influencés par une interprétation rigoureuse du Pacte de
stabilité, la plupart des gouvernements européens, suivant la
Commission et la Banque centrale européenne, semblent
décidés à poursuivre dans la voie de la réduction
des dettes publiques.
Le maintien pendant les 5 années à venir d'une croissance
modérée des dépenses publiques (à 1,6 % l'an),
une croissance moyenne de l'ordre de 2,5 % l'an, une politique
monétaire prudente (égalisant le taux d'intérêt
réel au taux de croissance) permettraient d'avoir chaque année
une marge de manoeuvre supplémentaire de 0,45 point de PIB. Il serait
donc possible, soit de baisser le taux de prélèvement obligatoire
de 2,25 points en 5 ans, soit, en maintenant à son niveau le taux de
prélèvement obligatoire, d'aborder le début de la phase de
croissance des dépenses de retraites avec une marge d'environ 4,5
points.
40
(
*
)
La comparaison du poids moyen des différents impôts en 1990 et en
2000 ne montre guère de grands bouleversements durant la période
(tableau 2). Tous les impôts ont légèrement augmenté
en pourcentage du PIB, de façon pratiquement homothétique.
Toutefois, le poids des cotisations sociales a très
légèrement diminué (de 0,3 point de PIB), la baisse
provenant en grande partie de l'introduction de la CSG en France et de l'IRAP
en Italie. Cette évolution va dans le bon sens, celui d'alléger
la charge portant sur le travail, même si elle reste
modérée.
Tableau 2 : Poids des prélèvements obligatoires dans le PIB de l'UE (en %)
|
1990 |
2000 |
Impôts sur le revenu des ménages |
9,6 |
10,1 |
Impôts sur les sociétés |
2,7 |
3,0 |
Cotisations sociales |
12,8 |
12,5 |
Impôts sur le patrimoine |
1,8 |
2,4 |
Impôts sur les biens |
11,1 |
11,8 |
Total |
38,9 |
40,8 |
Source : OCDE,
Statistiques des recettes publiques
, 2001.
Comparée aux Etats-Unis, l'UE se caractérise par le poids
important des cotisations sociales et des taxes portant sur les biens alors que
le poids de l'impôt sur le revenu des ménages y est moindre. Les
pays scandinaves font jouer un grand rôle à l'impôt sur le
revenu des ménages, alors qu'il reste peu important dans des pays du Sud
à structure fiscale relativement
« archaïque »
41
(
*
)
(Portugal, Grèce, Espagne). Le poids de
l'impôt sur les sociétés est faible en Allemagne et en
Autriche ; il n'est particulièrement élevé qu'en
Finlande et au Luxembourg. Les cotisations sociales pèsent fortement sur
les salaires dans les pays bismarkiens (Autriche, France, Suède,
Pays-Bas) ; elles sont, en revanche, peu importantes au Danemark, en
Irlande, au Royaume-Uni. Les impôts sur les produits sont
particulièrement élevés au Danemark (où ils
compensent l'absence de cotisations employeurs). Globalement, deux facteurs
expliquent les diversités de structures fiscales : l'organisation
du système de protection sociale -- Bismarkien (dépenses
importantes financées par des cotisations assises sur les salaires),
scandinave (dépenses importantes financées par l'impôt) ou
anglo-saxon (dépenses publiques faibles) -- ; l'opposition entre
les systèmes modernes (fort poids de l'impôt sur le revenu) et les
systèmes archaïques (fort poids des impôts indirects).
En moyenne, un pays continental européen type se caractérise par
des dépenses publiques primaires représentant environ 45 %
du PIB, réparties entre 11 points pour les retraites ; 8 pour la
santé ; 3 pour le chômage ; 3 pour l'ensemble
famille-logement-pauvreté ; 6 pour le poste
éducation-culture ; 3 pour les subventions
économiques ; 8 pour les dépenses collectives ; 3
points de dépenses en capital. C'est l'importance des dépenses
publiques de retraite, santé, prestations de solidarité et
éducation qui différencie les pays continentaux du modèle
anglo-saxon. Aussi, toute baisse sensible du taux de prélèvement
obligatoire, qui suppose une baisse équivalente des dépenses
publiques, passe par une privatisation, sous une forme ou une autre, de
dépenses profitant directement aux ménages.
Dans les années à venir, le vieillissement de la population
devrait induire une nette hausse des dépenses de retraites et de
santé en Europe, alors que certaines économies pourront sans
doute être réalisées sur le poste chômage. Par
contre, la faiblesse de la fécondité dans la grande
majorité des pays européens ne rend ni souhaitable ni probable
des économies sur le poste famille. La plupart des pays devront donc
choisir entre une certaine hausse des taux de prélèvements
obligatoires et une certaine privatisation des systèmes de retraites et
de santé. La seconde stratégie pose cependant deux
problèmes : la stabilité des taux de
prélèvements obligatoires aurait comme contrepartie une hausse
des primes aux fonds de pensions, aux mutuelles et aux assurances
privées ; ces primes devraient être plus ou moins
obligatoires si l'on veut que toutes les personnes restent couvertes dans des
conditions satisfaisantes. Un système mixte -- assurance publique pour
les plus pauvres et assurances privées pour les couches moyennes et
supérieures -- permet certes de faire baisser comptablement le taux de
prélèvements obligatoires, mais ne résout pas le
problème puisque les couches moyennes devraient payer des impôts
pour les moins favorisés et des primes pour elles-mêmes. Par
ailleurs, la hausse des cotisations retraites pour financer celles des
prestations est plus acceptable pour les cotisants qu'une hausse de la
fiscalité générale dans la mesure où elle a une
contrepartie directe
42
(
*
)
.
Deux mesures devraient toutefois être mises en oeuvre pour éviter
l'alourdissement du coût du travail. D'une part, les hausses devraient
porter sur les cotisations salariés, de sorte que la
compétitivité des entreprises ne serait pas affectée
directement à court terme. D'autre part, l'assiette « masse
salariale » devrait être réservée aux seules
cotisations finançant des prestations contributives, liées au
salariat (retraite, chômage, accident du travail, prestations
maladie-maternité de remplacement), les autres prestations devant
être financées par l'impôt. C'est d'ailleurs ce genre de
réformes que l'Italie a mises en oeuvre par l'IRAP et la France par la
CSG.
Fondamentalement, l'Europe a le choix entre deux stratégies. La
première consiste à préserver le
modèle social
européen
, caractérisé par un niveau important de
transferts redistributifs et de dépenses publiques, en particulier de
protections sociales, et donc par un niveau important de
prélèvement obligatoire. Les revenus du travail et du capital
resteront soumis à des taux d'imposition élevés. En
contrepartie, les ménages bénéficieront de transferts
importants. Le système devra être préservé de la
concurrence fiscale par des mesures d'harmonisation interne en Europe et des
accords internationaux contre les pratiques déloyales de concurrence.
Surtout, il devra compter sur ses avantages comparatifs (éducation et
santé gratuites pour tous, infrastructures publiques, prestations
d'assurances). La seconde consiste, au contraire, à se diriger vers un
modèle plus libéral, où la privatisation des
dépenses sociales, permettra une baisse des taux d'imposition
censée inciter à l'emploi, à la formation, à
l'épargne, à l'investissement. La seconde stratégie
suppose que les Européens acceptent de vivre dans une
société plus inégalitaire.
Réduire les tranches supérieures du barème
Partant d'un haut niveau de taux de prélèvements obligatoires,
les Etats membres, confortés par le retour en force des thèses de
l'économie de l'offre et encouragés par les organismes
internationaux ont tenté de réformer leur système fiscal
pour en diminuer les effets désincitatifs qui, selon certains,
expliqueraient la différence de dynamisme entre l'économie
américaine et les économies européennes. De façon
générale, cela s'est traduit par une diminution des taux
marginaux d'imposition : les taux marginaux d'imposition sur le revenu
(ceux des tranches les plus élevées du barème) et le taux
de l'impôt sur les bénéfices des sociétés,
supposés désinciter, au travail et à
l'épargne
pour le premier et à l'investissement
pour le second. De plus, les progrès de la mondialisation et la mise en
place du Marché unique sans harmonisation fiscale ont fait craindre que
des taux moyens élevés induisent l'évasion
des actifs à hauts revenus ou des individus à patrimoine
élevé et des grandes entreprises vers des pays plus
cléments fiscalement.
Selon la théorie microéconomique, la fiscalité est
désincitative dès lors qu'elle réduit la
rentabilité pour un individu de ses choix de comportement, notamment de
travail et d'épargne. La désincitation naissant de la baisse du
rendement marginal du travail ou de l'épargne, aucun impôt n'est
neutre, à l'exception de ceux assis sur les dotations initiales
(impôt forfaitaire, impôt assis sur des caractéristiques
innées, impôt sur les ressources naturelles). Les impôts les
plus redistributifs sont aussi les plus désincitatifs. Le
caractère désincitatif d'un impôt provient de son assiette
et de sa structure, c'est à dire de son taux marginal, et non de son
taux moyen. Les économistes qui insistent sur l'importance des effets
desincitatifs soulignent généralement l'impossibilité de
mettre en place des impôts neutres ; ils sont ainsi amenés
à préconiser la réduction des dépenses publiques et
des transferts redistributifs.
Les pays ont cependant essayé de compenser ces diminutions de taux par
l'élargissement de la base fiscale. Souvent, les tranches des
barèmes n'ont pas été indexées sur
l'évolution
des revenus ; les possibilités
d'abattement ont été réduites ; les
possibilités de déduction des intérêts
versés, des primes d'assurance-vie ont été
supprimées. La taxation du revenu du capital des ménages a
été augmentée. Dans la mesure où ce sont les
contribuables les plus aisés qui bénéficiaient le plus de
possibilités des diverses formules d'abattement, l'élargissement
de la base a quelque peu compensé, du point de vue de la redistribution,
les effets de la baisse des taux marginaux les plus élevés.
Ces réformes auraient pu aboutir à une diminution des
impôts les plus à même de générer des
comportements de délocalisation. En fait, sur la décennie 1990,
la structure fiscale des différents pays a relativement peu
évolué. Les prélèvements sur assiette
d'activité (impôt sur le revenu, impôt sur les
sociétés) ont tous augmenté dans des proportions
similaires. Les compensations entre la baisse de taux et l'élargissement
de la base se sont effectuées dans la plupart des pays au sein de chaque
impôt.
Reste qu'à l'avenir, dans un monde de plus en plus globalisé, la
tension entre les objectifs d'incitation et de redistribution risque de
grandir. Les couches supérieures, les grandes gagnantes de la
mondialisation, auront plus de facilité pour choisir leur lieu de
travail et de taxation. Elles risquent de refuser de contribuer à l'aide
aux couches sociales frappées par ce processus. Les Etats risquent
d'être contraints de baisser fortement les taux marginaux
supérieurs, voire d'offrir aux plus riches des possibilités
d'évasion fiscale (comme les
stock-options
) alors même que
se creuserait l'écart entre leurs revenus et ceux de la masse de la
population. Il y aura de plus en plus une limite aux prélèvements
possibles sur les couches supérieures mondialisées de la
population. Les nations devront réduire leur ambition
social-démocrate ou la faire financer par les couches moyennes.
Aussi, est-il important que l'Europe maintienne une croissance vigoureuse pour
éradiquer le chômage de masse et éviter que persistent
durablement des zones de pauvreté de masse. Chaque pays devrait chercher
à réduire la fracture sociale le plus en amont possible (aide
à l'éducation dans les zones défavorisées,
incitation à la création d'emplois non qualifiés, lutte
contre les trappes à pauvreté).
Pour que chaque
pays puisse gérer son arbitrage spécifique
entre
redistribution et incitation, il serait souhaitable qu'aucune mesure ne
favorise spécifiquement le nomadisme fiscal
43
(
*
)
.
Taxer les revenus du capital
L'équité horizontale implique que les revenus du capital des
ménages soient taxés comme leurs revenus du travail. La
comparaison devrait porter sur des bases comparables : d'un
côté, la taxation des revenus réels (hors inflation) du
capital, de l'autre, la taxation des revenus du travail, hors cotisations
retraites et chômage qui ouvrent des droits et constituent donc des
salaires différés.
Toutefois,
il est justifié que, pour des raisons de
justice sociale et pour inciter les contribuables à revenus modestes
à faire un certain effort d'épargne, l'épargne populaire
(un montant limité de capital placé dans des formules
spécifiques) bénéficie de la non imposition et que
l'épargne retraite (à sortie obligatoire en rente viagère)
ne soit pas soumise à la double taxation (et bénéficie
donc d'une exonération fiscale à l'entrée pour tous les
impôts ou cotisations auxquels les rentes seront soumises).
Malheureusement, se sont développées dans tous les pays de l'UE
des formules de taxation privilégiées des revenus
d'intérêt, à des taux libératoires,
inférieurs pour la quasi-totalité des épargnants
à leur taux d'imposition à l'impôt sur le revenu.
Par contre, les dividendes sont souvent taxés
à
l'IR, avec restitution de l'IS versé par une formule d'avoir fiscal. Les
plus-values, qui représentent théoriquement la contrepartie des
profits non distribués, supportent généralement le seul
taux de l'IS ; elles sont parfois aussi taxées
spécifiquement. Au total, la taxation des revenus des actions
est généralement nettement plus forte que celle des
revenus d'intérêt, alors même que les pays européens
souhaitaient développer l'épargne à risque. Certaines
réformes récentes (en Allemagne, au Royaume-Uni)
créent une nouvelle incohérence : l'avoir fiscal est
supprimé, mais les dividendes sont imposés à l'IR
après réduction par un coefficient arbitraire. Les dividendes
sont moins imposés que naguère, mais restent plus imposés
que les revenus d'intérêt.
Enfin, certains pays ont développé des formules de placements non
imposés, qui favorisent certains intermédiaires financiers
(assurance-vie, placement à long terme), sans cohérence du point
de vue de l'équité fiscale.
Les Pays-Bas ont mis en place une réforme globale et ambitieuse :
le capital financier détenu est taxé à 1,2 % de sa
valeur, soit 30 % d'un taux de rentabilité fictif de 4 %.
Toute disparité entre les formes de placement est ainsi
éliminée (du moins si le système comporte un avoir fiscal
intégral). Il n'est pas nécessaire de distinguer la
rentabilité réelle et nominale ; les plus-values latentes et
réalisées. Par contre, la logique de l'impôt progressif est
perdue de vue : les revenus du travail et ceux du capital ne font pas
masse. L'impôt ne tient pas compte de la rentabilité effective des
placements. Les bénéficiaires de la réforme sont les
ménages les plus riches qui effectuent généralement des
placements plus risqués et plus rémunérateurs.
La situation actuelle de la fiscalité des revenus du capital en Europe
n'est guère satisfaisante. Il faudrait choisir clairement entre deux
structures. Le principe de soumission à l'impôt de tous les
revenus des ménages, y compris les revenus financiers, est le plus
satisfaisant du point de vue de l'équité, mais il est difficile
à mettre en oeuvre. La pratique d'un taux spécifique pour les
revenus du capital semble se généraliser. Si elle était
choisie,
ce taux devrait
être uniforme pour
tous les placements, s'appliquer aux plus-values et intégrer
l'impôt sur les bénéfices déjà payé
par les entreprises. Dans ce cas, le choix hollandais est une stratégie
intéressante.
Diminuer le coût du travail et inciter à l'emploi
Malgré de nombreux symptômes montrant l'insuffisance de la demande
en Europe de 1991 à 1996 (en particulier, la baisse de l'inflation), les
explications du chômage persistant en Europe se sont focalisées,
dans les milieux gouvernementaux et les organisations internationales, sur les
problèmes d'offre et en particulier sur le poids des charges sociales.
Les charges sociales ont été jugées responsables de
l'alourdissement général du coût du travail, donc d'un
manque de compétitivité ; couplées avec l'existence
de salaire minimum dans la plupart des pays européens, elles
seraient responsables d'un niveau trop élevé du
coût du travail non qualifié ; enfin, pesant sur les salaires
nets, elles les rabaisseraient à un niveau trop faible, ne les
écartant pas suffisamment des revenus de remplacement (prestations
chômage, revenu minimum), de sorte que les travailleurs non
qualifiés préféreraient bénéficier des
revenus de remplacement plutôt que de travailler et seraient donc
plongés dans une trappe à pauvreté.
Il convient cependant de relativiser ce discours. Le choix que font la
société ou les salariés pris collectivement entre salaires
directs et salaires différés n'a aucune raison
a priori
d'augmenter le coût global du travail, du moins à moyen terme. Les
cotisations sociales financent des prestations, qui évitent aux
salariés d'avoir à supporter des dépenses d'assurances
maladie privées et des primes aux fonds de pensions.
L'élément redistributif, qui existe dans les systèmes
d'assurance universelle, bénéficie aux travailleurs les plus mal
payés et augmente donc leur salaire disponible à coût
salarial donné. Imaginons que dans un pays coexistent 100
travailleurs
payés 100 et 100 travailleurs payés
200. Un système d'assurance privée où chacun doit
cotiser
pour 15 est plus coûteux pour les plus mal
payés qu'un système d'assurance sociale où chacun verse
10 % de son salaire (10 pour les uns, 20 pour les autres).
Néanmoins, la stratégie d'allégement des
prélèvements sur les revenus salariaux mise en oeuvre a
comporté quatre éléments, d'importance variable selon les
pays.
La réduction de la croissance des dépenses de protection sociale
Les dépenses de protection sociale ont été gérées avec rigueur dans la plupart des pays de l'UE. Mais, globalement, elles sont passées de 25,5 % du PIB en 1990 à 27,6 % en 1999 ; soit une croissance moyenne de 2,4 % l'an, en terme réel par tête. Plusieurs pays (Suède, Italie, Royaume-Uni) ont adopté des dispositifs destinés à éviter la croissance des prestations publiques de retraites, mais ceux-ci ne jouent qu'à long terme. D'autres pays ont mis en oeuvre des politiques familiales ambitieuses pour enrayer leur déclin démographique. Enfin, les dépenses de santé ont progressé au taux de 2 % par an, en terme réel par tête. Les réformes drastiques sont apparues difficiles à mettre en oeuvre et peu populaires. Les perspectives démographiques en Europe ne permettront sans doute pas de ralentir substantiellement la croissance future de ces prestations.
La recherche de nouvelles ressources
A
prestations sociales données, il est possible de baisser les cotisations
sociales en dégageant d'autres sources de financement pour la
Sécurité sociale.
Le financement par les cotisations
sociales se justifie pour les prestations retraites, chômage et les
autres prestations de remplacement, liées au salariat. Il ne se justifie
pas pour les prestations famille, solidarité et maladie (si leur
couverture est universelle). La part des cotisations dans le financement des
prestations est passée, pour l'ensemble de l'Union,
de
67,1 % en 1990 à 60,6 % en 1999, soit 6,5 points de baisse
répartis entre 4,6 points de baisse pour les employeurs et 1,9 point
pour les salariés. Le mouvement a été
particulièrement sensible en Allemagne (baisse de 7 points, grâce
à la hausse de la fiscalité écologique), en France (baisse
de 13 points en raison de la CSG et des exonérations de cotisations
employeurs pour les bas salaires), en Italie (baisse de 12 points en raison de
la création de l'IRAP), au Portugal (baisse de 13 points).
Une telle politique a cependant ses limites. D'une part, il est souhaitable que
les cotisations réduites soient remplacées par une ressource
autonome, stable et pérenne et non par des subventions
discrétionnaires qui mettent en péril la fiabilité du
financement. D'autre part, remplacer des cotisations par un impôt sur les
revenus des ménages ne diminue la charge portant sur les actifs que si
ce nouvel
impôt frappe les revenus non liés à
l'activité, c'est-à-dire les revenus du capital et
éventuellement les revenus sociaux des ménages.
Or, il
devient difficile d'alourdir la charge portant sur les revenus du capital
financier (compte tenu du niveau atteint et du manque d'harmonisation fiscale
dans l'UEM) et les revenus sociaux (famille, chômage) sont souvent
déjà faibles ou gérés avec rigueur (retraite).
Pour un pays en situation de chômage de masse, changer l'assiette des
cotisations employeurs pour passer d'une assiette
« salaires » à une assiette « valeur
ajoutée » a l'avantage d'inciter les entreprises à
utiliser plus de main-d'oeuvre et moins de machines et de favoriser les
entreprises de main-d'oeuvre. Seule l'Italie a mis en oeuvre cette
réforme. La France l'a mise à l'étude, puis y a
renoncé de crainte qu'une telle mesure ne frappe trop les secteurs les
plus capitalistiques
44
(
*
)
.
Une baisse ciblée des cotisations employeurs
Réduire spécifiquement les cotisations employeurs sur les plus bas salaires peut être justifié par trois arguments :
-
Il existe actuellement un problème spécifique de chômage
pour les travailleurs non qualifiés : ceux-ci sont
particulièrement concurrencés par les productions des pays
à bas salaires ; ils sont les victimes du progrès technique
et de la substitution du capital au travail qui font disparaître leurs
emplois dans l'industrie et dans certains services. Au contraire, les
salariés qualifiés sont proches du plein emploi. Toute relance se
heurterait au manque de personnel qualifié avant qu'un niveau d'emploi
satisfaisant ne soit atteint pour l'ensemble des salariés.
Une cause essentielle du chômage en Europe est le niveau du salaire minimum (et du revenu minimum) qui empêche une baisse suffisante du salaire des non qualifiés. De nombreux travailleurs non qualifiés ont une productivité du travail inférieure au coût du salaire minimum charges comprises et ne seraient employables que si ce coût était diminué. La baisse des cotisations sociales employeurs est socialement préférable à la baisse du salaire minimum, puisque le niveau de vie des travailleurs non qualifiés n'est pas affecté.
Une mesure ciblée est plus efficace en termes d'emplois gagnés à coût budgétaire donné qu'une mesure globale. Il coûte moins cher de réduire de 10 % le coût d'un salarié à bas salaire que le coût d'un cadre.
Durant la décennie 1990, ce type de mesures a été mis en oeuvre de façon importante pour les travailleurs à bas salaires en Belgique, en France, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni. Elle aurait réussi à y stopper la baisse continuelle du nombre d'emplois non qualifiés, mais semble avoir aussi encouragé l'extension des emplois à temps partiel.
Elle fait courir deux risques. Si elle est peu efficace, elle crée peu d'emplois et doit être financée : un financement par hausse des impôts portant sur les ménages peut entraîner une baisse de la demande et augmenter le chômage keynésien. Les entreprises sont incitées à créer des emplois non qualifiés (ce qui est nuisible si le degré de qualification de la population active tend à augmenter) et à refuser toute hausse de salaire et toute évolution de carrière pour les salariés qui occupent ces emplois, puisque la hausse de leur salaire, qui fait perdre les allègements de cotisations, est très coûteuse : c'est la trappe à bas salaires.
En tout état de cause, cette mesure est théoriquement plus efficace pour créer des emplois non qualifiés, que la baisse de la TVA sur certains services à forte intensité en main-d'oeuvre, qui a été autorisée par le Conseil européen et mise en oeuvre par la plupart des pays européens, mesure qui a le défaut de ne s'appliquer qu'à certains secteurs et de favoriser toutes les entreprises de ces secteurs indépendamment de leur choix de techniques de production.
Une hausse ciblée des revenus des travailleurs non qualifiés
Dans les
années 1990, suivant l'exemple américain, l'accent a
été mis sur les problèmes d'incitation au travail des
travailleurs non qualifiés. Le développement du chômage de
masse et de la pauvreté a fait que de nombreux travailleurs n'ont
trouvé d'autre solution que d'accepter des emplois à mi-temps
rémunérés au salaire minimum. Ce genre d'emploi ne leur
permettait pas d'obtenir un niveau de vie supérieur à celui que
la société jugeait nécessaire d'offrir aux personnes sans
emploi, tout particulièrement s'agissant de personnes avec charge
d'enfants. Alors que le plus souvent, c'est le manque d'emplois disponibles qui
les empêche de travailler ; alors que l'urgence aurait dû
être de leur offrir des emplois à temps plein avec un salaire leur
permettant d'éviter la pauvreté (et d'ailleurs la
stratégie de baisse des cotisations employeurs allait dans ce sens et
elle aurait été d'autant plus efficace qu'elle aurait
été combinée avec une politique de croissance, qui aurait
aspiré vers le haut des travailleurs qualifiés qui avaient
dû se résigner à accepter des emplois peu
qualifiés), un certain consensus s'est fait pour mettre en cause la
générosité du système de protection sociale, qui
serait responsable du manque d'incitation de ces personnes à travailler.
Pourtant, il n'y a guère de preuves empiriques qu'il existe un vaste
stock d'emplois vacants disponibles pour des travailleurs non qualifiés
qui préféreraient vivre de ressources d'assistance.
Ce diagnostic aurait pu induire des stratégies de diminution des minima
sociaux. Heureusement, ce ne fut pas le cas. Certes, les minima sociaux ont
été gérés avec rigueur, mais les réformes
principales ont surtout consisté à offrir des prestations
supplémentaires aux travailleurs non qualifiés pour creuser
l'écart de leur niveau de vie avec celui des bénéficiaires
des prestations d'assistances. La plupart des pays ont réformé
leur barème de l'impôt en augmentant le seuil d'imposition et en
réduisant le taux le plus bas. Certains
ont instauré des
crédits d'impôt remboursables aux travailleurs à faibles
ressources dont la logique se rapproche de celle de l'impôt
négatif. Le Royaume-Uni
a montré la voie à
l'utilisation de ce principe déjà largement pratiqué aux
Etats-Unis. La France, la Belgique et les Pays-Bas ont suivi le mouvement. La
France a également modifié les règles d'attribution de
certaines prestations pour éviter les effets de seuil. Néanmoins,
l'ampleur et l'ambition de ces réformes sont restées modestes au
regard des mécanismes mis en place dans les pays anglo-saxons,
l'efficacité de ce type de mécanisme dépendant
largement de la situation et des modes de régulation du
marché du travail, sensiblement différents en France et en
Belgique (en situation de chômage de masse) et dans les pays anglo-saxons
(plus proches du plein emploi).
Même si le diagnostic est contestable, ces mesures ont l'avantage
d'augmenter quelque peu le revenu disponible des familles de travailleurs
pauvres. Elles ont par contre le défaut de compliquer encore le
système fiscal, la plupart des pays n'ayant pas choisi une mesure simple
(une baisse des cotisations sociales pour les salariés mal
rémunérés), mais une mesure fiscale (qui tient compte de
la situation familiale) de sorte que la mesure est à la fois une mesure
d'incitation à l'emploi et une mesure de lutte contre la
pauvreté. Dans ce dernier rôle, elle est bizarrement conçue
puisque la prestation augmente d'abord d'un revenu d'activité nul
à un revenu d'activité correspondant à un plein emploi au
salaire minimum (pour inciter à l'emploi) puis décroît pour
des salaires plus élevés.
Une mesure plus large et plus simple, comme une Allocation compensatrice de
revenu, aurait sans doute permis de mieux jouer les deux rôles
simultanément. Elle aurait été maximale pour un revenu
d'activité nul, puis aurait décrû linéairement de
sorte que sur 100 euros de revenus supplémentaires 50 seraient
restés au travailleur. Aucun pays ne s'est vraiment engagé dans
cette voie. Le point délicat est qu'une telle allocation subventionne,
et donc rend acceptable, des situations d'emplois à temps partiel. En
sens inverse, on peut penser que le développement des emplois à
mi-temps doit être enrayé, que ceux-ci doivent être
réservés à des cas particuliers (étudiants,
travailleurs seniors, parents d'enfants en bas âge) et que l'objectif
doit être de permettre à chacun de trouver un emploi à
temps plein
45
(
*
)
.
La coexistence dans de nombreux pays d'un mécanisme de salaire minimum,
d'exonération de cotisations employeurs et de crédit
d'impôt pour les bas salaires permet aux pouvoirs publics de gérer
à la fois, et de manière quasi indépendante, le coût
du travail et le niveau de vie des travailleurs non qualifiés. En sens
inverse, le risque existe de créer une catégorie
particulière d'emplois coupés du reste des salariés,
victimes de la
trappe à bas salaires, à temps de travail
réduit et flexible, et sans perspective de carrière.
La fiscalité écologique
Bien que
les préoccupations environnementales aient considérablement
progressé dans les opinions publiques européennes, l'instauration
puis la montée en puissance des taxes écologiques ou
écotaxes, ont été relativement tardives et leur poids
demeurent modestes. Certes tous les pays prélèvent depuis
longtemps des taxes spécifiques sur les consommations de certains
produits à l'origine d'émissions polluantes, au premier rang
desquels figurent les carburants à base d'hydrocarbures fossiles. Ces
droits d'accise ont été sensiblement alourdis au cours de la
décennie passée dans tous les pays européens pour inciter
aux économies d'énergie et limiter l'augmentation des
émissions polluantes. Mais, face à la hausse des cours du
pétrole en 1999-2000, le souci d'en limiter les conséquences
inflationnistes et, dans de nombreux pays, de répondre au
mécontentement populaire et des professions directement
concernées par l'augmentation des prix des carburants a incité
certains gouvernements européens à alléger un peu la
pression fiscale sur ces assiettes et, dans le cas de la France, à
mettre en place un dispositif de lissage.
Les écotaxes proprement dites, c'est-à-dire les taxes
générales sur les activités polluantes, n'ont
commencé à jouer un rôle notable que très
récemment, et dans un nombre limité de pays européens,
à commencer par les Pays-Bas. Ce type d'instruments répond
à la logique du « double dividende » : d'une
part, la taxation de l'usage de produits à l'origine d'émissions
polluantes -- et notamment de gaz à effets de serre, pour la
réduction desquels l'UE s'est engagée, en signant le Protocole de
Kyoto, et de polluants des nappes phréatiques, comme les nitrates et les
pesticides d'origine agricole -- incite leurs utilisateurs à en
réduire les quantités, selon le principe pigouvien de taxation du
pollueur ; d'autre part le surcroît de recettes ainsi procuré
permet de réduire, en compensation, d'autres prélèvements,
notamment d'alléger les charges sociales pesant sur les salaires. C'est
ainsi que plusieurs pays, dont l'Allemagne, ont entrepris de substituer des
écotaxes, dont le taux et le champ d'application font l'objet d'une
montée en puissance progressive et programmée, à des
cotisations sociales.
En dépit des avantages de ces prélèvements, leur
généralisation se heurte à de nombreuses
résistances et à des obstacles indéniables. Les
prélèvements sur les carburants sont, dans la plupart des pays,
déjà à des niveaux élevés et impopulaires,
ce qui rend les alourdissements plus difficiles politiquement. En outre, les
activités productives directement affectées par les taxes
générales sur les activités polluantes cherchent -- et
parviennent généralement -- à obtenir des
exonérations ou des allégements, de sorte que l'efficacité
du dispositif et son rendement sont faibles et souvent au prix d'une
complexité élevée. Enfin, ces écotaxes
pèsent sur les coûts moyens de production des activités les
plus polluantes, ce qui nuit à leur compétitivité et
risque d'entraîner leur délocalisation. Ces difficultés
peuvent être en partie résolues, ou du moins
atténuées, par des mécanismes de compensation, puisque
c'est l'alourdissement du coût
marginal
de l'usage des produits
visés qui doit inciter à en limiter la demande. Mais ces
compensations ne peuvent être complètes, sauf à introduire
des procédures lourdes et complexes d'évaluation des
coûts ; et les compensations globales, comme celles auxquelles
aboutissent les allégements de charges sociales par exemple, engendrent
inévitablement une redistribution du poids des
prélèvements entre les producteurs. Dans ces conditions, des
progrès ultérieurs dans la généralisation des
écotaxes sont peu probables aussi longtemps que la stratégie de
lutte contre les pollutions n'aura pas fait l'objet de choix clairs et que la
l'harmonisation européenne n'aura pas permis d'en limiter les effets en
termes de compétitivité.
La fiscalité locale
Presque
tous les pays européens ont, au cours de la décennie
passée, élargi les compétences de leurs
collectivités territoriales en matière de dépenses. Ce
mouvement de décentralisation, plus ou moins marqué selon les
pays, n'a toutefois pas été reflété partout dans un
accroissement du poids de la fiscalité locale au sens strict, ce qui
montre que les réponses apportées aux exigences d'autonomie
financière des collectivités locales varient
considérablement selon les pays
46
(
*
)
.
L'une des difficultés majeures en matière de fiscalité
locale provient du conflit inévitable qui existe entre l'autonomie
locale, qui engendre nécessairement la diversité, et les
objectifs nationaux de la politique fiscale, qu'il s'agisse de justice sociale
et de redistribution ou de choix de politique économique, tel que
l'allégement des prélèvements sur les salaires. A cela
s'ajoutent les problèmes spécifiques que posent la
mobilité des assiettes fiscales à l'échelle de
découpages territoriaux qui, dans certains pays, dont la France, peuvent
être très fins : la concurrence fiscale est sans doute plus
vive entre collectivités locales d'une même agglomération
ou bassin d'emploi qu'entre pays.
Dans la plupart des pays européens où des responsabilités
importantes sont confiées aux collectivités locales, aux
communautés autonomes (Espagne) ou aux Etats
fédérés (Allemagne, Autriche, Belgique) en matière
de dépenses publiques, notamment d'investissement, de santé et
d'éducation, la modalité dominante de financement est le partage,
selon des clés prédéfinies, des recettes d'impôts
nationaux à fort rendement, tels que la TVA ou l'impôt sur le
revenu des personnes. Cependant, dans la presque totalité des pays
européens, les collectivités locales prélèvent
également des impôts sur les assiettes peu mobiles, notamment des
impôts fonciers. L'imposition locale des entreprises continue
d'être pratiquée dans une minorité de pays membres,
même si son assiette a été, presque partout, sensiblement
remaniée pour éviter les problèmes de concurrence fiscale
ou des conflits avec les objectifs nationaux de la politique fiscale -- comme
c'est le cas avec la suppression de la part salariale de l'assiette de taxe
professionnelle en France ou des réformes de l'impôt local sur les
entreprises en Allemagne et en Italie. Le mouvement de regroupement communal
lancé en France depuis les lois Voynet et Chevènement, la
généralisation de la taxe professionnelle de zone qui
l'accompagne, n'ont pas d'équivalent ailleurs en Europe, où les
problèmes de structures et d'empilement sont généralement
moindres et ont souvent été réglés depuis longtemps.
Les transferts en provenance du budget central représentent, dans de
nombreux pays, une source importante de financement des dépenses
publiques locales. Ils ont l'avantage de permettre une
péréquation des ressources entre collectivités. Celle-ci
est le préalable indispensable à une décentralisation
audacieuse des compétences et à l'autonomie des
collectivités locales en matière de taux de
prélèvement sur les assiettes qui leur sont octroyées.
Faute d'une péréquation financière suffisante, en effet,
les disparités de prélèvements sur les ménages ou
les écarts de services publics locaux qui leur sont offerts apparaissent
particulièrement injustes, tandis que les écarts de
prélèvements sur les activités productives engendrent des
phénomènes cumulatifs de concentration spatiale et de
désertification. Si les transferts compensent la quasi-totalité
des disparités de potentiel fiscal
ex ante
des
collectivités locales, une décentralisation poussée peut
être compatible avec le maintien de l'équité sur l'ensemble
du territoire national..
Un modèle fiscal européen ?
Dans chaque pays, la structure et le poids du système fiscal
reflètent des choix économiques, sociaux et politiques
effectués par la collectivité nationale ; ce sont les
résultats des circonstances historiques ayant prévalu lors de sa
construction et à chaque étape de son évolution. Chaque
Etat membre de l'UE présente des spécificités ; c'est
en ordre fiscal dispersé que les pays se sont présentés au
début des années 1990, au départ de la construction du
Marché unique et de l'UEM. Une plus grande ouverture des
frontières dans une situation caractérisée par un
assemblage non organisé de systèmes fiscaux différents est
susceptible de générer des mouvements de personnes et de capitaux
physiques et financiers motivés par des considérations fiscales.
Ces mouvements peuvent réduire la capacité des Etats membres
à organiser la redistribution et à financer leurs dépenses
publiques. Ils peuvent générer aussi une ré-allocation non
efficace des ressources. Sont concernés principalement le comportement
migratoire des entreprises et des actifs hautement
rémunérés et la circulation du capital physique ou
financier. Certes, la Commission et le Conseil ont avant même l'ouverture
de 1993, et tout au long de la décennie, élaboré un
certain nombre de directives (par exemple les directives TVA) visant à
éviter les cas les plus flagrants de non-neutralité fiscale.
Malgré cela, la construction fiscale européenne reste encore
largement en chantier. Les décisions qui seront prises dans la prochaine
décennie auront de fait une influence considérable sur le devenir
de l'Europe fiscale.
En la matière, le principe de subsidiarité continue à
prévaloir. Il ne s'agit pas, dans l'état actuel des choses, et
tant que les citoyens n'auront pas décidé de passer à une
Europe fédérale, d'organiser une fiscalité unifiée
à l'échelle européenne. Chaque pays reste libre de son
niveau de dépenses publiques, donc de recettes fiscales ; de son
degré de redistribution entre ses résidents ; de l'organisation
de son système de protection sociale. Cependant, certaines
décisions seront plus efficaces si elles sont prises à
l'échelle européenne ; par ailleurs, la liberté doit
être organisée. Ce doit être l'objectif de l'harmonisation
fiscale que de permettre aux pays de pouvoir jouir des degrés de
liberté nécessaire. Reste que l'Europe fiscale devra vivre
longtemps dans une tension entre le désir d'autonomie de chaque pays,
son souci de maintenir son droit à décider de sa politique
fiscale, de garder sa liberté d'innover et la nécessité de
l'harmonisation
47
(
*
)
.
Le projet de directive sur la taxation des revenus de l'épargne va dans
le bon sens. Reconnaissant le principe de résidence, il permet à
chaque pays d'appliquer la fiscalité de son choix sur les revenus de ses
résidents en organisant les circuits d'information nécessaire.
La taxation des revenus des ménages peut pour le reste demeurer purement
nationale. Restent deux points délicats. Il faut éviter des
pratiques de concurrence fiscale dommageables et contraire au principe de
résidence, par exemple que certains pays accordent des régimes
dérogatoires aux résidents de fraîche date, ayant des
revenus d'origine étrangère. L'exode fiscal demeurera certes
possible pour les individus à patrimoines élevés ou les
actifs à très forts revenus, mais devrait rester limité,
compte tenu des coûts induits par l'obligation de changer durablement de
pays de résidence. Toutefois, sa possibilité obligera sans doute
les pays à limiter quelque peu la taxation des plus hauts revenus et
patrimoines. L'instauration d'un taux supérieur minimal est, de toute
évidence, impossible en Europe actuellement, mais les pays devraient
s'accorder sur la nécessité de lutter contre les paradis fiscaux
extra-communautaires.
La protection sociale doit, elle aussi, rester purement nationale, tant que la
vie sociale, les organisations syndicales et les négociations sociales
restent organisées à l'échelon national. La
disparité des systèmes est aujourd'hui extrême en
matière de retraite, de prestations chômage, d'assurance-maladie.
Le risque est que, sous prétexte de liberté de concurrence et
d'établissement, les assurances privées n'obtiennent le droit de
concurrencer les systèmes publics à composante redistributive.
Aussi, les pays concernés devraient-ils clairement déclarer que
les régimes d'assurance sociale qui ont des objectifs sociaux ou de
redistribution sont obligatoires et échappent au principe de la libre
concurrence. En même temps, chaque pays a la responsabilité propre
de mettre en place un système suffisamment attractif pour être
compétitif à l'échelle européenne tout en restant
suffisamment redistributif. Bien sûr, la tâche sera
facilitée si des normes sociales sont définies à
l'échelle européenne : revenu minimal, minimum vieillesse,
retraite minimale, prestations familiales (tous quatre en pourcentage du revenu
moyen dans chaque pays), couverture maladie de base universelle. Mais c'est un
choix politique que de décider si ces exigences font partie du
modèle européen
48
(
*
)
.
Théoriquement, chaque pays peut décider de sa propre
fiscalité écologique et utiliser les fonds ainsi
dégagés pour réduire la charge portant sur le travail.
Mais une stratégie purement nationale trouve vite ses limites : il
est difficile d'augmenter la charge portant sur un secteur industriel
donné si ses concurrents ne subissent pas les mêmes contraintes.
De plus, les effets favorables sont diffus. Aussi, peut-on penser que c'est un
domaine où la stratégie doit rapidement devenir communautaire. En
sens inverse, ceci ne favorise pas la prise de conscience nationale de la
nécessité d'agir. La fiscalité écologique
apparaît comme une contrainte bruxelloise, que les gouvernements
abandonnent vite face aux lobbies sectoriels.
Le cas le plus délicat est celui de l'impôt sur les
sociétés. Une assiette commune serait nécessaire, mais les
pays veulent garder le droit de mettre en oeuvre des mesures spécifiques
(aide à l'investissement, à la recherche-développement,
à l'innovation, etc.). La Commission a pris le parti de ne juger comme
réellement préjudiciable que les régimes fiscaux ayant un
caractère dérogatoire. Elle s'est refusée à imposer
un taux minimal
49
(
*
)
. Le
démantèlement complet des régimes dérogatoires
serait déjà un progrès important. Le refus d'uniformiser
les taux d'imposition ne laisse comme stratégie d'harmonisation
disponible que le principe de l'imposition à la source
50
(
*
)
. Chaque entreprise doit payer
l'impôt sur les sociétés sur les profits
réalisés dans chacun des pays où elle exerce son
activité. Sinon, le principe d'imposition à la résidence
induirait une concurrence fiscale destructrice, chaque entreprise pouvant
déplacer son siège social dans le pays le moins taxant. De plus,
un accord entre les pays membres est nécessaire sur les principes de
taxation des dividendes, en particulier sur l'avoir fiscal. Sinon,
l'unification du marché financier européen serait
entravée, les ménages des pays membres devant faire leurs choix
d'investissements en Bourse en fonction de considérations fiscales.
L'accord pourrait comporter la généralisation du système
de l'avoir fiscal, chaque pays pourrait alors choisir librement la taxation des
dividendes reçus par ses résidents selon le principe de
subsidiarité et la neutralité de l'imposition vis-à-vis du
choix du pays d'investissement serait assurée. En sens inverse, il
pourrait comporter la suppression de l'avoir fiscal, mais la neutralité
vis-à-vis du pays d'investissement ne serait pas assurée.
Malheureusement, il n'existe pas de solutions simples, ni dans le domaine de la
réforme fiscale, ni dans celui de l'harmonisation. Il n'y a pas de
grande réforme fiscale, mais des retouches qui cherchent à
améliorer l'équité et le fonctionnement de
l'économie, qui souvent compliquent au lieu de simplifier.
Jusqu'à présent, les pays européens semblent avoir
réussi à préserver le niveau de redistribution et de
dépenses publiques qu'ils souhaitaient. Par ailleurs, l'Europe fiscale
devra vivre longtemps dans cette contradiction entre des marchés du
capital et des biens qui s'unifient rapidement, des fiscalités (et plus
généralement des structures budgétaires, sociales et
politiques) qui restent nationales. Ceci rend difficiles les grands
progrès.
Références bibliographiques
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concurrence fiscale en Europe: une contribution au débat »,
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, n° 483, juillet.
STERDYNIAK H., M.-H. BLONDE, G. CORNILLEAU, J. LE CACHEUX et J. LE DEM,
1991 :
Vers une fiscalité européenne
, Paris :
Economica.
STERDYNIAK H. et P. VILLA, 1998 « Pour une réforme du
financement de la Sécurité sociale»,
Revue de l'OFCE
,
n° 67, octobre.
Chapitre
I : Fiscalité européenne, l'état des lieux
Réjane Hugounenq et Henri Sterdyniak
Les pays
de l'Union européenne sont caractérisés par des taux de
prélèvement obligatoire élevés, 40,8 % en
moyenne, supérieurs de plus de 10 points aux niveaux japonais et
américain. La mondialisation n'a jusqu'à présent pas
privé les pays européens de ressources. Au sein de l'UE, les pays
dont le TPO est le plus élevé sont la Suède, le Danemark,
la Finlande, la Belgique et la France. A l'autre extrémité du
spectre se trouvent le Royaume-Uni, l'Irlande et les pays du Sud (Espagne,
Grèce, Portugal). Les différences de TPO reflètent
essentiellement les choix du montant des dépenses collectives
(éducation, santé) et des prestations sociales. Comparée
aux Etats-Unis, l'UE se caractérise par le poids important des
cotisations sociales et des taxes sur les produits (TVA). Par contre, le poids
de l'impôt sur le revenu des ménages est plus faible. Les pays
européens s'étagent entre les pays très centralisés
où le gouvernement central prélève plus des 2/3 des
recettes (Irlande, Royaume-Uni, Grèce, Portugal, Luxembourg, Danemark)
et des pays peu centralisés : Allemagne, en raison du poids des
Länder, Belgique en raison de sa division linguistique, France en raison
du poids de la Sécurité sociale, Suède en raison du poids
des communes.
Ce chapitre présente les niveaux d'imposition et leur évolution
depuis le début des années 1990 pour les pays membres de l'Union
européenne (UE) auxquels nous avons ajouté les Etats-Unis et le
Japon à titre de comparaison. Il analyse aussi des indicateurs de la
structure de la fiscalité comme l'assiette des
prélèvements et l'administration perceptrice.
Le niveau d'imposition est appréhendé par le taux de
prélèvement obligatoire (TPO) tel qu'il est mesuré par
l'OCDE, soit les impôts et les cotisations sociales obligatoires en
pourcentage du PIB (Notes de méthode).
Dans chaque pays, le taux de prélèvement obligatoire
reflète fondamentalement le poids des dépenses publiques, compte
tenu cependant des recettes non fiscales, des charges d'intérêt,
du déficit public. Aussi, fournissons-nous plusieurs indicateurs du
poids des dépenses publiques, qui permettent d'expliquer les
différences de taux de prélèvement obligatoire.
Notes de méthodes
Les
données présentées ici sont essentiellement issues des
Statistiques des recettes publiques
de l'OCDE. Sous le terme de
« prélèvements obligatoires », l'OCDE
regroupe en principe l'ensemble des versements obligatoires (y compris
cotisations sociales) effectués sans contrepartie au profit des
administrations publiques.
Les administrations publiques comprennent les autorités supranationales
(institutions de l'Union européenne), les administrations centrales,
régionales et locales, les entités publiques autonomes
(églises dans certains pays), à l'exception des entreprises
publiques, et les organismes de Sécurité sociale. Un certain flou
existe quant à l'appartenance aux secteurs des administrations publiques
de certains organismes d'assurance maladie ou d'assurance retraite. Les
mutuelles ne font pas partie des administrations publiques (dans la mesure
où l'adhésion y est facultative). Les fonds de pension par
capitalisation n'y figurent pas, sauf dans certains pays où ils sont
obligatoires et socialement contrôlés (Finlande, par exemple). Les
régimes obligatoires y figurent, même s'ils sont juridiquement
gérés par le secteur privé (pour la France, Unedic, Arrco,
Agirc).
L'expression de « sans contrepartie » exclut en principe
les versements qui ouvrent des droits à des prestations proportionnelles
aux versements. C'est ainsi que ne sont pas considérées comme
prélèvement obligatoire certaines taxes qui sont le paiement d'un
services rendu (passeports, redevance radio-télévision, amendes,
etc.). Par contre, en dérogation à ce principe, sont
comptabilisées dans les prélèvements obligatoires toutes
les cotisations obligatoires, même si elles donnent droit à des
prestations plus ou moins directement liées aux cotisations
versées (en matière de retraite ou de chômage).
Les cotisations volontaires sont exclues des prélèvements
obligatoires de même que les cotisations obligatoires mais versées
à des organismes extérieurs au secteur des administrations
publiques (dans les pays où les salariés sont obligés de
s'assurer, mais peuvent le faire auprès de leurs entreprises ou d'une
assurance privée). Enfin, les cotisations fictives ne sont pas
comptabilisées dans les prélèvements obligatoires :
la création d'une caisse de retraite pour les fonctionnaires augmente
donc le taux de prélèvement obligatoire.
Les données de l'OCDE sont comptabilisées sur la base des
versements effectivement reçus par les administrations. Elles tiennent
donc compte des dispositions fiscales particulières : crédit
d'impôts, avoir fiscal, par exemple. De façon
générale, les recettes sont nettes des dépenses fiscales.
Le taux de prélèvement obligatoire est donc plus faible pour les
pays qui offrent des ristournes de cotisations sociales au lieu de subventions
à l'emploi, des crédits d'impôt aux familles plutôt
que des prestations familiales, des primes à l'emploi plutôt des
subventions aux travailleurs peu qualifiés, des ristournes à
l'impôt sur les sociétés plutôt que des subventions
à l'investissement, etc. De même, ce taux est fictivement plus
faible dans les pays qui exonèrent les retraites et les chômeurs
de cotisations ou d'impôt, mais qui tiennent compte de cette
exonération dans le calcul des prestations.
Enfin, pour ce qui est de la structure d'imposition, l'OCDE classe les recettes
fiscales en fonction de leur assiette : revenus, salaires, patrimoine,
biens et services etc., et non en fonction de leurs répercussions
économiques.
I. Les taux de prélèvement obligatoire des pays de l'UE
En 2000, les pays de l'UE restent caractérisés par des taux de
prélèvement obligatoire élevés, 40,8 % en
moyenne, supérieurs de plus de 10 points aux niveaux japonais et
américain (tableau 1). Globalement, les taux de
prélèvement obligatoire ont légèrement
augmenté (de 1,8 point en moyenne). La mondialisation n'a jusqu'à
présent pas obligé les pays européens à se priver
de ressources. En dépit d'un certain rapprochement, les divergences
entre pays de l'UE restent fortes.
Au sein de l'UE, les pays dont le ratio recettes fiscales sur PIB est le plus
élevé sont la Suède, le Danemark, la Finlande, la Belgique
et la France. A l'autre extrémité du spectre se trouvent le
Royaume-Uni et l'Irlande ainsi que les pays du Sud (Espagne, Grèce,
Portugal). Pour l'année 2000, l'écart entre le pays dont le taux
est le plus élevé et celui dont le taux est le plus bas est de
près de 22 points de PIB. Les cinq pays où le taux de
prélèvement obligatoire est le plus élevé avaient
un TPO de 46,3 % en 1990 ; il est passé à 47,9 %
en 2000 ; les cinq pays où le TPO est le plus faible avaient un TPO
de 32,2 % en 1990 ; il est monté à 35,4 % en 2000.
La mise en application du traité de Maastricht et du Pacte de
stabilité a généré, de la part des gouvernements
européens, des efforts pour réduire le déficit public.
Ceux-ci sont passés par la baisse relative des dépenses publiques
(investissement public, effectifs du secteur public, gestion rigoureuse des
prestations sociales, etc.) mais aussi par une certaine hausse de la
fiscalité. De 1990 à 2000, les taux de prélèvement
ont augmenté en Europe, de 1,8 point en moyenne
51
(
*
)
. Seuls, l'Irlande et les
Pays-Bas ont vu leur taux de prélèvement diminuer respectivement
de 2 et 1 points. Par contre, la hausse du taux de prélèvement
obligatoire a été particulièrement forte pour la
Grèce (8,7 points), l'Italie (3,4 points) et le Portugal (5,3 points).
Les dix années ont été marquées par un certain
rapprochement des taux de prélèvement, en raison du rattrapage
des pays du Sud. L'Irlande n'a pas participé à ce
rattrapage : ayant bénéficié sur la décennie
1990 d'une croissance exceptionnelle (qui a culminé à 9 % en
moyenne entre 1994 et 2000), elle a mis en place des programmes
d'allègements fiscaux, notamment sur le revenu, destinés à
compenser la faible évolution des salaires avant impôts.
Graphique 1 :Taux de prélèvement obligatoire
En % du
PIB
Source : OCDE,
Statistiques des recettes publiques
, 2001.
Graphique 2 : Taux de prélèvement obligatoire
En %
Source : OCDE, Statistiques des recettes publiques , 2001.
Tableau 1 : Les prélèvements obligatoires en pourcentage du produit intérieur brut
Pays |
1990 |
2000 |
Suède |
53,6 |
53,3 |
Danemark |
47,1 |
48,4 |
Finlande |
44,7 |
46,5 |
Belgique |
43,2 |
46,0 |
France |
43,0 |
45,5 |
Pays-Bas |
42,8 |
41,8 |
Luxembourg |
40,5 |
42,0 |
Autriche |
40,5 |
43,3 |
Italie |
38,9 |
42,3 |
Allemagne |
36,8 (1) |
37,8 |
Royaume-Uni |
35,9 |
37,7 |
Irlande |
33,5 |
31,5 |
Espagne |
33,0 |
35,3 |
Portugal |
29,4 |
34,7 |
Grèce |
29,3 |
38,0 |
UE pondérée |
39,0 |
40,8 |
Japon |
30,7 |
27,1 |
Etats-Unis |
26,7 |
28,9 (2) |
(1) 1991
; (2) 1999.
Source : OCDE,
Statistiques des Recettes publiques
, 2001.
Un classement qui diffère selon les sources mais des écarts qui subsistent
Les recettes fiscales évaluées par l'OCDE dans son document Statistiques des recettes publiques différent de celles que l'on peut calculer dans les Comptes nationaux. Ces divergences ont trois causes : les Comptes nationaux incluent les cotisations sociales volontaires aux administrations privées (mais, cette divergence est corrigeable, tableau 2) ; le document de l'OCDE utilise parfois des chiffres périmés (tant en ce qui concerne l'évaluation du PIB que celle de certaines recettes) ; enfin, les comptables nationaux peuvent reclasser certaines dépenses fiscales en impôts. L'écart est particulièrement marqué pour l'Allemagne, et à un moindre degré pour le Portugal et le Royaume-Uni.
Tableau 2 : Comparaison des taux de prélèvement obligatoire selon les Statistiques des recettes publiques et Comptes nationaux des pays de l'OCDE
1999, en point de PIB |
Taux de prélèvement obligatoire |
Cotisations volontaires |
Ecarts non expliqués |
|
SRP (1) |
CN (2) |
(3) |
(2)-(1)-(3) |
|
Allemagne |
37,7 |
42,7 |
1,18 |
3,8 |
Autriche |
43,9 |
44,3 |
0,10 |
0,3 |
Belgique |
45,7 |
46,3 |
0,00 |
0,6 |
Danemark |
50,4 |
50,8 |
0,04 |
0,3 |
Espagne |
35,1 |
35,2 |
|
0,1 |
Finlande |
46,3 |
46,3 |
0,29 |
- 0,3 |
France |
45,9 |
45,8 |
|
- 0,1 |
Royaume-Uni |
36,3 |
38,1 |
0,00 |
1,8 |
Grèce |
37,1 |
37,6 |
|
0,5 |
Irlande |
32,3 |
32,6 |
|
0,3 |
Italie |
43,3 |
43,3 |
|
0,0 |
Luxembourg |
41,8 |
42,6 |
|
0,8 |
Pays-bas |
42,1 |
42,3 |
|
0,2 |
Portugal |
34,3 |
36,8 |
|
2,3 |
Suède |
52,2 |
53,0 |
|
0,8 |
Sources : OCDE, Statistiques des recettes publiques et Comptes nationaux des pays de l'OCDE, tableaux détaillés, volume II - 1988-1999 , 2001.
Royaume-Uni : une analyse plus fine
Il
existe trois sources pour le taux de prélèvement
obligatoire : les
Statistiques des recettes publiques
de l'OCDE
(SRP), 2001 (qui donnent 36,3 % pour 1999) ; les
Comptes nationaux
des pays de l'OCDE, tableaux détaillés, volume II,
2001 (qui
donnent 38,1 %) ; enfin, les Comptes nationaux de source britannique,
The Blue Book
, 2001 (qui donnent 37,2 %).
Ces différences ont deux causes (tableau 3) :
-
1)
Des différences de concepts
: les Comptes nationaux de
l'OCDE incorporent les cotisations volontaires aux administrations ; les
autres sources non.
2) Des différences de mesures . : la publication SRP a fait une erreur de 4 milliards en recopiant le chiffre « taxe sur le tabac ». De façon générale, ses chiffres sont un peu plus anciens et n'intègrent pas les dernières révisions des Comptes nationaux. La Comptabilité nationale britannique a augmenté le PIB de 1,1 % dans sa dernière évaluation, ce qui diminue le TPO.
Conclusion : Le bon chiffre est celui de la comptabilité nationale britannique soit 37,2 % selon les concepts de l'OCDE. Il monte à 38,7 % si on ajoute les contributions volontaires aux administrations publiques et les contributions obligatoires aux organismes privés.
Tableau 3 : Comparaison de trois sources sur les impôts au Royaume-Uni
En
milliards de livres
|
SRP - OCDE |
Comptes nationaux - OCDE |
Comptes nationaux - ONS |
Impôts sur les produits |
123,5 |
130,3 |
131,0 |
Impôts sur les revenus |
142,9 |
145,5 |
145,3 |
Cotisations sociales |
55,2 |
56,6 |
56,6 |
Cotisations volontaires |
|
5,0 |
|
Impôts sur le capital |
2,0 |
2,0 |
2,0 |
Total |
323,6 |
339,4 |
334,9 |
PIB |
891 |
891 |
901 |
Taux de PO |
36,3 |
38,1 |
37,2 |
Sources : OCDE,
Statistiques des recettes publiques
et
Comptes nationaux des pays de l'OCDE, tableaux détaillés,
volume II - 1988-1999
, 2001 ; ONS,
United Kingdom National
Accounts
,
The Blue Book
, édition 2001.
II. Les recettes et les dépenses
Comment expliquer les écarts de prélèvements entre les
différents pays ? Quels choix reflètent-ils et peut-on en
inférer un modèle européen ? Le tableau 4
détaille les comptes des administrations publiques ce qui permet
d'obtenir une vision globale de l'utilisation des prélèvements
obligatoires pour chaque pays. Les dépenses publiques sont
financées par les prélèvements obligatoires mais aussi par
les recettes non fiscales et les déficits.
Ici aussi, l'enregistrement des dépenses publiques effectué par
la Comptabilité nationale ne reflète pas
l'intégralité des interventions économiques et sociales de
l'Etat et plus généralement de la Nation. Si les TPO ne prennent
pas en compte les dépenses fiscales, les dépenses publiques n'en
tiennent elles non plus pas compte.
Certains avantages fiscaux se substituent directement à des
dépenses sociales ; par exemple, le Royaume-Uni accorde une
réduction d'impôts pour les frais médicaux privés
des personnes de plus de 60 ans. De même, les réductions
d'impôt au titre des systèmes contractuels de substitution au
régime national d'assurance y représentaient 3,1 % du PIB en
1993. D'autres avantages fiscaux sont accordés pour encourager l'achat
de prestations privées sociales se substituant aux dépenses
publiques. C'est notamment le cas aux Etats-Unis, où des avantages
fiscaux sont accordés aux employeurs qui contribuent aux programmes
d'assurance maladie.
Il faut aussi tenir compte des dépenses privées obligatoires
à caractère social. Par exemple, en Allemagne, au Danemark et en
Suède, les employeurs versent pour une durée
déterminée des indemnités maladie en cas d'arrêt
maladie, non remboursées par l'Etat. Au Royaume-Uni, 20 % de ces
mêmes dépenses ne sont pas remboursées.
Nous ne disposons pas des données nécessaires pour corriger les
chiffres de la CN. Cependant, une étude de l'OCDE (1997)
52
(
*
)
montre que les écarts,
pour ce qui est des montants des seules dépenses sociales, passent de
15,5 à 8 points de PIB entre la Suède et le Royaume-Uni
après prise en compte des éléments énoncés
plus haut. Pour les même raisons, la situation relative des Pays-Bas et
de l'Allemagne est inversée après prise en compte des avantages
fiscaux, particulièrement élevés en Allemagne.
Ces réserves faites, les recettes fiscales s'étagent de 53 %
en Suède et 51,2 % au Danemark, à 36,9 % au Portugal et
35,4 % en Espagne. Les différentiels de taux de pression fiscale
restent donc importants.
Les recettes non fiscales comportent les intérêts reçus,
parfois importants pour des pays où des caisses de retraites ont
accumulé des actifs importants (Suède, Danemark, Finlande,
Espagne).
Les soldes ont subi de fortes variations tout au long de la décennie
1990. Pour l'année 1999, les bons élèves sont le Danemark,
le Royaume-Uni et la Finlande et les Pays-Bas. Quand le taux
d'intérêt est peu éloigné du taux de croissance du
PIB en valeur, la contrainte de stabilité de la dette est la
nullité du solde primaire. Tous les pays de l'UE avait en 1999 un solde
primaire positif. Ceci signifie qu'ils étaient en phase de
réduction de dette, que leurs recettes fiscales étaient
supérieures au niveau impliqué par leurs dépenses
primaires. L'écart est de l'ordre de 6 points pour la Belgique et le
Luxembourg ; de 5 points pour la Grèce et le Danemark ; de 4
points pour le Royaume-Uni, l'Italie et les Pays-Bas ; de 3 points pour
l'Irlande et la Suède ; de 2 points pour la Finlande ; de 1
point pour l'Allemagne, la France et l'Espagne. Il est pratiquement nul pour
l'Autriche et le Portugal. Les pays auront donc une marge à l'avenir
pour réduire leur taux de prélèvement obligatoire.
Les dépenses publiques primaires vont de 31 % du PIB en Irlande et
36 % au Royaume-Uni et en Espagne à 49 % au Danemark et
52 % en Suède. De 1990 à 1999, la part des dépenses
publiques primaires a augmenté de 2 points au Portugal et en France. Par
contre, elle a baissé de 2 points en Italie et en Espagne, de 8 points
aux Pays-Bas, de 11 points en Suède.
Les dépenses collectives (il s'agit des dépenses liées
à l'administration générale, la sécurité, la
défense nationale, la recherche et développement, la protection
de l'environnement etc.) sont relativement proches, de l'ordre de 8 % du
PIB avec 9,5 % en France et en Grèce, 11 % aux Pays-Bas et
seulement 5 % en Irlande.
Les dépenses individualisables (enseignement, santé,
sécurité sociale, culture, fourniture de logement etc.) et la
protection sociale représentent de 30 à 34 % du PIB. Deux
groupes de pays s'écartent de la moyenne, vers le haut pour les pays
scandinaves, le Danemark (35 %) et la Suède (38 %) ; vers
le bas pour l'Irlande (19 %), la Grèce (21 %), l'Espagne
(22 %) et le Royaume-Uni (25 %). Les Pays-bas, où la
protection sociale est assurée en partie par des organismes
privés, sont aussi à 25 %.
Les dépenses en investissement public sont de l'ordre de 1,8 % du
PIB de l'UE, mais de 1 % seulement au Royaume-Uni, tandis qu'elles
dépassent 3 % dans les pays du Sud.
Les différences de prélèvement obligatoire entre les pays
reflètent essentiellement les choix du montant des dépenses
individualisables et du montant des prestations sociales. Elles
représentent un choix de société entre les dépenses
que chaque ménage doit assurer lui-même et celles qui sont
collectivement fournies, en matière de santé, retraite,
protection contre le chômage, dépenses pour les enfants...
Globalement, un pays continental européen type se caractérise par
des dépenses publiques primaires représentant environ 45 %
du PIB, réparties ainsi : 11 points pour les retraites, 8 pour la
santé, 3 pour le chômage, 3 pour le poste
famille-logement-pauvreté, 6 pour le poste éducation-culture, 3
pour les subventions économiques, 8 pour les dépenses
collectives, 3 points de dépenses en capital. La privatisation partielle
de la retraite et de la santé (à 5 % du PIB chacun), la
réduction des prestations de solidarité (à 3 % du PIB
pour le total chômage-famille), une certaine privatisation de
l'éducation (limitant le financement public 4 % du PIB), un peu
moins de subventions et de dépenses collectives (1 point de moins au
total) permettent de passer à 30 points de PIB, soit au modèle
américain.
Tableau 4 : Comptes des administrations, en % du PIB
|
|
Recettes fiscales |
Recettes non fiscales (1) |
Solde |
Dépenses courantes (2) |
Intérêt de la dette |
Prestations sociales |
FBCF |
Dépenses publiques |
Dépenses primaires (3) |
||||
|
|
|
Total |
Dont : |
|
Total |
Dont : |
Y compris : |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Intérêts |
|
|
Dépenses individ. |
Dépenses collectives |
Rémunération des salariés |
|
|
|
|
|
Allemagne |
1991 |
39,7 |
2,8 |
1,1 |
- 3,1 |
22,3 |
10,5 |
8,7 |
9,0 |
2,8 |
15,7 |
2,8 |
43,8 |
41,0 |
|
1999 |
43,2 |
2,3 |
0,8 |
- 1,4 |
22,7 |
11,1 |
7,9 |
8,3 |
3,5 |
18,9 |
1,8 |
46,9 |
43,4 |
Autriche |
1990 |
42,8 |
4,3 |
2,1 |
- 2,4 |
25,5 |
11,4 |
7,6 |
11,9 |
4,1 |
18,7 |
3,0 |
49,5 |
45,4 |
|
1999 |
45,8 |
1,7 |
1,2 |
- 2,1 |
24,6 |
11,9 |
7,7 |
11,4 |
3,5 |
17,8 |
1,8 |
49,5 |
46,0 |
Belgique |
1990 |
43,9 |
3,3 |
1,3 |
- 6,7 |
24,1 |
12,8 |
7,5 |
11,2 |
11,9 |
16,2 |
1,7 |
53,9 |
42,0 |
|
1999 |
47,5 |
2,4 |
0,8 |
- 0,7 |
25,9 |
13,7 |
7,7 |
11,6 |
7,2 |
15,7 |
1,8 |
50,6 |
42,4 |
Danemark |
1990 |
47,6 |
7,0 |
4,6 |
- 1,0 |
28,9 |
17,4 |
8,2 |
17,7 |
7,3 |
17,9 |
1,6 |
55,6 |
48,3 |
|
1999 |
51,2 |
5,3 |
3,2 |
3,1 |
29,6 |
17,5 |
8,0 |
17,1 |
4,6 |
17,5 |
1,7 |
53,4 |
48,8 |
Espagne |
1995 |
33,6 |
3,1 |
1,6 |
- 6,6 |
20,6 |
10,1 |
8,0 |
11,3 |
5,2 |
13,9 |
3,7 |
43,3 |
38,1 |
|
1999 |
35,4 |
2,7 |
1,2 |
- 1,2 |
19,9 |
9,8 |
7,5 |
10,5 |
3,6 |
12,4 |
3,3 |
39,3 |
35,7 |
Finlande |
1990 |
45,8 |
6,1 |
3,8 |
5,3 |
26,5 |
14,2 |
7,4 |
15,1 |
1,4 |
14,9 |
3,8 |
46,6 |
45,2 |
|
1999 |
45,8 |
5,1 |
2,6 |
1,8 |
25,3 |
13,5 |
8,1 |
13,6 |
3,1 |
17,9 |
2,8 |
49,2 |
46,0 |
France |
1990 |
44,0 |
3,2 |
1,2 |
- 2,1 |
25,9 |
12,9 |
9,4 |
12,5 |
2,9 |
16,9 |
3,6 |
49,3 |
46,4 |
|
1999 |
47,1 |
2,8 |
0,6 |
- 1,6 |
26,7 |
14,0 |
9,4 |
13,6 |
3,3 |
18,3 |
3,0 |
51,5 |
48,2 |
Grèce |
1995 |
33,9 |
2,7 |
2,5 |
- 10,2 |
15,7 |
5,9 |
9,4 |
11,3 |
12,7 |
15,1 |
3,2 |
46,8 |
34,1 |
|
1999 |
39,2 |
2,7 |
2,3 |
- 1,8 |
14,5 |
5,9 |
9,3 |
11,5 |
8,8 |
14,5 |
4,1 |
43,7 |
34,9 |
Irlande |
1990 |
34,8 |
2,6 |
1,7 |
- 2,8 |
18,2 |
9,8 |
6,6 |
10,4 |
7,9 |
11,9 |
2,1 |
40,2 |
32,3 |
|
1999 |
33,2 |
1,8 |
1,1 |
1,9 |
17,6 |
8,9 |
5,0 |
8,2 |
2,5 |
10,2 |
2,6 |
33,1 |
30,6 |
Italie |
1990 |
39,4 |
1,7 |
0,6 |
- 11,8 |
23,6 |
12,3 |
7,9 |
12,6 |
10,5 |
15,4 |
3,3 |
52,9 |
42,4 |
|
1999 |
43,2 |
1,8 |
0,6 |
- 1,8 |
20,2 |
10,8 |
7,2 |
10,7 |
6,7 |
17,2 |
2,5 |
46,8 |
40,1 |
Lux. |
1990 |
40,8 |
7,2 |
4,1 |
4,7 |
23,6 |
9,1 |
8,4 |
10,0 |
0,4 |
14,8 |
4,5 |
43,3 |
42,9 |
|
1999 |
43,1 |
4,7 |
1,8 |
4,7 |
23,4 |
9,9 |
7,4 |
8,7 |
0,3 |
15,1 |
4,3 |
43,1 |
42,8 |
Pays-Bas |
1995 |
40,6 |
5,6 |
2,9 |
- 9,1 |
31,2 |
12,5 |
11,6 |
10,8 |
5,9 |
15,3 |
3,0 |
55,3 |
49,4 |
|
1999 |
42,4 |
4,4 |
1,8 |
1,0 |
25,6 |
12,1 |
11,0 |
10,3 |
4,5 |
12,6 |
3,1 |
46,0 |
41,5 |
Portugal |
1995 |
34,6 |
2,9 |
1,1 |
- 4,6 |
20,3 |
10,7 |
8,0 |
13,7 |
6,2 |
11,8 |
3,7 |
42,1 |
35,9 |
|
1999 |
36,9 |
2,5 |
0,6 |
- 2,1 |
20,7 |
11,7 |
8,1 |
14,4 |
3,2 |
13,5 |
4,1 |
41,5 |
38,3 |
R-U |
1990 |
36,7 |
2,5 |
1,6 |
- 1,5 |
23,2 |
10,7 |
9,2 |
12,0 |
3,8 |
11,9 |
2,6 |
41,7 |
37,9 |
|
1999 |
38,1 |
2,2 |
0,8 |
1,3 |
21,5 |
10,9 |
7,6 |
7,5 |
3,0 |
13,5 |
1,1 |
39,0 |
36,0 |
Suède |
1993 |
48,8 |
8,9 |
2,4 |
- 11,9 |
36,8 |
20,2 |
8,2 |
19,1 |
6,0 |
23,3 |
3,3 |
69,6 |
63,6 |
|
1999 |
53,0 |
5,8 |
2,2 |
1,7 |
30,4 |
19,2 |
7,7 |
16,5 |
5,0 |
18,9 |
2,7 |
57,1 |
52,1 |
Japon |
1990 |
30,0 |
3,6 |
0,6 |
2,8 |
11,1 |
8,8 |
6,8 |
3,8 |
11,0 |
4,9 |
30,8 |
27,0 |
|
|
1998 |
27,9 |
3,3 |
0,7 |
10,1 |
17,8 |
9,9 |
7,4 |
3,7 |
14,2 |
5,6 |
41,3 |
37,6 |
Interprétation : Recettes fiscales + recettes non
fiscales - solde public - intérêts nets = prestations sociales +
dépenses courantes + dépenses en capital.
(1) Les recettes non fiscales incluent l'excédent d'exploitation et les
revenus de la propriété.
(2) Ces dépenses comprennent aussi les subventions, les transferts nets
et les acquisitions d'actifs non financiers non produits.
(3) Les dépenses publiques primaires sont les dépenses publiques
hors les intérêts de la dette.
Sources : OCDE, Comptes nationaux des pays de l'OCDE, tableaux détaillés, volume II - 1988-1999 , 2001 ; calculs des auteurs.
III.
Structure fiscale et incidence des impôts
Il est d'abord possible de classer les impôts selon leur assiette
(tableaux 5 et 6). L'importance des différentes assiettes varie
fortement selon les pays :
Comparée aux Etats-Unis, l'UE se caractérise par le poids
important des cotisations sociales et des taxes portant sur le prix des
produits. Par contre, le poids de l'impôt sur le revenu des
ménages est plus important aux Etats-Unis.
Les pays scandinaves font jouer un grand rôle à l'impôt sur
le revenu des ménages. Celui-ci reste peu important dans des pays du Sud
(Portugal, Grèce, Espagne) ainsi qu'aux Pays-Bas.
Le poids de l'impôt sur les sociétés est faible en
Allemagne et en Autriche ; il n'est particulièrement fort qu'en
Finlande et au Luxembourg.
L'impôt sur le patrimoine est important au Luxembourg et au Royaume-Uni,
à un degré moindre en France.
Les cotisations sociales pèsent fortement sur les salaires dans les pays
Bismarkiens (Autriche, France, Suède, Pays-Bas). Ils sont peu importants
au Danemark, en Irlande, au Royaume-Uni.
Les impôts sur les produits sont particulièrement
élevés au Danemark et au Portugal.
La comparaison du poids des différents impôts en 1990 et en 2000
ne montre guère de grands bouleversements. Pratiquement, tous les
impôts ont légèrement augmenté en pourcentage du
PIB, de façon homothétique. Toutefois, le poids des cotisations
sociales a très légèrement diminué de 0,3 point de
PIB (la baisse provient en fait de l'introduction de la CSG) en France.
Une autre décomposition consiste à classer les impôts en
fonction de leur répercussion économique (tableaux 7 et 8), soit
en cinq catégories, selon qu'ils pèsent sur :
-
Les ménages (IR, impôts sur le patrimoine, cotisations sociales
salariés...).
Les entreprises : (IS).
Le coût du travail (cotisations sociales employeurs et taxes sur les salaires).
Les autres coûts de production (impôts sur l'actif des sociétés, etc.).
Le prix des produits (impôts sur la production).
Tableau 5 : Structure des recettes fiscales selon l'assiette des taxes, en % des recettes (2000, sauf (1))
|
ALL |
AUT |
BEL |
DAN |
ESP |
FIN |
FRA |
GRC |
IRL |
ITA |
LUX |
PB. |
PRT |
SUE. |
RU |
UE |
JAP |
EU |
Impôts sur le revenu
|
30,1 |
28,5 |
39,3 |
59,0 |
28,0 |
44,1 |
25,0 |
27,4 |
42,2 |
33,6 |
35,7 |
25,2 |
28,8 |
42,1 |
38,4 |
32,3 |
33,7 |
49,1 |
25,3 |
22,2 |
31,1 |
52,4 |
18,7 |
32,5 |
18,3 |
13,1 |
30,1 |
23,9 |
18,1 |
15,1 |
16,9 |
35,2 |
28,6 |
24,8 |
20,9 |
40,7 |
|
4,8 |
4,7 |
8,1 |
4,8 |
8,6 |
11,7 |
6,7 |
11,7 |
12,1 |
6,0 |
17,5 |
10,1 |
11,7 |
6,9 |
9,8 |
7,3 |
12,8 |
8,3 |
|
Prélèvement sur les salaires
|
39,1 |
40,5 |
30,8 |
4,9 |
35,1 |
23,9 |
38,2 |
30,8 |
13,3 |
28,3 |
25,4 |
39,4 |
25,4 |
32,8 |
16,8 |
31,5 |
37,0 |
23,9 |
39,1 |
34,3 |
30,8 |
4,6 |
35,1 |
23,9 |
36,2 |
30,3 |
12,9 |
28,3 |
25,4 |
39,4 |
25,4 |
28,4 |
16,8 |
30,6 |
37,0 |
23,9 |
|
0,0 |
6,2 |
0,0 |
0,3 |
0,0 |
0,0 |
2,0 |
0,5 |
0,3 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
4,4 |
0,0 |
0,9 |
0,0 |
0,0 |
|
Impôt sur le patrimoine |
2,3 |
1,4 |
3,3 |
3,3 |
6,2 |
2,5 |
6,7 |
5,2 |
5,5 |
4,3 |
10,5 |
5,4 |
3,3 |
3,6 |
11,8 |
5,9 |
10,2 |
10,7 |
Impôts sur les Biens et services
|
28,1 |
28,4 |
25,4 |
32,4 |
29,7 |
29,2 |
26,1 |
36,2 |
38,4 |
28,1 |
28,0 |
28,4 |
41,3 |
21,2 |
32,5 |
28,9 |
18,9 |
16,4 |
18,3 |
19,1 |
16,1 |
19,6 |
17,6 |
17,4 |
16,6 |
22,1 |
22,0 |
15,6 |
14,0 |
17,4 |
23,7 |
13,6 |
18,5 |
17,9 |
8,9 |
0,0 |
|
7,5 |
5,9 |
5,0 |
10,5 |
7,7 |
9,2 |
6,3 |
10,6 |
13,8 |
6,3 |
12,1 |
8,3 |
13,5 |
6,5 |
10,6 |
8,2 |
7,1 |
5,1 |
|
Autres |
0,4 |
1,2 |
1,1 |
0,4 |
1,0 |
0,3 |
4,0 |
0,5 |
0,6 |
5,7 |
0,5 |
1,7 |
1,3 |
0,4 |
0,5 |
1,4 |
0,2 |
0,0 |
(1)
Année 1999 pour l'Irlande, le Portugal et les Etats-Unis.
Source : OCDE,
Statistiques des recettes publiques
, 2001.
Tableau 6 : Structure des recettes fiscales selon l'assiette des taxes en % du PIB (2000, sauf (1))
|
ALL |
AUT |
BEL |
DAN |
ESP |
FIN |
FRA |
GRC |
IRL |
ITA |
LUX |
PB. |
PRT |
SUE. |
RU |
UE |
JAP |
EU |
Impôts sur le revenu
|
11,4 |
12,3 |
18,1 |
28,5 |
9,9 |
20,5 |
11,4 |
10,4 |
13,6 |
14,2 |
15,0 |
10,5 |
9,9 |
22,5 |
14,5 |
13,2 |
9,1 |
14,2 |
9,6 |
9,6 |
14,3 |
25,3 |
6,6 |
15,1 |
8,3 |
5,0 |
9,7 |
10,1 |
7,6 |
6,3 |
5,8 |
18,8 |
10,8 |
10,1 |
5,7 |
11,8 |
|
1,8 |
2,0 |
3,7 |
2,3 |
3,0 |
5,4 |
3,1 |
4,4 |
3,9 |
2,5 |
7,4 |
4,2 |
4,0 |
3,7 |
3,7 |
3,0 |
3,5 |
2,4 |
|
Prélèvement sur les salaires
|
14,8 |
17,5 |
14,2 |
2,4 |
12,4 |
11,1 |
17,4 |
11,7 |
4,3 |
12,0 |
10,7 |
16,4 |
8,7 |
17,5 |
6,3 |
12,8 |
10,0 |
6,9 |
14,8 |
14,8 |
14,2 |
2,2 |
12,4 |
11,1 |
16,5 |
11,5 |
4,2 |
12,0 |
10,7 |
16,4 |
8,7 |
15,2 |
6,3 |
12,5 |
10,0 |
6,9 |
|
0,0 |
2,7 |
0,0 |
0,2 |
0,0 |
0,0 |
0,9 |
0,2 |
0,1 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
2,3 |
0,0 |
0,4 |
0,0 |
0,0 |
|
Impôt sur le patrimoine |
0,9 |
0,6 |
1,5 |
1,6 |
2,2 |
1,1 |
3,0 |
2,0 |
1,8 |
1,8 |
4,4 |
2,2 |
1,1 |
1,9 |
4,4 |
2,4 |
2,8 |
3,1 |
Impôts sur les Biens et services
|
10,6 |
12,3 |
11,7 |
15,7 |
10,5 |
13,6 |
11,9 |
13,7 |
12,4 |
11,9 |
11,8 |
11,8 |
14,2 |
11,3 |
12,2 |
11,8 |
5,1 |
4,7 |
6,9 |
8,3 |
7,4 |
9,5 |
6,2 |
8,1 |
7,5 |
8,4 |
7,1 |
6,6 |
5,9 |
7,3 |
8,1 |
7,3 |
7,0 |
7,3 |
2,4 |
0,0 |
|
2,8 |
2,5 |
2,3 |
5,1 |
2,7 |
4,3 |
2,9 |
4,0 |
4,5 |
2,7 |
5,1 |
3,5 |
4,6 |
3,5 |
4,0 |
3,3 |
1,9 |
1,5 |
|
Autres |
0,2 |
0,5 |
0,5 |
0,2 |
0,4 |
0,1 |
1,8 |
0,2 |
0,2 |
2,4 |
0,2 |
0,7 |
0,4 |
0,2 |
0,2 |
0,6 |
0,1 |
0,0 |
Total |
37,8 |
43,3 |
46,0 |
48,4 |
35,3 |
46,5 |
45,5 |
38,0 |
32,3 |
42,3 |
42,0 |
41,7 |
34,3 |
53,3 |
37,7 |
40,8 |
27,1 |
28,9 |
(1)
Année 1999 pour l'Irlande, le Portugal et les Etats-Unis.
Source : OCDE,
Statistiques des recettes publiques
, 2001.
Tableau 6 bis : Structure des recettes fiscales selon l'assiette des taxes en % du PIB (1990)
|
ALL |
AUT |
BEL |
DAN |
ESP |
FIN |
FRA |
GRC |
IRL |
ITA |
LUX |
PB. |
PRT |
SUE. |
RU |
UE |
EU |
Impôts sur le revenu
|
11,5 |
10,3 |
16,2 |
27,6 |
10,2 |
19,3 |
6,9 |
5,8 |
12,4 |
14,2 |
16,0 |
13,8 |
7,6 |
22,3 |
14,1 |
12,4 |
11,9 |
9,8 |
8,5 |
13,9 |
24,8 |
7,2 |
17,2 |
4,6 |
4,1 |
10,7 |
10,2 |
9,6 |
10,6 |
4,7 |
20,6 |
10,0 |
9,6 |
9,9 |
|
1,7 |
1,4 |
2,4 |
1,5 |
2,9 |
2,0 |
2,3 |
1,6 |
1,7 |
3,9 |
6,4 |
3,2 |
2,3 |
1,7 |
4,2 |
2,7 |
2,0 |
|
Prélèvement sur les salaires
|
13,3 |
15,7 |
14,3 |
1,7 |
11,8 |
9,7 |
19,7 |
9,1 |
5,4 |
12,9 |
11,1 |
16,0 |
8,0 |
15,9 |
6,1 |
13,1 |
6,8 |
13,3 |
13,3 |
14,3 |
1,4 |
11,8 |
9,7 |
18,9 |
8,9 |
5,0 |
12,8 |
11,1 |
16,0 |
8,0 |
14,6 |
6,1 |
12,8 |
6,8 |
|
0,0 |
2,4 |
0,0 |
0,3 |
0,0 |
0,0 |
0,8 |
0,2 |
0,4 |
0,1 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
1,3 |
0,0 |
0,3 |
0,0 |
|
Impôt sur le patrimoine |
1,2 |
1,1 |
1,2 |
2,0 |
1,8 |
1,1 |
2,7 |
1,4 |
1,6 |
0,9 |
3,4 |
1,6 |
0,8 |
1,9 |
2,9 |
1,8 |
3,0 |
Impôts sur les Biens et services
|
9,5 |
12,7 |
11,4 |
15,8 |
9,4 |
14,6 |
12,2 |
13,1 |
14,2 |
10,9 |
10,3 |
11,3 |
12,9 |
13,4 |
11,1 |
11,1 |
4,5 |
5,9 |
8,4 |
7,1 |
8,7 |
5,2 |
8,7 |
7,9 |
7,2 |
6,9 |
5,7 |
4,8 |
7,1 |
5,8 |
8,0 |
6,1 |
6,6 |
0,0 |
|
2,4 |
2,5 |
2,1 |
4,7 |
1,9 |
4,3 |
2,7 |
3,5 |
5,7 |
3,0 |
4,1 |
2,5 |
4,1 |
3,9 |
3,5 |
2,9 |
1,3 |
|
Autres |
0,0 |
0,5 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,1 |
1,4 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,1 |
0,1 |
0,2 |
0,1 |
1,5 |
0,5 |
0,0 |
Total |
35,6 |
40,5 |
43,2 |
47,1 |
33,2 |
44,7 |
42,9 |
29,3 |
33,5 |
38,9 |
40,9 |
42,8 |
29,4 |
53,6 |
35,8 |
38,9 |
26,2 |
Source : OCDE, Statistiques des recettes publiques , 2001.
Tableau 7 : Structure des recettes fiscales selon leur répercussion économique immédiate en % des recettes (1999)
|
ALL |
AUT |
BEL |
DAN |
ESP |
FIN |
FRA |
GRC |
IRL |
ITA |
LUX |
PB. |
PRT |
SUE. |
RU |
UE |
JAP |
EU |
Revenu des ménages |
46,3 |
41,3 |
43,9 |
54,9 |
33,2 |
38,0 |
32,4 |
32,7 |
35,8 |
34,9 |
35,9 |
51,0 |
28,0 |
44,2 |
41,7 |
39,3 |
36,6 |
56,6 |
Revenu des entreprises |
4,8 |
4,1 |
7,9 |
5,9 |
8,0 |
9,1 |
6,4 |
8,7 |
12,1 |
7,7 |
17,6 |
10,1 |
11,7 |
6,0 |
10,4 |
7,2 |
12,9 |
8,3 |
Coût du travail |
19,3 |
23,0 |
19,3 |
1,3 |
24,1 |
20,1 |
27,1 |
14,5 |
8,5 |
20,1 |
11,1 |
6,0 |
14,5 |
26,7 |
9,7 |
18,3 |
19,1 |
12,2 |
Autres coûts de production |
0,2 |
0,5 |
0,8 |
0,2 |
0,7 |
0,3 |
4,1 |
0,2 |
0,7 |
4,5 |
4,7 |
0,6 |
0,1 |
0,3 |
0,4 |
1,3 |
0,3 |
0,9 |
Prix des produits |
27,1 |
26,9 |
23,3 |
30,9 |
27,7 |
30,2 |
25,9 |
35,1 |
36,6 |
25,0 |
27,5 |
25,6 |
40,8 |
20,8 |
30,6 |
27,8 |
17,9 |
14,4 |
Divers |
2,4 |
4,2 |
4,9 |
6,8 |
6,3 |
2,3 |
4,2 |
8,8 |
6,3 |
7,9 |
3,3 |
6,7 |
4,9 |
2,0 |
7,2 |
6,2 |
13,3 |
7,5 |
Source : OCDE, Statistiques des recettes publiques , 2001 ; calculs des auteurs.
Tableau 8 : Structure des recettes fiscales selon leur répercussion économique immédiate en % du PIB (1999)
|
ALL |
AUT |
BEL |
DAN |
ESP |
FIN |
FRA |
GRC |
IRL |
ITA |
LUX |
PB. |
PRT |
SUE |
RU |
UE |
JAP |
EU |
Revenu des ménages |
17,4 |
18,2 |
20,0 |
27,6 |
11,7 |
17,6 |
14,9 |
12,1 |
11,6 |
15,1 |
15,0 |
21,5 |
9,6 |
23,1 |
15,1 |
15,9 |
9,6 |
16,3 |
Revenu des entreprises |
1,8 |
1,8 |
3,6 |
3,0 |
2,8 |
4,2 |
2,9 |
3,2 |
3,9 |
3,3 |
7,3 |
4,2 |
4,0 |
3,2 |
3,8 |
2,9 |
3,4 |
2,4 |
Coût du travail |
7,3 |
10,1 |
8,8 |
0,7 |
8,4 |
9,3 |
12,4 |
5,4 |
2,7 |
8,7 |
4,7 |
2,5 |
5,0 |
13,9 |
3,5 |
7,4 |
5,0 |
3,5 |
Autres coûts de production |
0,1 |
0,2 |
0,4 |
0,1 |
0,3 |
0,2 |
1,9 |
0,1 |
0,2 |
1,9 |
2,0 |
0,3 |
0,0 |
0,1 |
0,2 |
0,5 |
0,1 |
0,3 |
Prix des produits |
10,2 |
11,8 |
10,6 |
15,6 |
9,7 |
14,0 |
11,9 |
13,0 |
11,8 |
10,8 |
11,5 |
10,8 |
14,0 |
10,9 |
11,1 |
11,2 |
4,7 |
4,2 |
Divers |
0,9 |
1,8 |
2,2 |
3,4 |
2,2 |
1,1 |
1,9 |
3,3 |
2,0 |
3,4 |
1,4 |
2,8 |
1,7 |
1,0 |
2,6 |
2,5 |
3,5 |
2,2 |
Total |
37,7 |
43,9 |
45,7 |
50,4 |
35,1 |
46,3 |
45,8 |
37,1 |
32,3 |
43,3 |
41,8 |
42,1 |
34,3 |
52,2 |
36,3 |
40,5 |
26,2 |
28,9 |
Source : OCDE, Statistiques des recettes publiques , 2001 ; calculs des auteurs..
IV. La
centralisation des prélèvements
La répartition des prélèvements entre les types
d'administration est très différenciée selon les
pays :
-
Dans deux des trois pays fédérés (Belgique et
Allemagne), le poids de la fiscalité des Etats est extrêmement
fort, de l'ordre de 10 % du PIB, supérieur à celui des
Etats-Unis.
Dans les pays scandinaves, la fiscalité locale est très importante (de 10 à 15 % du PIB). Dans certains petits pays, elle est en dessous de 1 % (Belgique, Grèce, Irlande).
Le poids des impôts perçus par les administrations centrales va de 11 % du PIB en Allemagne à plus de 25 % (Danemark, Irlande, Royaume-Uni, Suède).
Les recettes propres de la Sécurité sociale sont très faibles dans certains pays où elle est financée par le budget de l'Etat, totalement (Danemark, Suède) ou partiellement (Royaume-Uni, Irlande). Au contraire, elles sont très fortes dans les modèles bismarkiens (France, Pays-Bas, Belgique, Allemagne).
Tableau 9 : Répartition des
prélèvements selon l'administration perceptrice,
en % du total
des recettes
En 1997 |
CE |
Adm. Centrales. |
Etats fédérés |
Adm. locales |
Séc. Sociale |
Allemagne |
1,5 |
29,2 |
22,0 |
7,9 |
39,3 |
Autriche |
1,4 |
51,2 |
9,4 |
10,1 |
27,9 |
Belgique |
1,9 |
34,9 |
23,6 |
4,4 |
35,0 |
Danemark |
1,1 |
62,4 |
-- |
31,5 |
4,1 |
Espagne |
1,9 |
46,7 |
-- |
16,9 |
34,5 |
Finlande |
1,2 |
54,8 |
-- |
22,7 |
26,6 |
France |
1,2 |
42,5 |
-- |
10,0 |
45,1 |
Grèce |
1,8 |
67,6 |
-- |
1,1 |
29,5 |
Irlande |
2,2 |
85,0 |
-- |
1,8 |
11,1 |
Italie |
1,1 |
61,0 |
-- |
9,4 |
26,6 |
Luxembourg |
1,2 |
67,0 |
-- |
5,7 |
25,3 |
Pays-Bas |
2,3 |
54,7 |
-- |
2,7 |
40,0 |
Portugal |
1,8 |
65,0 |
-- |
6,6 |
26,5 |
Royaume-Uni |
1,7 |
76,9 |
-- |
4,1 |
17,3 |
Suède |
1,0 |
61,8 |
-- |
30,3 |
8,8 |
Etats-Unis |
-- |
45,0 |
19,1 |
12,0 |
23,9 |
Japon |
-- |
36,7 |
-- |
26,1 |
37,2 |
Source : OCDE, Statistiques des recettes publiques , 2001.
Tableau 10 : Répartition des prélèvements
selon l'administration perceptrice,
en % du PIB
En 1999 |
CE |
Adm. Centrales |
Etats fédérés |
Adm. locales |
Sécu. Sociale |
Allemagne |
0,6 |
11,0 |
8,3 |
3,0 |
14,8 |
Autriche |
0,6 |
22,5 |
4,1 |
4,4 |
12,2 |
Belgique |
0,9 |
16,0 |
10,8 |
0,2 |
16,0 |
Danemark |
0,6 |
31,5 |
-- |
15,9 |
2,1 |
Espagne |
0,7 |
16,4 |
-- |
5,9 |
12, 1 |
Finlande |
0,6 |
25,3 |
-- |
10,5 |
12,3 |
France |
0,6 |
19,5 |
-- |
4,6 |
20,7 |
Grèce |
0,7 |
25,1 |
-- |
0,4 |
10,9 |
Irlande |
0,7 |
27,4 |
-- |
0,6 |
3,6 |
Italie |
0,5 |
26,4 |
-- |
4,1 |
11,5 |
Luxembourg |
0,5 |
28,0 |
-- |
2,4 |
10,6 |
Pays-Bas |
1,0 |
23,0 |
-- |
1,3 |
16,9 |
Portugal |
0,6 |
22,3 |
-- |
2,3 |
9,1 |
Royaume-Uni |
0,6 |
27,9 |
-- |
1,5 |
6,3 |
Suède |
0,5 |
30,8 |
-- |
15,8 |
4,6 |
Etats-Unis |
-- |
13,0 |
5,5 |
3,5 |
6,9 |
Japon |
-- |
9,8 |
-- |
6,8 |
9,7 |
Source : OCDE, Statistiques des recettes publiques , 2001.
Chapitre 2. 1 : L'imposition des bénéfices
Réjane Hugounenq
L'organisation de la fiscalité des entreprises en Europe, dix
ans après l'ouverture des frontières, est encore à
construire. Les taux effectifs d'imposition, ainsi que les législations
auxquelles sont soumises les entreprises sont relativement disparates, ce qui,
en l'absence d'organisation génère des distorsions. Elles
concernent principalement les entreprises qui opèrent sur l'ensemble du
territoire européen : renchérissement des coûts du
fait de la coexistence de quinze régimes mais aussi, et surtout, des
possibilités d'optimisation fiscale (délocalisation de
sociétés-mères, prix de transferts etc.). Les
délocalisations pures sont, par contre, rares. Les Etats, de leur
côté, par la mise en place de régimes dérogatoires
tentent d'attirer des entreprises sur leur territoire. L'enjeu de la
construction fiscale européenne est clair : soit chaque pays tente
de tirer partie de l'absence de coordination avec des conséquences
dangereuses (concurrence fiscale, baisse de recettes et son corollaire
réduction du rôle de l'Etat), soit la fiscalité des
sociétés est organisée sous l'égide de la
Commission. Cette dernière a déjà mis en place un certain
nombre de directives visant à assurer la neutralité de la
fiscalité vis-à-vis des investissements transnationaux, de
même qu'elle a engagé des procédures de lutte contre la
concurrence fiscale. Mais les avancées sont laborieuses et
insuffisantes. Les dernières propositions concernent la base
d'imposition des sociétés multinationales afin de lutter contre
certaines discriminations et de limiter l'optimisation fiscale. En dépit
de leur intérêt, ces propositions sont insuffisantes pour
permettre aux Etats, de conserver leur autonomie fiscale et les recettes
nécessaires à la pérennité de leurs choix sociaux.
L'adoption d'un taux minimal à l'instar de ce qui s'est fait pour la TVA
devrait compléter ces propositions.
Une entreprise multinationale qui envisage d'investir aujourd'hui dans les pays
de l'UE a fort à faire pour analyser ce que sera sa situation fiscale.
Quinze régimes nationaux d'imposition des bénéfices (IS)
régis par tout un réseau de conventions bilatérales et par
trois directives de la Commission forment l'architecture du système
fiscal européen. Cette complexité est, pour les entreprises,
à la fois une aubaine et une source de coûts. Une aubaine pour les
plus grandes d'entre elles, qui utilisent les divergences fiscales pour
minimiser leurs charges d'imposition (optimisation fiscale). Une source de
coûts pour les petites et moyennes entreprises susceptibles
d'opérer en Europe.
Les Etats, de leur côté, sous l'effet de la pression des
entreprises et des autres Etats tentent d'attirer des entreprises sur leur
territoire (concurrence fiscale). Les entreprises courtisées sont
principalement les grandes entreprises et c'est à leur intention qu'ont
été mis en place par certains Etats membres, des régimes
dérogatoires aux droits communs (la Commission qui les combat en a
recensé plus de 200). Le comportement concurrentiel ne se limite
cependant pas à l'utilisation de ces régimes. Subventions
diverses et fourniture publique d'infrastructures sont autant d'instruments
permettant d'attirer les entreprises. Par ailleurs, comme nous le verrons, les
Etats membres se sont quasiment tous engagés dans un processus de baisse
des taux de l'IS accompagné par l'élargissement de la base
imposable. De sorte que si concurrence il y a, elle se signale certainement
plus par la présence de régimes dérogatoires que par la
baisse des taux.
La Commission, quant à elle, conformément à son engagement
de réalisation du grand marché européen, vise par ses
propositions et directives en matière d'imposition des
bénéfices à assurer la neutralité de la
fiscalité vis-à-vis des investissements transnationaux
53
(
*
)
: les entreprises doivent
pouvoir investir sur l'ensemble du territoire européen sans que la
fiscalité soit une source de coût ou de distorsion
économique
54
(
*
)
.
Des directives ont donc été mises en oeuvre pour éviter
par exemple, les doubles impositions ou encore pour limiter certaines pratiques
d'optimisation fiscale. De même, la Commission a engagé des
procédures de luttes contre la concurrence fiscale à laquelle se
livrent subrepticement les Etats. Mais, les avancées sont laborieuses et
pour certaines d'entre elles, insuffisantes. Les groupes transnationaux
continuent d'optimiser et le système dans son ensemble reste complexe et
non neutre. Telle est aujourd'hui la situation en Europe en matière de
fiscalité des sociétés.
La question urgente, qu'il s'agit de traiter aujourd'hui, en matière de
fiscalité des entreprises n'est pas celle de la comparaison du niveau
des taux d'imposition selon les pays ou encore celle de la
délocalisation des entreprises afin de désigner les bons ou les
mauvais élèves, mais celle de la nécessité de
l'organisation de l'IS au niveau européen. Et ce
précisément pour que les entreprises ne soient pas
incitées à se délocaliser pour des raisons uniquement
fiscales. La non neutralité du système, de même que la
concurrence fiscale (qui contribue aussi à cette non neutralité)
sont coûteuses, en termes d'efficacité économique
55
(
*
)
et de recettes fiscales pour
les Etats.
L'organisation fiscale qui est du ressort de la Commission se heurte, comme
d'ailleurs celle des autres impôts, à l'autonomie fiscale des
Etats membres et au principe de subsidiarité. Cela explique que le choix
de l'harmonisation des bases et des taux qui supprimerait l'ensemble des
problèmes est aujourd'hui inenvisageable. Les Etats la refuseraient au
motif qu'elle nuit à leur souveraineté fiscale. On voit bien
qu'en matière de TVA par exemple, c'est un ensemble de principes
généraux minimal et non l'harmonisation qui a été
choisi.
Quelle organisation mettre en place ? Est-il possible d'instituer un
système d'IS neutre en Europe tout en préservant la
diversité des régimes et sans mettre en péril les recettes
fiscales des Etats membres ? La Commission a récemment émis
un certain nombre de propositions visant à faire avancer le processus de
coordination. Suffiront-elles à enrayer les pratiques de concurrence
fiscale et les menaces de délocalisation des entreprises ? En clair, ces
propositions permettront-elles à chaque Etat, de conserver son autonomie
fiscale et les recettes nécessaires à la pérennité
de leurs choix sociaux ? Ce sont les questions que nous traiterons dans ce
chapitre. Dans un premier temps, cependant, nous présenterons les
régimes nationaux d'IS en Europe et leur évolution ces dix
dernières années et discuterons des problèmes de
délocalisations des entreprises ainsi que des solutions à
apporter. Sachant que le point d'achoppement le plus aigu concerne l'imposition
des entreprises transnationales, nous ferons dans une seconde partie, le point
sur le fonctionnement du système d'imposition tel qu'il s'applique aux
sociétés dont les activités s'étendent sur
l'ensemble du territoire européen. L'évolution des positions de
la Commission en matière de coordination, des comportements
d'optimisation et de concurrence fiscale seront alors évoqués.
I. L'IS en Europe, son poids, son évolution
1. Le poids de l'IS en Europe
Le poids de l'IS (tableau 1) dans les budgets nationaux est relativement proche. Seuls se distinguent, l'Autriche et l'Allemagne (avec des recettes nettement inférieures à la moyenne), le Luxembourg et dans une moindre mesure le Royaume-Uni (avec des recettes d'IS légèrement supérieures à l'ensemble des autres pays). Au cours de la décennie 1990, le poids de l'IS a légèrement progressé dans l'ensemble des pays de l'UE (sauf pour le RU). Cette progression est en grande partie due aux évolutions conjoncturelles (les entreprises ont des profits plus élevés), les modifications structurelles opérées dans les pays membres au cours des dernières années s'étant compensées.
Tableau 1 : Impôt sur les sociétés en % du PIB
|
1980 |
1990 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001* |
2002* |
Autriche |
1,4 |
1,3 |
1,8 |
1,8 |
1,8 |
1,7 |
1,7 |
1,8 |
1,8 |
Allemagne |
1,8 |
1,8 |
1,7 |
1,9 |
1,9 |
2,0 |
2,1 |
1,9 |
1,9 |
Belgique |
2,2 |
2,4 |
3,1 |
3,5 |
3,6 |
3,5 |
3,5 |
3,5 |
3,4 |
Danemark |
1,5 |
2,6 |
3,4 |
3,7 |
3,6 |
3,6 |
3,5 |
3,5 |
3,5 |
Espagne |
1,2 |
3,1 |
2,1 |
2,1 |
2,1 |
2,1 |
2,1 |
2,1 |
2,1 |
Finlande |
1,2 |
2,0 |
3,0 |
3,7 |
3,7 |
3,7 |
3,8 |
3,6 |
3,5 |
France |
2,1 |
2,4 |
1,9 |
2,2 |
2,7 |
2,9 |
2,9 |
2,8 |
2,8 |
Grèce |
0,5 |
1,7 |
2,2 |
2,4 |
2,9 |
3,2 |
3,3 |
3,3 |
3,2 |
Irlande |
1,5 |
2,2 |
3,6 |
3,7 |
3,7 |
3,7 |
3,5 |
3,4 |
3,3 |
Italie |
2,4 |
3,7 |
4,2 |
4,3 |
3,9 |
4,1 |
4,1 |
3,9 |
3,9 |
Luxembourg |
7,6 |
6,6 |
6,9 |
8,3 |
8,3 |
8,2 |
8,2 |
8,0 |
7,6 |
Pays-Bas |
3,0 |
3,4 |
4,1 |
4,6 |
4,5 |
4,5 |
4,4 |
4,2 |
4,2 |
Portugal |
0,9 |
2,5 |
2,7 |
2,8 |
2,8 |
2,9 |
3,0 |
3,1 |
3,1 |
RU |
2,9 |
4,1 |
3,8 |
4,3 |
4,7 |
4,7 |
4,8 |
4,7 |
4,7 |
Suède |
1,2 |
2,0 |
3,1 |
2,8 |
2,9 |
2,9 |
2,8 |
2,7 |
2,6 |
Europe |
2,2 |
2,9 |
2,7 |
3,0 |
3,1 |
3,2 |
3,2 |
3,2 |
3,1 |
*
Estimations/Prévisions.
Sources : Commission européenne/Eurostat.
2. Les modifications structurelles de la décennie 1990
Les
réformes fiscales mises en oeuvre tout au long de la décennie
1990 ont toutes été façonnées par l'idée
selon laquelle, tout prélèvement autre que forfaitaire
étant source de distorsions
56
(
*
)
, il est préférable que l'impôt,
pour un montant de recette donné, soit prélevé à un
taux relativement faible quitte à ce que la base d'imposition soit la
plus large possible.
De fait, pour la raison évoquée ci-dessus, mais aussi pour des
effets d'affichages en termes d'attractivité fiscale, les pays de l'UE
n'ont cessé tout au long des années 1990 de diminuer les taux
d'imposition sur les bénéfices (tableau 2). L'Allemagne avait
deux taux d'imposition sur les sociétés : 30 et 40 %
(respectivement pour les bénéfices distribués et non
distribués) qui ont été ramenés par la
réforme 2000 au taux unique de 25 %. La Grande-Bretagne a un
barème progressif qui commence à 10 et se termine à 30. En
Suède, le taux est unique, fixé à 28 %. L'Italie a
introduit la DIT (Dual Income Tax), ce qui revient à pratiquer un
barème progressif (en fonction de la rentabilité de l'entreprise)
à deux taux : 19 (pour la rentabilité normale) et 36 %
(pour la rentabilité exceptionnelle). Le taux français, a lui
aussi subi par rapport à son niveau des années 1980 une forte
baisse mais reste, compte tenu des majorations qui subsistent, aux alentours de
35 % soit avec les Pays-Bas dans le haut de la fourchette dans l'Union
européenne. L'Irlande a un double système : un taux normal
d'imposition sur les sociétés comparable à celui de la
Grande-Bretagne -- c'est à dire un taux progressif dont la fourchette se
situe entre 22 et 34 % -- et un taux de 10 % pour des
activités manufacturières localisées dans des zones
préférentielles. Ce mouvement de baisse des taux engagé
depuis une décennie perdure. Les Irlandais, par exemple, en
prévision d'une éventuelle condamnation pour compétition
fiscale déloyale, envisagent de fusionner en 2003 tous leurs
régimes sur la base d'un taux unique de 12,5 %.
On remarque qu'aujourd'hui, hormis le cas particulier de l'Irlande, le taux
nominal d'IS est en moyenne en Europe de 30 %.
Tableau 2 : Evolution des taux nominaux de l'IS
|
Taux normal hors surcharge (1 ) |
Autriche |
34 % |
Allemagne |
Avant
2000 : Taux sur les bénéfices réinvestis :
40 %
|
Belgique |
39 % |
Danemark |
1999 :
32 %
|
Espagne |
35 % |
Finlande |
1999 :
28 %
|
France |
50 %
fin de la décennie 1980
|
Grande-Bretagne |
33 %
début des années 1990
|
Grèce |
1999 :
40 %
|
Irlande |
10 % (3) |
Italie |
37 %
avant 1998
|
Luxembourg |
30 % |
Portugal |
1999 :
34 %
|
Pays-Bas |
35 % tout au long de la décennies 90 |
Suède |
28 % |
(1) Taux
maximal
hors surcharges
. Il existe par ailleurs dans tous les pays des
taux réduits pour les PME ou pour les entreprises dont le chiffre
d'affaires est en deçà d'un certain montant.(voir annexes pour
plus de précisions sur les pays).
(2) Le taux normal de l'IS a été l'objet de nombreuses surcharges
tout au long des années 1990 pour atteindre près de 42 % en
1997 avant de redescendre en 2002 à 35,43 %. Le taux sera de 34,43%
en 2003 (voir annexes sur la France pour plus de précisions).
(3) L'Irlande a un double système : un taux normal d'imposition sur les
sociétés -- soit un taux progressif dont la fourchette se situe
entre 22 et 34 % -- et un taux de 10 % pour des activités
manufacturières localisées dans diverses zones
préférentielles. On peut considérer que le taux normal est
de 10 % dans la mesure ou les entreprises qui se délocalisent en
Irlande pour des raisons fiscales s'installent précisément dans
ces zones préférentielles.
(4) L'application de l'un ou de l'autre taux dépend de la
rentabilité du capital. Le barème est progressif, le taux moyen
comme le taux marginal croissent avec la rentabilité du capital.
Sources: Rapport Commission européenne 2001(935), Eurostat.
Les pays membres étant confrontés tout au long des années
1990 à des impératifs budgétaires, les modifications de
taux se sont quasiment toutes traduites par un élargissement de la base
d'imposition. L'Allemagne a par exemple durci sa position en matière de
règles d'amortissement. La Grande-Bretagne a réduit certains
avantages comme l'exonération des dividendes reçus de
sociétés résidentes pour certains types d'actionnaires,
etc.
Il est
à priori
difficile, à partir de la seule analyse
qualitative de l'évolution des taux et des éléments
constitutifs de la base imposable, de se prononcer sur l'évolution de la
charge fiscale supportée par les entreprises dans chaque pays
.
La
baisse du taux nominal de l'IS ne signifie pas nécessairement
réduction de la charge fiscale pour les entreprises, ni même
diminution des recettes fiscales pour l'Etat. En effet, des compensations
peuvent s'effectuer entre taux et bases et entre les éléments de
la base elle-même, et ce à la fois au niveau de l'entreprise mais
aussi au niveau global. Par exemple, un pays qui impose des restrictions sur
les pratiques d'évaluation des biens immatériels pourra les
compenser par un régime d'amortissement favorable sur les biens
tangibles. Où en est-on aujourd'hui des charges d'IS pesant sur les
entreprises des différents Etats membres, autrement dit qu'en est-il du
taux effectif d'imposition ?
3. Taux moyens effectifs d'imposition dans les pays de l'UE
Dans son
dernier rapport sur l'imposition des entreprises en Europe
57
(
*
)
, la Commission mesure
quantitativement l'ampleur des divergences entre les régimes fiscaux.
Elle calcule pour cela un taux moyen d'imposition effectif,
c'est-à-dire, le taux d'imposition que supporte un investissement type
qui rapporterait avant impôt une rentabilité de 20 %
(tableaux 3 et 4).
Ces taux doivent être interprétés avec précaution.
Ils tiennent compte non seulement de l'IS (base et taux nominal d'imposition y
compris les surcharges), mais aussi de la fiscalité locale. Autrement
dit, des éléments fiscaux comme par exemple la taxe
professionnelle ou les impôts fonciers pour la France entrent en ligne de
compte. Ces derniers impôts n'ont pas forcément comme base
d'imposition le bénéfice. Les différences ne sont donc pas
seulement dues à l'IS. Par ailleurs, pour ce qui est de l'IS, si une
bonne partie des éléments constitutifs de ces impôts sont
considérés (taux, provisions, crédit d'impôts,
etc.), d'autres comme le traitement des pertes ou le report des déficits
sont ignorés. Enfin, il s'agit d'investissements type portant sur un
actif composite (combinaison de machines, de biens intangibles, etc.) avec un
mode de financement qui combine dans des proportions fixées
l'autofinancement, l'endettement et l'émission d'actions. Leur
représentativité est donc soumise à questionnement.
Quoiqu'il en soit des modalités de calculs, il ressort des analyses de
la Commission que les charges fiscales auxquelles sont soumises les entreprises
dans le cadre des investissements domestiques sont relativement disparates
(tableaux 3 et 4). Trois groupes de pays peuvent être distingués.
L'Irlande et les pays du Nord de l'Europe (Suède, Finlande) avec des
taux inférieurs à 25 %. Un groupe de pays (Italie,
Grande-Bretagne, Danemark, Autriche, etc.) avec un taux proche de 30 %. Et
enfin, la France et l'Allemagne avec des taux compris entre 35 % et
40 %. L'Allemagne en dépit de sa récente réforme est
toujours en première position, juste devant la France. L'Allemagne a
certes diminué son taux nominal d'imposition mais a élargi sa
base. Si la réforme a effectivement réduit le poids de l'IS, elle
n'a pas modifié la position de ce pays vis-à-vis de ses
partenaires européens. La raison est que l'Allemagne a réduit le
poids d'un impôt initialement très élevé. Quant
à la France, sa position est en partie due à la prise en compte
dans le calcul de l'imposition locale. Celle-ci est d'autant plus importante
qu'elle est un coût fixe pour les entreprises (indépendant de leur
résultat).
Tableau 3 : Taux moyen effectif d'imposition dans les pays membres de l'UE
En 1999 |
Taux légal d'imposition |
Taux nominal utilisé pour le calcul du taux effectif (1) |
Taux moyen effectif d'imposition (2) |
Autriche |
34.00 |
34.00 |
29.8 |
Allemagne |
40.00 |
52.35 |
39.1 |
Belgique |
39.00 |
40.17 |
34.5 |
Danemark |
32.00 |
32.00 |
28.8 |
Espagne |
35.00 |
35.00 |
31.0 |
Finlande |
28.00 |
28.00 |
25.5 |
France |
33.33 |
40.00 |
37.5 |
Grande-Bretagne |
30.00 |
30.00 |
28.2 |
Grèce |
40.00 |
40.00 |
29.6 |
Irlande |
10.00 |
10.00 |
10.5 |
Italie |
37.00 |
41.25 |
29.8 |
Luxembourg |
30.00 |
37.45 |
32.2 |
Pays-Bas |
35.00 |
35.00 |
31.0 |
Portugal |
34.00 |
37.40 |
32.6 |
Suède |
28.00 |
28.00 |
22.9 |
En 2001 |
Taux nominal d'imposition |
Taux nominal utilisé pour le calcul du taux effectif (1) |
Taux moyen effectif d'imposition (2) |
Autriche |
34 |
34 |
27.9 |
Allemagne |
25 |
39,35 |
34.9 |
Belgique |
39 |
40,17 |
34.5 |
Danemark |
30 |
30 |
27.3 |
Espagne |
35 |
35 |
31.0 |
Finlande |
29 |
29 |
26.6 |
France |
33,33 |
36,43 |
34.7 |
Grande-Bretagne |
30 |
30 |
28.3 |
Grèce |
37,5 |
37,50 |
28.0 |
Irlande |
10 |
10 |
10.5 |
Italie |
36 |
40,25 |
27.6 |
Luxembourg |
30 |
37,45 |
32.2 |
Pays-Bas |
35 |
35 |
31.0 |
Portugal |
32 |
35,20 |
30.7 |
Suède |
28 |
28 |
22.9 |
(1) Il
comprend le taux nominal de l'IS normal, les surcharges et l'impôt sur le
bénéfice local.
(2) Ce calcul prend en compte le taux d'imposition global sur les
bénéfices tel que défini en (1) et des impôts locaux
ne portant pas sur le bénéfice, tel que la taxe professionnelle
(pour la France par exemple).
Source : Rapport Commission européenne 2001(935).
Lecture : Le taux moyen effectif d'imposition pour un investissement
type (biens et mode de financement composite) qui rapporte avant impôt
20 % est de 34,7 % en France et de 34,9 % en Allemagne.
Que conclure de ces résultats et de la position relativement
défavorable de la France ?
On peut craindre que ce différentiel ne génère des
délocalisations d'entreprises. Or, il n'y pas eu en Europe de
délocalisations massives d'entreprises dues à la seule imposition
des sociétés. La raison en est simple, l'IS est un
déterminant relativement mineur des choix de localisation des
entreprises. Celles-ci sont sensibles à la qualité et au
coût de la main-d'oeuvre, à la qualité des infrastructures,
à la plus ou moins grande flexibilité des procédures
administratives, etc. Les choix de localisations peuvent aussi répondre
à des impératifs économiques (parts de marché,
conditions de production, etc.)
58
(
*
)
. Les délocalisations pures (délocaliser
la production pour l'exporter dans le pays d'origine) sont relativement rares.
L'effet du différentiel d'IS n'est pas pour autant nul. Même si
les délocalisations pures ne sont aujourd'hui pas massives, on ne peut
ignorer leur éventualité. Par ailleurs, les grandes entreprises,
qui opèrent sur l'ensemble du territoire européen utilisent ce
différentiel pour optimiser fiscalement (voir section II.2) sans pour
autant délocaliser la production.
Que faire ? Bien sûr un IS nul supprimerait les problèmes
mais nuirait aux pays qui souhaitent conserver des recettes fiscales sauf
à alourdir la fiscalité des autres facteurs de production. La
course à la baisse de l'IS n'est pas de ce point de vue une solution
viable et ce d'autant que l'issue du processus est une imposition nulle sur les
entreprises. Il coûterait certainement plus cher à un pays de
baisser le poids de l'IS qui porte sur l'ensemble de ses entreprises pour
conserver les quelques entreprises qui pourraient se délocaliser et
tenter d'attirer des entreprises étrangères (ce qui est peu
probable, si l'ensemble des pays se comporte de la sorte) que de laisser se
délocaliser les quelques cas existants. Il en est de même en ce
qui concerne l'effet d'une baisse du poids de l'IS sur les pratiques
d'optimisation.
Le problème doit être résolu au niveau de l'Union
européenne par la mise en place, par exemple, d'un taux minimal en
dessous duquel les pays ne pourraient pas descendre, à l'instar de ce
qui est fait pour la TVA. Comme nous le verrons plus bas, aucune proposition ne
va dans cette direction.
II. L'imposition des opérations transnationales
Comment sont imposés les groupes dont les opérations
s'étendent à l'ensemble de la Communauté et quels sont les
défauts de ce système ?
1. La situation de fait
Tout
résident est imposable dans son pays de résidence. Le statut de
résident dépend cependant de la forme juridique de la
société. Une filiale, dotée d'une personnalité
juridique et fiscale, sera considérée du point de vue du pays
d'accueil comme une société résidente et du point de vue
du pays d'origine de la société mère comme un contribuable
étranger. En revanche, les établissements non dotés d'une
personnalité juridique (succursales ou branches) sont des non
résidents.
L'imposition des bénéfices des sociétés peut
reposer sur deux principes : le principe de la
source (ou du
territoire)
et celui de
la résidence (ou du
bénéfice mondial)
. Selon le premier, un pays impose tous
les revenus engendrés sur son territoire, qu'ils aient été
réalisés par des résidents ou des non résidents.
Ainsi, dans un pays qui applique le principe de la source, les
bénéfices des entités de groupes étrangers sont
imposés et les sociétés nationales doivent exclure de
leurs résultats imposables les bénéfices de leurs
entités étrangères. En contrepartie, les déficits
subis à l'étranger ne sont pas imputables dans le pays d'origine.
Un pays qui applique le
principe de résidence doit imposer tous
les revenus perçus par les résidents nationaux, qu'ils aient
été réalisés sur le territoire national ou à
l'étranger. Les pertes subies à l'étranger peuvent
être imputées de leurs bénéfices.
La France applique dans la majeure partie des cas le principe de la source,
mais autorise sous certaines conditions les groupes internationaux à
utiliser le régime du bénéfice consolidé
59
(
*
)
, autrement dit, le principe de
résidence. Les autres pays membres appliquent le principe de
résidence, mais se réservent le droit d'imposer les entreprises
non résidentes.
De fait, dans la majorité des cas,
étant donné la définition du statut de résident, le
bénéfice des entreprises est imposé dans le pays de la
source de production.
Les sociétés mères
localisées dans un pays qui appliquent le principe de résidence
sont autorisées
60
(
*
)
à imputer sur l'impôt exigible les
impôts payés par leurs
succursales
à
l'étranger. Elles ne peuvent pas en revanche intégrer dans leur
résultat les bénéfices (pertes) de leurs
filiales
.
Ce système est insatisfaisant à plusieurs égards et est
critiqué par la Commission et par les entreprises. Il subsiste des
discriminations en fonction de la nationalité et certains revenus
subissent une double imposition.
-
Etant donné l'imposition séparée de chaque entité
d'un groupe multinational, la déduction sur le bénéfice de
la société mère des pertes subies par des entreprises
localisées à l'étranger, n'est actuellement
autorisée que pour les succursales et non pour les filiales. Autrement
dit, la compensation des pertes entre filiales d'un même groupe mais
localisées dans deux pays distincts n'est pas autorisée. De fait,
le régime de bénéfices consolidés est quasi
réservé aux seuls groupes nationaux
61
(
*
)
c'est-à-dire
réservé aux sociétés mères et filiales
résidentes. On est alors en présence d'une « discrimination
positive » en faveur des filiales nationales
62
(
*
)
. Il s'agit là pour la
Commission d'un obstacle à la libre circulation du capital qu'il faut
supprimer.
Autre source d'insatisfaction, le système actuel est potentiellement générateur de doubles impositions pour les flux de revenus (dividendes, revenus d'intérêts, etc.), qui circulent entre une filiale et sa société mère (voir annexe 1). Certes les directives de la Commission et tout un ensemble de convention bilatérales ont partiellement résolu le problème de la double imposition des dividendes , mais le système reste complexe et le problème demeure entier pour les autres catégories de revenus.
Les dividendes
La
directive 90/435
(mère-filiale) stipule que la double imposition
des dividendes doit être évitée lors de leur rapatriement.
D'une part, le taux de prélèvement à la source sur les
dividendes distribués doit être nul dans le pays de la source. Ces
dividendes ne doivent en principe supporter que le taux de l'IS du pays
d'accueil. D'autre part, ces revenus sont, soit exonérés lors de
leur rapatriement (système de l'exemption), soit
réintégrés dans le bénéfice de la
société mère donc soumis à l'IS avec en
contrepartie un crédit d'impôt égal à l'impôt
sur les sociétés supporté à l'étranger.
Cependant, ce crédit est plafonné dans la limite de l'impôt
sur les sociétés, payé dans le pays de résidence de
la société mère. Les pays dans leur grande majorité
utilisent le système de l'exemption. Seuls trois pays en Europe, la
Grande Bretagne, l'Irlande et la Grèce appliquent le crédit
d'impôt. La double imposition des dividendes n'est cependant pas
totalement corrigée car elle ne s'applique qu'aux dividendes
payés aux sociétés mères qui détiennent au
moins 25 % de leur filiale
63
(
*
)
. La Commission a émis en 1993 une proposition
de directive visant à élargir le champ d'application de la
directive de 1990. Mais cette proposition est restée sans suite. Le
système des conventions bilatérales a pris, dans une certaine
mesure, le relais pour le traitement fiscal de la circulation des dividendes
entre entreprises ne bénéficiant pas de la directive
européenne
64
(
*
)
.
Cependant, en l'absence de convention, l'investissement est clairement
pénalisé. Par exemple, une société résidente
dans un pays n'ayant pas signé de convention avec la France devra payer
sur les dividendes d'origine française rapatriés l'IS
français plus une retenue à la source de 25 %.
Enfin, les doubles impositions sont en partie supprimées pour les
entreprises, les asymétries de traitement sont en revanche beaucoup plus
marquées lors de la distribution des dividendes aux actionnaires
personnes physiques. La non généralisation de l'avoir fiscal et
la présence du système de l'exonération des dividendes au
niveau des entreprises (pour les plus importantes) créent des
inégalités de traitement très fortes entre les
actionnaires en fonction de leur nationalité (voir chapitre sur
l'imposition du capital).
Paiements d'intérêts, redevance etc.
Les dividendes ne constituent pas les seuls revenus qui transitent entre une société mère et sa filiale. Les paiements d'intérêts et autres redevances sont aussi concernés. Or ces derniers font souvent l'objet d'une retenue à la source et de doubles impositions. La Commission a présenté en 1998 une proposition, COM(1998/67), visant à supprimer cette source d'inefficacité à l'instar de ce qui a été fait pour les dividendes. Là encore, la proposition reste pour le moment sans suite.
2. Optimisation fiscale, localisation des sièges sociaux et régimes dérogatoires
L'application de fait du principe de la source associé à une correction imparfaite des doubles impositions et à la coexistence d'une pluralité de régimes d'imposition dans l'UE permet aux grandes entreprises de minimiser leurs charges d'imposition. Elles sont, de plus, aidées en cela par les régimes dérogatoires mis en place par les Etats membres. Ces pratiques ainsi que les régimes dérogatoires sont nombreux. Il ne s'agit pas ici de les recenser ici (la Commission en a dénombré plus de 200) mais plutôt à l'aide de quelques exemples d'expliquer les mécanismes à l'oeuvre.
Holding financière et système de correction de la double imposition
Une
holding
financière est une structure qui détient des
actions d'autres sociétés. Le motif de création d'une
holding
qui nous intéresse ici est celui d'utiliser en toute
légalité les divergences fiscales des pays. Certaines filiales
doivent être localisées pour des raisons économiques dans
des pays non attractifs fiscalement. La création d'une
holding
judicieusement localisée permettra alors de réorienter la
distribution de dividendes ou d'intérêts et de minimiser ainsi la
charge fiscale. Par exemple, les entreprises peuvent chercher à
exploiter le fait que les pays appliquent différentes méthodes
d'imputation pour la correction des doubles impositions pour les dividendes.
Les systèmes de l'exemption et crédit d'impôt sont
équivalents pour une entreprise multinationale lorsque le pays de
résidence de la société mère a un taux nominal
d'imposition plus faible que celui du pays d'accueil de la filiale.
L'exonération est un système plus avantageux pour les entreprises
que ne l'est le crédit d'impôt si le taux du pays de la
société mère est le plus élevé. A partir de
là, il est possible de mettre en place un montage financier qui
exploitera avantageusement la divergence des systèmes employés.
Le principe général
du montage financier est
celui-ci : la société mère est installée dans
le pays A, la
holding
dans le pays B et la filiale dans le pays C. La
société mère peut financer la holding qui en fait de
même pour la filiale, soit par émission d'actions, soit par
prêts. La société mère et la
holding
reçoivent donc en retour des dividendes ou des intérêts.
Le financement de la filiale (par exemple, émission d'action) en passant
par la holding financière peut être avantageux si les conventions
entre les pays A et C éliminent la double imposition en utilisant le
système du crédit d'impôt alors que les conventions entre
les pays C et B et entre les pays B et A utilisent le système de
l'exonération. Imaginons que le taux d'imposition dans le pays C soit de
15
% et celui de la société mère de 30 %.
Sans holding, le taux que supporte l'entreprise sur les dividendes sera de
30 %. Si cette société passe par la
holding
, elle
supportera
in fine
le taux de 15
%.
Les cas de figure sont aussi nombreux que les combinaisons de choix possibles
de financement. De façon générale, le choix de
localisation des holdings est sensible au traitement fiscal des dividendes, des
intérêts, à l'éventuelle exonération des
plus-values de cessions ; aux règles d'imposition des groupes (mise
en commun des bénéfices et des pertes par exemple), à
l'importance des réseaux de conventions fiscales (ce qui multiplie les
possibilités d'optimisation), aux règles relatives aux ratios
endettement/fonds propres (qui préviennent la sous-capitalisation), etc.
Ces pratiques d'optimisation reposent sur les régimes
dérogatoires mis en place par les Etats membres. Les pays d'accueil des
holdings en Europe sont : Pays-Bas, Belgique, Luxembourg, France,
Allemagne, Espagne. Aucun pays cités ne
constitue dans l'absolu
le lieu d'accueil idéal, mais chacun en fonction des objectifs de la
holding présente (plus ou moins) des avantages comparatifs. Le tableau
5, issu d'une étude du ministère des Finances, donne quelques cas
de figure.
Tableau 4 : Les pays d'accueil des holdings en fonction de leurs priorités
Objectifs |
Pays recommandés |
Pays à éviter |
Echapper à l'impôt sur les plus-values résultant de la cession des participations |
Pays-Bas
|
France |
Bénéficier d'un réseau de convention fiscale important |
France
|
-- |
Conquérir des participations en déduisant des intérêts au titre d'emprunt |
France
|
Pays-Bas |
Bénéficier de l'imposition des retenues à la source |
France
|
-- |
Préparer la succession d'une personne physique |
-- |
France
|
Source : Rapport Bollé, n° 82, Sénat.
Encadré 1 : Exemples d'utilisation des régimes des holdings
L'optimisation fiscale
Comment fonctionnent les régimes spéciaux des compagnies
financières aux Pays-Bas ?
L'avantage du régime des
compagnies financières hollandaises repose non pas sur un taux d'IS
particulièrement favorable mais sur l'existence d'un réseau de
conventions bilatérales relativement important et sur la
possibilité de négocier directement avec les autorités
hollandaises le montant de la base imposable. Par un accord avec
l'administration et un mécanisme de prix de transfert, les
holdings
néerlandaises peuvent échapper à
l'impôt. En effet, les compagnies financières sont
autorisées à constituer des réserves pour risques
financiers, réserves pouvant atteindre 80 % du revenu imposable de
ces sociétés et déductibles de ce même revenu ;
les revenus d'intérêts d'origine étrangère
bénéficient d'un crédit d'impôt et la distribution
des dividendes vers de nombreux pays (Allemagne, France, etc.) n'est pas
soumise à une retenue à la source et exonéré
à l'arrivée (Allemagne, ...).
L'utilisation optimale du crédit d'impôt au
Royaume-Uni
.
Le Royaume-Uni utilise comme méthode
d'élimination de la double imposition (cadre de la directive
mère-filiale) pour la distribution des dividendes de source
étrangère, le crédit d'impôt. Autrement dit, les
dividendes que reçoit une société installée au RU,
de la part de sa filiale (installée hors du RU) sont imposés aux
taux de 30 % mais la société bénéficie en
retour d'un crédit d'impôt égal au montant d'impôt
sur les sociétés versé à l'étranger.
Dès lors que le taux de l'IS du pays dans lequel est
localisée la filiale est supérieur à celui qui
prévaut au RU, une partie du crédit d'impôt est en quelque
sorte gaspillé. En revanche, s'il est inférieur, la
société mère est redevable d'un supplément
d'impôt. La situation optimale est celle où les deux taux sont
exactement égaux. Les filiales des grands groupes sont situées
dans de nombreux pays aux taux divergents. La législation au Royaume-Uni
ne permet pas à la société mère de
bénéficier de compensation entre les différentes sources.
L'utilisation d'une
holding
en centralisant l'ensemble des dividendes
quel qu'en soit l'origine permet à la société mère
d'optimiser.
Les techniques de transferts des bénéfices : la question des prix de transferts 65 ( * )
Le
transfert des bénéfices peut s'effectuer selon plusieurs
méthodes. Mais le principe est toujours le même. Il s'agit de
modifier le bénéfice des filiales de façon à
obtenir la répartition entre les entités du groupe la plus
judicieuse.
Les prix de transferts sont des transactions marchandes dont le prix est
volontairement faussé. Ils permettent de transférer une partie
des bénéfices d'une filiale située dans un pays à
forte imposition vers un pays à faible imposition en vendant à un
prix délibérément minoré les produits d'une filiale
A située dans un pays X à fort taux d'imposition, à une
autre filiale B localisée dans un pays Y à taux d'imposition
moins élevé. Le bénéfice que A aurait dû
retirer de la vente de ses produits à un prix normal est ainsi
transféré à B et supportera une taxation moins forte du
fait de l'existence d'un différentiel de taux d'imposition sur les
bénéfices entre X et Y. La modification de la répartition
des bénéfices entre A et B aboutit pour le groupe à une
économie d'impôt globale mais a des conséquences
divergentes sur les recettes fiscales de X, qui sont affaiblies, et celles de
Y, qui se trouvent au contraire augmentées.
La question des prix de transferts est délicate. Pour les Etats, ces
prix de transactions internes sont une source d'évasion fiscale. Pour
les entreprises, les dispositifs de lutte contre les prix de transferts mis en
place par les différents Etats
66
(
*
)
ne permettent pas de calculer à son juste
coût la valeur de certaines transactions et induisent des coûts de
gestion supplémentaires. Suivant les recommandations de l'OCDE, les
administrations utilisent diverses techniques de correction, dont la
méthode des prix comparables sur un marché de pleine concurrence
(comparable uncontrolled price method).
Mais de telles comparaisons
n'existent pas toujours, ce qui est le cas de la valorisation des biens
immatériels. Par ailleurs, les procédures permettant de calculer
les prix de transferts fiscalement acceptables seraient lourdes et fortement
différenciées entre les Etats et constitueraient de fait une
source supplémentaire de double imposition.
Devant la divergence des intérêts soulevée par de telles
pratiques, la Commission a émis la directive 90/436 (prix de
transferts)
visant à régler les litiges entre les Etats et
les entreprises. Un pays peut, par exemple, revaloriser pour des questions
fiscales une transaction effectuée entre deux sociétés
d'un même groupe mais localisées dans deux pays différents.
Si le pays de l'origine de la transaction ne corrige pas la valorisation de
cette transaction à la baisse, la société est doublement
imposée. D'où des réclamations et des litiges qui opposent
entreprises et Etats membres. Aussi la Commission souhaite-t-elle organiser
un cadre juridique.
La délocalisation des sièges sociaux
La
localisation des sièges sociaux fait partie des pratiques d'optimisation
fiscales. Les cas observés sont moins une délocalisation de
siège que le choix géographique d'un siège social nouveau
à la suite d'une fusion, exemple DEXIA (Belgique), EADS (PB), EURONEX
(PB)
67
(
*
).
.
La localisation des sièges sociaux dépend de nombreux
paramètres mais deux d'entre eux sont apparus au cours des
dernières années comme primordiaux. Les vagues successives de
fusions-acquisitions, les opérations de concentration, qu'a connu
l'Europe ont mis au premier plan le traitement fiscal des opérations de
restructuration. Parmi elles se trouvent l'imposition des plus-values de
cessions d'actifs et les systèmes de compensation de la double
imposition pour les actionnaires personnes physiques (voir chapitre sur
l'imposition du capital).
Les plus-values de cessions d'actifs
L'imposition des plus-values est un élément de premier
plan pour le choix du siège social des entreprises qui fusionnent. La
valeur des actions de la société issue d'une opération de
fusion est supérieure à la valeur des actions des
sociétés fusionnées. Cette plus-value est passible
d'imposition. La Commission a émis une directive (90/434) dont
l'objectif est le report de l'imposition des plus-values dégagées
par les opérations de fusions/acquisitions jusqu'à la cession
effective des titres.
L'exonération est le système appliqué ou en voie de
l'être (Allemagne, Royaume-Uni, Italie) par la plupart de nos partenaires
de l'Union européenne. La France est quasiment le seul pays à ne
pas respecter dans son intégralité cette directive. Les
opérations de fusions, d'apport partiel d'actifs ou encore les
opérations de scissions ne bénéficient de
l'exonération que sous des conditions restrictives
68
(
*
)
. Dans tous les autres cas,
l'imposition s'effectue soit au taux normal de l'impôt sur les
sociétés, soit au taux de 19 %.
III. Les propositions de la Commission
La création d'un marché intérieur sans obstacles fiscaux
se heurte à une contrainte de poids, le principe de subsidiarité
en matière fiscale. La mission que s'est fixée la Commission est,
à l'image de ce qui est fait dans les systèmes fiscaux des
fédérations (Etats-Unis notamment), de faire subsister les quinze
régimes fiscaux tout en minimisant les obstacles fiscaux qui à la
fois créent des coûts pour les entreprises transnationales mais
aussi et surtout distordent leurs comportements. La Commission, nous l'avons
vu, a dans l'optique du marché unique déjà mis en place
des directives, au début des années 1990, visant (certes
imparfaitement) à supprimer les doubles impositions. Plus
récemment, en 1997, face au comportement des Etats membres (la
concurrence fiscale étant nuisible à la neutralité) elle a
initié la lutte contre la concurrence fiscale déloyale, autrement
dit, la lutte contre les non impositions. Aujourd'hui, de nouvelles
propositions relatives aux principes d'imposition des bénéfices
ont vu le jour en 2002. Elles sont présentées comme un moyen de
simplifier pour les multinationales les procédures fiscales (ces
derniers n'ayant plus à faire face à quinze régimes et aux
multiples conventions) ; comme un moyen de supprimer les discriminations
entre résidents et non résidents et entre filiales et
succursales ; et enfin comme un moyen de limiter l'optimisation fiscale,
notamment les problèmes de transferts de bénéfices.
La lutte contre la concurrence déloyale
Le 1 er décembre 1997, le conseil Ecofin a adopté une série de mesures destinée à lutter contre la concurrence fiscale dommageable, ainsi que le principe de l'élaboration d'un code de bonne conduite. La première phase consistait à identifier les régimes susceptibles de générer une concurrence déloyale, c'est-à-dire les régimes qui ont une incidence sur la localisation des activités au sein de l'Union européenne. Environ 230 régimes de compétition fiscale ont été répertoriés et répartis en 5 catégories :
-
Les régimes de groupe (quartiers généraux,
holdings
, centres de coordination, etc.) ;
Les régimes dits financiers (réassurance, sociétés de financement intra groupe) ;
Les régimes dits sectoriels (régimes fiscaux spécifiques à certains secteurs économiques, financement de l'audiovisuel, etc.) ;
Les régimes dits régionaux, avec les différents types d'incitations fiscales en faveur de l'aménagement du territoire ;
Enfin, les régimes divers.
Les propositions relatives à la base d'imposition pour les sociétés transnationales
La
Commission a, dans une communication récente
69
(
*
)
,
proposé
toute une série d'alternatives concernant la base d'imposition des
sociétés multinationales. La principale alternative consiste,
soit à imposer les groupes sur une base communautaire (
Common
Consolidated Tax Base
: CCBT), soit à les imposer sur la base
d'un régime consolidé de la société mère
(
Home State Taxation :
HST). Dans le premier cas (CCBT), il s'agit
de répartir le bénéfice d'un groupe entre les divers Etats
membres dans lesquels celui-ci est présent, selon des clefs de
répartition qui restent à définir (valeur ajoutée,
masse salariale, etc.), chaque Etat imposant alors la part du
bénéfice qui lui revient. La deuxième solution
préconise la généralisation du régime de la
consolidation (quel que soit le statut juridique des entités
rattachées au groupe) au niveau de la société
mère,
le bénéfice étant alors imposé
au taux du pays d'accueil de la société mère.
Ces deux régimes s'inscrivent dans des logiques opposées entre
lesquelles la Commission n'a pas tranché. L'HST réhabiliterait le
principe de la résidence, ce qui avec le régime du
bénéfice consolidé permettrait de supprimer les
comportements de transferts de bénéfice des entreprises. Le
revers de cette proposition est que sans harmonisation ou tout au moins sans un
fort rapprochement des taux nominaux d'imposition, une telle proposition laisse
la porte ouverte à la délocalisation massive des sièges
sociaux dans les pays à bas taux d'imposition. Son adoption aboutirait
à la suppression totale des recettes pour les pays d'accueil des
filiales.
La CCBT préserve le principe de l'imposition à la source. Le
principe de la répartition du bénéfice, selon des clefs
qui diffèrent des résultats affichés, vise à
limiter, voire à supprimer les pratiques de transferts des
bénéfices des entreprises. Ce principe est celui qui est
utilisé aux Etats-Unis et au Canada ; deux
fédérations dans lesquelles les régimes d'impositions des
Etats diffèrent. Il s'agit dans leur cas de la méthode du
fractionnement qui permet de répartir le bénéfice
imposable entre les Etats sur la base de la part des immobilisations, des
ventes et des salaires versés par les filiales dans chaque Etat.
L'application d'un tel principe est d'autant plus simple que les bases
imposables sont harmonisées. Ce qui est le cas aux Etats-Unis mais qui
ne n'est pas encore dans l'UE. En l'absence de rapprochement des taux, ce type
de proposition ne supprime pas les possibilités de
délocalisation. Mais sous l'hypothèse raisonnable que seule la
délocalisation des sociétés mères présente
réellement un risque, l'application de la CCBT
serait
certainement moins onéreuse en termes de pertes de recettes fiscales des
Etats et de risque de concurrence fiscale que celui de HST.
Ces deux propositions présentent la particularité d'être
facultatives. Les entreprises auraient la possibilité d'opter ou non
pour ces régimes. Leur refus impliquerait pour elles l'application du
système actuel.
Quelle imposition européenne des bénéfices ?
Les récentes propositions de la Commission quant à l'imposition
du bénéfice des sociétés laissent tout le champ des
possibles ouvert, le meilleur comme le pire. Le point commun des propositions
actuelles est de ne permettre de lutter ni contre la concurrence fiscale par
les taux, ni contre les problèmes de localisations des sièges
sociaux. Elles divergent fortement cependant, quant aux effets qu'auraient la
concurrence fiscale et les délocalisations sur les recettes des Etats
membres.
La proposition de consolidation de la base imposable au niveau de la
société mère remet en cause la situation actuelle. A
savoir, en pratique, l'application du principe de la source avec des directives
visant à limiter les doubles impositions. Certes cette situation est
loin d'être satisfaisante. Les Etats se livrent à la concurrence
fiscale et les grandes entreprises utilisent les différentiels fiscaux
pour minimiser leur imposition. L'application du principe de résidence
sans rapprochement des taux nominaux d'imposition ou sans fixation d'un taux
minimum, aurait des conséquences néfastes. Certes, elle
supprimerait les pratiques de transferts de bénéfices. Mais ce
principe suppose que ce soit le pays de la société mère
qui, du fait de la consolidation, reçoive l'intégralité
des recettes du groupe (à moins qu'une réallocation des recettes
entre les Etats membres ne soit organisée). D'autre part, l'absence de
convergence des taux
70
(
*
)
va exacerber la concurrence entre les Etats, les enjeux en termes de
recettes (délocalisation des sièges sociaux) étant
considérables. Cette concurrence par les taux est d'autant plus probable
que la Commission n'a déclaré comme déloyale que la
concurrence qui porte sur les régimes dérogatoires.
La proposition de répartition des bénéfices entre les pays
est plus satisfaisante. Elle s'inscrit dans la construction de l'Europe fiscale
déjà entreprise depuis dix ans. Elle permettrait, elle aussi, de
limiter les pratiques de transferts de bénéfices. Même si
elle ne supprime pas tous les gains à la délocalisation, elle
permettrait par l'application du principe de la source de limiter les
transferts de recettes fiscales entre les pays, même en présence
d'un écart d'imposition. Elle gagnerait à être
accompagnée de la fixation d'un taux d'imposition minimum sur les
bénéfices au sein de l'UE.
Que deux propositions aux conséquences si divergentes soient
simultanément émises peut paraître surprenant. Il ne faut
pas oublier que les décisions du Conseil en matière fiscale ne
sont que celles que prennent les
Etats membres à
l'unanimité et que les Etats membres n'ont pas tous les mêmes
objectifs et la même volonté de construire une Europe
homogène. De ce point de vue, la première proposition
(régime consolidé de la société mère) est
celle qui permet de résoudre de façon techniquement simple la
question de l'optimisation fiscale des entreprises mais
au prix d'un
renforcement de la concurrence fiscale des Etats membres. Son adoption
renforcerait la position des Etats membres qui souhaitent le
démantèlement du modèle social européen actuel. La
proposition relative à l'imposition d'une base européenne est
certes beaucoup plus satisfaisante, s'il s'agit de respecter les choix de
société de chaque Etat. Mais, dans la mesure où pour
être menée à terme, elle nécessite
l'unanimité sur de nombreux points, sa mise en oeuvre est plus complexe.
Il faudrait en effet, régler les questions de l'harmonisation des bases,
de l'extension des directives visant la suppression des doubles impositions
(dividendes, intérêts), du système de l'avoir fiscal
à mettre en place au niveau européen. Il serait aussi
nécessaire que les pays se mettent d'accord sur l'application effective
des directives déjà en place, s'interrogent sur le système
des conventions fiscales bilatérales, etc. Autant de questions à
régler qui du fait du principe de l'unanimité, laissent aux
adversaires de l'Europe fiscale, la possibilité de saper son
processus de construction.
Annexe 1: Les sources de double imposition
Le schéma 1 retrace les flux de revenus qui circulent entre une
société mère et sa filiale ou succursale, les
méthodes d'imposition de ces flux et les sources possibles de double
imposition.
Toute entreprise résidente (une succursale ou une branche ne sont pas
considérées comme des résidents, mais elles peuvent
être, dans certains cas, traitées comme telles) est imposée
à l'IS sur son lieu d'implantation. L'imposition des
bénéfices non distribués ou conservés dans le pays
d'accueil de la filiale est différée. En revanche, tout profit
rapatrié (sous forme de dividendes, intérêts royalties,
etc.) peut donner lieu dans le pays d'accueil à un
prélèvement à la source. Une fois rapatriés dans le
pays d'implantation de la société mère, ces flux, en
fonction du système d'imputation choisi par le pays pour éviter
la double imposition, sont soit exonérés soit soumis à
l'IS avec un système de crédit d'impôt. Le second tour de
redistribution, celle qui échoie aux actionnaires, donne encore lieu
à de nouveaux prélèvements (le précompte en France
par exemple).
Schéma 1
LES SOCIÉTÉS TRANSFRONTALIÈRES (SOCIÉTÉ MÈRE RÉSIDENTE EN FRANCE) : SOURCES D'IMPOSITION
Pays étranger France
Filiale
Société Mère
Bénéfices
Intégration dans les bénéfices
1
Distribution à l'actionnaire
Distribution de dividendes
IS
I. IS
III. IR
4
3
2
1. Retenue à la source
-
• Directives mère-filiale (1990-1992) : application du
système de l'exemption ou de l'imputation totale (idem pour les
bénéfices provenant des filiales résidentes)
• Directives mère-filiale (1990-1992) pour les sociétés dont la participation dans le Capital de la filiale est au minimum de 25 % : pas de retenue à la source
• Sinon application des conventions bilatérales ou droit interne (notamment s'il s'agit d'une succursale)
• Sinon imposition à l'IS et mécanisme d'imputation
de l'IS et de l'IR
Intérêts, Royalties
3
Imposition et possibilité de crédit d'impôt si retenue à la source.
2
2. Retenue à la source selon
3. Convention bilatérale
Chapitre 2. 2 : L'impôt sur le revenu
Henri Sterdyniak et Paola Veroni
L'impôt sur le revenu est le plus important sur le plan
redistributif comme sur le plan psychologique. Il représente globalement
10 % du PIB et le quart des recettes fiscales des pays de l'UE. Dans la
période récente, la volonté d'utiliser l'impôt sur
le revenu pour réduire les inégalités de revenu s'est
émoussée. Les réformes mises en oeuvre en Europe durant
les dix dernières années ont visé à réduire
les taux d'imposition marginaux, censés décourager le travail ou
l'épargne. Cette baisse s'est souvent accompagnée de mesures
d'élargissement de la base imposable, par la suppression de certains
abattements ou crédits d'impôt. Souvent, les réformes ont
visé à améliorer la situation des familles avec enfants,
compte tenu des problèmes de natalité en Allemagne et dans les
pays d'Europe du Sud et des problèmes de pauvreté au Royaume-Uni.
Les Pays-Bas ont introduit une réforme originale de taxation
cédulaire. Beaucoup de pays envisagent d'introduire des formules
d'impôts négatifs. Aucune tendance à l'harmonisation ou
à la convergence ne s'est manifestée en Europe Les
réformes, même si elles répondaient à des
préoccupations communes, ont été conduites sur des bases
purement nationales. Il serait cependant nécessaire d'harmoniser les
règles de taxation des dividendes et d'adopter des
« règles de bonne conduite » quant à la
taxation des non résidents.
L'impôt sur le revenu représente globalement 10 % du PIB et
le quart des recettes fiscales des pays de l'UE. C'est l'impôt le plus
important psychologiquement puisque c'est le plus transparent : le
contribuable ressent directement le prélèvement sur ses
revenus ; il voit combien lui coûtent les dépenses publiques.
L'impôt sur le revenu est ainsi celui qui symbolise le plus nettement le
lien citoyen. C'est aussi le seul qui tient compte de la situation d'ensemble
du contribuable et de sa capacité contributive. C'est
généralement le seul impôt progressif, donc celui qui joue
le rôle le plus important en matière de redistribution.
Théoriquement, la structure de l'impôt progressif sur le revenu
devrait être relativement uniforme entre les pays. Chaque contribuable
devrait être imposé en fonction de son revenu selon un
barème, où les tranches successives de revenu sont soumises
à des taux marginaux croissants. Les systèmes nationaux ne
différeraient alors que par le barème, qui reflèterait les
choix de chaque pays en matière de redistribution fiscale. En fait,
d'autres différences existent : l'unité d'imposition peut
être l'individu ou la famille ; les conjoints sans ressources et les
enfants peuvent être pris en compte par le quotient familial, un
crédit d'impôt ou un abattement ; l'ensemble des revenus peut
faire masse ou certains types de revenus (en particulier les revenus
financiers) peuvent être traités de façon
différenciée ; certains revenus peuvent être ou non
taxés (revenus sociaux, loyers fictifs, plus-values
réalisées ou latentes) ; les abattements et les
crédits d'impôt peuvent être plus ou moins importants,
chaque pays pouvant choisir d'essayer ou non d'infléchir tel ou tel
comportement, et ce choix fait, d'agir par des subventions directes ou pas des
incitations fiscales.
Dans la période récente, la volonté d'utiliser
l'impôt, et en particulier l'impôt sur le revenu, pour
réduire les inégalités de revenu, s'est
émoussée dans la plupart des pays européens. Durant la
décennie 1990, ceux-ci ont réduit les taux marginaux de
l'impôt sur le revenu, en particulier le taux supérieur, ceux-ci
étant accusés de nuire au travail et à l'épargne.
La globalisation du marché des cadres a fait naître la crainte que
les pays à fort taux d'imposition soient désertés par les
actifs les plus dynamiques. Aussi, certains pays européens ont-ils
accepté de réduire la redistribution assurée par le
système fiscal. Par ailleurs, le fort taux de chômage des
travailleurs peu qualifiés a conduit plusieurs pays (Grande Bretagne,
France, Pays-Bas...) à réduire la taxation portant sur les actifs
à bas revenus, sans toutefois aller jusqu'à introduire un
système d'impôt négatif. Enfin, le souci d'élargir
la base imposable, pour pouvoir réduire les taux d'imposition sans trop
perdre en recettes fiscales, a conduit à réduire les diverses
possibilités d'abattement ou de crédit d'impôt mis en place
jadis pour favoriser tel ou tel comportement (épargne, achat de
logement, investissements spécifiques). Ainsi, la fiscalité
devrait-elle devenir plus neutre. Cependant, la plupart des pays ont
procédé par des retouches progressives, et non par une grande
réforme.
Aucune tendance à l'harmonisation ou à la convergence ne se
manifeste en Europe, quant à l'impôt sur le revenu. Les
réformes, même si elles répondaient à des
préoccupations communes, ont été conduites sur des bases
purement nationales.
1. Le principe de résidence
Selon le
principe de résidence, chaque pays taxe l'ensemble de ses
résidents sur la totalité de leur revenu mondial. Un individu
peut choisir de s'expatrier pour des motifs fiscaux, mais il doit alors changer
de résidence et il est soumis, dans son pays d'accueil, aux mêmes
impôts que les résidents. Pour que ce principe puisse être
mis en oeuvre, un pays ne doit pas avoir le droit d'offrir une fiscalité
privilégiée à ces résidents de fraîche date.
Cependant, certains pays ont des législations dérogatoires.
Le Royaume-Uni et l'Irlande ne taxent pas les revenus de source
étrangère des personnes physiques étrangères non
transférés dans le pays, pendant les quinze premières
années suivant l'installation (
remittance basis system
). Ceci
permet à un étranger de s'installer au Royaume-Uni en
étant exonéré d'impôt sur ses revenus issus de son
pays d'origine et transférés dans un pays tiers. Ce
système peut permettre d'attirer des individus avec un fort patrimoine
financier, mais il ne permet guère d'attirer des cadres étrangers
(sauf cas particuliers).
Le Danemark et la Finlande offrent aux cadres et chercheurs étrangers
résidents un régime fiscal dérogatoire, comportant un taux
d'imposition nettement allégé par rapport à celui des
résidents nationaux. La généralisation de telles pratiques
de concurrence fiscale déloyale permettrait à cette
catégorie de la population d'être exonérée de la
charge des dépenses publiques, en changeant de pays de résidence,
alors qu'elle jouit de revenus élevés et a
bénéficié généralement de la gratuité
des dépenses d'éducation dans son pays d'origine.
L'ouverture du marché du travail ne doit pas être utilisée
pour permettre aux actifs les mieux rémunérés
d'échapper à l'impôt. La seule mesure acceptable est la
déduction fiscale des frais spécifiques induits par
l'expatriation.
Selon le principe de subsidiarité, chaque pays doit conserver la
maîtrise de son niveau de dépenses publiques et de son
degré de redistribution. Ceci nécessite qu'il conserve la
maîtrise d'une partie de ses recettes fiscales. Or l'impôt sur le
revenu est un des impôts qui est le moins susceptible de concurrence
fiscale, une fois admis le principe que chaque pays taxe la totalité des
revenus de ses résidents, dans la mesure où la mobilité
des personnes est plus faible que celle des capitaux, des entreprises et des
biens. Toutefois, la concurrence fiscale peut jouer pour l'imposition des
revenus du capital financier ; celle-ci pose donc des questions
spécifiques d'harmonisation (voir chapitre II.3). Elle joue aussi, et de
plus en plus, pour les revenus les plus élevés, ceux des cadres
mobiles internationalement ou des individus à fort patrimoine, qui
peuvent s'expatrier pour des motifs fiscaux. Certains pays, en particulier, la
Grande-Bretagne, leur accordent des privilèges spécifiques, qui
induisent une concurrence fiscale déloyale (encadré 1). Les pays
membres devraient réaffirmer le droit de chaque pays à taxer ses
résidents. Celui-ci suppose que les dispositifs dérogatoires
à l'égalité devant l'impôt entre les
résidents permanents, les résidents temporaires (ou de
fraîche date) et les non résidents soient
démantelésLa convergence des systèmes fiscaux
européens n'est pas à l'ordre du jour. Il serait cependant
souhaitable que soient mises en place des « règles de bonne
conduite » en ce qui concerne les non résidents et une
certaine harmonisation pour la fiscalité des revenus du capital. Reste
qu'il est difficile d'harmoniser certaines parties de la fiscalité au
niveau européen sans remettre en cause la cohérence de chaque
système national. Il doit exister une certaine cohérence entre la
taxation des revenus d'obligations et celle des dividendes (puisque les
épargnants peuvent choisir entre actions et obligations) ; une
certaine cohérence entre taxation des dividendes et taxation des revenus
des entrepreneurs individuels (puisque certaines entreprises peuvent choisir
leur régime fiscal) ; une certaine cohérence entre taxation
des salariés et des entrepreneurs individuels.
La première partie présente le poids de l'impôt sur le
revenu dans les pays de l'UE et son évolution au cours des dix
dernières années. La deuxième présente, pays par
pays, la structure de l'impôt et les réformes qui ont
été mises en oeuvre durant cette période. Enfin, la
troisième partie présente la situation en 2001, en examinant le
poids de l'impôt selon les niveaux de revenu et les configurations
familiales.
I. L'IR en Europe, son poids, son évolution
En 2000, le poids de l'IR (tableau 1) allait de 5 % du PIB en Grèce
à 25,3 % au Danemark ; soit, de 13 % des recettes
fiscales en Grèce à 52 % au Danemark. En moyenne, il
représente 10 % du PIB et 24 % des recettes fiscales. Deux
types de pays s'écartent fortement de la moyenne :
-
Les pays scandinaves (Danemark, Finlande, Suède) où
l'impôt sur le revenu est très important, en particulier parce
qu'il finance un système de protection social généreux, de
type Beveridgien, qui donne à tous les résidents des prestations
uniformes d'un montant relativement élevé.
Les pays du Sud (Espagne, Grèce, Portugal) marqués par des structures fiscales relativement archaïques où les impôts indirects sont très importants et que l'impôt sur le revenu ne joue qu'un rôle mineur.
Tableau 1 : Impôt sur le revenu en Europe
|
En % du PIB |
(1) |
|||
1970 |
1980 |
1990 |
2000 |
2000 |
|
Autriche |
7,2 |
9,2 |
8,5 |
9,6 |
22,2 |
Allemagne |
8,8 |
9,8 |
9,0 |
9,6 |
25,3 |
Belgique |
8,7 |
15,4 |
13,9 |
14,3 |
31,1 |
Danemark |
19,6 |
22,9 |
24,8 |
25,3 |
52,4 |
Espagne |
1,9 |
4,7 |
7,2 |
7,2 |
19,5 |
Finlande |
12,8 |
14,0 |
17,2 |
15,1 |
32,5 |
France |
3,8 |
4,7 |
4,6 |
8,3 |
18,3 |
Grèce |
2,0 |
3,6 |
4,1 |
5,0 |
13,1 |
Irlande |
5,5 |
10,0 |
10,7 |
9,9 |
31,5 |
Italie |
2,8 |
7,0 |
10,2 |
10,1 |
23,9 |
Luxembourg |
6,7 |
10,9 |
9,5 |
7,6 |
18,1 |
Pays-Bas |
9,9 |
11,4 |
10,6 |
6,3 |
15,1 |
Portugal |
n.d. |
n.d. |
4,7 |
6,0 |
17,4 |
Royaume-Uni |
11,7 |
10,4 |
10,0 |
10,8 |
28,6 |
Suède |
19,8 |
19,5 |
20,6 |
18,8 |
35,2 |
UE15 |
7,1 |
8,7 |
9,2 |
9,9 |
24,1 |
Etats-Unis |
10,1 |
10,5 |
10,1 |
11,8 (2) |
40,7 (2) |
Japon |
4,2 |
6,2 |
8,2 |
5,7 |
20,9 |
(1) En %
des recettes fiscales ; (2) En 1999.
Source : OCDE,
Statistiques des Recettes publiques
, 2001.
Cependant, la comparaison du poids de l'impôt sur le revenu
soulève plusieurs difficultés :
-
Un même transfert peut être versé sous forme d'une
réduction fiscale (ce qui réduit le poids de l'impôt) ou
sous forme d'une prestation ou d'une subvention. C'est le cas par exemple des
allocations familiales, des mesures incitatives à l'emploi des
travailleurs non qualifiés, etc.
Il existe trois types de prestations sociales : les prestations de solidarité réservées aux plus pauvres, les prestations universelles que touchent tous les ménages, les prestations d'assurances (retraites, chômage) réservées aux personnes cotisantes et dépendantes des cotisations versées. Logiquement, les deux premières (qui n'ont plus de lien avec l'activité) devraient être financées par l'impôt, les troisièmes (qui sont des salaires différés) par les cotisations sociales. Ce n'est pas toujours le cas : en France, par exemple, les prestations famille et maladie sont financées par des cotisations, ce qui réduit le poids de l'impôt sur le revenu. L'impôt sur le revenu est particulièrement élevé dans les pays Beveridgiens, où il finance les prestations maladie, famille et des prestations retraites universelles. Il est plus bas dans les pays bismarckiens, où les retraites sont financées par des cotisations, surtout si, de plus, les cotisations financent aussi des prestations universelles ou de solidarité.
La frontière entre l'impôt sur le revenu et les cotisations sociales n'est pas toujours claire. Où faut-il classer la CSG ?
Dans certains pays, il existe des impôts locaux assis sur le revenu ; dans d'autres, ceux-ci sont forfaitaires ; dans d'autres, encore assis sur le logement (avec éventuellement une correction pour tenir compte du revenu). L'importance des impôts locaux varie énormément selon les pays. Dans les pays où il est important, ils sont assis sur le revenu et donc inclus dans le tableau 1.
Un impôt sur le revenu peut être fortement progressif et incitatif tout en rapportant relativement peu (s'il exonère beaucoup de ménages du bas de l'échelle et comporte beaucoup de mécanismes de dépenses fiscales). Il peut être proportionnel et rapporter beaucoup. Il n'y a pas de lien direct entre le poids de l'impôt et son impact en termes d'incitation et de redistribution.
1. La base
En
principe, l'impôt sur le revenu devrait porter uniformément sur le
revenu global de l'individu, c'est-à-dire la somme de ses
différentes catégories de revenus : salaires, prestations,
revenus des entrepreneurs individuels, revenus du capital. Ce modèle
théorique n'est jamais mis en oeuvre parfaitement.
Une tradition sociale-démocrate pourrait amener à sous-taxer les
revenus du travail, fruit de l'effort, relativement à ceux du capital.
En sens inverse, l'argument de la double taxation amènerait à
détaxer les revenus du capital puisque le capital dont ils sont issus a
déjà été taxé au moment de sa constitution.
Si le taux d'imposition est de 40 %, une personne qui gagne 100 paye 40
d'impôt ; si elle épargne 60, l'année suivante elle
aura 3 de revenus du capital (pour un taux d'intérêt de 5 %),
donc 1,8 après impôt. Sans impôt, elle aurait eu 5. Le taux
d'imposition effectif est alors de
64 %. Cependant, cet argument
peut aussi s'appliquer au travail qualifié, qui suppose une
période d'éducation financée par des revenus (ceux des
parents) qui ont eux aussi été soumis à l'impôt sur
le revenu. Le principe d'équité horizontale amène à
considérer qu'il faut taxer chaque revenu l'année où il
est gagné et donc à refuser l'argument de double taxation.
La volonté d'inciter à l'épargne, puis, dans les
années 1980, les risques d'évasion fiscale par des placements
à l'étranger ont conduit à de nombreuses mesures
d'allègement de l'impôt sur les revenus du capital financier. Dans
les années 1990, un certain retour de balancier est intervenu. Reste
que, dans la plupart des pays, les revenus d'intérêt sont
taxés à un taux spécifique plus bas. L'harmonisation
fiscale, elle-même, pourrait conduire à la
généralisation d'une taxation spécifique à un taux
de 20 ou 25 %. Ceci est contraire au principe de l'équité
horizontale et nuit à la progressivité de l'impôt, mais est
difficilement évitable : une taxation plus forte pourrait inciter
des contribuables les plus riches à placer leurs fonds hors de l'UE et
à ne pas déclarer leurs revenus financiers.
En toute logique, l'imposition devrait porter sur le revenu réel et non
sur le revenu nominal. Quand le taux d'intérêt nominal est de
5 % et le taux d'inflation de 2 %, un prélèvement
libératoire au taux de 25 %, équivaut à un
prélèvement de 41,7 % sur la rentabilité
réelle. L'idéal serait un prélèvement sur les taux
réels, mais celui-ci est généralement jugé trop
compliqué à mettre en oeuvre. Reste que si l'inflation devient
plus forte, le prélèvement peut devenir excessif : avec un
taux d'inflation de 6 % et un taux d'intérêt nominal de
9 %, un prélèvement de 25 % correspond à un taux
d'imposition de 75 %.
Au sens économique, le revenu inclut les plus-values réelles sur
les actifs financiers. Ce devrait être les plus-values latentes qui sont
taxées (et non seulement les plus-values réalisées) de
façon à rendre homogène le traitement de tous les revenus
du capital. Ce n'est généralement pas le cas. Les plus-values ne
sont taxées qu'au moment de leur réalisation et à un taux
relativement faible ; les moins-values ne sont généralement
fiscalement déductibles que des plus-values. Compte tenu de la forte
volatilité des plus-values, ceci évite de trop faire
dépendre les rentrées fiscales de la situation boursière.
La valeur ajoutée des entreprises se repartit en salaires, revenus des
entrepreneurs individuels, intérêts, dividendes et profits non
distribués. L'équité horizontale voudrait que ces cinq
types de revenus soient traités de la même façon. Ceci
supposerait qu'ils soient tous soumis à l'impôt sur le
revenu : les actionnaires devraient payer un impôt sur la
totalité des profits, distribués ou non, tout en
bénéficiant d'un avoir fiscal intégral. En fait, les
intérêts bénéficient généralement d'un
traitement privilégié. Les dividendes n'ont pas toujours droit
à l'avoir fiscal. De plus en plus, se développe un système
où l'impôt sur les sociétés n'est pas
remboursé aux actionnaires tandis les dividendes sont
intégrés à l'impôt sur le revenu pour un certain
pourcentage réduit.
Si t est le taux marginal de l'IR, s le taux
de l'IS et x le pourcentage des dividendes imposés, l'imposition totale
est de s + (1 - s)xt au lieu d'être de t. Ce système est d'autant
plus désavantageux pour le contribuable que t est faible. Par exemple,
si s = 33 %, x = 0,5, un ménage taxé à 50 % sera
taxé à 49,75 % sur ses dividendes ; un ménage
taxé à 30 % à 43 %. Les profits non
distribués sont taxés à l'impôt sur les
sociétés et subissent parfois une taxation des plus values au
moment de la vente des actions. Pour un taux d'IS de 33 % et une taxation
spécifique des plus-values de 25 %, la taxation totale des profits
non distribués peut être de 49,75 %. Ce système
favorise l'endettement au détriment des fonds propres. Mais aligner la
fiscalité des dividendes sur celle des intérêts serait
inéquitable par rapport au revenu du travail
et créerait
une forte distorsion au détriment des entrepreneurs individuels.
La France traite différemment les salaires et les pensions (qui
bénéficient d'un allègement de 20 %) et les autres
revenus afin de
compenser les possibilités de fraude plus grande
des revenus non salariaux. C'est le seul pays qui a cette pratique. Notons que
les dividendes et les revenus d'intérêt, pourtant
déclarés par un tiers, ne bénéficient pas de la
déduction de 20 %.
Dans la plupart des pays, les loyers fictifs (le revenu dont
bénéficie le contribuable qui occupe le logement dont il est
propriétaire) ne sont pas taxés. Ceci n'est pas conforme au
principe de l'équité horizontale, mais incite à
l'accession à la propriété.
Dans la plupart des pays, les prestations vieillesse et chômage sont
normalement taxées tandis que les cotisations ne figurent pas dans la
base imposable. L'Allemagne fait exception, qui n'impose qu'une fraction des
retraites (32 % si la personne a pris sa retraite à 60 ans). Ceci
est contraire à l'équité. Par contre, les prestations
famille sont généralement exonérées.
2. Allègements et crédit d'impôt
Le revenu imposable peut être diminué par cinq types d'abattements :
-
Un abattement général qui représente une sorte de
minimum vital, auquel peuvent s'ajouter des abattements pour conjoint et
enfants à charge (voir plus loin).
Des abattements pour les frais encourus pour l'acquisition du revenu (les frais professionnels).
Des abattements pour prendre en compte certaines charges (pensions alimentaires...).
Des abattements spécifiques pour certaines catégories de contribuables (abattements pour les salariés).
Des abattements pour certaines dépenses (intérêts des emprunts immobiliers...).
Autant les abattements sont justifiés quand ils visent à mieux cerner le revenu disponible du ménage, autant ils sont contestables quand ils sont des subventions déguisées : ils profitent surtout aux plus riches, aux mieux informés ; ils sont contraires aux principes de l'équité horizontale ; réduisant la base fiscale, ils obligent à augmenter les taux d'imposition ; leur coût n'apparaît pas directement.
Les crédits d'impôt sont généralement des formes de prestations ou de subventions. On peut citer :
-
Les crédits d'impôt pour conjoint et enfants à charge
(voir plus loin).
Les crédits d'impôt pour inciter à certaines activités (emploi).
Les crédits d'impôt pour inciter à certains dépenses ou investissements (intérêts des emprunts immobiliers...).
Tableau 2 : Principaux abattements spécifiques et crédits d'impôt
|
Abattements |
Crédits d'impôt |
Allemagne |
Frais
professionnels forfaitaires (3,2 % du SMO)
|
|
Autriche |
Frais
professionnels forfaitaires (0,8 % du SMO)
|
Crédit pour les salariés (1,7 % du SMO) |
Belgique |
Frais
professionnels dégressifs (6,4 % au niveau du SMO)
|
Achat
d'actions de son entreprise
|
Danemark |
Frais
professionnels (plafonnés à 1,6 % du SMO)
|
|
Espagne |
Frais
professionnels dégressifs (15 % au niveau du SMO)
|
Dons aux oeuvres |
Finlande |
Frais
professionnels (plafonnés à 1,6 % du SMO)
|
|
France |
Frais
professionnels (10 % du salaire)
|
Dons aux
oeuvres
|
Grèce |
Frais
professionnels (8,4 % du SMO)
|
|
Irlande |
Frais
professionnels (5,8 % du SMO)
|
|
Italie |
Dépenses pour la résidence principale |
Crédit dégressif pour les salariés et
retraités (2,4 % du salaire au niveau du SMO)
|
Luxembourg |
Frais
professionnels (3,1 % du SMO)
|
|
Pays-Bas |
Frais
professionnels (5,7 % du SMO)
|
|
Portugal |
|
Dépenses de santé, d'éducation
|
Royaume-Uni |
Intérêts versés
|
Crédit pour les familles de travailleurs (WFTC) |
Suède |
Intérêts versés
|
|
Note : SMO : Salaire moyen ouvrier.
Source :
European Tax Handbook, 2001.
3. L'individu ou la famille
Les pays peuvent imposer les individus ou les familles. Dans le premier cas, chaque adulte paie un impôt correspondant à ses revenus propres ; dans le second, les familles sont imposées globalement sur l'ensemble de leurs revenus. Des quinze pays de l'Union européenne, cinq pays pratiquent le quotient conjugal : le couple paie deux fois l'impôt que paie un célibataire qui aurait leur revenu moyen. Trois pratiquent l'imposition séparée pure. Sept pays pratiquent l'imposition séparée, mais le conjoint d'une personne sans revenu bénéficie d'un abattement ou d'un crédit d'impôt. L'importance de la réduction dépend du montant du crédit ou de l'abattement tandis que dans le quotient conjugal, elle dépend de la progressivité de l'impôt.
Tableau 3 : Traitement fiscal des couples mariés
|
Système |
Aide au conjoint sans revenu* |
Allemagne |
Quotient conjugal |
13,3 |
Autriche |
Imposition séparée avec crédit d'impôt |
2,3 |
Belgique |
Imposition séparée après partage du revenu |
13,1 |
Danemark |
Imposition séparée avec crédit d'impôt |
12,3 |
Espagne |
Imposition séparée avec abattement |
6,6 |
Finlande |
Imposition séparée pure |
0 |
France |
Quotient conjugal |
7,1 |
Grèce |
Imposition séparée pure |
0 |
Irlande |
Quotient conjugal |
12,2 |
Italie |
Imposition séparée avec crédit d'impôt |
8,3 |
Luxembourg |
Quotient conjugal |
10,9 |
Pays-Bas |
Imposition séparée avec abattement |
7,3 |
Portugal |
Quotient conjugal |
5,0 |
Royaume-Uni |
Imposition séparée avec crédit d'impôt |
1,5 |
Suède |
Imposition séparée pure |
0 |
Japon |
Imposition séparée avec abattement |
1,8 |
Etats-Unis |
Imposition séparée avec abattement, ou imposition conjointe |
4,4 |
*
Réduction d'impôt d'un couple où l'un des conjoints gagne
le salaire moyen et l'autre est sans revenu par rapport à l'impôt
d'une personne qui gagne le salaire moyen, en pourcentage du revenu disponible
de cette personne.
Source :
European Tax Handbook
, 2001
,
calcul des auteurs.
Le quotient conjugal est le système le plus équitable si
effectivement les deux membres du couple mettent leurs revenus en commun. On
peut lui faire deux reproches : la collectivité subventionne en
somme la non activité d'un des conjoints ; ceci est justifié
si cette
inactivité
s'explique par le chômage, la maladie,
un handicap ou l'éducation d'enfants, moins s'il s'agit d'une pure
oisiveté ; mais il serait difficile de distinguer la non
activité justifiée de l'oisiveté. La personne du couple
dont le salaire potentiel est le plus faible (la femme le plus souvent) subit
un taux marginal plus élevé que si elle vivait seule. Le
système est souvent accusé de nuire au travail des femmes
mariées. Toutefois, la hausse induite du taux marginal d'imposition est
faible comparée à celle dont souffre une femme seule, qui perd
les avantages des minima sociaux, en retrouvant un emploi.
Dans les deux systèmes, imposition conjointe ou séparée,
les vrais célibataires, ceux qui vivent seuls, sont
désavantagés par rapport aux couples puisque l'impôt ne
tient pas compte des économies d'échelle permises par la vie en
couple. Ceci est pratiquement inévitable pour ne pas favoriser le
concubinage par rapport au mariage.
4. Le traitement des enfants
Le traitement fiscal des enfants est très divers selon les pays de l'UE. Seule la France pratique le quotient familial. Dans 6 pays, les enfants ne sont pas pris en compte fiscalement. L'Espagne est la seule à pratiquer un système d'abattement des revenus. Enfin, sept pays pratiquent un crédit d'impôt, dont l'importance va de 1 % du salaire moyen à plus de 3 % (au Luxembourg et en Allemagne).
Tableau 4 : Traitement fiscal des enfants
|
Système |
Montant
par enfant
|
Aide fournie pour 2 enfants * |
Allemagne |
Crédit d'impôt |
3,9 |
12,7 |
Autriche |
Crédit d'impôt |
2,6 |
18,7 |
Belgique |
Crédit d'impôt |
1,3 |
15,4 |
Danemark |
Pas pris en compte |
0 |
8,5 |
Espagne |
Abattement |
9,0 |
1,9 |
Finlande |
Pas pris en compte |
0 |
10,0 |
France |
Quotient familial |
- |
8,6 |
Grèce |
Crédit d'impôt |
1,0 |
7,8 |
Irlande |
Pas pris en compte |
0 |
4,2 |
Italie |
Crédit d'impôt |
1,0 |
4,9 |
Luxembourg |
Crédit d'impôt |
3,1 |
18,9 |
Pays-Bas |
Pas pris en compte |
0 |
6,9 |
Portugal |
Crédit d'impôt |
1,3 |
6,8 |
Royaume-Uni |
Pas pris en compte |
0 |
6,6 |
Suède |
Pas pris en compte |
0 |
9,7 |
Japon |
Abattement |
8,8 |
2,0 |
Etats-Unis |
Abattement et crédit d'impôt |
9,1/1,6 |
6,8 |
*
Supplément de revenu disponible avec impôt et allocations
familiales d'une famille avec deux enfants (l'homme gagnant le SMO ; la
femme 33 % du SMO) relativement à un couple de même revenu
primaire.
Source : Calculs des auteurs d'après OCDE,
Les impôts sur
les salaires, 2000-2001
, 2002.
Globalement, en tenant compte de la fiscalité et des allocations
familiales, l'aide fournie aux familles avec enfants est très variable
selon le pays, de 18 % en Autriche et au Luxembourg à moins de
5 % en Espagne, en Irlande, en Italie.
Dans la période récente, de nombreux pays ont pris des mesures
pour augmenter les avantages fiscaux des familles avec enfants. Au Royaume-Uni,
ceci provient de la prise de conscience que beaucoup d'enfants vivaient dans
des familles pauvres ; dans d'autres pays (Allemagne, Espagne, Italie), de
la nécessité de lutter contre le déclin
démographique.
5. Les taux d'imposition
La
plupart des pays ont un barème d'imposition à plusieurs tranches.
L'Allemagne fait exception avec un taux marginal croissant de façon
continue. Le nombre de tranches va de 2 en Suède à 17 au
Luxembourg.
Si la plupart des pays font payer l'impôt à la plupart des
ménages, d'autres ont un seuil d'imposition élevé :
Grèce, France et Suède. En France, toutefois, la CSG frappe la
totalité des revenus.
Le taux maximum est généralement de l'ordre de 50 %.
Toutefois, il n'est que de 40 % au Portugal et au Royaume-Uni ; il
est proche de 60 % au Danemark, en Belgique et aux Pays-Bas. Toutefois, ce
taux est parfois atteint très vite (Irlande, Danemark) ; parfois
pour des revenus élevés (Italie, Portugal, Espagne,
Grèce).
Tableau 5 : Caractéristiques de l'impôt sur le revenu en 2001.
|
Seuil de paiement* |
Nombre de tranches |
Taux maximum |
Atteint pour*... |
Allemagne |
0,31 |
Infinité |
48,5 |
1,93 |
Autriche |
0,57 |
5 |
50 |
2,78 |
Belgique |
0,47 |
7 |
60,6 |
2,84 |
Danemark |
0,16 |
3 |
59 |
1,06 |
Espagne |
0,50 |
6 |
48 |
5,04 |
Finlande |
0,35 |
6 |
55,2 |
2,20 |
France |
0,67 |
6 |
53,25 |
2,74 |
Grèce |
0,67 |
5 |
45 |
5,43 |
Irlande |
0,27 |
2 |
44 |
0,98 |
Italie |
0,16 |
5 |
46,4 |
3,69 |
Luxembourg |
0,43 |
17 |
47,2 |
2,68 |
Pays-Bas |
0,21 |
4 |
60 |
1,93 |
Portugal |
0,53 |
5 |
40 |
4,66 |
Royaume-Uni |
0,32 |
3 |
40 |
1,78 |
Suède |
1,11 |
2 |
55,4 |
1,79 |
Japon |
0,27 |
4 |
37 |
5,27 |
Etats-Unis |
0,23 |
5 |
39,6 |
9,56 |
* En
salaire moyen ouvrier, cas du célibataire.
Sources : OCDE,
Les impôts sur les salaires, 2000-2001,
2002;
European Tax Handbook,
2001, calculs des auteurs.
III. Quelles réformes fiscales ?
De façon générale, les réformes mises en oeuvre en
Europe durant les dix dernières années ont visé à
réduire les taux d'imposition marginaux, censés décourager
le travail ou l'épargne. Cette baisse s'est souvent accompagnée
de mesures d'élargissement de la base imposable, par la suppression de
certains abattements ou crédits d'impôt. Souvent, les
réformes ont visé à améliorer la situation des
familles avec enfants, compte tenu des problèmes de natalité en
Allemagne et dans les pays d'Europe du Sud et des problèmes de
pauvreté au Royaume-Uni.
1. Allemagne
La
réforme fiscale engagée par le gouvernement Schröder vise
élargir la base imposable afin de permettre une baisse des taux
d'imposition. Le taux le plus bas a été ramené de
25,9 % en 1998 à 19,9 % en 2002 ; il devrait baisser
à 15 % en 2005. Le taux maximum, déjà passé de
53 % à 48,5 %, doit baisser à 42 %. Des mesures
ont été prises en faveur des familles, à la suite d'une
décision de la Cour constitutionnelle de 1998. Toutefois, les
présentations officielles de la réforme tendent à majorer
les allègements d'impôts à venir : ceux-ci seront
réduits par la traditionnelle non indexation des tranches du
barème sur l'inflation.
C'est le salaire brut qui est imposé. Les salariés ont droit
à une déduction fiscale de 1 000 euros pour leurs frais
professionnels et de 1 957 euros pour leurs cotisations (qui sont en fait
nettement plus fortes). En contrepartie, les retraites sont soumises à
un traitement fiscal particulier : 40 % de la retraite (avec un
plafond de 1 534 euros) ne sont pas soumises à l'IR. Ceci n'est
guère justifiable du point de vue de l'équité.
L'Allemagne disposait d'un système d'avoir fiscal qu'elle a
remplacé par un système de double taxation des dividendes,
compensé par le fait que les dividendes ne sont pris en compte que pour
la moitié de leur valeur. Ce système n'a guère de
logique : il augmente la taxation des actionnaires à bas taux
d'imposition marginal.
Tableau 6 : Taxation des dividendes en Allemagne
|
Ancien système |
Nouveau système |
Profit |
100 |
100 |
IS |
30 |
30 |
Profit distribué |
70 |
70 |
|
|
|
IR (au taux marginal de 50 %/30 %) |
50/30 |
18,5/10,5 |
Moins crédit d'impôt |
30 |
|
Impôt total |
50/30 |
48,5/40,5 |
Source : Calculs des auteurs.
Les couples peuvent choisir entre une imposition séparée et une
imposition conjointe selon la méthode du quotient conjugal. En raison de
la progressivité de l'impôt, l'imposition conjointe est toujours
plus avantageuse.
Les allocations en faveur des familles ont été
améliorées à la suite d'un arrêt de la Cour
constitutionnelle du 10 novembre 1998, qui considérait que la
fiscalité, en accordant aux parents célibataires un abattement
pour les frais de prise en charge des enfants, défavorisait les couples
mariés. Les ménages peuvent opter entre des allocations
familiales (en 2001 de 138 euros par mois pour les premier et deuxième
enfants, de 150 euros pour le troisième, de 179 euros pour les enfants
suivants) et des abattements fiscaux (1 767 euros par an et par enfant,
3 534 euros pour un couple). En 2001, un abattement supplémentaire
pour prise en charge a été introduit, d'un montant de 773 euros
par an, 1 546 euros pour un couple). Suite à la décision de
la Cour constitutionnelle, le montant des allocations familiales a
été relevé, de 22,7 % entre le premier janvier 1998
et le premier janvier 2000. Une seconde étape entrera en vigueur en
2002. Elle prévoit un nouveau relèvement du montant des
allocations familiales (de 138 à 154 euros pour les deux premiers
enfants, soit une augmentation de 11,6 %), un relèvement de
l'abattement de 3 534 euros à 3 648 euros pour un couple.
L'abattement supplémentaire sera fondu dans un nouvel abattement pour
éducation et formation, d'un montant de 2 160 euros pour un couple.
En échange, certaines déductions seront supprimées.
La formule de calcul de l'impôt a été modifiée en
moyenne tous les trois ans et demi entre 1958 et 2000. Depuis l'année
fiscale 1990, le taux marginal de l'impôt sur le revenu est
linéaire avant d'être stable au-delà d'un certain revenu,
alors qu'il était calculé dans les années 1980 par une
équation du quatrième degré avant la tranche d'imposition
au taux marginal supérieur. Depuis l'année fiscale 1996, deux
tranches linéaires sont distinguées pour le taux marginal avant
la dernière tranche maximum de 53 %, avec progressivité
entre les deux tranches.
Tableau 7 : Les principales mesures de la réforme de l'IRPP en Allemagne
|
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
Cumul |
Taux maximum |
53 |
51 |
48.5 |
48,5 |
47 |
47 |
42 |
- 11 points |
Taux minimum |
23,9 |
22,9 |
19,9 |
19,9 |
17 |
17 |
15 |
- 8,9 points |
Min. non
imposable
|
6681 |
6902 |
7206 |
7235 |
7426 |
7426 |
7664 |
+ 11 % |
Source :
Ministère des finances.
En 2001, le montant de l'impôt T est calculé en fonction du revenu
imposable X selon les formules :
T = 0 si X < 7235 euros
T = (768,85 Y+1990) Y avec Y = (X - 7200)/10 000 si 7235 < X < 9251
T = (278,65Z+2300)Z + 432 avec Z = (X - 9216)/10 000 si 9252 < X < 55007
T =0,485X + 872 si 55007< X
Le salaire net moyen est de 25 000 euros.
Le taux marginal d'imposition augmente de façon progressive de 19,9
à 23 % ; puis de 23 % à 48,5 %. Le seuil de
paiement est relativement bas et le taux de 48,5 % est atteint rapidement.
La réforme prévoit de faire passer ce taux à 42 %.
Par contre, la hausse du minimum non imposable sera sans doute
inférieure à la hausse du salaire moyen sur la période.
2. Autriche
L'unité d'imposition est l'individu ; un conjoint sans
ressource donne droit à un crédit d'impôt (mais celui-ci
est très faible, 1,6 % du SMO). Les enfants donnent droit à
un crédit d'impôt (2,6 % du SMO), qui s'ajoute à des
allocations familiales généreuses.
Les intérêts sont soumis à un prélèvement
libératoire au taux de 25 %. Les dividendes ne
bénéficient pas d'avoir fiscal ; ils sont
intégrés dans le revenu pour la moitié de leur
montant ; comme le taux de l'IS est de 34 %, la taxation globale
des profits distribués (y compris IS) est de 50,5 % pour les
ménages dont le taux marginal de taxation est de 50 % ; de
47,5 % pour ceux au taux de 41 % ; de 44,2 % pour ceux au
taux de 31 %.
Une particularité du système est que les primes de fin
d'année ou les primes de départ (qui ne dépassent pas deux
mois de salaires) sont taxées à un taux
privilégié : 0 % si elles ne dépassent pas
7,2 % du SMO ; 6 % si elles dépassent ce montant.
Tableau 8 : Taux d'imposition en Autriche
Tranches d'imposition, en euros* |
Taux, en % |
Jusqu'à 3 634 |
0 |
De 3634 à 7267 |
21 |
De 7267 à 21 202 |
31 |
De 21 202 à 50 872 |
41 |
Au-delà de 50872 |
50 |
* Le
revenu imposable d'une personne touchant le SMO est de 17 685 euros.
Source :
European Tax Handbook
, 2001.
Les barèmes (crédit d'impôt, tranches des barèmes)
ne sont pas indexés sur l'inflation, ce qui tend à augmenter
tendanciellement le poids de l'impôt. Le taux maximum est 50 %. Les
contribuables bénéficient d'un crédit d'impôt de
5,5 % du SMO, qui disparaît si le contribuable est taxé
marginalement à 50 %. Les crédits d'impôt sont en
partie remboursables.
La réforme de 1988 avait fait baisser le taux maximum de 62 %
à 50 %. Au début des années 1990, un
prélèvement libératoire sur les revenus
d'intérêt a été introduit pour lutter contre les non
déclarations. En 1994, l'abattement général a
été nettement augmenté. En 1996, les possibilités
de déductions (primes d'assurance-vie) ont été
réduites pour les contribuables taxés au taux marginal de
50 %. La réforme de 1998 a surtout augmenté les
crédits d'impôt pour enfants (en même temps que les
prestations familiales). Celle de 1999 a augmenté le crédit
d'impôt général et l'a rendu dégressif. Les taux
n'ont pas été modifiés.
3. Belgique
L'imposition sur le revenu porte sur le salaire net. La
déduction pour frais professionnel est dégressive (de 20 %
à 3 % par tranches de salaires) et plafonnée.
La taxation est individuelle pour les revenus salariaux et les pensions, mais
un conjoint actif peut attribuer 30 % de ses revenus à son conjoint
sans revenu salarial (avec un plafond de 25 % du SMO). Les autres revenus
du ménage sont attribués au conjoint de revenu le plus
élevé.
Plusieurs catégories de revenus bénéficient de taux
libératoires : 33 %, 15,5 % ou 15 % pour les
plus-values selon la durée de détention ; 25 % pour les
dividendes. Les intérêts sont soumis à un
prélèvement non libératoire de 15 %.
Il existe une tranche exonérée (14 % du SMO) et des
abattements pour enfants à charge (10 % du SMO pour 2 enfants). Ces
tranches s'imputent par le bas (soit à un taux de 25 %).
Tableau 9 : Taux d'imposition en Belgique
Tranches d'imposition, en euros * |
Taux, en% |
De 0 à 6100 |
25 |
De 6100 à 8000 |
30 |
De 8000 à 11 450 |
40 |
De 11 450 à 26 300 |
45 |
De 26 300 à 39 500 |
50 |
De 39 500 à 65 600 |
52,5 |
Au-delà de 65 600 |
55 |
* Le
revenu imposable d'une personne touchant le SMO est de 21 508 euros.
Source :
European Tax Handbook
, 2001.
Une contribution supplémentaire de crise de 3 % est en cours de
démantèlement. Il existe une surcharge municipale, qui est en
moyenne de 7 % de l'impôt. L'indexation du barème sur
l'inflation a été rétablie en 1999. En 2001, le bas de la
tranche à 55 % a été fortement relevé. Le
gouvernement veut aboutir à une baisse importante de l'impôt sur
le revenu à partir de 2002. Les mesures envisagées sont :
une hausse forfaitaire des frais professionnels déductibles ;
l'élargissement des tranches du barème ; la suppression des
taux d'imposition à 52,5 et 55 % ; l'alignement du
régime des concubins sur celui des couples mariés ; la
hausse des crédits d'impôt pour enfants (qui deviendraient
remboursables) ; la création d'un crédit d'impôt
remboursable pour les salariés à bas salaires.
4. Danemark
L'unité d'imposition est l'individu. Le revenu imposable est
la somme du revenu personnel (revenus d'activités nets et pensions) et
du revenu du capital (intérêts, dividendes, plus values, loyers,
nets des intérêts versés).
Chaque personne de plus de 18 ans bénéficie d'un crédit
d'impôt remboursable (4,7 % du SMO). Un époux sans ressource
peut le transférer à son conjoint. Les enfants ne donnent droit
à aucun allègement.
La fiscalité comporte un impôt national progressif et surtout des
impôts locaux proportionnels, au taux moyen de 32,8 %, de sorte que
la progressivité globale du système est faible. Le taux marginal
supérieur de 59 % est atteint rapidement.
Tableau 10 : Taux d'imposition au Danemark
Tranches d'imposition en euros* |
Taux** |
De 0 à 20 334 |
39,5 % |
De 20334 à 33045 |
45,5 % |
Au-delà de 33 045 |
59 % |
* Le
revenu imposable d'une personne touchant le SMO est de 30 880 euros. ; **
Impôt national+impôts locaux (au taux moyen).
Source :
European Tax Handbook
, 2001.
Les socio-démocrates au pouvoir depuis le début de la
décennie ont lancé en 1994 un programme quinquennal de baisse
d'impôt pour soutenir l'activité. L'objectif était de
réduire les taux marginaux élevés portant sur les revenus
du travail en élargissant la base d'imposition.
En juin 1998, la réforme fiscale, votée, pour la période
1998-2002, réduit les possibilités de déduction des
revenus négatifs du capital et les taux de déduction des primes
aux fonds de pensions, ce qui permet de financer une nouvelle baisse des taux
d'imposition. Depuis 1994, le taux maximal de l'impôt national a
baissé de 36,5 % à 27,25 %, le taux minimal de
14,5 % à 6,25 %. Toutefois, la part des individus soumis
à la tranche supérieure d'imposition est passée de 20
à 27,5 %. Cette réforme a été financée
par la hausse des taux de cotisations salariés de 5 à 8 % et
par des écotaxes. Depuis 2000, les loyers fictifs ne sont plus
imposés, mais la valeur du logement est soumise à une taxe
locale.
Le système a plusieurs défauts. Le taux d'imposition marginal
s'applique à une grande proportion des actifs, ce qui encourage le
travail à temps réduit. Les enfants ne sont pas pris en compte.
La fiscalité favorise fortement l'endettement (en particulier pour
acheter un logement) et les fonds de pensions au détriment de
l'épargne financière libre.
En novembre 2001, le nouveau gouvernement de centre droit a
décidé le gel des taux, des barèmes et des bases de tous
les impôts.
5. Espagne
L'unité de taxation est l'individu, mais, depuis 1990, un
couple marié peut choisir l'imposition conjointe. La déclaration
conjointe n'est rentable que pour les couples ne disposant que d'un revenu. Le
revenu imposable comprend le salaire net, les revenus des entrepreneurs, les
revenus du capital, les plus-values, les revenus imputés. Les
salariés ont droit à un abattement qui vaut 22 % du SMO pour
les bas salaires (en dessous de 50 % du SMO) et 15 % du SMO (pour les
salaires supérieurs à 80 % du SMO). Cet abattement diminue
nettement les impôts des salariés à bas salaires. Les
revenus imputés sont constitués des loyers fictifs des seules
résidences secondaires (évalués à 1,1 % de
leur valeur cadastrale).
Les dividendes sont soumis à une double taxation ; mais, leur taux
d'imposition est de 1,4t - 0,4, si t est le taux d'imposition marginal du
bénéficiaire (soit 27 % pour un taux de 48 %) ;
compte tenu d'un taux de l'IS de 35 %, l'imposition totale est de :
0,91 t + 9 % ; soit légèrement supérieure à t.
Chaque contribuable a droit à un abattement de 25 % du SMO (qu'un
époux oisif transfère à son conjoint en cas de
déclaration commune). Chaque enfant donne droit à un abattement
de l'ordre de 10 % du SMO.
L'achat d'une résidence donne droit à un crédit
d'impôt plafonné, qui diminue de 25 % (les 2 premières
années) à 15 % les années suivantes, du service de
l'endettement (intérêt et principal).
L'impôt comporte une part nationale et une part régionale qui ont
la même assiette. La part régionale peut être
modifiée par la région.
Tableau 11 : Taux d'imposition en Espagne
Tranches d'imposition, en euros* |
Taux, en %** |
De 0 à 3700 |
18 |
De 3700 à 13 000 |
24 |
De 13 000 à 25 200 |
25,3 |
De 15 200 à 40 600 |
37,2 |
De 40 600 à 68 000 |
45 |
Au-delà de 68 000 |
48 |
* Le
salaire imposable d'une personne touchant le SMO est de 11 820 euros (avant
abattement de 3 350 euros). ; ** Taux moyen.
Source :
European Tax Handbook
, 2001.
La réforme menée en 1992 par le gouvernement socialiste avait
pour but un élargissement de l'assiette fiscale et une incitation
à l'épargne de long terme. Pour financer la réforme, de
nouvelles sources de revenus, comme les avantages en nature, ont
été intégrées dans la base imposable. La
fiscalité des plus-values et des OPCVM a été
allégée.
En 1997, la droite a réduit de 16 à 10 le nombre de tranches de
l'IRPP. La réforme de l'impôt sur le revenu des personnes
physiques mise en oeuvre en 1999 avait plusieurs objectifs :
réduire la charge fiscale et élargir les mesures encourageant le
travail ; accroître la neutralité envers les divers types de
revenus et placements ; remplacer un ensemble d'exonérations par un
revenu minimal exonéré ; abaisser le coût de
perception de l'impôt, libérer des ressources pour lutter contre
la fraude fiscale.
Les taux marginaux ont été réduits de 56 à
48 % pour la tranche supérieure et de 20 à 18 % pour la
tranche inférieure, tandis que le nombre de tranches a diminué de
10 à 6.
Les revenus du capital et du travail sont désormais traités plus
équitablement. La majorité des exonérations sur les
revenus de l'épargne financière furent supprimée. A
l'exception des plus-values à long terme, les revenus du capital sont
intégrés dans le revenu avec compensation entre pertes et gains.
Un revenu exonéré assurant un niveau de vie minimal (
minimo
exento
), prenant en compte les caractéristiques de l'unité
fiscale, a remplacé la plupart des allègements fiscaux,
accusés d'être sources d'inégalités horizontales et
d'offrir de larges possibilités d'évasion fiscale
(dépenses de santé ou d'éducation, loyers, prise en charge
des personnes handicapées, frais de garde d'enfants...).
Le seuil à partir duquel il faut remplir une déclaration a
été relevé à 21 000 euros (au lieu de 7 200 euros
en 1998). Ceci devrait réduire de 5 millions le nombre de
déclarations (soit d'environ un tiers du total des déclarations).
Le revenu imputé des logements occupés par leurs
propriétaires n'est plus imposable, au nom de la simplification.
Selon les estimations officielles, ces réformes ont
entraîné une baisse de la pression fiscale totale de 11 %
(tableau 12). Les contribuables auraient ainsi bénéficié
d'une réduction d'impôts de 4,85 milliards d'euros en 1999.
Tableau 12 : Effets de la réforme de 1999 de l'IRPP
Revenu
|
Contribuables concernés
|
Réduction de la charge fiscale au titre de l'IRPP (en %) |
< 12 020 |
60,3 |
29,7 |
12 020-18 030 |
19,8 |
15,0 |
18 030-30 051 |
14,3 |
8,3 |
> 30 051 |
5,6 |
6,2 |
Total |
100,0 |
11,1 |
Source : Ministerio de economia y hacienda.
Le gouvernement a annoncé une baisse de l'IRPP en 2003 pour stimuler
l'épargne, l'investissement et l'offre de travail. Elle
bénéficierait principalement aux familles, avec un traitement
particulier pour les femmes seules avec un enfant de moins de 3 ans à
charge, des aides aux familles nombreuses (compensation additionnelle à
partir du troisième enfant) et aux familles ayant à charge des
personnes âgées ou des handicapés. Les taux d'imposition
marginaux maximum et minimum pourraient diminuer pour atteindre respectivement
46 % et 15 %, au lieu de 48 % et 18 % actuellement. Selon
les estimations du gouvernement, cette baisse d'impôt
représenterait un montant de 21 milliards d'euros sur les quatre
prochaines années. Par ailleurs, l'introduction d'une allocation pour
rendre financièrement intéressant le travail pour les
salariés à bas revenus est envisagée.
6. France
L'unité d'imposition est la famille. Ceci est assuré par le quotient conjugal et le quotient familial, que la France est le seul pays à en Europe, à pratiquer. L'autre particularité française est de combiner un IRPP fortement progressif, mais de faible rapport avec un impôt proportionnel, le CSG-CRDS, au taux de 8 %, qui frappe l'ensemble des revenus.
Tableau 13 : Taux d'imposition en France
Tranches d'imposition, en euros* |
Taux, en % |
De 0 à 4 050 |
0 |
De 4 050 à 8000 |
8,25 |
De 8 000 à 14 000 |
21,75 |
De 14 000 à 22 730 |
31,75 |
De 22 730 à 37 000 |
41,75 |
De 37 000 à 45 610 |
47,25 |
Au-delà de 45 610 |
43,25 |
* Le
salaire imposable d'une personne touchant le SMO est de 9 200 euros.
Source : Ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie, 2002.
Le revenu imposable comporte les salaires, les pensions, les revenus des
entrepreneurs individuels, les revenus du capital logement et financier. Les
salariés ont droit à une déduction pour frais
professionnel de 10 %. S'y ajoutent pour les salaires et les pensions, une
déduction de 20 % (destinée à récompenser la
moindre fraude fiscale). Aussi, le salaire imposable n'est que de 72 % du
salaire net. Les loyers fictifs ne sont pas imposables. Les revenus
d'intérêt sont, soit non imposables pour certains placements
sociaux ou soumis à des contraintes de durée de détention,
soit soumis à un prélèvement libératoire de
25 %. Les dividendes sont soumis à l'impôt sur le revenu,
avec un avoir fiscal intégral.
L'impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP), progressif, a
été complété par la création de la
Contribution sociale généralisée (CSG) en 1991 et de la
Contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) en 1996,
impôts proportionnels, affectés respectivement à la
Sécurité sociale et au remboursement de la dette de celle-ci. La
CSG avait pour objectif d'élargir la base de financement de la
Sécurité sociale et s'est traduite par un alourdissement sensible
de la taxation de l'épargne. La CSG et la CRDS étant
considérées comme des impôts sur le revenu (IR), la part de
l'IR dans le PIB a très fortement augmenté au cours des
années 1990, passant de 4,8 % en 1990 à 8,5 % en 2001.
L'IRPP
stricto sensu
n'a pas augmenté : il
représentait 3,8 % du PIB en 1990 et 3,7 % en 2001.
Pour le reste, les grandes modifications de la taxation des revenus depuis le
début des années 1990 sont :
-
La réforme en 1994 qui a légèrement simplifié un
impôt très compliqué et réduit le nombre de tranches.
Des baisses de taux à la fin de la décennie.
Une forte diminution des avantages familiaux pour les foyers aisés en 1999.
Une très grande instabilité des nombreux mécanismes d'allègement d'IRPP (dont le nombre a augmenté pendant la première moitié de la décennie et s'est légèrement réduit depuis 1995).
Une réduction des avantages dont bénéficie l'assurance-vie ; des mesures en faveur de l'épargne longue ou risquée (PEP, PEA).
La création de la Prime pour l'emploi en 2001, impôt négatif conditionnel à l'exercice d'une activité professionnelle (et très fortement individualisé).
Tableau 14 : Répartition de l'impôt sur le revenu (y compris Prime pour l'emploi) par déciles en 2002
Déciles |
1 |
2 |
3 |
4 |
5 |
6 |
7 |
8 |
9 |
10 |
Total |
En % de l'IRPP total |
- 0,1 |
- 1,1 |
- 1,5 |
- 1,1 |
1,0 |
2,7 |
4,5 |
7,7 |
14,6 |
73,2 |
100 |
Source : Rapport économique, social et financier du
gouvernement 2002.
La principale modification de l'IRPP a été la réforme de
1994 (applicable aux revenus de 1993) : le nombre de tranches a
été réduit de 12 à 6 et le système des
minorations applicables à l'impôt résultant du
barème a été -- fort heureusement -- supprimé.
Cette réforme a provoqué une baisse de 19 milliards de francs
selon le gouvernement de l'époque, soit d'un peu plus de 6 % du
rendement de l'IRPP. En 1997, le gouvernement Juppé a mis en oeuvre un
plan de réduction de l'ensemble des taux de l'IRPP
71
(
*
)
, qui devait aboutir au bout de
5 ans à une baisse d'un quart de l'IRPP. Seule la première phase
de ce plan a été effectuée (sur les revenus de 1996) car
la nouvelle majorité parlementaire a suspendu son application.
Après une stabilisation des taux pendant trois ans, qui ont abouti en
1999 à des recettes d'IRPP record compte tenu du dynamisme des revenus
en 1998, le gouvernement Jospin a engagé à partir de 2000 un plan
de baisse de l'ensemble du barème sur quatre ans. Ce plan prévoit
que le barème d'imposition des revenus de l'année 2002 sera
{7 ; 20,5 ; 30,5 ; 40,5 ; 46,5 ; 52,5}, alors que les
revenus des années 1996 à 1998 étaient imposés au
barème {10,5 ; 24 ; 33 ; 43 ; 48 ; 54}.
Compte tenu de la progression des revenus réels, ces baisses n'ont pas
porté atteinte au rendement de l'impôt. Ceci s'explique par
l'indexation des tranches, en principe sur la seule inflation. Toutefois, de
1993 à 2001, le premier seuil du barème a été
nettement plus augmenté que l'inflation (+ 2,5 % par an en moyenne
pour une inflation moyenne de 1,4 %), en raison de la forte hausse de 1997
(+ 11,3 %). Les cinq autres seuils, au contraire, ont été
légèrement sous indexés (+ 1,1 % en moyenne entre
1993 et 2001). Ceci a été favorable aux foyers imposés
dans les tranches les plus basses et défavorable aux foyers
imposés dans les tranches les plus hautes.
Le principe du quotient familial (QF), qui est une particularité
française, n'a pas été remis en cause par les
différentes majorités. Cependant, le plafond du QF, en
général indexé, comme les tranches du barème, sur
les prix, a été très fortement réduit en 1999 (d'un
tiers : il est passé de 16 380 francs par demi-part pour les
revenus de 1997 à 11 000 francs pour les revenus 1998 ; il est
remonté à 12 500 francs pour les revenus 2001). Cela a eu pour
conséquence une augmentation sensible de la taxation des familles
aisées.
Les dispositifs donnant lieu à des allègements d'impôt sur
le revenu sont nombreux et très instables. Selon le Conseil des
impôts, il y avait, en 1991, 24 dispositifs de réduction de l'IRPP
alors qu'il n'y en avait que 10 en 1982. En 1995, le nombre
d'allègements a plafonné à 32 et s'est
légèrement réduit depuis. Les divers abattements,
réductions et crédits d'impôt sont théoriquement
justifiés par des objectifs de justice sociale, de stimulation des
secteurs créateurs d'emplois ou d'incitation : favoriser la prise
de risque ou protéger l'environnement. Pourtant, ils provoquent un
sentiment d'injustice.
7. Italie
L'imposition est individuelle. Un époux sans ressource donne
droit à un crédit d'impôt de l'ordre de 2,4 %
SMO ; un enfant donne droit à un crédit d'impôt de
l'ordre de 1 % du SMO. La taxation porte sur le salaire net. Les
intérêts sont soumis à un prélèvement
libératoire de 27 % réduit à 12,5 % pour les
bons du Trésor ou les obligations. Les dividendes sont soumis à
l'impôt sur le revenu avec avoir fiscal intégral.
Les salariés bénéficient d'un crédit
d'impôt : 5,5 % du SMO tant que le salaire ne dépasse
pas 30 % du SMO ; 2,4 % du SMO pour un salaire de 50 % du
SMO ; 2 % du SMO au SMO. Il s'annule pour 5 fois le SMO. Il existe
des crédits d'impôts, non remboursables, au taux de 19 % pour
les dépenses médicales, les intérêts payés
pour l'acquisition de la résidence principale, les primes d'assurances.
Tableau 15 : Taux d'imposition en Italie
Tranches d'imposition, en euros* |
Taux, en %** |
De 0 à 10 000 |
18,5 |
De 10 000 à 15 000 |
25,5 |
De 15 000 à 30 000 |
33,5 |
De 30 000 à 67 500 |
39,5 |
Au-delà de 67 500 |
45,5 |
* Le
revenu imposable d'une personne touchant le SMO est de 18 693 euros.
** Hors impôts locaux (la surtaxe locale est en moyenne de 1,4 %).
Source :
European Tax Handbook
, 2001.
L'IRPP est passé de 8,3 % du PIB en 1990 à 10,1 % en
2000. Cette hausse provient de mesures de révision des tranches et de
suppression de crédits d'impôt entre 1990 et 1993. La suppression
de l'indexation totale des tranches à l'inflation, introduite vers la
fin des années 1980, y a aussi contribué.
La réforme de l'IRPP a été graduelle compte tenu des
marges de manoeuvre permises par la politique de stabilisation
budgétaire.
En 1998 la redéfinition du barème de l'IRPP a permis le maintien
du taux moyen d'imposition malgré la suppression des cotisations maladie
à la charge du travailleur, qui étaient
précédemment déductibles de l'impôt sur le revenu.
Le nombre de tranches a été réduit de 7 à 5. Si
l'abolition de la première et de la dernière tranche a
diminué la progressivité de l'impôt (le taux maximal a
été réduit de 51 % à 46 %),
l'augmentation du seuil d'exemption ainsi que du crédit d'impôt
pour enfants à charge a été favorable aux personnes
à faible revenu. Plusieurs types de revenus du capital
(intérêts et plus-values) ont été soustraits
à l'IRPP et soumis à une retenue à la source à un
taux proportionnel.
La loi de finance pour 2000 comportait une réduction d'un point du taux
appliqué à la deuxième tranche (qui profitait surtout aux
plus hauts revenus). Ceci était contrebalancé par l'instauration
d'un crédit d'impôt pour les salaires inférieurs au seuil
de la deuxième tranche. Par ailleurs, les familles
bénéficiaient de la hausse du crédit d'impôt pour
enfant à charge et de l'introduction d'un crédit d'impôt
pour tout enfant d'âge inférieur à trois ans.
Le supplément de recettes fiscales non prévues (appelé
« bonus fiscal ») considéré comme structurel
a été restitué par la loi de finances pour 2001 sous forme
d'une baisse généralisée de la charge fiscale plus
accentuée pour les plus faibles revenus, grâce à la hausse
du seuil d'exonération et à celle du crédit d'impôt
pour les salaires inférieurs au seuil de la deuxième tranche.
La hausse du crédit d'impôt décroissante en fonction du
revenu individuel augmente le caractère redistributif de l'imposition
mais pose le problème de la neutralité par rapport au nombre de
membres contribuables dans la famille. Cette mesure favorise les couples
mono-actifs appartenant aux tranches intermédiaires de revenu.
Tableau 16 : Barème de l'IRPP 1999-2003 prévu dans la loi de finances pour 2001
Tranches de revenu |
Taux, en % |
|||||
En euros |
En % du salaire moyen |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
0-10 329 |
0-50 |
18,5 |
18,5 |
18,0 |
18,0 |
18,0 |
10 329-15 494 |
50-74 |
26,5 |
25,5 |
24,0 |
23,0 |
22,0 |
15 494-30 987 |
74-149 |
33,5 |
33,5 |
32,0 |
32,0 |
32,0 |
30 987-69 722 |
149-335 |
39,5 |
39,5 |
39,0 |
38,5 |
38,0 |
> 69722 |
> 335 |
45,5 |
45,5 |
45,0 |
44,5 |
44,0 |
Source : Ministère du Trésor.
La loi de finances pour 2002 poursuit les mêmes objectifs redistributifs
que les précédentes. Elle accentue la redistribution verticale,
par une augmentation des crédits d'impôt pour enfant à
charge différenciés selon le revenu, ce qui renforce le
problème de neutralité face au nombre d'actifs dans le
ménage. L'effet redistributif de cette hausse, concentrée sur les
revenus moyens et bas, est renforcé par la suspension de la
réduction du taux de l'IRPP.
Toutefois l'effet progressif trouve ses limites dans la modalité de
baisse du prélèvement par hausse des crédits non
remboursables. La baisse de l'IRPP de 2001 avait déjà fait
ressortir le problème des ménages, qui n'ayant pas un revenu et
donc un impôt dû suffisamment élevé pour
bénéficier de la hausse des crédits, ne profitaient pas de
la réforme. En 2002 environ un tiers de l'augmentation formelle du
crédit d'impôt n'a pas été utilisée. Ce
phénomène concerne un cinquième des ménages et
75 % des plus pauvres.
Le gouvernement actuel envisage un nouveau barème comportant une
exemption pour les revenus inférieurs à 7 750 euros (11 390 euros
avec enfants à charge); une première tranche jusqu'à 103
800 euros imposée à 23 % ; un taux de 33 %
au-delà. La substitution d'abattement aux crédits d'impôt
permettrait de mieux réaliser la progressivité, mais l'absence de
transfert en cas de revenu imposable nul ne résout pas le
problème présent dans la législation actuelle. D'autre
part l'extension d'une exemption si élevée à tous les
contribuables induirait la perte d'un tiers des recettes. Sa limitation aux
revenus les plus faibles comporterait une perte pour les classes moyennes, avec
un effet de seuil provoquant une forte hausse du taux marginal.
8. Pays-Bas
Le
système d'imposition est individuel : les conjoints choisissent
librement qui déclare les revenus (et les charges) communs. Le
système a été fortement réformé en janvier
2001, date à partir de laquelle il est devenu cédulaire. Les
revenus sont partagés en trois catégories (en trois
boîtes) :
La première comporte les revenus du travail, les pensions et les loyers
fictifs. Cependant, ceux-ci sont fortement sous-évalués
(0,8 % de la valeur de l'appartement, plafonné à 7 813
euros en 2001). Les intérêts payés pour l'acquisition du
logement sont déductibles.
Chaque contribuable a droit à un crédit d'impôt de
1 576 euros (une personne sans revenu peut en faire
bénéficier son conjoint). Les actifs ont droit à un
crédit d'impôt supplémentaire, qui atteint 129 euros pour
50 % du salaire minimum et 920 euros pour le salaire minimum à
temps plein. Ce crédit d'impôt est censé encouragé
à l'emploi à temps plein. Les enfants donnent droit à un
crédit d'impôt (138 euros par enfant). Ces crédits
d'impôt ne sont pas remboursables. L'impôt sur le revenu inclut les
contributions à la Sécurité sociale pour la retraite et la
maladie (29,4 % sur les deux premières tranches).
Tableau 17 : Taux d'imposition aux Pays-Bas
Tranches d'imposition, en euros* |
Taux, en % |
De 0 à 14 870 |
32,35 |
De 14 870 à 26 750 |
37,60 |
De 26 750 à 42 532 |
42 |
Au-delà de 42 532 |
52 |
* Le
revenu imposable d'une personne touchant le SMO est de 23 152 euros
Source :
European Tax Handbook
, 2001.
La deuxième boîte comporte les revenus nets du capital provenant
d'une participation substantielle au capital d'une entreprise (plus de
5 %). Ceux-ci sont taxés à 25 %.
La troisième boîte comporte les revenus du patrimoine (autres que
ceux figurant dans la boîte 2 et le loyer fictif). Le patrimoine moyen de
l'année (demi-somme du patrimoine initial et du patrimoine final) est
censé rapporté 4 %, taxé à 30 %. Sa
valeur est donc taxée à 1,2 %. Certains investissements
éthiques bénéficient d'une déduction de 47 000
euros. Il existe de plus un abattement général de 17 600
euros par adulte, majoré de 2 350 euros par enfant. Ce
système assure la neutralité entre les différents types de
placement. L'équité horizontale n'est pas assurée puisque
les revenus du capital sont soustaxés par rapport à ceux du
travail et que les deux catégories de revenus ne font pas masse ;
mais c'est une caractéristique générale des
systèmes fiscaux.
La réforme de 2001 a permis de faire baisser de 60 à 52 % le
taux maximum d'imposition.
9. Suède
L'imposition est individuelle. Les enfants ne donnent droit à
aucune réduction d'impôt. Le revenu imposable est divisé
entre revenu d'activité (les salaires nets des cotisations, revenus des
entrepreneurs) et les revenus du capital (les intérêts nets du
capital, les plus-values, les dividendes).
Les revenus d'activité subissent une taxation nationale progressive et
une taxation locale proportionnelle (au taux moyen de 31 %). Ils
bénéficient d'un abattement, qui décroît avec le
revenu (3,8 % du SMO, à ce niveau). Il existe un crédit
d'impôt remboursable pour les actifs (2 % du SMO, à ce
niveau). Les revenus du capital sont taxés à un taux national
uniforme de 30 %.
Tableau 18 : Taux d'imposition en Suède
Tranches d'imposition, en couronnes* |
Taux, en %** |
De 0 à 252 000 |
31 |
De 252 000 à 390 400 |
51 |
Au-delà de 390 400 |
56 |
* Le
revenu imposable d'une personne touchant le SMO est de 209 420 couronnes
. ; ** Impôt national+impôts locaux (au taux moyen).
Source :
European Tax Handbook
, 2001.
La réforme de 1991 visait à réduire le taux d'imposition
marginal des revenus du travail. Le taux supérieur du barème
national était de 41 % (soit 72 % en y ajoutant les 31 %
de fiscalité locale) ; il est passé à 34 % en
1990 ; puis à 20 % en 1991 (soit 51 % y compris la
fiscalité locale).
Jusqu'en 1991, les revenus du capital étaient imposés comme les
revenus du travail. La déductibilité des intérêts
versés était une forte incitation à l'endettement
immobilier. Les revenus nets du capital étaient négatifs. Depuis
1991, le taux d'imposition des revenus du capital est réduit, ce qui
rend moins intéressant l'endettement. Mais les dividendes restent soumis
à une double imposition, ce qui décourage à
l'investissement en actions des entreprises nationales.
La réforme de 1991 a été financée en grande partie
par l'extension de la TVA. Mais les besoins de financement des administrations
ont obligé en 1994 à engager une politique d'assainissement
budgétaire financée à moitié par la hausse des
cotisations maladie des salariés (de 0,95 % en 1993 à
6,95 % en 1999) et par la hausse du taux maximal de l'IRPP (de 20 %
à 25 %). Les limites des tranches n'ont pas été
indexées de 1995 à 1998.
Le programme pluriannuel annoncé en 2000 vise à augmenter le
seuil de non imposition à l'impôt national et à faire
passer de 20 à 15 % le premier taux de l'impôt national. Les
autorités souhaitent baisser l'imposition pesant sur les plus bas
salaires et le taux marginal supérieur, grâce à la hausse
des écotaxes, mais elles doivent compenser la baisse des taxes sur
l'alcool et le tabac imposée par l'UE.
10. Royaume-Uni
L'impôt sur le revenu est individualisé. Le revenu
imposable comprend le salaire brut (y compris cotisations employés). Les
revenus du capital sont taxés, sauf les comptes destinés à
l'épargne retraite. Les dividendes ne bénéficient que d'un
avoir fiscal de 1/9 et sont taxés aux taux de 32,5 % : au
total, leur imposition est de 55,65 %.
de la simplification de la fiscalité des revenus d'épargne,
l'individualisation de l'impôt, et la modification des abattements et des
crédits d'impôt qui ont eu pour effet de défavoriser les
couples sans enfant et de favoriser les retraités ayant cotisé et
les ménages qui travaillent et/ou ont des enfants. Ces derniers sont
pris en compte
via
un crédit d'impôt appliqué
à un des deux parents (ou partagé entre eux). De façon
générale, les crédits d'impôt jouent un rôle
important dans le système britannique et ont été nettement
développés depuis 1997. L'impôt est collecté par les
entreprises qui versent au fisc les sommes que celui-ci a calculées en
prenant en compte les caractéristiques du contribuable (nombre
d'enfants...) et les autres revenus. Le barème ne contient que 3
tranches (contre 6 en France) et les contribuables bénéficient
d'un abattement forfaitaire de 4 535 livres (soit 17,8 % du revenu
moyen ; l'abattement est supérieur pour les personnes ayant plus de
65 ans).
Tableau 19 : Imposition des dividendes au Royaume-Uni
Profit |
100 |
Impôt sur les sociétés |
31 |
Dividendes |
69 |
Crédit d'impôt |
69/9=7,67 |
Impôt à payer |
(69+7,67)*32,5 %-7,67=24,65 |
Impôt total |
55,65 |
Source : Calculs des auteurs.
Tableau 20 : Taux d'imposition au Royaume-Uni
Tranches d'imposition, en livres* |
Taux, en % |
De 0 à 1 520 |
10 |
De 1 520 à 28 400 |
22 |
Au-delà de 28 400 |
40 |
* Le
revenu imposable d'une personne touchant le SMO est de 14 500 livres Sterling.
Source :
European Tax Handbook,
2001.
Les principales mesures prises dans les années 1990 sont la poursuite de
la diminution des taux et Les taux d'imposition ont diminué
continûment depuis la fin des années 1970. Sous les conservateurs
(1979-1996), la baisse des taux a été très forte : le
taux marginal supérieur est passé de 98 % dans certains cas
à 60 % puis 40 %. Le passage de 60 à 40 % du taux
marginal en 1988, s'est accompagné d'une très forte diminution du
nombre de tranches. Les Tories ont supprimé le taux le plus bas
(
lower rate
) un an après leur arrivée au pouvoir et ont
diminué progressivement le taux intermédiaire (
basic
rate
). Ils ont aussi réintroduit un taux réduit dans le
budget pré-électoral de 1992. Après 1992, les abattements
à l'IRPP ont été gelés. Les Travaillistes n'ont pas
remis en cause la baisse des taux marginaux les plus élevés. Ils
ont abaissé le taux réduit à 10 % à partir
d'avril 1999 (au lieu de 20 %) et ont réduit le taux moyen de 1
point à 22 % en avril 2000. La baisse du taux réduit n'a
concerné que les très petits contribuables, puisqu'elle s'est
accompagnée d'une très forte diminution du seuil au-delà
duquel le revenu est imposé au
basic rate
.
Sur 45 millions d'adultes, environ 27,6 sont aujourd'hui soumis à
l'impôt sur le revenu (61 %). Les réformes de l'IRPP se sont
traduites par une augmentation du nombre de contribuables payant les taux les
plus élevés (10 % aujourd'hui, contre 3 % en
1979-1980) : l'indexation des tranches n'a pas toujours suivi
l'inflation, les revenus ont en moyenne progressé plus vite que les prix
et la dispersion des revenus s'est accrue sur la période. Aussi,
malgré la forte baisse des taux, la part de l'IRPP dans le PIB n'a que
très peu varié en presque un quart de siècle. Depuis
1979-1980, soit en 22 ans, le seuil au-delà duquel le taux
supérieur est dû a diminué de 7,8 % en terme
réel. Au contraire, l'abattement (seuil en deçà duquel le
contribuable ne paye pas d'IRPP) a augmenté de 44,4 % à prix
constant.
Dans les années 1990, la prise en compte de la situation familiale a
été fortement modifiée. Avant 1990, les couples
mariés étaient soumis à une imposition conjointe (les
textes stipulaient que d'un point de vue fiscal, le revenu de l'épouse
était considéré comme le revenu de son mari...).
L'imposition conjointe a été supprimée en 1990, mais le
statut marital restait pris en compte par le biais d'un abattement fiscal
accordé aux couples mariés (
married couple's allowance
,
MCA). Cet abattement a été progressivement réduit à
partir de 1993, et supprimé en avril 2000. Jusqu'en 2001, les enfants
n'étaient pas pris en compte dans le calcul de l'imposition
excepté par le biais d'un crédit d'impôt en faveur des
familles à faible revenu avec enfant et dont un des parents au moins
travaillait : le
Family Income Supplement
créé en
1971, remplacé en 1988 par le
Family Credit
, lui-même
remplacé par le
Working Families' Tax Credit
(WFTC) en 1999. La
diminution du MCA a dégagé des ressources qui ont permis, dans un
premier temps, d'augmenter les allocations familiales.
A partir d'avril 2001, a été mis en place un
Children's Tax
Credit
(CTC) en faveur de toutes les familles ayant au moins un enfant de
moins de 16 ans. Il s'agit d'une réduction d'impôt non
remboursable, indépendante du nombre d'enfants, versée aussi bien
aux couples mariés qu'aux couples non mariés et aux
célibataires. Lorsqu'aucun des membres du foyer n'est imposé au
taux marginal supérieur, le CTC est forfaitaire et les couples
décident de la répartition du crédit entre chacun des deux
adultes. Lorsque l'un des deux est imposé à la tranche marginale
supérieure, celui qui gagne le plus doit recevoir le crédit
d'impôt qui est réduit de 1/15
e
de livre pour chaque
livre de revenu au-dessus du seuil de la tranche supérieure Pour les
hauts revenus, le CTC est donc nul.
En 2001-2002, le CTC plein vaut
520 livres. L'abattement pour le calcul du revenu imposable vaut 4 535
livres et le seuil de la tranche supérieure vaut 29 400. Si le plus
haut des deux revenus d'un couple est supérieur à 33 935
livres (4 535+29 400), la réduction d'impôt est
inférieure à 520 livres. Si le plus haut revenu est de
38 000 livres (soit grosso modo, 1,5 fois le revenu moyen), le CTC est de
249 livres (= 520 - (38 000 - 33 935)*(1/15) ). Le CTC devient nul
pour un revenu supérieur à 41 735 livres, soit 1,6 fois le
revenu moyen.
La prise en compte des enfants par le CTC a donc des effets très
différents de ceux du quotient familial. En France, chaque enfant permet
une réduction d'impôt d'autant plus forte que le revenu est
élevé (jusqu'à un certain plafond). Au Royaume-Uni, la
réduction d'impôt est forfaitaire puis dégressive (dans le
cas du WFTC, l'aide pour chaque enfant est forfaitaire, mais elle est
supprimée au-delà d'un certain revenu). En France, chaque enfant
induit une diminution de l'IRPP, qui est plus forte à partir du
troisième enfant, alors que le second enfant (et les suivants) ne
rapporte rien dans le cas du CTC (et une somme identique dans le cas du WFTC).
Deux célibataires à deux enfants qui se marient perdent un CTC.
Le gouvernement unifiera, à partir de 2003, la prise en compte des
enfants dans l'impôt sur le revenu par la création d'un nouveau
crédit d'impôt. Il s'agira d'une prestation globalement
dégressive, avec deux paliers. Le WFTC sera remplacé par un
crédit d'impôt destiné aux plus de 25 ans ayant un emploi,
avec ou sans enfants (
Working Tax Credit
).
Depuis 20 ans, la fiscalité de l'épargne a été
simplifiée, rationalisée et rendue plus neutre
72
(
*
)
. Aujourd'hui, l'épargne
des ménages britanniques se fait essentiellement à travers trois
types de produits qui permettent de ne pas payer d'impôt sur les revenus
d'épargne : l'épargne retraite, l'épargne logement,
et les
Individual Savings Accounts
(ISA). L'ISA, créé en
avril 1999 en remplacement de deux dispositifs proches, permet
d'épargner jusqu'à 7 000 livres par an. Comme dans le cas de
l'épargne logement, les revenus d'épargne et les retraits sont
exonérés. A l'inverse, l'épargne retraite est
exonérée à l'entrée, mais les rentes sont
imposées. Une part du capital accumulé peut même être
sortie en capital, en franchise d'impôt. Finalement, seuls les
très gros épargnants sont concernés par la taxation des
plus-values. Celles-ci sont imposées au barème de l'IRPP. Mais
depuis le budget de mars 1998, un système de dégressivité
temporelle a été mis en place : seul un certain pourcentage
de la plus-value est imposé et ce pourcentage est d'autant plus faible
que la détention est longue. Par contre, l'inflation n'est plus prise en
compte dans le calcul de la plus-value.
11. Irlande
L'unité d'imposition est le couple, mais chaque conjoint peut
choisir l'imposition séparée. Le revenu imposable est la somme du
revenu personnel (revenus d'activité nets et pensions) et des
dividendes. Les intérêts et les plus-values sont soumis à
un prélèvement libératoire respectivement de 22 % et
20 %. Une exonération est prévue pour le revenu
inférieur à 5 205 euros (le double si la déclaration
est commune). La déduction des intérêts pour le financement
de l'activité est prévue ainsi que les primes de l'assurance
santé et les frais médicaux non remboursables. Il existe un
crédit d'impôt au taux standard de l'IRPP (22 %) pour les
intérêts pour l'achat ou la rénovation de la
résidence principale et pour le loyer effectif. D'autres crédits
d'impôt, anciennement des abattements, sont prévus au même
taux : pour un célibataire ou un parent isolé (5 967 euros),
pour un couple marié (le double), pour une personne âgée de
plus de 65 ans (1 000). La progressivité du système est faible.
Le barème comportait en 2001 deux tranches, la première
jusqu'à 17 800 euros à un taux de 22 %, la deuxième
à un taux de 44 %.
Le gouvernement de droite a mis en place une importante baisse
d'impôt : de 1998 à 2002 le taux des deux tranches de l'IRPP
a baissé de 4 points (de 24 % à 20 % pour la
première et de 46 % à 42 % pour la deuxième) et
le seuil d'imposition a été relevé. Tous les contribuables
ont eu droit à des réductions significatives, les revenus bas et
moyens ayant profité le plus de la réforme. La conversion des
abattements individuels en crédit d'impôt a amélioré
la situation des contribuables dans la première tranche de revenu. La
forte réduction de la base imposable a permis d'exonérer
37 % des salariés de l'impôt. La charge fiscale sur le
salaire moyen (IRPP et cotisations incluses) a baissé globalement de
11,4 %, de 8,2 % pour un travailleur gagnant trois fois le salaire
moyen. L'individualisation de l'impôt a profité principalement aux
couples bi-actifs de revenu moyen. Le gouvernement s'est engagé sur une
baisse du taux maximal de l'IRPP de 42 % à 40 % au cours de la
nouvelle législature.
Un bilan
Le tableau 21 permet de comparer les taux d'imposition moyens dans les
différents pays européens d'une famille de deux salariés,
ayant deux enfants. Le premier chiffre rapporte le seul impôt sur le
revenu au revenu disponible : c'est un indicateur du poids ressenti de
l'IRPP ; le second rapporte le total des prélèvements nets
des prestations familiales au coût salarial total ; c'est un
indicateur plus économique (en particulier, il ne dépend pas du
partage du prélèvement entre cotisations sociales et impôt,
entre prestations sociales et impôt).
Le premier indicateur apparaît plus dispersé que le second. Pour
un couple au niveau du salaire moyen, le premier s'étage de 7,9 %
en Espagne à 32,5 % en Suède, alors que le second va de
25,2 % au Royaume-Uni à 46,4 % en Belgique. On peut distinguer
les pays à faible impôt sur le revenu (Espagne, France, Italie,
Royaume-Uni) et les pays à impôt sur le revenu important
(Danemark, Suède, Belgique).
En ce qui concerne le poids global des prélèvements, la France et
le Royaume-Uni taxent relativement peu les bas salaires. Les hauts revenus sont
peu taxés en Espagne et au Royaume-Uni. Au contraire, ils sont fortement
taxés en Belgique, au Danemark et en Suède. Globalement, le
Royaume-Uni se distingue par un faible poids des prélèvements,
mais les retraites publiques y sont faibles. Au contraire, les
prélèvements sont élevés en Belgique, Suède,
Italie, Danemark, France. Les prélèvements sont
particulièrement progressifs en France et en Belgique ; ils le sont
relativement peu en Espagne et en Italie.
Tableau 21 : Taux moyen d'imposition en 2001, couple marié, deux enfants, deux revenus salariaux, la femme travaille et gagne 70 % du salaire du mari
Niveau du salaire/SMO |
0,7 |
1 |
2 |
3 |
5 |
|||||
a |
b |
a |
b |
a |
b |
a |
b |
a |
b |
|
Allemagne* |
0 |
33,2 |
9,5 |
40,2 |
27,1 |
48,0 |
34,6 |
48,7 |
40,3 |
48,6 |
Autriche* |
1,6 |
25,1 |
13,8 |
35,7 |
27,7 |
43,8 |
35,6 |
45,4 |
41,4 |
46,9 |
Belgique* |
20,8 |
39,9 |
28,2 |
46,4 |
39,1 |
56,4 |
49,9 |
62,2 |
48,9 |
66,0 |
Danemark** |
28,5 |
33,1 |
32,5 |
37,2 |
43,9 |
48,0 |
49,1 |
52,9 |
53,0 |
56,8 |
Espagne* |
3,3 |
30,6 |
7,9 |
33,9 |
16,9 |
40,3 |
21,0 |
40,2 |
29,2 |
40,7 |
France* |
6,6 |
23,5 |
11,2 |
40,0 |
16,9 |
47,9 |
21,5 |
51,0 |
27,5 |
54,9 |
Italie* |
13,4 |
38,0 |
16,9 |
42,8 |
25,8 |
49,8 |
30,3 |
53,0 |
34,5 |
56,0 |
Pays-Bas** |
12,4 |
27,1 |
15,5 |
32,0 |
30,1 |
41,1 |
37,9 |
43,6 |
43,6 |
46,7 |
Royaume-Uni** |
12,8 |
19,0 |
16,1 |
25,2 |
21,5 |
32,2 |
26,8 |
36,1 |
32,2 |
40,3 |
Suède** |
26,2 |
42,8 |
29,0 |
46,1 |
37,0 |
53,1 |
41,4 |
57,4 |
48,4 |
63,4 |
a)
IR/salaire net ; b) (IR+cotisations sociales-prestations familiales)/
salaire super brut. Dans le cas français, la CSG/CRDS figure dans
l'impôt sur le revenu.
* Donne droit à une retraite proportionnelle ; ** Donne droit
à une retraite forfaitaire.
Source : Calculs des auteurs d'après OCDE,
Les impôts sur
les salaires, 2000-2001
, 2002.
Le tableau 22 permet de comparer les taux moyens d'imposition à 12 ans
d'intervalle. C'est la permanence qui frappe. Les taux n'ont globalement pas
varié en Belgique et en Espagne. Le Danemark a baissé d'environ 7
points ces taux d'imposition ; la baisse est encore plus nette aux
Pays-Bas (de 14 à 10 points). Le Royaume-Uni les a baissés de 10
à 0 points. L'Italie les a augmentés de 3 à 6 points.
L'Allemagne et, plus encore, la France ont réduit nettement les
prélèvements sur les bas salaires. Globalement, les
prélèvements apparaissent légèrement plus
redistributifs qu'il y a 12 ans.
Tableau 22 : Taux moyen d'imposition, couple marié, deux enfants, deux revenus salariaux, la femme travaille et gagne 70 % du salaire du mari
Niveau du salaire/SMO |
0,7 |
1 |
2 |
3 |
5 |
|||||
1989 |
2001 |
1989 |
2001 |
1989 |
2001 |
1989 |
2001 |
1989 |
2001 |
|
Allemagne |
39 |
33,2 |
41 |
40,2 |
46 |
48,0 |
47 |
48,7 |
50 |
48,6 |
Belgique |
40 |
39,9 |
46 |
46,4 |
56 |
56,4 |
61 |
62,2 |
67 |
66,0 |
Danemark |
41 |
33,1 |
44 |
37,2 |
55 |
48,0 |
59 |
52,9 |
62 |
56,8 |
Espagne |
29 |
30,6 |
34 |
33,9 |
41 |
40,3 |
41 |
40,2 |
41 |
40,7 |
France |
40 |
23,5 |
42 |
40,0 |
46 |
47,9 |
49 |
51,0 |
53 |
54,9 |
Italie |
35 |
38,0 |
37 |
42,8 |
43 |
49,8 |
46 |
53,0 |
50 |
56,0 |
Pays-Bas |
41 |
27,1 |
46 |
32,0 |
51 |
41,1 |
53 |
43,6 |
57 |
46,7 |
Royaume-Uni |
29 |
19,0 |
33 |
25,2 |
36 |
32,2 |
38 |
36,1 |
40 |
40,3 |
Source : Calculs des auteurs d'après OCDE,
Les
impôts sur les salaires, 2000-2001
, 2002.
Pourtant, une tendance commune vers l'atténuation de la
progressivité de l'impôt se dessine maintenant au sein des pays
européens. En France le taux marginal supérieur est redescendu
à 54
% en 1996 et a ensuite été réduit
à 52,5
%, l'Espagne et l'Allemagne se sont engagés
à une baisse progressive du taux supérieur de 11 points
respectivement sur la période de 1997 à 2003 et de 2000 à
2005. L'Italie est la pointe du processus d'affaiblissement de la
progressivité par une réforme, qui met en place un barème
à deux tranches avec un taux supérieur à 33
%.
Cette évolution suit l'abaissement massif des taux supérieurs de
l'impôt sur le revenu mis en place depuis le début des
années 1980 aux Etats-Unis. Ce taux, relevé par l'administration
Clinton, a été ultérieurement baissé par
l'administration Bush. L'évolution fut similaire au Royaume-Uni de 1979
à 1988 avec une baisse du taux marginal supérieur de
98
% à 40
%, non remise en cause par les
Travaillistes.
S'il n'est pas encore clair que cette évolution en Europe corresponde
à la volonté d'un abandon de la progressivité, un
débat théorique et des propositions concrètes d'un
impôt proportionnel couplé avec un transfert universel forfaitaire
apparaissent dans plusieurs pays. Cette réforme radicale de l'imposition
permettrait une forte baisse des taux marginaux pour le haut de la distribution
des revenus. Elle prétend maintenir le principe de la
progressivité grâce à au transfert forfaitaire. Le
problème d'une réforme si radicale est qu'il est difficile
d'assurer à la fois un transfert universel garantissant le minimum vital
et un taux d'imposition non confiscatoire. Dans de nombreux projets, le
financement du transfert universel se ferait par la suppression des actuels
transferts (minimum vieillesse, allocation chômage, etc.) de sorte que
les plus pauvres verraient leur situation se détériorer. La
baisse du taux marginal pour les hauts revenus s'accompagnerait d'une hausse
pour la grande masse des contribuables de revenu moyen.
Compte tenu des exigences de maintien du niveau des recettes, le souci dominant
à l'heure actuelle d'éviter de trop imposer les plus riches
risque d'amener en Europe à une évolution vers moins de
progressivité qui renoncerait à freiner l'accumulation des
grandes fortunes et à favoriser le renouvellement des élites
économiques.
Chapitre 2. 3 : L'imposition des revenus du capital
Réjane Hugounenq
Actuellement, les revenus de l'épargne placés à
l'étranger sont au mieux soumis à une retenue à la source,
au pire totalement exonérés. La raison en est simple. Le principe
de résidence qui constitue aujourd'hui la règle légale
d'imposition et qui lorsqu'il est strictement appliqué supprime l'effet
du différentiel d'imposition sur l'incitation à
délocaliser, n'est en pratique pas appliqué. Il ne peut
l'être que si les détenteurs de capital placé à
l'étranger les déclarent. Dès lors que dans un pays, les
intermédiaires financiers ne sont légalement pas tenus de
coopérer avec les administrations fiscales étrangères, les
possibilités de fraudes sont ouvertes pour les non résidents et
ce indépendamment du niveau des taux d'imposition. La résolution
de ce problème pour ce qui est de l'imposition des intérêts
passe par la mise en place d'un système généralisé
d'échange d'informations. Les Etats membres étaient parvenus en
juin 2000 à un accord sur ce choix, accord cependant soumis à la
mise en oeuvre de négociations avec les pays tels que les Etats-Unis, la
Suisse, le Liechtenstein, Monaco, Andorre et Saint Marin afin que ces pays
adoptent des mesures équivalentes. Cette proposition qui devait
être transformée en directive fin 2002 a été
abandonnée à cette même date suite à l'opposition de
la Suisse. Pour les dividendes, la question de l'échange d'information
se double de celle de l'intégration dans le pays de la source de
l'imposition sur les bénéfices et de l'imposition personnelle.
Seule la généralisation du système de l'avoir fiscal aux
résidents et aux non résidents pour l'ensemble des pays de l'UE
peut permettre une application totale du principe de résidence et
supprimer les inefficacités générées par
l'hétérogénéité des systèmes actuels.
Selon l'approche en termes de capacité contributive
73
(
*
)
les revenus du capital des
ménages devraient être traités fiscalement comme leurs
autres catégories de revenu. Or tel n'est pas le cas. Comme les pays
souhaitent favoriser l'épargne, comme ils craignent la fuite des
capitaux, les revenus du capital font l'objet de nombreuses dérogations
et sont en général moins imposés que les revenus du
travail. De même, tous les produits d'épargne ne supportent pas
les mêmes charges fiscales, l'Etat désirant orienter leur
allocation (vers de l'épargne longue ou risquée). Le traitement
préférentiel des revenus du capital est commun à tous les
pays membres. Par contre, chaque pays se distingue par la gamme des produits
financiers proposés et par leur modalité d'imposition. Dès
lors que les produits d'épargne présentent des
caractéristiques spécifiques de risque, de rendement et de
liquidité, il est difficile de construire un indicateur
synthétique du poids de la fiscalité dans chaque pays. Dans une
perspective de comparaison européenne, il est par contre possible de
donner une indication de la charge fiscale pesant sur l'épargnant le
plus à même de délocaliser son épargne. C'est ce que
nous ferons dans une première partie, en comparant la fiscalité
des pays membres pesant sur les dividendes, les obligations et les plus-values,
en ignorant les régimes dérogatoires, l'épargne
immobilière et l'épargne retraite.
L'épargne mobilière étant très mobile, le
différentiel d'imposition entre les divers pays membres peut être
une cause de délocalisation
74
(
*
)
du capital. Cette dernière nuit à
l'organisation de la compétition entre les places financières en
Europe. Si les résidents du pays A exportent leur capital vers le pays B
en raison d'une imposition avantageuse dans le pays B, les conditions de la
compétition entre les places financières des deux pays sont
faussées. Dans ce cas de figure, les revenus du capital sont
imposés selon le principe de la source. C'est, de fait, le cas
aujourd'hui en Europe en dépit des règles légales qui
stipulent que le principe de résidence doit s'appliquer. La
résolution de ce problème est, au moins techniquement, plus
simple que celui auquel se heurte la Commission pour les entreprises. Elle peut
être circonscrite aux mesures réglementaires à prendre en
Europe pour que soit respecté le principe de résidence. En effet,
si les sièges des grandes sociétés se déplacent
comme nous l'avons vu dans le chapitre sur l'IS, tel n'est pas le cas des
ménages. Ces derniers migrent éventuellement pour échapper
à la fiscalité du stock de capital mais non pour celle portant
sur les revenus du capital. De fait, une application stricte du principe de
résidence suffit à supprimer les effets néfastes des
différentiels de taux. Mais pour qu'un individu paie des impôts
sur les revenus de son capital placé à l'étranger, il faut
que celui-ci les déclare. Dès lors que dans un pays, les
intermédiaires financiers ne sont légalement pas tenus de
coopérer avec les administrations fiscales étrangères, les
possibilités de fraude sont ouvertes pour les non
résidents ; indépendamment du niveau des taux d'imposition,
ce capital est alors quasi défiscalisé. La deuxième partie
traite donc de la question de l'imposition des non résidents ainsi que
des récentes propositions de la Commission qui concernent les revenus
des obligations. L'imposition des revenus des dividendes se heurte à une
difficulté supplémentaire, liée cette fois-ci à la
non prise en compte par certains pays de la double imposition de ces revenus.
Il en résulte un traitement fiscal différencié entre les
investissements nationaux et étrangers en actions. Cette question ainsi
que la possibilité de la généralisation du système
de l'avoir fiscal seront traitées dans la troisième partie.
I. L'imposition des revenus de l'épargne en Europe
Les pays européens ont mis en oeuvre de nombreuses réformes
fiscales sur les revenus de l'épargne tout au long de la décennie
1990. Les taux d'imposition notamment sur les revenus d'intérêts
ont diminué dans l'ensemble des pays tout au long de cette
décennie. L'imposition des dividendes par contre n'a que très peu
évolué. Le gouvernement Blair a augmenté l'imposition des
dividendes mais a réduit le taux de l'IS de sorte qu'au total le poids
de l'imposition n'a été que peu affecté. La France est le
seul pays à avoir augmenté l'imposition des revenus de
l'épargne : durant la décennie 1990, les réformes ont
rééquilibré les contributions aux dépenses
publiques des revenus du travail et du capital (ces dernières
étant très faibles au début des années 1990). Ce
rééquilibrage s'est effectué par le basculement des
cotisations sociales vers la CSG et la mise en place de la CRDS et des
prélèvements additionnels (dont le niveau est aujourd'hui
respectivement de 7,5 %, 0,5 % et 2 %). Le taux d'imposition sur
les revenus de l'épargne a ainsi augmenté de près de 10
points.
Les tableaux 1 à 3 donnent un panorama de l'imposition des grandes
catégories de revenus des capitaux mobiliers (dividendes,
intérêts) et des plus-values pour dix pays européens. Nous
laissons de côté la fiscalité immobilière et celles
des plans de retraite. Dans l'ensemble de l'UE, ces produits
bénéficient tous pour des raisons sociales (accession à la
propriété)
75
(
*
)
ou économiques (inciter à la
constitution de fonds de pensions) d'avantages fiscaux qui tendent à
croître (l'Espagne et l'Allemagne ont récemment augmenté
les avantages fiscaux pour l'épargne retraite). Mais ces formes de
placements ne sont pas mobiles. Nous n'en parlerons donc pas ici.
Les comparaisons effectuées, même limitées aux revenus des
capitaux mobiliers, ne donnent qu'une image partielle de ce qu'est la
fiscalité de cette catégorie de revenu dans chaque pays. Les
régimes dérogatoires sont ignorés. Pour ce qui est de la
France par exemple, les dividendes peuvent être imposés au
Régime général (barème de l'IR) ou
bénéficier d'une fiscalité avantageuse s'ils sont acquis
dans le cadre de plan d'épargne longue (PEA). Par ailleurs, les revenus
considérés ici bénéficient d'abattements
généralement non pris en compte dans les calculs. Or ceux-ci
réduisent considérablement le taux d'imposition auquel est soumis
l'épargnant
76
(
*
)
.
D'une certaine façon, la fiscalité des revenus des capitaux
mobiliers et des plus-values présentée ici est celle à
laquelle fait face un individu qui a une préférence pour le court
terme et le risque ou encore pour l'épargnant qui a épuisé
les possibilités fiscales des régimes dérogatoires. Ce
profil n'est pas celui de la majorité des épargnants et
certainement pas celui de l'épargnant modeste. En témoignent les
structures de l'épargne financière des pays membres (tableau 4).
Par exemple, la France se caractérise par une proportion importante de
l'épargne totale placée sous forme de dépôts plus ou
moins liquides (du CODEVI au plan épargne-logement) et peu
risqués. La détention d'actions y est relativement faible. Quoi
qu'il en soit, la catégorie des épargnants à la recherche
du rendement immédiat maximal est celle la plus susceptible de
délocaliser son épargne.
Tableau 1 : Imposition des dividendes
Législation 2001 |
Résidents |
Taux
d'imposition effectif
|
Non résidents B |
IS + IR corrigé par un système d'imputation (AF) |
|||
France |
IR (52,75 %) plus avoir fiscal (AF) de 50 % restituable (double imposition quasi corrigée) |
52,75 % + prélèvements sociaux de 10 % |
Retenue à la source et remboursement de l'AF si convention (encadré : exemple la convention franco-italienne) |
Italie |
Sur
participations non qualifiées
:
retenue à la
source de 12,5 % ou IR avec AF (58,73)
|
44 % ou 45 % (pour les participations non qualifiées) ou 53 % sur participations qualifiées C . |
Si pas
de convention
: retenue de 27 %. Restitution d'une partie de
cette retenue sur justification de l'impôt dans le pays de
résidence
|
Espagne |
Retenue
à la source restituable (non libératoire) de 18 %
|
53,7 % sans tenir compte des éventuels abattements |
Si pas
de convention
: Retenue à la source libératoire :
25 %
Pas d'AF
|
Royaume-Uni |
IR (barème progressif ; taux de 10 % ou de 32,5 % ) et crédit d'impôt au taux de 1/9 du montant de dividendes distribué. (Double imposition partiellement corrigée) |
47,5 % D |
Si pas
de convention
: retenue à la source
|
IS + IR à taux préférentiel ou retenue à la source libératoire. Pas d'avoir fiscal |
|||
Belgique |
Retenue à la source de 25 % E libératoire ou imposition à l'IR si la globalisation des revenus dans le cadre de l'IR est plus favorable |
54 % |
Si pas
de convention
: Retenue à la source libératoire :
25 %
E
.
|
Allemagne |
Retenue
à la source de 25 % ou 20 %
E
non
libératoire et restituable.
|
43,2 % sans tenir compte des systèmes d'abattements |
Si pas
de convention
: retenue à la source libératoire de
25 % et 20 % (pour les dividendes issus de profit
réalisés à partir de 2001.
|
Luxembourg |
Retenue
à la source de 25 % non libératoire et restituable.
|
44,7 % sans tenir compte des systèmes d'abattements |
Si pas
de convention
|
Double imposition |
|||
Irlande |
IR (taux max : 42 %) |
48 % |
Exemption des dividendes issus d'actions de sociétés irlandaises. |
Suisse |
Retenue
à la source non libératoire de 35 %
|
Les taux d'imposition d'IR sont dépendants des communes et cantons. |
Si pas
de convention
: retenue à la source de 35 %.
|
Cas particulier |
|||
Pays-Bas |
Base
d'imposition : 4 % de la valeur de marché des actifs (actions
ou obligations)
|
|
Si pas
de convention
: même régime que les résidents.
|
A. Ces
calculs sont effectués en supposant que l'actionnaire est imposé
sur ses dividendes au tau maximal du barème et en incluant le montant de
l'IS déjà payé par l'entreprise pour le compte des
actionnaires. Les taux d'IS sont les taux nominaux (hors surcharges voir
chapitre 2.1) : France (33,33 %), Italie (36 %), Espagne
(35 %), RU (30 %), Belgique (39 %), Allemagne (25 %),
Luxembourg (30 %), Irlande (10 %), Suisse (8,5 %), Pays-Bas
(35 %).
B. Il s'agira pour l'ensemble des pays membres des non résidents
français. La France a signé des conventions quasi identiques avec
la totalité des pays membres. Nous donnerons un exemple de l'application
de la convention franco-Italienne dans l'encadré.
C. Le taux effectif est égal pour le cas de la retenue à la
source de 12,5 % à IS(0,36) + (1 - IS)0,125.
D. On suppose pour ce calcul que le taux marginal de l'actionnaire est de
32,5 %. En réalité, seule une partie des dividendes est
imposée à ce taux puisque, les revenus de l'épargne ne
sont pas additionnés avec les revenus du travail mais subissent seuls
l'application du barème progressif. Le taux final de 47,5 est donc
surévalué.
E. Il existe un taux réduit de 15 % dans certains cas de figures
(actions émises avant le 1
er
janvier 1994, etc.).
F. Ces taux sont actuellement augmentés d'une surcharge de 5,5 %
(soit 26,38 % et 21,1 %).
G. Les non résidents reçoivent un crédit d'impôt
égal à 1/9 du montant du dividende après IS et sont alors
soumis à un prélèvement à la source de 10 %,
ce qui en pratique annule toute imposition sur les dividendes après IS
mais ne rembourse pas l'IS.
Sources : European Tax Handbook, 2001, La fiscalité des revenus de
l'épargne Conseil des impôts 1999, Rapport Bollé, Taxation
de l'épargne et risques de délocalisation.
Les dividendes sont imposés au niveau de l'entreprise (IS) et au niveau
de l'actionnaire. L'évaluation de la charge fiscale qui porte
in
fine
sur les actionnaires, ne saurait se limiter à la prise en
compte de la seule imposition personnelle. En effet, l'entreprise s'apparente
à un actif qui procure à ses détenteurs des revenus
différés et non différés, les dividendes et les
profits réinvestis. L'imposition des bénéfices de
l'entreprise constitue dans cette optique une avance au Trésor
acquittée par l'entreprise pour le compte de son actionnaire à la
fois sur l'impôt final dû sur les dividendes et sur les montants
des profits non distribués
77
(
*
)
. L'évaluation de la charge fiscale finale sur
les dividendes doit donc tenir compte de l'imposition prise en charge en son
nom par l'entreprise.
Certains pays restituent à l'actionnaire, par un mécanisme
d'imputation (avoir fiscal), tout ou partie de l'IS acquitté par
l'entreprise. Si ces revenus sont soumis à l'IR, le taux effectif
supporté sur les dividendes est alors celui de l'impôt sur le
revenu. C'est le cas en France et en Italie (pour les participations non
substantielles).
L'Espagne et le Royaume-Uni appliquent ce système mais sans que la
correction de la double imposition soit totale. Le Royaume-Uni a au cours des
années 1990 réduit le taux de l'avoir fiscal qui est aujourd'hui
très faible. Dans ces deux pays, le taux effectif d'imposition des
dividendes est supérieur au taux marginal du barème.
L'Allemagne et l'Irlande ont tout récemment supprimé le
système de l'avoir fiscal pour s'inscrire dans la liste des pays qui
utilisent le système dit « classique »,
c'est-à-dire qui ne corrigent pas la double imposition.
Généralement, la non prise en compte de l'avance payée par
l'entreprise donne lieu à une compensation au niveau de l'actionnaire.
Elle peut prendre la forme soit d'un taux préférentiel (la
moitié du taux du barème de l'IR pour l'Allemagne et le
Luxembourg), soit d'une retenue à la source libératoire dont le
taux est inférieur à celui du barème de l'IR (Belgique et
Italie pour les participations substantielles). L'Irlande et la Suisse
compensent la double imposition en réduisant le taux d'IS. Les Pays-Bas
ont exonéré les dividendes en créant une taxe sur la
richesse mobilière.
La tendance est donc à l'abolition du système de l'avoir fiscal
et à l'application d'un système mixte, IS et imposition
personnelle préférentielle. Le système de l'avoir fiscal a
une logique claire qui consiste à imposer les bénéfices de
l'entreprise uniquement au niveau de leurs détenteurs. Les
systèmes hybrides n'ont qu'une logique de court terme qui consiste
à compenser les effets de la baisse des taux de l'IS (pour des raisons
de concurrence fiscale en Europe) par une hausse de l'imposition directe sur
les actionnaires tout en ne diminuant que très légèrement
les taux des barèmes d'IR.
Le tableau 1 montre qu'en dépit de la diversité des
systèmes appliqués, la charge fiscale supportée par
l'actionnaire dès lors que l'on considère l'IS comme un
pré-paiement est relativement proche dans les divers pays. Elle varie
entre 43 % et 53 %. Seule la France se distingue pour les
contribuables dont le taux marginal est celui de la dernière tranche du
barème par un taux d'imposition sur les dividendes de près de
63 %.
Tableau 2 : Imposition des intérêts sur les obligations d'Etat A
Législation 2001 |
Actionnaires résidents |
Actionnaires non résidents B |
|
Les intérêts sont inclus dans le revenu imposable et taxés au taux marginal du barème (sauf RU) . Une retenue à la source non libératoire peut être appliquée. Il existe des abattements dont les montants peuvent dépendre de la taille familiale |
|
Allemagne |
IR (taux
max : 48,5 %)
|
Exonération |
Luxembourg |
IR (taux
max : 42 %)
|
Exonération |
Espagne |
IR (taux
max : 48 %
|
Exonération |
Royaume-Uni |
IR
(application du barème progressif : 20 % et 32,5 %)
|
Exonération |
Suisse |
IR
(impôt fédéral de 11,5 %)
|
35 %
si pas de convention
|
|
Le détenteur a le choix entre l'application de la retenue à la source libératoire ou l'application de l'IR |
|
Belgique |
Taux de
retenue à la source : 25 ou 15 %
B
|
Exonération |
France |
Taux de retenue à la source : 15 % (plus prélèvements sociaux) ou IR |
Exonération |
|
Les intérêts font l'objet d'une retenue à la source libératoire |
|
Italie |
Taux de retenue à la source libératoire: 12,5 % |
Exonération |
Cas particulier |
||
Pays-Bas |
Base
d'imposition : 4 % de la valeur de marché des actifs (actions
ou obligations)
|
Exonération |
A. La
législation applicable aux intérêts dépend dans
chaque pays de type de produit considéré. Par exemple, si les
intérêts d'un compte courant au Luxembourg sont
exonérés pour les résidents comme les non
résidents, ceux issus d'obligations d'entreprises subissent une retenue
à la source de 25 % réduite à 10 % dans le cadre
des conventions avec la France.
B. Il s'agit des non résidents français. Les taux applicables
sont ceux des conventions passées entre les pays membres et la France.
En général (sauf pour la Suisse) pour ce qui est des revenus
d'obligation, les non résidents qu'il y ait ou non des conventions sont
exonérés.
C. Il existe un taux réduit de 15 % dans certains cas de figures
(actions émises avant le 1
er
janvier 1994, etc.).
D. Un certain nombre de placements produisant des intérêts sont
cependant totalement exonérés ou sont imposés au-dessus
d'un certain montant d'intérêts produits. C'est le cas des
Certificats nationaux d'épargne en GB et de l'épargne
réglementés en France.
Sources
: European Tax Handbook
, 2001,
La fiscalité des
revenus de l'épargne
Conseil des impôts 1999, Rapport
Bollé,
Taxation de l'épargne et risques de
délocalisation.
Trois régimes d'imposition des revenus d'obligations se rencontrent dans
les pays européens : l'application du barème d'imposition
d'IR, le choix entre un prélèvement libératoire et l'IR ou
le seul prélèvement libératoire. Le tableau 2
présente les régimes d'imposition pour les obligations d'Etat.
L'Espagne, le Royaume-Uni et la Suisse pratiquent l'imposition à l'IR,
avec un taux faible pour la Suisse, et dans une moindre mesure pour le
Royaume-Uni qui applique un barème progressif sur ces seuls revenus
(sans cumul avec les revenus du travail). Seule l'Espagne applique un taux
réellement élevé. L'Allemagne et le Luxembourg sont des
cas particuliers. En effet, l'imposition à l'IR n'est réellement
effective que si le pays qui l'applique possède les moyens de la faire
respecter, à savoir une obligation de déclaration à
l'administration fiscale par les établissements payeurs. Dans ces deux
pays, l'absence de système d'information aboutit à l'application
en pratique de la retenue à la source. Celle-ci est en l'occurrence
nulle pour le Luxembourg. La France et la Belgique proposent un régime
optionnel de prélèvement obligatoire et l'Italie à un taux
libératoire. Au total, le Luxembourg présente donc, devant la
Suisse, le régime le plus favorable. Pour les autres (à
l'exclusion de l'Espagne) les taux varient selon les pays entre 15 % et
25 %.
Tableau 3 : Plus-values de cessions de titres
Législation 2001 |
Actionnaires résidents |
Actionnaires non résidents |
|
Imposition au barème de l'IR des opérations spéculatives, taux préférentiel pour les cessions de participations substantielles et exonérations |
|
Allemagne |
Imposition
au barème de l'IR des cessions d'opérations spéculatives
(détentions inférieures à 12 mois)
|
Si pas
de convention
:
même système que pour les
résidents et imposition en France avec remboursement des impôts
payés en Allemagne
|
Belgique |
Choix entre
IR et taux de 33 % pour les cessions d'opérations
spéculatives
|
Si pas
de convention
:
même système que pour les
résidents et imposition en France. avec remboursement des impôts
payés en Allemagne
|
Luxembourg |
Imposition
à l'IR en cas d'opérations spéculatives (détentions
inférieures à 6 mois) ou
|
Si pas
de convention
:
même système que pour les
résidents avec des cas particuliers pour des contribuables qui changent
de statut (de résidents à non résidents) et imposition en
France. avec remboursement des impôts payés au Luxembourg
|
Royaume-Uni |
Imposition
au barème progressif de l'IR avec abattements dont le montant est
croissant avec la durée de détention.
|
Si pas
de convention
:
Exonération des plus-values et
Imposition en France
|
Autres cas |
||
Espagne |
Détention inférieure à deux ans :
barème progressif
|
Si pas
de convention
:
Exonération des plus-values
réalisées par les résidents de l'UE. taux de retenue
à la source de 35 % si de participation substantielle au cours des
12 mois précédents
|
Pays-Bas |
Imposition
au taux de 25 % des plus-values réalisées au cours de
cessions de participations importantes (5 % du capital détenu)
|
Si pas
de convention
:
même système que pour les
résidents
|
Suisse |
Exonération |
Exonération en Suisse et imposition en France |
Italie |
Taux de
12,5 % pour la cession de participation non qualifiée.
|
Si pas
de convention
:
|
France |
Existence d'un seuil de cession (certains produits sont imposés dès le 1 er euro, ex : OPCVM) et application d'un taux de 16 % (plus prélèvements sociaux). Absence du seuil si participations substantielles (25 %) |
Exonération des non résidents (sauf participations substantielles) |
Sources :
European Tax Handbook
, 2001,
La
fiscalité des revenus de l'épargne
, Conseil des impôts
1999, Rapport Bollé,
Taxation de l'épargne et risques de
délocalisation
, 1997.
Concernant les plus-values, deux types de distinctions sont
opérés entre les plus-values à court terme et à
long terme et entre les plus-values portant sur des cessions de participations
importantes ou non. Les plus-values à court terme sont celles
réalisées sur des titres dont la durée de détention
est inférieure à une certaine durée (entre six et douze
mois). Elles sont considérées comme des opérations
spéculatives et à ce titre la plupart des pays les imposent.
L'Allemagne, le Luxembourg les soumettent (sous réserve de leur
déclaration) au barème d'IR. La Belgique laisse au contribuable
le choix entre le barème de l'IR et un taux de 33 %. Ces trois pays
exonèrent en revanche les plus-values de long terme.
L'Espagne et le Royaume-Uni imposent à la fois les plus-values de court
et celles de long terme. Le Royaume-Uni applique le barème de l'IR et
l'Espagne des taux fixes. Pour ces deux pays, l'imposition est
décroissante avec la durée de détention, et toute une
série de titres sont exonérés.
Les Pays-Bas et l'Italie ignorent la distinction entre le court terme et le
long terme mais différencient les plus-values en fonction du montant de
participation. Les taux appliqués sont respectivement de 25 % et
27 % pour les participations substantielles et de zéro à
12,5 % pour les autres. Il en est de même à des taux
privilégiés pour l'Allemagne, la Belgique et le Luxembourg.
Enfin, la Suisse exonère toutes les plus-values.
Alors que dans la plupart des autres pays, le système d'imposition des
plus-values présente des zones d'exonération, la France impose
systématiquement toutes les plus-values au taux de 16 % (soit
26 % avec les prélèvements sociaux) avec un seuil de
cession. Au total, l'imposition des plus-values en Europe présente un
paysage bigarré. La Suisse et les pays où la non
déclaration permettent la fraude sont les pays les plus favorables en ce
qui concerne ce type d'imposition. La situation de la France n'est
réellement comparativement défavorable que pour les plus-values
réalisées sur les participations non substantielles de long
terme.
La neutralité de l'imposition des revenus de l'épargne
L'imposition des différentes catégories de revenus du
capital n'est généralement pas neutre en termes d'allocation de
ressources. Les revenus d'intérêt sont moins imposés que
les dividendes (et les plus values)
78
(
*
)
. Par contre, les pays nordiques et la Grèce
ont évolué vers une imposition plus neutre des revenus du capital
mobilier. Ces pays appliquent ce que l'on appelle le système dual :
les dividendes, les intérêts et les plus-values sont
imposés à un taux unique, les revenus du travail étant
imposés selon un barème progressif. La Finlande par exemple
accorde un avoir fiscal qui supprime totalement la double imposition et impose
au même taux les profits des sociétés et les revenus du
capital (29 %). Les Pays-Bas ont opté pour une imposition sur la
richesse. La Grèce exonère totalement les dividendes au niveau de
l'actionnaire et impose un taux unique sur des deux formes de profit
(distribué ou non) de 35 % au niveau de la firme.
Dans certains pays, l'imposition effective des obligations et des dividendes
diffère de celle qui serait issue de l'application de la
législation. En Italie par exemple, où le taux d'imposition des
deux types de revenus est en droit identique (12,5 %), le contribuable est
en fait soumis au taux de 44 % (en comptant l'IS) sur les dividendes alors
qu'il est imposé à 12,5 % sur ses revenus d'obligations. Ce
différentiel peut aussi être le résultat de
caractéristiques institutionnelles. Ainsi, la fraude est plus
coûteuse pour l'actionnaire que pour le détenteur d'obligation
lorsque la communication des revenus entre les institutions bancaires et
l'administration fiscale (tableau 4) n'est pas obligatoire, l'actionnaire ne
bénéficiant alors plus du mécanisme d'imputation. Par
exemple, l'Allemagne applique le même système d'imposition pour
les dividendes et les obligations. Mais si un épargnant ne
déclare pas ses revenus, il paiera tout de même 40 % sur les
dividendes (IS plus retenue à la source) au lieu de 43 % s'il les
avait déclarés et 20 % (retenue à la source) sur les
revenus d'obligations au lieu de 48 %.
Dans les autres pays européens, les dividendes (comme les revenus du
travail) sont imposés au barème progressif alors que les
intérêts font face à une imposition à taux
proportionnel. Ces disparités d'imposition peuvent être
expliquées par des choix d'allocation de l'épargne (financement
de la dette ou de l'investissement privé) propres à chaque pays.
Cet écart, particulièrement important en France, a des effets
pervers sur la structure de détention de l'épargne et sur le mode
de financement des entreprises. Les épargnants français (tableau
6) présentent la caractéristique de détenir plus de titres
à revenus fixes (57,7 %) que d'actions, en détention directe
ou indirecte (14,4 %)
79
(
*
)
. Aussi, 40 % des actions françaises
sont-elles détenues par des non résidents
80
(
*
)
. Ces derniers ne sont pas
imposés en France mais dans leur pays de résidence, ce d'autant
que la France est un des rares pays à rembourser l'avoir fiscal (tableau
1). Il y a donc une asymétrie de traitement entre les épargnants
résidents et non résidents. Pour ce qui est des entreprises cet
écart d'imposition entre les deux produits favorise le financement par
la dette par rapport à l'émission d'actions
81
(
*
)
.
S'il existe un certain consensus sur la nécessité d'orienter
davantage l'épargne vers des placements en actions, les solutions
envisagées sont diverses. Sans être exhaustif, on peut à
l'instar du rapport Bollé (ou le rapport du Conseil national du
crédit) qui s'inspire de ce que font certains pays européens,
préconiser l'instauration d'un prélèvement
libératoire à taux unique (inférieur à celui de
l'IR) sur ces produits. Cette solution permettrait de réduire
l'écart d'imposition entre obligations et dividendes. Mais le
système dans son ensemble resterait peu cohérent. Il subsisterait
des régimes dérogatoires incitatifs (PEA, PEP) et un
régime général d'imposition des dividendes et des
obligations qui serait en lui-même déjà une exception en ce
sens que revenus du travail et du capital ne seraient pas imposés au
même taux.
Une autre solution serait, de revenir au barème progressif pour tous les
revenus du capital (y compris les revenus d'obligations et en conservant
l'avoir fiscal), en définissant avec rigueur les supports
bénéficiant d'une fiscalité plus incitative
(épargne populaire, assurance-décès et
épargne-logement, épargne longue contractuelle et épargne
en action). Cette solution a l'avantage de présenter clairement
l'arbitrage qui est fait entre l'équité fiscale qui
nécessite que l'ensemble des revenus des foyers fiscaux soient soumis au
même traitement fiscal et la volonté d'orienter l'épargne
pour des raisons d'efficacité économique.
Quelle que soit la solution adoptée, une réforme de la
fiscalité française de l'imposition des revenus du capital est
nécessaire
82
(
*
)
. La
question posée ici est de savoir si les aménagements à
effectuer seront soumis à la contrainte européenne. Au contraire,
l'Europe en matière d'imposition des revenus du capital ne peut-elle pas
s'organiser afin de permettre à chaque pays de conserver la totale
maîtrise de son système et donc de ses réformes internes ?
Tableau 4 : L'information sur les revenus financiers
|
Obligations pour les établissements payeurs |
|
|
Déclaration des revenus d'intérêts, plus-values et dividendes |
Renseignement sur demande nominative |
Allemagne |
NON A |
OUI |
Autriche |
NON |
NON |
Belgique |
NON |
NON |
Danemark |
Intérêts : OUI ; Dividendes : NON |
NON |
Espagne |
OUI |
OUI |
Finlande |
NON |
OUI |
France B |
OUI |
OUI |
Grèce |
NON |
OUI |
Irlande |
NON |
NON |
Italie |
Intérêts : NON ; Dividendes : OUI |
OUI |
Luxembourg |
NON |
NON |
Pays-Bas |
OUI |
OUI |
Portugal |
NON |
NON |
Royaume-Uni |
NON |
OUI |
Suède |
OUI |
OUI |
A. Sauf
si les épargnants demandent à bénéficier des
abattements.
B. B. En France, les épargnants eux-mêmes sont soumis à
certaines obligations : déclaration de transferts de capitaux
étrangers de moins de 7 700 euros et déclaration de toute
ouverture de compte à l'étranger. Bien sûr, la non
déclaration est difficilement vérifiable.
Source : Conseil National du Crédit, Rapport 1999.
Tableau 5 : Structure de détention des actions en 1999
En % |
Allemagne |
Royaume-Uni |
France |
Ménages |
1,3 |
16,0 |
11,1 |
Entreprises |
38 |
1,4 |
17,7 |
Fonds de pensions, OPCVM |
26,1 |
54,0 |
26,6 |
Non résidents |
11,8 |
27,8 |
35,7 |
Autres |
6,1 |
0,8 |
8,9 |
Source : Rapport Bollé, 1997.
Tableau 6 : Affectation de l'épargne des ménages en 1999 A
En % |
Financement de la dette publique |
Financement de la dette privée |
Actions cotées des sociétés non financières |
Créances sur le reste du monde |
Epargne intermédiée |
||||
|
(1) |
(2) |
(1) |
(2) |
(1) |
(2) |
(1) |
(2) |
|
Allemagne |
3,2 |
17,6 |
0,6 |
38 |
5,3 |
14,6 |
10,8 |
29,8 |
80,2 |
Espagne |
1,3 |
19,0 |
4,0 |
35,9 |
16,1 |
20,6 |
4,9 |
24,6 |
73,6 |
Finlande |
1,9 |
9,9 |
0,5 |
29,6 |
32,0 |
38,9 |
0,7 |
21,7 |
62,5 |
France |
3,6 |
20,2 |
3,4 |
37,3 |
4,4 |
14,4 |
5,2 |
28,1 |
83,5 |
Italie |
15,2 |
32,8 |
3,2 |
23,8 |
8,1 |
11,54 |
10,6 |
32,0 |
62,9 |
Pays-Bas |
0,9 |
12,3 |
2,7 |
30,8 |
6,9 |
18,9 |
6,1 |
38,1 |
83,5 |
Royaume-Uni |
3,8 |
12,7 |
2,3 |
16,8 |
7,7 |
32,0 |
2,6 |
38,5 |
83,6 |
Suède |
2,2 |
11,5 |
0,4 |
22,1 |
22,0 |
37,3 |
7,0 |
29,1 |
68,3 |
Etats-Unis |
5,5 |
12,7 |
3,0 |
36,0 |
21,3 |
42,8 |
3,3 |
8,5 |
66,9 |
(1)
Avant prise en compte de la part de l'épargne
intermédiée ; (2) Après prise en compte de la part de
l'épargne intermédiée.
Source : V. Oheix, B. Séjourné « Les portefeuilles
des ménages européens : des choix initiaux à
l'affectation finale »,
Revue d'économie
financière
, n° 64.
Tableau 7 : Composition des patrimoines financiers (fin 1999)
|
Monnaie
et dépôts
|
Autres dépôts |
Titres de taux |
Actions détenues en direct |
Sociétés de placements collectifs |
Créances sur les sociétés d'assurance-vie |
Droits à la retraite et épargne entreprise |
Autres |
Total |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Allemagne |
36,3 |
10,7 |
13,1 |
11,3 |
23,3 |
5,3 |
_ |
100,0 |
|
Espagne |
9,4 |
23,5 |
2,0 |
35,7 |
15,6 |
6,1 |
4,5 |
3,2 |
100,0 |
Finlande |
|
|
|
|
|
|
|
|
100,0 |
France |
11,0 |
29,3 |
2,2 |
10,2 |
13,0 |
32,8 |
1,5 |
100,0 |
|
Italie |
13,1 |
7,5 |
16,9 |
31,9 |
19,5 |
11,1 |
_ |
100,0 |
|
Pays-Bas |
5,1 |
13,0 |
2,4 |
22,1 |
55,3 |
2,1 |
100,0 |
||
Royaume-Uni |
20,7 |
1,8 |
17,7 |
5,1 |
52,3 |
2,5 |
100,0 |
Source : CREP, d'après statistiques nationales.
II. L'intégration européenne : quelle imposition des non
résidents ?
Les tableaux 1 à 3 montrent la diversité des taux
supportés en Europe sur les divers produits d'épargne à
l'épargnant susceptible de délocaliser son épargne. Dans
la mesure où les contribuables ne changent pas de résidence pour
la seule fiscalité de l'épargne, le problème n'est pas
celui du rapprochement des taux mais celui de l'imposition des non
résidents. En effet, si les épargnants ne se déplacent
pas, ils peuvent délocaliser leur épargne. Les revenus de cette
épargne seront imposés dans le pays de résidence sous la
condition qu'ils soient déclarés. Etant donné les
législations actuelles sur l'échange d'information entre les
établissements payeurs et les administrations fiscales (tableau 4) et
les pratiques d'imposition des non résidents (tableaux 1 à 3),
les revenus de l'épargne placés à l'étranger sont
au mieux soumis à une retenue à la source, au pire totalement
exonérés. En effet la majorité des pays de l'UE pratique
le secret bancaire (tableau 4). Seuls le Danemark, l'Espagne, la France, les
Pays-Bas et la Suède ont un système obligatoire d'échange
d'information.
Pour ce qui est de l'imposition des non résidents, il faut
différentier les dividendes et les intérêts. Pour ces
derniers, l'exonération est la règle. De fait, un
épargnant français qui achète des obligations en Allemagne
ou en Belgique et qui ne les déclare pas à l'administration
fiscale française est totalement exonéré sur ces revenus.
Dans la mesure où cet épargnant français n'est pas
imposé comme un résident de l'Etat de la source, le
différentiel de taux entre les deux pays n'a strictement aucune
importance sur la question de la délocalisation. Pour les dividendes, la
question de l'échange d'information se double de celle de
l'intégration dans le pays de la source de l'imposition sur les
bénéfices et de l'imposition personnelle. L'absence
d'échange d'information, peut en dépit du pré-paiement de
l'IS et de la retenue à la source, rendre dans certains cas la fraude
intéressante. C'est le cas pour un épargnant français qui
supporterait, en détenant des actions au Luxembourg, un taux d'IS de
30 % et une retenue à la source de 15 % en fraudant, et un
taux d'IS de 30 % plus l'IR français à 52,75 % sans
frauder.
Suppression ou généralisation de l'avoir fiscal
Supposons résolue la question de l'échange
d'information. Reste le problème de la double imposition des dividendes.
Les conventions entre pays ont pour objectif, autant que faire se peut, de
résoudre cette question. Il s'agit de libérer l'actionnaire des
impôts payés dans le pays d'accueil pour qu'il supporte
in fine
le seul impôt prévu dans son pays sur ce type de revenu. Mais
dans la plupart des pays, le système de l'avoir fiscal pour les
résidents ne s'appliquant plus, l'impôt effectivement
remboursé est au mieux le taux de retenue à la source. Aucun pays
ne peut obliger son partenaire à rembourser le pré-paiement de
l'impôt effectué par les entreprises et ce d'autant moins que les
résidents du partenaire n'en bénéficient pas.
Dès lors que l'avoir fiscal est remboursé et que le pays de
résidence prend en charge l'éventuelle retenue à la source
payée dans le pays d'accueil (encadré), l'actionnaire paie dans
son pays le seul IR sur le montant de ses dividendes (c'est le cas pour un
résident français qui détient des actions en Italie et en
Espagne). Le principe de résidence est respecté. La France,
l'Espagne et l'Italie sont les seuls pays à rembourser l'AF.
En revanche, ce principe n'est plus respecté et des asymétries de
traitements émergent lorsque les pays ne disposent pas de système
d'avoir fiscal ou ne corrigent la double imposition que de façon
partielle pour les non résidents (tableau 7). Dans ce cas, un
actionnaire français ne supporte pas le même taux selon qu'il
investit en France ou à l'étranger. Il y a donc une incitation
fiscale à l'investissement national (toujours en supposant bien
sûr que la fraude est impossible).
Le tableau 8 montre que seule la généralisation du système
de l'avoir fiscal
83
(
*
)
aux
résidents et aux non résidents pour l'ensemble des pays de l'UE
peut permettre une application totale du principe de résidence et
supprimer les inefficacités (traitements différentiés des
investissements selon leur origine) générés par
l'hétérogénéité des systèmes actuels.
Par contre, cette généralisation de l'avoir fiscal ne supprime
pas le traitement différentié des actionnaires résidents
et des non résidents quant à la charge totale pesant sur les
dividendes. Mais ce type d'asymétrie n'a que peu d'importance si le
principe de résidence est partout appliqué. Il serait par
ailleurs nécessaire de rétablir une certaine neutralité
entre les différents revenus du capital (intérêts et
dividendes). A l'inverse, la raison pour laquelle le gouvernement allemand a
supprimé en 2001 l'avoir fiscal pour les résidents était
de traiter sur un même pied d'égalité les résidents
et les non résidents, qui n'en bénéficiaient pas. Si cette
suppression s'inscrit dans le mouvement général actuellement
à l'oeuvre en Europe, elle ne constitue pas la meilleure solution en ce
sens qu'elle redonne de l'importance aux différentiels de
fiscalité entre les pays et notamment aux différentiels de taux
d'IS.
Tableau 8 : Les effets sur l'application du principe de résidence de l'application de l'avoir fiscal A
|
|
Pays A |
|
|
|
Pas d'avoir fiscal |
Avoir fiscal |
Pays B |
Pas d'avoir fiscal |
Le principe
de résidence n'est pas respecté.
|
Le principe
de résidence n'est pas respecté.
|
Avoir fiscal |
Cas symétrique à celui ou A pratique l'AF et B ne le pratique pas. |
Le principe de résidence est respecté. |
A. On
suppose que les contribuables ne fraudent pas.
B. Cet argument de traitement égalitaire des actionnaires
résidents et non résidents a été utilisé en
Allemagne lors de la suppression de l'avoir fiscal. Avant la réforme de
2001, l'avoir fiscal était accordé aux résidents et
refusé aux non résidents.
Les échanges d'informations
Les
propositions de la Commission relatives à l'harmonisation de la
fiscalité de l'épargne ne concernent que les revenus
d'intérêts. Certes, les actionnaires sont
généralement moins incités à frauder que les
détenteurs d'obligations mais dans certains cas, en dépit de
paiement de l'IS et de la retenue à la source, la fraude peut rester
intéressante. Quoiqu'il en soit, en 1998, la Commission avait
proposé, afin d'éviter la quasi-exonération des revenus
d'intérêts perçus par les non résidents, de mettre
en place un « régime de coexistence », les Etats
membres pouvant choisir entre l'application d'une retenue à la source
sur les revenus de l'épargne des non résidents ou
l'adhésion à un système d'échange d'information
avec les administrations fiscales des pays de l'UE. La retenue à la
source avait l'avantage d'imposer ces catégories de revenus tout en
conservant la tradition du secret bancaire auquel sont attachés de
nombreux pays. Mais cette solution avait l'inconvénient d'introduire un
élément d'imposition à la source. Quoiqu'il en soit, la
coexistence des deux régimes aux logiques opposées ne permettait
pas de régler le problème de l'imposition des non
résidents dans sa globalité. Les Etats membres sont parvenus au
cours du sommet de Feira en juin 2000 à un accord sur le choix
définitif à long terme de l'échange d'informations. Le
modèle de la coexistence ne serait appliqué que pour une
période transitoire de sept ans au maximum à compter de
l'entrée en vigueur de la directive
84
(
*
)
. A partir de cette date, les pays membres devront
définitivement adopter la solution de l'échange d'informations.
Le Conseil doit avant la fin de l'année 2002 décider à
l'unanimité de l'adoption de cette directive. Avant l'adoption de cette
mesure, l'UE doit engager des négociations avec les pays tels que les
Etats-Unis, la Suisse, le Liechtenstein, Monaco, Andorre et Saint Marin afin
que ces pays adoptent des mesures équivalentes. Les négociations
avec ces pays sont la condition
sine qua none
de la transformation de la
proposition en directive. Elles semblent à l'heure actuelle en voie
d'avancement, même si des pays tels que la Suisse, qui impose
actuellement une retenue à la source (sauf convention),
considèrent qu'un système d'échange d'information ne peut
être compatible ni avec l'ordre juridique, ni avec le système
fédéral fiscal suisse.
La mise en oeuvre de cette proposition constituerait une avancée dans la
construction européenne. Pour être totalement efficace, elle
devrait être généralisée aux autres
catégories de revenus de l'épargne. Elle permettrait aux Etats
membres de conserver la maîtrise de leur système d'imposition
personnelle. Mais certains (rapport Bollé) craignent que les dispositifs
juridiques ne soient pas réellement appliqués. D'autres, les
institutions bancaires, soulignent les coûts induits pour les
intermédiaires payeurs par l'application d'un système
d'échanges d'informations.
Encadré : Exemple de traitement de la distribution de dividendes en France en fonction de la nationalité de l'actionnaire
Le taux
de l'impôt sur les sociétés en tenant compte des surtaxes
(y compris la CSB) est actuellement de 35,43 %. Soit une
société qui distribue un dividende après IS de 1 000
euros, l'avoir fiscal attaché à la distribution de ces dividendes
est de 500 euros.
Particulier résident français
:
Dividendes imposables : 1 500 euros
Réduction d'impôts : 500 euros.
Particulier résident italien
:
La convention stipule qu'un résident italien qui reçoit des
dividendes d'une société française doit être
imposé en Italie. Le taux de retenue à la source que peut
pratiquer la France est au maximum de 15 %. Le résident italien
s'il est effectivement imposé en Italie bénéficie d'un
crédit d'impôt égal à celui qu'aurait reçu un
résident français.
Dividende + remboursement de l'avoir fiscal : 1 500 euros.
Retenue à la source au taux de 15 % : 225 euros.
Revenu net global du résident italien : 1 275 euros.
Avoir fiscal à valoir en Italie: 225 euros.
Revenu imposable en Italie : 1 500 euros.
La convention permet de traiter de façon identique le résident
français et le résident italien.
Particulier résident d'un pays n'ayant pas signé de convention
avec la France
:
Dividende : 1000 - Retenue à la source : 250 euros.
Dividende net perçu : 750 euros.
Revenu imposable dans son pays si toutefois la déclaration de revenu
d'origine étrangère est obligatoire : 750. Dans ce cas de
figure, le non résident reçoit la moitié de ce que
reçoit le résident français.
Chapitre
2. 4 : Les mesures d'incitation au travail des personnes non
qualifiées
Hélène
Périvier
Dans la
période récente, plusieurs pays ont attribué la
persistance du chômage de masse à l'existence de trappe à
inactivité. En raison de la générosité du
système social envers les personnes sans emploi, reprendre un travail
est devenu peu rentable pour les actifs peu qualifiés, en particulier
pour les personnes seules avec enfants ou pour le premier travailleur d'un
couple, sans et surtout avec enfants. La reprise d'un emploi à temps
partiel n'apporte généralement aucun gain de ressources. De
nombreux pays ont réduit la fiscalité portant sur les bas
revenus ; la France a, de plus, réformé plusieurs
prestations. Quatre pays : Royaume-Uni, Belgique, Pays-Bas et France, ont
introduit des crédits d'impôt pour garantir que « le
travail paie ». La plupart des évaluations aboutissent
à des impacts décevants : la recherche d'un emploi est
légèrement stimulé, mais, souvent, la formule
adoptée incite à la réduction du temps de travail et
décourage le travail des femmes mariées. Par ailleurs, il
apparaît difficile de concilier l'objectif incitatif et des effets
redistributifs satisfaisants. Enfin, la mesure n'est efficace que si le
marché du travail des non qualifiés ne souffre pas d'une
insuffisance de demande de travail de la part des entreprises, ce qui est
contestable est Europe continentale.
Les taux de chômage élevés qui persistent dans plusieurs
pays européens (annexe 1, tableau 1) ont fait l'objet de nombreuses
analyses. Plusieurs explications ont été avancées :
croissance insuffisante en raison de politiques économiques peu
appropriées, effet des mutations technologiques, rigidités du
marché du travail, manque d'incitation à la prise d'un emploi.
Selon cette dernière explication, une partie du chômage provient
d'une insuffisance des gains à reprendre un emploi ; elle a fait
l'objet de nombreux débats en France depuis le milieu des années
1990. Une hausse des ressources d'activité d'un individu augmente les
prélèvements qu'il supporte et réduit les prestations
sociales dont il bénéficie. Le système fiscalo-social
réduit d'autant plus les gains au travail qu'il est
généreux. Il est donc susceptible de réduire l'offre de
travail. Ceci concerne surtout les personnes qui, étant donné
leurs faibles qualifications, ne peuvent obtenir qu'une faible
rémunération sur le marché du travail. Cette population
souffre d'un taux d'emploi plus bas que celui des individus plus
qualifiés (annexe 1, tableau 3). Son taux de chômage est plus
élevé que celui des personnes qualifiées quel que soit le
pays. En France, par exemple, il était de plus de 15 % en 1999
contre 6 % pour les individus les plus qualifiés, pour un taux de
chômage global d'environ 10 %. Les écarts de taux de
chômage entre les moins qualifiés et les plus qualifiés
sont nettement marqués en Allemagne, en Belgique, en France, en Finlande
et en Irlande (annexe 1, tableau 2). Leur taux d'activité est nettement
plus faible (66,6 % en 1999 en France) que celui des personnes plus
qualifiées (87,2 %).
Le Conseil européen de Lisbonne de mars 2000 s'est focalisé sur
la faiblesse de l'offre de travail pour expliquer le niveau de chômage et
d'inactivité des moins qualifiés. Il a préconisé de
mettre en place des réformes pour alléger la pression fiscale
pesant sur le travail, avec une attention particulière pour les emplois
non qualifiés et faiblement rémunérés. Il a
insisté sur la nécessité d'améliorer les effets
incitatifs à l'emploi et la formation afin d'éviter l'apparition
de « trappes à inactivité, chômage et
pauvreté ». Après avoir présenté un
état des lieux de ces
trappes
en Europe, nous verrons comment les
pays européens ont récemment utilisé la fiscalité
pour inciter les individus faiblement qualifiés à travailler.
Nous porterons une attention particulière au développement des
crédits d'impôt (Royaume-Uni, France, Belgique et Pays-Bas) et
nous dresserons un bilan des effets de ces instruments en termes d'incitation
au travail et redistributifs en nous concentrant sur les cas anglais et
français.
Les mesures d'incitation au travail ne peuvent réduite le chômage
que sous trois conditions :
-
Il faut qu'il existe effectivement des personnes qui soient inactives (ou
travaillent peu) parce qu'elles ne souhaitent pas travailler (ou travailler
davantage) jugeant la rémunération associée trop faible au
regard de leur revenu d'inactivité. Autrement dit, les concepts de
« trappes à inactivité, à chômage et
à pauvreté » sont-ils pertinents ? La
première partie montre que l'on peut évaluer le gain financier
associé à un surcroît d'offre de travail ; mais rien
ne permet d'affirmer que les individus réagissent effectivement en
fonction de cette incitation.
Il faut que ces personnes choisissent de travailler (ou travailler plus) si les pouvoirs publics, via la fiscalité, rehaussent les revenus d'activité. Ceci revient à s'interroger sur le pouvoir incitatif de la fiscalité. Or, les réactions effectives de l'offre de travail aux modifications de la fiscalité sont difficiles à mesurer.
Enfin, si ces individus souhaitent travailler (ou travailler plus) en réaction à l'incitation fiscale, il faut qu'ils soient en mesure de trouver du travail : des emplois sont-ils disponibles pour les individus non qualifiés ? Cette catégorie de travailleurs est davantage affectée par le chômage. Le taux de chômage des non qualifiés, même s'il a diminué depuis 6 ans, reste encore nettement supérieur à la moyenne (Audric-Lerenard et Tanay, 2000). En période de pénurie d'emplois les individus qualifiés acceptent des postes non qualifiés, comme ce fut le cas dans les années 1990 en France, réduisant de facto le nombre d'emplois disponibles pour les personnes faiblement qualifiées. Cette tendance semble se maintenir en 2000, alors que le taux de chômage baisse 85 ( * ) . Or, si le marché du travail est contraint par une demande trop faible, toute mesure augmentant l'offre de travail entraînera un taux de chômage plus élevé.
L'effet favorable sur l'emploi de réformes fiscales ou sociales incitatives à l'offre de travail dépend fortement du fonctionnement et de l'état du marché du travail Ainsi, dans des pays souffrant d'un taux de chômage des travailleurs peu qualifiés élevé et en présence d'un salaire minimum (ce qui est le cas de la France), il y a peu de chance que l'instauration d'un crédit d'impôt ayant pour but d'accroître l'offre de travail permette de réduire le taux de chômage. Si les incitations doivent être améliorées, c'est plutôt le système social qu'il faut modifier en cherchant à faciliter la sortie des dispositifs d'aide (comme le RMI) vers l'activité. En revanche, la fiscalité peut être utilisée pour stimuler la demande de travail des entreprises et ainsi accroître les embauches des travailleurs non qualifiés.
I. Les trappes à inactivité, à chômage et à pauvreté à la fin des années 1990
1. Les concepts de pièges à pauvreté, inactivité et chômage
La
décision de participer au marché du travail peut être
décomposée en deux : « entrer sur le marché
du travail » et « combien de temps travailler ».
Ce découpage est contestable dans la mesure où la rigidité
de certains marchés du travail n'ouvre guère le choix du temps de
travail. Quoi qu'il en soit, le système fiscal en interaction avec le
dispositif social affecte ces choix.
La faiblesse de l'écart entre le niveau de revenu obtenu par la
participation au marché du travail et celui obtenu en dehors du
marché du travail peut entraîner l'apparition d'une trappe
à inactivité. Elle provient de la perte des prestations induite
par l'augmentation des revenus d'activité et par l'assujettissement
à l'impôt du salaire obtenu. Dans ce cas, les individus ne sont
pas incités à entrer sur le marché du travail, restent non
employés et donc sont piégés dans une trappe à
inactivité. La trappe à chômage concerne la transition du
chômage à l'emploi : c'est le différentiel entre les
allocations chômage perçues par l'individu et la
rémunération qu'il peut obtenir sur le marché du travail
qui est en cause. Par ailleurs, la faiblesse de la croissance du revenu
disponible avec le temps de travail peut être la cause de l'apparition
d'une trappe à pauvreté : une fois sur le marché du
travail, les individus ne sont pas incités à travailler
davantage.
Ainsi, le système fiscalo-social peut-il décourager certaines
transitions entre le non emploi et l'emploi et, au sein de l'emploi, entre un
emploi à temps partiel et un emploi à temps plein. Dans cette
étude, nous nous intéressons précisément au
côté fiscal du dispositif. Néanmoins, il est essentiel de
ne pas perdre de vue l'aspect global du système fiscalo-social, les
incitations étant issues de l'interaction des prélèvements
et des prestations.
Quelles sont les personnes concernées ?
Les réactions de l'offre de travail des individus face aux incitations fiscales sont difficilement prévisibles, mais certains groupes d'individus sont plus confrontés à ces problèmes que d'autres. Les personnes isolées et les « travailleurs principaux au sein d'un ménage » n'ont guère de choix en matière de participation au marché du travail de sorte que la fiscalité des revenus d'activité ne devrait avoir que peu d'effets sur leur décision 86 ( * ) . Par contre, le choix de trois catégories d'individus peut être influencée par la structure du système fiscalo-social : le travailleur le moins bien rémunéré dans un couple (ou « travailleur secondaire »), les parents isolés et les travailleurs peu qualifiés. Si le travail rapporte peu financièrement et étant donné les coûts fixes associés à la prise d'un emploi (frais de déplacement, de garde d'enfants...), les premiers peuvent trouver plus rentable de se consacrer à des tâches domestiques qu'à une activité marchande. L'offre de travail des deuxièmes devrait réagir assez fortement au système redistributif. En effet, les coûts fixes de l'emploi sont plus élevés pour cette catégorie d'individus (frais de garde d'enfant...) et donc l'emploi qu'ils peuvent occuper doit permettre de couvrir des coûts fixes plus importants que pour des personnes sans enfant. En outre, les parents isolés bénéficient, à juste titre, d'une générosité particulière des systèmes sociaux. Aussi, sont-ils davantage confrontés à ces problèmes de « trappes ». Encore une fois, cette question relève de l'arbitrage entre protection et incitation. Enfin, les travailleurs faiblement qualifiés ne peuvent obtenir qu'une faible rémunération sur le marché du travail. De ce fait le différentiel entre les revenus d'activité et d'inactivité est plus faible que pour des individus plus qualifiés. Ils se trouvent donc sur le segment du marché du travail le plus propice à l'apparition de trappe à pauvreté ou à inactivité.
Quelques remarques sur les concepts de trappes
Ces
concepts doivent être utilisés avec précaution. En effet,
la thèse selon laquelle le système redistributif entraîne
l'apparition de tels pièges pourrait amener à considérer
que les individus ne prennent leur décision d'offre de travail que sur
des fondements financiers. Leur choix ne serait motivé que par la
comparaison entre les gains associés à l'emploi et les revenus
sociaux nets d'impôt. Or, l'emploi n'est pas seulement un moyen de
subvenir à des besoins matériels. Il s'accompagne d'une
reconnaissance sociale nécessaire à l'intégration dans la
société. Par ailleurs, l'individu prend en considération
les avantages de long terme associés à la prise d'un emploi (en
termes de retraite future plus importante ou de formation et
d'expérience professionnelle pouvant sensiblement améliorer sa
situation professionnelle dans le futur). Ceci explique que certains acceptent
de prendre un emploi même peu rémunérateur relativement
à ce qu'ils peuvent obtenir en restant non employés. Dans une
étude récente, deux sociologues, Dubet et Vérétout
(2001), passent en revue les « bonnes raisons de prendre un
emploi » pour un échantillon de Rmistes. Ils mettent en
lumière les limites du modèle de rationalité
« étroite » qui, selon eux, ne peut décrire
le comportement d'offre de travail des agents.
Enfin, dans un marché du travail marqué par le chômage de
masse, les individus qui souhaitent prendre un emploi ou travailler davantage
ne le peuvent pas toujours. Or, il est difficile, voire impossible, de
distinguer ceux qui ne veulent pas travailler de ceux qui ne le peuvent pas.
Par exemple, le temps partiel est particulièrement
développé chez les travailleurs peu qualifiés où il
représente 30 % des emplois en France. Pour près d'une
personne sur deux ce temps de travail est subi ; ainsi 14 % des
personnes ayant un emploi non qualifié sont en situation de sous-emploi
subi (Chardon, 2001). Pour celles-ci, on ne peut parler de trappe à
pauvreté issue des effets désincitatifs du système
fiscalo-social dans la mesure où elles souhaiteraient travailler
davantage mais sont contraintes par le marché. C'est la demande de
travail qu'il faudrait stimuler.
S'ils existent, l'ampleur de ces pièges reste difficile à
évaluer. Laroque et Salanié (2000) proposent une
décomposition du non emploi : ils estiment que pour 57 %, il
s'agit de non emploi volontaire
87
(
*
)
. Mais leur analyse exclut le temps partiel. Or la
plupart des travailleurs à temps partiel (le plus souvent des femmes)
n'auraient pas intérêt à travailler étant les
faibles salaires qu'ils perçoivent relativement au RMI et autres
allocations associées à l'inactivité. De plus, ils sont
souvent en situation de sous-emploi involontaire (ils souhaiteraient travailler
davantage). Ainsi les exclure de l'analyse sous-estime le chômage
involontaire et surestiment le chômage volontaire. En outre, les auteurs
ne peuvent pas prendre en compte l'ensemble des ressources des ménages
du fait des données utilisées
88
(
*
)
. Enfin, le pouvoir explicatif du modèle est
peu important dans la mesure où la décision de rechercher un
emploi telle qu'elle y est représentée dépend en grande
partie de facteurs inexpliqués.
Cependant, même si l'ampleur des réactions d'offre de travail peut
être discutée, il n'en reste pas moins qu'un système
redistributif qui désavantage financièrement l'activité,
devrait être corrigé afin de rémunérer plus
équitablement les travailleurs du bas de la distribution des revenus.
2. Les
trappes à chômage et à inactivité
Comment les mesurer ?
Les
décisions d'offre de travail sont souvent le résultat de choix
discrets : passage du non emploi à l'emploi à temps partiel
ou du temps partiel à temps plein ou d'un emploi à un autre mieux
rémunéré. Le système fiscalo-social, en imposant
les revenus du travail et en retirant les aides sociales à mesure que le
revenu augmente, altère le gain d'un changement de situation. De ce fait
il affecte cette décision. Si en passant du non emploi à un
emploi à temps partiel, l'individu ne perçoit qu'un gain faible
ou nul, il peut alors être tenté de rester inactif. Mesurer le
gain net associé à un changement de statut permet
d'évaluer l'effet désincitatif du système. Le taux
effectif d'imposition (noté AETR,
Average Effective Tax Rate
)
89
(
*
)
relatif à un
changement du chômage ou de l'inactivité à l'emploi est un
indicateur adéquat. Néanmoins, il doit être employé
avec précaution. En effet, il ne s'agit pas à proprement parler
d'un taux d'imposition dans la mesure où il n'est pas seulement question
du prélèvement d'une somme d'argent au titre de l'impôt
mais également du montant de prestations sociales qui ne seront plus
versées du fait d'une hausse du revenu. L'utilisation du terme
« imposition » est donc abusive : on ne peut pas
affirmer qu'un individu qui ne travaillait pas et percevait un revenu
(étant par exemple en congé maternité) et qui travaille
à nouveau pour le même revenu est
« imposé » à 100 %.
L'AETR mesure la part du revenu salarial supplémentaire non
perçue par la famille à cause des prélèvements et
du retrait des prestations sociales lorsque l'individu modifie sa situation sur
le marché du travail, par exemple en passant du chômage à
l'emploi. Il ne prend pas en compte des dépenses additionnelles
associées à la prise d'un emploi : garde d'enfant,
transport.
AETR = 1 - [(revenu du travail net - revenu hors travail net)/ changement du
revenu brut]
Plus l'AETR portant sur une modification de la situation professionnelle de
l'individu est élevé, moins ce changement lui rapporte
financièrement et donc moins il est incité à le faire. La
valeur de l'AETR dépend non seulement de la transition
considérée sur le marché du travail mais également
du statut familial de l'individu. En effet dans de nombreux pays l'impôt
sur le revenu n'est pas calculé de façon individuelle mais prend
en compte l'ensemble du foyer fiscal ; dans la plupart des cas, les aides
sociales accordées sous condition de ressources sont fondées sur
le revenu global de la famille. Le comportement d'offre de travail de l'un de
ses membres affecte donc l'éligibilité de l'ensemble du
ménage. Le nombre d'enfants (et parfois leur âge) intervient
également dans la mesure où il existe des prestations familiales
attribuées sous condition de ressources qui modifient les gains
financiers issus d'un surcroît d'activité.
Comparaisons internationales
Le
tableau 1 évalue l'imposition effective qui pesait en 1997 sur la
transition emploi/non emploi au sein du couple. La première colonne du
tableau donne le montant de salaire retiré quand, dans un couple, une
personne est non employée et ne perçoit aucune aide
particulière et que le travailleur principal passe du chômage
(indemnisé) à l'emploi à temps plein (au salaire moyen).
En moyenne pour l'Europe des 15 en 1997, 77 % du salaire individuel est
retiré dans le cas de la prise d'un emploi à plein temps. Ceci
est le résultat de l'interaction entre l'impôt et le retrait des
allocations chômage. Les Pays-Bas (tout comme la Finlande et la
Suède) retirent un taux plus élevé de 89 %, alors
qu'en France, il est de 76 %. La situation décrite dans cette
colonne concerne le passage du premier mois de chômage à
l'activité. Les AETR associés à cette transition sont
importants. Cependant des individus au chômage depuis un mois seulement
sont encore probablement dans une période de recherche active d'emploi,
donc les supposer prisonniers d'une trappe à chômage est quelque
peu prématuré. De plus, lorsqu'un salarié perd son emploi,
il perçoit des allocations au titre des cotisations passées qui
ont été prélevées sur son salaire, elles sont donc
de nature assurantielle : l'individu employé se couvre contre une
période de chômage ; cette assurance lui garantit une partie
de son salaire afin qu'il puisse retrouver un emploi qui il lui convienne.
La deuxième colonne concerne l'imposition de la reprise d'un emploi
à temps partiel du travailleur principal qui était au
chômage de long terme. La famille avait de ce fait droit à des
revenus sociaux. Dans ce cas, il n'existe pratiquement aucune incitation
financière à prendre un emploi à temps partiel dans aucun
pays (à l'exception de l'Irlande avec un taux de 60 %). La moyenne
européenne est de 128 %, cette transition est donc fortement
pénalisée. L'Italie et le Royaume-Uni ont un taux
élevé qui reste inférieur à 100 %, le couple
obtient alors un gain (certes faible). Dans tous les autres pays et en
particulier en France, le taux est très élevé indiquant
une forte désincitation des individus dans des situations
précaires à prendre un emploi à temps partiel.
Les colonnes 3 à 6 décrivent les incitations créées
par le système fiscalo-social à la participation au marché
du travail du travailleur secondaire quand le travailleur principal est
chômeur indemnisé (colonnes 3 et 4) ou employé au salaire
moyen ouvrier (colonnes 5 et 6). Dans tous les pays les AETR sont relativement
faibles : le dispositif fiscalo-social n'engendre pas de
désincitation majeure pour le travailleur secondaire. On note cependant
des taux légèrement plus élevés dans le cas du
chômage indemnisé pour le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Au
Royaume-Uni, les allocations chômage sont attribuées sous
conditions de ressources du ménage, ce qui explique le taux effectif
d'imposition élevé. Des travaux empiriques ont pointé les
inefficacités résultantes sur le marché du travail. Dilnot
et Kell (1987) ont montré par exemple que le taux d'emploi des femmes
mariées à un chômeur était deux fois plus faible que
celui des femmes mariées à un travailleur employé. Par
ailleurs celles qui travaillaient avaient un emploi à temps plein (elles
plaçaient donc les revenus du ménage suffisamment loin de la
condition de ressources).
En 1997, les systèmes redistributifs en Europe comportent encore des
aspects désincitatifs à la prise ou reprise d'un emploi au sein
d'un couple. De façon générale, le travail paie d'autant
plus que l'autre membre du couple travaille déjà et paie moins,
voire même pas du tout, lorsqu'il ne travaille pas. La position de la
France par rapport à la moyenne européenne montre que c'est
particulièrement la transition entre le chômage de longue
durée et l'emploi à temps partiel qui est
découragée. Ceci est principalement dû à la
structure des aides sociales (RMI, allocation-logement...). Les réformes
mises en place à partir de 1998 ont permis d'améliorer quelque
peu cette situation.
Tableau 1 : Taux effectifs d'imposition de la reprise d'un
emploi en 1997
(le travailleur principal a le niveau de salaire moyen
1
)
Travailleur principal : |
Du
chômage
2
|
Du chômage de longue durée 4 à l'emploi à temps partiel 5 |
Chômage |
Emploi |
Chômage |
Emploi |
Travailleur secondaire : |
Non emploi 3 |
Non emploi |
Du non
emploi
|
Du non
emploi
|
||
Allemagne |
80 |
115 |
19 |
50 |
31 |
51 |
Autriche |
76 |
135 |
43 |
21 |
32 |
30 |
Belgique |
68 |
109 |
25 |
61 |
43 |
57 |
Danemark |
84 |
118 |
61 |
48 |
55 |
36 |
Espagne |
78 |
159 |
19 |
19 |
23 |
23 |
Finlande |
88 |
152 |
23 |
23 |
48 |
36 |
France |
76 |
133 |
30 |
38 |
29 |
28 |
Grèce |
54 |
104 |
118 |
30 |
66 |
30 |
Irlande |
68 |
60 |
38 |
25 |
20 |
32 |
Italie |
63 |
84 |
19 |
25 |
37 |
33 |
Luxembourg |
87 |
198 |
12 |
14 |
26 |
30 |
Pays-Bas |
89 |
134 |
52 |
37 |
45 |
39 |
Portugal |
79 |
174 |
11 |
13 |
14 |
21 |
Royaume-Uni |
72 |
93 |
55 |
20 |
60 |
28 |
Suède |
88 |
154 |
42 |
42 |
43 |
37 |
Eu15 |
77 |
128 |
39 |
31 |
38 |
35 |
Etats-Unis |
68 |
102 |
0 |
11 |
20 |
19 90 |
.
SMO : Salaire moyen ouvrier, calculé comme le salaire moyen brut
d'un adulte travaillant à plein temps dans le secteur manufacturier.. En
Espagne, par exemple, le salaire minimum correspond à 50 % du SMO
alors qu'en France en 1998, le SMIC représente 60 % du SMO
(Joumard, 2001).
2. 1
er
mois de chômage du travailleur principal qui
était employé au niveau du SMO. Il reçoit le montant
d'allocation chômage de base plus éventuellement des aides
sociales pour personne à charge et pour le loyer.
3. Le travailleur secondaire ne perçoit aucune allocation chômage.
4. On suppose que le chômeur de longue durée reçoit une
aide sociale s'il est en fin de droit d'allocation chômage.
5. Le temps partiel est supposé correspondre à un salaire de
40 % du SMO.
Lecture du tableau : dans la 1
ère
colonne, l'AETR donne
le complément à un de la différence de revenu net de la
famille entre la situation dans laquelle le travailleur principal travaille
à temps plein et le conjoint ne travaille pas et celle dans laquelle le
travailleur principal est au chômage et son conjoint ne travaille pas,
divisée par la différence de revenu brut de la famille qui existe
entre les deux situations. Ainsi, par exemple en France, 76 % du salaire
du temps plein est perdu en impôt et réduction de transferts
sociaux. Un AETR supérieur à 100 % indique que le
ménage perd de l'argent lors du passage au temps partiel.
Source : OCDE,
Benefit systems and Work Incentives,
(1999)
.
Le cas de la France
En
France jusqu'en 1998, les taux d'imposition élevés étaient
engendrés par l'interaction entre RMI et le système fiscal.
Après le point où le transfert était complètement
retiré (autour de 50 % du SMIC), les taux effectifs d'imposition
diminuaient substantiellement pour augmenter à nouveau autour de
1,25/1,5 SMIC.
Du côté de la fiscalité, deux mécanismes principaux
expliquaient l'ampleur des taux effectifs d'imposition. D'une part, un individu
à bas revenu entrant sur le marché du travail était
brutalement assujetti au prélèvement social (les Rmistes ne
paient pas de cotisations sociales, ne sont pas assujettis à la CSG et
ont droit aux prestations sociales). D'autre part, à partir d'un niveau
de revenu assez bas (autour du SMIC pour un célibataire), l'individu
subissait une hausse rapide du prélèvement fiscal. Il perdait en
effet sa qualité de non imposable à l'impôt sur le revenu
(IR), ainsi que son statut de Rmiste, ce qui implique un assujettissement total
ou partiel à la taxe d'habitation. Le mécanisme de calcul de l'IR
expliquait une grande part de ces taux marginaux effectifs
élevés, ceci malgré le « lissage » que
permet la décote effectuée à l'entrée dans le
barème. La décote en 1999 bénéficiait aux individus
dont le montant d'impôt sur le revenu selon le barème (Ib) ne
dépassait pas 3 350 francs. Ils payaient alors un montant
d'impôt (I) égal à I = 2*Ib - 3 350. Or, le taux
marginal d'imposition associé à la première tranche de
revenu imposable était de 10,5%. Ainsi, du fait de la décote, le
taux marginal du bas du barème était de 2*10,5 soit 21 %.
Tableau 2 : Taux effectifs de prélèvement
supportés par un bénéficiaire du RMI entrant
sur le
marché du travail en % du coût salarial total
1
et en
fonction de la situation familiale en 1995
En %
Bénéficiaire du RMI embauché 2 |
1 |
2 |
3 |
4 |
5 |
6 |
Avec un CES |
91 |
87 |
37 |
85 |
83 |
107 |
A 75 % du SMIC avec intéressement 3 |
83 |
80 |
58 |
78 |
76 |
109 |
A 75 % du SMIC sans intéressement |
87 |
97 |
nd |
102 |
87 |
nd |
A 100 % du SMIC |
81 |
88 |
58 |
91 |
78 |
109 |
1. Le
coût salarial total résulte de la somme du salaire brut et des
cotisations sociales patronales obligatoires. On assimile le taux marginal
effectif de prélèvement au rapport d[prélèvements -
prestations] / d[coût salarial total]. Il dépend de la situation
familiale de l'individu.
2. Les bénéficiaires sont : 1 = célibataire sans
enfant versant un loyer de 1 266 F ; 2 = couple sans enfant versant un
loyer de 1 266F ; 3 = couple avec 2 enfants (12 et 16 ans) versant un
loyer de 2 046 F dont l'autre membre gagne le SMIC ; 4 = couple avec 2
enfants (12 et 16 ans) versant un loyer de 2 046 F ; 5 = couple
avec 3 enfants (2, 6, 13 ans) versant un loyer de 2 309 F ; 6 =
célibataire avec 2 enfants (12 et 16 ans) versant un loyer de 2 046 F,
et satisfaisant aux conditions pour bénéficier du versement de
l'API (allocation parent isolé).
3. Le mécanisme d'intéressement permet aux Rmistes qui prennent
un emploi de cumuler en partie l'allocation et leur revenu d'activité
pendant un certain temps.
Source : Direction de la Prévision.
Du côté des prestations sociales, la perte
d'éligibilité à divers transferts, induite par
l'augmentation des revenus, l'apparition de ces seuils
90
(
*
)
. De plus, les personnes dont
le revenu primaire augmente à la suite d'une modification de leur
situation professionnelle perdent également l'accès gratuit
à certains services locaux ou d'autres avantages réservés
aux personnes justifiant de faibles ressources
91
(
*
)
.
Ainsi, en 1996, un Rmiste acceptant un emploi à plein temps payé
au SMIC, pouvait ne recevoir
in fine
qu'environ 1 500 francs
supplémentaires par mois, montant faible au regard de l'effort que
demande un travail à plein temps. En comparant la situation d'un
individu touchant le RMI et celle d'un autre travaillant à mi-temps
payé au SMIC, la rémunération nette de cet emploi à
temps partiel pouvait même être négative (i.e. l'individu
travaillant à temps partiel jouissait d'un revenu disponible
inférieur à celui du Rmiste). Ceci était, en grande
partie, le résultat du mode d'attribution de l'allocation logement dont
la règle de calcul prenait en compte les revenus salariaux mais pas le
RMI.
Afin de faciliter l'insertion professionnelle, l'allocataire du RMI pouvait
cumuler son revenu d'activité et une partie de l'allocation RMI. Ces
règles dites d'intéressement variaient selon la nature de
l'emploi en question ou de la formation. Depuis le 1
er
décembre 1998, le mécanisme d'intéressement a
été élargi dans la mesure où le cumul de 50 %
des ressources d'activité avec l'allocation se poursuit durant les trois
trimestres suivant la 1
ère
révision et ceci même
si les 750 heures de travail limites ont été atteintes avant la
fin de cette période de cumul (DREES, 2000). En cas de cessation puis de
reprise d'activité, l'individu peut bénéficier d'un autre
cycle complet (cumul total puis partiel) pour une nouvelle période de
quatre trimestres de droits. La condition requise est que le trimestre de
référence précédent la reprise d'activité ne
comporte aucun revenu d'activité.
Bien que cette réforme ait permis de combler en partie la trappe
à inactivité, induite par les taux d'imposition effectifs qui
pesaient sur la reprise d'un emploi, il n'en restait pas moins que son effet
stimulant sur l'offre de travail a été modeste (Fleurbaey,
Hagneré, Martinez et Trannoy, 1998). Premièrement, ce
mécanisme d'intéressement n'est que temporaire, ce qui implique
qu'à échéance d'un an le cumul n'est plus possible et le
seuil « réapparaît ». Deuxièmement, il
n'est offert qu'aux individus dont le parcours sur le marché du travail
a été défavorable au point qu'ils se trouvent dans la
situation limite du RMI. Enfin, troisièmement, il est probable que les
individus bénéficiaires qui ne percevaient déjà que
difficilement les subtilités du dispositif initial ne soient conscients
de la réforme et de ce fait n'ajustent pas leur comportement.
Les réformes instaurées en France à partir de 2000
(réformes de l'allocation-logement, de la taxe d'habitation,
introduction de la Prime pour l'Emploi) ont largement modifié cette
situation, diminuant sensiblement les prélèvements effectifs sur
les bas salaires.
3. La trappe à pauvreté
L'association de l'impôt sur le revenu et des prestations
sociales crée un ou plusieurs points de retournement sur la contrainte
budgétaire des travailleurs à faible revenu. Celle-ci n'est donc
pas linéaire. Au-delà de ces points, travailler davantage
rapporte moins à la marge. Ainsi, ceux qui sont sur le marché du
travail ne sont pas incités à travailler au-delà d'un
certain nombre d'heures. De ce fait ils ne dépassent pas le niveau de
revenu correspondant à cette offre de travail et sont alors
piégés dans une « trappe à
pauvreté ». Le taux marginal effectif d'imposition
(
Marginal Effective Tax Rate
, METR) constitue l'indicateur pertinent
permettant de localiser ces seuils et donc l'apparition probable de trappe
à pauvreté. Ainsi permet-il de mesurer les effets combinés
du système fiscal et social et en particulier l'étendue de la
trappe à pauvreté.
Le taux marginal effectif d'imposition mesure le prélèvement
effectif associé à une modification marginale du revenu salarial.
Autrement dit si l'individu travaille un peu plus et perçoit à ce
titre par exemple cent euros supplémentaires de salaire, le METR donne
le nombre d'euros qui seront prélevés sur cette somme du fait de
la perte de prestations sociales et d'impôt supplémentaire. Il est
défini par le taux auquel les impôts augmentent et les transferts
diminuent à mesure que les revenus bruts croissent :
METR = 1 - [changement du revenu net/changement du revenu brut]
Ce
concept mesure les incitations économiques immédiates sous forme
de rendements financiers associés à l'augmentation marginale des
heures travaillées ou de l'effort de travail. Il constitue un indicateur
de politique économique puisqu'il résulte de la combinaison des
politiques d'imposition progressive et de retrait des transferts quand le
salaire augmente.
Cet indicateur s'appuie sur le salaire brut et non sur le coût total du
travail. En effet, ce dernier inclut les cotisations sociales employeurs. Or
dans la plupart des pays, les individus ignorent le coût de leur
emploi ; ils ne jugent que leur salaire brut et ce qu'il va leur permettre
de dégager comme revenu disponible pour leur consommation. Plus le METR
est élevé moins cela rapporte à l'individu de travailler
plus.
Le tableau 3 donne les taux marginaux d'imposition pesant sur des
ménages ayant diverses configurations familiales dans les pays
européens en 1997. En outre, il donne les efforts réalisés
par les pays pour diminuer l'imposition effective pesant sur les revenus
d'activité entre 1997 et 2000.
Dans l'ensemble, les Etats européens ont diminué les METR pesant
sur les faibles et moyens salaires entre 1997 et 2000. Néanmoins, pour
certains pays, ils restent élevés se situant entre 40 et
50 % (Belgique, Allemagne, Danemark, Finlande et Pays-Bas) quelle que soit
la configuration familiale.
Dans les pays qui ont recours à des transferts sociaux avec exigence de
travail, comme le Royaume-Uni et l'Irlande, l'apparition de trappes à
pauvreté s'explique par le fait que le transfert n'est proposé
qu'une fois sur le marché du travail. Son retrait, qui dépend de
la configuration familiale, se réalise à partir d'un certain
niveau de salaire. Par exemple, en Irlande, une personne isolée ayant 2
enfants et gagnant 67 % du salaire moyen ouvrier supportait en 1997 un
METR de 90 % alors que pour une personne sans enfant il était de
30 %. De même au Royaume-Uni, en 2000 la phase de retrait du
Working Family Tax Credit
implique un METR pour les familles avec
enfants à bas revenu de presque 70 % alors que celui de familles
plus riches et de ce fait non concernées par le WFTC est seulement de
32 %. Ces seuils sont à l'origine de l'apparition de trappes
à pauvreté. Afin d'éviter ces effets, les Pays-Bas ont mis
en place un crédit d'impôt forfaitaire (
General Rebate
) qui
s'accompagne d'un crédit supplémentaire pour les travailleurs
(
Employment Rebate
).
Les réformes qui visent à diminuer les trappes à
inactivité en augmentant le revenu disponible des travailleurs à
plus bas salaires aboutissent souvent à accentuer les trappes à
pauvreté, dans la mesure où le supplément de revenu
disparaît quand le travailleur progresse dans l'échelle salariale.
Tableau 3 : Taux marginaux d'imposition dans les pays
européens et aux Etats-Unis en 2000
(Impôt sur le revenu + cotisations sociales employés - transferts
monétaires de politique familiale, en % du salaire brut)
1
|
Célibataire sans enfant 67 % du SMO |
Parent
isolé 2 enfants
|
Couple marié 2 enfants 1 travailleur SMO |
Couple marié 2 enfants 2 travailleurs 100 % SMO + 33 % SMO |
||||
|
Taux
|
Modification 1997-2000 |
Taux
|
Modification
|
Taux
|
Modification
|
Taux
|
Modification
|
Allemagne |
51,0 |
- 0,9 |
48,8 |
- 0,8 |
51,8 |
3,6 |
39,5 |
- 2,4 |
Autriche |
37,1 |
- 14,4 |
52,1 |
30,5 |
42 |
- 0,5 |
32,3 |
- 2 |
Belgique |
54,1 |
- 0,7 |
54,1 |
- 0,7 |
51,4 |
- 0,3 |
45,5 |
1,0 |
Danemark |
50,7 |
- 1,4 |
50,7 |
- 1,4 |
45,2 |
- 1,3 |
36,3 |
- 0,5 |
Espagne |
26,4 |
- 4,8 |
6,4 |
- 17,7 |
23,2 |
- 0,9 |
34,9 |
- 1,8 |
Finlande |
42,7 |
- 2,3 |
42,7 |
- 2,3 |
48,4 |
- 2,3 |
38,9 |
- 1 |
France |
48,6 |
- 0,8 |
21,0 |
- 0,4 |
21,0 |
- 0,4 |
39,0 |
- 0,5 |
Grèce |
20,1 |
0 |
15,9 |
0 |
28,5 |
0 |
35,5 |
- 0,3 |
Italie |
32,8 |
- 1,6 |
32,8 |
- 1,6 |
40,1 |
- 0,6 |
40,5 |
- 6,5 |
Irlande |
22,0 |
- 8,5 |
22 |
- 68,5 |
28,5 |
- 4,2 |
20,3 |
- 4,6 |
Luxembourg |
34,1 |
0 |
14,7 |
2,1 |
14,7 |
2,1 |
14,2 |
- 1,3 |
Pays-Bas |
45,8 |
- 1,0 |
41,3 |
- 3,4 |
41,8 |
- 1,9 |
37,5 |
2,9 |
Portugal |
25,0 |
- 1,0 |
11,0 |
0,0 |
25,0 |
- 1,0 |
27,5 |
- 0,5 |
Royaume-Uni 2 |
32,0 |
- 1,0 |
69,4 |
36,4 |
69,4 |
36,4 |
20,8 |
- 1,3 |
Suède |
38,3 |
- 0,6 |
38,3 |
- 0,6 |
35,2 |
- 0,5 |
43,6 |
- 2,5 |
UE 12 3 |
48,5 |
- 2,8 |
33,7 |
- 2,1 |
46,3 |
- 0,8 |
44,5 |
- 2,2 |
Etats-Unis |
29,6 |
- 0,3 |
35,6 |
- 15,4 |
29,6 |
- 21,4 |
24,8 |
- 2,4 |
1. On
suppose que le revenu brut principal du ménage augmente. Le
résultat peut être différent si le salaire du conjoint
augmente, surtout si les conjoints sont imposés séparément.
2. Les chiffres 2000 et 1997 pour le Royaume-Uni ne sont pas comparables dans
la mesure où en 1997 le
Family Credit
n'est pas inclus dans le
calcul alors que le programme
Working Family Tax Credit
, qui l'a
remplacé, l'est en 2000. C'est la raison pour laquelle la moyenne
européenne est calculée sur l'Europe des 12.
3. Moyenne pondérée (PIB réel).
Lecture du tableau : Par exemple en France, en 2000, un célibataire
travaillant à 67 % du SMO, pour 1 € supplémentaire de
salaire percevra 51,4 centimes.
Source : OCDE,
Taxing Wages 1999-2000
,
The Tax/Benefit Position
of Employees 1997
.
II. Les mesures récentes d'incitation au travail des travailleurs peu
qualifiés
Nous présenterons ici les principales réformes fiscales
réalisées depuis 2000 afin d'améliorer les incitations au
travail des travailleurs peu qualifiés. Les mesures prises en France
sont mises en perspectives avec celles du Royaume-Uni, de la Belgique et des
Pays-Bas. Ces quatre pays ont réformé de leur système
fiscal pour réduire les pièges à inactivité. Ils
ont opté pour l'introduction de crédits d'impôt qui
permettent d'offrir un surcroît de revenu aux individus qui
décident de travailler.
1. Les
réformes engagées
Les différentes solutions choisies
Depuis,
2000 les pays européens ont mis en place des réformes de leur
système redistributif pour rétablir les incitations au travail
des personnes peu qualifiées (annexe 3). La tendance
générale est à la réduction de la charge fiscale
sur les travailleurs et plus précisément les travailleurs
à faible revenu.
Certains pays ont opté pour une augmentation sensible du niveau du seuil
d'imposition (Autriche, Finlande, Allemagne, Pays-Bas). Ceci réduit la
charge fiscale pour tous et conduit à exonérer de l'imposition
les travailleurs, à faibles salaires comme les travailleurs à
temps partiel. La plupart des pays ont réduit les taux marginaux
d'imposition des tranches les plus basses, plus particulièrement
l'Allemagne, l'Autriche, l'Irlande, la France et l'Espagne (en 1998) (annexe
4). Phelps (2000) souligne que si l'objectif de ces réductions
d'impôt est de réduire la charge fiscale sur les travailleurs
faiblement rémunérés, alors une subvention directe pour
les travailleurs à faibles salaires peut être plus efficace pour
augmenter l'emploi et la rémunération. En effet, ces
réductions d'impôt, si elles profitent à ces travailleurs,
profitent aussi à tous les autres y compris ceux qui ont un salaire
élevé ou ceux qui travaillent de courtes périodes et qui
n'entendent pas prendre un emploi régulier. En outre ces
réductions de charges fiscales ont des effets différents selon
les pays en raison des différences institutionnelles des marchés
du travail et leur degré de rigidité. Si trappes à
inactivité il y a, les effets sur l'emploi seront plus importants dans
des pays où l'augmentation du revenu après impôt ne
s'accompagne pas d'une augmentation des revenus de remplacement après
impôts des personnes non employées.
L'Irlande a adopté une mesure spécifique d'incitation à la
reprise d'un emploi pour les chômeurs de longue durée. Il s'agit
d'un abattement spécial offert aux personnes qui, étant au
chômage depuis au moins un an, reprennent un emploi. Pendant la
première année d'emploi, l'abattement s'élève
à 3 809 euros avec 1 270 euros supplémentaires
accordés pour chaque enfant. Ce montant est réduit à deux
tiers la deuxième année et à un tiers la troisième.
Concernant l'IR en France, le système de la décote
(mentionné précédemment) a été
modifié. A partir de 2003, il profite à tout ménage dont
le montant d'impôt brut (c'est-à-dire le montant d'impôt Ib
selon le barème et avant toute application de la décote) est
inférieur à 747 euros. Ainsi, alors que sous l'ancienne formule,
un célibataire bénéficiait de ce mécanisme
jusqu'à 961 euros de salaire net mensuel il en profite désormais
jusqu'à 1 138 euros. La nouvelle formule de la décote
implique que les ménages paient un impôt de I = 1,5*Ib - 374. Le
taux d'imposition de la première de revenu est abaissé à
7% ce qui engendre un taux marginal du bas du barème de 1,5*7 soit 10,5%
du fait de la décote contre 21% en 1999. Plus de foyers fiscaux sont
concernés par cet avantage et le montant d'IR des individus à bas
salaire est moindre. Cependant, ce dernier étant déjà
faible, le gain de la réforme est minime : le gain maximal est 118
euros par an (Dupont, Le Cacheux, Sterdyniak et Touzé, 2000). Le tableau
4 montre l'évolution des taux des tranches du barème de l'IR en
France prévue jusqu'à 2003.
Tableau 4 : Évolution des taux des tranches du barème en France entre 2000 et 2003
Tranches de revenu annuel imposable 2000, en € |
IR 2000
|
IR 2001
|
IR 2002
|
IR 2003
|
2000-2003 |
< 4 055 |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
de 4 055 à 7 976 |
9,5 |
8,25 |
7,5 |
7 |
- 2,5 |
de 7 976 à 14 039 |
23 |
21,75 |
21 |
20,5 |
- 2,5 |
de 14 039 à 22 732 |
33 |
31,75 |
31 |
30,5 |
- 2,5 |
de 22 732 à 36 987 |
43 |
41,75 |
41 |
40,5 |
- 2,5 |
de 36 987 à 45 613 |
48 |
47,25 |
46,75 |
46,5 |
- 1,5 |
> 45 613 |
54 |
53,25 |
52,75 |
52,5 |
- 1,5 |
Source :
Déclaration des revenus 2000
, Brochure
pratique 2001, DGI.
C'est l'ensemble du système fiscalo-social qui crée des effets de
seuil à l'entrée du marché du travail. Certains pays ont
de ce fait opté pour des réformes du côté social
pour restaurer les incitations des travailleurs peu qualifiés à
prendre un emploi. Le cas de la France est remarquable sur ce point. En effet,
la France est la seule à avoir mis en place une réforme
d'ensemble de son système social en 2000 qui, associée à
celle de la fiscalité, a amélioré sensiblement les
incitations sur le marché du travail. La réforme de la taxe
d'habitation et des allocations logement
92
(
*
)
ont permis de limiter l'imposition brutale des
revenus lorsque la personne prend un emploi, ainsi qu'un retrait trop abrupt du
RMI. La mise en place de la couverture maladie universelle offre les soins
médicaux gratuits sous condition de ressources. Enfin,
l'élargissement du mécanisme d'intéressement du RMI permet
de cumuler l'allocation avec des revenus d'activité pendant une
période d'un an. L'ensemble de ces réformes devrait supprimer
l'effet négatif sur la décision de prise d'emploi. Pour un couple
sans emploi avec 2 enfants, « abandonner le RMI » pour que
l'un des deux membres prenne un emploi à plein temps au SMIC implique un
surplus par mois de 229 euros au lieu de 91 euros avant la réforme.
Lorsque l'emploi pris est à temps partiel, le gain s'élève
à 45 euros alors qu'il était nul avant la réforme
(Hagneré et Trannoy, 2001).
L'utilisation des crédits d'impôt
A
l'instar des Etats-Unis (
Earned Income Tax Credit
, EITC)
93
(
*
)
et de la Finlande, quelques
pays européens ont choisi d'introduire un mécanisme de
crédits d'impôt afin de rendre l'emploi plus attractif
financièrement relativement au non emploi (le Royaume-Uni en 1999, la
France et la Belgique en 2000, les Pays-Bas en 2001). Le système
instauré aux Pays-Bas diffère des trois autres : le
crédit n'y est pas remboursable : au mieux le foyer fiscal
considéré n'est pas imposable. Pour les autres systèmes,
les crédits fonctionnent comme un impôt négatif. Ainsi, un
individu non imposable (du fait d'un revenu trop faible) et qui travaille, va
percevoir un certain montant correspondant à un
« remboursement d'impôt ». Seuls les individus qui
participent au marché du travail et donc déclarent à
l'administration fiscale un revenu d'activité positif peuvent être
éligible au crédit d'impôt. L'aide est retirée
à un certain taux au fur et à mesure que le revenu de l'individu
augmente. Les crédits d'impôt ciblés vers les travailleurs
peu rémunérés permet de rendre le travail
rémunérateur pour des individus faiblement qualifiés tout
en évitant de réduire les minima sociaux. Cependant les effets
incitatifs sur l'offre de travail dépendent largement de l'état
du marché du travail et de l'ampleur de ces programmes. En outre, leur
impact en termes redistributifs peut s'avérer discutable.
Au Royaume-Uni, en France et en Belgique, les crédits mis en place sont
remboursables et dépendent la situation familiale du
contribuable
94
(
*
)
.
Ainsi, les foyers fiscaux éligibles, du fait de revenus
d'activité positifs mais de ressources globales inférieures
à un certain montant, se voient attribuer un crédit
d'impôt. Si le montant de ce crédit dépasse le montant
d'impôt dû à l'administration fiscale, cette dernière
rembourse la différence. En ce sens ils relèvent du principe
d'imposition négative. En termes de coût budgétaire, le
crédit d'impôt britannique (
Working Family Tax Credit
(WFTC)) est presque 8 fois plus important que celui de la Prime pour
l'Emploi (PPE) de 2001, mais la PPE doit être multipliée par 3
d'ici 2003. Le crédit belge reste loin derrière avec un
coût total représentant la moitié de celui de la PPE. En
termes de nombre de personnes touchées par la mesure, la France est
devant la Belgique et le Royaume-Uni, avec plus de 8 millions de foyers fiscaux
concernés par la prime contre 1,43 million pour le crédit belge
et 1,27 million pour le WFTC (ce qui implique des effets redistributifs
différents). Cependant, les extensions du crédit d'impôt
aux ménages sans enfant prévues d'ici 2003 au Royaume-Uni
devraient élargir considérablement la population
concernée. En ce qui concerne le gain moyen, le WFTC est loin devant les
deux autres. Cependant, il intègre une grande partie de la politique
familiale du Royaume-Uni ce qui n'est pas le cas des autres : il est donc
difficile de comparer les gains. On souligne encore une fois l'importance de
prendre en compte l'ensemble du système redistributif pour comparer la
situation de ménages identiques dans deux pays. Il serait
nécessaire pour cela de disposer de modèles simulant les
systèmes fiscaux et sociaux de chaque pays, ce qui permettrait
d'apprécier les effets des différents crédits
d'impôt sur la situation de ménages types (voir annexe 5 pour une
comparaison partielle de quatre crédits d'impôt). Si le montant
versé dans le cadre du WFTC est conséquent, celui concernant la
PPE, et plus encore le crédit belge, restent faibles, probablement trop
faibles pour stimuler significativement l'offre de travail des travailleurs
faiblement qualifiés. Des réformes davantage ciblées et
plus importantes pourraient diminuer le risque de trappe à
inactivité.
En moyenne, les Etats membres ont réduit leur taux effectif d'imposition
de 2 à 3 points pour les travailleurs à faibles et moyens
revenus. L'objectif affiché consiste clairement à aider ceux qui
sont hors du marché du travail à y entrer plutôt que ceux
qui travaillent déjà à travailler davantage (ce qui
revient à choisir de réduire de la trappe à
inactivité plutôt que la trappe à pauvreté), que ce
soit
via
des crédits d'impôt sur les salaires ou des
réductions de cotisations sociales employés. Si ces
crédits sont ciblés sur les faibles revenus avec un retrait pour
des niveaux de revenus plus élevés, alors le risque est
d'augmenter la trappe à pauvreté. Le crédit d'impôt
néerlandais contourne cette difficulté par son caractère
forfaitaire pour tout niveau de salaire. Cependant cette solution est plus
coûteuse pour une réduction identique de la trappe à
inactivité. Le Royaume-Uni a réduit très sensiblement le
taux de retrait du crédit d'impôt sur les salaires ce qui diminue
le risque de trappe à pauvreté. Quels peuvent être les
résultats en termes d'emploi de ces crédits d'impôt ?
Quels en sont les effets redistributifs ? Nous proposons ici une
comparaison sous ces deux angles de la PPE et du WFTC.
2.
Comparaison des effets sur l'offre de travail du WFTC et de la PPE
Les effets théoriques d'un crédit d'impôt sur l'offre de
travail
D'un
point de vue théorique, ces mesures fiscales rendent l'accès
à l'emploi plus attractif financièrement pour les travailleurs
faiblement qualifiés, et donc les incitent à prendre un emploi.
Néanmoins, elles peuvent avoir des conséquences négatives
sur l'offre de travail de certaines catégories de travailleurs. D'une
part elles peuvent induire une incitation à la réduction de
l'offre de travail des individus qui, travaillant déjà, ont un
revenu situé dans la tranche où l'aide diminue. D'autre part,
elles sont susceptibles de jouer négativement sur l'emploi du
travailleur le moins bien rémunéré dit
« travailleur secondaire » dans le couple. Il est difficile
d'éviter un taux marginal relativement élevé sur le
salaire de ces deux catégories d'individus. L'invidualisation du droit
au transfert pourrait permettre de résoudre cette question pour le
travailleur secondaire. Dans ce cas, l'aspect redistributif serait
délaissé totalement au profit de l'aspect incitatif. En effet, le
programme ne serait plus uniquement dirigé vers les travailleurs pauvres
puisqu'un individu ayant un salaire faible mais appartenant à un
ménage riche, percevrait quand même le crédit. Par
ailleurs, le coût de la mesure pourrait substantiellement augmenter. En
France, la PPE est « individuelle » parce que son calcul
porte sur le montant de salaire individuel et que le droit est
conditionné à une activité minimale individuelle, mais la
condition de ressources porte sur les revenus globaux du ménage.
Ainsi les effets théoriques d'un crédit d'impôt sur l'offre
de travail sont d'une part une stimulation de la participation au marché
du travail et d'autre part une réduction des heures de travail des
individus qui travaillaient déjà et un effet négatif sur
l'emploi du travailleur secondaire au sein du couple. La résultante sur
l'emploi total est donc indéterminée.
Des résultats sur l'offre de travail décevants
Il est
trop tôt pour disposer d'évaluations complètes des effets
sur l'offre de travail de ces réformes. Le WFTC a fait l'objet de
quelques travaux. Cependant, il ne s'agit pas de mesures
ex post
mais
de simulations réalisées avec les modèles de
microsimulation construits par l'Institute for Fiscal Studies.
Les effets incitatifs du WFTC dépendent d'une part de la situation
familiale du ménage (couple ou famille monoparentale) et d'autre part de
la situation initiale vis-à-vis du marché du travail. Le
caractère familial du dispositif est essentiel en ce qui concerne les
effets de la mesure sur les incitations au travail. En effet, il peut impliquer
un effet négatif sur l'offre de travail de couples bi-actif dont l'un
est à temps partiel. Les résultats des simulations montrent que
les effets incitatifs au travail du WFTC sont modestes sur certaines
catégories de ménages (famille monoparentales) et ils peuvent
être négatifs sur les couples bi-actifs (Blundell, Duncan, McCrae
et Meghir, 2000). Le WFTC incite les parents isolés à prendre un
emploi mais il implique en même temps des incitations à la
réduction du temps de travail. Les mères isolées verraient
leur taux d'activité augmenter de 2,2 % (soit 34 000 femmes
incitées à prendre un emploi) ; 0,2 % des mères
isolées seraient incitées à passer d'un emploi à
temps plein à un emploi à temps partiel.
Prenant en compte l'ensemble des réformes mises en place au Royaume-Uni,
les résultats obtenus par Piachaud et Sutherland (2000) sont les
suivants : deux tiers des parents isolés gagneraient moins à
travailler à temps partiel court (16 heures par semaine)
rémunéré au salaire minimum qu'avant les réformes.
Les incitations à travailler plus de 30 heures sont accentuées
pour les familles monoparentales. Globalement les incitations au travail des
parents isolés sont donc très faibles.
Les membres de couples inactifs seraient incités à prendre un
emploi (environ 11 000 femmes et 13 000 hommes). Néanmoins, le
travailleur secondaire du couple serait incité à se retirer du
marché du travail soit 20 000 femmes et 10 000 hommes. Ainsi,
les effets du WFTC sur l'offre de travail devraient être sensiblement les
mêmes que ceux de l'EITC à savoir une faible incitation au travail
pour les hommes et les mères isolées et une désincitation
pour les femmes vivant en couple. Les évaluations globales de l'EITC aux
Etats-Unis ont montré que s'il avait eu un effet négatif sur
l'offre de travail du travailleur secondaire, il n'avait pas engendré de
réduction majeure du nombre d'heures travaillées par ceux qui
participaient déjà au marché du travail. En outre son
effet positif sur la participation a été assez important. De ce
fait l'impact global sur l'offre de travail a été plutôt
positif.
Certains facteurs peuvent venir atténuer les effets incitatifs du WFTC.
D'une part, le manque de structures d'accueil pour les jeunes enfants (aider au
financement de la garde ne résout pas le problème de l'absence de
possibilités de garde). D'autre part, les ménages inactifs sont
concentrés dans les bassins d'emplois sinistrés ou la demande de
travail est insuffisante pour permettre aux individus de prendre un emploi et
ceci qu'elle que soit leur motivation.
Concernant les effets de la PPE sur l'offre de travail, les évaluations
sont beaucoup plus rares. L'étude effectuée par Laroque et
Salanié (2001) simule les conséquences de la PPE sous le
barème de 2003 rétropolé pour l'année 1999 sur
l'emploi des femmes (tableau 5).
Tableau 5 : Effet de la PPE sur l'emploi des femmes (en milliers)
Statut initial |
Effectif de référence |
Entrées (+) ou sorties (-) vers |
||
Non emploi |
Mi-temps |
Plein temps |
||
Non emploi |
2 297 |
- 16 |
+ 6 |
+ 10 |
Emploi à mi-temps |
494 |
+ 2 |
- 4 |
+ 2 |
Emploi à plein temps |
2 238 |
+ 5 |
+ 2 |
- 7 |
Total |
5 029 |
- 9 |
+ 4 |
+ 5 |
Source : Laroque et Salanié (2001), tableau 10.4.
Globalement, la PPE aurait un effet positif sur l'emploi dans la mesure
où 9 000 femmes sortiraient du non emploi pour prendre un emploi
à mi-temps pour 4 000 d'entre elles et à plein temps pour
les 5 000 autres. Mais au regard de la taille de l'échantillon
(5 290 000 personnes) cet effet est extrêmement faible. Elle
ferait passer 10 000 femmes du non emploi à un emploi à
plein temps mais parallèlement 5 000 femmes qui avaient un emploi
à plein temps sortiraient du marché du travail et 2 000
réduiraient leur temps de travail pour prendre un emploi à
mi-temps. Les résultats illustrent les effets théoriques attendus
dans la mesure où celles qui augmentent leur offre de travail sont
celles qui se situent à l'entrée du barème et, par
ailleurs, les femmes mariées à un travailleur
bénéficiant de la PPE réduisent leur offre de travail.
Ceci montre que l'effet du caractère individuel de la PPE est
compensé par l'effet du caractère familial de la condition de
ressources. De ce fait de la même façon que le WFTC ou que l'EITC,
le travailleur secondaire du couple est désincité à
travailler.
Pourquoi ces effets médiocres ?
A ce
stade on peut s'interroger sur les raisons qui font que le WFTC a permis
d'améliorer même faiblement l'offre de travail alors que la PPE ne
devrait pas avoir d'effet sensible. Deux grandes explications peuvent
être invoquées.
La première concerne l'ampleur et les modalités d'application du
crédit offert. En effet, le montant du WFTC peut être très
important et atteindre une valeur de 92 livres par semaine pour une
durée de travail comprise entre 16 et 25 heures hebdomadaires soit
environ 7 800 euros par an. La PPE s'élève au maximum à
230 euros par an en 2001 (690 euros en 2003) pour un emploi au SMIC à
plein temps
95
(
*
)
. Elle
représente au maximum 2,2 % du revenu déclaré avec le
barème 2001 et 7,1 % avec le barème 2003 contre 40 %
pour l'EITC et 160 % pour le WFTC (Cahuc, 2002). Certes, comme nous
l'avons souligné plus haut, le WFTC comprend l'intégralité
des aides familiales et sociales versées aux individus alors que la PPE
ne constitue qu'un dispositif d'incitation à l'emploi
96
(
*
)
. Il n'en reste pas moins que
le système britannique est beaucoup plus généreux que le
français. De plus le barème actuel de la PPE cherche à
créer des incitations au travail là où il n'en manque pas.
Son montant est maximum pour un Smic à plein temps. Or les individus
concernés auraient pour la plupart travaillé en l'absence de la
PPE : ils bénéficient pleinement d'un effet d'aubaine. En
revanche, la PPE est très faible là où une trappe à
inactivité est susceptible d'apparaître, au niveau du temps
partiel.
En outre, alors que le WFTC est versé tous les mois sur la fiche de
paie, la PPE est perçue tous les ans dans le cadre de l'impôt sur
le revenu. Cette modalité de versement rend le dispositif moins visible
par les individus qui de ce fait sont moins enclins à augmenter leur
offre de travail. Le versement d'un acompte simplifié directement
visible sur le salaire mensuel pourrait améliorer sensiblement le
caractère incitatif de la PPE.
La seconde explication est relative aux institutions et à l'état
du marché du travail (Cahuc (2002)). Le marché du travail
français est très différent des marchés
anglo-saxons. Il est illusoire d'espérer obtenir des résultats
similaires à ceux obtenus sur le marché américain ou
même britannique en appliquant ces mesures fiscales incitatives sur le
marché français. Une étude menée par l'OCDE a
montré l'importance de l'état du marché du travail sur les
résultats en termes d'incitation au travail des crédits
d'impôt. A l'aide d'un modèle d'équilibre
général, les auteurs évaluent les effets d'un
crédit d'impôt du type EITC au Royaume-Uni, aux Etats-Unis, en
Allemagne et en Suède en tenant compte des effets de bouclage
macroéconomique
97
(
*
)
pouvant influencer indirectement les performances des
bénéficiaires du crédit (Bassanini
et al.
, 1999).
Leur modèle distingue quatre catégories de travailleurs allant
des « très bas salaires » (60 % du salaire
moyen) aux « salaires moyens hauts » (90 % du salaire
moyen). Ils concluent que la combinaison d'une structure de salaire
compressée, de salaires de réserve
98
(
*
)
élevés et de
taux d'imposition élevés sur les revenus d'activité
implique que le crédit d'impôt soit très coûteux. En
effet dans ce cas, le crédit doit être suffisamment important pour
que le revenu issu de la prise d'un emploi dépasse le salaire de
réserve de l'individu. Selon les auteurs, en Suède et en
Allemagne un crédit d'impôt élevé pourrait conduire
in fine
à une diminution des heures travaillées : les
individus qui travaillaient déjà le jugeraient suffisamment
attractif et réduiraient leur temps de travail pour satisfaire aux
conditions de ressources et ainsi le percevoir. De ce fait l'efficacité
des crédits d'impôt en matière de créations
d'emplois devrait être beaucoup moins importante sur les marchés
du travail européens continentaux, et donc en particulier en France, que
sur les marchés du travail anglo-saxons caractérisés par
une grande flexibilité des salaires.
En conclusion, les effets sur l'offre de travail du WFTC devraient être
limités et ceux de la PPE très décevants. Mais l'objectif
des pouvoirs publics devrait être aussi d'assurer un niveau de ressources
suffisant aux personnes peu qualifiées et peu
rémunérées : ce type d'aide
bénéficie-t-il aux ménages situés au bas de la
distribution des revenus ?
3. Qu'en est-il des effets redistributifs ?
La
littérature concernant l'évaluation des effets redistributifs du
WFTC est relativement abondante. Les modèles français (Myriade
pour la CNAF et Inès pour l'INSEE) n'intègrent pas les
réactions comportementales des agents et ne permettent donc pas
d'évaluer
ex ante
les effets de la PPE sur l'offre de travail des
individus. Cependant, ils offrent une représentation assez fidèle
du dispositif et donnent donc un chiffrage des effets redistributifs assez
précis. Alors que le WFTC ne touche que 1 foyer sur 20, la PPE concerne
1 foyer sur 4 (contre 1 sur 5 pour l'EITC). Ce simple constat montre que le
WFTC s'adresse à une population plus spécifique que ne le fait la
PPE (et l'EITC).
Globalement le WFTC et la PPE profitent aux ménages du bas de la
distribution des revenus. Cependant, alors que le WFTC est plus
généreux avec les ménages les plus pauvres, la PPE est
davantage ciblée sur le troisième décile et s'étale
très haut dans la distribution des revenus (Lhommeau
et al.
,
2001, Legendre
et al.
, 2001
99
(
*
)
). Le WFTC bénéficie principalement aux
ménages appartenant aux deux premiers déciles qui devraient voir
leur revenu progresser en moyenne de 5,2 %. Alors que la PPE 2003 devrait
engendrer une augmentation de revenu de 2,5 % et de 1,6 % pour
respectivement les premier et deuxième déciles. Les
ménages du troisième décile verraient quant à eux
leur revenu augmenter de 3 % par le WFTC alors que l'effet de la PPE sur
le revenu de cette population serait de 1,2 % (Atkinson
et al.
,
2001). Les individus appartenant aux 10 % les plus pauvres ne peuvent
bénéficier de la PPE. Cahuc (2002) explique cela par les
caractéristiques du marché du travail français : le
salaire minimum élevé implique que les individus ayant une
productivité trop faible ne peuvent trouver un emploi et donc ne peuvent
pas bénéficier de la mesure. Enfin, le revenu des 10 %
ménages les plus riches diminuerait de 0,6 % en moyenne dans le cas
anglais alors que la PPE n'a pas d'effet sur le revenu de ce décile.
L'ensemble des réformes engagées par le gouvernement travailliste
au Royaume-Uni devrait entraîner un fort recul de la pauvreté chez
les enfants avec une diminution de 22,5 % du
poverty gap
(écart moyen au seuil de pauvreté du revenu du ménage
auquel l'enfant appartient), dont 4,7 % imputables au WFTC (Piachaud et
Sutherland, 2000). Les ménages avec enfants seraient majoritairement
gagnants (et principalement les couples inactifs initialement). Les familles
profitant le moins des réformes seraient celles où les deux
conjoints travaillent.
Au contraire, la mise en place de la PPE et la refonte de l'aide au logement
n'ont pas eu d'effets sensibles sur la pauvreté monétaire
(Legendre
et al.
, 2001). Les trois réformes et plus
particulièrement la PPE ont accru l'écart entre actifs et
inactifs. : avec une réduction de la pauvreté dans le
premier groupe plus importante (Lhommeau
et al.
, 2001). Le montant de la
prime est croissant avec le nombre d'heures travaillées pour des
rémunérations horaires inférieures au SMIC, puis
au-delà elle décroît à mesure que le temps de
travail augmente. Ce principe implique une certaine ambiguïté quant
à la cible visée. D'une part elle est défavorable aux
travailleurs à temps partiel subi. Or, ceux-ci constituent l'essentiel
des travailleurs pauvres. Mais d'autre part elle favorise les travailleurs
ayant une rémunération horaire faible et donc devrait
malgré tout cibler une partie de cette catégorie
d'individus
100
(
*
)
.
Quoiqu'il en soit, l'introduction de la PPE a permis de réduire le taux
moyen des prélèvements nets sur les individus les plus modestes
appartenant à un ménage mono-actif qui ne pouvaient profiter des
baisses d'impôts car ils étaient non imposables
101
(
*
)
.
Selon Lhommeau
et
al.
(2001), le taux de prélèvement net de
prestations sociales du premier décile a été réduit
de 2,4 points. Cette baisse est due pour 1,1 point à la PPE et pour le
reste à la réforme de l'allocation logement. Legendre
et
al.
(2001) concluent qu'un durcissement de la condition
d'éligibilité du ménage à la PPE permettrait de
réorienter la prime vers les premiers déciles et d'accentuer son
effet redistributif en faveur des ménages les plus pauvres. Mais ils
soulignent que cette mesure pourrait avoir un effet discriminatoire selon le
type de ménage (couple marié, concubin) et qu'elle favoriserait
le temps partiel pour le travailleur secondaire au sein d'un couple
marié. En outre les simulations ne tiennent pas compte des
réactions comportementales, or les désincitations à
l'offre de travail sont d'autant plus fortes que l'effet de seuil l'est.
L'arbitrage protection-incitation reste au coeur du débat.
Conclusion
Les Etats membres de la Communauté européenne ont amorcé
un processus d'allègement de la charge fiscale pesant sur le travail,
accusée de pénaliser l'activité des travailleurs non
qualifiés. Les réformes ont principalement porté sur le
côté fiscal et assez peu du côté du système
social (Carone et Salomaki, 2001). Les mesures n'ont le plus souvent pas tenu
compte de l'interaction entre les deux sphères. Elles auraient sans
doute nécessité une approche plus globale du système
redistributif. La France fait exception, elle s'est en effet engagée
dans une voie qui consiste à considérer les influences du
système fiscalo-social dans sa globalité et les réformes
ont permis de rétablir les incitations financière à
prendre un emploi.
Les nouvelles propositions du gouvernement britannique prévoit un
élargissement de l'utilisation du système fiscal dans un but de
protection sociale. La réforme annoncée pour 2003 élargit
sensiblement la population visée par les crédits
d'impôt : ils devraient être perçus non seulement par
les familles avec enfants (avec ou sans revenu d'activité), mais
également par les actifs sans enfant.
Les effets sur l'offre de travail des travailleurs peu qualifiés restent
incertains. Les quelques évaluations réalisées dans le cas
du Royaume-Uni ne sont pas très encourageantes. Par ailleurs l'exemple
des Etats-Unis montre que, s'il y a un effet global positif sur l'offre de
travail, il ne faut pas s'attendre à une modification majeure des
comportements. Par contre, la PPE semble ne pas avoir d'effets significatifs
positifs sur l'offre de travail et les élargissements prévus pour
2003 ne devraient pas modifier sensiblement ce résultat. En effet, le
marché du travail français s'avère inadapté pour ce
type de mesures qui ne permet pas de stimuler l'emploi en présence d'un
salaire minimum élevé relativement à celui qui
prévaut sur le marché du travail anglo-saxon. Il n'est donc pas
souhaitable de calquer les mesures prises dans des pays anglo-saxons pour les
appliquer à des pays où les situations institutionnelles et
conjoncturelles diffèrent.
En conclusion, en ce qui concerne les incitations au travail des personnes peu
qualifiées, ce n'est pas tant la fiscalité qui est en cause que
les mécanismes d'attribution des transferts sociaux. Il serait donc plus
adapté de modifier le dispositif social de façon à
aménager les sorties du RMI vers l'activité. Diverses
propositions ont été faites dans cette optique. Par exemple,
l'Allocation compensatrice de revenu (ACR) proposée par Godino
(1999) permettrait de lisser les effets de seuil défavorables à
l'emploi. En outre, le mécanisme de l'ACR serait nettement plus
redistributif que la PPE en faveur des ménages à faible niveau de
vie (CERC, 2001). Par ailleurs, s'agissant de stimuler l'emploi des personnes
peu qualifiées, il semble que ce segment du marché du travail
souffre davantage d'un problème de demande de travail que d'un
problème d'offre. Or, pour éradiquer le chômage
involontaire, les mesures fiscales du type « allègements de
charges sociales » pour les emplois peu qualifiés ont fait
leurs preuves (Charpail
et al.
, 1999). Ces mesures sont non seulement
efficaces du point de vue de l'emploi mais également peu coûteuses
pour les finances publiques (Cahuc, 2002). C'est dans ce sens que le
système fiscal français devrait être utilisé pour
améliorer l'emploi des personnes peu qualifiées.
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Modèles de microsimulation et
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cours
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Annexe 1 : Taux de chômage, d'emploi et d'activité selon le
niveau de qualification en Europe
Tableau 1 : Évolution des taux de chômage en Europe (en % de la population active civile)
|
1977 |
1980 |
1985 |
1990 |
1995 |
2000 |
Allemagne |
3,9 |
3,2 |
7,3 |
4,8 |
8,2 |
8,1 |
Autriche |
1,6 |
1,9 |
3,6 |
3,2 |
3,7 |
3,6 |
Belgique |
6,8 |
8,1 |
12,6 |
8,9 |
13,0 |
10,0 |
Danemark |
7,4 |
6,9 |
7,3 |
8,4 |
7,1 |
4,6 |
Espagne |
5,2 |
11,5 |
21,7 |
16,3 |
22,9 |
14,1 |
Finlande |
5,9 |
4,7 |
5,0 |
3,2 |
15,4 |
9,8 |
France |
5,2 |
6,5 |
10,5 |
9,1 |
11,8 |
9,9 |
Grèce |
1,7 |
2,8 |
7,8 |
7,0 |
10,0 |
11,1 |
Irlande |
8,8 |
7,4 |
16,7 |
13,0 |
12,2 |
4,3 |
Italie |
7,2 |
7,7 |
10,4 |
11,5 |
11,7 |
10,7 |
Luxembourg |
0,5 |
0,7 |
1,6 |
1,1 |
2,3 |
1,9 |
Pays-Bas |
5,5 |
6,2 |
11,1 |
7,6 |
7,1 |
3,0 |
Portugal |
7,5 |
7,8 |
8,7 |
4,6 |
7,2 |
4,0 |
Royaume-Uni |
5,2 |
5,7 |
11,3 |
6,9 |
8,7 |
5,5 |
Suède |
2,0 |
2,2 |
3,1 |
1,8 |
9,2 |
5,9* |
EU 15 |
5,2 |
6,1 |
10,5 |
8,2 |
10,8 |
8,4 |
Etats-Unis |
7,1 |
7,1 |
7,2 |
5,6 |
5,6 |
4,0 |
Source : OCDE, (2001), Statistiques de la population active 1980-2000. :* 1999
Tableau 2 : Taux de chômage selon le niveau de
qualification pour les personnes âgées de 25 à 64 ans,
en 1999 en %
|
Niveau
inférieur au 2
e
cycle
|
2
e
cycle
|
Enseignement supérieur |
Allemagne |
15,8 |
8,8 |
4,9 |
Autriche 1 |
6,9 |
3,6 |
2,0 |
Belgique |
12,0 |
6,6 |
3,1 |
Danemark |
7,0 |
4,1 |
3,0 |
Espagne |
14,7 |
12,7 |
11,1 |
Finlande |
13,1 |
9,5 |
4,7 |
France |
15,3 |
9,2 |
6,2 |
Grèce |
8,5 |
10,9 |
7,5 |
Irlande |
11,6 |
4,5 |
3,0 |
Italie |
10,6 |
8,0 |
6,9 |
Luxembourg |
3,7 |
1,1 |
1,0 |
Pays-Bas |
4,9 |
2,4 |
1,7 |
Portugal |
4,2 |
5,1 |
2,5 |
Royaume-Uni |
10,0 |
4,7 |
2,7 |
Suède (1999) |
9,0 |
6,5 |
3,9 |
EU 15 |
11,5 |
7,2 |
5,1 |
Etats-Unis |
7,7 |
3,7 |
2,1 |
1. Les
données se réfèrent à l'année 1998.
Lecture du tableau : en France, en 1999, 15,3 % des personnes en
âge de travailler ayant de faibles qualifications sont au chômage,
contre 6,2 % pour les personnes les plus qualifiées.
Source : OCDE, Regards sur l'éducation-Les indicateurs de l'OCDE,
2001.
Tableau 3 : Taux d'activité selon le niveau de
qualification pour les personnes âgées de 25 à 64 ans,
en 1999 en %
|
Niveau inférieur au 2 e cycle de l'enseignement secondaire |
2 e cycle de l'enseignement secondaire |
Enseignement supérieur |
Allemagne |
58,0 |
76,6 |
87,4 |
Autriche * |
56,6 |
78,1 |
88,1 |
Belgique |
55,8 |
79,8 |
88,1 |
Danemark |
66,3 |
84,2 |
90,6 |
Espagne |
59,8 |
79,9 |
87,2 |
Finlande |
67,4 |
82,2 |
88,9 |
France |
66,6 |
82,8 |
87,2 |
Grèce |
60,0 |
72,8 |
87,3 |
Irlande |
60,4 |
75,1 |
87,9 |
Italie |
53,3 |
76,1 |
86,7 |
Luxembourg |
56,6 |
73,9 |
85,9 |
Pays-Bas |
59,7 |
80,2 |
88,7 |
Portugal |
79,3 |
86,4 |
93,0 |
Royaume-Uni |
58,4 |
82,9 |
90,1 |
Suède (1999) |
73,1 |
85,1 |
89,0 |
EU 15 |
69,5 |
83,2 |
91,0 |
Etats-Unis |
62,7 |
79,2 |
86,4 |
1. Les
données se réfèrent à l'année 1998.
Lecture du tableau : en France, en 1999, 66,6 % des personnes ayant
de faibles qualifications sont actives (soit elles ont un emploi, soit elles
sont au chômage, soit elles sont en formation), contre 87,2 % pour
les personnes les plus qualifiées.
Source : OCDE, Regards sur l'éducation-Les indicateurs de l'OCDE,
2001.
Tableau 4 : Taux d'emploi selon le niveau de qualification pour les personnes âgées de 25 à 64 ans, en 1999 en %
|
Niveau
inférieur au 2
e
cycle
|
2
e
cycle
|
Enseignement supérieur |
Allemagne |
48,9 |
69,9 |
83,1 |
Autriche * |
52,6 |
75,3 |
86,4 |
Belgique |
49,1 |
74,5 |
85,4 |
Danemark |
61,7 |
80,7 |
87,9 |
Espagne |
51,0 |
69,6 |
77,6 |
Finlande |
58,6 |
74,3 |
84,7 |
France |
56,4 |
75,1 |
81,8 |
Grèce |
54,8 |
64,9 |
80,7 |
Irlande |
53,4 |
71,7 |
85,2 |
Italie |
47,7 |
70,0 |
80,7 |
Luxembourg |
54,5 |
73,0 |
85,0 |
Pays-Bas |
56,8 |
78,3 |
87,2 |
Portugal |
75,9 |
82,0 |
90,7 |
Royaume-Uni |
52,6 |
78,9 |
87,7 |
Suède (1999) |
66,5 |
79,6 |
85,6 |
EU 15 |
54,0 |
73,9 |
83,6 |
Etats-Unis |
57,8 |
76,2 |
84,6 |
1. Les
données se réfèrent à l'année 1998.
Lecture du tableau : en France, en 1999, 56,4 % des personnes ayant
de faibles qualifications ont un emploi contre 81,8 % pour les personnes
les plus qualifiées.
Source : OCDE, Regards sur l'éducation-Les indicateurs de l'OCDE,
2001.
Annexe 2 : Les réformes récentes des systèmes
redistributifs en Europe
Tableau 1 : Les mesures fiscales d'incitation au travail des personnes non qualifiés
Allemagne |
Réduction générale des impôts sur le
revenu : taux marginal minimum ramené de 22,5 % (2000)
à 15 % (2005).
|
Autriche |
Réduction des taux d'imposition des bas et des moyens revenus.
|
Belgique |
Introduction d'un crédit d'impôt remboursable pour les
travailleurs faiblement rémunérés.
|
Danemark |
Réduction graduelle des taux marginaux d'imposition pour les
bas et moyens revenus (1999-2002).
|
Espagne |
Réduction du taux marginal d'imposition minimal de 2 points.
|
Finlande |
Réduction cumulative pour 2000-2001 pour toutes les tranches
mais les revenus les plus faibles ont été spécialement
visés par la suppression de la tranche d'imposition la plus faible.
|
France |
Réforme de l'impôt sur le revenu de 2001 à 2003
avec des réductions d'imposition ciblées sur les revenus (au
total la réduction générale de l'IRPP
s'élève à 0,5 % du PIB soit 22 milliards de F en
2001).
|
Grèce |
Augmentation des abattements, majoration des crédits d'impôts pour enfants, suppression des critères forfaitaires. |
Irlande |
Baisse du
taux de base de 24 % en 1999/00 à 22 % en 2000/01.
|
Italie |
Réduction des taux de base de l'IR de 19 % en 1999
à 18 % en 2002.
|
Luxembourg |
Majoration
du revenu minimum imposable qui a été augmenté de
130,8 % entre 1990 et 2002.
|
Pays-Bas |
Introduction d'un système de 3
« boîtes » de revenus regroupant des types de revenus
qui sont soumis au même type d'imposition. La boîte 1 regroupe les
revenus du travail et la valeur locative d'un logement en
propriété et se voit appliquer un barème progressif.
|
Portugal |
Conversion
des abattements en crédits d'impôts (depuis 1999).
|
Royaume-Uni |
Remplacement du programme
Family Credit
par le programme plus
généreux
Working Families tax Credit
(2000).
|
Suède |
Réduction des taux applicables aux bas et moyens revenus.
|
Source : Carone et Salomäki (2001).
Tableau 2 : Les mesures sociales d'incitation au travail des personnes non qualifiées
|
Prestations de chômage : niveau des prestations, durée, droit aux prestations et exigences de disponibilité à l'embauche |
Régimes sous condition de ressources : allocations de logement, assistance sociale, allocations familiales |
Prestations subordonnées à un emploi |
Allemagne |
Les chômeurs peuvent bénéficier de mesures actives (emplois subventionnés) après 6 mois (et non plus 12 mois) depuis 1999. |
Application plus sévère des conditions de ressources au travail partiel dans le système de sécurité sociale (1998) |
-- |
Autriche |
Déduction d'une partie seulement du revenu du travail temporaire des prestations chômage (1998) |
-- |
-- |
Belgique |
Adaptation des règles relatives aux prestations de chômage afin de tenir compte des nouvelles dispositions concernant le chômage temporaire et le travail volontaire. |
-- |
Introduction d'un seuil d'aide au revenu pour les personnes ayant un
emploi dans le cadre d'un régime de réinsertion professionnelle
(1998).
|
Danemark |
Réduction de 5 à 4 ans de la durée de
prestations chômage (1999).
|
Resserrement des règles relatives au droit au
« minimum garanti » (assistance sociale) pour les jeunes de
moins de 25 ans.
|
|
Espagne |
-- |
-- |
-- |
Finlande |
Majoration des prestations de chômage partiel pour favoriser
l'emploi à temps partiel (1997).
|
Modification du régime d'assistance sociale visant à abaisser le plancher de salaire (1998) |
-- |
France (2000) |
-- |
Extension du mécanisme d'intéressement qui permet de
cumuler des revenus d'activité avec l'allocation RMI pendant les 12
1
er
mois de l'emploi (1998).
|
-- |
Grèce |
Aide aux jeunes chômeurs de plus de 20 ans pour les encourager à suivre une formation et à rechercher un emploi dans le cadre d'un programme d'une durée limitée (1998-2000). |
-- |
-- |
Irlande |
-- |
Conservation du supplément pour loyer et prêt hypothécaire pour les bénéficiaires du Community Employment Scheme et du Revenu job Assist (1999) |
Amélioration du régime de réinsertion professionnelle (indemnités de transport, primes au commencement d'une formation, 1999) |
Italie |
-- |
-- |
-- |
Luxembourg |
-- |
-- |
-- |
Pays-Bas |
-- |
Mise en place d'un programme permettant l'amélioration de la prise en charge des enfants (1999). |
-- |
Portugal |
Création d'une allocation chômage partiel pour promouvoir le travail à temps partiel (1999). |
Système d'offre d'emplois aux bénéficiaires du revenu minimum garanti ; suppression de l'aide en cas de refus |
-- |
Suède |
Renforcement des exigences de mobilité d'emploi et de mobilité géographique dans le cadre de l'assurance chômage (2000) |
-- |
-- |
Royaume-Uni |
Introduction d'un entretien obligatoire avec un conseiller en emploi pour pouvoir bénéficier des prestations (ONE, 1999) |
Introduction d'un salaire minimum national pour soutenir la
stratégie visant à rendre le travail financièrement plus
attrayant (1999).
|
Liaison plus étroite entre le bénéfice des prestations et la participation à des initiatives du New Deal pour les jeunes chômeurs (18 à 24 ans), les handicapés, les parents isolés et les conjoints de chômeurs. |
Source : Rapport conjoint sur l'emploi 2000, MISSOC INFO
Evolution de la protection sociale dans les Etats membres de l'Union
européenne, Plans d'action nationaux pour l'emploi 1998, 1999 et 2000.
Annexe 3 : Systèmes d'impôt sur le revenu en Europe
Tableau 1 : Description du bas du barème d'imposition
sur le revenu dans les pays européens
(pour un
célibataire sans enfant)
|
Seuil
d'exonération en €
|
Taux
marginal
|
Commentaires |
||
|
1999 |
2001/2002 |
1999 |
2001/2002 |
|
Allemagne |
6 681 € (21,47 %) |
7 236 € |
Formule
1
ère
tranche imposable
:179,13*Revenu
|
Formule
1
ère
tranche imposable
:768,85*Revenu
|
Système d'abattements et de crédits d'impôt en
fonction de la situation familiale (pas d'abattement personnel de base)
|
Autriche |
3 634 € (16,07 %) |
8 721 € |
10 % |
0 % * |
Système d'abattements et de crédits d'impôt
remboursables (pas d'abattement personnel de base)
|
Belgique |
6 321 € (22,39 %) |
5 280 € |
25 % |
25 % |
Système de quotient familial, l'exonération
dépend de la situation familiale.
|
Danemark |
4 345 € (11,78 %) |
4 493 € |
7,5 % |
6,25 % |
Diverses
déductions fiscales (cotisations retraite, frais professionnels...).
|
Espagne |
3 606 € (24,82 %) |
3 678 € |
15 % ** |
15 % |
Système d'abattements et de crédits d'impôt lié à la situation familiale (abattement personnel de bas e de 3 306 €). L'imposition est séparée mais avec une possibilité de déclaration conjointe pour les couples mariés. Environ 3 % sont prélevé en plus des 15 % pour la 1 ère tranche par les collectivités locales. |
Finlande |
7 905 € (32,1 %) |
8 006 € |
5,5 % |
5 % |
Divers abattements et crédits d'impôt en fonction du type de revenu. Imposition séparée. Imposition nationale et municipale. |
France |
3 998 € (19,25 %) |
4 121 € |
10,5 % |
7,5 % |
Système du quotient familial et divers abattements, PPE.
|
Grèce |
5 576 € (55,8 %) |
nd |
5 % |
nd |
Système d'abattements et de crédits d'impôt en fonction de la situation familiale. Les cotisations sociales sont déduites du revenu imposable. Imposition séparée. |
Irlande |
0 à 17 776 € (86,4 %) |
0 à 25 395 € |
24 % |
20 % |
Système complet de crédits d'impôts divers et d'abattements (abattement de base de 5 333 €). Déclaration conjointe avec possibilité de déclaration séparée si le montant d'imposition est le même que sous l'imposition jointe. |
Italie |
0 à 7 750 € (38,55 %) |
0 à 10 329 € |
18,5 % |
18 % |
Système de crédits d'impôt et d'abattement en fonction de la situation familiale. Imposition séparée. |
Luxembourg |
8522 € (23,79 %) |
nd |
6 % |
nd |
Système d'abattements et de crédits d'impôt. Barème à 18 tranches. Imposition conjointe. |
Pays-Bas (2002) |
6 806 € (29,13 %) |
14 363 € |
6,2 % |
3 % |
Réforme fiscal de fond en 2001 : adoption d'un système de « 3 boîtes » de revenus et d'un système complet de crédits d'impôt non remboursable (crédit de base de 1 576 €). Imposition séparée. |
Portugal |
0 à 3 492 € (47,96 %) |
nd |
14 % |
nd |
Système d'abattements et de crédits d'impôt. (abattement forfaitaire de 2 604 €). Les cotisations sociales sont déductibles au-delà d'un montant de 2 642 €). L'unité d'imposition est le revenu de la famille. |
Royaume-Uni |
0 à 2 431 € (11,85 %) |
0 à 3 050 € |
10 % |
10 % |
Système d'abattements et de crédits d'impôt
remboursables.
|
Suède (1999) |
24 125 (99,3 %) |
24 158 € |
0 |
22 € 3 |
Système d'abattements et de crédits d'impôt divers indépendant de la situation familiale. Déduction de base qui va de 958 € à 1 994 €. Imposition séparée. |
1. Le
taux de la tranche suivante est passé de 22 % à 21 %.
2. Le montant d'impôt pour le niveau de revenu imposable de la
1
ère
tranche est de 90 000 pesetas (541 €) puis
au-delà de cette limite et dans cette tranche le revenu est
imposé à 15 %. On note qu'en 1998, le taux était de
17 %.
3. Dans cette tranche de revenu, l'impôt est forfaitaire, puis pour tout
revenu au-delà de ce seuil, le contribuable paie en plus (20 % pour
1999) 25 % de son revenu imposable. Par ailleurs il ne s'agit ici que de
l'impôt national, il existe un impôt municipal sur le revenu qui
varie de 26 % à 35 %.
Sources 1999 : OCDE, Taxing wages, 1999-2000.
Sources 2002 :
http://europa.eu.int/comm/ta
xation_customs/taxation/taxat
ionlinks.htm
(Sites web des différents
ministères des finances).
Annexe 4 : Caractéristiques générales des
crédits d'impôt
Tableau 1 : Caractéristiques générales des crédits d'impôt mis en place dans les dernières réformes fiscales de quelques pays européens
Oui |
Familiale |
Octobre 1999 |
Parents isolés et couples avec enfant |
Crédit de base par famille:85,06 € par semaine ;
|
55 % à partir de 146,43 € par semaine |
5 milliards de £ soit 8,11 milliards d'€ |
1 269 000 (au 31 mai 2001) |
82,21 £ par semaine soit 134,81€ soit environ 6 470 € par an. |
Oui : 16 heures avec une prime pour plus de 30 heures |
|
Belgique :
|
Oui |
Individuelle |
2000 |
Toute personne dont les revenus d'activité sont positifs mais limités |
619,73 par an |
3718,4
à 12 394,68
|
27 milliards de BEF soit 669,31 millions d'€ pour l'année 2001 |
1 430 000 individus dont : 867 000 pour l'intégralité du crédit et 233 000 ayant droit à un rembourse-ment d'impôt |
471 € par an |
oui |
Pays Bas : |
Non |
Individuelle |
2001 |
Un crédit d'impôt est offert pour contribuable employé ( Employment Rebate ) |
Le montant max : 920 € pour le niveau du salaire minimum. |
Il n'est pas dégressif pour des niveaux de salaire supérieurs au seuil du sal min. |
816 millions de florins soit environ 370 millions d'€ (coût estimé) |
|
|
|
Source
France : Ministère des Finances.
Source Belgique : Reynders (2000).
Source Royaume-Uni : Chambaz et Lequet-Slama (2000), Brewer, Clark et Myck
(2001).
Source Pays-Bas : Ministry of Finance (2001).
Annexe
5 : Description des crédits d'impôt au Royaume-Uni, en
France, en Belgique et aux Pays-Bas
A. Royaume-Uni : du WFTC au
Working Tax Credit
1. Fonctionnement général
L'objectif du WFTC est de rétablir les incitations à prendre un emploi et ainsi réduire les trappes à inactivité et à pauvreté, en particulier en allégeant le coût de la garde des jeunes enfants. Il s'agit d'offrir un crédit d'impôt aux familles avec enfants (avec une condition sur l'âge) ayant de faibles ressources et comprenant au moins un actif travaillant au minimum 16 heures par semaine. Au final, cette mesure devrait permettre de redistribuer 5 milliards de livres à environ 1,5 million de familles.
Tableau 1 : Montants du WFTC en 1999-2000
|
WFTC par semaine |
Crédit de base par famille |
59 £ soit 95,58 € |
Crédit pour les enfants :
|
26 £
soit
42,12 €
|
Crédit supplémentaire 1 |
11,45 £ soit 18,55 € |
Taux de retrait au-delà du seuil |
55 % au-delà de 91,45 £ soit 146,43 € |
Crédit supplémentaire Adulte invalide |
16 £ soit 25,94 € |
Crédit supplémentaire pour enfant handicapé |
30 £ soit 48,63 € |
Crédit supplémentaire pour enfant
|
41,05 £ soit 66,55€ |
Allocation pour garde d'enfant 2 |
70 % des frais de garde d'enfants sont pris en charge dans la limite de 135 £ ( 218,69 € ) pour un enfant et 200 £ ( 323,99 € ) pour deux enfants et plus |
1.
Lorsque le travailleur principal travaille plus de 30 heures par semaine.
2. Seuls les parents isolés travaillant au moins 16 heures par semaine
sont éligibles à ce supplément ou les couples dans lequel
les deux travaillent au moins 16 heures par semaine (à moins que
l'inactif ne soit bénéficiaire d'une pension d'invalidité).
Source :
http://www.inlandrevenue.gov.uk/wftc/howmuch.htm
Le WFTC est versé pour une période de 6 mois et ouvre droit
à d'autres prestations en nature dans les domaines de l'éducation
et de la santé.
2. Mode de versement
Le WFTC
est versé sur une base familiale contrairement à l'impôt
sur le revenu, calculé sur une base individuelle. Ce principe se
justifie en termes d'équité entre les ménages, et de
coût budgétaire ainsi que la volonté d'exclure du
dispositif les jeunes adultes vivant encore chez leurs parents. Le travailleur
perçoit le crédit sur sa paie
105
(
*
)
(si le couple est bi-actif, il choisit lequel des
deux travailleurs va percevoir le crédit).
L'administration fiscale examine les conditions d'éligibilité du
ménage et calcule les droits associés, puis l'employeur verse
directement au salarié le crédit d'impôt auquel il a droit
soit sous forme d'un complément de rémunération, soit sous
forme d'un allègement des prélèvements fiscaux qu'il doit
effectuer.
Graphique 1 : Montant du WFTC en euros
Source : Institue for fiscal Studies, Inland Revenue.
Cette
double gestion comporte plusieurs risques. D'une part, les employeurs peuvent
exercer une pression à la baisse des salaires, mais ceci est
atténué par la mise en place d'un salaire minimum en 1999.
D'autre part, il existe une possibilité de collusion entre l'employeur
et l'employé concernant la fixation des horaires en fonction du nombre
minimal requis pour être éligible (16 ou 30 heures). Enfin le
problème de la confidentialité de la situation familiale de
l'employé est soulevé par ce mode de gestion.
Le WFTC offre un avantage en termes de ciblage relativement aux transferts
sociaux traditionnels, notamment le
Family Credit
qu'il a
entièrement remplacé. En effet, certaines prestations souffrent
d'un taux de recours
106
(
*
)
faible ce qui implique qu'une partie importante de
la population visée par le transfert ne le perçoive pas. Le
dispositif devient
de facto
moins efficace en termes de redistribution.
Les raisons du « non-recours » sont multiples : effets
stigmatisants associés à la perception du transfert, mauvaise
compréhension par les individus éligibles, manque
d'information... Le
Family Credit
engendrait d'un taux de recours
très faible contrairement au WFTC, certainement jugé moins
stigmatisant par les bénéficiaires potentiels.
3. Population concernée
En février 2000, 1 026 000 personnes étaient bénéficiaires du WFTC ou du FC (allocataires résiduels). 2 millions d'enfants appartenaient à des ménages bénéficiant de la nouvelle mesure et 43 % d'entre eux étaient dans des familles monoparentales. 51 % des allocataires du WFTC sont des parents isolés et presque exclusivement des femmes (seulement 2 % sont des hommes). Les 49 % autres sont des couples et dans 79 % des cas l'homme est le travailleur principal. Plus d'une famille sur 10 allocataires du WFTC perçoit une aide à la garde d'enfant ; dans 90 % des cas ce sont des familles monoparentales. Le WFTC a permis d'augmenter les transferts liés à la garde des enfants.
4. Vers une extension du WFTC aux ménages sans enfant
Les nouvelles propositions du gouvernement britannique reposent sur un élargissement de l'utilisation du système fiscal dans un but de protection sociale. Une nouvelle réforme du système fiscalo-social anglais est prévue pour 2003, elle remplacera le WFTC par deux types de crédits :
-
Un crédit d'impôt intégré pour les enfants et
un crédit d'impôt pour l'emploi.
Un crédit d'impôt pour les retraités (voir chapitre 3.3).
B. La Prime
pour l'emploi en France
1. Fonctionnement général
Afin
d'inciter le retour à l'emploi et le maintien de l'activité, le
gouvernement français a mis en place une Prime pour l'emploi applicable
à l'automne 2001. Elle est destinée à compenser une partie
des prélèvements sociaux et des charges fiscales qui
pèsent sur les revenus d'activité permettant ainsi
d'améliorer la rémunération du travail. Elle concerne les
personnes ayant une activité salariée ou non salariée et
ayant des revenus modestes. Elle est individuelle dans le sens où chaque
travailleur du foyer peut y prétendre mais elle repose sur une condition
de ressources qui englobe l'ensemble des revenus du foyer fiscal.
Trois conditions sont requises pour en bénéficier :
-
l'un des membres du foyer fiscal doit exercer une activité
professionnelle ;
Le revenu fiscal du foyer doit être inférieur à un certain seuil soit 76 000 francs (11 772 euros soit environ 1 SMIC) par an pour les personnes isolées, et 152 000 francs (23 544 euros soit plus de 2 SMIC) pour les couples déclarés. Ces seuils sont majorés de 21 000 francs pour chaque demi-part supplémentaire ;
le montant des revenus d'activité de chaque bénéficiaire potentiel doit être supérieur à 20 575 francs (3 187 euros soit environ 0,3 SMIC) par an et inférieur à 96 016 francs (14 872 euros soit un peu moins d'1,5 SMIC) pour les personnes isolées et les couples bi-actifs et 146 257 francs (22 654 euros soit environ 2 SMIC) pour les couples mono-actifs et les célibataires avec enfants à charge.
2. Mode de versement
Pour les
personnes imposables, la PPE vient automatiquement en déduction de
l'impôt sur le revenu du foyer fiscal. Si le montant de l'impôt sur
le revenu du foyer est inférieur à celui de la prime, la
différence est restituée par chèque du trésor
public. Pour les personnes non imposables, l'intégralité de la
PPE est versée par chèque du TP.
Le montant de la PPE est maximal pour un actif au SMIC, elle est de 1 500
francs
(544 euros)
. Elle est majorée de 500 francs pour les
couples mono-actif et de 200 francs
(31 euros)
par personne à
charge. Son montant minimal est de 160 francs
(19 euros)
par foyer
bénéficiaire. Son montant moyen est de 946 francs soit 144 euros
par foyer bénéficiaire. En 2001, 8 milliards de francs, soit 1,22
milliard d'€ de pouvoir d'achat auront été distribués
au titre de la PPE. Son montant est doublé en 2002.
Si l'ensemble des conditions d'éligibilité est réuni, le
calcul de la PPE revenant au foyer fiscal comporte deux étapes :
d'une part le calcul de la prime pour chaque membre du foyer et d'autre part le
calcul de la prime pour l'ensemble du foyer.
Tableau 2. Calcul de la prime pour chaque membre du foyer
Le tableau tient compte des modifications (doublement de la PPE)
instaurée par la législation de 2002 :
Situation familiale |
Niveau du revenu d'activité |
Formule
de calcul de la PPE
|
Célibataires, veufs, divorcés (à temps partiel) |
3 187 € < R< 10 623 € |
R * 4,4 % |
Mariés bi-actifs ou personnes à charge du foyer exerçant une activité professionnelle au moins rémunérée 20 575 F |
10 623 € < R < 14 872 € |
(14 872 - R) * 11 % |
Mariés mono-actifs |
3 187 € < R< 10 623 € |
(R * 4,4 %) + 76,22 € |
10 623 € < R < 14 872 € |
[(14 872 - R) * 11 %]+76,22 € |
|
14 872 € < R < 20 911 € |
76,22 € |
|
20 911 € < R < 22 654 € |
(22 654 - R) * 11 % |
|
Célibataires, veufs, divorcés à temps plein |
3 187 € < R< 10 623 € |
(R * 4,4 %) |
10 623 € < R < 14 872 € |
(14 872 - R) * 11 % |
|
14 872 € < R < 22 654 € |
0 * |
1.
Même si la PPE est nulle dans ce cas, le foyer peut néanmoins
bénéficier de la majoration forfaitaire de 62 €.
Source :
http://www.impots.gouv.fr/documentation/reglementaire/ldf2002/ir/ir2.htm#4
.
Tableau 3. Calcul de la prime pour l'ensemble du foyer
Célibataire, veuf, divorcé, marié bi-actif |
Avec 1 personne à charge |
Avec 2 personnes à charge |
Avec 3 personnes à charge |
3 187 € < R< 14 872 € |
Majoration :31 € |
Majoration :62 € |
Majoration :93 € |
Marié mono-actif |
Avec 1 personne à charge |
Avec 2 personnes à charge |
Avec 3 personnes à charge |
3 187 € < R< 14 872 € |
Majoration :31 € |
Majoration : 62 € |
Majoration :93 € |
14 872 € < R < 22 654 € |
Majoration forfaitaire de 31 € |
Majoration forfaitaire de 31 € |
Majoration forfaitaire de 31 € |
Célibataire, veuf, divorcé (temps plein) |
Avec 1 personne à charge |
Avec 2 personnes à charge |
Avec 3 personnes à charge |
3 187 € < R< 14 872 € |
Majoration :62 € |
Majoration : 62 + 31 =186 € |
Majoration : 62 + 31 +31 =124 € |
14 872 € < R < 22 654 € |
Majoration forfaitaire de 62 € |
Majoration forfaitaire de 62 € |
Majoration forfaitaire de 62 € |
Source : http://www.impots.gouv.fr/documentation/reglementaire/ldf2002/ir/ir2.htm#4 .
Graphique 2 : Structure de la PPE en euros
Source :
http://www.impots.gouv.fr/documentation/reglementaire/ldf2002/ir/ir2.htm#4
.
3. Population concernée
Selon la Direction générale des impôts, 25,4 % des foyers fiscaux bénéficient de la PPE en 2001 (législation 2001) soit plus de 8 millions de foyers fiscaux. La proportion de foyers fiscaux imposables bénéficiaires est d'un tiers environ.
C. Le
crédit d'impôt en Belgique
1. Fonctionnement général
Le
gouvernement belge a adopté en 2001 un crédit d'impôt
remboursable destiné revaloriser le salaire des travailleurs à
bas revenus. Le crédit d'impôt est ciblé sur les
travailleurs dont le revenu est proche du salaire minimum afin de rendre leur
travail plus rémunérateur.
Toutes personnes dont les revenus d'activité se situent entre
150 000 francs belges (2 000 euros) et 500 000 francs belges (13 000
euros) bénéficient d'une réduction d'impôt
forfaitaire de 25 000 francs belges (500 euros).
2. Mode de versement
Il
s'agit d'un crédit remboursable donc pour toute personne dont le montant
d'impôt est déjà nul ou est inférieur à 25
000 francs belges (2 000 euros), le solde de crédit se transforme en
complément de revenu.
Le montant du crédit (CR) dépend du niveau des revenus
d'activité R selon le barème :
Pour R < 3 260 € alors CR = 78 € * [(R - 3 260)/4 350 -3 260)]
Pour 3 260 € < R < 4 350 € alors CR= 78 €
Pour 4 350 € < R < 10 880 € alors CR = 78 € * [(14 140 -
R)/14 440 - 10 880)]
Pour R > 14 140 € alors CR = 0 €
En pratique le taux moyen d'imposition est négatif pour les bas revenus
(par exemple un travailleur qui gagne 150 000 francs belges de revenu net
imposable (3 000 euros) bénéficie d'une pression fiscale
négative de - 16,7 %.
Un isolé actif travaillant à mi-temps au SMIC voit son revenu
augmenter de 18 % dont la plus grande partie est due au crédit
d'impôt. S'il travaille à ¾ temps son revenu augmente de
14 %, il ne paie pratiquement plus d'impôt. S'il travaille à
plein temps, son revenu augmente de 12 % il paie moins d'impôt
(Reynders, 2000).
Pour un couple marié, le crédit d'impôt offre les
mêmes avantages que les personnes isolées. Pour un couple
bi-actif, les effets seront les mêmes que ceux donnés
précédemment. Pour un couple mono-actif, l'alignement de la
tranche exonérée des isolés et des conjoints
entraîne une forte réduction d'impôt qui s'ajoute au
crédit d'impôt. Tout travailleur rémunéré au
SMIC dont le conjoint ne perçoit pas de revenu professionnel et qui a au
moins un enfant à charge ne paie pas d'impôt et reçoit un
complément de revenu de 25 000 francs belges (500 euros) qu'il travaille
à temps partiel ou à temps plein. Puis au fur et à mesure
que le revenu augmente le crédit diminue pour devenir nul pour un
montant de revenu de 14 140 euros.
3. Population concernée
Le crédit bénéficie largement aux jeunes et aux femmes. 50 % des jeunes âgés de 20 à 25 ans, (période correspondant à leur entrée sur le marché du travail), bénéficient du crédit d'impôt. Cette proportion tombe à 16 % pour les personnes âgées de 40 à 65 ans. Les femmes étant beaucoup plus nombreuses à exercer un temps partiel et ayant des salaires moyens plus faibles que les hommes sont également largement concernés : 60 % des bénéficiaires sont des femmes.
Graphique 3 : Structure du crédit d'impôt belge (en euros)
Source : Reynders (2000)
D. Le
crédit d'impôt aux Pays-Bas
Fonctionnement général
La
réforme de 2001 crée un système cédulaire de
revenus pour lesquels s'appliquent des règles fiscales
particulières. En ce qui concerne le revenu du travail, les
différents abattements fiscaux et déductions ont
été limités voire supprimés et remplacés par
un crédit d'impôt unique pour les trois types de revenus : le
General Levy Rebate
qui concerne tous les contribuables et
s'élève à 1 507 euros par an pour ceux de moins de 65 ans
et à 679 euros par an pour ceux qui sont âgés de plus de 65
ans. A ce crédit de base s'ajoutent des crédits
spécifiques selon la situation personnelle du contribuable.
A la différence des trois systèmes évoqués plus
haut, il n'est pas remboursable : de façon générale
le crédit d'impôt est de 1 576 euros par personne et par an quelle
que soit sa situation (qu'elle travaille ou non).
Un crédit supplémentaire est offert pour les personnes actives.
Il est plafonné à 920 euros pour le SMIC et n'est pas
dégressif pour les hauts revenus. Un crédit supplémentaire
pour les parents isolés qui travaillent (1,94 % du revenu
plafonné à 1 206 euros) ayant des enfants à charge de
moins de 12 ans ; d'autres types de crédits sont également
offerts en fonction de la situation familiale ainsi que pour les personnes
âgées.
Tableau 4 : Crédit d'impôt aux Pays-Bas
Crédit général |
1 576 € |
Crédit pour l'emploi |
Max : 920 € |
Crédit par enfant |
1 261 € |
Crédit pour parent isolé |
1 261 € |
Source : Ministry of Finance of Netherlands.
Graphique 4 : Structure du crédit d'impôt au Pays Bas (en euros)
Source : Ministry of Finance of Netherlands.
Chapitre
2. 5 : Les cotisations sociales
Xavier Timbeau
Supérieures à 12 points de PIB, les taux de
cotisations sociales en Europe sont pratiquement le double de celles aux
Etats-Unis, bien qu'au cours des dix dernières années, ils ont
baissé en Europe, les gouvernements étant soucieux de limiter la
hausse du coût du travail. Les cotisations sociales financent des
prestations (retraite, chômage, maladie) : à un haut niveau
de cotisations correspond un haut niveau de prestations. Dans certains pays,
principalement du Nord, les régimes sociaux sont significativement
financés par les ressources générales de l'Etat. Dans les
grands pays européens, les efforts de baisse se sont heurtés aux
contraintes de l'équilibre des régimes sociaux. Des politiques de
baisse ciblées ont été engagées dans certains pays
(France, Belgique, Pays Bas) afin d'obtenir un effet important sur l'emploi
important sans remettre en cause le financement des régimes sociaux.
I. Un niveau pratiquement double des cotisations sociales en Europe par rapport
aux Etats-Unis...
La part des cotisations sociales dans le PIB en Europe est proche du double de
celle atteinte aux Etats-Unis (tableau 1). Les cotisations sociales sont
liées à la couverture d'un risque ou au financement de
prestations. Les principaux risques couverts sont la maladie et la
maternité, la vieillesse, l'invalidité, le chômage, les
accidents du travail et parfois la famille, les garanties de ressources ou la
dépendance. Généralement, la couverture sociale offerte
par les cotisations est liée au statut de salarié. Les
systèmes de protection sociale se sont développés en
Europe après la deuxième guerre mondiale, sous l'impulsion des
pouvoirs publics, parfois avec la participation explicite des partenaires
sociaux.
Les systèmes européens continentaux sont pour la plupart issus du
principe d'ouverture de droit par les cotisations en mutualisant des risques
communs aux salariés. Ainsi, les systèmes de protection sociale
en Europe reposent en grande partie sur des cotisations sociales
prélevées sur les salaires (tableau 2). C'est le cas de
façon très nette pour l'assurance chômage, qui est
financée uniquement par les cotisations sociales, sauf dans son
éventuelle composante « garantie de ressource ». Les
accidents du travail sont un autre exemple de régime socialisé de
salaire différé. Le cas de la vieillesse diffère un
peu : il s'ajoute au principe des droits ouverts par les cotisations des
régimes de minimum vieillesse, de prestation universelle ou de
préretraite financés par l'impôt. Le système de
santé, dont la couverture tend être universelle
107
(
*
)
, repose
généralement sur un double financement.
Tableau 1 : Recettes de cotisation sociales employeurs, salariés en % du PIB
|
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
90-2000 |
Autriche |
13,3 |
13,4 |
14,0 |
14,5 |
14,9 |
15,1 |
15,1 |
15,2 |
15,1 |
15,1 |
14,9 |
+ 1,6 |
Belgique |
14,2 |
14,8 |
15,0 |
15,3 |
15,1 |
14,7 |
14,6 |
14,5 |
14,4 |
14,4 |
14,1 |
- 0,1 |
Allemagne |
13,3 |
14,1 |
14,3 |
14,5 |
14,8 |
14,9 |
15,0 |
15,2 |
15,0 |
14,9 |
14,8 |
+ 1,5 |
Danemark |
1,4 |
1,4 |
1,5 |
1,6 |
1,6 |
1,5 |
1,6 |
1,6 |
1,5 |
2,1 |
2,2 |
+ 0,8 |
Espagne |
11,8 |
11,9 |
12,6 |
12,7 |
12,5 |
11,9 |
11,7 |
11,8 |
11,9 |
12,2 |
12,3 |
+ 0,5 |
Finlande |
9,7 |
11,2 |
10,7 |
11,8 |
12,3 |
12,4 |
12,2 |
11,6 |
11,6 |
11,9 |
11,2 |
+ 1,5 |
France |
18,9 |
18,9 |
19,1 |
19,1 |
18,8 |
18,7 |
18,8 |
18,4 |
16,3 |
16,6 |
16,4 |
- 2,5 |
RU |
6,1 |
6,1 |
6,2 |
5,9 |
6,1 |
6,1 |
6,1 |
6,0 |
6,4 |
6,1 |
6,3 |
+ 0,2 |
Grèce |
8,9 |
8,6 |
8,5 |
9,6 |
9,6 |
9,8 |
9,7 |
10,9 |
11,2 |
11,4 |
11,4 |
+ 2,5 |
Irlande |
5,0 |
5,2 |
5,3 |
5,3 |
5,1 |
4,7 |
4,4 |
4,2 |
4,0 |
4,1 |
4,2 |
- 0,8 |
Italie |
12,8 |
13,0 |
13,2 |
13,6 |
12,9 |
13,0 |
14,6 |
14,8 |
12,5 |
12,3 |
12,0 |
- 0,8 |
Luxembourg |
11,1 |
11,2 |
11,7 |
11,7 |
11,2 |
11,3 |
11,1 |
10,6 |
10,3 |
10,7 |
10,6 |
- 0,5 |
Pays-Bas |
16,0 |
16,9 |
17,5 |
17,4 |
17,6 |
17,6 |
16,5 |
17,2 |
16,2 |
16,7 |
16,2 |
+ 0,2 |
Portugal |
8,0 |
8,3 |
8,3 |
8,3 |
8,4 |
8,8 |
8,3 |
8,5 |
8,6 |
8,7 |
8,9 |
+ 0,9 |
Suède |
14,6 |
15,1 |
14,5 |
13,2 |
13,2 |
13,9 |
14,9 |
15,0 |
14,8 |
13,2 |
15,2 |
+ 0,6 |
UE |
12,8 |
13,1 |
13,4 |
13,5 |
13,5 |
13,5 |
13,7 |
13,5 |
12,7 |
12,6 |
12,4 |
- 0,4 |
USA |
6,8 |
6,9 |
6,8 |
6,7 |
6,8 |
6,8 |
6,7 |
6,7 |
6,7 |
6,8 |
|
0 |
Source : Statistiques des recettes publiques 2001, Economic
outlook n° 70. Les chiffres dans ce tableau rapportent les recettes de
cotisations sociales payées par les employeurs et les salariés
à la richesse nationale. Ils indiquent donc l'ampleur des transferts
réalisés par le système de protection sociale. Le tableau
4 donne une image plus précise de l'impact du système de
cotisations sociales sur le coût du travail.
Les sources de financement peuvent être des impôts affectés
(comme une partie des ressources de TVA en Belgique ou la CSG en France) ou des
subventions de l'Etat, inclus dans le budget général.
Le haut niveau des cotisations sociales est donc à mettre en rapport
avec le bénéfice qu'en tirent les cotisants. La comparaison
directe avec les Etats-Unis est trompeuse : la socialisation de la
protection sociale y est moindre, et des systèmes d'assurance
privés se substituent au système public. Par exemple, les
dépenses de santé sont socialisées à 45 % aux
Etats-Unis contre un peu plus de 70 % en France (
source Health data,
OECD, 2000
). On ne peut déduire des comparaisons de taux de
cotisations sociales une hiérarchie des coûts du travail, puisque
le salaire net de cotisations sociales doit permettre de couvrir plus de
dépenses dans le cas d'un salarié américain que dans le
cas d'un salarié européen
108
(
*
)
.
De plus, les cotisations sociales peuvent ne pas couvrir des prestations
financées par l'impôt général. Le taux de
cotisations sociales est plus bas au Royaume-Uni qu'en France. La
différence est de l'ordre de 10 points de PIB. Mais, les dépenses
de santé (6 % du PIB) sont presque entièrement
financées par l'impôt au Royaume-Uni (le budget du National Health
System), alors qu'elle le sont, pour une part importante, par les cotisations
sociales en France (54 % des recettes de la CNAM sont des cotisations
sociales, 34 % sont de la CSG). La différence de taux de cotisation
s'explique en partie par cette différence de sources de financement,
l'autre partie s'expliquant par des dépenses de santé plus
faibles au Royaume-Uni qu'en France (de 4 points de PIB). Comparer les taux de
cotisations ne suffit pas à comparer les prestations reçues.
Comme le Royaume Uni, le Danemark et l'Irlande se caractérisent par un
financement principalement par l'impôt.
Tableau 2 : Financement des principaux risques dans les pays de l'union européenne
|
Maladie et maternité |
Vieillesse |
Chômage |
Famille |
Accident travail |
Belgique |
CS + Etat + IA |
CS + Etat + IA |
CS + Etat + IA |
CS + Etat + IA |
CS +Etat+IA+ass. |
Danemark |
IA |
IA + CS (comp.) |
CS |
IA |
CS |
Allemagne |
CS |
CS + Etat |
CS+IA |
IA |
CS |
Grèce * |
CS + Etat |
CS + Etat après 1993 |
CS |
CS |
CS |
Espagne |
CS + IA |
CS |
CS |
IA |
CS |
France |
CS + IA |
CS + IA |
CS + Etat |
CS + IA |
CS |
Irlande |
CS + Etat |
CS + Etat |
CS + Etat |
IA |
CS + Etat |
Italie |
CS |
CS |
CS |
CS |
CS |
Luxembourg |
CS + Etat |
CS + Etat |
IA |
CS + IA |
Etat+ass. |
Pays Bas |
CS |
CS |
CS |
Etat |
-- |
Norvège |
CS + IA |
CS + IA |
CS + IAs |
IA |
CS |
Autriche |
CS + Etat |
CS + Etat |
CS + Etat |
principalement IA |
CS + Etat |
Portugal |
CS + IA |
CS |
CS |
CS |
CS + ass. |
Finlande |
CS + IA |
CS + IA |
CS + IA |
IA |
CS |
Suède |
CS + IA |
CS + Etat |
CS + Etat |
IA |
CS |
RU |
CS + IA |
CS |
CS + Etat |
IA |
IA |
* Pour
les assurés après 1993, le système de cotisations sociales
est remplacé par un système tripartite salarié, employeur,
état.
Notes : CS signifie financement par les cotisations sociales, IA
financement par impôt affecté, Etat financement par inclusion dans
le budget général ou subvention de l'Etat récurrente ou
exceptionnelle. Les parts des différentes sources de financement ne sont
pas indiquées et peuvent varier d'un type de risque à l'autre ou
d'un pays à l'autre.
Source : MISSOC, Communauté européenne.
II. Une évolution au cours des années 1990 marquée par la
construction européenne et le poids du chômage
Si les niveaux de cotisations sont très différents entre l'Europe
et les Etats-Unis ou entre pays européens, les évolutions sont
assez marquées et sont en partie seulement liées aux
évolutions des prestations.
Aux Etats-Unis, les cotisations sociales sont stables autour de 6,8 points de
PIB. Rapportées à la masse salariale, elles diminuent
légèrement depuis 1997 (tableau 3), tandis que la part de la
masse salariale dans la valeur ajoutée compense ce mouvement.
Tableau 3 : Recettes de cotisation sociales employeurs et
salariés
en % de la masse salariale du secteur
privé
|
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
Autriche |
32,2 |
32,0 |
33,4 |
34,6 |
36,0 |
36,4 |
37,4 |
37,1 |
36,8 |
36,9 |
36,7 |
Belgique |
35,1 |
35,6 |
36,1 |
37,2 |
37,2 |
36,7 |
36,6 |
36,7 |
36,5 |
35,9 |
35,1 |
Allemagne |
30,0 |
29,8 |
30,1 |
30,7 |
31,9 |
32,1 |
32,7 |
33,7 |
33,4 |
32,8 |
32,4 |
Danemark |
3,8 |
3,8 |
4,0 |
4,2 |
4,4 |
4,3 |
4,4 |
4,3 |
4,3 |
5,8 |
6,2 |
Espagne |
30,1 |
29,8 |
31,5 |
31,5 |
31,8 |
30,7 |
30,4 |
30,2 |
30,4 |
30,7 |
31,0 |
Finlande |
24,0 |
27,5 |
27,8 |
32,8 |
35,4 |
36,1 |
35,2 |
34,2 |
33,9 |
33,9 |
32,6 |
France |
47,4 |
47,3 |
47,8 |
48,5 |
48,9 |
48,9 |
49,3 |
48,3 |
43,1 |
43,2 |
42,5 |
RU |
13,7 |
13,5 |
13,9 |
13,2 |
13,6 |
13,6 |
13,5 |
13,2 |
13,7 |
12,8 |
13,0 |
Grèce |
39,0 |
40,6 |
41,1 |
46,5 |
46,4 |
46,1 |
45,6 |
51,0 |
51,3 |
53,3 |
54,1 |
Irlande |
13,6 |
14,0 |
14,2 |
14,3 |
14,0 |
13,3 |
12,6 |
12,4 |
12,0 |
12,6 |
13,1 |
Italie |
38,1 |
38,5 |
39,0 |
40,7 |
39,9 |
41,4 |
46,9 |
47,6 |
41,7 |
41,0 |
39,9 |
Luxembourg |
25,6 |
25,4 |
26,0 |
26,5 |
25,7 |
25,8 |
25,7 |
25,7 |
25,3 |
25,9 |
25,5 |
Pays-Bas |
38,7 |
40,3 |
41,2 |
41,2 |
43,3 |
43,5 |
40,6 |
42,9 |
39,7 |
40,6 |
39,4 |
Portugal |
26,0 |
26,0 |
26,2 |
26,6 |
28,2 |
30,6 |
29,6 |
31,0 |
30,6 |
30,7 |
30,8 |
Suède |
35,3 |
37,1 |
36,5 |
34,3 |
34,9 |
37,1 |
38,3 |
38,8 |
37,7 |
33,9 |
36,2 |
UE |
32,2 |
32,2 |
32,9 |
33,4 |
33,9 |
34,2 |
35,1 |
34,8 |
32,7 |
32,2 |
31,6 |
USA |
14,3 |
14,6 |
14,5 |
14,3 |
14,5 |
14,5 |
14,5 |
14,4 |
14,1 |
14,1 |
|
Note : En calculant les recettes de cotisations sociales par
rapport à la masse salariale privée, on a,
a priori,
une
meilleure image de la base fiscale des cotisations sociales. Cependant, dans
certains pays, les revenus de transfert sont soumis partiellement à
cotisations sociales. Par ailleurs, les salaires publics sont soumis à
cotisations sociales. En conséquence, cette mesure reste
imprécise.
Source : OCDE Statistiques des recettes publiques, 2001, Economic outlook
n° 70.
En Europe, par contre, la part des cotisations sociales dans le PIB a nettement
augmenté jusqu'en 1995. En moyenne pour les pays de l'Union
européenne, le taux apparent des cotisations sociales rapportées
à la masse salariale s'alourdit de 2,9 points entre 1990 et 1996.
Ensuite, ce taux a tendance à baisser et passe en deçà du
niveau de début de période. Ce mouvement s'explique par la
nécessité de rétablir les finances publiques afin de
satisfaire les critères de Maastricht. L'effort fiscal a porté
sur les salaires, qui sont d'autant plus facilement taxables que peu mobiles.
S'y ajoute le remplacement de cotisations sociales par des ressources plus
larges (CSG en France, IRAP en Italie, taxation écologique en
Allemagne).
Tableau 4 :Taux de cotisations sociales employeur et employé en % du coût salarial
|
1991 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
France |
|
|
45,8 |
42,9 |
43,5 |
41,2 |
37,4 |
37,8 |
38,7 |
38,7 |
Allemagne |
30,8 |
30,9 |
32,6 |
32,8 |
33,7 |
34,8 |
34,8 |
34,3 |
33,9 |
33,9 |
Espagne |
36,4 |
34,2 |
33,6 |
32,6 |
31,3 |
30,8 |
31,6 |
34,1 |
34,7 |
31,5 |
Italie |
37,6 |
38,4 |
38,5 |
38,3 |
38,4 |
38,7 |
32,8 |
32,3 |
32,3 |
32,2 |
Pays Bas |
22,5 |
20,9 |
25,8 |
26,8 |
26,7 |
25,3 |
24,5 |
24,2 |
22,2 |
20,5 |
Royaume Uni |
22,1 |
24,3 |
25,0 |
24,6 |
25,5 |
26,2 |
26,2 |
25,0 |
25,5 |
25,9 |
Note : Les taux de cotisations sociales sont ceux pour un
célibataire sans enfant ayant un salaire égal au salaire moyen
ouvrier.
Source : Taxing Wages 2001, OECD.
L'évolution des cotisations sociales est en grande partie autonome et
déterminée par l'équilibre des régimes sociaux. Il
est donc difficile de les utiliser comme instrument de régulation
budgétaire (ou comme instrument de gestion du coût du travail).
Pourtant, le rétablissement de la part des profits dans la valeur
ajoutée au début des années 1990 dans les grands pays
européens (lié à la désinflation) et la
montée du chômage ainsi que la difficulté à
réduire les dépenses sociales corrélativement au
ralentissement de la croissance ont placé les régimes sociaux
dans une situation financière difficile. Rééquilibrer les
finances publiques passait par un rééquilibrage des finances
sociales.
Dans certains pays, dès le début des années 1990, des
réformes ont eu comme objectif la substitution de l'impôt
général aux cotisations sociales (aux Pays-Bas par la baisse des
cotisations sociales au début des années 1990, en France par le
biais de la CSG dès 1991). L'impact est une base fiscale plus large que
les seuls salaires, mais dont les salaires restent tout de même
l'élément principal ; la fiscalité relative des
autres revenus et des revenus du travail peut s'en trouver augmentée,
mais le taux global de taxation des revenus du travail (en agrégeant
impôt sur le revenu et cotisations sociales) est faiblement
modifié. Dans d'autres pays, la substitution s'est faite en usant de la
montée en charge de la fiscalité écologique (au Danemark,
en Suède, en Finlande, aux Pays Bas).
Après 1997, la fin du processus de convergence et le retour de la
croissance en Europe ont permis d'alléger la pression fiscale en
abaissant la fiscalité des ménages et en particulier les
cotisations sociales. Le Danemark et la Grèce font toutefois exception
à cette tendance européenne. Les cotisations sociales sont
très faibles au Danemark et la protection sociale est financée
par l'impôt. Les réformes ont été concentrées
sur l'impôt sur le revenu, les cotisations retraites et chômage
étant augmentées. En Grèce, c'est le système de
protection sociale qui a été renforcé, induisant une
hausse des cotisations sociales.
Après la création de l'euro, le processus d'équilibrage de
la pression fiscale entre le travail et le capital s'est poursuivi, par
exemple, en France avec le transfert des cotisations sociales salariés
sur la CSG en 1998. L'introduction de l'IRAP en Italie, un impôt sur la
valeur ajoutée, correspond au même objectif et a compensé
une baisse de 12,6 points des cotisations sociales santé.
L'élargissement est toutefois de nature différente à celui
opéré en France, puisque la taxation porte sur la valeur
ajoutée des entreprises, alors que la CSG taxe les revenus de transfert
et du capital des ménages. Les impacts macroéconomiques de ces
changements de base fiscale sont faibles. Ils dépendent de
l'élasticité de substitution entre le travail et le capital et
n'ont pas fait l'objet d'évaluations poussées. Les
bénéfices en termes d'emploi sont rarement avancés pour
justifier ces mesures.
Mais, la possibilité de baisser les prélèvements
obligatoires, après la qualification pour l'euro, les déficits
publics étant réduits et la croissance de retour, a
été utilisée en partie pour traiter le problème du
chômage, à un pic en 1997. Deux approches concurrentes ont
été mises en oeuvre. La première cherche à
résoudre la question du coût du travail. La seconde cherche
à accroître l'incitation au travail.
1. Baisser le coût du travail
Cette
approche se concrétise par des baisses de cotisations sociales
employeurs, qui sont supposées avoir l'impact le plus direct sur le
coût du travail perçu par les entreprises. La baisse peut
être générale, comme elle a été en Allemagne,
en Espagne, en Italie, aux Pays-Bas ou en France (en étant
éventuellement financée par d'autres prélèvements).
L'objectif poursuivi est d'améliorer la compétitivité de
l'économie en baissant le coût du travail. Lorsque cette baisse du
coût du travail est financée, que ce soit par un impôt ayant
une base plus large ou par un impôt sur un autre facteur de production,
c'est la fiscalité relative du travail et des autres facteurs qui est
modifiée, (CSG en France, IRAP en Italie, fiscalité
écologique en Allemagne, en Suède, aux Pays-Bas). Financée
ou non, la baisse de charges sociales abaisse le coût relatif du travail.
Suivant la fonction de production, cette modification induit une substitution
entre le travail et les autres facteurs. Cet effet peut n'apparaître
qu'à long terme, l'élasticité de substitution entre
différents facteurs pouvant être plus faible à court terme
qu'à plus long terme.
La baisse de cotisations sociales employeurs peut être ciblée sur
des catégories particulières. Ces catégories
particulières sont choisies parce qu'elles subissent plus durement le
chômage (soit en niveau, soit parce que le chômage y est plus
long). L'inspiration de ces mesures provient des travaux de Drèze et
Malinvaud en 1993, proposant une baisse ciblée des cotisations sociales
employeurs sur les bas salaires. L'objectif en est d'abaisser le coût du
travail et d'enclencher des effets de hausse des emplois proposés par
les entreprises : emploi plus important par un effet coût du
travail, comparable à celui qu'on aurait si on avait fait une baisse
générale, mais qui bénéficie principalement
à une catégorie choisie (si la mesure n'est pas financée,
auquel cas il faut comptabiliser l'effet négatif d'un
prélèvement supplémentaire). Puis, cet effet est
amplifié par la substitution entre salariés peu qualifiés
(ou à bas salaire) et salariés qualifiés parce que le
coût relatif des deux catégories est à l'avantage des moins
qualifiés. Bien que relié, un dernier argument concerne
l'éventuelle interaction avec le salaire minimum. Les allègements
de charges sociales permettent en effet de réduire le coût du
travail au niveau du salaire minimum et en compensent l'impact négatif
éventuel.
Ces mesures ont été introduites à des échelles
diverses et pour des catégories variées dans les pays
européens (voir tableau 5 et notes associées). La France et la
Belgique ont consacré à cette politique des budgets importants
(de l'ordre de 1 point de PIB)
109
(
*
)
. Les Pays-Bas ont un dispositif comparable d'ampleur
moindre (0,3 point de PIB). Le Royaume-Uni a un dispositif assez
différent, puisqu'il inclut à la fois l'argument d'incitation et
de coût du travail (voir plus bas). En France et en Belgique, ces
dispositifs ont été associés de façon assez
complexe à des conditions de réduction de la durée du
travail. Dans le cas de la France, la réduction de charges sociales
employeurs accordée en échange d'un accord 35 heures ne vise pas
directement à réduire le coût du travail mais à
compenser la hausse induite par la réduction de la productivité
par tête.
Tableau 5 : Allègements spécifiques de cotisations sociales en Europe
|
Allègement bas salaires |
Autres allègements spécifiques |
Montant |
en %PIB |
Autriche |
Non |
non |
-- |
-- |
Belgique a |
Oui |
salariés âgés, jeunes, réduction du temps de travail |
2,9 M€ |
1,1 |
Danemark |
Non |
non |
-- |
-- |
France b |
Oui |
Réduction du temps de travail |
7,6 M€ |
1,0 |
Finlande c |
Non |
petites entreprises, entreprises intensives en main d'oeuvre |
non disp. |
non disp. |
Allemagne d |
non (en projet) |
non (en projet) |
-- |
-- |
Grèce e |
Oui |
nouveaux embauchés |
non disp. |
non disp. |
Italie f |
Oui |
catégories à fort taux de chômage, PME, régions défavorisées (Italie du Sud), jeunes |
autour de 350 m€, par an |
> 0,1 |
Irlande |
|
|
|
|
Pays-Bas g |
Oui |
chômeurs de longue durée |
1,1 M€, par an |
0,3 |
Portugal h |
Non |
jeunes, chômeurs, handicapés, retraités en activité partielle, footballeurs professionnels |
non disp. |
non disp. |
Espagne |
Non |
+ 65 ans, transformations de CDD en CDI particulièrement pour les femmes |
non disp. |
non disp. |
Suède |
Non |
non |
-- |
-- |
Royaume-Uni i |
Oui |
non |
1,0 M€* |
0,25 |
*
L'évaluation de l'ampleur de l'allègement pour le Royaume-Uni est
faite par rapport à la situation de 1997. En 1997, le système
anglais était anti-progressif du fait de l'existence de seuil. La
comparaison avec les autres pays est donc délicate.
Sources : Plans nationaux pour l'emploi (version 2002 sauf France et
Italie, version 2001), OCDE, MISSOC, Peer Review et différentes sources
nationales.
a Belgique
: Réduction forfaitaire des cotisations sociales
employeurs, augmentée pour les publics moins de 25 ans et plus de 50
ans. Cette réduction fait suite aux réductions de charges
entreprises dans les années 1980, puis sur les bas salaires en 1993,
intégrée en 1999 dans la réduction structurelle,
c'est-à-dire forfaitaire. Réduction supplémentaire
à partir de 2001 pour les chômeurs de plus de 45 ans (plan
activa). Réduction de charges sociales salariés (8 % de
revenu en plus pour les salaires bas) à partir de 2000. Aide forfaitaire
unique en cas de réduction de la durée du travail (800 euros par
heure réduite par salarié, non permanente), puis permanente (de
250 à 600 euros par salarié par an selon l'ampleur de la
réduction). Primes en cas d'utilisation du crédit temps par les
salariés (au total 31 millions d'euros, soit un dispositif restant
confidentiel).
Réduction de charges sociales salariés (8 % de revenu en
plus pour les salaires bas) à partir de 2000.
En projet
:
Réductions de cotisations sociales proportionnelles à l'âge
à partir de 58 ans.
Impact évalué
: Pas
d'impact chiffré en termes d'emploi. Fin de la dégradation (ou
amélioration) de la part des moins qualifiés dans l'emploi.
b France
: Depuis 1993, réductions de charges pour les bas
salaires (ristourne Juppé, jusqu'à 1,3 SMIC). En 1997,
réduction de charge en cas de réduction de la durée du
travail (Robien), depuis 1999 et surtout 2000, dispositif Aubry accordant
réduction de charge (jusqu'à 1,8 SMIC), plus réduction
forfaitaire (610 euros par an par salarié) en cas 35 heures. De 1993
à 2000, réduction de charge pour le temps partiel, de 1995
à 1998 réduction de charge pour les embauches de chômeurs
de longue durée (CIE).
Impact évalué
:
Estimations
a priori
des baisses de charges bas salaires entre 200 et
500 000 emplois, estimations des 35 heures de l'ordre de 300 000 emplois.
Estimations
a posteriori
de l'impact d'une partie du dispositif bas
salaire discutables quant à la méthodologie (le chiffre de 460
000 emplois est avancé pour un tiers du dispositif, ce qui implique un
effet considérable pour l'ensemble. Avec de telles estimations l'effet
sur le déficit public de mesures d'allègement est positif !).
c Finlande
: Réduction de charges de 0,1 pour les petites
entreprises, 0,35 pour les grandes. Réduction de 0,65 pour les
entreprises intensives en main-d'oeuvre, 0,45 pour les autres.
d Allemagne
:
en projet
et en expérimentation,
réduction de charges pour les chômeurs embauchés.
e Grèce
: Réduction de charges employeurs pour les bas
salaires (2 points de réduction pour les salaires inférieurs
à 580 euros par mois), suppression dans le cas des salaires les plus bas
(11 %), réduction de charges employeurs dans le cas d'une nouvelle
embauche.
f Italie
: Jusqu'en 2000, aide forfaitaire (de 4 100 euros à 5
100 euros) pour l'embauche nouvelle en CDD avec un plafond annuel. L'aide est
touchée une seule fois. Les PME seules sont éligibles au
dispositif et le contrat peut être un CDD dans certaines
régions ; 350 millions d'euros. En 1999, un dispositif
supplémentaire a été introduit pour les zones à
fort taux de chômage (1 500 euros). En 2000, le dispositif est
étendu à toutes les PME, devient une aide mensuelle (413 euros)
pour une durée de 3 ans (soit 14 868 euros pour trois années).
g Pays-Bas
: Depuis 1996, le SPAK, allègement forfaitaire de
cotisations sociales employeurs sur les bas salaires (jusqu'à 1,15
salaire minimum) qui réduit (en 2000) de 10 % le coût
salarial. L'allègement et le seuil sont proportionnels à la
durée du travail. Le t-SPAK est un allègement entre 115 et
130 % du salaire minimum pour ceux qui ont bénéficié
avec le même employeur du SPAK. Pour les chômeurs de longue
durée nouvellement embauchés, un allègement
supplémentaire pendant 4 ans est possible, doublant le SPAK.
Impact
évalué
: autour de 50 000 emplois créés
pour une évaluation ; 0 ou peu selon d'autres.
h Portugal
: Exonération de cotisations sociales patronales
pendant une année pour les groupes ciblés lors de la
transformation d'un CDD en CDI. Pour les travailleurs handicapés, le
taux de cotisations patronales est de 12,5 au lieu de 23,7 %, pour les
footballeurs il est de 17,5.
i Royaume-Uni
: En dessous d'un seuil (environ 609 euros par mois), il
n'y a pas de cotisations sociales salariés ou employeurs. Le taux est
ensuite constant et s'applique au salaire moins le seuil. Passé un
second seuil (+ de 4 000 euros par mois), le taux des cotisations employeurs
redevient nul. Avant 1997, en dessous d'un seuil (environ 400 € par mois)
il n'y avait ni cotisations sociales ni ouverture de droits. Au-delà du
seuil, la montant des cotisations sociales était de 5 % du salaire
plus 10 % du salaire moins le seuil.
Les systèmes d'allègements sur les bas salaires créent
potentiellement des trappes à bas salaires : le taux de charges
sociales est plus faibles pour les salaires les plus bas et peut inciter les
entreprises à conserver des salaires bas ou des structures de
qualifications peu propices aux salaires plus élevés. Le premier
inconvénient est partiellement traité lorsque la réduction
de charge est forfaitaire, c'est-à-dire un montant de réduction
indépendant du salaire (c'est le cas du nouveau système belge, ou
d'une partie du système français pour les 35 heures). Une autre
solution consiste à définir des seuils en deçà
desquels le taux de cotisations est plus bas (ou nul), à la condition
que les marches soient nulles, c'est-à-dire que le taux au-delà
du seuil s'applique au salaire diminué du seuil, comme dans le
système anglais après les réformes initiées en
1997. Dans les cas des réductions forfaitaires ou à seuil, le
taux marginal des cotisations sociales reste modéré, au niveau du
taux moyen de cotisations, au lieu d'être très
élévé (comme dans le système français ou
néerlandais où il est supérieur à 100 % dans
certains cas).
Les bas salaires sont la cible privilégiée des baisses de charges
spécifiques. Outre la réduction du temps de travail, d'autres
catégories ont été visées, parfois symboliquement :
les femmes en Espagne, les handicapés au Portugal, les travailleurs
âgés en Espagne, au Portugal, en Belgique, les chômeurs de
longue durée aux Pays Bas, au Portugal, les plus jeunes en Italie, au
Portugal, en Espagne. L'Italie a utilisé cet outil pour le
développement régional (mais on pourrait aussi inclure les zones
franches pratiquées dans différents pays).
Les évaluations empiriques, en particulier dans les pays où ces
mesures ont eu une ampleur importante, sont assez peu concluantes. Les
évaluations
a priori
, sur la base de modèles
microéconomiques ou macroéconomiques bouclés concluent
à la dépendance forte des résultats à quelques
paramètres difficilement évalués. Les fourchettes
d'estimations sont importantes (de 100 000 à 500 000 par exemple pour la
France) et les effets sont supposés intervenir à des horizons
temporels longs. En France, une évaluation
a posteriori
sur
données microéconomiques (Crépon Deplatz, 2002) conclut
à un effet important et rapide des baisses de charges sur les bas
salaires effectuées jusqu'en 1994 ; la méthode est fragile
et la transposition au niveau macroéconomique entâchée
d'imprécisions telles qu'on ne peut en retenir les ordres de grandeur.
Les allègements de charges seraient tellement favorables à
l'emploi qu'ils seraient plus que financés par les retours positifs.
2. Inciter au travail
L'autre
approche de baisse des cotisations sociales s'inscrit dans le mouvement
d'incitation au travail. L'objectif est de réduire les effets pervers
supposés de taux fiscalo-sociaux marginaux, comme ceux que l'on observe
dans le cas d'une reprise d'activité. L'instrument le plus
utilisé est alors l'impôt sur le revenu avec l'introduction de
crédit d'impôt ou d'impôt négatif (cf. le chapitre
correspondant). Au Royaume-Uni, la réforme initiée en 1997
(
Making work pay)
s'inscrit dans ce schéma et s'est traduit par
une baisse des taux de cotisations sociales salariés sur les bas
salaires et de la déconnexion du lien entre prestations sociales et
cotisations sociales (on peut recevoir des prestations sans avoir payé
des cotisations si on travaille). La Belgique propose aussi un
allègement de cotisations sociales salariés pour les bas salaires.
Lorsqu'elles incitent au travail, ces mesures sont censées augmenter les
taux d'activité ou avoir un impact sur le chômage volontaire. Les
évaluations empiriques concluent à des impacts assez faibles.
Conclusion
Les taux de cotisations varient donc avec plusieurs objectifs parfois
contradictoires. D'une part, ils sont un instrument pour équilibrer les
régimes sociaux ou les finances publiques. Le travail est une ressource
peu mobile et donc plus facile à taxer que le capital ou
l'épargne. D'autre part, ils pèsent sur le coût du travail,
et sont considérés comme un facteur expliquant le chômage
élevé des économies européennes. A ce titre, ils
sont souvent dénoncés par les institutions internationales
(l'OCDE notamment). L'argument est qu'il existe un écart important
entre le salaire reçu après impôt par le travailleur et le
coût de ce salarié pour l'employeur. Selon l'OCDE, l'écart
est supérieur de 15 à 25 points dans les pays européens
à sa valeur aux Etats-Unis, à l'exception du Royaume-Uni, de
l'Irlande, de la Grèce, du Portugal et de l'Espagne. Cependant, la
méthode de l'OCDE n'intègre pas les prestations reçues par
les ménages à l'exception des allocations familiales et ne prend
donc pas en compte les dépenses privées en assurance sociale ou
retraite que les salariés des pays à système de protection
social peu développé doivent engager. Lorsque les risques
couverts correspondent à une solidarité entre salariés
actifs, l'effet global sur le coût du travail devrait être nul,
hors les effets sur les taux marginaux d'imposition suivant le degré de
redistribution du système. Le cas de l'assurance chômage et de
l'assurance vieillesse est différent puisqu'il s'agit d'une
solidarité entre actifs employés et inactifs ou actifs
inemployés. La comparaison des écarts en niveau est ainsi
trompeuse et discutable, bien qu'il s'agisse d'un argument courant. Les
variations des écarts peuvent éclairer sur les variations des
coûts du travail qui sont imposées aux entreprises et aux
salariés par la législation à la condition que les
prestations sociales (reçues directement par les salariés) soient
inchangées.
Chapitre 2. 6 : Les fiscalités locales européennes
et leurs réformes
Quelle autonomie financière pour les collectivités locales ?
Jacques Le Cacheux
Les pays
membres de l'Union européenne présentent une grande
diversité en matière de nombre et d'organisation des
collectivités territoriales, de répartition des
compétences entre échelons d'administration et de modes de
financement. Les réformes des fiscalités locales
européennes, mises en oeuvre au cours de la dernière
décennie, ne montrent pas d'orientation convergente. Toutefois, dans
plusieurs pays, la fiscalité locale pesant sur les entreprises a
été allégée, pour remédier aux
problèmes de concurrence fiscale et réduire le coût du
travail. Les réformes hésitent entre le souci d'accroître
l'autonomie fiscale des collectivités locales, les craintes
d'inefficience (distorsion des choix de localisation des entreprises,
archaïsme des impôts locaux) et d'inéquité (faible
redistributivité des impôts locaux, inégalité entre
citoyens des diverses collectivités locales).
Si tous les pays membres de l'Union européenne (UE) ont une structure
institutionnelle décentralisée, certains (l'Allemagne, l'Autriche
et la Belgique) étant même des fédérations, ils
présentent cependant une grande diversité en matière de
nombre et d'organisation des collectivités territoriales, de
répartition des compétences entre elles et de financement. Tous
recourent à une fiscalité locale pour assurer une part, le plus
souvent minoritaire, du financement de dépenses publiques locales, qui
représentent, dans la plupart des cas, entre 8 % et 12 % du
PIB, selon les pays, soit en moyenne près du tiers des dépenses
publiques des administrations centrales (Etat central et organismes de
Sécurité sociale), sauf dans les trois pays d'Europe du Nord
(Danemark, Finlande et Suède) où elles constituent une
majorité des dépenses publiques hors protection sociale ;
partout, les collectivités locales assurent aussi l'essentiel de
l'investissement public. Dans plusieurs pays européens, la
décentralisation a été promue et approfondie au cours de
la décennie 90, mais les modalités choisies diffèrent
sensiblement selon les pays, la plupart (Espagne, Italie, Royaume-Uni
notamment) ayant recours à des formules hybrides entre les
modèles canoniques de l'Etat unitaire et de l'Etat fédéral.
Les évolutions de la fiscalité locale des Etats membres de l'UE
au cours de la dernière décennie ne dessinent aucune perspective
ou orientation commune, le principe de subsidiarité interdisant à
la Commission de faire la moindre proposition, ou même étude
comparative, en matière de finances publiques locales. En outre, si,
comme on le verra dans la suite de ce chapitre, les forces de la concurrence
fiscale sont pour beaucoup dans les réformes mises en oeuvre dans
certains pays européens en matière de fiscalité locale,
leur pertinence se fait moins sentir à l'échelle internationale,
entre pays de l'UE, qu'au sein des pays, entre collectivités
territoriales.
Outre deux des trois Etats fédéraux déjà
mentionnés (Allemagne et Belgique) dans lesquels les recettes fiscales
des Etats fédérés constituent une part substantielle des
recettes totales (entre 1/3 et 1/4), seuls les pays d'Europe du Nord (Danemark,
Finlande et Suède) se distinguent par une fiscalité locale
importante (15 % du PIB au Danemark et en Suède, 11 % en
Finlande). Partout ailleurs, le poids de la fiscalité locale est faible,
voire quasi nul (Irlande), de sorte qu'une part importante du financement des
dépenses publiques locales est assurée par des transferts en
provenance de l'Etat central. Toutefois, les réformes fiscales mises en
oeuvre dans plusieurs pays de l'UE au cours de la décennie passée
ont, dans certains cas, sensiblement modifié les sources de financement
des dépenses publiques locales et l'équilibre antérieur
entre les différentes sources de financement, notamment entre ce qui
provient de la fiscalité locale et ce qui est versé par l'Etat
aux collectivités territoriales. De ce point de vue, chaque pays choisit
un équilibre singulier, qui évolue dans le temps selon
l'arbitrage entre autonomie fiscale des collectivités locales et les
impératifs de l'efficience -- à la fois parce que la concurrence
fiscale induit des distorsions dans les choix de localisation des agents
privés, et parce que certains types de prélèvements locaux
engendrent des choix économiques indésirables -- et de
l'équité -- soit verticale, parce que la fiscalité locale
est régressive, soit horizontale, parce que la diversité des
fiscalités locales produit des inégalités de traitements
de contribuables connaissant des situations économiques identiques.
Plutôt qu'une description exhaustive des structures locales et des
modalités de financement de leurs dépenses, difficilement
synthétique en raison de l'extrême diversité des choix
nationaux et disponible ailleurs par pays (voir les fiches pays du
présent rapport et, par exemple, Dexia-Crédit local de France,
1997), ce chapitre propose, après un bref rappel des principaux
impôts locaux existants dans les pays de l'UE, une analyse
articulée autour de trois thèmes centraux dans le débat
sur la décentralisation et le financement des collectivités
locales : l'imposition locale des entreprises, et donc, la question de la
concurrence fiscale entre collectivités territoriales ; la
spécialisation fiscale, c'est-à-dire le caractère plus ou
moins exclusif ou, au contraire, partagé des assiettes fiscales ;
et l'autonomie financière des collectivités locales
110
(
*
)
.
I. Des fiscalités locales disparates
Les sources de financement des collectivités locales européennes
et leur importance relative présentent une grande diversité selon
les pays, de sorte qu'une typologie générale apparaît
particulièrement malaisée et, somme toute, peu éclairante.
En effet, en dehors du clivage, pertinent, entre fiscalité locale propre
et ressources transférées de l'échelon national (cf.
infra
), les spécificités nationales des fiscalités
locales semblent relever davantage de l'héritage historique que de
logiques généralisables. L'un des déterminants a trait aux
compétences dévolues aux collectivités locales, qui
varient grandement selon les pays : ainsi, la part des dépenses
publiques totales assumée par les collectivités locales est-elle
élevée dans les pays d'Europe du Nord (tableau 1) --
essentiellement parce qu'elles ont, dans ces pays, la charge de
l'éducation, y compris la rémunération des enseignants,
et, dans certains cas, de la santé. Il convient de noter que la part des
dépenses publiques locales dans le PIB a eu tendance à se
réduire au cours des années récentes dans la plupart des
pays européens, à l'exception de l'Espagne, de l'Irlande et, de
manière moins importante, de la France.
En outre, les réalités institutionnelles nationales
diffèrent considérablement quant au nombre de niveaux de
gouvernement infra nationaux -- le plus souvent deux, le niveau le plus bas
n'ayant, dans les Etats fédéraux, que très peu d'autonomie
-- et quant au nombre de collectivités à chaque niveau. Dans ces
deux dimensions, la France se distingue nettement de ses partenaires, avec un
empilement complexe de niveaux d'administration territoriale, dont les
frontières de compétence sont relativement mal définies,
et un nombre important d'entités à chaque niveau
111
(
*
)
.
Tableau 1 : Poids des collectivités locales et de la fiscalité locale
|
Dépenses publiques locales/PIB |
Recettes fiscales locales/recettes locales totales |
||
|
1994 |
2000 |
1994 |
1999 |
Allemagne a |
14,0 et 7,5 |
13,8 et 7,4 |
30 |
33 |
Autriche a |
11,2 et 9,0 |
10,3 et 9,4 |
42 |
14 |
Belgique a |
12,3 et 7,4 |
13,2 et 6,6 |
32 |
45 |
Danemark |
33,0 |
30,6 |
48 |
50 |
Espagne b |
12,0 |
14,3 |
16 et 53 |
20 et 45 |
Finlande |
23,0 |
17,3 |
45 |
42 |
France |
9,2 |
9,8 |
52 |
57 |
Grèce c |
2,1 |
2,2 |
Nd |
30 et 7 |
Irlande |
5,4 |
11,7 |
16 |
26 |
Italie |
13,7 |
13,5 |
21 |
24 |
Luxembourg |
11,7 |
5,7 |
31 |
32 |
Pays-Bas d |
19,1 |
15,2 |
7 |
7 et 21 |
Portugal |
3,7 |
5,7 |
31 |
32 |
Royaume-Uni |
10,0 |
9,5 |
13 |
13 |
Suède |
28,7 |
23,9 |
59 |
57 |
a. Etats
fédérés et secteur local pour les dépenses, secteur
local seul pour la fiscalité.
b. Communautés autonomes et secteur local, pour les recettes.
c. Communes et départements, pour les recettes.
d. En 1994, communes seulement. Recettes 1998 pour les communes, 1999 pour les
provinces.
Sources
: Dexia, 1997 et 2002.
La France se distingue également par une fiscalité locale qui,
sans être parmi les plus lourdes (en pourcentage du PIB), assure une part
importante -- environ la moitié -- du financement des dépenses
publiques locales. De ce point de vue, seuls les pays nordiques, avec des
fiscalités locales dont le poids dans le PIB dépasse les
10 %, sont proches de la France. En règle générale,
en effet, les recettes de fiscalité locale propre représentent
moins de la moitié du total des recettes des collectivités
territoriales dans la majorité des Etats européens, à
l'exception des fédérations, dans lesquelles le niveau des Etats
fédérés pèse lourd (tableau 9 du chapitre 1 et
tableau 1), mais partage souvent des impôts avec le niveau central, sans
véritable autonomie fiscale (cf.
infra
).
En matière d'assiettes également, les fiscalités locales
européennes font apparaître une très grande
diversité. De manière peu surprenante, la plupart des
fiscalités locales comportent des impôts assis sur les bases les
moins mobiles : en général -- sauf au Danemark, en Irlande
et en Suède --, un impôt foncier sur les biens immeubles des
ménages -- parfois aussi sur le foncier non bâti --, dont le
redevable est parfois le propriétaire (la taxe sur le foncier bâti
en France, impôt foncier aux Pays-Bas, par exemple), parfois l'occupant
(la
council tax
britannique ou la taxe d'habitation
française) ; et, dans presque tous les pays -- sauf le Royaume-Uni
et la Suède --, un impôt foncier sur les entreprises ou, plus
généralement, sur les activités économiques. En
outre, une évaluation des immobilisations des entreprises entre toujours
dans le calcul de l'assiette des autres impôts locaux versés par
les entreprises lorsque ceux-ci sont assis sur une base difficilement
localisable -- bénéfice ou valeur ajoutée nette, par
exemple. Tous les impôts fonciers locaux présentent une
difficulté spécifique, celle d'évaluation des bases :
chaque pays a fait, de ce point de vue, des choix différents, mais, en
dehors du Royaume-Uni qui recourt à la valeur vénale, la plupart
s'appuient sur une valeur locative, dont les révisions sont, presque
toujours, coûteuses, donc peu fréquentes
112
(
*
)
.
Outre l'impôt foncier, une minorité de pays européens
recourt à des impôts locaux directs sur les personnes, et seuls
sept d'entre eux -- Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne, Finlande, Portugal
et Suède -- ont un impôt local sur le revenu des personnes,
généralement sous forme de centimes additionnels à
l'impôt national, mais parfois simplement sous forme de partage des
recettes de l'impôt national, sans véritable autonomie locale dans
la fixation des taux (Allemagne, Portugal). Rappelons qu'en France, une loi
votée en 1990 par l'Assemblée nationale se proposait de remplacer
la part départementale de la taxe d'habitation par une taxe
départementale sur le revenu des personnes sur le mode des centimes
additionnels à l'IRPP. Bien que relativement peu répandue en
Europe
113
(
*
)
,
l'imposition locale des revenus des personnes présente des avantages
importants en termes d'efficacité et d'équité, tant
horizontale que verticale, puisqu'elle est assise sur la capacité
contributive du contribuable.
En matière de fiscalité locale des personnes, les années
90 n'ont pas été marquées par de grandes réformes.
Il est vrai que le seul bouleversement d'envergure -- l'introduction, au
Royaume-Uni, de la
Poll tax
, ou
Community charge
, impôt
forfaitaire local sur toutes les personnes physiques majeures, par le
gouvernement Thatcher en 1990
114
(
*
)
--, s'était révélé
suffisamment désastreux sur le plan politique pour calmer les ardeurs
des plus fervents réformateurs et de ceux qui critiquent le
caractère inefficace ou inique de la fiscalité locale des
personnes. Pourtant, quelques aménagements ou commencements de
réformes ont eu lieu au cours des années récentes. En
Espagne, la poursuite de la décentralisation s'est traduite, en 1997
puis en 2001, par la cession d'une part plus importante (33 %) des
recettes de l'impôt sur le revenu des personnes physiques -- ainsi que
l'octroi de la faculté de faire varier de 3 points le taux d'imposition
-- aux Communautés autonomes qui, désormais, assurent le
financement des dépenses de santé
115
(
*
)
. En France, les impôts
locaux sur les ménages n'ont pas été
réformés, mais sensiblement allégés au cours des
années récentes (1999-2001), avec notamment la réduction
de la taxe d'habitation.
Les personnes physiques sont aussi soumises, dans la plupart des pays, à
une variété plus ou moins grande de taxes locales
spécifiques (sur les véhicules, les mutations économiques,
l'enlèvement des ordures ménagères, etc.), certaines ayant
plus la nature d'une redevance pour service rendu que d'un impôt. En
France, plusieurs de ces taxes ont été supprimées ou
allégées au cours des années récentes (vignette
automobile, droits de mutation).
II. L'imposition locale des activités économiques :
coûts de production et concurrence fiscale
La question de l'imposition locale des entreprises est, dans tous les pays, une
source de difficultés importantes et donc d'hésitations, ayant
entraîné, dans les années récentes, plusieurs
réformes importantes. Elle pose, en effet, tout d'abord un
problème de principe : faut-il ou non assujettir les
activités économiques à un prélèvement
local ; ne faudrait-il pas, au contraire, prélever uniquement sur
les personnes physiques pour financer des dépenses qui
bénéficient davantage à ces dernières,
l'impôt local constituant, dans un raisonnement économique
idéal, en quelque sorte le « prix fiscal » des biens
et services publics locaux, donc un élément déterminant
des choix électoraux des citoyens locaux ?
116
(
*
)
Si cette logique, que l'on
pourrait qualifier de « logique de club », prévaut
comme fondement du financement des collectivités locales, les
entreprises ne devraient y contribuer qu'au prorata des avantages qu'elles
tirent de leur localisation, en termes de biens et services publics locaux, ce
qui renvoie à la notion d'attractivité des territoires, si
souvent évoquée dans le contexte de la concurrence fiscale. Mais
l'évaluation empirique de ces avantages apparaît
singulièrement malaisée.
Lorsqu'elle est pratiquée, l'imposition locale se heurte à deux
difficultés distinctes : d'une part, au problème de la
mobilité de l'assiette, de sa localisation et des risques de
délocalisation qui résultent de la concurrence fiscale (voir,
notamment, Madiès, 1997 a et b ; Paty, 2000) ; d'autre part,
à d'éventuelles contradictions avec les orientations nationales,
notamment en matière de baisse de charges sur certains facteurs de
production. Enfin certaines assiettes de la fiscalité locale des
entreprises, et singulièrement le bénéfice, connaissent
d'importantes variations conjoncturelles, ce qui pose problème dans la
gestion des finances locales.
Face à ces difficultés, les pays européens ont
apporté des réponses différentes, qui ont aussi
sensiblement varié dans le temps, et qui couvrent presque tout
l'éventail imaginable, depuis l'abandon total de l'imposition locale des
entreprises (Royaume-Uni) jusqu'à une imposition locale autonome des
activités productives. Le niveau d'imposition locale des entreprises,
donc aussi le nombre de collectivités locales en concurrence, sont une
dimension essentielle de cette diversité des choix.
Tous les pays européens, à l'exception notable du Royaume-Uni et
de la Suède, pratiquent au moins une imposition foncière des
activités économiques. Dans certains d'entre eux, comme
l'Irlande, cet impôt foncier constitue même la principale source de
recettes fiscales des collectivités territoriales. L'avantage de ce mode
d'imposition est, comme pour les ménages, l'immobilité de
l'assiette ; mais, dans des marchés fonciers et immobiliers ouverts
et concurrentiels, la fiscalité locale tend à être
capitalisée dans les prix et dans les loyers des immeubles, notamment
ceux à vocation professionnelle, de sorte que la concurrence fiscale
peut s'exercer malgré tout
117
(
*
)
. C'est la raison pour laquelle le Royaume-Uni avait
choisi, dès les années 80, d'interdire toute autonomie locale en
matière de
Business rates
, en centralisant l'impôt foncier
sur les entreprises. A l'inverse, toutefois, on pourrait soutenir que, le
mécanisme de capitalisation jouant aussi bien du côté des
prélèvements -- en amputant la valeur vénale des biens
immobiliers de la valeur actualisée des prélèvements
futurs qu'ils supporteront -- que du côté des
aménités et services publics locaux offerts en contrepartie de
ces prélèvements -- en accroissant, au contraire, cette
même valeur vénale d'une évaluation des ces avantages
futurs de localisation --, l'assiette foncière est celle qui se
rapproche le plus de la conception de la collectivité locale comme un
club, et de l'impôt local comme un prix fiscal des biens et services
publics offerts.
Par ailleurs, sept des pays membres de l'UE -- l'Allemagne, la Belgique,
l'Espagne, la France, l'Italie, le Luxembourg et le Portugal -- ont
également recours à une imposition locale spécifique des
activités productives, qui s'appuie sur des assiettes assez diverses
(immobilisations, masse salariale ou nombre de salariés,
bénéfice, valeur ajoutée, etc.). Dans plusieurs de ces
pays, des réformes de l'imposition locale des entreprises ont
été mises en oeuvre au cours de la décennie passée,
soit pour réduire les conséquences de la concurrence fiscale sur
ces impôts, soit pour assurer une meilleure adéquation avec les
objectifs généraux de la politique fiscale nationale. Ainsi, en
Allemagne, la « taxe professionnelle »,
précédemment assise sur les immobilisations et la masse
salariale, à l'instar de la taxe professionnelle française,
a-t-elle modifiée : ce sont désormais les
bénéfices qui en constituent l'assiette
118
(
*
)
. En France, une
réforme de la taxe professionnelle a été entreprise depuis
1999, qui vise à l'élimination progressive de la masse salariale
de l'assiette, de manière à alléger le coût du
travail, conformément aux orientations générales de la
politique fiscale nationale.
Bien qu'aucune tendance commune claire ne se dessine en la matière, il
semble que plusieurs pays européens se tournent vers une imposition
locale des entreprises sur la base d'une assiette plus favorable que par le
passé à l'emploi et qui reflète autant que possible la
capacité contributive actuelle de l'entreprise, qu'il s'agisse du
bénéfice ou de la valeur ajoutée : c'est, comme on
l'a vu, le cas de l'Allemagne (bénéfice), mais aussi, plus
récemment, de la réforme menée en Italie (
IRAP
)
(valeur ajoutée) et, pour une part, de la France, puisque le
plafonnement de la taxe professionnelle en pourcentage de la valeur
ajoutée aboutit, en pratique, à ce que bon nombre d'entreprises
acquittent un impôt local proportionnel à la valeur
ajoutée. Si ces assiettes apparaissent économiquement mieux
fondées, elles présentent cependant deux
inconvénients : d'une part, elles sont plus difficilement
localisables, c'est-à-dire attribuables à telle ou telle
entité territoriale, dans le cas des entreprises ayant des
établissements dans plusieurs collectivités locales ;
d'autre part, les recettes de ces impôts sont plus sensibles à la
conjoncture que lorsque l'assiette est constituée d'une
évaluation des immobilisations ou de la masse salariale, plus
inertes
119
(
*
)
, ce qui
peut poser aux collectivités locales perceptrices des problèmes
de gestion financière.
En définitive, toutes les modalités d'imposition locale des
activités productives présentent de sérieux
inconvénients, qui justifient l'abandon de ce type d'impôts par
certains pays et les nombreuses réformes mises en oeuvre par les
autres : d'une part, en effet, ces impôts sont
inéluctablement l'instrument de concurrence fiscale, même si
l'ampleur de celle-ci ne fait pas l'unanimité ; d'autre part,
l'imposition locale des entreprises soulève le problème des
inégalités de potentiel fiscal et de leur caractère
cumulatif, dès lors que les prélèvements effectués
localement sur les entreprises ne profitent pas exclusivement à ces
dernières.
III. La spécialisation fiscale
Faut-il réserver certains types d'impôt à chaque niveau
d'administration territoriale, ou bien est-il préférable que
plusieurs niveaux se partagent certaines assiettes ? Ce débat,
classiquement mené en France sous l'appellation générique
de la spécialisation fiscale, est, à des degrés divers,
présent dans tous les pays européens, qui lui ont apporté
des réponses différentes, et variables dans le temps. Bien qu'il
soit difficile de déceler dans les évolutions récentes des
fiscalités locales européennes une tendance commune clairement
marquée, il semble que bon nombre de réformes menées entre
1992 et 2002 aillent plutôt dans le sens d'un partage des ressources
fiscales entre niveaux de gouvernement, et singulièrement entre
l'échelon national et l'échelon régional.
Les logiques qui président à la spécialisation fiscale ou,
au contraire, au partage des impôts entre niveaux de collectivités
territoriales sont de plusieurs ordres : d'un côté, la
volonté de doter les collectivités de ressources dynamiques et de
modalités de financement conformes aux orientations nationales incite
à partager certains grands impôts, comme l'impôt sur le
revenu des personnes, la TVA, ou la TIPP ; à l'inverse, la
spécialisation fiscale est souvent présentée comme une
source de clarification des responsabilités et comme un moyen de limiter
la concurrence fiscale.
En France, comme dans une majorité de pays européens, les divers
niveaux de collectivités territoriales prélèvent des
impôts et taxes dont l'assiette est commune ; mais il n'y a pas
d'impôt commun aux niveaux national et locaux. Cette situation
apparaît davantage l'exception que la règle. Dans de nombreux pays
européens, en effet, les collectivités locales partagent avec le
gouvernement central certains grands impôts, qu'il s'agisse de
l'impôt sur le revenu des personnes (pays nordiques, Espagne), de
l'impôt sur les bénéfices des sociétés
(Italie, avant l'introduction de l'
IRAP
), ou des principaux impôts
indirects, TVA (Allemagne, Espagne) et TIPP (Espagne) notamment. Mais ce
partage ne s'accompagne pas toujours de la libre détermination des taux
de prélèvement locaux : dans la plupart des pays
cités, en effet, les taux sont fixés nationalement et les
collectivités n'ont, au mieux, qu'une marge de manoeuvre très
faible (Espagne depuis la réforme, pays nordiques) ou nulle
(Allemagne) ; le plus souvent, le partage s'effectue selon une clé
de répartition entre niveaux.
L'imposition locale des entreprises pose, de ce point de vue, un
problème spécifique, en raison de la concurrence fiscale qu'elle
peut susciter, notamment lorsque le niveau de collectivités qui la
pratique est bas, correspondant donc à des territoires de faible
superficie (inférieure au bassin d'emploi). La réforme
entamée par la France, dans le cadre du regroupement communal, avec
l'introduction de la taxe professionnelle unique, qui amorce une certaine
spécialisation, affiche l'objectif explicite de limiter la concurrence
fiscale au sein des agglomérations, dont on peut penser qu'elle est
particulièrement forte (Jayet, Benard et Rajaornison, 1999).
IV. L'autonomie financière des collectivités locales
Au coeur du débat sur la fiscalité locale en France, notamment
depuis les réformes récentes qui ont amputé un peu plus
les ressources propres des collectivités territoriales -- suppression de
la vignette automobile, de la part salariale de la taxe professionnelle, de
certains droits de mutation, allègement de la taxe d'habitation --, et
mise en exergue dans le rapport Mauroy sur la décentralisation, la
question de l'autonomie financière des collectivités locales
reçoit, dans les différents pays européens, des
réponses très diverses, qui reflètent des arbitrages
différents entre les objectifs nationaux d'efficience et
d'équité et le souci de décentralisation et de
responsabilisation des élus locaux. Ce débat rejoint en partie
celui sur la spécialisation fiscale -- dans la mesure où la
responsabilisation des élus implique une clarification du dispositif de
financement --, mais s'en distingue néanmoins en mettant l'accent sur la
possibilité, pour ces élus, de déterminer, en toute
liberté ou, du moins, avec des marges de manoeuvre appréciables,
les modalités de prélèvements -- c'est-à-dire les
taux d'imposition, car les assiettes elles-mêmes sont, dans tous les cas,
définies par le gouvernement central.
Généralement jaugée à l'aune de la part des
recettes locales assurée par la fiscalité contrôlée
en propre par les autorités locales (tableau 1), cette notion
d'autonomie financière est, en réalité, beaucoup plus
ambiguë qu'il n'y paraît, dans des systèmes où un
nombre important d'impôts sont empilés et partagés, sans
que les marges de manoeuvre fiscale des collectivités locales soient
toujours effectives (Dexia, 2002). Selon ce critère, cependant, il
apparaît que la majorité des pays européens a
légèrement accru, au cours des années 90, l'autonomie
financière de ses collectivités locales ; mais celle-ci
demeure, presque partout, très limitée -- avec un indicateur le
plus souvent inférieur à 50 %, la situation française
constituant, de ce point de vue, plutôt une exception que la
règle. Il convient notamment de souligner que les pays à
structure fédérale -- ainsi que bon nombre de ceux qui confient
désormais des compétences importantes et étendues, en
matière notamment d'éducation et de santé, à leur
secteur public local -- ont généralement fait le choix des
impôts partagés ou empilés : dans la plupart de ces
pays, le niveau des Etats fédérés et, parfois, celui des
collectivités locales sont financés par la répartition,
selon une clé de partage prédéterminée, du produit
de certains grands impôts à fort rendement, sans que les niveaux
infra-nationaux aient véritablement de marges de manoeuvre sur la
fixation du taux local de prélèvement.
Ce type de solution, dont les exemples les plus extrêmes sont les
Pays-Bas et le Royaume-Uni, présente de nombreux avantages en
évitant ou, du moins, en limitant les problèmes de concurrence
fiscale et d'iniquité horizontale de traitement des contribuables
résidant dans des collectivités différentes, ainsi que
ceux qui résultent d'éventuels conflits d'objectifs entre niveaux
de gouvernement (cf.
supra
). Les partages de recettes selon des
clés de répartition qui reflètent, en
général, les besoins locaux -- population, potentiel fiscal, etc.
-- permettent d'effectuer une importante péréquation de recettes
entre collectivités qui sont, dès lors, en position de prendre
des décisions fiscales autonomes.
Conclusion
Puisque la France est à la veille de lancer une nouvelle vague de
décentralisation, la question du financement des collectivités
locales va se poser avec acuité et l'exemple des expériences
européennes des années récentes devrait permettre, par la
diversité des choix qui les caractérisent, d'alimenter une
réflexion mieux étayée sur les conséquences des
choix faits en ce domaine crucial.
Pas plus que la répartition des compétences entre les
différents niveaux d'administration locale dans les pays membres de
l'UE, les nombreuses réformes des fiscalités locales
européennes qui ont été mises en oeuvre au cours de la
dernière décennie n'esquissent de convergences
évidentes : la diversité demeure considérable, tant
dans le choix des assiettes que les modalités de détermination
des taux et dans le degré d'autonomie financière des
collectivités locales. Toutefois, dans plusieurs pays européens,
la fiscalité locale pesant sur les entreprises a été
réformée et allégée ou centralisée, pour
remédier aux problèmes de concurrence fiscale et réduire
le poids des assiettes qui renchérissent le coût des facteurs de
production, et notamment le travail. Cette préoccupation a abouti
à l'abandon, en Allemagne, en Italie et, plus récemment, en
France, des assiettes de type « masse salariale », soit en
réservant l'imposition des entreprises au niveau central de
gouvernement, soit pour privilégier des assiettes plus neutres -- comme
la valeur ajoutée -- ou plus favorable à l'emploi -- comme le
bénéfice.
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Chapitre 2. 7 : La fiscalité écologique : nouvelle
tendance ou velléités ?
Jacques Le Cacheux
La
montée en puissance de l'écotaxe est nécessaire en Europe
si celle-ci veut réduire ses émissions de gaz à serre
comme elle s'y est engagée à Kyoto et répondre à la
montée des exigences écologique. S'il est difficile qu'elle ne
nuise pas aux secteurs pollueurs, elle fournirait, si elle finance une
réduction des cotisations sociales employeurs, un double
dividende : réduction de la pollution et hausse de l'emploi.
L'écotaxe serait d'autant plus efficace qu'elle serait harmonisée
à l'échelle européenne.
La montée, dans tous les pays européens, d'une conscience
écologique dans des cercles de plus en plus larges de l'opinion, ainsi
que le souci de trouver de nouvelles assiettes de prélèvements
obligatoires pour en soulager d'autres, a conduit, depuis le début des
années 90, à une généralisation, en Europe, de
différents types de taxes indirectes à objectif
désincitatif destinées à renchérir l'usage de
certaines ressources naturelles limitées ou l'émission de rejets
polluants. Elles ont été regroupées sous le vocable
générique d'écotaxes. Activement promues par la Commission
européenne au début de la décennie passée, ces
écotaxes n'ont cependant pas connu, dans la majorité des pays, le
succès que l'on pouvait attendre : si tous les pays
européens ont, depuis longtemps, une fiscalité spécifique
sur les consommations d'énergie, et en particulier sur les carburants
fossiles, périodiquement alourdie au motif d'en renchérir l'usage
selon la logique pigouvienne
120
(
*
)
, et si la plupart des pays européens ont
introduit des taxes spécifiques sur des activités polluantes, peu
d'entre eux --en dehors des Pays-Bas récemment -- ont adopté des
écotaxes générales et plus que symboliques.
La France, qui avait introduit dans la loi de finances pour 2001, une Taxe
Générale sur les Activités Polluantes (TGAP) à
l'intitulé ambitieux, ne fait pas exception à cette
règle : en multipliant les exonérations et exemptions, le
gouvernement précédent a, en pratique, grandement compromis les
effets bénéfiques attendus en termes de réduction des
consommations intermédiaires polluantes des industries et de
l'agriculture. Comme chez la plupart de nos partenaires, les producteurs sur
qui est prélevée l'écotaxe s'y opposent au prétexte
qu'elle renchérit leurs coûts de production et met en péril
leur compétitivité. En réalité, si cet argument est
incontestable lorsqu'il fait référence aux coûts marginaux
de production -- qui sont, précisément, la cible de cette
imposition --, il l'est beaucoup moins en termes de coûts moyens. Et il
est tout à fait concevable, comme on le verra dans la troisième
partie de ce chapitre, d'accompagner l'introduction de l'écotaxe, puis
ses alourdissements successifs, de réductions d'autres
prélèvements acquittés par les producteurs -- sans
préjuger de l'incidence ultime des prélèvements
concernés.
I. Généralisation de la logique pigouvienne ?
D'une manière générale, dès lors que la puissance
publique souhaite, pour diverses raisons, influer sur les usages privés
de certains produits, elle a le choix entre plusieurs méthodes, dont
l'efficacité varie selon les cas et que l'on peut ranger en deux grandes
catégories : les restrictions administratives quantitatives, qui
peuvent aller de la prohibition pure et simple -- comme dans le cas des drogues
illicites, dans la plupart des pays européens -- à des quotas
d'usage - pour l'eau utilisée dans l'irrigation des cultures --,
d'émissions ou de rejets -- comme c'est le cas, dans la plupart des pays
européens, pour les émissions polluantes des véhicules,
les rejets d'eaux usées des activités productives, etc.
121
(
*
)
; et les
désincitations pécuniaires qui compte sur la rationalité
économique de l'utilisateur du produit visé. Chacune des deux
méthodes engendre des coûts pour les utilisateurs des produits
réputés à l'origine des émissions polluantes :
dans le premier cas, il s'agit d'un coût de mise aux normes des
installations -- pots d'échappement catalytiques, station
d'épuration, etc. -- ; dans le second, d'une augmentation du prix
acquitté pour consommer le produit taxé, ce qui peut sembler plus
visible. A la différence de la plupart des autres cas fiscaux, où
l'on cherche à minimiser les distorsions induites par la
fiscalité, tout en visant un effet maximum sur le ou les objectifs que
l'on se donne, la taxation « pigouvienne » a donc pour but
explicite l'exploitation des distorsions qu'elle engendre dans le
système de prix relatifs, donc dans les incitations auxquelles les
agents économiques sont soumis dans leurs choix de comportement, en tant
que consommateurs ou producteurs. Tous les pays européens ont ainsi,
depuis longtemps, recours à des modes de taxation
délibérément dissuasive de certaines consommations
individuelles -- alcool, tabac, carburants -- qui s'appuie sur l'effet
désincitatif de l'impôt : en accroissant le prix
acquitté par le consommateur, cette taxation augmente le coût
marginal de l'usage du bien taxé. C'est également dans cette
logique que s'inscrivent les écotaxes, qui frappent les consommations
finales de carburants ou de sources d'énergie et les consommations
intermédiaires de carburants ou autres intrants polluants, tels que les
engrais chimiques et pesticides dans l'agriculture. Le premier objectif de ces
taxes est donc d'engendrer une réduction des émissions polluantes
en rendant plus coûteux l'usage des produits qui en sont la
cause
122
(
*
)
Les divers engagements nationaux en matière de protection de
l'environnement et de lutte contre les pollutions avaient, depuis plusieurs
années, incité les gouvernements européens à
alourdir la taxation de la consommation d'un certain nombre de produits --
notamment les carburants hydrocarbures fossiles -- dont la combustion est
à l'origine de rejets polluants dans l'atmosphère.
Parallèlement, les normes quantitatives d'émissions ont
été régulièrement durcies pour la plupart des
principaux rejets polluants connus. Mais la tendance générale a
longtemps été de cibler les alourdissements de fiscalité
indirecte sur certains produits et de le faire supporter principalement par les
consommateurs, en soumettant les usages productifs à des taxations plus
légères, voire en les exonérant.
Au cours des dix dernières années, cette
sélectivité a cédé le pas, du moins dans certains
pays, à l'introduction de taxes
générales
sur les
activités polluantes, mieux à même de produire des
réductions d'émissions polluantes, dans une situation
marquée par l'engagement de l'UE, pris à la conférence de
Kyoto, de réduire sensiblement ses émissions de gaz à
effet de serre à l'horizon 2010. La généralisation des
écotaxes apparaissait ainsi comme l'instrument idoine pour atteindre de
tels objectifs.
Toutefois, si presque tous les pays de l'UE ont formellement adopté des
écotaxes, bien peu en ont fait un instrument général et
leur ont donné un poids important. Plusieurs d'entre eux -- Allemagne,
Pays-Bas, Royaume-Uni notamment -- se sont d'abord contentés de baptiser
écotaxe des augmentations de droits d'accises sur les carburants. Et ce
n'est que très récemment -- à partir de 1996 aux Pays-Bas,
de 2001 en Allemagne et en France, etc. -- que plusieurs pays ont introduit des
véritables écotaxes, généralement de manière
très progressives, à des taux bas et avec de très nombreux
plafonnements, exonérations ou exemptions destinés à
sauvegarder la compétitivité des producteurs gros consommateurs
de produits polluants visés par la taxe. En outre, la hausse du prix du
pétrole en 2000-2001 a incité certains gouvernements -- dont le
gouvernement italien -- à suspendre l'application de l'écotaxe,
tandis que d'autres -- dont le gouvernement français -- choisissaient de
la conserver formellement, mais d'offrir à diverses catégories de
producteurs des allégements de taxes ou des compensations qui en ont
sensiblement amoindri la portée et le rendement
123
(
*
)
.
II. Un « double dividende » ?
Dans plusieurs des pays européens où elles ont été
introduites précocement, les écotaxes ont été
justifiées, outre par les objectifs purement écologiques, par le
souci de réduire, en compensation, d'autres prélèvements
obligatoires, dont les assiettes apparaissaient moins favorables, notamment
ceux assis sur les salaires ou le coût du travail (cotisations sociales
en particulier). Certains pays, comme l'Allemagne et les Pays-Bas, ont
même répercuté point pour point la montée en
puissance de l'écotaxe dans des baisses de cotisations patronales --
retraite en Allemagne, maladie aux Pays-Bas. Dans la plupart des cas, ces
dispositifs ont été justifiés par la logique dite du
« double dividende » : les écotaxes auraient la
double vertu d'inciter à réduire les usages de produits
réputés polluants et de permettre, grâce aux recettes ainsi
perçues, d'alléger le poids d'autres prélèvements,
notamment ceux qui pèsent sur le coût du travail. On disposerait
ainsi d'un instrument miracle à double usage : lutte contre la
pollution et lutte contre le chômage ! Pourquoi, si tel était
le cas, n'y recourrait-on pas plus massivement ?
En théorie, bien sûr, les situations du type
free lunch
--
l'équivalent de l'expression française « le beurre et
l'argent du beurre » -- sont plutôt rares selon l'analyse
économique standard. Mais, dans certaines configurations de
marché -- selon les caractéristiques, notamment, de la demande
des biens affectés par les prélèvements --, il se
peut que l'écotaxe, associée à un allègement de
cotisations, engendre à la fois une baisse du coût de production,
favorable à l'emploi, et une certaine réduction des
émissions polluantes visées. Pourtant, comme dans le domaine des
droits d'accise frappant les consommations dangereuses pour la santé
(tabac et alcool) ou, d'ailleurs, dans celui des droits sur les carburants, les
recettes ne sont vraiment importantes que si la demande du produit taxé
est peu élastique au prix
124
(
*
)
, ce qui réduit quelque peu la
probabilité du « double dividende ».
Il n'en demeure pas moins que la taxation des usages de produits
réputés polluants, ou de ressources réputées rares,
peut constituer une assiette de substitution intéressante si l'on
souhaite réduire les prélèvements pesant sur d'autres
facteurs de production, notamment le travail
125
(
*
)
. Le « double dividende » sera
d'autant plus élevé que le chômage sera lui-même
élevé, puisque, dans un tel contexte, la taxation
écologique et l'allègement des charges sur les salaires conduit
à une « double réduction
d'externalités », la pollution et le chômage.
L'écotaxe sera d'autant mieux acceptée par ceux qui l'acquittent
que son introduction sera plus progressive et compensée par des
réductions de cotisations, même si cette substitution
entraîne toujours une redistribution de la charge fiscale, car les
producteurs qui ont une masse salariale importante ne sont que rarement ceux
qui sont aussi gros consommateurs des produits polluants qui supportent
l'écotaxe.
En outre, la logique de la compensation de l'augmentation du coût moyen
de production engendrée par l'écotaxe est théoriquement
fondée, puisqu'elle ne remet pas en cause l'effet désincitatif de
la taxe, qui ne dépend que de son incidence à la marge. En effet,
pour que le prélèvement soit efficace -- c'est-à-dire pour
qu'il incite véritablement les utilisateurs à économiser
sur l'usage du produit visé --, il suffit que son coût
marginal
soit accru : compenser exactement l'augmentation du
coût
moyen
et du coût
total
de production subi par
les producteurs est donc théoriquement possible, dès lors que
cette compensation est forfaitaire -- par exemple sur la base des
quantités historiquement consommées par chaque producteur ou
chaque catégorie -- ou du moins assise sur autre chose que la
consommation courante du produit visé. Ainsi, trois stratégies
sont-elles possibles : la hausse de l'écotaxe peut être
compensée par une subvention à la production au niveau de chaque
type de produits ; elle peut être compensée par une
subvention pour chaque producteur en fonction de sa consommation passée
de produits polluants ; enfin elle peut être compensée au
niveau de l'ensemble des entreprises par une réduction de charges
sociales. Les deux premières réformes ont l'avantage de ne pas
léser directement les entreprises polluantes ; mais elles sont
délicates à mettre en oeuvre : elles supposent une
connaissance fine des processus de production ; comment traiter les
nouvelles entreprises ? intégrer en permanence les progrès
techniques ? Les ménages ne sont pas découragés de
consommer les produits dont la production est source de pollution. La
troisième frappe directement les entreprises polluantes dont le
coût moyen de production augmente ; la hausse des prix relatifs
détourne les ménages des produits à production
polluante ; cette stratégie a l'avantage de ne pas demander
d'analyse microéconomique pour être mise en oeuvre et de
permettre de subventionner l'emploi.
III. Vers une taxe européenne générale sur les
activités polluantes ?
Les principaux obstacles à la généralisation des
écotaxes en Europe sont de deux ordres : d'une part, les secteurs
d'activité qui subissent le nouveau prélèvement protestent
contre un alourdissement de leurs charges d'exploitation ; d'autre part,
comme dans de nombreux autres domaines de l'imposition des entreprises, de tels
prélèvements, précisément parce qu'ils accroissent
les coûts de production, pèsent sur la compétitivité
des activités qui les supportent et risquent donc d'engendrer des
délocalisations ou, de manière équivalente, de susciter
une concurrence fiscale.
Sur le premier point, il est possible, comme on l'a vu plus haut, d'accompagner
l'introduction des écotaxes et leur montée en puissance
progressive d'une compensation qui peut être forfaitaire -- ce qui limite
les effets redistributifs -- ou fondée sur la réduction des
charges pesant sur une autre assiette -- la masse salariale, par exemple.
Quant au second, il plaide pour une coordination ou une harmonisation
européenne des écotaxes, voire pour l'adoption d'une
écotaxe européenne. Cela ne ferait pas disparaître tous les
problèmes de compétitivité et de concurrence fiscale, dans
la mesure où les pays tiers n'adhéreraient pas
nécessairement à cette démarche. Mais, dans ce domaine
comme dans d'autres, il faut parfois assumer des choix qui apparaissent
coûteux, si l'objectif de préservation de l'environnement -- et
les engagements de réduction des émissions de gaz à effet
de serre pris par les pays de l'UE à Kyoto -- est pris au
sérieux. Une telle orientation induira sans aucun doute la disparition,
sur le sol européen, de certaines activités grosses
consommatrices des produits taxés, qui se délocaliseront dans
d'autres régions du monde ou incorporeront les progrès techniques
leur permettant de continuer à produire avec une moindre quantité
de ces produits. C'est déjà ce que l'on observe lorsque les
normes quantitatives de rejets de certains polluants ont été
durcies.
Bien sûr, une telle perspective peut paraître indésirable
dans un contexte de chômage élevé en Europe, ce qui
justifie les compensations offertes aux producteurs. Mais le chômage
n'est pas uniformément élevé en Europe. A terme, c'est
dans cette direction que l'UE devra cependant progresser, ne serait-ce que pour
respecter ses engagements internationaux, et singulièrement le protocole
de Kyoto sur la réduction des gaz à effets de serre
126
(
*
)
.
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Chapitre 3. 1 : Les réformes fiscales en Allemagne
L'Allemagne se caractérise par un taux de prélèvement
obligatoire inférieur à la moyenne des pays européens
(37,8 %, contre 40,8 % en 2000). Le taux de prélèvement
obligatoire a fortement augmenté durant la décennie 1990. Les
réformes en cours visent à réduire la charge fiscale et le
coût du travail, à financer les retraites et à inciter
à la protection de l'environnement. Elles tendent à
élargir les assiettes pour réduire les taux. Le taux de l'IS a
été abaissé à 26,25 %. Les abattements pour
enfants ont été améliorés. Dans un pays à
système social bismarckien, les cotisations représentent une part
importante des prélèvements. La réforme des retraites a
introduit un élément de capitalisation. La taxe écologique
permet d'abaisser les cotisations employeurs. Des mécanismes de
péréquation assurent aux collectivités locales une part
importante des recettes fiscales.
I. Une mise en perspective dans les années 1990
L'Allemagne se caractérise par un taux de prélèvement
obligatoire inférieur à la moyenne des pays européens
(37,8 % selon les statistiques des recettes publiques de l'OCDE, contre
40,8 % dans l'Union européenne en 2000). Comme dans tous les pays
à système social bismarckien, les cotisations représentent
une part importante des prélèvements. Des mécanismes de
péréquation assurent aux collectivités locales une part
importante des recettes fiscales. Les impôts indirects
représentent un peu plus de la moitié des recettes fiscales
(52,8 % en 2001), exactement la moitié en intégrant la taxe
professionnelle dans les impôts directs
127
(
*
)
. Le système fiscal
est concentré sur un nombre limité d'impôts. Les trois
premiers (cotisations sociales, impôt sur le revenu et TVA) totalisent
85 % des recettes fiscales en 2001.
Tableau 1 : Prélèvements obligatoires
|
En % du PIB |
En % du prélèvement des APU |
|||||||||||
|
1991 |
1992 |
1995 |
1998 |
2001 |
1991 |
1992 |
1995 |
1998 |
2001 |
|||
Total prélèvements |
40,27 |
37,94 |
41,1 |
41,9 |
41,2 |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
|||
Total impôts |
24,03 |
21,34 |
23,41 |
23,76 |
23,67 |
59,7 |
56,2 |
56,9 |
56,9 |
57,4 |
|||
dont : |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|||
Impôts directs |
11,4 |
11,7 |
11,1 |
11,5 |
11,2 |
28,2 |
30,8 |
27,0 |
27,0 |
27,1 |
|||
dont : |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|||
|
1,2 |
1,1 |
0,7 |
1,0 |
0,1 |
3,0 |
3,0 |
1,6 |
1,6 |
0,2 |
IR |
||
9,6 |
10,0 |
9,9 |
10,1 |
10,7 |
23,9 |
26,3 |
24,1 |
24,1 |
26,0 |
Impôts sur le patrimoine |
|||
0,2 |
0,2 |
0,22 |
0,03 |
0,01 |
0,57 |
0,56 |
0,54 |
0,54 |
0,04 |
Autres impôts directs |
|||
0,3 |
0,4 |
0,3 |
0,3 |
0,3 |
0,8 |
0,9 |
0,8 |
0,8 |
0,8 |
|
|||
Impôts indirects |
12,7 |
9,7 |
12,3 |
12,2 |
12,5 |
31,5 |
25,4 |
29,9 |
29,9 |
30,3 |
|||
|
1,6 |
1,6 |
0,9 |
0,6 |
0,6 |
4,0 |
4,3 |
2,2 |
2,2 |
1,4 |
dont : |
||
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
TVA : |
|||
6,4 |
6,3 |
6,7 |
6,7 |
6,7 |
15,8 |
16,7 |
16,2 |
16,2 |
16,4 |
Cotisations sociales |
|||
16,2 |
16,6 |
17,7 |
18,2 |
17,6 |
40,3 |
43,8 |
43,1 |
43,1 |
42,6 |
Collectivités locales |
|||
10,9 |
9,7 |
9,8 |
10,1 |
10,1 |
26,9 |
25,5 |
23,8 |
23,8 |
24,6 |
Impôts directs |
|||
6,4 |
6,6 |
6,1 |
6,4 |
6,2 |
15,9 |
17,5 |
14,8 |
14,8 |
15,0 |
Impôts indirects |
|||
4,4 |
3,0 |
3,7 |
3,7 |
4,0 |
11,0 |
8,0 |
9,0 |
9,0 |
9,6 |
|
Source : Statistisches Bundesamt.
Graphique 1 : taux de prélèvements obligatoires en
Allemagne
En % du PIB
Source : Statistisches Bundesamt.
Les contraintes imposées par le financement de la réunification
puis par le respect des critères de Maastricht se sont traduites par une
progression quasiment continue du taux de prélèvement obligatoire
durant la décennie 1990 (40,3 % en 1991, 42,8 % en 2000).
Trois périodes peuvent être distinguées. Passés les
premiers moments d'euphorie et l'espoir d'un miracle économique dans les
nouveaux Länder, le gouvernement a été contraint dans un
premier temps (1991-1995) de réagir à la forte dégradation
du solde public en relevant dans l'urgence quasiment tous les
prélèvements (majoration de la TIPP en 1991 et 1994, de la taxe
sur le tabac en 1992, de la taxe sur les assurances en 1991 et 1993, majoration
d'un point du taux normal de TVA en 1993, introduction pour un an de la surtaxe
de solidarité en 1991, réintroduction de la surtaxe en 1995,
relèvement du taux de cotisation chômage en 1991...). La
réduction du déficit public favorisée notamment par la
reprise de 1994 a permis dans un deuxième temps (1995-1997) d'engager
des réformes plus structurelles (relèvement des abattements pour
enfants en 1996, abaissement du taux de l'impôt sur les
sociétés en 1994, suppression de l'impôt sur le patrimoine
et de la part de la taxe professionnelle assise sur le capital en 1997).
L'impact de ces réformes sur le taux de prélèvement fiscal
est resté modéré, dans la mesure où elles ont
été en partie financées par la suppression de plusieurs
avantages fiscaux. Dans le même temps, les difficultés de
financement des dépenses de retraites et d'assurance maladie ont
nécessité de nouvelles hausses des taux de cotisation sociale, si
bien que la part des prélèvements sociaux dans le PIB a atteint
avec 18,5 % un niveau record en 1997. Dans un troisième temps
(à partir de 1998), priorité a été donnée
à la baisse des taux de prélèvements sociaux et de la
fiscalité directe ainsi qu'à une réduction conjointe du
déficit public, par une forte maîtrise des dépenses et par
l'augmentation de la fiscalité indirecte. Le relèvement d'un
point du taux de TVA en 1998 a permis de stabiliser le taux de cotisation
retraite, avant que l'introduction, puis la majoration de l'écotaxe
financent une baisse de 1,3 point de ce taux entre 1999 et 2001. Dans le
même temps, le taux de la surtaxe de solidarité a
été abaissé en 1998, et la nouvelle coalition au pouvoir
à partir de 1998 a lancé un vaste programme de réformes de
l'imposition des revenus des ménages et des entreprises,
étalé sur les années 1999-2005.
Au-delà des nécessités immédiates imposées
par le coût de la réunification, l'esprit général
des réformes menées dans les années 1990 par la coalition
de centre droit et partagé par l'ensemble des forces politiques a
été de mener de front l'abaissement des taux d'imposition, la
simplification du système fiscal et l'élargissement des bases
imposables. A de multiples égards, ce mot d'ordre se retrouve dans les
réformes fiscales engagées par le gouvernement en place depuis
1998.
II. Les réformes mises en oeuvre par le gouvernement Schröder
Les réformes engagées par le gouvernement Schröder visaient
essentiellement cinq objectifs :
Poursuivre l'allégement de la charge fiscale des entreprises et des
particuliers afin d'améliorer la compétitivité du
« site de production allemand » ;
Alléger la charge fiscale des petites entreprises, le
« Mittelstand » allemand ;
Préparer l'avenir du système d'assurance vieillesse ;
Abaisser le coût du travail ;
Engager une politique favorable à l'environnement.
Le montant total des allégements nets des réformes se monte
(cumul 1999/2005) à 56,8 milliards d'euros, soit 2,5 % du PIB. Il
est d'un ordre de grandeur équivalent à celui de la
réforme fiscale 1986/1988/1990.
Encadré 1 : Aperçu général des lois votées sous le gouvernement Schröder
Imposition des revenus :
Steueränderungsgesetz 1998 du 19 décembre 1998.
Steuerentlastungsgestz 1999 du 19 décembre 1998.
Steurentlastungsgestz 1999/2000/2002 du 24 mars.1999 : 3 premières
étapes (1999-2000-2002 de la réforme de l'imposition des revenus,
mesures d'élargissement de la base imposable).
Steuerbereinigungsgesetz 1999 du 22 décembre 1999.
Steuerreform 2000.
Steuersenkungsgesetz 23 octobre 2000 (avancement à 2001 de
l'étape 2002 et nouvelles étapes 2003 et 2005 de la
réforme de l'imposition des revenus, réforme imposition des
sociétés 2001).
Steuersenkungsergänzungsgesetz 19 décembre 2000 (réforme
imposition des sociétés 2001).
Gesetz zur Fortentwicklung des Unternehmensteuerrechts nov 2001
(réforme de l'imposition des sociétés 2002).
Politique familiale :
Gesetz zur Familienförderung du 22 décembre1999.
Assurance vieillesse :
Altersvermögensgesetz 26 juin 2001 (réforme de 2002).
Réforme écologique
:
Gesetz zum Einstieg in die ökologische Steuerreform du 24 mars 1999
(étapes 1999).
Gesetz zur Fortführung der ökologischen Steuerreform du 16
décembre 1999 (étapes 2000 à 2003).
1. Les réformes de l'imposition des entreprises
Le contexte politique
Le
chantier de la réforme de l'imposition des sociétés a
été lancé en décembre 1998 par la mise en place de
la commission Brühler, dont les propositions ont été rendues
publiques le 30 avril 1999. Initialement lancé par Oskar Lafontaine, le
projet de réforme devait déboucher sur une imposition unique des
bénéfices, quelle que soit la forme juridique des entreprises,
à un taux unique de 35 %. La taxe professionnelle assise sur les
bénéfices devait disparaître. Les sociétés en
nom personnel pouvaient opter soit pour le régime de l'IS, soit pour une
imposition selon un barème spécifique. Selon le ministre des
finances, cette réforme présentait l'avantage d'introduire des
modalités uniques de détermination du bénéfice
imposable, d'unifier le traitement des sociétés de personnes,
prépondérantes, et des sociétés en capital.
Ce projet initial a cependant été mis en cause par une
décision juridique. Dans une décision du 29 avril 1999, la Cour
suprême fédérale des finances (Bundesfinanzhof)
128
(
*
)
a estimé qu'une
« imposition maximale différenciée en fonction de
l'origine du revenu était anticonstitutionnelle ». Ceci
s'appliquait à la différence existant entre le taux maximal de
l'IR (53 %) et celui de l'impôt sur les sociétés en
nom personnel (45 %),
a fortiori
au projet de nouvel impôt
unique sur les sociétés.
La réforme de la fiscalité des entreprises -- la volonté
d'assujettir à l'IS certaines provisions -- est l'une des raisons de la
démission d'Oskar Lafontaine en mars 1999 et explique l'adoption
relativement tardive du volet entreprise de la réforme fiscale. Le
débat a essentiellement porté sur l'égalité de
traitement entre les bénéfices des sociétés, celles
des PME et les revenus des ménages assujettis à l'IR.
La logique de la réforme de l'imposition des entreprises
La
neutralité de l'imposition des bénéfices, qui était
garantie par le système d'imputation complète des
bénéfices mis en place en 1977, a été
abandonnée. Selon ce système, les bénéfices
distribués sont imposés au niveau de l'actionnaire, mais ce
dernier bénéficie d'un crédit d'impôt qui correspond
au montant de l'impôt sur les bénéfices perçus sur
les dividendes. L'argument avancé par le gouvernement pour justifier la
réforme est que ce système peut freiner les investisseurs
étrangers et les investissements à l'étranger, car
l'imputation complète ne s'applique qu'en cas de distribution entre
résidents. Il serait compliqué et difficile à appliquer
à l'échelle de l'Europe. Le risque serait de voir les recettes
fiscales se déplacer entre d'un côté les pays qui
reçoivent l'impôt sur les bénéfices et, de l'autre,
ceux qui compensent les crédits d'impôts. Un tel système
supposerait donc une délicate harmonisation fiscale. En Allemagne
même, ce système serait à l'origine de tensions entre les
Länder.
Dans le nouveau système, les bénéfices des entreprises
sont imposés au niveau de l'entreprise et les dividendes sont
imposés au niveau de l'actionnaire ; le crédit d'impôt
disparaît. En contrepartie, le taux d'imposition des
bénéfices est uniforme à 25 % (voir tableau 2), soit
un taux d'imposition total de 39,3 % en incluant la surtaxe de
solidarité et la taxe professionnelle assise sur les
bénéfices, contre 52,3 % (bénéfices
réinvestis) et 43,6 % (bénéfices distribués)
en 2000
129
(
*
)
. De plus,
seule la moitié des dividendes reçus par les actionnaires
(personnes physiques) est inclue dans leur base imposable et les dividendes
interentreprises ne sont plus soumis à l'impôt. En outre,
l'exonération des dividendes versés par des filiales
étrangères détenues à hauteur de plus de 10 %
par des sociétés résidentes est désormais
étendue à l'ensemble des dividendes en provenance de
sociétés non résidentes.
C'est également pour compenser la suppression du système
d'imputation complète que le gouvernement a modifié le
régime d'imposition des plus-values de cessions de participation. Les
plus-values peuvent en effet être considérées comme des
profits accumulés, ayant déjà été soumises
à l'impôt sur les sociétés, si bien que leur
taxation au moment de la cession de participation induirait une double
taxation. Le gouvernement avance également que ces plus-values
résultent d'une sous-estimation de certains postes d'actif, qui seront
soumis à l'impôt sur les sociétés au moment de leur
liquidation. Si le premier argument paraît recevable, le second l'est
moins : les entreprises qui liquident leur actif le font en règle
générale en situation de faillite, si bien que l'imposition peut
ne jamais se produire. Il est plus judicieux de considérer que les
plus-values résultant d'une appréciation
différenciée de la valeur de l'actif des sociétés
par les marchés boursiers sont volatiles. Dans ce cadre, exonérer
les plus-values latentes va de pair avec l'absence de remboursement en cas de
moins-value latente. L'exonération des plus-values s'appliquait
déjà dans le cas des cessions de participations
étrangères depuis 1994 pour les participations supérieures
à 10 % du capital. Pour le gouvernement, cette mesure permet donc
aussi de traiter désormais de manière équivalente les
investissements en Allemagne et à l'étranger et d'éviter
la multiplication de sociétés holding dans d'autres pays
européens. Elle vise également à accroître l'offre
d'actions sur les marchés financiers et à engager un mouvement de
recomposition des structures participatives.
Tableau 2 : Imposition des bénéfices
Impôt sur les bénéfices |
Autres |
Incitations fiscales/exonérations |
Avant 2001 |
|
|
1988-1994
1
:
|
Taxe
professionnelle :
|
Amortissements :
linéaire ou dégressif.
Accéléré : certains types d'investissement seulement,
supplémentaire : en dessous d'un certain plafond d'actif.
|
Formule de calcul du taux légal d'imposition des
bénéfices :
|
||
Janvier 2001 |
|
|
Taux uniforme de 25 % (26,375 2 ) Suppression de l'imputation et remplacement par système du demi revenu. |
Pas de modification |
Pertes :
--
ordinaires : report en arrière (<1 mill. DM à partir 2001)
|
= 39,3 (BD et BND) |
1.
Introduction de la surtaxe de solidarité de 5,5 % introduite en
1993
.
2. y compris surtaxe de solidarité.
Tableau 3 : Imposition des dividendes, intérêts et plus-values en capital
Dividendes |
Intérêts |
Plus-values de cession de participation |
Ancien régime |
|
|
Retenue
à la source de 25 % (26,38 %) non libératoire.
|
Depuis 1992 :
--
Particuliers :
|
--
Inter-entreprises :
|
Janvier 2001/2002 |
|
|
--
Inter entreprises :
|
Inchangé |
--
Interentreprises (2002) :
|
Encadré 2 : Mesures d'élargissement de l'assiette
Encadrement plus strict des règles de détermination du
bénéfice fiscal :
-- Modification des règles d'évaluation des provisions
constituées par les sociétés d'assurance ;
-- Durcissement du régime d'imputation des pertes ordinaires et en
capital des sociétés résidentes ;
-- Suppression de l'imputation des pertes (01.01.1999) réalisées
dans une filiale étrangère (en cas d'existence de traité
bilatéral) ;
-- Limitations des possibilités de pratiquer des amortissements
dérogatoires et réduction du taux d'amortissement
dégressif pour les actifs circulants ou manufacturés de 30 %
à 20 % (janvier 2001) (concerne surtout les entreprises intensives
en capital), réduction du taux d'amortissement pour les actifs
immobiliers de 4 à 3 %, adaptation des amortissements
anticipés pour nouveaux investissements (possibilité
donnée aux petites entreprises de constituer des provisions
exonérées d'impôt en anticipation de la réalisation
d'un investissement) adapté aux nouvelles conditions d'amortissement.
Le traitement des petites entreprises
Près de 84 % des entreprises sont en Allemagne des
entreprises individuelles ; dans 86 % des cas, il s'agit d'entrepreneurs
individuels (
Einzelunternehmen
), dans 14 % des cas de
sociétés en nom personnel (
Personenunternehmen
). Les
sociétés en nom personnel et les entrepreneurs individuels
représentent un peu plus d'un tiers de la valeur ajoutée de
l'ensemble des entreprises (selon les comptes de résultat publiés
par la Bundesbank (Bundesbank Monatsbericht décembre 2001)).
Ces entreprises sont soumises au régime de l'impôt sur le revenu
que les particuliers et bénéficient donc des allégements
d'impôts inclus dans les différentes réformes (
voir
impôt sur le revenu
). La détermination du
bénéfice imposable est en général celle de la
comparaison de la valeur nette (la base imposable se déduit comme la
différence entre la valeur nette des actifs à la fin de
l'exercice et celle de la fin de l'exercice précédent). Si les
profits ne dépassent pas 48 000 DM par an et le chiffre d'affaires est
inférieur à 500 000 DM, la méthode du revenu net peut
être choisie (revenu brut moins les dépenses afférentes
à l'activité).
En outre, la réforme de l'imposition des entreprises permet aux
entrepreneurs individuels de bénéficier d'un crédit
d'impôt sur le revenu forfaitaire au titre de la taxe professionnelle. La
plupart des entreprises personnelles devraient désormais être
exonérées de la taxe professionnelle. Comme de nombreuses
entreprises personnelles ont un bénéfice inférieur au
montant d'exonération forfaitaire de la taxe professionnelle, le
relèvement du minimum d'exonération de l'impôt sur le
revenu et l'abaissement des taux leur permettront de bénéficier
également du crédit d'impôt. En contrepartie de
l'exonération de la taxe professionnelle, les entreprises en nom
personnel ne peuvent plus bénéficier de taux maximum
réduits
130
(
*
)
,
avantage qui leur était conféré pour compenser leur
assujettissement à la taxe professionnelle.
Contrairement à celles des entreprises soumises au régime de
l'impôt sur les sociétés, les cessions d'entreprises en nom
personnel ne sont pas exonérées de l'impôt, car les
bénéfices n'ont pas été grevés de
l'impôt sur les bénéfices. Mais les propriétaires de
ces entreprises peuvent bénéficier dans certaines conditions d'un
taux réduit de moitié (à partir de 2001), qui vise
à limiter le montant de l'impôt dû lors de la transmission
des droits de propriété.
La répartition des allégements d'impôts entre les différents types d'entreprises
La réforme fiscale est nettement plus favorable aux petites et moyennes entreprises (entendues ici comme les entreprises de moins de 500 salariés et dont le chiffre d'affaires est inférieur à 50 millions d'euros) (tableau 1). Cela tient d'une part à l'abaissement plus important du taux moyen d'imposition des entrepreneurs individuels et des entreprises en nom personnel, d'autre part au fait que les deux tiers des mesures d'élargissement de la base imposable sont supportées par les grandes entreprises, plus intensives en capital.
Tableau 4 : Impact total des réformes fiscales dans le cas des entreprises -- Cumul des mesures (1999/2005)
En milliards d'euros |
PME |
Grandes Entreprises |
Allégements nets |
- 15,8 |
+ 0,8 |
Source :
Ministère des finances.
L'un des enjeux importants de la réforme fiscale est la mesure dans
laquelle mesure la réforme conjointe de l'impôt sur les
sociétés et de l'impôt sur le revenu conduit ou non
à désavantager
in fine
les entreprises en nom personnel
par rapport aux sociétés en capital.
Selon les simulations réalisées par le Ministère des
finances, le taux moyen d'imposition pour une entreprise en nom personnel
appartenant à un couple marié dont le revenu imposable se monte
à 51 129 euros par an (78 % des entreprises en nom personnel
ont un revenu imposable inférieur à cette somme) passera de
25,3 % en 1998 à 19 % en 2005. En 2005, seules 5 % des
entreprises -- celles dont le bénéfice imposable est
supérieur à 128 000 euros -- seront soumises à un taux
d'imposition équivalent à celui des sociétés en
capital.
Tenant compte de l'imposition du propriétaire du capital, les
simulations réalisées par le
Conseil des Sages
131
(
*
)
(Sachverständigenrat zur Begutachtung der gesamtwirtschaftlichen
Entwicklung, 2001) montrent en outre qu'aussi bien avant qu'après la
réforme, le régime fiscal avantage les petites entreprises, et
que cet avantage s'est accru avec la réforme, en particulier grâce
au système d'imputation de la taxe professionnelle assise sur les
bénéfices.
L'impact de la réforme sur le coût du capital et le taux
d'imposition marginal et moyen
L'application d'un taux uniforme d'imposition des bénéfices est,
selon le gouvernement, plus favorable au réinvestissement des
bénéfices, puisque les bénéfices non
distribués étaient auparavant imposés à un taux
supérieur à celui des bénéfices distribués.
La réforme vise donc à accroître le taux d'autofinancement
des entreprises, jugé trop faible en comparaison internationale.
Pour préciser les ordres de grandeur, des simulations ont
été réalisées par le
Conseil des Sages
en
novembre 2001 (Sachverständigenrat zur Begutachtung der
gesamtwirtschaftlichen Entwicklung, 2001). Ces simulations distinguent 3 modes
de financement (autofinancement, émission d'actions, endettement) et 5
types d'investissement (intangibles, bâtiments, machines, placements
financiers, stocks) et permettent notamment de mesurer l'impact de la
réforme sur le taux d'imposition moyen, entendu comme le taux
d'imposition que supporte un investissement type qui rapporterait avant
impôt une rentabilité de 20 % (voir chapitre sur la
réforme de l'imposition des bénéfices).
La baisse du taux d'imposition légal se traduit par une baisse du taux
moyen effectif d'imposition (tous types d'investissement et tous types de
financement confondus) de 3,2 points (tableau 2). Elle est plus faible que la
réduction du taux d'imposition légal (13 points pour les
bénéfices non distribués, 4,3 points pour les
bénéfices distribués) en raison du durcissement du
régime d'amortissement. Assez logiquement, les investissements en
machines bénéficient de la plus faible baisse du taux
d'imposition moyen, en raison du durcissement des amortissements des actifs
circulants ou manufacturés (voir encadré 2). Alors qu'avant
réforme le taux d'imposition était supérieur en cas
d'autofinancement, l'harmonisation des taux conduit à aligner le taux
d'imposition moyen d'un investissement type financé par autofinancement
sur celui d'un investissement type financé par émission d'action
(38,8 %). Le taux d'imposition moyen reste en 2001 le plus
élevé des grands pays européens
.
Tableau 5 : Taux d'imposition moyen (tous types de financement confondus)
|
Intangibles |
Bâtiments |
Machines |
Financiers |
Stocks |
Moyenne |
2000 |
35,6 |
38,5 |
36,6 |
45,7 |
39,6 |
39,2 |
2001 |
33,0 |
36,5 |
35,3 |
39,4 |
35,5 |
36,0 |
Source : Sachverständigenrat zur Begutachtung der
gesamtwirtschaftlichen Entwicklung, 2001.
2. Les réformes de l'impôt sur le revenu des personnes physiques
Comme pour celle de l'imposition des entreprises, la réforme comporte
des éléments d'élargissement de la base imposable ainsi
qu'une baisse des taux d'imposition. En outre, un certain nombre de mesures ont
été prises en faveur des familles, à la suite d'une
décision de la cour Constitutionnelle de 1998.
Les ménages sont les principaux bénéficiaires de la
réforme fiscale (tableau 3). Mais les simulations de l'impact de la
réforme tendent à majorer les allègements d'impôts,
en raison de la non indexation des tranches du barème (progressif
linéaire depuis 1990) sur l'inflation. Le graphique 1 permet de comparer
pour différents cas types l'impact de la réforme sur le taux
d'imposition moyen dans deux situations, l'une où le salaire nominal est
fixe, l'autre où il progresse de 2,5 % par an (moyenne des
dernières années). La baisse du taux d'imposition est deux fois
moins importante quand on tient compte de l'inflation.
Tableau 6 : Impact total des réformes fiscales dans le cas des ménages -- Cumul des mesures (1999/2005)
En milliards d'euros |
|
Allégements nets |
- 41,7 (2 % du PIB, 2,7 % du RDB des ménages) |
Source : Ministère des finances.
Graphique 2 : Taux d'imposition moyen de trois cas types de salariés
En %
Source : Ministère des finances.
Tableau 7 : Les principales mesures de la réforme de l'IRPP
Étape |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
Cumul |
Taux maximum |
53 |
51 |
48,5 |
48,5 |
47 |
47 |
42 |
- 11 points |
Taux minimum |
23,9 |
22,9 |
19,9 |
19,9 |
17 |
17 |
15 |
- 8,9 points |
Min. non imposable euros/personne/an |
6 681 |
6 902 |
7 206 |
7 235 |
7 426 |
7 426 |
7 664 |
+ 11 % |
Source : Ministère des finances.
Encadré 3 : La formule de calcul de l'impôt sur le revenu
La
formule de calcul de l'impôt a été modifiée en
moyenne tous les trois ans et demi entre 1958 et 2000.
Depuis l'année fiscale 1990, le taux marginal de l'impôt sur le
revenu est linéaire avant d'être stable au-delà d'un
certain revenu, alors qu'il dérivait dans les années 1980 d'une
équation du quatrième degré avant la tranche d'imposition
au taux marginal supérieur (barème non linéaire,
progressif et continu avant la dernière tranche). Depuis l'année
fiscale 1996, deux tranches linéaires sont distinguées pour le
taux marginal avant la dernière tranche maximum de 53 %, avec
progressivité entre les deux tranches.
Avec la réforme fiscale, le barème glisse progressivement sur un
système à deux tranches linéaires (avant la
dernière tranche à taux marginal stable), avec
dégressivité entre les deux tranches.
Pour les formules des tranches du barème depuis 1958, voir :
http://www.bundesfinanzministerium.de/fach/tarife/start.htm
L'imposition des couples et les mesures en faveur des familles
Les
éléments des couples sont imposés
séparément, sauf s'ils optent pour une imposition conjointe. Tous
les résidents doivent remplir une déclaration fiscale.
L'impôt est dû le 31 mai de l'année suivant la fin de
l'année fiscale. Dans un couple salarié, dont l'impôt est
prélevé à la source, les conjoints déclarent leur
situation familiale mais sans préciser le niveau de revenu de leur
conjoint. Ils peuvent opter soit entre une classe d'impôt moyenne, soit
pour deux classes d'impôts différentes selon leur niveau respectif
de salaires.
Les mesures en faveur des familles ont été pour l'essentiel
imposées à la suite d'un arrêt de la Cour constitutionnelle
du 10 novembre 1998, qui considérait que le droit fiscal, en accordant
aux parents célibataires un abattement pour les frais de prise en charge
des enfants, tendait à défavoriser les couples mariés. Les
ménages peuvent opter soit entre percevoir des allocations familiales
(à l'heure actuelle de 138 euros pour les premier et deuxième
enfants, de 150 euros pour le troisième, de 179 euros pour les
enfants suivants), soit pour des abattements. Pour les couples qui optent pour
l'imposition conjointe, les abattements sont imputés sur le revenu du
couple. Pour les couples qui optent pour l'imposition séparée,
les abattements sont déduits du revenu de celui qui en fait la demande.
Lors de la déclaration à l'entreprise, les couples qui optent
pour la déclaration conjointe déclarent avoir ou non des enfants
à leur charge en même temps que leur situation de famille.
Suite à la décision de la Cour constitutionnelle, le montant des
allocations familiales a été relevé. Au total, entre le
premier janvier 1998 et le premier janvier 2000, les allocations familiales ont
été relevées de 22,7 % (112,48 euros initialement).
Le montant de l'abattement est en 2000 de 1 767 euros/an (3 534 pour
un couple). Un abattement supplémentaire pour prise en charge a
été introduit, d'un montant de 773 euros/an (1 546 pour un
couple). Le montant total des exonérations induites par cette
réforme se montant à 3,4 milliards d'euros.
Une seconde étape entrera en vigueur en 2002. Elle se soldera par des
allégements de 2,4 milliards d'euros. Elle prévoit un nouveau
relèvement du montant des allocations familiales (de 138 à
154 euros pour les deux premiers enfants, soit une augmentation de
11,6 %), un relèvement de l'abattement de 3 534 euros à
3 648 euros pour un couple. L'abattement supplémentaire sera fondu dans
un nouvel abattement pour éducation et formation, d'un montant de 2 160
euros pour un couple. En échange, un certain nombre de déductions
sont supprimées.
3. Les cotisations retraites, les réformes des retraites
Le
régime d'assurance sociale, objet de la réforme 2001, fournit
plus de 80 % des pensions des régimes contributifs obligatoires
132
(
*
)
. Relèvent
de ce régime tous les salariés du secteur privé, ainsi
qu'une part importante des artisans. Le régime est un système
à points, mais est dans les faits intermédiaire entre un
régime à annuités et un régime à points. Le
nombre de points obtenus chaque année est calculé comme le ratio
entre la rémunération du salarié (jusqu'à
concurrence du plafond) et la rémunération moyenne des
assurés sociaux. Le montant de la pension est ainsi largement tributaire
du nombre d'années de cotisation validées, si bien que plusieurs
mécanismes compensent cet aspect fortement contributif. Le
système est financé de façon contributive et paritaire. En
2001, le taux de cotisation retraite était de 19,1 %, dont
9,55 % à la charge des salariés et 9,55 % à la
charge des employeurs. Néanmoins, près d'un quart des recettes de
l'assurance pension légale sont financées sur ressources
budgétaires fédérales, ce qui se justifie par l'existence
de prestations relevant du principe de solidarité.
Comme la plupart des pays confrontés à terme au vieillissement
démographique, l'Allemagne a engagé au cours des dernières
années plusieurs réformes, parfois majeures. La grande
réforme de 1992 (
Rentenreformgesetz 1992
) a introduit des
règles automatiques de revalorisation de la valeur du point et de la
contribution publique. Chaque année, la valeur du point (et donc des
pensions) est indexée sur l'évolution du salaire moyen brut de
l'année précédente corrigée de l'évolution
du taux d'imposition relatif du salaire moyen et de la pension
« standard » (45 années de cotisations au salaire
moyen). Ce mode d'indexation vise à garantir le maintien d'une
parité nette intégrale
entre les pensions et les salaires
des actifs. Entre 1993 et 2000, le taux de remplacement net mesuré comme
le ratio entre la pension standard et le salaire moyen de l'économie est
ainsi resté proche de 70 %. Enfin, il existe des règles
automatiques de revalorisation de la contribution publique : toute hausse du
taux de cotisation (décidée automatiquement chaque année
avant la fin septembre de sorte que les réserves à la fin de
l'année suivante soient égales à un moins un mois de
dépenses) se traduit automatiquement par une majoration de la
contribution publique.
La grande réforme de 1992 (
Rentenreformgesetz 1992
) a largement
contribué à contrôler la dérive à moyen terme
du régime contributif du secteur privé via l'introduction de
mécanismes d'ajustement automatiques des paramètres du
système. Cette réforme restait sur certains points
incomplète et s'accommodait d'une hausse jugée encore excessive
du poids des retraites dans l'économie. C'est dans cette situation
qu'est intervenue la réforme de l'ancienne coalition qui
prévoyait notamment l'introduction d'un facteur démographique et
devait entrer en vigueur en 1999. Partiellement remise en cause par la nouvelle
coalition sociale-démocrate en 1998, ce projet a laissé place
après de nombreux débats à la réforme actuelle, qui
comprend trois volets. Une première loi
(
Altersvermögensergänzungsgesetz
), adoptée début
2001, détermine les modalités de réforme de l'assurance
légale. La seconde, adoptée en novembre 2000 (
Gesetz zur
reform der Renten wegen verminderter Erwerbsfähigkeit
) réforme
les pensions d'invalidité. La troisième, plus controversée
(
Altersvermögensgesetz)
, a été adoptée en
mai 2001 et fixe les conditions de création d'une assurance
privée facultative par capitalisation. La réforme inscrit
explicitement dans la loi la volonté de contrôler la hausse des
taux de cotisation à moyen terme
133
(
*
)
. En contrepartie, elle donne un signal clair : le
maintien ou la hausse des taux de remplacement passe par la prévoyance
individuelle par capitalisation, éventuellement dans le cadre des
régimes d'entreprise.
L'objectif affiché pour l'évolution du régime légal
est une baisse limitée (2,8 points) du taux de remplacement net, ainsi
qu'une hausse limitée (2,7 points) du taux de cotisation légal.
Le principal outil de contrôle du taux de cotisation est l'introduction
d'une nouvelle formule de revalorisation des pensions. A partir de 2001, la
valeur du point est revalorisée selon une nouvelle formule qui rompt
avec la parité nette. En contrepartie de l'abandon de la logique de
parité nette, la réforme permet aux assurés sociaux de
compenser la baisse du taux de remplacement du régime légal par
l'introduction en 2002 d'une prévoyance individuelle facultative par
capitalisation, financée uniquement par les salariés sur la base
de cotisations facultatives. La loi ne fixe pas de montant maximal aux
cotisations. Par contre, elle fixe un montant minimum de cotisation à
taux plein permettant de bénéficier des aides fiscales de l'Etat
et plafonne le montant des cotisations pouvant bénéficier de
l'aide. Sur la base d'une cotisation de 4 % (soit le taux permettant de
bénéficier de l'aide maximale de l'Etat), de rendements nominaux
de 4 %, et d'une espérance de vie à 65 ans de 18 ans, la
retraite par capitalisation permettrait en 2030 de relever le taux de
remplacement net de la pension standard de 8 points (76 %). La part des
pensions relevant de la capitalisation reste ainsi limitée, de l'ordre
de 10 %.
Le montant total des cotisations se décompose entre d'une part la
cotisation propre de l'assuré, d'autre part la prime
supplémentaire versée directement par l'Etat. Le montant de la
prime supplémentaire dépend du statut familial et du nombre
d'enfants. Il ne dépend pas du revenu. La prestation peut être
remplacée par un avoir fiscal, la règle étant
l'application du mécanisme le plus favorable à l'assuré.
L'aide n'est maximale que lorsque l'assuré cotise à l'assurance
pension facultative au taux plein. Pour éviter que le montant de l'aide
ne dépasse le montant de la cotisation, une cotisation minimum est
prévue, mais le montant de l'aide est plafonné à 4 %
du salaire plafond actuel. Les couples mariés faisant une
déclaration conjointe de revenu bénéficient
séparément des droits lorsqu'ils travaillent tous les deux, mais
ils en bénéficient également chacun lorsque seul l'un des
conjoints travaille et cotise le montant minimum.
L'introduction d'une partie facultative par capitalisation dans le
système des retraites, même si elle reste modérée,
équivaut à introduire une dose de responsabilité
individuelle à côté du système obligatoire et rompt
avec le principe de financement paritaire de l'assurance vieillesse. Elle
comporte cependant plusieurs risques. La garantie légale est faible,
même si le risque ne porte que sur une part limitée des pensions ;
l'absence de disposition relative au traitement de l'espérance de vie
risque d'introduire une discrimination entre sexes.
Ces inconvénients ont incité le législateur à
favoriser la constitution de l'épargne par capitalisation dans le cadre
des régimes d'entreprises, essentiellement par deux moyens. Il est
prévu de créer des fonds de pension permettant de
transférer les anciens régimes d'entreprises dans un
système bénéficiant de l'aide publique. De plus,
contrairement aux régimes d'entreprise actuels, les salariés
auront désormais un droit individuel aux retraites d'entreprises s'ils
renoncent à une partie de leurs salaires et seront en droit d'exiger de
leur employeur la signature d'un contrat d'assurance. La
transférabilité des droits sera immédiate lorsque les
cotisations sont versées par les salariés. Lorsque les versements
seront financés par un abondement patronal, le délai de
transférabilité est réduit de 10 à 5 ans et
l'âge minimum ouvrant droit à la transférabilité est
abaissé de 35 à 30 ans.
La baisse du taux de remplacement prévu par la réforme est d'une
ampleur limitée. La réforme induit une baisse de 5,2 % du
taux de remplacement net des retraites par répartition. Le taux de
cotisation légal (y compris l'écotaxe) devrait passer de
20,3 % en 2000 actuellement à 23,5 % en 2030 (22 % pour
le taux légal, 1,5 % d'écotaxe). L'équilibre du
système repose fortement sur des projections optimistes de taux
d'activité. De fait, la réforme table sur une augmentation du
taux d'activité, aussi bien pour les tranches d'âge
élevées
via
la réforme des pensions
d'invalidité, qui permettra de rendre effectif la réforme des
dispositifs de départ anticipé, que par l'encouragement des
carrières continues des femmes. De 2000 à 2030, la population
allemande baissera de 4 %, la population de 20 à 60 ans baissera de
19 %. Le gouvernement table sur une croissance de l'emploi de 2 %. Il
faudrait une hausse de 15 points du taux d'emploi et un taux de chômage
de l'ordre de 4 %. Le taux d'emploi passerait de 79 % en 1998
à 94,5 % en 2030, alors qu'il est aujourd'hui de 91 % au
Danemark ou aux Etats-Unis. Même dans ce cas, très optimiste, le
ratio retraités/actifs passerait de 48,9 % à 71 %. Avec
une hausse de 15 % du taux de cotisations, il faudrait une baisse du taux
de remplacement de 16 % alors que le gouvernement ne prévoit qu'une
baisse de 8 % (en comptant les salaires avant cotisations facultatives et
impôt). L'équilibre du système suppose donc soit une plus
forte hausse des cotisations, soit une nouvelle baisse du taux de remplacement.
Dès la fin 2001, il est de fait apparu que les baisses initiales de taux
prévues à l'horizon 2005 seraient irréalisables et le
gouvernement s'est vu contraint de modifier les règles de
détermination des réserves des régimes de retraites afin
d'éviter un relèvement de 0,5 point du taux en 2002. Enfin, la
constitution d'une retraite par capitalisation complémentaire est
facultative, même si la fiscalité en favorise la constitution et
l'intégration dans le cadre des régimes d'entreprises. Il peut en
résulter à terme un manque de maniabilité du
système (que fera le gouvernement si peu de salariés
souscrivent ?). Elle aboutit à court terme une hausse du taux de
cotisation global et, en principe, à long terme à une hausse du
niveau de vie relatif des retraités qui y auront souscrit.
Paradoxalement, la réforme augmente donc la part du revenu national qui
devra aller aux retraités.
4. La
fiscalité locale
Les principes généraux du système de
péréquation fiscale
La
péréquation financière est un mécanisme de
correction de la répartition des recettes fiscales destiné
à permettre aux Länder de faire face à leurs attributions
dans le respect du principe constitutionnel d'homogénéité
des conditions de vie sur l'ensemble du territoire. A ce système
s'ajoute le pacte de solidarité, qui regroupe les moyens destinés
à la mise à niveau des Länder de l'Est, essentiellement en
matière d'infrastructure. L'ensemble du dispositif porte chaque
année sur environ 30 milliards d'euros, soit 1,5 % du PIB.
Le système, introduit en 1969, relève du
fédéralisme coopératif : les Länder ont une autonomie
limitée en matière fiscale (leur compétence fiscale
exclusive ne porte que sur les taxes locales à la consommation pour
autant qu'elles ne sont pas fixées au niveau fédéral),
70 % des recettes fiscales sont partagées et un grand nombre de
projets sont financés conjointement.
Le système de péréquation actuel date de 1995 et comporte
essentiellement quatre niveaux :
-- Une première répartition des recettes fiscales résulte
de la collecte des impôts propres à chaque collectivité et
de la répartition des impôts communs hors TVA (tableau 3). La loi
fondamentale elle-même stipule que le produit de l'IRPP et de l'IS est
réparti également entre le Bund et les Länder, à
charge pour le premier de déterminer par voix législative la part
de l'IRPP qui est préalablement reversée aux communes. L'IRPP et
l'IS sont au sein des collectivités locales réparties au prorata
de leur perception par les administrations fiscales locales. Sont
également partagés la retenue à la source sur les
dividendes et sur les intérêts.
-- C'est la répartition de la TVA entre le Bund et les Länder, qui
relève simplement de la loi, qui assure le premier mécanisme de
péréquation horizontale. La part de la TVA affectée aux
Länder est ventilée à hauteur de 75 % au prorata du
nombre de leurs habitants
et à hauteur de 25
% pour
garantir aux Länder, dont les recettes fiscales par habitant sont faibles,
une capacité financière égale à 92 % de la
capacité financière moyenne (par habitant) hors TVA
(
Finanzkraft
).
-- La péréquation financière au sens strict compare la
capacité financière des Länder avec leurs besoins. La
capacité fiscale des Länder comprend les recettes fiscales des
Länder (part des impôts communs après compensation de la TVA,
impôts propres et part des impôts communaux reversés aux
Länder. Les besoins sont considérés comme les recettes
fiscales moyennes de tous les Länder rapportées à leur
nombre d'habitants, multipliée par le nombre d'habitants du Land.
Lorsque les besoins sont supérieurs à la capacité
financière, la péréquation doit permettre de porter
à 95 % de la moyenne des capacités financière la
capacité financière des Länder les moins bien dotés.
Les Länder donateurs sont soumis à un tarif progressif : entre
100 et 101 % de la moyenne, le reversement est de 15 % du montant de
l'écart, 66 % entre 101 et 110 % de la moyenne, 80 % pour
les Länder dont les ressources dépassent de 10 % la moyenne.
- Le dernier dispositif est constitué des subventions complémentaires du Bund, qui correspondent à la péréquation verticale. Ces subventions couvrent des besoins exceptionnels et complètent le dispositif horizontal pour porter à 99,5 % de la moyenne la capacité financière des Länder défavorisés.
Tableau 8 : Mode de répartition des impôts
|
BUND |
LÄNDER |
COMMUNES |
IRPP |
42,5 |
42,5 |
15 |
IS |
50 |
50 |
|
Retenue à la source dividendes |
50 |
50 |
|
Retenue à la source sur les intérêts |
44 |
44 |
12 |
TVA
|
63
|
37
|
2,1
|
Impôts propres |
Taxe sur le tabac, alcool, assurances |
Vignette
auto
|
Taxe foncière et professionnelle 1 assise sur les bénéfices |
1. En
pratique une part de la taxe professionnelle est reversée aux
Länder et à l'Etat fédéral.
Pour plus de précisions sur la péréquation fiscale :
Gabel (2001), Vesper (2000).
Source : Agence financière 2001.
Les dernières réformes en cours
La
péréquation financière a été l'objet de
nombreux débats avec la réunification, les nouveaux Länder
étant les grands bénéficiaires du système de
péréquation. Les nouveaux Länder n'ont été
intégrés que tardivement (1993) et en même temps que la
mise en place d'un pacte de solidarité destiné à assurer
le financement de la réunification, couvrant la période
1995/2004. A la suite d'un arrêt de la Cour constitutionnelle rendu le 11
novembre 1999, le système devait être redéfini. Cet
arrêt a été rendu à la suite d'une saisine de la
Cour par trois Länder donateurs (Bade-Württemberg, Bavière et
Hesse), qui incriminaient le caractère désincitatif du
système de péréquation fiscale, la garantie d'une
capacité financière proche de la moyenne des Länder
n'incitant pas à soigner ses propres ressources fiscales (Gabel, 2001).
L'arrêt de la Cour se concentre sur les principes généraux
du système financier fédéral, et exige qu'une loi soit
votée clarifiant les principes généraux selon lesquels la
péréquation verticale et horizontale doit se dérouler. Un
accord politique est intervenu en juin 2001. Il aménage la
péréquation financière à partir de 2005 et prolonge
le pacte de solidarité jusqu'en 2019.
Le système de péréquation fait l'objet
d'aménagements modestes. Les cinq Länder contributeurs supporteront
un reversement portant sur 75 % au lieu de 80 % au-delà de
110 % de la moyenne. De plus tous les Länder pourront
désormais conserver 12 % de leurs recettes supplémentaires,
qui ne seront plus inclues dans la péréquation. Les Länder
bénéficiaires tirent également bénéfice de
la réforme grâce aux contributions du Bund (37 à 168
millions de DM). Le système ne garantit plus que la capacité
financière des Länder bénéficiaire soit portée
à 99,5 %. Le Bund s'est engagé à supporter
2,5 milliards de DM supplémentaires par an à partir de 2005
(moins de 0,1 % du PIB).
Le nouveau pacte de solidarité porte sur un montant de 7,4 % du PIB
(pour les quinze années 2005-2019). Aucune dégressivité
n'est prévue avant 2009, les versements seront nuls en 2020. La surtaxe
de solidarité de 5,5 % est maintenue.
4. La fiscalité écologique
L'écotaxe a été introduite en avril 1999. Elle
prévoit une majoration de la TIPP (essence, diesel, gaz) ainsi que
l'introduction d'une taxe sur la consommation d'électricité. La
réforme comporte cinq étapes, chacune intervenant au premier
janvier de chaque année jusqu'en 2003 inclus. L'objectif de
l'écotaxe est double. D'une part, elle vise à réduire la
consommation d'énergie. D'autre part, son produit est affecté
à la réduction du taux de cotisation retraites. L'économie
de taux de cotisation permise par l'écotaxe se monte à 1,7 point
(1,3 en 2001, 0,4 point supplémentaire pour les deux dernières
étapes) au total. Les cotisations légales étant
partagées pour moitié entre les salariés et les
employeurs, l'allégement de cotisation pour les employeurs se monte
à 0,85 point.
L'écotaxe est fixée forfaitairement. Pour l'essence, la
majoration se monte par exemple à 3,07 centimes d'euros, ce qui
correspondait en avril 1999 à un relèvement de 3,5 % du prix
de l'essence. Des subventions ont été accordées,
essentiellement aux entreprises de l'industrie, de l'agriculture, aux
entreprises productrices d'énergies renouvelables, aux entreprises de
transports publics de proximité.
En moyenne en 1999, la part de la fiscalité dans le prix des carburants
était de 74 % pour le super, de 62 % pour le diesel. Elle
était de 36 % pour le fuel domestique. L'Allemagne se situe dans la
moyenne des pays européens. Pour le prix du super, elle n'était
dépassée que par la France et le Royaume-Uni (
Schintke
et al.
2000).
5. Les prélèvements affectés
Sont
principalement concernés en Allemagne dans les années 1990,
l'affectation du relèvement d'un point du taux de TVA (15 à
16 %) et du produit de l'écotaxe au financement de l'assurance
vieillesse légale. L'économie totale de taux de cotisation se
monte à 2,7 points.
Références bibliographiques
Agence financière de Berlin, 2001 : « Les relations
financières entre l'état fédéral et les
Länder », Bulletin d'informations économiques et
financières sur la République Fédérale d'Allemagne.
Gabel M., 2001 : « la réforme du fédéralisme
financier allemand, beaucoup de bruit pour rien ? », Regards sur
l'économie allemande, Bulletin économique du CIRAC, octobre.
Sachverständigenrat zur Begutachtung der gesamtwirtschaftlichen
Entwicklung, 2001 : « Für Stetigkeit - gegen
Aktionismus », novembre.
Schintke
J.,
Stäglin
R.,
Weiß
J.P., 2000 : «
Verteuerung
von Erdöl, Erdgas und Mineralölprodukten: Potentielle Preiseffekte in
den Produktionsbereichen der deutschen Wirtschaft
»
,
DIW Wochenbericht 45/2000.
Vesper D., 2000 : « Quo vadis Länderfinanzausgleich »,
DIW Wochenbericht 26/2000.
Chapitre 3. 2 : Les réformes fiscales en France
Gaël Dupont
La
plupart des prélèvements obligatoires ont sensiblement
augmenté au cours des années 1990, et particulièrement
entre 1993 et 1996, dans une situation de fort ralentissement
économique. Malgré les baisses de fin de décennie, les
impôts directs restent sensiblement supérieurs au niveau du
début des années 1990, alors que les prélèvements
indirects ont retrouvé un niveau à peu près
équivalent. Les principales évolutions du système fiscal
ont été la diminution des charges sur le travail en particulier
pour les bas salaires et l'élargissement de l'assiette du financement de
la Sécurité sociale avec la création de la CSG et pour
corollaire une augmentation de la fiscalité de l'épargne. A la
fin de la décennie, la réforme fiscale a eu pour objectif
l'augmentation de l'écart entre revenus du travail et revenus
d'assistance, notamment avec la réforme de la taxe d'habitation et la
création de la prime pour l'emploi. Par contre, contrairement aux
ambitions affichées, la fiscalité écologique n'a
guère pris d'importance.
I. Un historique
1. Caractéristiques du système fiscal français
Le Taux de prélèvement obligatoire (TPO) est nettement supérieur à la moyenne européenne : 45,2 % du PIB en France contre 40,8 % en moyenne dans l'Union européenne en 2000, soit un écart supérieur à ce qu'il était 10 ans plus tôt. L'écart s'explique exclusivement par des cotisations sociales plus importantes ; les impôts sur le revenu sont un peu plus faibles et les impôts indirects sont dans la moyenne européenne (en points de PIB). Depuis la fin des années 1970, l'évolution générale des prélèvements peut se décomposer en 4 étapes : de 1978 à 1984, le TPO augmente fortement, passant de 37,4 % en 1978 à 44,3 % en 1984. Entre 1984 et 1993, les prélèvements ont plutôt tendance à se réduire modérément, et atteignent 43,4 % en 1993. Les six années suivantes sont marquées par une hausse sensible de la pression fiscale destinée à rétablir l'équilibre des comptes publics. Enfin après le niveau record atteint en 1999, les prélèvements ont été réduits à partir de 2000. A partir de 2005-2010, il est probable que les prélèvements sociaux augmenteront pour financer les retraites...
Tableau 1 : Evolution des principaux prélèvements obligatoires (en % du PIB)
|
1978 |
1985 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
TVA |
8,0 |
8,5 |
7,3 |
7,2 |
7,4 |
7,5 |
7,8 |
7,8 |
7,7 |
7,8 |
7,5 |
7,3 |
Autres impôts sur les produits |
4,0 |
4,5 |
4,4 |
4,5 |
4,7 |
4,7 |
4,7 |
4,7 |
4,7 |
4,7 |
4,6 |
4,5 |
Impôts sur la production |
2,3 |
3,5 |
3,6 |
3,8 |
3,9 |
4,1 |
4,2 |
4,2 |
4,2 |
4,1 |
4,0 |
3,8 |
IR ménages |
4,3 |
5,1 |
5,3 |
5,4 |
5,4 |
5,3 |
5,6 |
6,0 |
8,2 |
8,4 |
8,5 |
8,5 |
Impôt sur les bénéfices |
1,8 |
1,9 |
1,5 |
1,6 |
1,6 |
1,7 |
2,0 |
2,2 |
2,2 |
2,6 |
2,8 |
2,9 |
Autres impôts courants |
0,7 |
1,2 |
1,4 |
1,2 |
1,4 |
1,3 |
1,3 |
1,3 |
1,2 |
1,2 |
0,9 |
1,0 |
CS employeurs |
11,4 |
12,4 |
11,8 |
11,8 |
11,6 |
11,5 |
11,4 |
11,4 |
11,3 |
11,5 |
11,3 |
11,3 |
CS salariés et non salariés |
4,6 |
6,6 |
7,2 |
7,3 |
7,2 |
7,2 |
7,4 |
6,9 |
5,0 |
5,1 |
5,1 |
5,1 |
Impôts en capital |
0,2 |
0,3 |
0,5 |
0,4 |
0,4 |
0,6 |
0,5 |
0,6 |
0,5 |
0,5 |
0,6 |
0,6 |
Total |
37,4 |
44 |
42,7 |
42,9 |
43,4 |
43,7 |
44,8 |
44,9 |
44,8 |
45,6 |
45,2 |
45,0 |
Source : Comptes nationaux trimestriels INSEE.
Tableau 2 : Evolution des principaux prélèvements obligatoires (en % du total)
|
1978 |
1985 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
TVA |
21,5 |
19,4 |
17,0 |
16,8 |
16,9 |
17,0 |
17,5 |
17,4 |
17,1 |
16,9 |
16,6 |
16,3 |
Autres impôts sur les produits |
10,8 |
10,3 |
10,1 |
10,3 |
10,8 |
10,7 |
10,4 |
10,4 |
10,5 |
10,2 |
10,2 |
10,1 |
Impôts sur la production |
6,2 |
8,0 |
8,4 |
8,9 |
9,0 |
9,2 |
9,4 |
9,3 |
9,3 |
9,0 |
8,8 |
8,5 |
IR ménages |
11,4 |
11,6 |
12,4 |
12,5 |
12,5 |
12,2 |
12,5 |
13,3 |
18,1 |
18,3 |
18,8 |
18,9 |
Impôt sur les bénéfices |
4,8 |
4,4 |
3,6 |
3,6 |
3,7 |
3,9 |
4,3 |
4,9 |
5,0 |
5,7 |
6,1 |
6,3 |
Autres impôts courants |
1,9 |
2,6 |
3,2 |
2,9 |
3,2 |
3,1 |
2,9 |
2,8 |
2,7 |
2,6 |
2,0 |
2,2 |
CS employeurs |
30,5 |
28,1 |
27,4 |
27,3 |
26,6 |
26,2 |
25,5 |
25,4 |
25,1 |
25,0 |
25,0 |
25,0 |
CS salariés et non salariés |
12,4 |
15,1 |
16,8 |
16,9 |
16,5 |
16,5 |
16,5 |
15,4 |
11,1 |
11,1 |
11,3 |
11,4 |
Impôts en capital |
0,6 |
0,6 |
1,1 |
1,0 |
0,9 |
1,3 |
1,1 |
1,2 |
1,1 |
1,2 |
1,3 |
1,4 |
Total |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
Source : Comptes nationaux trimestriels INSEE.
Tableau 3 : Répartition des prélèvements obligatoires par sous secteurs des administrations publiques
En % du PIB |
1978 |
1990 |
1995 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
Etat |
17,7 |
17,5 |
16,6 |
17,3 |
17,2 |
17,9 |
17,1 |
16,7 |
Autres administrations centrales |
0,3 |
0,4 |
0,4 |
0,8 |
0,8 |
0,8 |
0,8 |
0,9 |
Administrations publiques locales |
3,1 |
4,8 |
5,5 |
5,7 |
5,7 |
5,5 |
5,2 |
5,1 |
Administrations de sécurité sociale |
16,2 |
19,2 |
20,3 |
20,5 |
20,5 |
20,9 |
21,4 |
21,7 |
Dont cotisations sociales |
15,6 |
18,5 |
18,3 |
17,8 |
15,7 |
16 |
15,9 |
15,8 |
Union européenne |
0,7 |
0,9 |
0,8 |
0,7 |
0,6 |
0,6 |
0,6 |
0,6 |
Total |
37,9 |
42,8 |
43,7 |
44,9 |
44,8 |
45,6 |
45,2 |
45,0 |
Note : les transferts fiscaux de l'Etat aux
collectivités locales (respectivement à la Sécurité
sociale) sont comptabilisés avec les administrations locales
(respectivement avec les administrations de sécurité sociale).
Source : Rapport économique et financier 2002, INSEE
Première n° 849.
Graphique 1 : Taux de prélèvement obligatoire
En % du PIB
Sources : INSEE, comptes nationaux.
2. Phases d'évolution du taux de PO dans les années 1990
Les années 1990 sont une décennie de hausse sensible des prélèvements (+ 2,8 points de PIB entre 1989 et 1999). Stable jusqu'en 1993, le taux de PO a fortement augmenté entre 1993 et 1996 (+ 2 points en trois ans) dans un contexte de fort ralentissement économique. Après une stabilisation pendant deux ans, la part des prélèvements dans le PIB a connu une croissance très forte en 1999 induite par la forte reprise économique. En 2002, le taux de prélèvements est repassé en dessous du niveau de 1996 (44,8 % du PIB).
3. Orientations générales
A partir de 1993, les mesures fiscales prises ont, pour l'essentiel, été guidées par des impératifs budgétaires. A peu près tous les impôts ont été accrus dans une période de fort ralentissement économique et de nécessité d'assainissement des finances publiques dans le cadre européen. On peut cependant distinguer une orientation centrale sur l'ensemble de la décennie : la diminution des charges pesant sur le travail en particulier le travail non qualifié : la dégressivité des cotisations patronales a été mise en place dès 1993. Les baisses de cotisations patronales ont été poursuivies par le gouvernement Jospin, dans le cadre de la réduction du temps de travail, et complétées par la réforme de la taxe professionnelle. L'assiette du financement de la Sécurité sociale a été élargie par la substitution d'une partie des cotisations salariés par la CSG. En fin de période, la volonté d'augmenter l'écart entre revenus du travail et revenus d'assistance a également nettement marqué la politique fiscale : baisse du taux inférieur de l'IR et réforme de la décote, réforme de la taxe d'habitation, création de la Prime pour l'emploi (PPE). Ces orientations ont eu pour conséquence une réduction de la part des cotisations sociales dans le financement de la Sécurité sociale et une diminution de l'autonomie fiscale des administrations locales. La taxation des revenus du travail a été réduite, mais la taxation des revenus du capital augmentée, essentiellement du fait de la CSG et de la CRDS.
4. Les points marquants de la décennie 1990
Les
premières mesures de ristournes dégressives de cotisations
patronales (exonérations de cotisations familiales) ont
été mises en place en 1993. A l'inverse, la CSG a
été augmentée en juillet 1993, le taux passant de
1,1 % à 2,4 %. En 1993, le nombre de tranches du barème
de l'impôt sur le revenu des personnes physiques a été
réduit de moitié. En 1995-1996, la quasi-totalité des
prélèvements a été augmentée. Le taux normal
de TVA est passé de 18,6 % à 20,6 % en juin 1995 ;
les taux des impôts sur les produits (tabac, alcool, taxe sur les
produits pétroliers TIPP) et les impôts sur la production ont
également été en hausse. En 1995, une surtaxe de 10 %
de l'impôt sur les bénéfices a été mise en
place, faisant passer le taux normal de 33 1/3 à 36 2/3.
En 1997 et 1998, le taux de prélèvements a été
globalement stable malgré quelques hausses d'impôts :
à la sortie de la récession du milieu des années 1990, les
bases étaient encore peu dynamiques. L'objectif d'un déficit de
3 % en 1997 a été atteint grâce à la mise en
place d'une surtaxe temporaire de 15 % de l'impôt sur les
bénéfices des sociétés. Le taux normal a alors
atteint 41 2/3 %. En 1997 et 1998, la principale mesure a
été le basculement en deux temps de 6,05 points de cotisations
maladies salariés vers 5,1 points de CSG. Cette mesure a
été bénéfique aux salariés et a
élargi le financement de la Sécurité sociale. En 1996, a
été engagée une diminution quinquennale des taux de
l'IRPP, mais celle-ci a été interrompue par le changement de
majorité.
En 1999, les rentrées fiscales ont été beaucoup plus
dynamiques que prévu (cf. débat sur la cagnotte). La reprise
économique a fortement augmenté les bases d'imposition à
l'impôt sur le revenu des ménages et des entreprises.
L'élasticité des recettes fiscales au PIB a été de
l'ordre de 2. En conséquence, malgré quelques baisses
d'impôts indirects (TVA, droits de mutation à titre
onéreux, taxe professionnelle), le taux de prélèvements
obligatoires a augmenté de 0,8 point.
En 2000 et 2001, les marges budgétaires ont été
utilisées pour faire redescendre le TPO. Les mesures ont concerné
un ensemble très large d'impôts : impôts indirects
(baisse d'un point du taux normal de TVA, suppression progressive des salaires
de l'assiette de la taxe professionnelle, suppression de la vignette pour les
particuliers...) et directs (diminution de l'impôt sur le revenu et de la
taxe d'habitation, suppression progressive des surtaxes à l'impôt
sur les bénéfices des sociétés). Les bases
d'imposition sont restées très dynamiques. En 2002, les baisses
de prélèvements se sont poursuivies à un niveau
soutenu : 2002 constituait la seconde étape d'un plan de
réductions d'impôts sur trois ans annoncées par le ministre
des finances (dit « plan Fabius »), complété
à l'automne 2002 par la baisse de l'impôt sur le revenu
effectuée par la nouvelle majorité. Compte tenu de la forte
dégradation de la conjoncture économique et de l'augmentation
importante du déficit public, les baisses de prélèvements
prévues en début d'année 2003 pour l'année en cours
étaient très faibles, la hausse des cotisations Unedic compensant
presque les baisses prévues par la loi de finances pour 2003.
Bilan
Le TPO a
augmenté de 1,5 point entre 1992 et 2002. La hausse a concerné
les impôts directs (+ 4,2 points de PIB), alors que les impôts
indirects restaient globalement stables en proportion du PIB, et que les
cotisations sociales diminuaient(- 2,6 points de PIB).
Les principales hausses concernent les impôts directs. L'impôt sur
les bénéfices des sociétés
a
augmenté de 1,1 point de PIB pour atteindre 2,7 % du PIB en
2002, malgré la quasi-stabilité du taux d'imposition. En fait, la
conjoncture et donc les comptes des entreprises, étaient très
détériorés en 1991. L'impôt sur le revenu des
ménages a augmenté de 3,1 points de PIB pour atteindre 8,4 %
du PIB en 2002. L'impôt sur le revenu lui-même n'augmente que de
0,2 point de PIB, la principale augmentation étant imputable à la
hausse de la CSG et de la CRDS. Créée en février 1991
à 1,1 %, la CSG a subi des hausses successives, compensées
en partie par une diminution des cotisations salariés et non
salariés. La part de ces dernières a été
réduite de 2,0 points de PIB. La politique de réduction des
cotisations patronales depuis 1993 a eu pour effet une diminution de 0,6 point
de leur part dans le PIB. Aux réductions de cotisations sur les bas
salaires de 1993 et 1995, se sont ajoutées récemment les baisses
de charges accordées dans le cadre de la réduction du temps de
travail.
Graphique 2 : Décomposition des recettes fiscales
En % du
PIB
Source : Comptes nationaux INSEE.
Le poids des impôts indirects a été peu modifié. Le
taux normal de TVA est aujourd'hui supérieur d'un point à sa
valeur entre juillet 1982 et juillet 1995. Le champ d'application du taux
réduit (5,5 %) a été étendu, notamment aux
travaux d'entretien dans les logements et les abonnements EDF. Rappelons que la
TVA avait été fortement modifiée pendant les quinze
années précédentes puisqu'elle était passée
de 8,0 % du PIB en 1978 à 8,8 % en 1982 et avait
été réduite à 7,3 % en 1992. Augmentée
en 1996, elle a de nouveau été réduite en 2000. Les autres
impôts sur les produits (TIPP, taxes sur les alcools et les tabacs
essentiellement) ont été assez sensiblement augmentés au
cours de la dernière décennie.
Quelques avantages fiscaux
ont été accordés en faveur des énergies propres et
de l'écologie mais dans l'ensemble, le développement d'une
fiscalité incitant au respect de l'environnement n'a pas
été une priorité des gouvernements qui se sont
succédés dans les années 1990.
II. Analyse des réformes des principaux impôts
1. Impôts sur les entreprises
Le poids de la fiscalité sur les entreprises a été assez peu modifié au cours de la décennie, mais sa structure a sensiblement changé. La taxation des entreprises (sociétés non financières, SNF) représente une part de leur valeur ajoutée (VA) équivalente à celle qu'elle avait 15 ans plus tôt, soit 23,2 % (tableau 4). Le poids des impôts et cotisations sociales s'est réduit entre 1985 et 1992 (notamment en 1986 et en 1991-1992), mais s'est accru par la suite, notamment en 1996 et 1999 où il a atteint un record. En 2000, la part des prélèvements dans la valeur ajoutée des entreprises non financières s'est de nouveau nettement réduite.
Tableau 4 : Répartition des impôts et charges sociales pesant sur les entreprises
En % de la VA des SNF |
1980 |
1985 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
Cotisations sociales employeurs |
15,9 |
16,6 |
15,5 |
15,3 |
15,5 |
15,6 |
15,6 |
15,1 |
15,4 |
15,3 |
15,0 |
15,2 |
14,8 |
Impôts à la production |
3,3 |
3,9 |
3,8 |
3,9 |
4,2 |
4,5 |
4,7 |
4,7 |
5,1 |
5,1 |
5,0 |
4,9 |
4,6 |
Impôts sur le bénéfice |
3,1 |
2,8 |
3,4 |
3,0 |
2,2 |
2,2 |
2,4 |
2,9 |
2,9 |
3,2 |
3,3 |
3,9 |
4,1 |
Total |
22,3 |
23,3 |
22,6 |
22,2 |
21,8 |
22,3 |
22,6 |
22,8 |
23,3 |
23,6 |
23,3 |
24,0 |
23,5 |
Source : Comptes nationaux
La part des cotisations sociales dans la valeur ajoutée, relativement
stable au début des années 1990, s'est nettement réduite
à partir de 1993 : en 8 ans, de 1992 à 2000, elle est
passée de 71 % à 63 % des prélèvements.
C'est le résultat de l'ensemble des politiques de baisse des charges
menées depuis 1993 (voir plus loin). Les impôts, à
l'inverse, ont augmenté, à la fois en termes relatifs, et en
proportion de la valeur ajoutée. Les impôts sur la production ont
beaucoup augmenté pendant la première moitié de la
décennie, et sont passés de 16,7 % de l'ensemble des
impôts sur les SNF en 1990 à 21,7 % en 1996. A la fin de la
décennie, ces impôts ont été réduits de fait
de la diminution de la taxe professionnelle à partir de 1999. Les
impôts sur la production représentent 4,4 % de la VA en 2001
(18,8 % des impôts et charges sur les SNF).
Le gouvernement Jospin a décidé la suppression progressive, de
1999 à 2003, des salaires de l'assiette de la taxe professionnelle, pour
un coût total de 4 milliards d'euros, soit 1/3 du rendement
134
(
*
)
. La nouvelle majorité
élue mi-2002 n'a pas remis en cause la dernière étape de
la réforme : à partir de 2003, la base de la taxe
professionnelle est exclusivement constituée des immobilisations
corporelles (valeur locative des immeubles, matériels, outillages).
Graphique 3 : Décomposition de prélèvements pesant sur les entreprises
En % de la valeur ajoutée des sociétés non financières
Sources : Comptes nationaux, prévision OFCE
L'impôt sur les bénéfices des
sociétés (IS) a subi l'évolution inverse. Il s'est
effondré au début des années 1990, notamment en 1992
où il ne représentait plus que 2,2 % de la VA des SNF et
9,9 % des prélèvements sur les entreprises. Mais
l'impôt sur les bénéfices augmente fortement depuis 1995 et
a atteint un record en 2001 (4,1 % de la VA, soit plus de 18 % de
l'ensemble des impôts et charges). Cet impôt est beaucoup plus
volatile que les autres prélèvements car les
bénéfices imposables varient fortement au gré de la
conjoncture.
Le taux d'imposition a été fortement augmenté au milieu
des années 1990 pour combler les déficits publics et respecter un
déficit de 3 %, comme l'exigeait le traité de Maastricht. Le
taux d'imposition a atteint 41,67 % en 1997 et 1998 (tableaux 5 et 6). La
reprise économique de la fin de la décennie a induit une
très forte croissance du rendement de l'IS. Les taux ont
été progressivement réduits pour atteindre 34,33 % en
2002. Le gouvernement Jospin avait prévu de supprimer totalement la
surtaxe « Juppé » en 2003, ce qui aurait
porté le taux normal d'imposition à 33 1/3, soit le niveau
des années 1993 et 1994, mais le gouvernement Raffarin a finalement
renoncé à diminuer l'impôt sur les sociétés
en 2003 en raison des contraintes budgétaires. Depuis 2000, les
entreprises sont également soumises à la Contribution sociale sur
les bénéfices (CSB) qui finance des exonérations de
cotisations patronales accordées dans le cadre de la réduction du
temps de travail. La CSB s'élève à 3,3 % de
l'impôt sur les bénéfices, soit 1,1 % des
bénéfices imposés au taux normal, diminué d'un
abattement de 762 245 euros. Cet abattement rend la cotisation progressive. Les
PME (entreprises réalisant un chiffre d'affaires inférieur
à 7,63 millions d'euros et détenues directement ou indirectement
par des personnes physiques
135
(
*
)
) sont exonérées de CSB. La CSB est
l'équivalent des cotisations salariés pour le facteur capital.
Mais à la différence de ces dernières, la CSB n'est pas
exonérée d'impôt car elle n'est pas déduite de
l'assiette de l'impôt sur les bénéfices. La non
déductibilité de l'assiette de l'IS a pour but d'éviter
que d'éventuelles hausses de CSB ne pèsent sur le rendement de
l'IS. Par ailleurs, elle ne frappe pas la totalité du capital,
puisqu'elle ne touche pas les intérêts versés,
rémunération du capital emprunté. La montée en
charge de la CSB, initialement prévue pour financer les
exonérations de charges liées à la réduction du
temps de travail, n'a pas eu lieu.
L'imposition des bénéfices en France se caractérise par un
taux élevé relativement aux autres pays de l'Union
européenne, mais une assiette étroite. Certaines mesures prises
ces dernières années ont eu tendance à élargir
l'assiette de l'IS. Le régime de l'amortissement dégressif a
été rendu un peu moins favorable. L'avoir fiscal attaché
aux dividendes reçus par les sociétés non mères a
été réduit en plusieurs étapes de 50 % en 1998
à 15 % en 2002. En 2003, le taux est passé à
10 %. Ces mesures accroissent fortement la double imposition des
bénéfices. Il s'agit de pénaliser les placements purement
financiers des entreprises, dans l'espoir de les inciter à
réaliser des investissements productifs. Il existe un régime
fiscal permettant de percevoir des dividendes en franchise d'impôt
lorsque les participations sont significatives (régime
« mère-filiales »), dont la définition a
été récemment modifiée : le seuil de
participation nécessaire pour bénéficier de
l'exonération est dorénavant de 5 % au lieu de 150 millions
de francs ou 10 % jusqu'à 2000. Ce régime
d'exonération a été maintenu. Mais compte tenu de la
structure actionnariale des grandes entreprises, la réduction de l'avoir
fiscal est très pénalisante : dans la majorité des
cas, les actionnaires n'atteignent pas le seuil de 5 %.
Ces dernières années, les petites entreprises ont
bénéficié d'un certain nombre d'avantages fiscaux,
à commencer par l'exonération de CSB. La loi de finances pour
2001 a introduit un taux réduit de taxation des bénéfices
des PME. A partir de 2002, ce taux est de 15 % sur la fraction des
bénéfices inférieurs à 38 120 euros. Ce taux
bénéficie aux entreprises dont le chiffre d'affaire est
inférieur à 7,63 millions d'euros. D'autres mesures de plus
faible ampleur ont également été prises en faveur des
PME : élargissement du régime de micro-entreprise,
allègement des droits d'enregistrement que doivent acquitter les fonds
de commerce, diminution de la taxe sur les salaires.
Tableau 5 : Taux normal d'imposition des bénéfices des sociétés
1965-1985 |
1986 |
1987 |
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
50,00 |
45,00 |
45,00 |
42,00 |
40,50 |
39,50 |
38,00 |
34,00 |
33,33 |
33,33 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 1 |
2001 1 |
2002 1 |
2003 1 |
|
36,67 |
36,67 |
41,67 |
41,67 |
40,00 |
36,67 + 1,1 |
35,33 + 1,1 |
34,33 + 1,1 |
34,33 + 1,1 |
|
Note 1 : Le « 1,1 » est la contribution sociale sur les bénéfices qui s'ajoute à l'impôt sur les bénéfices pour les grandes entreprises.
Tableau 6 : Taux d'imposition des bénéfices des sociétés, détail
Exercice |
1965-1985 |
1994 |
1995 & 1996 |
1997 & 1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 & 2003 |
Surtaxes , en pourcentage du taux normal (TN) |
||||||||
Juppé |
|
|
10 |
10 |
10 |
10 |
6 |
3 |
Jospin 1 |
|
|
|
15 |
10 |
|
|
|
Taux normal |
||||||||
TN |
50 |
33,33 |
33,33 |
33,33 |
33,33 |
33,33 |
33,33 |
33,33 |
Surtaxes |
|
|
3,33 |
8,33 |
6,67 |
3,33 |
2,00 |
1,00 |
Impôt (IS) |
|
33,33 |
36,67 |
41,67 |
40,00 |
36,67 |
35,33 |
34,33 |
CSB 2 |
|
|
|
|
|
1,1 |
1,1 |
1,1 |
IS + CSB |
50 |
33,33 |
36,67 |
41,67 |
40,00 |
37,77 |
36,43 |
35,43 |
Taux réduit 3 |
||||||||
TN |
15 |
19,00 |
19,00 |
19,00 |
19,00 |
19,00 |
19,00 |
19,00 |
Surtaxes |
|
|
1,90 |
4,75 |
3,80 |
1,90 |
1,14 |
0,57 |
Impôt (IS) |
|
19,00 |
20,90 |
23,75 |
22,80 |
20,90 |
20,14 |
19,57 |
CSB |
|
|
|
|
|
0,627 |
0,627 |
0,627 |
IS + CSB |
15 |
19,00 |
20,90 |
23,75 |
22,80 |
21,53 |
20,77 |
20,20 |
Taux PME 4 (dans la limite de 38 120 euros de bénéfice imposable) |
||||||||
TN |
|
|
|
|
|
|
25,00 |
15,00 |
Surtaxe Juppé |
|
|
|
|
|
|
1,50 |
0,45 |
Impôt (IS) |
|
33,33 |
36,67 |
41,67 |
40,00 |
37,77 |
26,50 |
15,45 |
1. Les
entreprises dont le chiffre d'affaire (CA) est inférieur à 7,63
millions d'euros sont exonérées de surtaxe Jospin.
2. Contribution sociale sur les bénéfices ; les entreprises dont
le CA est inférieur à 7,63 millions d'euros sont
exonérées ; les autres bénéficient d'un abattement
de 762 245 euros.
3. Payable notamment sur les plus-values à long terme mises en
réserve.
4. Applicable aux entreprises dont le CA est inférieur à 7,63
millions d'euros et détenues à 75 % par des personnes
physiques.
Source : Rapport de l'Assemblée nationale sur le projet de loi de
finances pour 2001.
2. Le financement de la protection sociale
Les recettes des Administrations de Sécurité sociale (ASS) ont augmenté de 2 points de PIB entre 1990 et 2000. Malgré des augmentations des taux de cotisations sociales, la part de celles-ci dans le financement des ASS s'est réduite au profit des impôts (tableau 7) : création et montée en puissance de la Contribution sociale généralisée (CSG), mais aussi de la Contribution sociale sur les bénéfices (CSB) et de la Taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). L'objectif de ces réformes fiscales est à la fois de réduire les charges sur le travail et d'élargir le financement de la protection sociale aux revenus de remplacement et d'épargne. Les prélèvements sociaux sur les revenus non salariaux ont nettement augmenté au cours de la décennie 1990.
Tableau 7 : Le financement des Administrations de Sécurité Sociale
|
1980 |
1985 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
Dépenses et recettes des Administrations de Sécurité sociale (en % du PIB) |
|
|
|
|
|||||||||
Dépenses |
20,1 |
22,6 |
21,9 |
22,4 |
23,2 |
24,2 |
24,2 |
24,2 |
24,4 |
24,4 |
24,0 |
23,9 |
23,5 |
Recettes |
21,2 |
23,1 |
22,1 |
22,2 |
22,7 |
23,3 |
23,6 |
23,6 |
23,9 |
23,9 |
23,9 |
24,1 |
24,1 |
Structure du financement (en % des recettes totales) |
|
|
|
|
|
|
|
||||||
Cotisations sociales |
82,3 |
81,4 |
84,4 |
83,5 |
82,7 |
80,8 |
78,6 |
78,3 |
77,7 |
75,4 |
66,7 |
67,2 |
66,6 |
Impôts |
0,5 |
1,2 |
1,6 |
2,9 |
3,5 |
4,8 |
7,1 |
7,1 |
7,2 |
9,8 |
18,9 |
19,1 |
21,6 |
Autres |
17,2 |
17,5 |
14,0 |
13,5 |
13,8 |
14,5 |
14,3 |
14,6 |
15,1 |
14,7 |
14,3 |
13,8 |
11,7 |
Source : Comptes nationaux.
Tableau 8 : Taux de cotisations apparents
|
1980 |
1985 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
Cotisations patronales |
30,4 |
33,1 |
32,7 |
32,2 |
32,9 |
33,1 |
33,3 |
32,5 |
32,7 |
32,7 |
32,5 |
32,7 |
31,5 |
Cotisations salariés |
12,4 |
14,8 |
17,1 |
17,0 |
17,4 |
17,8 |
18,1 |
18,1 |
18,4 |
17,4 |
13,5 |
13,6 |
13,6 |
Note : il s'agit des cotisations versées respectivement
par les SNF et par les salariés en pourcentage de la masse salariale
brute.
Source : Comptes nationaux.
Tableau 9 : les taux de CSG - CRDS
Assiette |
Revenus de remplacement 1 |
Autres revenus |
|||||||||
Bénéficiaire |
CNAF 2 |
FSV 3 |
Maladie |
Total CSG |
CRDS |
CNAF 2 |
FSV 3 |
Maladie |
Total CSG |
CRDS |
|
Février 1991 |
1,1 |
0,0 |
0,0 |
1,1 |
0,0 |
1,1 |
0 |
0 |
1,1 |
0,0 |
|
Juillet 1993 |
2,4 |
0,0 |
0,0 |
2,4 |
0,0 |
2,4 |
0 |
0 |
2,4 |
0,0 |
|
1994 |
1,1 |
1,3 |
0,0 |
2,4 |
0,0 |
1,1 |
1,3 |
0 |
2,4 |
0,0 |
|
Février 1996 |
1,1 |
1,3 |
0,0 |
2,4 |
0,5 |
1,1 |
1,3 |
0 |
2,4 |
0,5 |
|
1997 |
1,1 |
1,3 |
1,0 |
3,4 |
0,5 |
1,1 |
1,3 |
1 |
3,4 |
0,5 |
|
1998 |
1,1 |
1,3 |
3,8 |
6,2 |
0,5 |
1,1 |
1,3 |
5,1 |
7,5 |
0,5 |
|
2001 |
1,1 |
1,15 |
3,95 |
6,2 |
0,5 |
1,1 |
1,15 |
5,25 |
7,5 |
0,5 |
1. Les
revenus de remplacement sont les pensions de retraite et d'invalidité,
ainsi que les allocations chômage et préretraite. Les titulaires
de minima sociaux ou du minimum vieillesse sont exonérés. Les
personnes non imposables titulaires de pensions de retraite ou
d'invalidité ou d'allocations chômage ou de préretraites,
sont exonérées si leur revenu fiscal de référence
est inférieur à un certain seuil (6819 euros pour la
première part du quotient) et taxés au taux réduit de
3,8
%
si leur revenu fiscal est compris supérieur à
ce seuil ;
2. Branche famille de Régime général de
Sécurité sociale ;
3. Fonds de solidarité vieillesse.
Source : Rapports de la Commission des Comptes de la
Sécurité Sociale.
Concernant les cotisations sociales versées à la
Sécurité sociale, les deux faits les plus marquants des
années 1990 ont été la quasi-suppression de la cotisation
maladie payée par les salariés au profit de la CSG et la mise en
oeuvre des exonérations dégressives de cotisations patronales
pour les bas salaires à partir de 1993. A partir de 1997, les baisses de
cotisations patronales ont été renforcées dans les
entreprises ayant signé des accords de réduction du temps de
travail.
Le début de la décennie a été marqué par une
diminution des cotisations salariés pour la retraite (passé de
7,6 à 6,55
% en janvier 1991) et par une hausse du taux de
cotisations salariale pour la maladie de 5,9 à 6,8
% en
juillet 1991. La CSG a été créée en janvier de
cette même année au taux de 1,1
% pour financer la
CNAF (tableaux 9 et 10). La nouveauté de la CSG était
d'être une contribution sociale (non déductible
à l'IRPP) payée par la quasi-totalité des revenus,
alors que traditionnellement, la Sécurité sociale était
payée essentiellement par les revenus du travail. La CSG a
été augmentée de 1,3 point en 1993, pour financer le Fonds
de solidarité vieillesse et d'un point en 1997 pour financer l'assurance
maladie. Entre temps, en février 1996, avait été
créée la Contribution pour le remboursement de la dette sociale
(CRDS) au taux de 0,5
%.
Réduite à 5,5
% au 01/01/1997, la cotisation
salariale maladie a été presque supprimée un an plus tard
(reste 0,75 point finançant les indemnités journalières),
tandis que la CSG était fortement augmentée en 1998 : + 4,1
points sur les salaires et + 2,8 points sur les revenus de remplacement. Cette
substitution a eu pour effet de réduire de 1,205 point les
prélèvements sociaux sur le salaire
136
(
*
)
.
Tableau 10 : Taux de cotisations sociales sur les salaires du secteur privé : CSG, CRDS et Sécurité sociale
|
|
01/01/1982 |
01/01/1992 |
01/01/2002 |
|||
|
Assiette |
Employeur |
Salarié |
Employeur |
Salarié |
Employeur |
Salarié |
CSG et CRDS |
|
|
|
|
|
|
|
Non déductibles |
95 % du salaire brut |
|
-- |
-- |
1,1 |
-- |
2,9 |
Déductibles |
95 % du salaire brut |
|
-- |
-- |
-- |
-- |
5,1 |
Sécurité sociale |
|
|
|
|
|
|
|
Maladie... |
Salaire brut |
8,0 |
5,5 |
12,6 |
6,8 |
12,8 |
0,75 |
|
Salaire sous plafond |
5,45 |
-- |
-- |
-- |
-- |
-- |
Vieillesse, veuvage |
Salaire brut |
-- |
0,1 |
1,6 |
0,1 |
1,6 |
0,1 |
|
Salaire sous plafond |
8,2 |
4,7 |
8,2 |
6,55 |
8,2 |
6,55 |
Famille |
Salaire brut |
-- |
|
5,4 |
|
5,4 |
|
|
Salaire sous plafond |
9,0 |
|
-- |
|
-- |
|
Note : Salaire sous plafond = min (salaire brut ; plafond
de Sécurité sociale).
Ici, on ne comptabilise pas les cotisations d'accident du travail dont le taux
dépend du secteur d'activité.
Source : Liaisons sociales.
Dès le 1
er
juillet 1993, le gouvernement Balladur a mis en
place des exonérations dégressives de cotisations patronales pour
les salaires mensuels inférieurs à 1,2 SMIC avec pour objectif de
réduire le coût du travail, jugé responsable du
chômage des travailleurs les moins qualifiés (encadré). Les
baisses de cotisations ont été étendues jusqu'à 1,3
SMIC et fortement renforcées en 1995 par le gouvernement Juppé.
Le taux de cotisations patronales au niveau du SMIC est donc passé, en
plusieurs étapes, de 40 % au début des années 1990
à 22 % en 1996. La gauche, longtemps hostile à ce type de
mesures favorables au patronat, n'a pas remis en cause ces décisions.
Elle a au contraire accru les réductions de cotisations patronales pour
les entreprises ayant signé un accord de réduction du temps de
travail (RTT). Les entreprises dans lesquelles un accord a été
signé bénéficient dorénavant d'une baisse de
cotisation annuelle de 4 000 francs (610 euros) pour chaque salarié
(quel que soit son niveau de salaire) et de réductions
dégressives qui sont plus élevées que les
réductions prévues par le dispositif Juppé et concernent
les salariés gagnant jusqu'à 1,8 SMIC. En régime de
croisière, le coût de l'aide forfaitaire était
estimé à 6,1 milliards d'euros et l'extension de la ristourne
dégressive devait coûter 3,8 milliards d'euros. Aujourd'hui, le
taux normal de charges sociales et fiscales sur les salaires payées par
les entreprises est d'environ 45 % (en dessous du plafond de
Sécurité sociale), mais il est seulement de 18 % ou
26 % pour les Smicards, selon que leur entreprise a signé un accord
de réduction du temps de travail ou
non. Précisons que les
aides liées à la RTT (« aides Aubry ») sont
exprimées en euros et non en pourcentage du salaire brut, ce qui a pour
conséquence une diminution de l'avantage en % du
SMIC dans le temps, d'autant que le SMIC pris en compte
pour le calcul des seuils n'est pas le SMIC de l'année en cours, mais le
SMIC de 1999, la revalorisation étant décrétée par
le gouvernement. Mais l'opacité sur ce plan est de règle,
d'autant que plusieurs SMIC mensuels coexistent du fait de la réduction
du temps de travail.
La nouvelle majorité a annoncé une modification du dispositif
d'allègements de charges patronales en trois étapes, de 2003
à 2005. Les aides conditionnelles à la mise en place d'un accord
de réduction du temps de travail sont supprimées et la ristourne
« Juppé » est étendue progressivement. A
terme, l'allègement concernera les salaires inférieurs à
1,7 SMIC, ce qui constitue une extension du champ des
bénéficiaires aux salaires compris entre 1,3 et 1,7 SMIC. Le
niveau d'allègement sera supérieur à son niveau
actuel : le taux de cotisations patronales sera réduit de 26 points
au niveau du SMIC contre 18,2 jusqu'en 2002, et à 1,3 SMIC, la ristourne
sera de 11,5 points de cotisations contre 0 avec le dispositif
« Juppé ». Un des corollaires importants de cette
réforme est la perte, pour les entreprises ayant passé des
accords de RTT, de l'aide forfaitaire dont elles bénéficiaient
pour chaque salarié, quel que soit le niveau de
rémunération. Pour les bas salaires, la ristourne aura tendance
à augmenter, même dans les entreprises qui
bénéficiaient des aides « Aubry ».
Les dispositifs d'allègements de charges patronales sur les bas salaires :
-
1 er juillet 1993 : exonérations de cotisations d'allocations familiales pour les salaires inférieurs à 1,1 SMIC (5,4 points) ; réduction de moitié entre 1,1 et 1,2 SMIC. Réduction pour un SMICard : 5,4 points.
1 er janvier 1995 : les seuils sont relevés à 1,2 et 1,3 SMIC respectivement pour l'exonération totale et l'exonération partielle.
1 er septembre 1995 : s'ajoute à la mesure précédente une réduction dégressive de cotisations maladie, totale au niveau du SIMC (12,8 points) et nulle au niveau de 1,2 SMIC. Réduction pour un SIMCard : 18,2 points.
1 er octobre 1996 : les deux mesures fusionnent en une ristourne unique dégressive (« ristourne Juppé ») pour les salaires mensuels inférieurs à 1,33 SMIC.
1 er janvier 1998 : le seuil est abaissé de 1,33 à 1,3 SMIC.
Jusqu'à la mise en oeuvre de la RTT, l'Etat dédommageait la Sécurité sociale du manque à gagner induit par les exonérations de charges sociales en versant des subventions à travers le budget de l'emploi. Le gouvernement Jospin a « débudgété » ces financements en créant un fonds de financement des réductions de cotisations patronales (Forec) dont les ressources sont des impôts affectés (tableau 11). Le précédent gouvernement avait initialement prévu de financer l'aide forfaitaire par des prélèvements sur la Sécurité sociale, les régimes complémentaires et le régime d'indemnisation du chômage. Ces contributions étaient justifiées par les gains faits par ces organismes du fait de la réduction du chômage consécutive à la RTT. Mais ces organismes ont refusé de financer des baisses de charges pour les entreprises. Verser des aides forfaitaires à travers des ristournes de cotisations, elles-mêmes proportionnelles au salaire, n'est pas des plus simple. Une baisse de 3 points aurait été beaucoup plus facile à mettre en oeuvre puisqu'il suffisait de baisser les taux existants sans introduire de circuits supplémentaires 137 ( * ) . La nouvelle Contribution sociale sur les bénéfices (CSB) et la Taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) devaient rapporter chacune 1,9 milliard d'euros à terme pour financer la hausse de la ristourne dégressive. Mais le gouvernement Jospin ne les a pas augmentées comme prévu initialement, et a notamment renoncé à l'extension de la TGAP aux consommations intermédiaires d'énergie. En 2002, ces deux nouveaux prélèvements financent moins de 10 % de l'ensemble des réductions de charges liées à la RTT, le reste étant financé par une modification de l'affectation d'impôts existants : 43 % de recettes détournées du Régime général et du fonds de solidarité vieillesse (alcool, tabac...) et 48 % de recettes fiscales de l'Etat (Dupont, 2001). Cependant l'estimation des charges (15,56 milliards d'euros en 2002) est une estimation ex ante , qui ne prend pas en compte l'effet positif des emplois créés par les 35 heures sur les comptes sociaux.
Tableau 11 : L'équilibre du fonds de financement des réductions de cotisations patronales
En milliards d'euros |
2000 |
2001 |
2002 |
Charges |
11,46 |
14,42 |
15,56 |
Ristournes dégressives jusqu'à 1,3 SMIC |
5,56 |
5,05 |
4,62 |
Allègements 35 heures |
5,90 |
8,80 |
10,46 |
Autres (essentiellement exonérations « Robien ») |
|
0,57 |
0,48 |
Recettes |
9,00 |
14,68 |
15,67 |
Tabac |
5,85 |
8,50 |
7,81 |
Alcools |
1,66 |
2,85 |
2,65 |
TGAP |
0,40 |
0,52 |
0,66 |
CSB |
0,43 |
1,06 |
0,87 |
Contribution de l'Etat |
0,66 |
|
|
Conventions d'assurance |
|
1,05 |
1,45 |
Assurances auto |
|
|
0,95 |
Taxe véhicules de sociétés |
|
0,70 |
0,75 |
Contribution prévoyance |
|
|
0,57 |
Résultat net |
- 2,46 |
+ 0,26 |
+ 0,11 |
Source : Assemblée nationale, rapport Bardet sur la LFSS
2003.
Sur l'ensemble de la décennie, les prélèvements sociaux
sur les prestations vieillesse ont été accrus sensiblement
(tableau 12). Cette évolution a contribué à la baisse en
terme réel des prestations vieillesse nettes dans la décennie
1990.
Tableau 12 : Taux de cotisations sociales sur les pensions de retraite
Evolution en points |
Régime général |
ARRCO AGIRC |
Fonction publique |
Régime de base CANCAVA ORGANIC |
Régime complémentaire CANCAVA ORGANIC |
Dont CSG CRDS |
1990 |
1,4 |
2,4 |
2,65 |
3,4 |
0 |
0 |
Depuis 1998 |
6,7 |
7,7 |
6,7 |
6,7 |
6,7 |
6,7 |
Variation depuis 1990 |
5,3 |
5,3 |
4,05 |
3,3 |
6,7 |
6,7 |
Source : Mesnard (2001).
L'ensemble des mesures prises dans les années 1990 a profondément
modifié la structure du financement de la Sécurité sociale
(tableau 13). En dix ans, la part des cotisations dans le financement du
Régime général est passée de 91 à 62 %,
tandis que les impôts et les taxes représentent aujourd'hui un
tiers des ressources si on compte les versements du FOREC et de la section 1 du
FSV, tous deux entièrement financés par des taxes. Les
gouvernements ont introduit une progressivité des cotisations sociales
patronales qui constitue une inversion radicale par rapport aux cotisations
proportionnelles mais plafonnées de jadis. Le remplacement de
cotisations assises sur le salaire par des contributions portant sur l'ensemble
des revenus se justifie sur le plan de la logique économique et sociale
pour financer les prestations universelles ou de solidarité (famille,
maladie), qui bénéficient à tous les résidents
(Sterdyniak et Villa, 1998). La réforme a été
poussée jusqu'au bout pour les cotisations des salariés, mais pas
pour celles des entreprises, qui continuent à payer des cotisations
famille et maladie assises sur la masse salariale. Au lieu d'une grande
réforme, les gouvernements ont préféré agir par
petites touches : réduction des cotisations sur les bas salaires,
création de la CSB et de la TGAP. La logique du système devient
alors confuse. La croissance des cotisations retraites à la fin de la
décennie 2000 rendra certainement nécessaire une réforme
plus profonde.
Tableau 13 : Structure des ressources du Régime général de Sécurité sociale
En % du total des ressources |
1990 |
1995 |
2000 |
2001 |
Cotisations effectives dont : |
91 |
82 |
63 |
62 |
cotisations employeurs |
62 |
55 |
50 |
49 |
cotisations assurés |
29 |
27 |
13 |
13 |
Impôts et taxes 1 |
2 |
5 |
28 |
29 |
Transferts 2 |
3 |
10 |
5 |
4 |
Contributions publiques 3 |
3 |
2 |
4 |
4 |
1. Y
compris cotisations prises en charge par le FOREC.
2. Y compris cotisations prises en charge par les régimes sociaux (dont
le Fonds de Solidarité Vieillesse).
3. Y compris cotisations prises en charge par l'Etat.
Sources : Comptes de la protection sociale 1990-1996 ; Commission des
comptes de la Sécurité sociale.
La crise du milieu des années 1990 a induit de forts déficits
pour les régimes complémentaires de retraite, qui sont
gérés par les seuls partenaires sociaux. En conséquence,
les cotisations ont été augmentées, ce qui s'est traduit
par de forts excédents à partir de 1998. Le taux de cotisations
contractuel minimum est progressivement passé de 4 % en 1994
à 6 % en 1998 à l'ARRCO (ensemble des salariés du
secteur privé) et de 10 % en 1994 à 16 % en 1999
à l'AGIRC (cadres). En 1993, le taux d'appel de l'AGIRC a
été porté à 125 % (contre 117 %), soit le
même niveau qu'à l'ARRCO. L'accord du 10 février 2000 entre
le Medef et deux syndicats (CFDT et CFTC) n'a pas modifié le taux de
cotisations. Il a consisté à ne prendre aucune décision en
attendant une réforme du Régime général.
Depuis la réduction de l'âge de la retraite en 1982, l'Association
de la structure financière (ASF) finance la retraite à 60 ans
pour les régimes complémentaires. Le taux de cotisation de cette
structure, qui vient en complément des taux de cotisation ARRCO et
AGIRC, a augmenté dans les années 1990 passant de 1,8 %
jusqu'en 1993 à 1,96 % à partir de 1994, pour la part du
salaire inférieure au plafond de Sécurité sociale. En
l'absence d'accord entre les partenaires sociaux sur sa prolongation l'ASF a
été supprimée fin 2000. Elle a été
remplacée, à partir du 01/04/2001, par l'Association pour la
gestion du fonds de financement AGIRC - ARRCO (AGFF). Les cotisations n'ont pas
été prélevées au premier trimestre 2001. Depuis le
second trimestre 2001, le taux de cotisation à l'AGFF est de 2 %.
Tableau 14 : Cas type : cotisations sociales versées pour un salaire égal au plafond de Sécurité sociale (salarié non cadre)
En % du salaire brut |
01/01/1992 |
01/01/2002 |
01/01/2003 |
|||
|
Employeur |
Salarié |
Employeur |
Salarié |
Employeur |
Salarié |
CSG et CRDS 1 |
-- |
1,045 |
-- |
7,6 |
-- |
7,6 |
Sécurité sociale |
27,8 |
13,45 |
28,0 |
7,4 |
28,0 |
7,4 |
Maladie |
12,6 |
6,8 |
12,8 |
0,75 |
12,8 |
0,75 |
Vieillesse, veuvage |
9,8 |
6,65 |
9,8 |
6,65 |
9,8 |
6,65 |
Famille |
5,4 |
-- |
5,4 |
-- |
5,4 |
-- |
Retraite complémentaire 2 |
3,0 |
2,0 |
4,5 |
3,0 |
4,5 |
3,0 |
ASF - AGFF 3 |
1,08 |
0,72 |
1,2 |
0,8 |
1,2 |
0,8 |
Unedic 4 |
3,38 |
1,67 |
3,8 |
2,0 |
4,35 |
2,4 |
Total |
35,26 |
18,885 |
37,5 |
20,8 |
38,05 |
21,2 |
1.
L'assiette étant égale à 95 % du salaire, on
multiplie le taux par 0,95.
2. Dans le cas de l'ARRCO, on suppose que le taux minimum est choisi ; il
faut ajouter les cotisations d'accident du travail, payées par
l'employeur, qui dépendent du secteur d'activité.
3. Structure de financement de la retraite à 60 ans pour les retraites
complémentaires : Association de la Structure Financière
(ASF) jusqu'à 31/12/2000 et Association pour la Gestion du Fonds de
Financement AGIRC - ARRCO (AGFF) à partir du 01/04/2001.
4. Hors ASF, mais y compris cotisations au fonds national de garantie des
salaires.
Sources : Liaisons sociales, Unedic.
Le tableau montre l'évolution des charges sociales entre 1992 et
2003. Pour un salarié non cadre recevant un salaire égal au
plafond de Sécurité sociale (et ne bénéficiant donc
pas des exonérations dégressives de cotisations patronales), le
taux de cotisations a augmenté de 4,2 points entre 1992 et 2002 et de
5,1 points entre 1992 et 2003 : 2,8 points pour les employeurs et 2,3
points pour les salariés.
Les cotisations versées à l'assurance chômage (Unedic) ont
globalement augmenté au cours des années 1990
138
(
*
)
. L'évolution des taux
de cotisations Unedic est très procyclique : les taux ont beaucoup
augmenté entre 1990 et 1993, passant de 4,9 % du salaire brut
à 6,6 %. Puis ils ont été progressivement
réduits à partir de 1997 et jusqu'au premier semestre 2002
où ils ont atteint 5,6 %. Face à l'augmentation très
rapide du déficit de l'assurance chômage en 2002, les taux ont
été fortement augmentés en deux étapes, mi 2002 et
surtout au 1
er
janvier 2003, passant à 6,4 % à
cette date. La répartition de ces cotisations entre employeurs et
salariés a été globalement stable, les employeurs payant
environ 62,5 à 65 % de l'ensemble.
La réforme du financement de la Sécurité sociale a eu pour
conséquence une modification des prélèvements sur les
salaires pour chaque type de risque social (tableau 15). L'élargissement
de l'assiette de financement de l'assurance maladie a permis de réduire
de plus d'un point les prélèvements salariés pour la
maladie. Les prélèvements en faveur de la famille n'ont pas
été modifiés depuis la création de la CSG en 1991.
Ce sont les prélèvements finançant les retraites qui ont
le plus augmenté depuis 1992 : presque 3,8 points de hausse en 10
ans. Les cotisations retraites du Régime général n'ont pas
été modifiées, mais les cotisations des régimes
complémentaires ont fortement augmenté (+2,7 points), et le fonds
de solidarité vieillesse, qui finance les prestations retraite non
contributives, est alimenté depuis 1994 par une partie de la CSG (1,15
point depuis 2001).
Tableau 15 : Cas type : cotisations sociales versées pour un salaire égal au plafond de Sécurité sociale (salarié non cadre) : structure par risque
|
01/01/1992 |
01/01/2003 |
Variation |
||||
|
Employeur |
Salarié |
Total |
Employeur |
Salarié |
Total |
totale |
Maladie |
12,6 |
6,8 |
19,4 |
12,8 |
5,7375 |
18,5375 |
- 0,8625 |
Famille |
5,4 |
1,045 |
6,445 |
5,4 |
1,045 |
6,445 |
0,0 |
Chômage |
3,38 |
1,67 |
5,1 |
4,35 |
2,4 |
6,8 |
1,7 |
Vieillesse veuvage |
13,9 |
9,4 |
23,3 |
15,5 |
11,5425 |
27,0425 |
3,7925 |
Remboursement dette |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,475 |
0,475 |
0,475 |
Total |
35,26 |
18,885 |
54,145 |
38,05 |
21,2 |
59,3 |
5,105 |
Sources : Liaisons sociales, Unedic.
3. Impôt sur le revenu des ménages
Graphique 4 : Impôts et cotisations sociales versés par les ménages (hors TVA)
En % du revenu disponible brut des ménages (y compris les EI)
Sources : Comptes nationaux, prévision OFCE.
Dans les années 1990, l'Impôt sur le revenu des personnes
physiques (IRPP), progressif, a été complété par la
création de la Contribution sociale généralisée
(CSG) et de la Contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS),
impôts proportionnels, affecté respectivement à la
Sécurité sociale et au remboursement de la dette de celle-ci.
Cela a fortement accru la taxation des revenus (tableau 16).
L'impôt sur le revenu des ménages au sens de la
Comptabilité nationale est passé de 4,8 % du PIB en 1990
à 8,5 % en 2000. Cette hausse de 3,7 points est imputable à
la CSG et à la CRDS créées dans les années 1990,
qui atteignent 4,1 % du PIB en 2000 ; pour le reste, l'impôt
sur le revenu a plutôt eu tendance à diminuer.
Tableau 16 : le taux apparent d'impôt sur le revenu
|
1980 |
1985 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
Impôt sur le revenu |
7,3 |
7,8 |
7,6 |
8,0 |
8,3 |
8,3 |
8,4 |
8,2 |
8,6 |
9,2 |
12,7 |
13,1 |
13,2 |
Note : il s'agit de l'impôt sur le revenu au sens de la
Comptabilité nationale (y compris CSG-CRDS) en pourcentage du revenu
disponible brut.
Source : Comptes nationaux.
Les grandes modifications de la taxation des revenus depuis le début des
années 1990 sont les suivantes :
-
Une grande réforme en 1994 qui a simplifié un impôt
très complexe et réduit de moitié le nombre de tranches.
Des baisses de taux à la fin de la décennie.
Une forte diminution des avantages familiaux pour les foyers aisés en 1999.
Une très grande instabilité des nombreux mécanismes d'allègement d'IRPP (dont le nombre a augmenté pendant la première moitié de la décennie et s'est légèrement réduit depuis 1995).
Une réduction des avantages dont bénéficie l'assurance-vie, des mesures en faveur de l'épargne longue et/ou risquée, mais une diminution des seuils en deçà desquels les revenus d'épargne sont exonérés (infra).
La création de la PPE en 2001, impôt négatif conditionnel à l'exercice d'une activité professionnelle et très fortement individualisé (paragraphe 5).
Tableau 17 : Répartition de l'impôt sur le revenu (y compris PPE) par déciles en 2002
Déciles |
1 |
2 |
3 |
4 |
5 |
6 |
7 |
8 |
9 |
10 |
Total |
Impôt payé en 2000 |
0,0 |
0,0 |
0,1 |
1,0 |
2,2 |
3,6 |
5,6 |
8,7 |
14,6 |
64,2 |
100 |
Impôt payé en 2003 (hors PPE 1 ) |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,4 |
1,6 |
2,9 |
4,7 |
7,9 |
13,8 |
68,7 |
100 |
Impôt payé en 2003 (y compris PPE 1 ) |
- 0,2 |
- 1,7 |
- 2,4 |
- 1,7 |
- 0,9 |
2,5 |
4,3 |
7,6 |
14,9 |
75,9 |
100 |
1. PPE.
Note : en 2000, les 10 % de ménages ayant les revenus les plus
élevés payaient 64,2 % de l'impôt sur le revenu
encaissé par l'Etat. En 2003, les 10 % de ménages ayant les
revenus les moins élevés ont touché une PPE
équivalant à 0,2 % du total recettes d'impôts sur le
revenu - PPE versée, tandis que les 10 % les plus aisés ont
payé un IRPP équivalent à 75,9 % de ce total.
Sources : Notes bleues de Bercy, septembre 2001, PLF 2002.
Quelques caractéristiques de l'IRPP en France :
-
Rendement très faible de l'IRPP, assez faible même si l'on ajoute la CSG et la CRDS (rendement inférieur à la moyenne européenne en % du PIB).
Etroitesse de l'assiette du fait des nombreuses exonérations (participation des salariés, de nombreux revenus financiers, les prestations redistributives, les cotisations sociales...) et du mode de calcul (abattements pour frais professionnels et abattement de 20 % sur les salaires et les pensions...).
Forte progressivité (sauf si l'on ajoute la CSG).
Imposition des revenus de l'année précédente, pas de retenue à la source.
Mécanisme du quotient conjugal et familial (avec avantage à partir du troisième enfant), unique en Europe, qui favorise nettement les familles.
Nombre de tranches encore relativement élevé.
Complexité du système (nombreux abattements, CSG en partie déductible en partie non déductible, régime fiscal différent pour les différentes prestations sociales, grande complexité des taxations de l'épargne...
Taxation des revenus d'épargne plus faible que la taxation des revenus du travail, malgré la création de la CSG et de la CRDS (pas spécificité française).
Instabilité des règles.
Tableau 18 : les taux d'IRPP
|
1974 à 1981 1 |
1982 à 1985 |
1986 |
1987 à 1992 |
1993 à 1995 |
1996 à 1998 |
1999 |
2000 |
2001 2 |
2002 |
2000 Juppé 3 |
2002 Fabius 3 |
1 ère tranche |
5 |
5 |
5 |
5 |
12 |
10,5 |
9,5 |
8,25 |
7,5 |
7,05 |
7 |
7 |
2 e tranche |
10 |
10 |
10 |
9,6 |
25 |
24 |
23 |
21,75 |
21 |
19,74 |
20 |
20,5 |
3 e tranche |
15 |
15 |
15 |
14,4 |
35 |
33 |
33 |
31,75 |
31 |
29,14 |
28 |
30,5 |
4 e tranche |
20 |
20 |
20 |
19,2 |
45 |
43 |
43 |
41,75 |
41 |
38,54 |
35 |
40,5 |
5 e tranche |
25 |
25 |
25 |
24 |
50 |
48 |
48 |
47,25 |
46,75 |
43,94 |
41 |
46,5 |
6 e tranche |
30 |
30 |
30 |
28,8 |
56,8 |
54 |
54 |
53,25 |
52,75 |
49,58 |
47 |
52,5 |
7 e tranche |
35 |
35 |
35 |
33,6 |
|
|
|
|
|
|
|
|
8 e tranche |
40 |
40 |
40 |
38,4 |
|
|
|
|
|
|
|
|
9 e tranche |
45 |
45 |
45 |
43,2 |
|
|
|
|
|
|
|
|
10 e tranche |
50 |
50 |
50 |
49 |
|
|
|
|
|
|
|
|
11 e tranche |
55 |
55 |
55 |
53,9 |
|
|
|
|
|
|
|
|
12 e tranche |
60 |
60 |
58 |
56,8 |
|
|
|
|
|
|
|
|
13 e tranche |
|
65 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
1. Il
s'agit de l'année du revenu, l'impôt est payé
l'année suivante.
2. Ces taux prennent pas en compte la réduction de 5 % de
l'impôt sur les revenus soumis au barème, mise en oeuvre à
l'automne 2002 par la nouvelle majorité.
3. « 2000 Juppé » correspond aux taux prévus
pour 2000 dans le plan pluriannuel de réduction des taux de l'IRPP dont
la première étape a été mise en place en 1996 et
qui a été interrompu en 1997 par la nouvelle majorité.
« 2002 Fabius » est le barème applicable aux revenus
de 2002 annoncé en 2000 par le ministre des finances de l'époque,
modifié par la nouvelle majorité.
Source : Piketty (1999), projets de lois de finances.
Les tranches sont globalement indexées sur l'inflation. Entre 1980 et
1992, chacun des 12 seuils a en moyenne été augmenté de
5,7 % par an, soit exactement la hausse moyenne de l'indice des prix
à la consommation (tableau 19). Entre 1993 et 2001, le premier seuil a
été nettement plus augmenté que l'inflation : +
2,5 % par an en moyenne alors que les prix à la consommation
augmentaient de 1,4 % en moyenne. La forte hausse du premier seuil a
concerné l'impôt payé en 1997 : les prix ont
augmenté de 2 % en 1996, alors que la première tranche a
été augmentée de 13,3 %. Les six autres seuils, au
contraire, ont été légèrement sous-indexés
(+ 1,1 % en moyenne entre 1993 et 2001). Ceci a été
favorable aux foyers imposés dans les tranches les plus basses et
défavorable aux foyers imposés dans les tranches les plus hautes.
Tableau 19 : Evolutions annuelles moyennes des seuils de l'IRPP
|
1980-1992 |
1993-2001 |
Prix de consommation |
5,7 |
1,4 |
1 e seuil |
5,7 |
2,5 |
Autres seuils |
5,7 |
1,1 |
Sources : Piketty (1999), Comptes nationaux.
4. L'imposition des revenus du capital
La
fiscalité des revenus financiers en France avait été
progressivement allégée jusqu'en 1992 du fait de l'addition
disparate de mesures visant à favoriser successivement telle ou telle
forme de placements. En 1989, l'instauration de la libre circulation des
capitaux a amené les pouvoirs publics à permettre aux
institutions financières d'offrir un produit totalement
exonéré d'impôt pour l'épargne qui peut
s'évader facilement, c'est-à-dire l'épargne
financière liquide : les SICAV de capitalisation ont
été exonérées de toute taxation. Depuis, un retour
de balancier est intervenu : les SICAV de capitalisation sont de nouveau
imposées ; l'abattement de 1 220 euros a été
réservé aux seules actions ; les privilèges de
l'assurance-vie ont été partiellement remis en cause. Mais la
principale cause de l'alourdissement de la fiscalité sur les revenus
d'épargne dans les années 1990 a été la
création (et l'augmentation) de la CSG et de la CRDS.
Malgré ces évolutions, les revenus d'épargne restent moins
taxés que les revenus du travail, d'autant que les régimes
dérogatoires à l'IRPP sont très nombreux. Les
exonérations, initialement prévues en faveur des ménages
modestes, se sont progressivement multipliées au bénéfice
des plus hauts revenus, ce qui a eu tendance à réduire l'effet
redistributif de la taxation de l'épargne. Mais cette évolution
est justifiée par la concurrence fiscale entre pays européens qui
limite les possibilités d'accroître la taxation de
l'épargne. Théoriquement, l'impôt français
s'applique à l'ensemble des revenus des résidents : pour
échapper à la fiscalité française, les
ménages doivent changer de résidence. Ce type de comportement,
sans devoir être négligé, est évidemment assez
marginal. En revanche, les difficultés de la coordination
européenne concernant les transferts d'information limitent fortement
les capacités effectives des Etats à taxer les revenus
étrangers de leurs résidents. Certains pays de l'Union
européenne (UE) refusent le transfert d'information entre
administrations fiscales. En janvier 2003, un accord de compromis a cependant
été signé, qui a pour objectif de réduire
l'évasion fiscale transfrontalière. Il reste que l'orientation de
l'épargne vers la France pourrait être d'autant plus
pénalisée que les contrôles des revenus d'épargne
sont très supérieurs à ceux de la plupart de nos
voisins : la majorité des pays de l'UE n'obligent pas les
établissements payeurs à déclarer à
l'administration fiscale les intérêts versés.
Le principe général d'imposition des revenus de capitaux
mobiliers est le suivant :
-
Les placements, dit populaires, sont non imposables (épargne
réglementée : livret A, Codevi...), dans la limite de
certains plafonds relativement bas.
Les produits de placement à revenu fixe (intérêts) sont soit intégrés au barème de l'IRPP, soit soumis à un prélèvement libératoire de 15 %, selon le choix du contribuable.
Les revenus des placements à revenu variable (dividendes) sont intégrés au revenu imposable avec un avoir fiscal qui supprime la double imposition (impôt sur les bénéfices et IRPP) et un abattement de 1 220 euros (2 440 pour un couple) 139 ( * ) . Ces abattements ont été récemment supprimés pour les foyers fiscaux imposés au taux marginal supérieur. Cet abattement était également valable pour les placements à revenu fixe jusqu'en 1995, mais a été supprimé à partir de 1996.
Les plus-values de cessions de valeurs mobilières sont imposées à un taux forfaitaire de 16 %. Si la valeur des cessions est inférieure à un certain seuil, les plus-values sont exonérées. Ce seuil a été fortement réduit dans la seconde moitié des années 1990 : il valait 342 800 francs en 1995 et seulement 50 000 francs (7 622,45 euros) à partir de 1998. En 2002, il a été augmenté à 7 650 euros.
Au-delà des innombrables modifications des paramètres (abattements, plafonds, taux de réduction...), les années 1990 ont été marquées par la réduction des avantages fiscaux en faveur de l'assurance-vie, et par l'incitation à l'épargne risquée et à l'épargne salariale.
La réduction d'impôt sur les primes versées dans les contrats d'assurance-vie (¼ des primes dans la limite de 4 000 francs majorée de 1 000 francs par enfant à charge) a été supprimée en deux temps (1995 et 1996). Par ailleurs, la loi de finances pour 1998, a supprimé l'exonération des produits de l'assurance-vie dont bénéficiaient les contrats au-delà d'une durée de détention de 6 ans (pour les contrats souscrits entre 1983 et 1989) ou de 8 ans (pour ceux souscrits à partir de 1990). Dorénavant, au-delà de 8 ans de détention, les produits sont imposés à 7,5 %. L'épargnant bénéficie cependant d'un abattement annuel de 4 600 euros (9 200 euros pour un couple marié). Compte tenu de cet abattement, la possibilité de rachats partiels permet dans une grande mesure de supprimer l'imposition.
La loi de finances pour 1998 a créé les contrats en unités de compte (dits contrats « DSK »), dont l'unité de compte est la part d'un OPCVM dont l'actif est constitué pour 50 % au moins d'actions ou titres assimilés, dont 5 % de titres à risque. Les produits des contrats DSK bénéficient d'une exonération totale. Cette mesure est destinée à favoriser les placements en action et le capital risque. Les dispositifs en fonction de l'épargne à risque ont été accrus à la fin de la décennie 1990 par la création des Fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI, loi de finances pour 1997) et des Bons de souscription de parts de créateurs d'entreprises (BSCPE, loi de finances pour 1998). Les FCPI constituent une dérogation au régime des Fonds communs de placements à risque (FCPR), qui existent depuis 1983. Les FCPR sont constitués d'au moins 50 % d'actions non cotées ou cotées au nouveau marché, dont le siège se trouve dans un Etat de l'Union européenne. Les produits des FCPR immédiatement réinvestis et les plus-values sont exonérés. Les FCPI sont des FCPR dont 60 % au moins du portefeuille est constitué de titres de petites sociétés non cotées, innovantes, et majoritairement détenues par des personnes physiques. Les placements dans les FCPI offrent une réduction d'impôt de 25 % dans la limite de 12 000 euros ( le double pour un couple). Les BSCPE sont des stocks-options (encadré) à fiscalité allégée en faveur des sociétés jeunes (moins de 15 ans). L'objectif est de favoriser l'émergence de nouvelles sociétés à fort potentiel de croissance mais qui n'ont pas les moyens de verser des rémunérations élevées. Les entreprises concernées sont les sociétés non cotées et les sociétés cotées sur les marchés européens des valeurs de croissance.
Hormis la création des BSCPE, la fiscalité des stocks-options (SO) a été modifiée plusieurs fois au cours des années 1990. La loi de finances pour 1995 a réduit les avantages fiscaux en faveur des SO, alors que la réforme de mai 2000 rendu la fiscalité des SO progressive et a introduit une incitation fiscale en faveur de la conservation des actions acquises par la réalisation de l'option.
La fiscalité des stock-options
Les
stock-options
(SO) sont un mode d'intéressement lié
à l'évolution de la valeur boursière de l'entreprise. Le
détenteur de
stock-options
a la possibilité d'acheter des
actions de sa société à un prix fixé pendant la
période dite d'attribution. Lors de la levée de l'option,
l'entreprise prend à sa charge la « plus-value
d'acquisition », PVA, c'est-à-dire la différence entre
le prix d'achat de l'action au moment de la levée de l'option et le prix
effectivement payé par le détenteur de l'option*. La plus-value
d'acquisition est une rémunération pour le dirigeant, qui
devient, de ce fait, sensible à la valeur de l'entreprise. Si l'action
est conservée après la levée de l'option et revendue plus
tard, le bénéficiaire peut réaliser une
« plus-value de cession » au moment de la vente de ses
actions si le prix de vente est supérieur au prix d'achat de l'action.
La rémunération que procure les
stock-options
est
aléatoire puisqu'elle dépend de l'évolution de la valeur
financière de la firme. Mais avant la levée de l'option, le
bénéficiaire d'un plan de
stock-options
ne peut pas perdre
de l'argent.
Supposons qu'une action vaut 100 aujourd'hui. L'entreprise autorise à un
dirigeant d'acquérir une quantité donnée d'actions au prix
de 90 dans les 5 ans à venir. On dit que l'entreprise accorde un
« rabais » de 10 %. Au bout de deux ans, l'action vaut
110 et le dirigeant décide d'exercer son option, c'est-à-dire
d'acheter l'action. La plus value d'acquisition (PVA) est donc de 20 (110 -
90). Si le dirigeant revend instantanément les actions qu'il a acquises
ainsi, il n'encourt pas de risque. S'il attend pour revendre l'action, il
risque de perdre de l'argent au cas où le cours de l'action diminue. Si
le cours continue à augmenter, et si le détenteur de l'action la
revend 120 euros, il enregistre une plus value de cession (PVC) de 10 (120 -
110). C'est au moment de cette cession que s'effectue la taxation de la PVC,
mais aussi de la PVA.
La plus-value de cession est soumise au régime normal des plus-values
sur valeurs mobilières : soit un taux de prélèvement
de 16 % au-dessus d'un seuil de 7 650 euros de cession auquel s'ajoutent
10 % de contributions sociales. Le taux de prélèvement sur
la plus-value d'acquisition dépend de la durée
écoulée entre la date d'attribution et la date de cession de
l'action. Le prélèvement est effectué l'année de la
cession. Si l'action est revendue avant la fin de la période dite
d'indisponibilité (cinq ans avant 2000, quatre ans après), le
bénéficiaire est imposé au barème progressif de
l'IRPP. La progressivité est réduite selon le mécanisme du
quotient en fonction de la durée écoulée entre la date
d'attribution de l'option et la revente des titres. Pour un ménage qui
se situe dans la tranche marginale supérieure d'imposition sur le revenu
(à 49,58 % en 2003), le taux de prélèvement se situe
entre 50 et 60 % si la cession a lieu avant cinq années pleines.
Avant 1990, si l'action était revendue après la période
d'indisponibilité, la PVA était exonérée
d'impôt, bien qu'en cas de cession immédiate après la
réalisation de l'option, le risque financier soit nul. Les avantages
fiscaux des stock-options sont censés favoriser la prise de risque et
l'innovation, éléments essentiels de la croissance
économique. Cependant, les SO peuvent être utilisés comme
un mode de rémunération sans risque de perte et très
avantageux fiscalement. C'est pourquoi l'écart avec la taxation des
salaires a été réduit dans les années 1990.
Tableau 20 : La taxation des plus-values d'acquisition
Durée entre l'attribution de l'option et la cession des actions |
Prélèvements sociaux |
IRPP |
Total |
Options attribuées entre le 20/09/1995 et le 26/04/2000 |
|||
- 5 ans |
Assimilé à un salaire* |
52 à 63 |
|
+ 5 ans |
10 |
30 |
40 |
Options attribuées à partir du 27/04/2000 |
|||
- 4 ans |
Assimilé à un salaire* |
52 à 63 |
|
+ 4 ans |
On distingue deux situations : |
||
1) Actions conservées moins de deux ans |
|||
PVA 152 500 euros |
10 |
30 |
40 |
PVA > 152 500 euros |
10 |
40 |
50 |
2) Actions conservées plus de deux ans |
|||
PVA 152 500 euros |
10 |
16 |
26 |
PVA > 152 500 euros |
10 |
30 |
40 |
Bons de souscription de parts de créateurs d'entreprises (BSPCE) |
|||
Durée d'activité dans l'entreprise au moment de la cession |
|||
- 3 ans |
10 |
30 |
40 |
+ 3 ans |
10 |
16 |
26 |
* Dans le cas où la PVA est requalifiée en salaire, le taux de taxation de la PVA est le suivant : |
|||
Salaire annuel |
Cotisations sociales |
IRPP |
Total |
0,5 MF (75 000 euros) |
20 |
32 |
52 |
1 MF (150 000 euros) |
16 |
47 |
63 |
1,5 MF (225 000 euros) |
8 |
51 |
59 |
Note
: les calculs sont effectués sur la base d'un barème
inchangé (taux marginal à 54 %) de façon à ne
montrer que l'effet de la modification de la fiscalité des SO.
Source : Dupont &
alii
,(2000).
A partir de 1990, les PVA des SO cédées au-delà de 5 ans
n'ont plus été exonérées, mais taxées
à 16 %. Ce taux a été porté à 30 %
en 1995. Avant la réforme de 2000, le taux de prélèvement
total s'établissait donc à 40 % (30 % d'impôt sur
le revenu et 10 % de contributions sociales) au-delà du
délai de cinq ans. La loi interdit les rabais supérieurs à
20 %. Tout rabais supérieur à 5 % est dit
« excédentaire » : la partie du rabais qui
excède 5 % est considérée comme du salaire et
imposé comme tel, et non au taux de la PVA.
La double réforme décidée par le gouvernement Jospin
(BSPCE et nouvelles régulations économiques) avait pour objectif
de concilier une plus grande justice sociale (progressivité), le
renforcement de l'incitation à la prise de risque (portage et BSCPE) et
l'amélioration de la compétitivité fiscale de la France
(taux à 26 %). La période d'indisponibilité a
été réduite à 4 ans mais une progressivité a
été introduite dans l'imposition des plus-values
d'acquisition : désormais, la partie de la plus-value
supérieure à 150 000 euros est soumise à un taux
spécifique supérieur de 10 points au taux normal ; ceci
accroît le taux de prélèvement sur les plus-values
importantes au-delà de la quatrième année. Toutefois, si
le détenteur des stock-options conserve ses actions (portage) pendant au
moins deux ans après la réalisation de ses options, il
bénéficie d'une réduction de la fiscalité :
les deux taux sont réduits respectivement à 16 % et
30 % (+ 10 % de contributions sociales). Le portage a l'avantage
d'inciter les bénéficiaires à conserver des actions de
l'entreprise donc à supporter un vrai risque.
Les dispositifs d'épargne salariale consistent en des incitations
fiscales en faveur de l'épargne à long terme constituée
dans le cadre de l'activité. Les avantages fiscaux en faveur de
l'épargne salariale ont récemment été
étendus par la création du Plan partenarial d'épargne
salariale volontaire (PPESV) et du Plan d'épargne inter-entreprise
(PEI). Ces dispositifs complètent les Plans d'épargne entreprise
(PEE) créés en 1967. Les avantages fiscaux des PEE sont
élevés puisque lorsque les fonds sont bloqués au moins 5
ans, les versements effectués par l'entreprise sont
exonérés de cotisations sociales et d'impôt sur le revenu
(mais pas de prélèvements sociaux) sous un plafond de 2 300 euros
par an
141
(
*
)
, ainsi que
les revenus accumulés. Les versements des salariés,
limités au quart de leur rémunération brute, ne sont
exonérés que s'il s'agit des sommes issues de
l'intéressement. Les PEE ne concernaient en pratique que les grandes
entreprises. La création des PEI a pour objectif de
généraliser l'épargne salariale aux PME. Les PPESV sont
très proches des PEE. Le plafond est double, mais le blocage des fonds
est de 10 ans. L'abondement des entreprises bénéficie des
mêmes avantages fiscaux que pour les PEE et ouvre, en plus, droit
à une provision de 25 % à l'impôt sur les
sociétés (soit une réduction de 8,3 % des sommes
versées). Devant les inquiétudes des syndicats et des
gestionnaires de caisses de Sécurité sociale sur la perte de
recettes sociales pouvant être induite par le projet, les parlementaires
ont décidé que la part de l'abondement patronal qui
dépasse 2 300 euros par an sera soumise à une contribution au
taux de 8,2 %, versée au Fonds de solidarité vieillesse.
S'agissant des revenus d'épargne, la grande innovation des années
1990 est l'introduction de la CSG et de la CRDS, qui a fortement
augmenté les prélèvements sociaux : création
de le CSG en 1991 et de la CRDS en 1996, augmentation du taux de CSG en 1993,
1997 et 1998, élargissement du champ d'application de la CSG sur les
revenus d'épargne en 1997. En 1998, les prélèvements sur
les revenus de valeur mobilière non soumis à
prélèvement libératoire (1 % en faveur de la CNAVTS
et 1 % en faveur de la CNAF) ont été fusionnés et
leur assiette a été élargie à celle de la CSG.
L'ensemble des revenus d'épargne est aujourd'hui soumis à
10 % de prélèvements sociaux. Contrairement à
l'impôt sur le revenu, la fiscalité sociale sur l'épargne
connaît très peu de régimes dérogatoires puisque
seules six catégories de produit d'épargne
réglementée
142
(
*
)
sont exonérées. Cette augmentation de
la fiscalité sociale permet de réduire l'écart de taxation
entre revenus d'épargne et revenus du travail, mais elle porte atteinte
à la compétitivité des produits d'épargne
français.
La fiscalité française taxe non seulement les revenus du capital,
mais aussi les patrimoines eux-mêmes. Les trois impôts sur le
patrimoine français sont l'Impôt de solidarité sur la
fortune (ISF), les droits de mutations et les taxes foncières.
L'impôt sur les grandes fortunes, introduit par la gauche au début
des années 1980, taxait les gros patrimoines. Il a été
supprimé entre 1986 et 1988. Réinstauré sous le nom
d'Impôt de solidarité sur la fortune (ISF) après le
changement de majorité, il n'a pas été de nouveau remis en
cause. Au contraire, le gouvernement Juppé l'a augmenté en
limitant les possibilités de réduction d'impôt pour les
foyers dont le cumul entre l'impôt sur le revenu et l'ISF
dépassait 85 % du revenu. Depuis 1997, le barème de l'ISF
n'est plus indexé sur les prix, ce qui induit une augmentation
réelle de l'impôt. En 1999, les taux ont été accrus
et une sixième tranche a été introduite au taux de
1,8 %, qui constitue depuis lors le taux marginal maximal. Du fait de ces
augmentations, le rendement de l'ISF, qui équivalait à 0,9 %
du PIB en 1990, atteint 2,5 % du PIB en 2002. A l'inverse, les droits de
mutation à titre onéreux ont été sensiblement
réduits, passant de 0,56 % du PIB en 1990 à 0,03 % du
PIB en 2002. Les droits de mutation sur les acquisitions de logements et de
terrains à bâtir ont été fortement
allégés fin 1998 et fin 1999
143
(
*
)
.
5. Mesures d'incitation au travail des non qualifiés
A la fin
des années 1990, des mesures fiscales d'incitation à la recherche
d'emploi pour les inactifs et les chômeurs ont été mises en
place. Jusqu'à présent, la politique économique cherchait
essentiellement à augmenter la demande de travail (par exemple en
réduisant les cotisations patronales pour diminuer le coût du
travail et inciter ainsi les entreprises à embaucher). Les débats
d'experts et les politiques mises en oeuvre dans certains pays de l'OCDE ont
fait apparaître le problème du faible intérêt
financier à travailler au SMIC (à temps partiel) compte tenu des
prestations sociales de solidarité dont bénéficient les
exclus du marché du travail.
Un certain nombre de mesures ont donc été prises pour
réduire les trappes à inactivité, c'est-à-dire
à augmenter l'écart entre le revenu des travailleurs à bas
salaire et les prestations d'assistance, sans diminuer ces dernières et
sans accroître le coût du travail, bien que l'effet sur l'emploi de
ce type de mesures soit loin d'être clair (chapitre 5). Les Smicards
à temps plein profitent de ces mesures, alors que, les exclus du
marché du travail (chômeurs, Rmistes, retraités modestes)
en bénéficient peu (puisque l'objectif de ces dispositions est de
favoriser l'activité). Il ne s'agit donc pas de mesures redistributives,
même si ce sont les salariés modestes qui en
bénéficient. Le mode de calcul des allocations logement a
été réformé. Les dégrèvements de taxe
d'habitation dont bénéficient les bas revenus ont
été revus de façon à ne pas pénaliser les
salariés à bas revenus par rapport aux
bénéficiaires de minima sociaux (infra). Les taux du bas du
barème de l'IRPP ont été sensiblement modifiés et
le mécanisme de la décote a été modifié.
Enfin, les possibilités de cumul entre RMI et salaire ont
été renforcées. Mais la principale nouveauté est la
création de la Prime pour l'emploi (PPE) le 30 mai 2001.
Initialement, le projet adopté par le Parlement était la
suppression de la CSG-CRDS pour les Smicards et sa réduction pour les
bas salaires. Cette mesure a été refusée par le Conseil
constitutionnel car elle instituait une progressivité de la CSG
(considérée comme un impôt sur le revenu) sans prendre en
compte la structure du foyer fiscal, ce qui a été jugé
pénalisant pour les familles. La réduction dégressive de
CSG-CRDS a donc été remplacée par une prestation
versée par le fisc (ou venant en déduction de l'impôt sur
le revenu payé).
La prime est calculée sur la base du revenu d'activité
individuel. La structure familiale est prise en compte par des majorations. Un
plafond sur l'ensemble du revenu fiscal du foyer (11 972 euros pour une
personne seule en 2003) évite que la prime ne soit versée
à des salariés ayant de faibles revenus du travail et
d'importants revenus de placement et/ou un conjoint ayant un revenu
d'activité élevé. La prime est maximale pour les
salariés au SMIC pour lesquels elle représente 4,4 % du
salaire imposable. Au-delà d'une rémunération horaire au
SMIC, la prime est décroissante jusqu'à 1,4 fois le SMIC et nulle
ensuite. Elle est également nulle pour les salariés à
temps partiel très court (lorsque le revenu d'activité est
inférieur à 0,3 SMIC). La coexistence de plusieurs garanties
mensuelles complique le dispositif. En 2003, la prime est maximale (478 euros)
pour un Smicard bénéficiant de la deuxième garantie
mensuelle de rémunération, c'est-à-dire si son entreprise
est passée à 35 heures entre juillet 1999 et juin 2000. Un
Smicard à 39 heures reçoit 443 euros. Le gouvernement Jospin
avait prévu que la prime augmente de 50 % en 2003, mais le nouveau
gouvernement n'a conservé cette augmentation que pour les
salariés à temps partiel inférieur à 50 %. A
temps plein, la prime n'est pas modifiée, et la PPE des salariés
qui travaillent entre 50 et 100 % du temps plein augmente de moins de
50 %. La modification du dispositif en 2003 est donc globalement favorable
aux temps partiels.
Des majorations familiales sont introduites, de montant très faible et
arbitraire : 79 euros par an pour un conjoint inactif en 2003, 32 euros
par an par enfant, 64 euros pour le premier enfant d'un parent isolé.
Rappelons à titre de comparaison que les allocations familiales sont de
1 329 euros annuels pour les deux premiers enfants (soit 664 pour chacun),
auxquels il faut ajouter 1 702 euros par enfant à partir du
troisième. Pour un couple sans enfants, si l'un des conjoints est au
SMIC à mi-temps en 2002 et si l'autre personne est à plein temps
avec un revenu de 1,5 SMIC, le couple touchera une PPE de 322 euros fin 2003.
La prime sera presque trois fois supérieure (886 euros) si les deux
conjoints ont un emploi à temps plein au SMIC, bien que leur revenu
total soit identique
144
(
*
)
. Si l'un gagne le SMIC et l'autre 2 SMIC, la prime
est de 443 euros alors qu'elle est nulle si les deux gagnent 1,5 SMIC. Il
s'agit bien d'une subvention à l'emploi, et non d'un
élément de la fiscalité. Sinon, comment justifier qu'un
couple avec 2 enfants reçoive 586 euros s'il a un salaire au SMIC ;
950 euros s'il bénéficie de deux salaires au SMIC ? La
mesure est peu généreuse pour les familles avec enfants et ne
prend pas en compte des charges de famille. On peut se demander si le Conseil
constitutionnel aurait validé une telle mesure s'il avait
été saisi. La nouvelle prime est annuelle et non mensuelle, ce
qui ne peut que nuire à son impact incitatif : une personne qui
retrouve un emploi en janvier 2002 ne la touchera qu'en novembre 2003. Elle
accroît la charge de travail de l'administration fiscale en compliquant
un système déjà particulièrement peu simple. Pour
atteindre le même objectif d'incitation à l'emploi, il aurait
été préférable de mettre en place une ristourne
dégressive de cotisations salariales (ce qui est identique à ce
qui était initialement prévu pour la CSG-CRDS) remboursée
par l'Etat aux caisses de Sécurité sociale. La hausse de salaire
net aurait été instantanée (chaque mois). Le plafond
global de ressources ne pouvait plus être pris en compte, mais la hausse
de revenu induite par la mesure aurait été imposée au
barème progressif. Parallèlement, une hausse des allocations
familiales était possible, y compris le versement d'allocations
dès le premier enfant.
6. La fiscalité indirecte
La fin
des années 1980 et le début des années 1990 ont
été orientés par les décisions européennes.
La directive n°92-77 du 19 octobre 1992 a fixé des niveaux minimaux
à 15 % pour le taux normal et 5 % pour le taux réduit
et défini le champ d'application de ce dernier. Par anticipation de la
directive européenne, le taux majoré de 33 % a
été réduit à la fin des années 1980
(28 % en 1988 ; 25 % en 1990) et complètement
supprimé en avril 1992. Le taux intermédiaire a également
disparu et les taux réduits ont été unifiés. Au
total, cela a réduit les recettes nettes de TVA de 8 % (Conseil des
impôts, 2001).
Actuellement, le taux normal vaut 19,6 % et le taux réduit vaut
5,5 %. Le taux normal est passé de 18,6 % à 20,6 %
en 1995 et a été diminué d'un point mi-2000. Il y a
également un taux super réduit de 2,1 % qui s'applique,
notamment, aux publications de presse et aux médicaments remboursables
par la Sécurité sociale. Des taux particuliers sont applicables
en Corse et dans certains départements d'outre-mer (Guadeloupe,
Martinique, Réunion). Le taux réduit de 5,5 % concerne la
plupart des produits alimentaires ou agricoles, certains produits tels que ceux
destinés à la consommation animale, les médicaments non
remboursables, les livres ainsi que certaines prestations de services
(fourniture de logement, fourniture de repas aux cantines d'entreprise,
transports de voyageurs, certains spectacles). Son champ a récemment
été étendu (en respect de la directive
européenne) :
A la fin de la décennie, des mesures ciblées ont
été prises pour stimuler l'emploi (réductions en faveur
des secteurs économiques utilisant abondamment de la main-d'oeuvre) ou
avec un objectif social. Les principales activités qui ont
récemment pu bénéficier du taux réduit sont :
-
Opérations de construction de logements sociaux à usage
locatif, LFI 1997.
Travaux d'amélioration des logements sociaux, LFI 1998.
Abonnements au gaz et à l'électricité, LFI 1999.
Collecte et tri sélectif de déchets ménagers, LFI 1999.
Travaux portant sur les locaux à usage d'habitation achevés depuis plus de deux ans, LFI 2000.
Services à la personne, LFI 2000.
Equipements de production d'énergies renouvelables des particuliers, paquet fiscal 2001-2003.
La Taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) est une accise qui taxe les consommations de produits pétroliers et représente grosso modo 150 % du prix hors taxe. Les recettes de TIPP représentent 1,81 % du PIB en 2000, comme en 1989. En 1992, elles étaient descendues à 1,7 % du PIB et étaient montées à 1,9 % en 1994. Les taux de TIPP sont indexés pour prendre en compte l'inflation. En 1998, le gouvernement avait prévu un relèvement progressif de la TIPP sur le gazole (7 centimes par an) destiné à atténuer en 7 ans son avantage fiscal par rapport au supercarburant en comparaison de ce qui se pratique en Europe. Une partie de la hausse est remboursée aux transporteurs routiers. Par contre, la TIPP sur l'essence sans plomb n'a pas été augmentée depuis 1999, ce qui induit une baisse relative de son prix. L'augmentation des cours du pétrole en 2000 et les revendications corporatistes qui ont suivi ont poussé le précédent gouvernement à réduire la fiscalité sur les carburants pesant sur les professions revendicatrices. L'augmentation prévue de la TIPP sur le gazole a été supprimée et la taxation du fioul domestique réduite de 30,4 %. Par ailleurs, a été mis en place un mécanisme de stabilisation de la fiscalité sur les carburants par le biais d'une modulation de la TIPP destinée à compenser les augmentations de TVA consécutives aux hausses de prix. Ce dispositif de « TIPP flottante » a été abandonné par la nouvelle majorité fin 2002.
La fiscalité sur le tabac a été considérablement accrue au cours des années 1990. Le produit du droit de consommation tabac a augmenté de 250 % en euros constants entre 1991 et 2001, malgré une diminution de 14 % de la consommation de cigarettes. Les recettes de droits sur le tabac sont passées de 0,3 % du PIB à 0,6 % en 2001. Les plus fortes hausses ont eu lieu en 1993 et 1994 (augmentation du prix de 13 à 15 %) et en 2003. La hausse des taxes sur le tabac permet d'augmenter les recettes de l'Etat ou de la Sécurité sociale tout en réduisant la consommation de tabac. Selon l'INSEE, l'augmentation de 1 % du prix des cigarettes réduit la consommation de 0,3 %. Elle risque cependant de stimuler le trafic parallèle et le commerce frontalier.
7. La fiscalité locale
Entre la
fin des années 1970 et le milieu des années 1990, les
impôts locaux ont augmenté continuellement en proportion du PIB,
passant de 3,1 % en 1978 à 5,7 % en 1996 (y compris transfert
de recettes fiscales, tableau 21). Cette évolution a
coïncidé avec une augmentation des dépenses des
administrations locales, passées de 7,6 % du PIB en 1978 à
10,1 % en 1996. La première moitié des années 1990 a
été marquée par une augmentation d'un point des
dépenses locales en proportion du PIB, financée essentiellement
par une hausse des impôts locaux. Après deux années de
stabilité en 1997 et 1998, les impôts locaux ont augmenté
beaucoup moins vite que le PIB à partir de 1999, pour atteindre
5,1 % du PIB en 2001. Les taux des quatre impôts locaux
directs
145
(
*
)
ont
augmenté en moyenne de 2,5 % entre 1993 et 1996, mais de seulement
1,3 % en 1997, de 0,8 % en 1998 et de 0,4 % en 1999, et se sont
stabilisés en 2000 et 2001
146
(
*
)
. La croissance des taux d'imposition a de nouveau
été plus forte en 2002 (+ 2,1 %).
Outre ces évolutions de taux, décidées par les
collectivités, les principales mesures concernant la fiscalité
locale ont été prises par le gouvernement Jospin à partir
de 1999 : de 1999 à 2003, suppression progressive de la part
salariale de l'assiette de la Taxe professionnelle (TP) ; en 1999, forte
baisse des Droits de mutation à titre onéreux (DMTO) ; en
2000, la réforme de la taxe d'habitation (TH) et suppression de la part
régionale de la TH ; en 2001, suppression de la vignette automobile
sur les particuliers. Des réformes de la fiscalité locale avaient
été votées au début des années 1990, mais
n'ont jamais été appliquées : impôt
départemental sur le revenu (1990), révision des valeurs
locatives sur lesquelles sont fondées taxe d'habitation et taxe
foncière (1991).
Tableau 21 : Les ressources des administrations publiques locales
|
1978 |
1990 |
1996 |
2001 |
||||
|
% du PIB |
% du total |
% du PIB |
% du total |
% du PIB |
% du total |
% du PIB |
% du total |
Impôts (hors transferts de RF) |
2,8 |
41 |
4,1 |
46 |
4,8 |
47 |
4,2 |
41 |
Transferts de recettes fiscales (RF) |
0,3 |
4 |
0,7 |
8 |
0,9 |
9 |
0,9 |
9 |
Autres recettes |
3,7 |
54 |
4,2 |
47 |
4,5 |
44 |
5,1 |
50 |
Total |
6,8 |
100 |
9,0 |
100 |
10,2 |
100 |
10,1 |
100 |
Source : Rapport économique et financier 2002 et 2003.
La loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la
simplification de la coopération intercommunale a induit un fort
développement des groupements de communes à fiscalité
propre. La part des bases de TP soumises au régime de « taxe
professionnelle unique » est par exemple passée de 7 % en
1999 à 46 % en 2002. Cette évolution a pour
conséquence une profonde modification de la répartition des
recettes fiscales entre collectivités.
Les baisses d'impôts locaux décidées par le gouvernement
Jospin ont tendance à grignoter l'autonomie budgétaire des
administrations locales. Pour les quatre taxes directes locales, la part prise
en charge par l'Etat est passée de 22 % en 1999 à
33,5 % en 2002. Les collectivités locales, comme la
Sécurité sociale, voient leurs ressources propres progressivement
érodées par des réformes successives qui restreignent peu
à peu leur autonomie de financement. En outre, la logique même des
contraintes globales que fait peser sur le solde des administrations publiques
le pacte de stabilité européen, de même que celle des plans
pluriannuels de finances publiques soumis par le gouvernement aux instances
communautaires, accentuent la domination de l'Etat sur les décisions de
financement et de dépenses des autres administrations publiques.
Cependant, ces mesures n'ont pas porté atteinte aux recettes des
administrations publiques locales car les transferts en provenance de l'Etat
ont augmenté dans le même temps.
La réforme de la taxe professionnelle et la diminution des DMTO ont
été évoquées plus haut. La taxe d'habitation (TH)
est proportionnelle à la valeur locative du logement, avec des
abattements (pour charges de famille) et des dégrèvements (pour
les bas revenus). Comme la valeur locative du logement augmente moins vite que
le revenu, cet impôt apparaît légèrement
dégressif. Etablies dans les années 1970, les valeurs locatives
sont aujourd'hui très injustes. Devant la difficulté d'une
réforme profonde de la TH, le gouvernement Jospin a mis en place des
ajustements à la marge de la taxe afin d'en atténuer les
principaux défauts. En outre, la part régionale de la taxe a
été supprimée pour un coût estimé à
880 millions d'euros. Le rendement de la TH était passé de
14 % de l'IRPP en 1985 à 21 % en 1998. Suite aux mesures, elle
ne représentait plus que 18,6 % de l'IRPP en 2001, malgré la
diminution de ce dernier.
Jusqu'à la réforme de 2000, la taxe d'habitation comportait un
système de dégrèvements à la fois compliqué
(quatre dispositifs étaient empilés) et mal conçu. Les
effets de seuil étaient importants : pour un franc de plus
gagné, la taxe d'habitation pouvait passer de 1 541 à
2 189 francs
.
A revenu égal, les Rmistes ne payaient pas de
taxe d'habitation alors qu'un salarié gagnant un ½ SMIC payait
1 541 francs. Dorénavant, le dégrèvement ne
dépend que du revenu. La taxe d'habitation est plafonnée à
4,3 % du revenu imposable, diminué d'un abattement de 3 533 euros
pour la première part de quotient familial, majoré de 1 021 euros
par demi-part supplémentaire
147
(
*
)
. Les personnes dont le revenu dépasse 16 290
euros (plus 3 806 euros pour la première demi-part supplémentaire
et 2 994 euros pour les demi-parts suivantes) ne bénéficient pas
de dégrèvement. On remarque avec étonnement qu'une famille
avec 2 enfants représente 3 parts fiscales pour l'impôt sur le
revenu, 2,16 pour la limite inférieure de l'exonération de la
taxe d'habitation et 1,78 pour sa limite supérieure. La réforme
du dégrèvement va néanmoins dans le sens d'une
simplification, d'une suppression d'effet de seuil et d'une plus grande justice
fiscale.
8. La fiscalité écologique
La
principale taxe « verte » française est la TIPP.
Pour le reste, la volonté d'utiliser l'instrument fiscal pour favoriser
l'environnement est relativement récente. Lors de la
précédente législature, le gouvernement a renoncé
à ses ambitions initiales dans ce domaine.
On a vu ce qu'il en a
été concernant la TIPP.
Une Taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) a
été mise en place en 1999, regroupant cinq anciennes taxes
fiscales et parafiscales (qui rapportaient déjà 300 millions
d'euros). L'objectif de la fiscalité écologique est d'inciter
à la protection de l'environnement, en application du principe
« pollueur-payeur ». Les recettes de la TGAP sont
affectées au financement des réductions de cotisations patronales
selon le principe du « double dividende ». Une telle
stratégie n'affecte pas globalement les coûts de production, donc
les prix, tout en incitant les entreprises à utiliser plus de travail en
économisant l'énergie et les produits polluants.
Initialement, la TGAP concernait la pollution atmosphérique, le stockage
des déchets ménagers, les déchets industriels dits
spéciaux, les huiles de base et les nuisances sonores (trafic
aérien). En 2000, elle a été étendue aux lessives,
aux grains minéraux naturels, aux produits anti-parasitaires à
usage agricole. En 2001, le gouvernement a mis en place une taxation des
consommations intermédiaires d'énergie, afin de réduire
les émissions de gaz à effet de serre. Les consommations
d'énergie des entreprises sont relativement peu taxées en France,
alors que la plupart des communes et des départements taxent les
consommations d'électricité des ménages et que le fioul
domestique est assez fortement taxé (par rapport aux autres pays
européens). C'est la raison pour laquelle la TGAP-énergie ne
devait concerner que les entreprises. Intégrée à la TGAP,
cela aurait permis d'augmenter son rendement de 600 millions d'euros. La
création de la TGAP-énergie a été interdite par le
Conseil constitutionnel car elle portait atteinte au principe
d'égalité devant l'impôt compte tenu des nombreuses
exonérations et ristournes qui étaient prévues. Ces
réductions de taxes avaient un objectif économique : la
consommation d'énergie est très concentrée sur un nombre
restreint de secteurs. La mise en place uniforme d'une telle accise aurait donc
eu pour conséquence une forte modification des prix relatifs et un
risque de délocalisation des entreprises les plus lourdement
taxées vers les pays moins « verts ». A
défaut d'harmonisation européenne, les exceptions prévues
pouvaient donc se justifier. La plupart des pays ayant décidé
d'accroître les taxes sur les consommations d'énergie ont mis en
place des dispositifs similaires.
En septembre 2000, le gouvernement a décidé la suppression de la
vignette automobile pour les particuliers (soit 1,8 milliard d'euros). Cette
mesure favorise la voiture individuelle au détriment des transports
collectifs. La vignette avait en outre le mérite d'être une taxe
progressive, qui mettait un frein à la montée en gamme, qui
frappait spécifiquement un bien ostentatoire. De plus, les voitures les
plus consommatrices étaient les plus taxées. Enfin, l'avantage
fiscal d'exonération de vignettes, attribuée aux seuls
véhicules non polluants (GPL, électrique), est désormais
caduc. Le gouvernement a donc sacrifié une grande part de sa politique
environnementale en septembre 2000.
Cependant, des incitations fiscales ont été prises en faveur des
énergies alternatives : taux réduit de TVA sur la collecte,
le tri et le traitement des déchets ménagers en 1999,
crédit d'impôt pour l'acquisition d'un véhicule
« propre » (fonctionnant au GPL ou à
l'électricité) ou pour l'achat d'équipements
d'énergie renouvelable tels que les panneaux solaires, etc. en 2000.
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,
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, n° 348.
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n° 212, 5 décembre.
DUPONT G., J. LE CACHEUX, H. STERDYNIAK et V. TOUZÉ, 2000 :
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Revue de
l'OFCE,
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Chapitre 3. 3 : Les réformes fiscales au Royaume-Uni
Gaël Dupont et Catherine Mathieu
Au
Royaume-Uni, les prélèvements obligatoires sont parmi les plus
bas de l'UE : 37,9 points de PIB en 2000, contre près de 41 points
en moyenne dans l'UE. Les prélèvements sur les salaires y sont
faibles (6,3 % du PIB contre 12,8 % pour l'UE), alors que la plupart
des autres prélèvements sont un peu plus élevés. La
fiscalité locale ne représente que 1,5 point de PIB en 2000 et ne
couvre que 20 % des dépenses des collectivités locales, le
reste provenant de transferts de l'administration centrale. Le niveau actuel
des prélèvements obligatoires est au-dessus de la moyenne des
trente dernières années, mais inférieur au point haut de
1982 (38,8). Depuis la fin des années 1970, le poids de la
fiscalité indirecte s'est accru (TVA et fiscalité
pétrolière), tandis que celui de fiscalité locale s'est
réduit. La progressivité de l'impôt sur le revenu a
été réduite. Le gouvernement travailliste élu en
1997 a rationalisé et simplifié le système de cotisations
sociales, baissé le taux de l'impôt sur les sociétés
mais accru la fiscalité des dividendes, dans le but de favoriser
l'investissement. Des crédits d'impôt ont été mis en
place pour inciter au retour à l'emploi et réduire les trappes
à pauvreté, principalement pour les familles avec enfants.
I. Principales caractéristiques du système fiscal
1. Structure des prélèvements obligatoires
Le
Royaume-Uni fait partie des pays qui ont les taux de prélèvements
obligatoires les plus bas de l'UE : 37,9 points de PIB en 2000, contre
près de 41 points en moyenne dans l'UE (chapitre 1). Il se distingue
aussi par la faiblesse des prélèvements sur les salaires
(6,3 % du PIB contre 12,8 % pour l'UE, 17,4 pour la France, soit un
peu moins que les Etats-Unis 6,9 %). Le bas niveau des cotisations
sociales explique la faiblesse du taux de prélèvements
obligatoires au Royaume-Uni, alors que les autres prélèvements
sont plutôt un peu plus élevés. Le faible poids de la
fiscalité locale est aussi une spécificité
britannique : la part des taxes perçues par les administrations
locales ne représente que 1,5 point de PIB en 2000 et ne leur permet de
financer que 20 % de leurs dépenses (quasi exclusivement via la
Council tax
), le reste provenant d'un transfert de l'administration
centrale.
Le niveau actuel est au-dessus de la moyenne des trente dernières
années (36,1 points), mais inférieur au point haut de 1982
(38,8). Le taux de prélèvements obligatoires a nettement
baissé de 1982 à 1993, où il ne représentait plus
que 33,9 points de PIB, avant de remonter régulièrement par la
suite (graphique 1).
Graphique 1 : Taux de prélèvements obligatoires au Royaume-Uni
En
points de PIB
Source : ONS,
United Kingdom National Accounts
,
The Blue Book
,
édition 2001.
Tableau 1 : Evolution de la structure des prélèvements obligatoires au Royaume-Uni (1)
|
En % du PIB |
En % des recettes |
||||||
|
1979 |
1992 |
1997 |
2000 |
1979 |
1992 |
1997 |
2000 |
Impôts sur production et les importations |
12,9 |
14,1 |
14,2 |
14,6 |
38,1 |
40,1 |
39,9 |
38,6 |
TVA |
4,0 |
6,8 |
6,8 |
6,9 |
11,8 |
19,3 |
19,2 |
18,2 |
Impôts et droits sur les importations, hors TVA |
0,6 |
0,3 |
0,3 |
0,2 |
1,6 |
0,9 |
0,8 |
0,6 |
Impôts sur les produits, hors TVA et impôts sur les importations |
4,6 |
4,4 |
5,0 |
5,5 |
13,6 |
12,6 |
14,1 |
14,6 |
Alcools |
1,2 |
0,8 |
0,7 |
0,7 |
3,5 |
2,4 |
2,0 |
1,8 |
Tabac |
1,3 |
1,0 |
1,0 |
0,8 |
3,7 |
2,8 |
2,7 |
2,2 |
Carburants |
1,4 |
1,8 |
2,3 |
2,4 |
4,1 |
5,2 |
6,4 |
6,4 |
Autres (2) |
0,8 |
0,8 |
1,1 |
1,6 |
2,2 |
2,1 |
3,1 |
4,1 |
Impôts sur la production |
3,7 |
2,6 |
2,1 |
2,0 |
11,0 |
7,3 |
5,8 |
5,3 |
Dont : impôts locaux |
1,9 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
5,6 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
Impôts courants sur le revenu, le patrimoine etc. |
15,0 |
14,8 |
15,0 |
16,8 |
44,1 |
42,1 |
42,1 |
44,2 |
Impôt sur le revenu des ménages |
10,9 |
11,2 |
9,6 |
11,2 |
32,1 |
31,8 |
27,1 |
29,6 |
Impôt sur les bénéfices des sociétés |
2,0 |
1,9 |
3,1 |
3,6 |
5,9 |
5,5 |
8,8 |
9,4 |
Impôts locaux |
1,4 |
1,4 |
1,3 |
1,5 |
4,1 |
3,8 |
3,7 |
3,9 |
Autres impôts (3) |
0,7 |
0,3 |
0,9 |
0,5 |
2,0 |
0,9 |
2,5 |
1,4 |
Cotisations sociales obligatoires |
5,8 |
6,1 |
6,2 |
6,3 |
17,2 |
17,2 |
17,5 |
16,5 |
Autres impôts en capital (4) |
0,2 |
0,2 |
0,2 |
0,2 |
0,6 |
0,6 |
0,5 |
0,6 |
Total des prélèvements obligatoires |
34,0 |
35,2 |
35,6 |
37,9 |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Part perçue par l'administration centrale |
29,6 |
32,8 |
33,6 |
35,7 |
|
|
|
|
Part perçue par les administrations locales |
3,4 |
1,4 |
1,3 |
1,5 |
|
|
|
|
Part perçue par l'Union européenne |
1,0 |
1,0 |
0,7 |
0,7 |
|
|
|
|
(1)
Selon la décomposition du SEC 95. Pour l'ONS, les crédits
d'impôt correspondent à une dépense, et non à une
diminution de recettes.
(2) Principalement : droits de timbres, jeux et paris ; taxes
d'aéroport et taxes sur les contrats d'assurance (à partir de
1994).
(3) Principalement : taxe automobile payée par les
ménages (0,3 point en 2000) ; recettes pétrolières
(0,2 point en 2000). En 1997 et 1998 s'ajoutent 0,3 point de taxe sur les
entreprises privatisées (
Windfall tax
).
(4) Il s'agit principalement de l'impôt sur les successions.
Source : ONS,
United Kingdom National Accounts
,
The Blue
Book
, édition 2001.
Graphique 2 : Structure des recettes des administrations publiques britanniques
En % du
PIB
Source : ONS,
United Kingdom National Accounts
,
The Blue Book
,
édition 2001.
Les changements de tendance du poids de la fiscalité britannique ne
sont, pour l'essentiel, pas liés aux alternances de gouvernements :
1979-1997 pour les Conservateurs, retour des Travaillistes en mai 1997. En
effet lors de l'accession de Margaret Thatcher au poste de Premier ministre en
1979, le taux de prélèvements obligatoires n'était que de
34 points de PIB. Au cours des trois années suivantes, le taux a
augmenté de 5 points et ce n'est qu'à partir de 1983 que les
mesures fiscales se sont traduites par une baisse du taux de
prélèvements obligatoires, le ramenant en 1993 au niveau dont les
Conservateurs avaient hérité en 1979. L'arrivée des
Travaillistes au gouvernement en mai 1997 a conduit à une augmentation
du taux de prélèvements obligatoires.
Si l'on compare les poids des différents prélèvements en
1979 et en 2000, il apparaît clairement que le poids de la
fiscalité indirecte s'est accru (tableau 1 et graphique 2). C'est
surtout vrai pour la TVA (+ 2,9 points de PIB en 20 ans) et la
fiscalité pétrolière (+ 1 point), tandis que le poids
des droits d'accise sur les alcools et le tabac a baissé. La part des
cotisations sociales est restée quasiment stable depuis le début
des années 1990 (elle avait augmenté dans la première
moitié des années 1980 jusqu'à 6,9 points de PIB). Le
poids de l'impôt sur le revenu n'a pas connu de bouleversement, et celui
de l'IS a eu tendance à augmenter. La fiscalité locale a
été allégée au début des années 1990,
avec la suppression des impôts locaux sur la production au profit d'une
taxe définie au niveau national et la suppression de la
Community
charge
en 1993, remplacée par la
Council tax
.
Les prélèvements obligatoires atteignaient 357,4 milliards de
livres en 2000. Les principales sources de recettes sont l'impôt sur le
revenu des ménages qui, y compris les revenus du patrimoine,
représente près de 30 % des recettes, puis la TVA
(18,2 %), les autres taxes sur les produits (14,6) et les cotisations
sociales (16,5).
Un des objectifs des Conservateurs était d'augmenter le poids des
impôts indirects et de réduire celui des impôts directs. Le
taux de TVA a certes été relevé de 8 % à
15 % à l'arrivée des Conservateurs puis à 17,5 %
en avril 1991, pour financer la baisse de la fiscalité locale
(réduction de la C
ommunity charge
ou
poll tax
avant
sa suppression en 1993), mais les autres droits d'accise ont globalement
été abaissés dans le même temps. Le taux marginal
supérieur de l'impôt sur le revenu des ménages a
été abaissé de 83 % à 40 %, mais
l'imposition des sociétés s'est alourdie. Finalement, les parts
relatives des fiscalités indirecte et directe ne sont pas nettement
différentes aujourd'hui de ce qu'elles étaient en 1979,
malgré les nombreux changements opérés dans le
système fiscal en 20 ans.
2.
Principales mesures fiscales depuis 1979
Principales mesures fiscales sous les gouvernements conservateurs 1979-1996
Au
pouvoir pendant 18 ans, les Conservateurs (Margaret Thatcher jusqu'en novembre
1990, John Major par la suite) ont modifié la plupart des
prélèvements obligatoires. Les principales évolutions de
la fiscalité britannique ont été les suivantes :
Impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP ou IR) :
très forte diminution des taux, surtout du taux marginal
supérieur qui est passé de 98 % dans certains cas à
40 % du revenu imposable ; après 1992, gel des abattements
à l'IR ; pourtant, pas de diminution sensible de la part de l'IR
dans le PIB.
Impôt sur les bénéfices des sociétés
(IS) : 1984, baisse du taux (de 52 % à 35 % puis
33 % en 1991-1992) et élargissement de la base ; cela a
plutôt augmenté les recettes d'IS.
TVA : le taux normal passe de TVA de 8 % à 15 % en 1979
et à 17,5 % en 1991 (pour financer la baisse de la
Community
charge
ou
Poll Tax
), introduction de la TVA sur les carburants.
Autres impôts indirects : hausse des taxes sur le fuel (5 % en
termes réels) et le tabac (3 % en termes réels), hausse
prévue chaque année (mécanisme dit
«
escalator
», augmenté puis supprimé
par le gouvernement de Tony Blair).
Cotisations sociales : réduction du lien entre prestations et
cotisations ; suppression du plafond des cotisations employeurs en 1985.
Diminution du saut d'entrée pour les salaires passant au-dessus du seuil
en deçà duquel les salaires sont exonérés de
cotisations (
Lower Earnings Limit
, LEL) en 1985 et 1989 : lorsque
le salaire atteignait le LEL, le taux de cotisations passait de 0 à
19,45 % de l'ensemble du salaire (9 % employés et 10,45 %
employeurs) avant 1985, à 10 % après la réforme de
1985 (5 + 5 %) et à 7 % en 1989 (5 %
employés et 2 % entreprises). Mais des effets de seuil
intermédiaires ont été introduits.
Orientations fiscales du New Labour depuis 1997
Le gouvernement travailliste, dirigé par Tony Blair, poursuit depuis 1997 plusieurs objectifs principaux de politique économique, renouvelés sous une forme ou une autre dans chacun des budgets annuels : stabilité macroéconomique (objectif prioritaire, avec la mise en place de règles de politique monétaire -- cible d'inflation -- et de règles budgétaires -- solde public courant nul en moyenne sur un cycle économique et dette publique maintenue à des niveaux « stables et prudents ») ; augmentation de la productivité (pour rattraper le niveau de productivité des autres pays du G7, la productivité par tête étant estimée 38 % plus élevée aux Etats-Unis, 18 % en France, 9 % en Allemagne) ; augmentation des possibilités d'emploi pour tous, justice sociale, principalement en faveur des familles, mais aussi réduction de la pauvreté (enfants et retraités) ; enfin, protection de l'environnement. Pour atteindre ces objectifs, le gouvernement a entrepris dès son arrivée la « modernisation » du système fiscal et de protection sociale. Le budget 2002 (présenté en avril dernier) ajoute à la liste des objectifs l'amélioration de la qualité des services publics, notamment dans le secteur de la santé.
Augmentation de la productivité
Les modifications de la fiscalité des entreprises doivent permettre d'accroître l'innovation et l'investissement. Le taux d'imposition des bénéfices des sociétés a été réduit de 33 à 30 % (à 20 % pour les petites entreprises, à 10 % pour les premières 10 000 livres de bénéfices). Cette baisse a été financée par la suppression du remboursement de l'avoir fiscal sur les dividendes versés aux actionnaires exonérés (fonds de pension...). Un crédit d'impôt a été créé pour stimuler la recherche et développement dans les PME. La taxation des plus-values a été également modifiée : dorénavant, la taxation se réduit avec la durée de détention. En avril 2002, le taux d'imposition des petites entreprises a été abaissé à 19 % au lieu de 20 %, et à 0 % au lieu de 10 % pour les plus petits bénéfices.
Augmentation du taux d'emploi ( making work pay)
La fiscalité directe des ménages et les prestations sociales ont été modifiées de façon à rendre le travail financièrement intéressant pour les salariés du bas de l'échelle. Le taux de la première tranche de l'impôt sur le revenu a été réduit de 20 à 10 % en avril 1999. Dans le cadre de cette stratégie de retour à l'emploi, un salaire minimum a été instauré (3,6 livres de l'heure en octobre 1999, 3,7 à partir d'octobre 2000, revalorisé à 4,1 en d'octobre 2001, 4,2 à partir d'octobre 2002) ; des aides supplémentaires pour les familles actives avec enfants (sous forme de crédits d'impôts) ont été progressivement mises en place, ainsi qu'un crédit d'impôt pour les personnes handicapées ayant ou retrouvant un emploi. Le salaire plancher à partir duquel salariés et employeurs paient des cotisations sociales a été fortement augmenté (en laissant les droits à prestations inchangés), ce qui a permis d'exonérer un million de personnes supplémentaires, selon le Trésor. La création du Working Families' Tax Credit (WFTC), en octobre 1999, a sensiblement amélioré le niveau de vie des foyers avec enfant, dont une personne au moins travaille plus de 16 heures par semaine. A partir de 2003, le WFTC de base (hors suppléments pour enfants) sera étendu aux foyers sans enfants sous le nom de Working Tax Credit 148 ( * ) . La création d'un crédit d'impôt pour les retraités les plus pauvres ( Pension Credit ) en 2003 vise à favoriser l'emploi en garantissant aux actifs ayant cotisé d'avoir des retraites supérieures à celles versées par l'assistance. En plus d'inciter à l'emploi, ces mesures augmentent sensiblement le niveau de vie des personnes à bas revenu.
Justice sociale
Outre l'augmentation forte des allocations pour enfant ( Child Benefit ), deux mesures ont amélioré nettement le niveau de vie des familles ayant des enfants. Les réductions d'impôts pour couples mariés ( Married Couples Allowance ) ont été supprimées et remplacées par un crédit d'impôt (non remboursable) pour enfant ( Children's Tax Credit , CTC). Le WFTC a également un effet positif sur le niveau de vie des familles avec enfant. En 2003, le Child Tax Credit (composante du WFTC) et les prestations familiales attribuées sous conditions de ressources aux personnes sans emploi (principalement l' Income Support et la Jobseeker's Allowance) seront supprimées et remplacées par un crédit d'impôt unique, un nouveau Child Tax Credit (CC) . Les exonérations fiscales sur les dons aux oeuvres de charité ont été étendues. Les mesures favorisant l'épargne sont classées par le gouvernement dans la catégorie des mesures en faveur de la justice pour les familles et les communautés : le taux minimum de 10 % a été étendu aux revenus d'épargne à compter d'avril 1999 et les avantages fiscaux des Individual Savings Accounts (ISA) créés à cette date sont censés favoriser l'épargne de la moitié de la population qui n'épargne pas ou peu.
Protection de l'environnement
Une taxe sur la consommation d'énergie par les entreprises a été mise en place en avril 2001. En compensation, les cotisations patronales ont été réduites de 0,3 point. Les secteurs signant des accords de réduction d'émission bénéficient d'exemptions à hauteur de 80 % de la taxe (cela afin de ne pas peser sur leur compétitivité). Le taux réduit de TVA est appliqué sur les travaux effectués par les ménages, permettant d'économiser l'énergie. La vignette automobile ( Vehicle Excise Duty, VED) a été réformée pour prendre en compte les émissions polluantes (en fonction du nombre de chevaux et du type de carburants). La hausse des taxes sur les carburants ( Fuel Duties ) a cependant été gelée en termes réels en 2000, suite à la hausse des prix du pétrole. Celle sur la consommation d'énergie l'a été également.
Amélioration de la qualité des services publics
Le
gouvernement s'est engagé dans la voie de l'amélioration de la
qualité des services publics dès sa première
législature (augmentation de la part de l'investissement public net dans
le PIB, mesures en faveur des secteurs de l'éducation et de la
santé). Le budget 2002 a mis en avant de façon explicite
l'objectif d'amélioration de la qualité des services publics,
particulièrement dans le secteur de la santé. Les mesures
décidées s'appuient sur les conclusions du rapport Wanless
(2002), qui visent notamment à réduire les délais
d'accès aux soins et les taux de mortalité, et à
améliorer la productivité des services de santé. La part
des dépenses de santé dans le PIB devrait atteindre 9,4 points en
2007-2008 et 12,5 points d'ici 20 ans, contre 7,7 points de PIB en 2002-2003.
Pour financer la hausse prévue des dépenses de santé de
7 % par an en termes réels à l'horizon 2008, les taux de
cotisations sociales vont être relevés à partir de 2003.
L'augmentation des taux prévue pour 2003 devrait représenter 0,35
point de PIB pour les employeurs (3,9 milliards de livres), 0,32 point de PIB
pour les salariés (3,55 milliards de livres), 0,04 pour les travailleurs
indépendants (0,45 milliard de livres), soit 0,7 point de PIB au total.
Ce supplément de recettes est légèrement supérieur
à l'augmentation prévue des dépenses de santé, ce
qui permet de respecter les règles de stabilité budgétaire
du gouvernement.
On ajoutera à la liste des objectifs celui de la rationalisation du
système fiscal. Le système ubuesque de cotisations sociales a
été remis à plat. La simplicité administrative a
été accrue, la fiscalité de l'épargne
unifiée. Toutefois, le WTC reste une prestation compliquée.
Le gouvernement Blair n'a pas remis en cause les mesures prises par les
conservateurs (modifications profondes concernant la TVA, l'IRPP, l'IS) ;
il a poursuivi à un rythme ralenti la diminution des taux de l'IS et de
l'IR, mais en la finançant par des hausses d'assiettes (IS sur les fonds
de pension) ou d'autres prélèvements (cotisations patronales).
II. Le système fiscal actuel et ses principales modifications depuis 1992
1. Fiscalité des entreprises
La fiscalité des entreprises a subi d'importantes modifications depuis 10 ans. Les principales évolutions sont les suivantes :
-
Réduction de 33 à 30 % du taux d'imposition des
bénéfices (- 3,3 milliards de livres en 2000-2001,
- 3,75 en 2001-2002).
Suppression du remboursement du crédit d'impôt versé aux actionnaires exonérés (+ 5,4 milliards).
Suppression de l' Advance Corporation Tax (ACT), pré-paiement de l'impôt sur les bénéfices lors du versement des dividendes, et introduction d'un paiement trimestriel pour les grandes entreprises (+ 2 milliards).
Taxation des services publics privatisés.
Introduction d'une fiscalité portant sur l'utilisation industrielle et commerciale d'énergie dans le but de réduire les émissions de CO2.
Mesures spécifiques pour les PME (- 1,2 milliards de livres en 2001-2002) : taux réduit, crédit d'impôt pour la R&D, réductions d'impôts pour les employés bénéficiant d'options ; création d'un taux 0 à partir de 2002 pour les petits bénéfices (265 millions de livres en 2003-2004).
2. Fiscalité des ménages
La
diminution de l'impôt sur le revenu et des cotisations salariés a
été en partie compensée par la hausse des taxes sur le
tabac et l'essence (tableau 2). Concernant l'impôt sur le revenu, les
principales mesures sont la diminution du taux de base (payé sur la
tranche intermédiaire) et du taux inférieur. La baisse du taux
supérieur, initiée par les Conservateurs n'a pas
été remise en cause. L'abattement pour couple marié a
été supprimé au profit d'un crédit d'impôt
pour enfant et le WFTC a été créé. La
fiscalité de l'épargne a été simplifiée,
rationalisée et rendue plus neutre.
Les mesures fiscales et sociales prises depuis 1997 ont des effets
redistributifs forts (surtout en bas de l'échelle des revenus). Elles
permettent d'accroître de 8,8 % le revenu disponible moyen du
décile le plus pauvre, alors que les 10 % les plus riches perdent
0,7 % en pouvoir d'achat (Myck, 2000), mais les inégalités
restent grandes (voir par exemple, Lefresne, 2001). Les foyers avec enfants et
les retraités voient leur revenu disponible croître sensiblement,
alors que la fiscalité des foyers d'âge actif sans enfant est
alourdie. Le pouvoir d'achat des retraités célibataires augmente
de plus de 4 %, celui des familles monoparentales de 6,5 % et celui
des couples sans travail avec enfants de presque 10 %. A l'inverse, le
pouvoir d'achat des couples monoactifs sans enfant diminue de presque 2 %.
Le gouvernement travailliste a aussi poursuivi la politique des Conservateurs
dans le domaine des réductions d'impôts pour charges
d'intérêt pour emprunts immobiliers. L'allégement avait
été réduit par les Conservateurs en 1991 ; il a
été encore réduit (à 10 % des
intérêts à partir d'avril 1998), avant d'être
supprimé en avril 2000.
Tableau 2 : Impact des principales mesures ayant affecté les ménages de 1997 à 2000
En milliards de £
Total |
- 3,62 |
Impôt sur le revenu |
- 7,11 |
Abattement pour couple marié |
3,12 |
Taux d'imposition et abattements individuels |
- 5,08 |
WFTC |
- 3,35 |
Crédit d'impôt pour enfant ( Children's tax credit ) |
- 2,18 |
Cotisations sociales |
- 2,39 |
-- Salariés |
- 2,64 |
-- Travailleurs indépendants |
0,25 |
Fiscalité indirecte |
6,20 |
TVA sur le fuel domestique |
- 0,51 |
Tabac |
1,74 |
Carburants |
4,71 |
Dépenses |
- 0,32 |
Allégements pour les intérêts hypothécaires |
3,15 |
Allocations familiales ( Child benefit ) et majorations pour enfants de l'aide sociale |
- 2,03 |
Augmentation du revenu minimum garanti ( allowances and capital limits ) |
- 0,75 |
Allocation d'hiver pour les retraités ( winter allowance ) |
- 1,07 |
Suppression d'aides pour parents seuls et d'aides pour les moins de 18 ans |
0,39 |
Note : Un signe (-) correspond à un impact favorable
pour les ménages.
Source : Myck (2000).
III. Les réformes des principaux impôts
1. Impôt sur les sociétés
Les
travaillistes ont réduit le taux normal d'imposition des
bénéfices de 33 à 30 %, ce qui poursuit la tendance
à la baisse engagée en 1984. C'est un des taux les plus bas de
l'OCDE, mais la part des recettes dans le PIB est supérieure à
celle des autres pays du G7. Entre 1996-1997 et 2000-2001, la part des recettes
d'IS dans le PIB a diminué. Le taux applicable aux PME a
été réduit de 23 à 20 % (jusqu'à
300 000 livres de bénéfices) en 2000 et à 19 %
en avril 2002. Au 1
er
avril 2000, un taux réduit de 10 %
jusqu'à 10 000 livres de bénéfices a également
été introduit, ce taux a été abaissé
à 0 au 1
er
avril 2002. Aujourd'hui, l'imposition des
bénéfices est progressive (et assez originale, tableau 3).
La création du taux 0 pour l'impôt des sociétés qui
déclarent moins de 10 000 livres de bénéfices imposables
est une surprise du budget 2002. Sa logique n'est pas évidente ; on
comprend mal pourquoi certains bénéfices échapperaient
à toute imposition ; elle introduit une inégalité de
traitement entre les personnes qui déclarent des revenus perçus
à titre individuel (soumis à l'IR) et celles qui, se constituant
en société, peuvent échapper à l'imposition
à concurrence de 10 000 livres de bénéfices. En se
constituant en société, un travailleur indépendant peut se
verser un traitement de 4 615 livres (plafonds de l'abattement de
l'impôt sur le revenu) et réaliser des bénéfices de
10 000 livres, qu'il s'attribuera sous forme de dividendes, en
échappant à toute imposition. Il devient donc possible de gagner
15 000 livres sans être imposable. Un salarié, avec le
même revenu, devrait s'acquitter de 3 827 livres d'impôt sur
le revenu et de cotisations sociales
149
(
*
)
. Le budget estime que le coût de la mesure
sera de 265 millions de livres (0,23 point de PIB) en 2003-2004 et de 450
millions en 2004-2005 (0,39 point de PIB), estimant que la proportion de
personnes qui se constitueront en société sera faible.
L'
Institute for Fiscal Studies
(Blow
et al.
, 2002) estime pour sa
part que la mesure est potentiellement coûteuse, pensant vraisemblable
que 50 % des travailleurs indépendants décident de se
constituer en société ce qui leur permettrait d'économiser
plus de 500 livres d'impôt par an et représenterait un coût
budgétaire de 1,2 milliard de livres (de 2,5 si tous les travailleurs
indépendants se constituaient en société).
Tableau 3. Imposition des bénéfices en 2000-2001
Bénéfice annuel, en £ |
Taux marginal |
Taux moyen |
< 10 000 |
10 |
10 |
10 001 - 50 000 |
22,5 |
10 à 20 |
50 001 - 300 000 |
20 |
20 |
300 001 - 1 500 000 |
32,5 |
20 à 30 |
> 1 500 000 |
30 |
30 |
Sources : HM Treasury, Budget , Adam et al. (2001).
Modalité de perception de l'IS et fiscalité des dividendes
Le
gouvernement Blair a supprimé à partir de 1999 le système
de
l'Advance Corporation Tax
(ACT) et a fortement réduit le
système d'imputation qui évitait la double imposition des
dividendes.
L'ACT consistait en un pré-paiement de l'impôt sur les
bénéfices au moment du versement des dividendes (à hauteur
de 20/80
e
des dividendes versés). L'ACT venait en
déduction de l'IS qui était versé 9 mois après la
clôture de l'exercice. L'actionnaire bénéficiait d'un
crédit d'impôt remboursable de la valeur de l'ACT, ce qui
permettait une suppression partielle de la double taxation. Pour un
bénéfice avant impôt de 100 versé sous forme de
dividende et avec un taux d'IS de 31 % et un taux marginal d'IRPP de
40 %, l'IS valait 31, le dividende versé 69, l'ACT 17,25 (donc le
solde de l'IS, 13,75) et l'IRPP 17,25. L'imposition totale atteignait donc
48,25, soit 8,25 de plus que dans le cas d'une imputation totale (tableau 4).
Les dividendes reçus par une entreprise actionnaire d'une entreprise
résidente étaient (et restent) exonérés, pour
éviter toute double imposition. Les impôts sur les dividendes
versés par des filiales étrangères étaient
imputés pour le calcul de l'impôt sur les bénéfices
de l'actionnaire, mais un système de plafonnement de la part que l'ACT
pouvait prendre dans l'IS versé sur chaque source de revenu avait pour
conséquence une taxation plus forte des bénéfices
étrangers. Pour limiter la pénalisation des groupes britanniques,
deux régimes fiscaux ont été mis en place en 1994 :
le
foreign income dividend (FID) regime
et le régime des
international headquarters companies (IHC).
Les mesures prises par le gouvernement Blair ont quasiment supprimé le
régime d'imputation qui empêchait la double imposition. Depuis le
2 juillet 1997, le crédit d'impôt n'est plus remboursable aux
entreprises et fonds de pensions, qui étaient exonérés
d'impôt sur ces dividendes, ce qui fait passer l'impôt total
payé sur les bénéfices distribués de 12,5 à
30 % (tableau 4). Depuis le 6 avril 1999, le crédit d'impôt
n'est plus remboursable pour personne et est réduit à
1/9
e
du dividende.
A cette date, le système de l'ACT a été
supprimé : le recouvrement de l'IS est dorénavant
effectué sous forme d'acomptes trimestriels pour les grandes entreprises
(les autres continuent de payer l'IS avec un an de décalage, mais sans
pré-paiement même dans le cas de versements de dividendes).
Tableau 4 : Cas types d'effet de la réforme de la fiscalité des dividendes
|
Personne physique |
Actionnaire exonéré |
||||
Système |
Ancien 1 |
Ancien |
Nouveau 1 |
Ancien |
Ancien |
Nouveau |
Taux d'IS |
31 |
30 |
30 |
31 |
30 |
30 |
Taux d'IR |
40 |
32,5 |
32,5 |
Remboursement de l'AF |
Non remboursement |
|
Bénéfice |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
Impôt (IS) |
31 |
30 |
30 |
31 |
30 |
30 |
Dividende (Div) |
69 |
70 |
70 |
69 |
70 |
70 |
Avoir fiscal (AF) |
17,25 |
17,5 |
7,78 |
17,25 |
17,5 |
17,5 |
Div + AF |
86,25 |
87,5 |
77,78 |
86,25 |
87,5 |
87,5 |
IR actionnaire |
17,25 |
10,94 |
17,50 |
- 17,25 |
- 17,50 |
0,0 |
IR actionnaire + IS |
48,25 |
40,94 |
47,50 |
13,75 |
12,50 |
30,0 |
Double imposition |
8,25 |
8,44 |
15,00 |
|
|
|
1.
Ancien système, avoir fiscal (AF) de 20/80 et remboursement de l'AF aux
actionnaires exonérés ; Nouveau système, AF de 10/90
et non remboursement de l'AF aux actionnaires exonérés. Avant la
réduction de l'avoir fiscal et la suppression de son remboursement aux
actionnaires exonérés, le taux de l'IS était de 31 %
et le taux d'IR sur les dividendes était de 40 % (pour les
personnes imposées à la tranche supérieure) ; en
2000-2001, le taux d'IS était de 30 % et le taux d'imposition des
dividendes était réduit à 32,5 %. Dans les deux
exemples, la colonne intermédiaire permet séparer l'effet de
l'évolution des taux de l'effet des réformes de l'avoir fiscal.
Source : Auteurs.
Intérêt et objectif des réformes
Au total, la hausse de la fiscalité des dividendes fait plus que compenser la diminution du taux d'imposition. La suppression de l'ACT simplifie le système et réduit les distorsions économiques (il aurait suffi de le modifier à la marge pour atteindre cet objectif). L'objectif de la suppression du remboursement du crédit d'impôt est de stimuler l'investissement : dans l'ancien système, les bénéfices distribués à des actionnaires exonérés étaient au total moins taxés que les bénéfices non distribués (tableau 4). Cela incitait à un excès de versement de dividendes, au détriment de l'autofinancement. Ce raisonnement est critiquable : le principe de l'imputation est de taxer le dividende distribué au taux dû par l'actionnaire, ce qui justifie le remboursement du crédit d'impôt c'est-à-dire (d'une partie) de l'IS payé. La raison d'être de l'IS est de taxer les bénéfices réinvestis. Les mesures en faveur des PME ont également pour objectif de favoriser l'innovation et l'investissement.
Imposition des bénéfices retirés de l'exploitation de pétrole et de gaz
Le budget 2002 a introduit à partir d'avril une surtaxe de 10 % pour les bénéfices retirés de l'exploitation du pétrole et du gaz en mer du Nord, jusqu'alors soumis au taux de l'IS de 30 %. Ceci devrait rapporter 450 millions de livres en 2003-2004. La mise en place de cette surtaxe est facilitée par le maintien des prix du pétrole à des niveaux relativement élevés. Le gouvernement a par ailleurs lancé une consultation sur la suppression des royalties, payées sur les recettes des champs de pétrole dont l'exploitation a commencé avant 1982 (les champs dont la date de début d'exploitation est antérieure à 1982 paient actuellement un taux d'imposition marginal de 73,8 %, en tenant compte aussi de la PRT ( Petroleum revenue tax ), contre 40 % pour ceux dont la date de début d'exploitation est postérieure à mars 1993).
2. Cotisations sociales
Avant la
réforme d'avril 1999, le système britannique de financement de la
Sécurité sociale présentait deux particularités. La
première particularité n'a pas été remise en
cause : les salariés à très bas revenu (salaire
inférieur à la
Lower Earnings Limit
, LEL) ne sont pas
couverts par la Sécurité sociale (
National
Insurance
) : ils n'acquièrent pas de droits, mais ni le
salarié, ni son employeur ne paie de cotisations. Seconde
particularité, les effets de seuils étaient très
lourds : une faible augmentation du salaire brut pouvait se traduire par
une augmentation très forte des cotisations dues. Les réformes
travaillistes ont eu un objectif double : améliorer l'incitation au
travail et rationaliser/simplifier le système. La réduction du
coût du travail n'était pas un objectif prioritaire car le salaire
minimum et les cotisations sociales sont bas.
Le seuil en deçà duquel les salaires sont exonérés
a été fortement augmenté ces dernières
années (+ 20,8 % par rapport à une stabilisation en
pouvoir d'achat par rapport à 1999), ce qui accroît l'incitation
au travail et réduit le coût des salariés peu
rémunérés. Cette réduction des cotisations sur les
bas salaires a été financée par une forte hausse du
plafond des cotisations salariés (
Upper Earnings Limit
, UEL,
passé de 535 livres en 2000-2001 à 575 en 2001-2002). Depuis
2001, les seuils au-dessus desquels les salariés et les employeurs
paient des cotisations sociales (
Primary Threshold
, PT, pour les
cotisations salariés et
Secondary Threshold
, ST, pour les
cotisations patronales) sont égaux à l'abattement individuel
d'impôt sur le revenu (89 livres en 2002-2003) et l'assiette des
cotisations sociales a été alignée sur celle de
l'impôt sur le revenu pour plus de simplicité (tableau 5). Le
gouvernement a créé une tranche de revenu où les
salariés sont assurés sans que les cotisations soient
payées : tranche à taux 0, pour les salaires hebdomadaires
compris entre le LEL (75 livres en 2002-2003) et le PT/ST (89 livres).
Mais la principale mesure est la suppression, en avril 1999, des effets de
seuil (
entry fees
et
steps
) par la mise en place d'un taux fixe
sur le salaire tronqué. Auparavant, les taux de cotisations variaient
selon la tranche dans laquelle se situait le salaire ; le changement de
taux s'appliquait à l'ensemble du salaire. Les taux de cotisations
patronales étaient croissants, ce qui conduisait à des taux
marginaux de cotisation infinis (graphique 3). Le système est
aujourd'hui plus simple puisque les cotisations sont proportionnelles sur la
part du salaire supérieure à un certain seuil et, pour les
cotisations salariés, en dessous d'un plafond (UEL). Auparavant, le taux
de cotisation patronale allait de 3 à 10 % de l'ensemble du salaire
selon le niveau de celui-ci ; en 1999-2000, il était de 12,2 %
de la part du salaire supérieure au ST. Le taux de cotisations
patronales a été réduit de 0,4 point en contrepartie d'une
hausse de la fiscalité écologique. En 2002-2003, il est de
11,8 %. Les réformes n'ont pas modifié les recettes de
cotisations patronales, mais ont sensiblement réduit les recettes de
cotisations salariés. En 2003-2004, les taux de cotisations sociales
employeurs et salariés seront relevés de 1 point pour financer
l'augmentation des dépenses de santé (bien qu'il ne s'agisse pas
de prélèvements affectés).
Les cotisations sociales des non salariés, qui étaient
particulièrement faibles, ont été augmentées. Les
non salariés dont les bénéfices annuels étaient
compris entre 3 955 et 4 535 livres en 2001-2002 payaient une
cotisation forfaitaire de 2 livres par semaine (dite « classe
2 ») ; ceux dont les bénéfices étaient au
moins de 4 535 livres payaient une cotisation de 7 % (dite
« classe 4 ») sur la fraction de leurs
bénéfices comprise entre 4 535 livres et 29 900 livres
(seuil maximum). A partir de 2003, le taux de 7 % sera aussi relevé
de 1 point ; un taux de 1 % sera appliqué aux
bénéfices supérieurs au seuil maximum (indexé sur
l'inflation).
Tableau 5 : Cotisations sociales au Royaume-Uni
Salaire
|
Cotisations employeur (1) |
Salaire
|
Cotisations salariés (1) |
1998-1999 |
|||
0 - 64 |
0 % |
0 - 64 |
0 % |
64 - 110 |
3 % * (salaire total) |
64 - 485 (2) |
10 % * (salaire - 64) + 2 %* 64 |
110 - 155 |
5 % *(salaire total) |
> 485 (2) |
10 %* (UEL - 64) + 2 % * 64 |
155 - 210 |
7 % * (salaire total) |
|
|
> 210 |
10 % * (salaire total) |
|
|
2001-2002 |
|||
0 - 87 |
0 % |
0 - 87 |
0 % |
87 - 575 |
11,9 % * (salaire - 87) |
87 - 575 |
10 % * (salaire - 87) |
> 575 |
11,9 % * (salaire - 575) |
> 575 |
0 % * (salaire - 575) |
2002-2003 |
|||
0 - 89 (PT/ST) |
0 % |
0 - 89 |
0 % |
89-585 (UEL) |
11,8 % * (salaire - 89) |
89 - 585 |
10 % * (salaire - 89) |
> 585 |
11,8 % * (salaire - 585) |
> 585 |
0 * (salaire - 585) |
2003-2004 |
|||
0 - 89 |
0 % |
0 - 89 |
0% |
89-585 (3) |
12,8 % * (salaire - 89) |
89 - 585 (3) |
11 % * (salaire - 89) |
> 585 (3) |
12,8 % * (salaire - UEL) |
> 585 (3) |
1 %* (salaire - UEL) |
(1)
Lorsque les salariés bénéficient d'un fonds de pension et
renoncent à l'affiliation au Serps, les cotisations sont réduites
en deçà de l'UEL. En 2002 - 2003, le rabais est de 1,6 point pour
les salariés. Pour les employeurs, il est de 3,5 points lorsque le fonds
est à prestations définies et de 1,0 point quand le fonds est
à cotisations définies.
(2) Un salarié gagnant 84 livres paie 3,28 ( = 0,1*(84-64)+0,02*64), un
salarié gagnant 500 livres paie 43,38 (= 0,1*(485-64)+0,02*64), un
salarié gagnant 1 000 livres paie la même chose.
(3) Le seuil UEL sera indexé sur l'inflation en 2003-2004.
Sources : HM Treasury,
Budgets
, IFS
.
Graphique 3 : Cotisations sociales employeurs en fonction du salaire hebdomadaire
En
livres par salaire
Note : Les seuils sont aux prix 1998.
Source : IFS.
3. Impôt sur le revenu des ménages
En 2000,
l'impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) représentait
11,2 % du PIB, comme en 1992. L'impôt est individualisé. Les
principales mesures prises dans les années 1990 sont la poursuite de la
diminution des taux et de la simplification de la fiscalité des revenus
d'épargne, l'individualisation de l'impôt, et la modification des
abattements et des crédits d'impôts qui ont eu pour effet de
défavoriser les couples sans enfant et de favoriser les retraités
ayant cotisé et les ménages qui travaillent et/ou ont des
enfants. Ces derniers sont pris en compte
via
un crédit
d'impôt appliqué à un des deux parents (ou partagé
entre eux). De façon générale, les crédits
d'impôts jouent un rôle important dans le système et ont
été nettement développés depuis 1997. L'impôt
est collecté par les entreprises qui versent au fisc les sommes que
celui-ci a calculé en prenant en compte les caractéristiques du
contribuable (nombre d'enfants...) et les autres revenus. Le barème ne
contient que 3 tranches et les contribuables bénéficient d'un
abattement forfaitaire de 4 535 livres (soit 17,8 % du revenu
moyen ; l'abattement est supérieur pour les personnes ayant plus de
65 ans).
Les taux d'imposition ont diminué quasiment continûment depuis la
fin des années 1970. Sous les Conservateurs (1979-1996), la baisse des
taux a été très forte, surtout concernant le taux marginal
supérieur qui est passé de 98 % dans certains cas à
60 % du revenu imposable puis 40 % (tableau 6). Le passage de 60
à 40 % du taux marginal en 1988, s'est accompagné d'une
très forte diminution du nombre de tranches. Les Conservateurs ont
supprimé le taux le plus bas (
lower rate
) un an après leur
arrivée au pouvoir et ont diminué progressivement le taux
intermédiaire (
basic rate
). Ils ont aussi réintroduit un
taux réduit dans le budget pré-électoral de 1992.
Après 1992, les abattements à l'IRPP ont été
gelés. Les Travaillistes n'ont pas remis en cause la baisse des taux
marginaux les plus élevés. Ils ont abaissé le taux
réduit à 10 % à partir d'avril 1999 (au lieu de
20 %) et ont réduit le taux moyen de 1 point à 22 % en
avril 2000. La baisse du taux réduit n'a concerné que les
très petits contribuables, puisqu'elle s'est accompagnée d'une
très forte diminution du seuil au-delà duquel le revenu est
imposé au
basic rate
.
Sur 45 millions d'adultes, environ 27,6 sont soumis à l'impôt sur
le revenu (61 %). Les réformes de l'IRPP se sont traduites par une
augmentation du nombre de contribuables payant les taux les plus
élevés (10 % aujourd'hui, contre 3 % en 1979-1980).
Ceci reflète le fait que l'indexation des tranches n'a pas toujours
suivi l'inflation, que les revenus ont en moyenne progressé plus vite
que les prix et que la dispersion des revenus s'est accrue sur la
période. Cela explique que, malgré la forte baisse des taux, la
part de l'IRPP dans le PIB n'ait que très peu varié en presque un
quart de siècle. Depuis 1979-1980, soit en 22 ans, le seuil
au-delà duquel le taux supérieur est dû a diminué de
7,8 % en terme réel. Au contraire, l'abattement (seuil en
deçà duquel le contribuable ne paye pas d'IRPP) a augmenté
de 44,4 % à prix constant.
Tableau 6 : Taux et tranches d'imposition sur le revenu des personnes physiques
Année fiscale |
Lower
rate
|
Basic
rate
|
Higher
rate(s)
(1)
|
Lower
rate
|
Basic
rate
|
1973-1974 |
-- |
30 |
40-75 |
-- |
5000 |
1974-1975 |
-- |
33 |
38-63, 73, 83 |
-- |
4500 |
1975-1976 |
-- |
35 |
40-75, 83 |
-- |
4500 |
1976-1977 |
-- |
35 |
40-75, 83 |
-- |
5000 |
1977-1978 |
-- |
34 |
40-75, 83 |
-- |
6000 |
1978-1979 |
25 (2) |
33 |
40-75, 83 |
-- |
8000 |
1979-1980 |
25 (2) |
30 |
40-60 |
-- |
10000 |
1980-1981 |
-- |
30 |
40-60 |
-- |
11250 |
1981-1982 |
-- |
30 |
40-60 |
-- |
11250 |
1982-1983 |
-- |
30 |
40-60 |
-- |
12800 |
1983-1984 |
-- |
30 |
40-60 |
-- |
14600 |
1984-1985 |
-- |
30 |
40-60 |
-- |
15400 |
1985-1986 |
-- |
30 |
40-60 |
-- |
16200 |
1986-1987 |
-- |
29 |
40-60 |
-- |
17200 |
1987-1988 |
-- |
27 |
40-60 |
-- |
17900 |
1988-1989 |
-- |
25 |
40 |
-- |
19300 |
1989-1990 |
-- |
25 |
40 |
-- |
20700 |
1990-1991 |
-- |
25 |
40 |
-- |
20700 |
1991-1992 |
-- |
25 |
40 |
-- |
23700 |
1992-1993 |
20 |
25 |
40 |
2000 |
23700 |
1993-1994 |
20 |
25 |
40 |
2500 |
23700 |
1994-1995 |
20 |
25 |
40 |
3000 |
23700 |
1995-1996 |
20 |
25 |
40 |
3200 |
24300 |
1996-1997 |
20 |
24 |
40 |
3900 |
25500 |
1997-1998 |
20 |
23 |
40 |
4100 |
26100 |
1998-1999 |
20 |
23 |
40 |
4300 |
27100 |
1999-2000 |
10 |
23 |
40 |
1500 |
28000 |
2000-2001 |
10 |
22 |
40 |
1520 |
28400 |
2001-2002 |
10 |
22 |
40 |
1880 |
29400 |
2002-2003 |
10 |
22 |
40 |
1920 |
29900 |
Note : Avant 1983-1984, une surtaxe de 15 % était
appliquée sur les revenus d'épargne au-dessus d'un certain seuil
(7 100 livres en 1983-1984).
(1) « - » indique une série de taux ayant 5 points
d'écart ; par exemple en 1987-1988, il y avait des tranches
d'imposition aux taux : 40, 45, 50, 55 et 60 %.
(2) S'applique aux 750 premières livres de la personne imposable et aux
premières 750 livres de son conjoint.
Sources : HM Treasury , IFS.
Tableau 7 : Impôt sur le revenu : abattements, tranches et taux d'imposition en 2001-2002
|
En £, par an |
En % du salaire moyen (1) |
|||
Abattements |
|
|
|||
Individuel : |
|
|
|||
|
4535 |
17,8 |
65 à 74 ans |
||
5990 |
23,6 |
75 et + |
|||
6260 |
24,6 |
|
|||
Couples mariés (2) : |
|
|
|||
|
0 |
0,0 |
65 à 74 ans |
||
5365 |
21,1 |
75 et + |
|||
5435 |
21,4 |
|
|||
Crédit d'impôt pour enfant ( Children's Tax Credit ) (2) |
5200 |
20,5 |
|||
Revenu imposable |
|
|
|||
1 e tranche ( lower-rate band ) - 10 % |
0 - 1880 |
|
|||
2 e tranche ( basic-rate band ) - 22 % |
1881 - 29400 |
|
|||
3 e tranche ( higher-rate band ) - 40 % |
29401 - + |
|
(1)
Salaire moyen à temps plein des hommes en avril 2001.
(2) Allégement d'impôt limité à 10 %.
Sources : HM Treasury,
Budget 2001
, Adam
et al
.(2001).
Dans les années 1990, la prise en compte de la situation familiale a
été fortement modifiée. Avant 1990, les couples
mariés étaient soumis à une imposition conjointe (les
textes stipulaient que, d'un point de vue fiscal, le revenu de l'épouse
était considéré comme le revenu de son mari). L'imposition
conjointe a été supprimée par les Conservateurs en 1990,
mais le statut marital restait pris en compte par le biais d'un abattement
fiscal accordé aux couples mariés (
married couple's allowance,
MCA). Cet abattement a été progressivement réduit
à partir de 1993 par les Travaillistes, et supprimé en avril 2000
(sauf pour les couples où un conjoint est né avant 1935).
Jusqu'en 2001, les enfants n'étaient pas pris en compte dans le calcul
de l'imposition sur le revenu excepté par le biais d'un crédit
d'impôt en faveur des familles à faible revenu avec enfant et dont
un des parents au moins travaillait : le
Family Income Supplement
créé en 1971, remplacé en 1988 par le
Family
Credit
, lui-même remplacé par le
Working Families' Tax
Credit
(WFTC) en 1999. La diminution du MCA a dégagé des
ressources qui ont permis, dans un premier temps, d'augmenter les allocations
familiales. La suppression de cette allocation a financé la mise en
place du
Children's Tax Credit
(CTC) à partir d'avril 2001, en
faveur de toutes les familles, dont l'un des parents travaille, ayant au moins
un enfant de moins de 16 ans à charge. Il s'agit d'une réduction
d'impôt non remboursable, indépendante du nombre d'enfants,
versée aussi bien aux couples mariés qu'aux couples non
mariés et aux célibataires. Lorsque aucun des membres du foyer
n'est imposé au taux marginal supérieur, le CTC est forfaitaire
et les couples décident de la répartition du crédit entre
chacun des deux adultes. Lorsque l'un des deux est imposé à la
tranche marginale supérieure, celui qui gagne le plus doit recevoir le
crédit d'impôt qui est réduit de 1/15
e
de livre
pour chaque livre de revenu au-dessus du seuil de la tranche
supérieure
150
(
*
)
. Pour les hauts revenus, le CTC est donc nul.
La prise en compte des enfants par le CTC a donc des effets très
différents du quotient familial. En France, chaque enfant permet une
réduction d'impôt d'autant plus forte que le revenu est
élevé (jusqu'à un certain plafond). Au Royaume-Uni, la
réduction d'impôt est forfaitaire puis dégressive (dans le
cas du WFTC, l'aide pour chaque enfant est forfaitaire, mais elle est
supprimée au-delà d'un certain revenu). En France, chaque enfant
induit une diminution de l'IRPP, qui est plus forte à partir du
troisième enfant, alors que le second enfant (et les suivants) ne
rapportent rien dans le cas du CTC
151
(
*
)
(et une somme identique dans le cas du WFTC).
Le gouvernement a prévu d'unifier, à partir de 2003, la prise en
compte des enfants dans l'impôt sur le revenu par la création d'un
crédit d'impôt unique, le
Child Tax Credit (CC)
. Il s'agira
en fait d'une prestation globalement dégressive, avec deux paliers. Le
WFTC sera remplacé par un crédit d'impôt (
Working Tax
Credit
) pour les plus de 25 ans exerçant un emploi, y compris ceux
n'ayant pas d'enfant.
Le gouvernement a également prévu la mise en place d'un
crédit d'impôt pour les retraités les plus pauvres
(
Pension Credit
), ayant cotisé, afin d'accroître
l'incitation au travail et à l'épargne : en l'absence de
crédit d'impôt, des retraités ayant cotisé pendant
leur vie active peuvent en effet se retrouver avec une retraite identique
à la retraite d'assistance (notamment si leur carrière est
incomplète). Le
Pension Credit
permettra de réduire
à 40 % le « taux de prélèvement marginal
apparent ». Ce crédit d'impôt entrera en vigueur en
octobre 2003.
Depuis 20 ans, la fiscalité de l'épargne a été
simplifiée, rationalisée et rendue plus neutre
152
(
*
)
. Aujourd'hui,
l'épargne des ménages se porte essentiellement sur trois produits
qui permettent de ne pas payer d'impôt sur les revenus
d'épargne : l'épargne retraite, l'épargne logement et
les
Individual Savings Accounts
(ISA). L'ISA, créé en
avril 1999 en remplacement de deux dispositifs proches, permet
d'épargner jusqu'à 7 000 livres par an. Comme dans le cas de
l'épargne logement, les revenus d'épargne et les retraits sont
exonérés. A l'inverse, l'épargne retraite est
exonérée à l'entrée, mais les rentes sont
imposées. Une part du capital accumulé peut même être
sortie en capital, en franchise d'impôt. Finalement, seuls les
très gros épargnants sont concernés par la taxation des
plus-values. Celles-ci sont imposées au barème de l'IRPP. Mais
depuis le budget de mars 1998, un système de dégressivité
temporelle a été mis en place : seul un certain pourcentage
de la plus-value est imposé et ce pourcentage est d'autant plus faible
que la détention est longue. Par contre, l'inflation n'est plus prise en
compte dans le calcul de la plus-value.
4. Mesures d'incitations au travail
Le
Working Families' Tax Credit
(WFTC) annoncé dans le budget 1998,
est une mesure centrale de la politique de modernisation du système
fiscal et de la protection sociale. Il vise à réduire les trappes
à pauvreté et à chômage. Il a été mis
en place en même temps que le salaire minimum (avril 1999) et la
création du taux de l'IR à 10 %.
Le WFTC est entré en vigueur en octobre 1999, en remplacement du
Family credit
(FC). Le WFTC est versé aux familles avec enfants,
dont l'un des parents travaille au moins 16 heures par semaine, dont un enfant
a moins de 18 ans ; avec une épargne inférieure à
8 000 livres. Dans le but de renforcer l'aspect incitatif au travail, le
WFTC, qui est géré par l'administration fiscale (et non sociale)
est versé avec le salaire (donc par les entreprises), et non comme une
prestation sociale (ce qui était jusqu'alors le cas pour les
crédits d'impôt, tels le FC). Il ne se substitue pas aux
allocations familiales versées par ailleurs.
Le WFTC est un dispositif à plusieurs étages :
-
Un crédit de base (
basic credit
), versé à un
parent seulement (au choix).
Un crédit supplémentaire ( 30-hour tax credit ), si la personne travaille au moins 30 h par semaine.
Un crédit par enfant ( child tax credit ) (deux taux selon que l'enfant a plus ou moins de 16 ans).
Un crédit pour garde d'enfant ( Childcare tax credit ) : 70 % des frais de garde, à hauteur de 135 livres par semaine (depuis juin 2001) pour une famille avec un enfant et 200 livres pour une famille avec 2 enfants ou plus.
Tableau 8 : Evolution du WFTC
En £, par semaine |
|
1999-2000 |
2000-2001 |
2001-2002 |
2002-2003 |
||
Crédit de base |
1 par famille |
52,30 |
53,15 |
59,00 |
62,50 |
||
Crédit supplémentaire, à partir de 30h travaillées par semaine |
|
11,05 |
11,25 |
11,45 |
11,65 |
||
Crédit par enfant |
|
|
|
|
|
||
|
|
19,85 |
25,60 |
26,00 |
26,45 |
11-16 ans |
|
|
20,90 |
25,60 |
26,00 |
26,45 |
16-18 ans |
||
|
25,95 |
26,35 |
26,75 |
27,20 |
|
||
Crédit pour garde d'enfants, 70 % des coûts avec un maximum de... |
1
enfant
|
100,00
|
100,00
|
135,00
|
135,00
|
||
Plafonds de revenu au-delà de laquelle la dégressivité s'applique |
|
90,00 |
91,45 |
92,00 |
94,50 |
||
Dégressivité |
|
55 % |
55 % |
55 % |
55 % |
Source : HM Treasury,
Budget
(2000, 2001, 2002).
Exemple de calcul du WFTC
Soit un couple avec 2 enfants de moins de 11 ans, où les deux adultes
travaillent, celui des deux demandant le crédit travaillant plus de 30
heures, dont les revenus nets (après cotisations sociales et impôt
sur le revenu) hebdomadaires sont de 300 livres, et qui ont des frais de garde
d'enfants de 150 livres par semaine. Le crédit initial est de 262,05
(62,5 + 11,65 + 2*26,45 + 135), d'où il faut enlever : 0,55*(300 -
94,5) = 113,03. Il reste donc : 149,02 livres. Au final, les revenus
hebdomadaires de cette famille seront de 449,02 livres.
A l'été 1999, 2,2 millions d'enfants (1/5 des enfants) vivaient
dans des familles où les parents étaient sans emploi. En 1998, le
gouvernement anticipait qu'1,5 million de familles toucheraient le WFTC en
2001, ce qui a été pratiquement atteint : à la
mi-2001, 1,3 million de foyers (soit 2,5 millions d'enfants) recevaient le WFTC
(sur 7 millions de familles), dont 600 000 couples et 650 000
familles monoparentales (dont 27 000 hommes seuls avec enfants). Les
familles concernées touchent en moyenne 80 livres par semaine. 60 %
bénéficient du crédit de 30 heures ; 12 % d'un
Childcare Tax Credit
- pour un montant moyen de 37,3 livres par semaine.
Le montant moyen brut du « salaire principal » est de 171
livres. En avril 2001, le WFTC garantissait un revenu minimum de 214 livres par
semaine
Les études réalisées par l'IFS (voir, par exemple,
Blundell et Reed, 2000) estiment que le WFTC aura des effets
modérés sur l'offre de travail (de moins de 30 000 emplois).
Par contre, le WFTC a des effets redistributifs importants. Pour les femmes
mariées, le nouveau système donne une légère
incitation à rester à la maison ou à réduire son
temps de travail.
Tableau 9 : Evolution du nombre de bénéficiaires du FC/WFTC depuis 1992
|
Mai 1992 |
Mai 1997 |
Mai 1999 |
Mai 2000 |
Mai 2001 |
Total, milliers (1) |
396,7 |
747,7 |
821,3 |
1061,4 |
1259,5 |
Prestation moyenne, £ par semaine |
37,69 |
57,85 |
62,99 |
73,28 |
79,57 |
(1) Hors
Irlande du nord jusqu'en mai 1997 (environ 3,5 % des
bénéficiaires).
Source : Inland revenue
, Working Families' Tax Credit Statistics
,
2001.
Par ailleurs, le DPTC (
Disabled Person's Tax Credit
), a
été introduit en même temps que le WFTC. Le DPTC concerne
des handicapés travaillant 16 heures ou plus par semaine. En 2001,
29 000 travailleurs le percevaient, pour un montant de 73 livres par
semaine (soit 60 % de personnes en plus, par rapport aux
bénéficiaires de la
Disability working allowance
en
juillet 1999).
2003 : Créations annoncées du Working Tax Credit, en remplacement du WFTC, et du Child Tax Credit
Le Working Tax Credit (WTC) va se substituer au WFTC et au DPTC en avril 2003, l'objectif étant d'étendre l'aide conditionnée à l'emploi aux plus de 25 ans, qui n'ont pas d'enfant, et travaillent au moins 30 heures par semaine. Le WTC sera déterminé sur une base annuelle, comme le nouveau Child Tax Credit . Les personnes ayant des enfants ou étant handicapées pourront bénéficier du WTC à partir du moment où elles travaillent au moins 16 heures par semaine. Un complément de crédit d'impôt sera versé aux couples avec enfants travaillant à eux deux au moins 30 heures par semaine (et dont l'un travaille au moins 16 heures), ainsi qu'aux handicapés travaillant au moins 30 heures par semaine. Le crédit pour frais de garde (C hildcare Tax Credit ) sera maintenu à l'identique par rapport aux WFTC et DPTC.
Tableau 10 : Principales composantes du WTC
En £, par semaine |
2003-2004 |
Composante de base |
29,20 |
Composante couple ou parent seul |
28,80 |
Crédit supplémentaire, à partir de 30h travaillées par semaine |
11,90 |
Crédit pour garde d'enfants, 70 % des coûts avec
un maximum de...
|
135,00
|
Seuil au-delà duquel la dégressivité s'applique |
97,00 |
Dégressivité |
37 % |
Source : HM Treasury
, Budget 2002
.
Le
Child Tax Credit
intégrera toutes les aides existantes en
faveur des enfants dans un seul crédit d'impôt. Il comprendra les
allocations familiales (
Child Benefit
, 16,05 livres par semaine pour le
premier enfant et de 10,75 par enfant à partir du deuxième
enfant, tableau 11) ; un crédit d'impôt (
Child Credit
)
par famille (10,45 livres), versé intégralement pour les revenus
ne dépassant pas 5 060 livres par an, et avec une
dégressivité de 37 % au-delà ; un crédit
d'impôt pour chaque enfant (27,75 livres), versé
intégralement pour les revenus annuels de 50 000 livres au plus,
avec une dégressivité de 1/15 ensuite.
Les familles dont le revenu est inférieur à 5 060 livres par
an (soit 97 livres par semaine) et celles qui reçoivent actuellement
l'
Income support
ou la
Jobseeker's allowance
recevront le
Child Tax Credit
maximum (54,25 livres pour le premier enfant). Les
familles percevant moins de 50 000 livres de revenus toucheront un
crédit d'impôt de 26,50 pour le premier enfant. Le
Child Tax
Credit
sera versé par l'administration fiscale à la personne
déclarée principale responsable de l'enfant. Il sera
calculé sur les salaires bruts, et non plus sur les nets comme c'est le
cas dans le dispositif actuel.
Tableau 11 : Principales composantes du Child Tax Credit
En £, par semaine, 2003-2004
|
1 er enfant |
Par
enfant,
|
||
Allocations familiales ( child benefit ) |
16,05 |
10,75 |
||
Crédit d'impôt ( Child tax credit ) : |
|
|
||
|
10,45 |
|
composante « enfant » |
|
27,75 |
27,75 |
|
||
Montant maximum du crédit d'impôt |
54,25 |
38,50 |
||
|
Montants hebdomadaires |
Montants annuels |
||
Plafonds de revenu pour bénéficier du montant maximum |
253,76 |
13 000 |
||
Premier seuil de revenu (composante « famille ») |
97 |
5 060 |
||
Dégressivité (pour la composante « famille ») |
37 % |
|
||
Second seuil de revenu (composante « enfant ») |
958,90 |
50 000 |
||
Second seuil de dégressivité (composante « enfant ») |
1/15 |
|
Sources : HM Treasury,
Budget 2002
, « The
Child and Working Tax Credits »,
The modernisation of Britain's
Tax and Benefit System
, Number Ten, avril 2002, HM Treasury, Inland Revenue.
Exemples de calcul du WTC et du Child Tax Credit
Le calcul se fait globalement. Lorsque les revenus sont supérieurs
à 97 livres par semaine, la dégressivité s'applique
d'abord au WTC, puis au crédit pour frais de garde d'enfant et enfin
au Child Tax Credit
.
Une famille dont les deux parents travaillent (et l'un des deux plus de 16
heures), avec des revenus de 97 livres par semaines, deux enfants et des frais
de garde de 60 livres par semaine bénéficiera du WTC
maximum : 69,9 livres ; de 42 livres au titre du crédit pour
garde d'enfant (60*0,7) et du
Child Tax Credit
maximum de 65,95 livres,
soit au total d'un crédit d'impôt de 177,85 livres : c'est le
montant maximum de crédit d'impôt pour le cas type de famille
considéré.
On considère maintenant la même famille, mais avec des revenus de
300 livres par semaine. Cette famille a un revenu supérieur de 203 au
seuil (300-97), la dégressivité de 37 % au-delà de 97
livres de revenus représentant 75,11 livres ((300-97)*0,37). En
déduisant ce montant du montant maximum calculé plus haut
(177,85), on obtient le droit à crédit d'impôt de cette
famille : 102,74 livres. Cette famille a des revenus trop
élevés pour bénéficier du WTC (75,11 > 69,9).
Mais elle a droit à un crédit d'impôt pour garde d'enfant
de 36,79 livres (42 livres - (75,11-69,9)) et au
Children Tax Credit
pour 65,95 livres. S'y ajoutent les allocations familiales pour 26,8 livres. Le
crédit d'impôt est supérieur de 23 livres à celui du
système du WFTC et CTC actuels.
5.
Fiscalité indirecte
TVA
Le taux de TVA est de 17,5 % depuis avril 1991. A partir d'avril 1994 le fioul domestique a bénéficié d'un taux réduit de 8 %, taux qui a été abaissé à 5 % en 1998. Certains produits sont taxés à un taux 0. C'est en particulier le cas des produits alimentaires, de la construction de bâtiments neufs, des livres et de la presse, des vêtements d'enfants, de la distribution d'eau et des médicaments. D'autres sont exonérés : location de logements résidentiels, certains services (éducation privée, santé...). Selon Adam et al. (2001), l'ensemble des réductions et exonérations de TVA représente 25 milliards de livres, pour un total annuel de recettes de 61 milliards.
Tableau 12 : Evolution des taux de TVA depuis 1979
Budgets |
Mesures |
1979 |
Remplacement des taux de TVA de 8 et 12,5 % par un taux unique de 15 % |
1991 |
Augmentation du taux de 15 à 17,5 % |
1994 |
Taux réduit de 8 % sur le fioul domestique |
1997 |
Taux réduit sur le fioul domestique abaissé de 8 % à 5 % |
Source : HM Treasury, Budgets .
Droits d'accise
Alcools, tabac et carburants supportent des taxes spécifiques (tableau 13), auxquelles s'ajoute la TVA. Les recettes des droits d'accise proviennent principalement de la fiscalité pétrolière (22,5 milliards de livres). L'alourdissement de la fiscalité pétrolière avait été engagé par le gouvernement conservateur (la fiscalité pétrolière se situant par ailleurs au début des années 1990 dans la moyenne de l'UE) et a été poursuivi par les Travaillistes (tableaux 14 et 15). Les protestations qui ont suivi la hausse des prix du pétrole en 2000 ont amené le gouvernement à stopper l'augmentation prévue des taxes sur les carburants. La fiscalité sur le tabac a aussi été alourdie jusqu'en 2000 (et est stable depuis en termes réels), tandis que celle sur les alcools a été allégée.
Tableau 13 : Droits d'accise, année 2001-2002 *
|
Droits
d'accise
|
Droits
d'accise
|
Fiscalité totale
|
|||
Alcools |
|
|
|
|||
|
26 |
14,4 |
29,3 |
Vins (bouteille de 75 cl) |
||
116 |
35,9 |
50,8 |
Alcools forts (bouteille de 70 cl) |
|||
548 |
44,8 |
59,7 |
|
|||
Carburants |
|
|
|
|||
|
51 |
64,8 |
79,7 |
Sans plomb (litre) |
||
49 |
64,2 |
79,1 |
Diesel (litre) |
|||
49 |
63,2 |
78,1 |
|
|||
Tabac |
|
|
|
|||
|
|
|
|
|||
Droit spécifique |
183 |
|
|
|||
Taxe ad valorem (22 % du prix de vente) |
96 |
64,2 |
79,1 |
* Aux
prix d'avril 2001, y compris la TVA.
Sources : HM Treasury, Adam
et al.
(2001).
Tableau 14 : Part de la fiscalité dans le prix de vente, en %
|
Essence
|
Diesel |
Cigarettes |
Bière |
Vin |
Alcools |
1979 |
-- |
49 |
70 |
34 |
47 |
77 |
1992 |
66 |
66 |
76 |
33 |
48 |
66 |
2000 |
76 |
75 |
80 |
30 |
52 |
62 |
Sources : HM Treasury, Adam et al . (2001).
Tableau 15 : Evolution des droits d'accise
Budgets |
Carburants |
1993, K.
Clarke,
|
Engagement d'augmenter les droits d'au moins 3 % en termes réels |
1993, K.
Clarke,
|
Engagement d'augmenter les droits d'au moins 5 % en termes réels, au lieu de 3 % |
1994 |
Augmentation des droits supérieure à l'inflation, droits sur le diesel alignés sur ceux de l'essence |
1995 |
Augmentation de la fiscalité sur les carburants de 3,5 pence ou 5 % en termes réels (y compris TVA) |
1996, |
Augmentation de la fiscalité sur les carburants de 5 % en termes réels |
1997, G. Brown |
Engagement d'augmenter les droits de 6 % en termes réels par an au lieu de 5 % |
1998 |
Elargissement de l'écart de fiscalité entre le diesel et le sans plomb |
2000 |
Gel des droits en termes réels |
2001 |
Gel des droits, et baisse de 2 pence pour l'essence sans plomb et celle « à faible contenu en soufre » ; 3 pence pour le diesel « à faible contenu en soufre » |
2002 |
Gel des droits en termes nominaux |
Budgets |
Tabac |
1993 |
Augmentation des droits supérieure à l'inflation |
1994 |
Augmentation des droits supérieure à l'inflation |
1995 |
Augmentation de la plupart des droits de 3 % en termes réels |
1996 |
Augmentation de 5 % en termes réels (sauf tabac indexé) |
1997 |
Engagement d'augmenter les droits d'au moins 5 % en termes réels, au lieu de 3 % |
2000 |
Droits sur les cigarettes augmentés de 5 % en termes réels |
2001 |
Augmentation suivant l'inflation (+1,8 %) |
2002 |
Augmentation suivant l'inflation (+1,9 %) |
Budgets |
Alcools |
1993, automne |
Pas d'indexation pour les droits sur la bière et les alcools, augmentation supérieure à l'inflation autres produits |
1994 |
Augmentation des droits de 4 % en moyenne |
1995 |
Gel des droits sur la bière, le vin et le cidre ; baisse de 4 % sur les alcools |
1996 |
Gel des droits sur la bière, le vin et le cidre ; baisse de 4 % sur les alcools |
2001 |
Gel des droits |
2002 |
Gel des droits sur la bière, le vin et les alcools, baisse de 2 % sur le cidre |
Source : HM Treasury, Budgets .
Autres droits d'accise
Parmi les taxes apparues dans la période sous revue, on citera :
-
Les taxes d'aéroport, à partir 1994 (1 milliard de livres de
recettes).
Les taxes sur les contrats d'assurance, à partir de 1994.
Des taxes environnementales : taxes sur les déchets polluants depuis 1996, « climate change levy » : fiscalité écologique introduite en avril 2001 pour réduire les émissions de CO2, portant sur l'utilisation industrielle et commerciale d'énergie, à des taux différents selon les types d'énergie. (recettes attendues : 0,8 milliard de livres) ; différenciation de la fiscalité automobile selon la cylindrée, et depuis mars 2001 selon le taux d'émission de CO2 pour les véhicules neufs.
6. Fiscalité locale
Fiscalité foncière (
Council tax
) :
elle existe depuis 1993 (en remplacement de la
poll tax
). Les
propriétés sont évaluées sur leur valeur de
marché de 1991, un barème s'applique ensuite, selon huit tranches
fixées au niveau national (valeurs en livre, et taux de fiscalité
par rapport à un taux central). Le taux central est fixé par les
autorités locales (recettes estimées à 14,7 milliards de
livres en 2001-2002)
Fiscalité des entreprises (
non-domestic rates
) : Les
entreprises sont imposées selon un taux basé sur la valeur
marchande (réévaluée tous les 5 ans) de leurs actifs
immobiliers (17,5 milliards de livres de recettes). Depuis 1990, cette
fiscalité ne relève plus des administrations locales mais est
déterminée au niveau national, le taux d'imposition étant
désormais le même, pour une valeur marchande donnée, quelle
que soit la localisation géographique des entreprises
Références bibliographiques
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N. ROBACK, 2001 : « A survey of the UK tax system »,
Briefing Note
n° 9, IFS.
BLOW L., M. HAWKINS, A. KLEMM, J. MCCRAE et
H. SIMPSON, 2002 : « Budget 2002: business taxation
measures »,
Briefing Note
n° 24, IFS.
BLUNDELL R. et H. REED, 2000 : « The employment
effects of the working families tax credit »,
Briefing Note
n° 6, IFS.
HM TREASURY :
Budget
, différents numéros.
LEFRESNE F., 2001 : « Royaume-Uni - La pauvreté, ses
caractéristiques, l'ambiguïté de l'action
gouvernementale »,
Chronique internationale de l'IRES
n° 69, mars.
MYCK M., 2000 : « Fiscal reforms since May 1997 »,
Briefing Note
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WANLESS D., 2002 :
Securing Our Future Health: Taking A Long-Term
View
, HM Treasury.
Chapitre
3. 4 : Les réformes fiscales en Italie
Paola Veroni
Après avoir atteint l'objectif de stabilisation de la dette
et celui de participation à la monnaie unique, les différents
gouvernements italiens ont pu s'orienter vers une réduction progressive
de la pression fiscale. D'abord la fiscalité d'entreprise a
été reformée par une baisse du taux d'imposition des
bénéfices et par une plus forte neutralité de
l'impôt selon le type de financement des entreprises, cette
dernière orientation ayant toutefois été remise en cause
par le gouvernement Berlusconi. La politique fiscale s'est ensuite
orientée plus graduellement vers la réduction des
prélèvements sur le revenu des ménages, d'abord par une
baisse des taux de l'impôt sur le revenu, puis par une refonte du
barème rendu moins progressif, cette dernière réforme
n'ayant encore été que partiellement appliquée. Le
système de protection sociale a été réformé
par une transformation du système public des retraites d'un dispositif
à prestations définies à un dispositif à
cotisations définies, sans modification du taux de cotisation. La
réforme de la Constitution vers une plus forte décentralisation a
doté les régions de fonctions accrues, et imposé un
fédéralisme fiscal, qui substitue aux transferts de l'Etat des
recettes propres aux régions, la solidarité nationale
n'étant que partiellement assurée par un fonds de
péréquation entre les régions.
En 2001 le taux de prélèvement obligatoire (42,3 %) se situe
au-dessus de la moyenne de l'Union européenne (40,8 %). Au
début de la décennie 1990, les gouvernements issus de la
recomposition des forces politiques, ont hérité d'un taux de
prélèvement obligatoire (TPO) très élevé,
dépassant le seuil de 40 % en 1992. Durant la période
1975-1983, la croissance automatique de la base imposable avec l'inflation
avait engendré une forte hausse du prélèvement. A partir
de 1989, les tranches du barème sont indexées sur l'inflation, et
ce sont des mesures discrétionnaires qui poussent le TPO italien
au-dessus de la moyenne de l'Union en 1993, avec une hausse de 5,3 points.
Cette hausse est rendue indispensable par le cumul des déficits et la
hausse de la dette tout au long des années 1970 et 1980 et le retard de
l'assainissement budgétaire. Celui-ci se fait plus par hausse des
recettes que par baisse des dépenses. Deux pics
« historiques » du taux de prélèvement en
1993 (44 %) et 1997 (44,5 %) marquent l'engagement à la
participation à l'Union monétaire. Le gouvernement de
Centre-gauche, qui atteint le double objectif de stabilisation de la dette et
de la participation à la monnaie unique au prix d'une hausse de la
fiscalité, peut ensuite engager un relâchement de la pression
fiscale.
Graphique 1 : Taux de prélèvement obligatoire
En % du
PIB
Source : ISTAT.
I. Structure des prélèvements obligatoires
L'Italie se caractérise par un fort prélèvement sur les
salaires, notamment par les cotisations sociales (38 % des
prélèvements obligatoires en 1980 et 36,7 % en 1990).
Malgré les efforts de réduction du coût du travail au cours
de la décennie, leur part dans les recettes fiscale en 2000 (30 %)
reste supérieure à celle de la moyenne de l'Union
européenne (23,9 %). L'impôt sur les revenus des entreprises,
qui a enregistré un pic au début de la décennie 1990,
retrouve en 2000 (5,5 %) sa part dans le prélèvement de 1980
(5,3 %), soit un poids plus faible que dans la moyenne des pays de l'Union
(8,3 %). La part de l'impôt sur le revenu des ménages
continue de progresser depuis 1980 (19,2 %), mais reste encore en 2000
(23,8 %) en dessous de la moyenne européenne (40,7 %).
L'Italie, caractérisée encore en 1990 par une faible part des
recettes des collectivités locales (5,5 %), décentralise
10,7 % de son prélèvement en 2000, grâce à la
hausse de l'imposition des entreprises par l'IRAP (5,4 % des recettes
fiscales en 2000).
Tableau1 : Evolution de la structure du prélèvement
Prélèvement obligatoire |
en % du PIB |
en % des prélèvements |
||||||
1980 |
1992 |
1995 |
2000 |
1980 |
1992 |
1995 |
2000 |
|
Total |
31,4 |
42,7 |
42,2 |
42,4 |
100 |
100 |
100 |
100 |
Impôts directs dont : |
9,7 |
14,6 |
14,7 |
14,5 |
30,8 |
34,0 |
35,0 |
34,1 |
- IS (IRPEG, DIT, ILOR, ICIAP) |
1,7 |
2,2 |
2,2 |
2,3 |
5,5 |
5,1 |
5,1 |
5,3 |
- IRPP (IRPEF) |
6,0 |
9,0 |
9,0 |
10,1 |
19,2 |
20,8 |
21,4 |
23,8 |
Impôts indirects dont : |
8,8 |
11,3 |
12,1 |
15,1 |
28,0 |
26,2 |
28,7 |
35,6 |
- TVA |
4,5 |
5,1 |
5,2 |
6,3 |
14,3 |
11,9 |
12,3 |
14,9 |
- IRAP |
-- |
-- |
-- |
2,3 |
-- |
-- |
-- |
5,4 |
Impôts en capital dont : |
0,1 |
2,0 |
0,6 |
0,1 |
0,3 |
4,6 |
1,4 |
0,2 |
- Impôt sur le patrimoine net d'entreprise |
-- |
-- |
0,5 |
-- |
-- |
-- |
1,2 |
-- |
Cotisations sociales |
11,9 |
15,1 |
14,8 |
12,7 |
38,0 |
35,1 |
35,0 |
30,0 |
Source : ISTAT.
II. Principales mesures fiscales de 1992 à 2002
Les gouvernements de « techniciens » (cabinet Amato 1993,
Ciampi 1994, Dini 1995) sortant de la recomposition des forces politiques
après l'opération « mains propres » ont
opéré une gestion d'urgence de la consolidation budgétaire
sans stratégie déterminée. Elle s'est traduite par une
multiplication de mesures : révision des tranches et des
déductions de l'impôt sur le revenu, augmentation des cotisations
sociales, hausse des taux de la TVA, introduction de l'ICI (impôt
municipal sur les entreprises) et de l'impôt sur le patrimoine net
d'entreprise. Par contre, l'absence de clivage politique a permis au
gouvernements Amato et Dini de procéder à une réforme
radicale du système de retraites par répartition, modifiant
d'abord le calcul de la prestation et transformant ensuite le système
à prestations définies en un schéma à cotisations
définies.
Les gouvernements du Centre-gauche (Prodi de 1996 à 1999, D'Alema 2000
et Amato 2001) ont d'abord appelé les entreprises et les ménages
à contribuer à la stabilisation budgétaire en 1997, les
premiers par l'eurotaxe (restituée à la hauteur de 60 % en
1998), les deuxièmes, par une taxe sur les fonds d'indemnités de
fin de carrière. S'est ouverte ensuite une période d'importantes
réformes : la fiscalité d'entreprise est modifiée par
la suppression de plusieurs impôts et l'introduction de la DIT (
Dual
Income Tax
), un mécanisme d'imposition des bénéfices
à deux taux différents et de l'IRAP, un impôt
régional sur la valeur ajoutée nette d'entreprise. Les
cotisations maladie ont été supprimées et une baisse
progressive des cotisations employeurs s'est engagée. La réforme
du système de retraites, engagée par le cabinet Dini en 1995, a
été poursuivie. L'IRPP a été
réformé : le nombre de tranches a été
réduit de 7 à 5, les taux ont été baissés,
le seuil d'exemption et le crédit d'impôt pour enfants à
charge ont été progressivement augmentés. Les revenus de
l'épargne (intérêts et plus-values), soustraits à
l'IRPP, ont été soumis à une retenue à la source
à un taux proportionnel.
La campagne électorale, qui s'est conclue en mai 2001 par
l'élection du deuxième cabinet Berlusconi, a été
centrée sur des projets de baisse du prélèvement par une
réforme radicale de l'IS et de l'IRPP. Le nouveau gouvernement de droite
a remis entièrement en cause la réforme du Centre-gauche,
réintroduisant la loi Tremonti-bis, réédition des mesures
d'incitation à l'investissement déjà en vigueur de la
mi-1994 à la mi-1996. Elle assurerait la transition vers une
réforme complète de la fiscalité, qui envisage, la
suppression de la DIT et de l'IRAP et la baisse du taux de l'IS à
33 %. Une réforme radicale de l'IRPP est annoncée, mettant
en place un barème à deux tranches avec un taux supérieur
à 33 %, couplé avec un impôt négatif.
III. Les réformes de la fiscalité des entreprises
Après une importante réforme au début des années
1970, l'Italie suit un parcours inverse à celui de la majorité
des pays européens, qui réalisent d'importantes baisses du taux
de l'imposition sur les sociétés financées par
l'élargissement de la base imposable. De 1980 à 1997 le taux
légal est réduit de 10 points dans la moyenne des pays
européens, tandis qu'en Italie il augmente de 17 points. Le taux
d'imposition sur le bénéfice des sociétés passe de
36,25 % à 53,2 %. En 1993 un impôt sur le patrimoine net
d'entreprise a été introduit, d'abord temporairement, puis de
façon définitive. En 1995, la loi Tremonti rend déductible
de l'IS les dépenses d'investissements en biens d'équipement,
mais il ne s'agit que d'une mesure conjoncturelle. Ce n'est qu'en 1996 que le
gouvernement de Centre-gauche introduit une réforme plus structurelle.
En 1998, année de son entrée en vigueur, le différentiel
entre le taux italien et le taux moyen européen est devenu
inférieur à 6 points.
1. La réforme de 1998
La
réforme, introduite par un gouvernement de Centre-gauche, touche aux
principaux aspects du système de prélèvement, mais les
innovations les plus importantes concernent les revenus d'entreprises et les
revenus du capital. Sous contrainte du maintien du niveau des recettes, la
réforme se donnait quatre objectifs principaux :
1) Simplification de la relation entre le contribuable et le système
fiscal ;
2) Décentralisation par un transfert de la responsabilité des
dépenses et des recettes aux administrations locales ;
3) Baisse du taux légal et élargissement de la base
imposable ;
4) Neutralité de l'imposition.
Elle se veut une réforme d'ensemble cohérente, concernant aussi
le système de recouvrement des impôts et la lutte contre la fraude
fiscale.
L'introduction de l'IRAP
Le paysage fiscal d'avant la réforme comportait, outre l'IS à 37 %, une multiplicité d'impôts sur les entreprises, levés à tous les niveaux administratifs :
-
• Taxe sur l'enregistrement à la TVA ;
• ILOR, impôt local sur le bénéfice d'entreprise (de 16,2 %) ;
• ICIAP, impôt municipal sur les entreprises ;
• Impôt sur le patrimoine net des entreprises (0,75 % du capital, soit un prélèvement sur les profits entre 5 et 10 %) ;
• Cotisation au système de santé assise sur les rémunérations des salariés, payée par les salariés (1 %) et l'employeur (11,46 %).
Graphique 2 : Impôt sur les sociétés : part des principaux impôts dans le prélèvement total
En %
Source : ISTAT.
L'IRAP, dont les recettes permettent de financer 40 % des dépenses
courantes des régions, permet d'abandonner partiellement les transferts
de l'administration centrale en faveur de l'autonomie fiscale. L'affectation de
90 % de ces recettes au financement du système de santé
complète la réforme de 1992, qui avait attribué une
gestion autonome de la santé aux administrations locales. Le
renforcement progressif de l'autonomie permettra aux régions d'augmenter
le taux de l'IRAP (à ce jour d'un point au maximum) en plus du taux
actuel fixé par l'Etat et de le moduler selon les secteurs.
Tableau 2 : Réforme de 1998
Impôts supprimés |
Perte de
recettes
|
Impôts introduits et modifiés |
Recettes
induites
|
Cotisations maladie |
41
300
|
Elargissement de la base imposable de l'IRPP (suppression cotisations)* |
5
200
|
Impôt sur le patrimoine net |
7
000
|
Elargissement de la base imposable de l'IS (suppression cotisations) |
5
500
|
ILOR |
19
000
|
IRAP |
52
300
|
ICIAP + enregistrement TVA |
3
300
|
Modification IRPP* |
7
600
|
Total |
70
600
|
Total |
70
600
|
*La
redéfinition de la structure de l'IRPP a contribué à
maintenir inchangé le taux moyen d'imposition sur le revenu.
Source : Banque d'Italie.
La réforme de l'IS
Une modification majeure est intervenue dans l'imposition des bénéfices, avec l'introduction de la Dual Income Tax (DIT), qui substitue au taux unique de 37 % de l'IS deux taux d'imposition :
-
• Un taux allégé (
b
=19 %, correspondant
à celui appliqué à la tranche inférieure de l'IRPP)
est appliqué à la rentabilité
« ordinaire » du capital investi. Celle-ci se calcule en
appliquant un taux d'intérêt calculé sur la base du taux
des obligations publiques et privées (actuellement
i
e
=7 %) au patrimoine net. La définition du patrimoine
net pour le calcul de la rentabilité « ordinaire »
est restreinte au patrimoine généré, à partir de
1996, par réinvestissement des profits ou par nouvelles
émissions.
• Un taux plus élevé ( h =37 %, égal au taux de l'IS dans l'ancien système) est appliqué aux bénéfices supplémentaires.
Cette réforme a été guidée par des considérations d'efficacité : réduire le taux marginal sur les bénéfices et répondre à la concurrence fiscale par la baisse du taux moyen, trop élevé par rapport aux niveaux européens. Lors de son introduction la DIT comportait un taux minimal d'imposition moyenne de 27 %. Ce taux était atteint pour une part de bénéfice de référence égale ou supérieure à 55,5 % de la totalité des bénéfices. Quand la part des bénéfices de référence passait de 0 à 55,5 %, le taux moyen d'imposition décroissait de 37 à 27 %.
Compte tenu des réductions du taux légal dans plusieurs pays européens en 2000 et 2001 plusieurs innovations furent introduites, qui accentuent la baisse d'imposition associée à la DIT :
-
• Suppression du plancher d'imposition moyenne de 27 %. Le taux
moyen peut être de 19 % si tout le capital est nouveau.
• Introduction de la Super DIT permettant aux sociétés de personnes de calculer la rentabilité « ordinaire » sur l'intégralité du capital ; pour les sociétés de capital un multiplicateur (+ 20 % en 2000 et + 40 % en 2001) est appliqué au nouveau capital permettant ainsi de calculer la rentabilité « ordinaire » sur une partie du capital ancien.
• Introduction de la loi Visco pour les années 1999, 2000 et 2001, permettant qu'une partie additionnelle du revenu net déclaré soit soumise au taux de 19 % : l'investissement en biens d'équipement neufs, les bénéfices destinés aux réserves et les apports en espèces.
• La loi de finances pour 2001 a accéléré la réforme de l'impôt sur les bénéfices résiduels par la baisse d'un point (de 37 à 36 %) du taux ordinaire, qui aurait dû se poursuivre pour atteindre 35 % en 2003. Le taux d'imposition de la DIT est aujourd'hui de 32,5 % en moyenne, mais il diminuera jusqu'à 25 %, lorsqu'un montant plus important des bénéfices sera assujetti au taux de 19 %.
• La loi de finances pour 2000 a aussi introduit des déductions fiscales dans les zones défavorisées, notamment le Mezzogiorno (crédit d'impôt de 15 % à 60 % pour les nouveaux investissements et de 100 % pour la création d'entreprise) pour la période 2001-2006.
Résultat de la réforme de l'IS
Le taux d'imposition total (comprenant l'IRAP) varie de 23,25 % (un des plus bas d'Europe), pour les entreprises bénéficiant entièrement de la DIT à un maximum de 40,25 %, le plus élevé en Europe. Certains documents indiquent un taux maximal de l'impôt sur les bénéfices plus élevé (50 %), qu'ils calculent en y imputant entièrement le poids apparent de l'IRAP (13 %). Cet impôt étant assis sur toutes les autres composantes de la valeur ajoutée pèserait aussi sur les bénéfices. Ce calcul ne correspond cependant pas au taux légal et n'est donc pas approprié pour les comparaisons internationales.
Effets sur les choix financiers et réels
Dans
l'ancien système l'imposition des bénéfices T
1
résultait de la somme du taux de l'impôt sur les revenus
d'entreprise (IS, 37 %) et du taux de l'impôt local sur le revenu
(ILOR, 16,2 %). La base imposable était constituée des
bénéfices fiscaux : le revenu, F(K), net de la charge
d'intérêt (iB) et des amortissements (A).
T
1
=
1
[F(K)- A-iB]+
k
[E].
L'impôt sur le patrimoine net (E) (
k
=0,75 %) avait pour
base le capital accumulé dE
1
/dt, généré
par les profits réinvestis (F(K)-iB-A) net des dividendes (D) et de
l'impôt sur les bénéfices (T
1
).
dE
1
/dt=F(K)-iB-A-D-T
1
A partir de 1995 les émissions de nouvelles actions ont
été exclues de cette base imposable, introduisant ainsi un biais
au détriment du financement par réinvestissement des profits.
Après la réforme l'impôt est le résultat de trois
éléments.
T
2
=
[F(K)-A]+
b
[i
e
E]+
h
[F(K)-A-iB-i
e
E] où
l
=4.25%;
b
=19% et
h
=36%
Dans la base imposable de l'IRAP, qui remplace l'ILOR et l'impôt sur le
patrimoine net, la charge d'intérêts n'est pas déductible,
donc
s'applique à
[F(K)-A]. Après la
réforme le taux de l'IS est différentié :
b
=19% s'applique à la part des bénéfices
correspondant à une rentabilité « ordinaire »
du capital, calculée comme la somme des augmentations de capital, E,
(par apport des actionnaires ou profits réinvestis) depuis 1996,
multipliée par un taux i
e
=7 %. Le taux
« normal » de l'IS
h
=36% s'applique aux
bénéfices résiduels [F(K)-A-iB-i
e
E].
Après la réforme le patrimoine net est
généré par les bénéfices réinvestis
nets des dividendes, de l'impôt sur le bénéfice et par les
émissions de nouvelles actions (Q).
dE
2
/dt=F(K)-iB-A-D-T
1
+ Q
Avant la réforme le taux marginal d'impôt était très
différencié : le choix du financement par la dette (dont le
coût marginal de 5 %) était favorisé par la
déduction des intérêts. Cet avantage était d'autant
plus élevé que le taux légal sur les
bénéfices était de 53,2 %. Le coût du capital
financé par dette était inférieur au taux
d'intérêt de marché impliquant un taux marginal
négatif. Le réinvestissement des bénéfices
(coût marginal de 12,3 %) était pénalisé
par rapport aux émissions nouvelles (coût marginal de
10,7 %), parce que soumis à l'impôt sur le patrimoine net,
qui exemptait ces dernières. Avec un faible taux d'imposition personnel
sur les revenus d'intérêt (12,5 %) l'imposition plus
favorable des plus-values et des dividendes n'arrivait pas à compenser
l'effet total des deux prélèvements.
La réforme n'a pas entièrement supprimé l'avantage fiscal
de l'endettement, mais elle l'a réduit par rapport au financement par
émission d'actions. L'imposition du revenu personnel ne contrebalance
pas cet écart car le même taux est appliqué aux
intérêts, aux dividendes et aux plus-values (12,5 %). La
réintroduction de la charge de la dette dans la base imposable de l'IRAP
rend ce dernier neutre par rapport au choix de financement (le coût
marginal du financement par la dette passe à 5,4 % et le coût
marginal du financement par fonds propres baisse à 8,5 %).
L'introduction de la DIT et la suppression de l'ILOR permettent une
réduction additionnelle du coût du financement par fonds propres
(6,4 %). Par contre la déduction fiscale des charges
d'intérêt assurée par l'imposition des
bénéfices résiduels (
h
i) fournit toujours un
avantage par rapport à la déduction pouvant être obtenue
grâce au dualisme de la DIT à un financement par action (
h
-
b
)i
e
). L'introduction des émissions
d'actions dans le patrimoine net d'entreprise supprime la discrimination entre
réinvestissement des profits et émissions.
L'IRAP pèse également sur les deux facteurs, capital et travail,
mais son introduction n'est pas neutre. Le coût du capital est plus
élevé dans le nouveau système à cause de l'absence
de déduction des charges d'intérêt de la base imposable de
l'IRAP. L'effet total sur le coût du capital est toutefois
contrebalancé par la plus faible imposition du capital réinvesti
introduite par la DIT.
Les distorsions du système d'imposition ont été
réduites, sans diminution des recettes fiscales. L'impossibilité
de déduire l'IRAP payé de la base imposable de l'IR et de l'IS a
soulevé des fortes critiques. Toutefois, les recettes de l'IRAP se sont
révélées inférieures aux anticipations des
autorités. Cette mesure a eu pour effet de pénaliser les
entreprises à basse rentabilité et fortement endettées.
L'introduction de la DIT favorise les jeunes entreprises au détriment
des sociétés à forte capitalisation.
2. La réforme de 2001
Le nouveau gouvernement de droite a remis entièrement en cause la réforme du Centre-gauche. Il introduit une loi Tremonti-bis, réédition des mesures d'incitation à l'investissement déjà en vigueur de la mi-1994 à la mi-1996. La loi prévoit l'exclusion de la base de l'impôt sur les sociétés (IS) de 50 % du volume des investissements et des dépenses en formation (dans la limite de 20 % de la masse salariale), excédant la moyenne des 5 dernières années. Ces mesures concernent les investissements effectués en 2001 et en 2002.
-
• La DIT est suspendue pour toute décision d'augmentation du
patrimoine prise après le 30 juin 2001. Le choix entre les deux mesures
est possible pour les opérations décidées avant cette
date. Le cumul est prévu pour les dépenses pour la formation et
lorsque la base imposable soumise au taux de 19 % est inférieure
à 10 % de la base imposable totale.
• La possibilité d'opter entre la Tremonti-bis et la Loi Visco pour toute opération d'investissement ou de mise en réserve des bénéfices, décidée avant le 30 juin 2001, est instaurée. Mais la nouvelle mesure se substitue à la loi Visco pour toute opération après cette date.
• Pour les déductions fiscales dans les zones défavorisées le choix entre les deux mesures reste permis pour les investissements effectués après l'entrée en vigueur de la loi Tremonti-bis.
La loi Tremonti-bis crée une segmentation du prélèvement entre entreprises sur des bases purement accidentelles et aboutit à la coexistence de trois taux d'imposition : 0 % (Tremonti) 19 % (Visco), entre 19 % et 36 % (DIT). Elle ne répond pas à l'objectif de simplification du prélèvement ni à celui de la baisse structurelle du taux d'imposition engagé par la DIT. C'est une mesure conjoncturelle.
Pour son financement le gouvernement compte sur les économies réalisées par la suppression des déductions existantes et par la croissance engendrée par la plus forte demande de biens d'équipement.
Tableau 3 : Effets des mesures d'incitation à l'investissement sur les recettes fiscales
VARIATION DES RECETTES
|
2001 |
2002 |
2003 |
2001-2003 |
Effets directs |
|
|
|
|
Loi
Tremonti-bis
dont :
|
- 6 755
|
- 14 410
|
|
- 21 165
|
Suspension loi Visco |
+ 2 800 |
|
|
+ 2 800 |
Suspension DIT ( hypothèse d'option exercée par la moitié des ayants droit ) |
+ 1 890 |
+ 1 890 |
+ 1 140 |
+ 4 920 |
AUTRES MESURES MINEURES |
+ 8 |
+ 153 |
+ 83 |
+ 244 |
EFFETS INDIRECTS |
|
|
|
|
TVA
|
+ 1 120
|
+ 2 390
|
+ 2 910 |
+ 3 510
|
Recettes
sur chiffre d'affaire additionnel
dont :
|
+ 3 435
|
+ 5 960
|
- 4 310
|
+ 5 085
|
I. TOTAL |
+ 3 428 |
- 1 107 |
- 177 |
+ 2 144 |
Source : Ministère du Trésor.
La loi Tremonti-bis assurerait la transition vers une réforme
complète de la fiscalité annoncée au cours de la campagne
électorale, qui envisage, outre la suppression de la DIT et de la Loi
Visco, la baisse du taux de l'IS à 33 % et l'élargissement
de la base imposable pour inclure partiellement les dividendes et les
plus-values des participations substantielles. La proposition de réforme
introduit une limitation de la déductibilité des
intérêts pour rééquilibrer la perte de
neutralité du système. Mais la DIT fait que, dès 2002 en
régime encore transitoire, le taux de prélèvement effectif
de l'IS est de 32-33 % ; il serait descendu à 25 %
à régime complet, lorsqu'une part de plus en plus importante des
bénéfices aurait été assujettie au taux de
19 %. En tout cas toute baisse du taux en absence de DIT le rendrait
supérieur au 19 % payé par les entreprises nées
après 1996 ou par celles ayant beaucoup augmenté leur actif
récemment. Une alternative aurait été
d'accélérer la DIT et continuer ainsi autant la baisse du
prélèvement que la desincitation à l'endettement. Mais les
bénéficiaires de la DIT sont les entreprises fortement
capitalisées et à forte capacité d'autofinancement. Ce
profil n'est pas représentatif des PME familiales qui constituent une
partie importante du tissu industriel italien et de l'électorat du
Centre-droite. Néanmoins cette réforme enlève un
élément d'automatisme à l'allègement de la
fiscalité implicite dans le mécanisme de la DIT et remet à
la discrétion des gouvernements toute baisse ultérieure.
Le programme électoral comprenait aussi l'abolition de l'IRAP,
accusé de trop accentuer les prélèvements sur les
bénéfices (33 % de DIT plus 5 % d'impact moyen de
l'IRAP). Mais le coût de sa disparition (2,3 points de PIB en 2000), et
le problème du financement des régions, ont
réorienté le gouvernement vers une redéfinition graduelle
de la base imposable. La dernière proposition se limitait à
l'exclusion de la masse salariale de la base imposable. Une simulation
effectuée sur les seules sociétés de capital estime la
réduction d'impôt à 60 % (1,6 point de PIB).
IV. Les cotisations sociales
Au cours de la décennie 1990 l'Italie a poursuivi une politique
d'allégement des cotisations sociales, qui sont passés de 14,3
points de PIB en 1990 à 12,7 en 2000 (plus en ligne avec la moyenne de
l'UE de 12 points de PIB). Une accélération est imprimée
à partir de 1998 lorsque le Pacte social signé avec les
partenaires sociaux engage le gouvernement à une baisse progressive des
cotisations. Le taux légal de cotisation varie selon la taille de
l'entreprise, le secteur d'activité et le statut du travailleur (ouvrier
ou cadre). Le taux moyen effectif est inférieur, car l'Etat
réduit le coût du travail dans les régions
méridionales. Cette politique de dégrèvement
différentié et de fiscalisation des charges sociales perd
progressivement de l'importance, suite aux directives de l'UE.
Tableau 4: Taux légal des cotisations sociales en 2001
|
Taux légal |
|
Salariés des grandes entreprises industrielles |
ouvriers |
cadres |
A la charge de l'employeur |
33,8 |
31,66 |
Retraite |
23,81 |
23,81 |
Chômage |
1,91 |
1,91 |
Fonds de garantie du TFR |
0,20 |
0,20 |
Allocations familiales |
2,48 |
2,48 |
Chômage partiel (Cassa Integrazione Guadagni) |
2,80 |
2,80 |
Assurance maladie et maternité |
2,68 |
0,46 |
A la charge du salarié |
9,19 |
9,19 |
Retraite |
8,89 |
8,89 |
CIG |
0,30 |
0,30 |
Total |
43,07 |
40,85 |
Indépendants |
|
|
Retraite |
Entre 15,80 et 18,80 selon le secteur d'activité |
|
Assurance maladie et maternité |
Forfaitaire 9,8 euros annuels |
Sources : Relation générale sur la situation économique du pays, Ministère du Trésor.
1. Incitations au travail pour les moins qualifiés, baisse du coût du travail, élargissement de l'assiette
Il existe plusieurs politiques de baisse des cotisations poursuivant des objectifs différents.
-
• En 1984 l'introduction du « contrat de formation »
(un CDD de 12-24 mois ayant pour objectif la formation et l'insertion des
jeunes âgés entre 16 et 32 ans) permettait une baisse des
cotisations employeurs de 25 % financée par la fiscalité
générale.
• L'Italie a opéré une substitution du financement d'une prestation universelle par le seul facteur travail à une contribution de la fiscalité générale, lors de la suppression des cotisations santé et de l'introduction de l'IRAP. Les recettes de cet impôt régional sur la valeur ajoutée sont destinées pour 90 % au financement des dépenses régionales de santé. La suppression des cotisations santé au taux de 11,46 % a été permise par l'imposition au taux de 4,25 % de toutes les composantes de la valeur ajoutée, capital et travail compris.
Effet de l'introduction de l'IRAP sur le coût du travail
L'introduction de l'IRAP répond à l'objectif de
neutralité par rapport aux facteurs de production. La réduction
du coût du travail a été évaluée à
1 %.
Le coût unitaire du travail dans l'ancien système était w
(1+cso+csa (1-)) avec w = rémunération du salarié,
csa=taux des cotisations maladie (11,46 %) à la charge de
l'employeur, =part de la cotisation maladie soumise à réduction
(le taux de cotisation était réduit à 6,76 % pour les
entreprises manufacturières dans le Centre-Nord du pays et à
4,76 % dans le Sud), cso= taux des autres cotisations sociales.
Dans le régime IRAP, il vaut w (1+cso)(1+
) avec
=4,25 %.
La variation du coût du travail est w( (1+cso) - csa (1-)). La
réduction du taux légal de 11,46 à 4,25 %
représente seulement en partie la variation du coût, qui est
fonction des cotisations sociales à la charge de l'employeur et de et
n'est donc pas homogène entre secteurs et régions
bénéficiant de différents régimes de
réduction.
-
• Les lois de finances pour 1999, 2000 et 2001 ont mis en oeuvre des
clauses du Pacte social de 1998 baissant de 0,2 point les cotisations
patronales pour l'indemnité de maternité (0,66 %) et
supprimant les cotisations pour famille (0,8 %) et accidents du travail.
Ceux-ci ont été mis à la charge de la fiscalité
générale, notamment par les recettes engendrées par la
lutte contre la fraude et, comme prévu par les accords de Kyoto, par la
carbon tax
. Mais cette dernière forme de financement n'a
été appliquée qu'en 1999.
• Depuis 1990, les entreprises installées dans les zones moins développées du Sud de l'Italie bénéficient d'une exemption de cotisations, totale jusqu'en 1997 et partielle de 1998 à 2001. La loi de finances pour 1999 a rajouté, pour toute création d'emploi sur tout le territoire national, une exonération totale de cotisation, ainsi qu'un crédit d'impôt pour toute embauche par une PME. La loi de finances pour 2001 a modifié ce cadre introduisant un crédit d'impôt pour toute création d'emploi jusqu'en 2003 dans tout le pays, avec un crédit d'impôt additionnel pour le Sud. Néanmoins l'avantage relatif des régions méridionales a été réduit.
• La dernière mesure en faveur de la baisse du coût du travail a été proposée par le gouvernement Berlusconi. Elle consiste enune baisse de 3 à 5 points des cotisations retraite au système public pour toute embauche de jeune (participant au nouveau système public de retraite à cotisations définies). De cette baisse, 2 points seraient attribués aux fonds de pensions privés, pour en accélérer le développement. Le restant se traduirait en baisse du coût du travail pour l'entreprise. Cette baisse du coût du travail compenserait l'entreprise de la perte de l'indemnité de fin de carrière (une forme obligatoire de retraite professionnelle, financée et gérée par l'employeur avec une contrainte de rentabilité très faible), qui serait transférée aux fonds de pension privés.
Tableau 5: Evolution de la structure des cotisations sociales
|
En % du PIB |
En % du prélèvement |
||||
|
1990 |
1995 |
2000 |
1990 |
1995 |
2000 |
Total |
14,4 |
14,8 |
12,7 |
36,7 |
35,0 |
30,0 |
Retraite |
11,3 |
11,9 |
12,7 |
28,6 |
28,2 |
30,0 |
Santé |
3,2 |
2,9 |
0,0 |
8,1 |
6,8 |
0,0 |
A la charge de l'employeur |
10,7 |
10,4 |
9,0 |
27,1 |
24,6 |
21,2 |
Retraite |
8,2 |
8,4 |
9,0 |
20,7 |
20,0 |
21,2 |
Santé |
2,5 |
2,0 |
0 |
6,4 |
4,7 |
0 |
A la charge du salarié |
2,5 |
2,5 |
2,4 |
6,3 |
5,9 |
5,7 |
Retraite |
2,2 |
2,3 |
2,4 |
5,6 |
5,4 |
5,7 |
Santé |
0,3 |
0,2 |
0 |
0,7 |
0,6 |
0 |
Indépendants |
1,2 |
1,8 |
1,3 |
3,2 |
4,2 |
3,1 |
Retraite |
0,9 |
1,2 |
1,3 |
2,2 |
2,7 |
3,1 |
Santé |
0,4 |
0,6 |
0 |
1,0 |
1,4 |
0 |
Non travailleurs** |
0,1 |
0,1 |
0,0 |
0,1 |
0,3 |
0,1 |
Retraite |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,1 |
0,1 |
0,1 |
Santé |
0,0 |
0,1 |
0 |
0,0 |
0,1 |
0 |
Cotisations socialisées |
0,7 |
0,4 |
0,0 |
1,8 |
0,8 |
0,1 |
Retraite |
0,6 |
0,4 |
0,0 |
1,4 |
0,8 |
0,1 |
Santé |
0,2 |
0,0 |
0* |
0,4 |
0,0 |
0* |
* La
socialisation est faite à la charge de la fiscalité
régionale.
** Ce groupe comprend le clergé, les femmes au foyer et les individus
inactifs cotisant sur une base volontaire.
Source : INPS.
2. Les cotisations retraite
Depuis le début des années 1990 le système de protection sociale a été l'objet de trois réformes radicales : en 1992 la réforme Amato, en 1993 la loi d'encadrement de l'assurance complémentaire retraite, en 1995 la réforme Dini et en 1997 la réforme Prodi. Elles ont réformé un système qui attribuait des taux de rendement complètement déconnectés de l'évolution des variables déterminant sa soutenabilité macroéconomique. Le traitement des individus était inégal selon leur profession et leur parcours de carrière, en raison de la diversité des règles entre secteur et du principe « à dernier salaire identique, pension identique » indépendamment de l'effort contributif. Les titulaires de pensions d'ancienneté (un dispositif permettant un départ à taux plein avec 37 ans de cotisations sans condition d'âge ou à 57 ans avec 35 ans de cotisations) bénéficiaient, compte tenu de leur jeunesse, d'un taux de rendement plus élevé. Les taux de cotisations effectifs étant déjà très élevés (8,9 % pour les employés et de 23,8 % pour les employeurs dans le secteur privé), une réduction des dépenses s'imposait. Le grave déséquilibre financier se voit dans l'écart entre le taux de cotisation effectif et le taux de cotisation d'équilibre : en 1997, après les deux réformes de 1992 et de 1995 ils étaient encore 32,7 % contre 41 % respectivement.
-
• La réforme Dini a introduit des changements fondamentaux dans la
structure des prestations par la transformation du système de
Sécurité sociale en un dispositif à cotisations
définies et par l'unification des conditions d'acquisition des droits.
Le dispositif continue à fonctionner selon le financement des
prestations courantes par les cotisations versées dans l'année.
Mais il introduit un principe de capitalisation virtuelle par la
création d'un compte individuel pour chaque assuré,
financé par un quota fixe du salaire, le taux de cotisation
d'équilibre (33 % pour les salariés, 20 % pour les
indépendants, 10 % pour les autres), utilisé pour calculer
la prestation. Ainsi la valeur actualisée des pensions perçues au
cours de la période de retraite est égale au capital virtuel des
cotisations accumulées durant la vie active. La réforme a fait le
choix crucial de stabiliser le taux de cotisation et réduire le taux de
remplacement au lieu de choisir un taux de remplacement et d'en déduire
un taux de cotisations (qui aurait dû augmenter avec la date de naissance
de l'assuré). Ce nouveau système, s'appliquant uniquement aux
travailleurs avec moins de 18 ans de cotisation en 1995, leur fera recevoir des
retraites plus faibles que celles qu'ils assurent à leurs parents. Le
taux de remplacement passe de 88 % pour les adhérents à
l'ancien système à 64 % pour les nouveaux assurés.
• La possibilité d'augmenter la prestation par l'adhésion aux plans professionnels, qui demeure facultative, est difficilement envisageable. En effet avec un taux de cotisations effectif au système par répartition de 32,7 % et un de 7,4 % pour l'indemnité de fin de carrière (TFR), le taux de cotisations obligatoire de 40 % est déjà une charge trop importante sur les salariés et les employeurs. Et cela malgré le fait que le taux de rendement assuré par le système par répartition (de l'ordre de 1,5 % en terme réel compte tenu de la faiblesse de la croissance anticipée pour les prochaines 40 années) soit inférieur à celui que l'on pourrait obtenir sur les marchés financiers. Le transfert de l'indemnité de fin de carrière aux fonds de pension privés est donc indispensable, bien qu'insuffisante pour financer le deuxième pilier sans augmenter le taux de cotisation obligatoire.
• Le premier pas vers le développement du deuxième pilier est la loi de 1993 établissant le processus de constitution des fonds de pension et permettant de verser la cotisation annuelle de TFR aux fonds de pension. Lorsque la négociation collective le prévoit, les assurés peuvent convertir une part du paiement annuel du TFR dans les fonds de pension, alors que les nouveaux assurés doivent placer entièrement le quota annuel de TFR dans les fonds de pension.
• La loi 2000 introduit deux nouvelles formes d'épargne retraite : la participation sur base individuelle (outre celle déjà prévue depuis 1993 sur base collective aux fonds négociés ou fermés, crées par des accords de branche) aux fonds non négociés (ou fonds ouverts) et les formes individuelles réalisées par des contrats d'assurance-vie à des fins de prévoyance. Elle prévoit le plein transfert des droits et intensifie l'harmonisation avec le système d'imposition de l'épargne financière. Elle a aussi rendu fiscalement moins rentable la liquidation anticipée de l'indemnité de fin de carrière, une fois qu'elle a été transférée aux fonds. Avec cette moindre liquidité du TFR l'objectif de couverture du risque vieillesse a primé sur celui de protection du risque chômage ou santé.
Jusqu'ici les gouvernements ont choisi l'option plus conservatrice du maintien du même taux de cotisation et de l'allocation de la nouvelle épargne ou de la réorientation du TFR aux fonds de pension. Cette option a reçu le soutien des employeurs en échange d'une réduction du coût du travail (baisse des cotisations ou modération salariale). Des propositions plus innovatrices suggèrent de laisser le choix aux nouveaux actifs de réduire leur cotisation au régime par répartition, qu'ils devraient placer dans des fonds par capitalisation. Durant la période transitoire, la perte de revenu du régime par répartition serait compensée par une hausse de la fiscalité, ce qui provoquerait un transfert des générations nées avant 1980 vers celles nées ensuite. Une autre proposition plus radicale suggère la transformation progressive du système actuel en système public préfinancé par capitalisation, ceci par une forte cotisation additionnelle temporaire, qui permettrait d'accumuler des actifs importants. Cette proposition, qui suppose une rentabilité trop élevée, a été totalement écartée par le gouvernement.
-
• Le gouvernement D'Alema en 2000 avait proposé de rendre
automatique pour tous les travailleurs l'attribution du total du TFR annuel aux
fonds de pensions ; le patronat a réclamé en échange
une réforme de la totalité du système de
Sécurité sociale et une réduction du taux de cotisation
obligatoire, tout en posant un veto sur l'automatisme du transfert.
• Face à ce blocage, le gouvernement Berlusconi utilise le levier des réductions d'impôt et de cotisation pour rendre acceptable le transfert du TFR au deuxième pilier. La dévolution du TFR futur (aux fonds négociés en cas de silence du travailleur) est ainsi encouragée par une baisse des cotisations employeur de 3 à 5 points pour les nouveaux assurés, tout en assurant le maintien du niveau de leur prestation retraite. De cette baisse 2 points seulement seraient dévolus aux fonds de pension et les points restants bénéficieraient aux entreprises en tant que baisse du coût du travail. Au risque politique de faire accepter une baisse des prestations aux nouveaux assurés, le gouvernement a préféré le risque financier, car face à cette baisse du taux de cotisation effectif, le taux d'équilibre du système à cotisations définies reste inchangé à 33 %. La logique de la réforme Dini est renversée et une cause d'instabilité financière est introduite par rapport à l'équilibre tendanciel du système contributif. Cela implique un concours additionnel permanent de l'Etat au financement du système de retraite et en particulier de l'assurance complémentaire ; la fiscalité générale est appelée à financer un instrument en faveur des seuls actifs. Le gouvernement a choisi d'agir dans le cadre conservateur du maintien du système obligatoire à répartition partiellement réformé (cotisations définies pour les nouveaux assurés et prestations définies pour les autres) et d'un deuxième pilier financé uniquement par le TFR. Il a aussi renoncé à résoudre le problème des pensions d'ancienneté (et donc du départ précoce à la retraite) et de l'incompatibilité de certains instruments. Depuis 2001 existe une exonération de cotisation à la charge du travailleur et de l'employeur au cas où les travailleurs ayant rempli les critères de la retraite d'ancienneté, continueraient leur activité dans le cadre d'un CDD d'au moins deux ans, renouvelable plusieurs fois jusqu'à l'âge de la pension de vieillesse et renoncent temporairement à leur retraite. A ce jour l'inefficacité de cette mesure d'incitation au report de la pension d'ancienneté s'est traduite par son application à seulement 240 retraités. Le gouvernement la renforce en attribuant au travailleur au moins 50 % des cotisations épargnées par l'employeur. Il étend ces incitations aux pensions de vieillesse, voulant ainsi réduire l'incitation à choisir l'autre option, rendue possible en 2001, de cumuler retraite (de vieillesse et d'ancienneté contributive de 40 ans) et autres revenus et de continuer à cotiser. Alternative qui permet aussi aux retraités participant encore au système à prestations définies de pouvoir cumuler les cotisations additionnelles aux 40 ans et de bénéficier d'un supplément de retraite selon le calcul à cotisations définies. D'autre part le gouvernement annonce vaguement vouloir supprimer l'interdiction partielle de cumul (permis à la hauteur de 70 % de la pension) entre pension d'ancienneté (pour une période contributive inférieure aux 40 ans) et autres revenus du travail.
La fiscalité sur l'assurance complémentaire retraite
De façon générale, le système italien applique le principe de double taxation du revenu du capital (cotisation exemptée, rendement taxé, prestation taxée, soit ETT) contrairement à la majorité des pays européens (cotisation exemptée, rendement exempté, prestation taxée, soit EET). Le TFR reçoit le même traitement fiscal que toute autre cotisation aux fonds de retraites privés, mais l'employeur peut bénéficier d'un crédit d'impôt sur le revenu d'entreprise pour 3 points de parts de TFR versés aux fonds de pension. Les versements aux fonds de pension payent le même taux de cotisation social salariés que les salaires, alors que les employeurs payent une cotisation réduite égale à 10 %. Depuis 2000 le bénéfice fiscal sur le revenu du travail destiné à l'épargne a été augmenté. Les versements aux fonds sont entièrement déductibles du revenu d'entreprise et du revenu du travailleur à hauteur de 12 % du salaire brut (par rapport au 2 % admis précédemment), avec un plafond de 5 170 euros par an et de 2 fois le TFR versé pour les salariés. Jusqu'en 1999, l'épargne dans un fonds d'investissement ne procurait aucun avantage à l'entrée, mais ses revenus étaient imposés à un taux plus faible (12,5 %). A partir de 1999 les revenus de l'épargne au sein des fonds de pension, ainsi que les revenus de la revalorisation du TFR au sein des entreprises, sont imposés au taux de 11 %. Les prestations versées en rente sont entièrement soumises à l'IRPP, sauf pour la partie provenant de la revalorisation du fonds (déjà taxé à 11 %). La sortie en capital est séparée en deux composantes : la partie provenant du revenu du capital accumulé ou du rendement financier du TFR n'est pas imposée (tant que la sortie en capital ne dépasse le tiers du montant accumulé) ; le capital accumulé par cotisation est soumis à la même imposition séparée que le TFR. Les propositions récentes du gouvernement Berlusconi concernent la baisse de l'imposition du revenu de l'épargne auprès des fonds à 6 % en vue du passage à un système d'imposition de type EET.
3. Incitations à l'épargne salariale
L'Italie
n'a pas fait de l'épargne salariale une priorité. Il n'existe
aucune autre forme d'épargne salariale obligatoire que
l'indemnité de fin de carrière (TFR), qui jusqu'en 1993
était le seul instrument d'assurance vieillesse complémentaire.
Il s'agit toutefois d'un instrument, qui fournit un capital versé
à la retraite et le déblocage anticipé est prévu
uniquement en cas d'évènements spéciaux (achat immobilier,
importants besoins familiaux). L'employeur verse chaque année 7,4 %
du salaire brut (équivalant au treizième mois) et gère le
fonds sans contrainte d'investissement excepté l'interdiction d'achat
des actions de l'entreprise. La contrainte de rentabilité étant
très faible (1,5 % plus 75 % du taux de croissance de l'indice
des prix à la consommation), le fonds constitue une source de
financement à très bon marché pour l'entreprise. Depuis
2000, le TFR ne bénéficie plus d'avantages fiscaux par rapport
aux autres formes d'épargne complémentaire pour la retraite. Les
lois de 1993 et 2000 ont aussi réorienté le TFR à des fins
de prévoyance en rendant plus difficile la mobilisation anticipée
du TFR transféré aux fonds de pension.
L'actionnariat salarié s'est développé récemment
avec le processus de privations. Plus de 50 % des employés des
grandes entreprises privatisées en ont acquis les actions. Les actions
distribuées gratuitement aux salariés dans le cadre
d'augmentations de capital sont exemptées de l'impôt sur le
revenu, mais à partir de 2000, cette exonération est maintenue
à condition que la distribution profite à l'ensemble du
personnel, que les titres soient conservés au moins 3 ans et pour un
montant annuel inférieur à 1 550 euros.
4. La lutte contre la fraude
Il y
aurait en Italie selon les estimations officielles 3,5 millions de travailleurs
(salariés et indépendants) non déclarés, soit
15,1 % de l'emploi
.
14,4 % du PIB serait réalisé
par l'économie souterraine. La réforme de 1998 avait introduit
trois mesures principales : contrôles croisés dans les
déclarations de l'IR, de l'IS, de la TVA et des cotisations sociales,
qui sont aujourd'hui examinées simultanément, afin d'en
vérifier la cohérence ; études sectorielles fixant un
niveau standard de revenu à déclarer par les travailleurs
indépendants ; mesures rajoutant à la logique de sanction
une dimension d'incitation à la déclaration des revenus. Ces
mesures en couple avec la réforme fiscale, qui a introduit un
élargissement de la base imposable, ont permis une hausse des recettes
de l'impôt sur le revenu des personnes et sur les bénéfices
de 0,7 point de PIB en 2000.
Depuis 1996, les entreprises installées dans le Sud revenant dans la
légalité bénéficiaient d'une régularisation
graduelle des cotisations et de l'exclusion de sanction. Pour les
périodes d'activité irrégulière, il fallait
acquitter 25 % des cotisations sociales annuelles et la totalité de
l'impôt fraudé. Pour le salarié la régularisation
des charges fiscales sur le salaire était graduelle, mais tout
contentieux sur les cotisations était suspendu.
La majorité actuelle a fortement renforcé la dimension incitative
et elle a étendu ces mesures à tout le pays
.
L'objectif
est de régulariser un quart des salariés irréguliers et un
cinquième des revenus d'entreprise et des revenus du travail (2,7 %
du PIB au total).
Les entreprises revenant dans la légalité
bénéficient d'un taux réduit de l'IS (ou de l'IRPP) de
10 % la première année, 15 % la deuxième,
20 % la troisième, sous un plafond égal à 3 fois la
masse salariale régularisée (gain attendu : 7 milliards
d'euros). De même, le taux de cotisation employeur serait de 7 %,
9 % et 11 % au lieu de 23,8 % (gain attendu : 4,6 milliards
d'euros). Le travailleur régularisé verrait son taux de IRPP
réduit à 6 %, 10 % et 12 % (gain attendu :
3,7 milliards d'euros) et une totale exemption de cotisation. Il pourra choisir
d'alimenter son compte retraite par des cotisations volontaires.
Les périodes de travail irrégulier ne seront pas
sanctionnées, mais l'entreprise sera soumise à un impôt
libératoire de 8 % des salaires non déclarés pour
chaque année (gain attendu : 3,7 milliards d'euros). Pour le
travailleur la dette envers l'Etat s'annule avec le paiement de 103 euros par
année de travail irrégulier (gain attendu : 0,3 milliard
d'euros). Le gouvernement espère une hausse des recettes de 0,3 à
0,5 point de PIB par an de 2001 à 2003, période pendant laquelle
les mesures sont en vigueur.
Dans la même optique de mobilisation des ressources et de
l'émergence de recettes fiscales futures le gouvernement Berlusconi a
mis en place une mesure, « le bouclier fiscal » pour
permettre la rentrée de capitaux exportés illégalement.
L'incitation se fait par la suspension de toute sanction et par la soumission
à un faible impôt libératoire (2,5 %) lors de la
rentrée des capitaux sur le territoire italien et lors de la
régularisation de l'activité jusqu'à mai 2002. Les
bénéficiaires sont les personnes physiques et les
sociétés en nom personnel.
V. La fiscalité sur les personnes
L'IRPP (
IRPEF
) est le principal impôt du système italien.
Sa part dans le PIB passe de 8,3 % à 10,1 % entre 1990 et 2000
(de 21,1 % à 23,8 % du prélèvement et de
58,7 % à 69,3 % des impôts directs). Sa hausse provient
de mesures de révision des tranches et des crédits d'impôt
entre 1990 et 1993. La suppression de l'indexation totale des tranches à
l'inflation, introduite vers la fin des années 1980, y a
contribué. En 1997 est introduite une impopulaire eurotaxe,
principalement une taxe additionnelle progressive sur l'IRPP de 0,3 point de
PIB, qui est restituée à la hauteur de 60 % (0,2 point de
PIB) en 1998.
La structure productive italienne caractérisée par une forte
composante d'indépendants, et la plus grande difficulté à
évaluer les revenus de cette catégorie de contribuables a
de
facto
concentré la charge de l'IRPP sur les salariés. A cause
de l'érosion et de la fraude, le taux d'imposition est assez
élevé, pour une part de l'impôt dans le PIB en ligne avec
les autres pays européens. C'est pour compenser l'évasion
possible pour certaines catégories de contribuables qu'au début
de la décennie 1990 le précédent système de
déductions a été remplacé par un système
plus articulé de crédits d'impôt liés aux
différentes sources de revenu et à la composition familiale.
L'orientation du législateur s'est déplacée du principe
d'équité verticale à l'équité horizontale.
L'unité d'imposition de l'IRPP est l'individu, mais certains
éléments tels que les crédits d'impôt sont
fondés sur la famille nucléaire. Les membres du ménage
sont à charge lorsque leur revenu annuel n'excède pas 2 840
euros. Les enfants sont à charge jusqu'à 18 ans (à 26 ans
si étudiants). Les couples bi-actifs peuvent choisir à quel
époux attribuer la charge de l'enfant afin de bénéficier
du crédit d'impôt, qui est attribué sur la base du revenu
individuel. Ils peuvent aussi partager la charge (selon la proportion
souhaitée) et se répartir ainsi le crédit d'impôt.
Le revenu imposable est obtenu par la somme des revenus du travail
(salariés, indépendants, entreprises commerciales), des revenus
de la propriété immobilière et des revenus du capital.
Le système comporte un ensemble de déductions et de
crédits d'impôt, qui répondent à divers
objectifs : crédit d'impôt standard pour le conjoint et les
enfants à charge et crédit additionnel pour les salariés
et les retraités ; déductions des cotisations sociales
acquittées par l'employeur et le travailleur, du loyer ou la valeur
locative de l'appartement ; crédit d'impôt à hauteur
de 19 % pour les dépenses de santé et éducation, les
prêts pour l'achat de la résidence principale et les primes
d'assurance. L'incidence relative des crédits d'impôt standard
diminue au fur et à mesure que l'impôt augmente. Le crédit
d'impôt pour les salariés et les retraités comporte un
montant fixe et un montant supplémentaire sous condition de ressources.
Les crédits d'impôt pour membre de famille à charge sont
accordés en fonction décroissante du revenu. Le crédit
d'impôt trouve sa limite dans l'impôt minimum nul, car il n'existe
pas d'impôt négatif.
Le système de redistribution est donc plus axé sur la
déduction et le crédit d'impôt que sur les transferts et
les allocations. Ces dernières représentent en moyenne seulement
0,6 % du revenu primaire brut. Le système est expressément
orienté vers l'aide des ménages salariés avec enfants
à charge et faible revenu. Comme tous les systèmes d'imposition
individualisée il favorise les ménages dans lesquels le revenu
est réparti de façon paritaire, tout en réduisant la
pénalisation de l'offre de travail du travailleur secondaire (à
plus faible capacité de gain). Le système qui en résulte
est moins progressif qu'en France et légèrement régressif
dans la partie haute de la distribution. Le taux marginal est très
élevé dans le premier vingtile de la distribution du revenu.
Graphique 3: Evolution du prélèvement sur le revenu
En %
Source : ISTAT.
1. Les principales étapes de la réforme de l'IRPP
La réforme de l'IRPP est assez graduelle et tient compte des marges de manoeuvre permises par la politique de stabilisation budgétaire :
- • En 1998 la redéfinition de la structure de l'IRPP permet le maintien du même taux moyen d'imposition malgré la suppression des cotisations maladie à la charge du travailleur, qui étaient précédemment déductibles de l'impôt sur le revenu.
Avec la redéfinition de l'impôt sur les revenus du capital, plusieurs types de revenus de l'épargne (intérêts et plus-values) sont soustraits à l'IRPP et soumis à une retenue à la source à un taux proportionnel.
Tableau 6 : Barème de l'IRPP avant la réforme de 1998
Tranchesde revenu |
|
|
taux |
Millions de lires |
euros |
En % du salaire moyen |
|
0-7,2 |
0-3718 |
0-18,9 |
1 |
7,2-14,4 |
3718-7437 |
18,9-37,7 |
22 |
14,4-30 |
7437-15494 |
37,7-78,6% |
27 |
30-60 |
15494-30987 |
78,6-157,2 |
34 |
60-150 |
30987-77469 |
157,2-392,9 |
41 |
150-300 |
77469-154937 |
392,9-785,8 |
46 |
>300 |
>154937 |
>785,8 |
51 |
Source : Ministère du Trésor.
-
• La loi de finance pour 2000 introduit aussi des éléments
de progressivité : l'effet régressif de la réduction
d'un point du taux appliqué à la deuxième tranche est
partiellement compensé par l'introduction d'un crédit
d'impôt pour les salaires inférieurs au seuil de la
deuxième tranche. La hausse du crédit d'impôt pour enfant
à charge et l'introduction d'un crédit d'impôt pour tout
enfant d'âge inférieur à trois ans contribuent aussi
à la plus forte progressivité de l'impôt.
• Le supplément de recettes fiscales non prévues (appelées « bonus fiscal ») considérées comme structurelles sont restituées par la loi de finances pour 2001 sous forme de la plus importante réduction du prélèvement direct des vingt dernières années (1,1 point de PIB). La baisse généralisée de la charge fiscale (tableau 6) est plus accentuée pour les plus faibles revenus, grâce à la hausse du seuil d'exonération et à l'adaptation au nouveau barème du crédit d'impôt pour les salaires inférieurs au seuil de la deuxième tranche.
Tableau 7 : Barème de l'IRPP 1999-2003 prévu dans la Loi de finances pour 2001
Tranches de revenu |
|
|
Taux |
||||
Millions de lires |
euros |
En % du salaire moyen |
1999 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
0-20 |
0-10329 |
0-50 |
18,5 |
18,5 |
18,0 |
18,0 |
18,0 |
20-30 |
10329-15494 |
50-74 |
26,5 |
25,5 |
24,0 |
23,0 |
22,0 |
30-60 |
15494-30987 |
74-149 |
33,5 |
33,5 |
32,0 |
32,0 |
32,0 |
60-135 |
30987-69722 |
149-335 |
39,5 |
39,5 |
39,0 |
38,5 |
38,0 |
>135 |
>69722 |
>335 |
45,5 |
45,5 |
45,0 |
44,5 |
44,0 |
Source : Ministère du Trésor.
Tableau 8 : Système des abattements en 2001
Tranches de revenu en : Millions de lires |
euros |
% du salaire moyen |
euros |
Crédit d'impôt pour les revenus salariaux |
|||
0-12 |
0-6197 |
0-30 |
1147 |
12-19 |
6197-9813 |
30-47 |
décroissante de 1085 à 578 |
19-30 |
9813-15494 |
47-74 |
542 |
30-60 |
15494-30987 |
74-149 |
décroissante de 491 à 336 |
60-100 |
30987-51646 |
149-248 |
décroissante de 284 à 77 |
>100 |
>51646 |
>248 |
52 |
Crédit d'impôt pour conjoint à charge |
|||
0-30 |
0-15494 |
0-74 |
546 |
30-60 |
15494-30987 |
74-149 |
497 |
60-100 |
30987-51646 |
149-248 |
459 |
>100 |
>51646 |
>248 |
422 |
Crédit d'impôt pour enfant à charge |
|||
<100 |
<51646 |
<248 |
285 |
<100 |
<51646 |
<248 |
+ 33 pour tout enfant additionnel |
>100 |
>51646 |
>248 |
266 |
Tout revenu |
|
|
+ 124 pour tout enfant d'age inférieure à 3 ans |
Source : Ministère du Trésor.
Tableau 9: Crédit d'impôt additionnel pour les bas salaires en 2001
Age |
Tranches de revenu |
|
|
|
|
Millions de lires |
euros |
En % du salaire moyen |
euros |
<75 |
0-9,4 |
0-4 855 |
0-23 |
98 |
< 5 |
9,4-18 |
4 855-9 296 |
23-45 |
62 |
>75 |
0-9,4 |
0-4 855 |
0-23 |
222 |
>75 |
9,4-18 |
4 855-9 296 |
23-45 |
186 |
>75 |
18-18,5 |
9 296-9 554 |
45-46 |
93 |
>75 |
18,5-19 |
9 554-9 813 |
46-47 |
46 |
Source : Ministère du Trésor.
L'introduction d'un crédit d'impôt plus élevé,
croissant en fonction du rang et décroissant en fonction du revenu
individuel (tableau 8) augmente le caractère redistributif vertical mais
soulève le problème de la neutralité par rapport au nombre
de membres contribuables. Cette mesure favorise les couples mono-actifs
appartenant aux tranches intermédiaires de revenu.
La loi de finances pour 2002 poursuit l'objectif redistributif avec le
même instrument que les précédentes : mais en
accentuant le caractère de redistribution verticale, par l'augmentation
des crédits d'impôt différentiés pour enfant
à charge, elle renforce le problème de neutralité face au
nombre de percepteurs. L'effet progressif de cette hausse, concentrée
sur les revenus moyens et bas, est renforcé par la suspension de la
réduction du taux de l'IRPP, notamment la baisse d'un point de la
deuxième tranche et de 0,5 point pour les deux taux les plus
élevés.
Tableau 10 : Crédit d'impôt pour enfant à charge en 2002
Tranche de revenu
|
Montant du crédit
|
<36151 |
516 |
36 151-51 646 |
303 ou 516 si entre 2 et 3 enfants |
>51 646 |
285 ou 516 si au moins 4 enfants |
Tout revenu |
+ 124 pour tout enfant d'age inférieure à 3 ans |
Source : Ministère du Trésor.
Toutefois l'effet progressif trouve ses limites dans la modalité de
baisse du prélèvement par hausse des abattements. La baisse de
l'IRPP de 2001 avait déjà fait ressortir le problème de
l'existence de ménages, qui n'ayant pas un revenu et donc d'un
impôt dû suffisamment élevés pour
bénéficier de la hausse des déductions, ne profitaient pas
de la réforme. En 2002 environ un tiers de l'augmentation formelle du
crédit d'impôt ne correspond pas à une augmentation du
revenu disponible. Ce phénomène concerne un cinquième des
ménages italiens et 75 % des ménages les plus pauvres.
2. Les propositions de réforme de l'IRPP
Ce
problème a inspiré la proposition d'une réforme plus ample
de la fiscalité et de la protection sociale autant de la part de la
majorité que de l'opposition. Le changement radical qu'elles impliquent
ainsi que la situation des finances publiques n'a pas permis l'introduction de
ces mesures dans la loi de finance pour 2002.
Les deux propositions ont en commun la réduction du nombre de tranches
à 2 et la simplification des déductions attribuées
uniquement en fonction de la taille du ménage. Pour garantir la
progressivité face à une structure plate des taux, la limitation
du nombre de contribuables payant un impôt positif se fait par des
instruments différents.
La proposition de la gauche
La proposition de « dividende social » de l'opposition prévoit l'application du taux de 33 % jusqu'à 31 000 euros et de 41 % au-delà. Une déduction universelle sans contrainte de revenu (à partir de 3 100 euros et croissante en fonction de la taille du ménage) serait remboursée (impôt négatif) en cas d'absence de revenu imposable. Elle se substituerait à tous les instruments d'assurance contre le risque d'exclusion et au soutien de la famille (pension sociale, minimum retraite, allocations familiales). Le coût de la modification de l'IRPP correspond à la moitié de ses recettes actuelles, la réforme de l'assistance permettrait de couvrir la moitié du coût, pour une perte nette d'un quart des recettes. Cette transformation changerait le caractère catégoriel de l'assistance italienne en soutien plus universel. Le soutien accordé aux retraités se déplacerait vers les ménages avec enfants à charge et à très faible revenu ou vers les jeunes sans revenus, qui sont aujourd'hui privés d'aides. Toute application graduelle de cette réforme, notamment en réduisant le montant de l'impôt négatif pourrait comporter des fortes pertes en termes de redistribution, dans ce système caractérisé par un impôt pratiquement proportionnel et par des taux marginaux élevés.
La proposition de la droite
La majorité propose aussi une nouvelle structure des taux, mais la garantie de la progressivité et la limitation du nombre de contribuables payant un impôt positif est obtenue par des instruments différents :
-
Un nouveau barème à deux taux avec une première tranche
jusqu'à 103 800 euros imposée à 23 % et un taux de
33 % au-delà, comportant la baisse de 5 points du taux minimal et
de 11 points du taux maximal.
Un nouveau seuil d'exemption relevé du niveau actuel de 6 197 euros à 10 329 euros (ou 7 747 euros pour un célibataire, 10 329 pour un couple et 11 362 pour un ménage avec enfants).
La transformation des crédits d'impôt en déductions et leur redéfinition en fonction de critères familiaux permettrait de mieux réaliser la progressivité.
Le gouvernement a estimé la perte de recettes de l'IRPP à 16/18 %, soit 1,7/1,9 % du PIB. Cette perte correspond à une configuration du barème, qui maintient le seuil d'exemption actuel et qui transforme les crédits d'impôts actuels en déductions. Mais la réforme telle qu'elle a été présentée lors de la campagne électorale impliquerait la complète substitution des crédits d'impôts par un seuil d'exemption universel, plus élevé (10 329 euros) et comporterait une baisse de 40 % des recettes 153 ( * ) , soit 4,2 % du PIB. 85 % des individus seraient avantagés ; les réductions d'impôt augmenteraient avec le revenu, le 15 % exclu des effets de la réforme représente les individus non imposables, car, contrairement au barème proposé par l'opposition, aucun impôt négatif n'est prévu. Dans une autre hypothèse moins coûteuse (le coût estimé est de 6 % des recettes, soit 0,6 point de PIB), l'exemption serait limitée aux revenus inférieurs à 10 329 euros.
Tableau 11 : Barème de l'IRPP en 2002*
Tranches de revenu en euro |
Taux |
Impôt brut correspondant à chaque tranche |
0-10 329 |
18 % |
0-1 859 |
10 329-15 494 |
24 % |
1 859-3 099 |
15 494-30 987 |
32 % |
3 099-8 057 |
30 987-69 722 |
39 % |
8 057-23 163 |
69 722-103 291 |
45 % |
2 163-38 269 |
Au-delà de 103 291 |
45 % |
38 369 + 2 324 tous les 5 165 euros additionnels |
* Sans
exemption ni crédits d'impôt.
Source : Ministère des finances.
Tableau 12 : Barème de l'IRPP réformé *
Tranches
de revenu
|
Taux |
Impôt brut |
Différence avec l'ancien barème |
0-10 329 |
0 % |
0 |
jusqu'à -1 859 |
10 329-15 494 |
23 % |
2 376-3 564 |
entre 516 et 465 |
15 494-30 987 |
23 % |
3 564-7 127 |
entre 465 et -930 |
30 987-69 722 |
23 % |
7 127-16 036 |
entre - 930 et - 7 127 |
69 722-103 291 |
23 % |
16 036-23 757 |
entre - 7 127 et - 14 512 |
Au-delà de 103291 |
33 % |
23 757+1 704 tous les 5 165 euros additionnels |
à partir de - 14 512 - 620 euros pour chaque tranche de 5 165 euros additionnelle |
* Avec
exemption de 10329 euros pour les revenus inférieurs à 10329
euros.
Source : Ministère des finances.
Ce nouveau barème comporterait une baisse du prélèvement
pour la première tranche de revenu et une très forte baisse pour
les revenus supérieurs à 30 000 euros. Mais le gain
d'impôt brut, que la hausse du seuil d'exemption impliquerait pour les
revenus inférieurs au seuil, est fictif, car dans le système
actuel les crédits d'impôt pour les revenus salariaux et pour les
personnes à charge les exemptent
de facto
du payement de
l'impôt. Il en résulterait aussi une hausse du
prélèvement pour les revenus compris entre 10 329 et
20 658 euros du fait du passage du taux d'imposition de 18 % à
23 % pour la part de revenu correspondant à la première
tranche du barème avant réforme. Pour les revenus
supérieurs à 20 658 euros cet effet serait compensé
par la réduction du taux marginal de 32 % à 23 %. La
limitation de l'exemption aux revenus les plus faibles comporterait donc un
effet de seuil provoquant un risque de « trappe à la
pauvreté » par la forte hausse du taux marginal et une perte
pour les classes moyennes. Ce n'est pas surprenant car
l'élévation du seuil d'exemption et la baisse des taux marginaux
les plus élevés nécessitent une perte pour les
déciles intermédiaires de la distribution du revenu. La
réforme désavantagerait 45 % des individus, 45 % se
trouveraient avantagés et 10 %, notamment le premier décile
de la distribution des revenus, n'en seraient pas concernés. Pour
éviter cette trappe à la pauvreté l'exemption
complète jusqu'au seuil de 10 329 euros pourrait être
réduite graduellement jusqu'à un niveau de revenu de 30 987
euros avec un coût plus important (14 % des recettes et 1,5 %
du PIB). Cela permettrait le respect de la « clause de
sauvegarde » incluse dans la délégation de loi, dictant
que le nouveau régime doit être plus favorable ou
équivalent au précédent pour chaque individu. Le
problème du financement a retardé l'application de la
réforme, car la délégation de loi prévoit qu'elle
soit effectuée à solde public inchangé.
Dernièrement le gouvernement semble s'orienter vers une exemption de
6 200 euros décroissante jusqu'à son annulation pour un
revenu de 58 900 euros et une première phase de réforme
limitée à la substitution du taux à 23 % aux deux
premières tranches non exemptées. Le coût serait de
4,3 % des recettes de l'IRPP, soit 0,4 point de PIB. Pour le financement
de la réforme de l'IRPP le gouvernement compte sur les effets keynesiens
du multiplicateur de la demande et sur les effets d'offre garantissant
l'élargissement de la base imposable par l'encouragement au travail par
la moindre incitation à la fraude. Compte tenu des montants en jeu et de
la contrainte d'équilibre du solde des ménages, le financement de
la réforme ne peut reposer que sur une baisse des prestations sociales.
3. L'impôt sur les successions
Le gouvernement Berlusconi a modifié la progressivité du
prélèvement par la suppression de l'impôt sur les
successions et sur les donations. La majorité sortante avait
déjà transformé le taux d'imposition sur les successions
de progressif à proportionnel et avait relevé le seuil
d'exemption à 181 000 euros.
VI. La réforme de l'impôt sur le revenu du capital
La réforme de l'impôt sur le revenu du capital introduite en 1998
poursuit le même objectif que la réforme de l'IS: l'imposition
faible et proportionnelle de tous les revenus du capital, autant physique que
financier.
Naguère, la plupart des revenus du capital étaient
exonérés d'impôt. Les plus-values sur les actions
n'étaient pas imposées jusqu'en 1990 ; depuis, les
plus-values sur les actions non cotées étaient assujetties
à un taux préférentiel lors de leur réalisation.
Les dividendes, par contre, étaient inclus dans la base de l'IRPP, tout
en bénéficiant d'un crédit d'impôt.
Tableau 13 : le prélèvement sur le revenu du capital
Dividendes |
Intérêts |
Plus-values de cession de participation |
Inter-entreprises :
|
Inter-entreprises :
|
Inter-entreprises :
|
Particuliers :
|
Particuliers :
|
Particuliers :
|
Source : Ministère du Trésor.
La réforme réalise une plus forte
homogénéité dans l'imposition des différents types
de revenus du capital en ramenant le nombre de taux d'imposition de 16 à
2, tandis que l'assiette de l'impôt a été élargie
par l'incorporation des plus-values et des revenus tirés des
transactions sur produits dérivés. Le système reste celui
de l'imputation complète des bénéfices selon lequel les
bénéfices distribués sont imposés au niveau de
l'actionnaire, si celui-ci est une entreprise, mais ce dernier
bénéficie d'un crédit d'impôt qui correspond au
montant de l'impôt sur les bénéfices. Pour les particuliers
prévaut le prélèvement libératoire à la
source. Actuellement la plupart des revenus du capital, plus-values latentes
(non réalisées) et dividendes inclus, sont imposés par
retenue à la source au taux de 12,5 %, sauf les
intérêts sur les dépôts bancaires auxquels s'applique
encore le taux de 27 % (tableau 4). La réforme a augmenté la
rationalité du système fiscal.
1. Proposition de réforme de la droite
La
réforme des revenus du capital identifie comme objectifs fondamentaux la
simplification et la suppression de la double imposition. La simplification est
réalisée par l'uniformisation de l'imposition de tout revenu du
capital par un prélèvement libératoire à un taux
unique de 12,5 % (actuellement 27 % pour les
intérêts sur les dépôts et les obligations
détenues moins que 18 mois). Le prélèvement
libératoire à la source s'applique donc autant aux
intérêts qu'aux plus-values et aux dividendes de participations
non substantielles. Pour ces derniers disparaît l'option du crédit
d'impôt, ce qui augmente le prélèvement pour les revenus
soumis à un taux marginal de l'IRPP inférieur à 44 %.
Cet effet est renforcé par la disparition de la DIT, qui
réduisait le taux effectif payé en amont la distribution par
l'entreprise. Les plus-values de participation substantielle sont
exemptées de prélèvement à la source (actuellement
à 27 %) et incluse dans la base imposable de l'IRPP (23 %),
avec un gain d'impôt qui peut augmenter si l'inclusion n'est que
partielle (probablement à la hauteur de 50 %). Pour les dividendes
de participation substantielle le crédit d'impôt est
supprimé et l'inclusion dans la base de l'IRPP se fait à la
hauteur de 5 %.
Cette proposition constitue une contre-réforme par rapport aux
innovations introduites par le Centre-gauche. Face à l'alignement de
l'imposition entre intérêts et rendement des actions (avec une
disparité entre les différents types de contribuables en fonction
du niveau de revenu de l'investisseur et du patrimoine de la
société), la réforme propose l'uniformité de
l'imposition entre contribuables (un seul taux de 12,5 % pour chaque type
de revenu), mais une disparité de traitement entre dette et actions.
Elle se couple de la disparition de l'imposition des plus-values latentes de
l'épargne gérée, le nouveau critère d'imposition
étant celui de la réalisation. Pour les gestions collectives est
introduite la possibilité de différer le
prélèvement lors de la cession de la participation ou de la
liquidation de la prestation. Cette mesure supprime la double imposition du
revenu de l'épargne auprès des fonds d'investissement, notamment
des fonds de pension, qui caractérisait l'Italie par un système
ETT (exemption des cotisations, imposition de la revalorisation du capital
ainsi que de la prestation) et qui l'aligne sur un schéma de type EET,
dans lequel la seule prestation est imposée. Le coût estimé
de la réforme, est de 1 900 millions d'euros, soit 0,2 point de PIB.
2. Impôt sur les plus-values immobilières
En Italie existaient deux types d'impôt sur les plus-values des immeubles :
-
• L'impôt ordinaire, dû lors de la vente, levé sur la
valeur incrémentale à partir de la date d'achat. Depuis 1992 la
valeur incrémentale était calculée entre la date d'achat
et 1992. De ce fait l'impôt est supprimé à partir de
2003 ;
• L'impôt décennal à la charge des sociétés était levé à la date du dixième anniversaire de possession des immeubles (exclu les biens instrumentaux). Il est supprimé à partir de 2002.
La TVA, principal impôt indirect, croît faiblement jusqu'à 1998, date à partir de laquelle les taux ont été alignés sur ceux régnant en Europe. Le taux plancher reste à 4 %, ainsi que le taux intermédiaire de 10 % alors que celui de 16 % a été supprimé et le taux maximal a été relevé de 19 % à 20 %. La plupart des biens et services, jusque là imposés à 16 %, sont assujettis au nouveau taux maximal. Sur la période 2000-2002 un taux réduit est appliqué à certains services intensifs en main-d'oeuvre.
VIII. La fiscalité locale
Plusieurs interventions sur les finances locales se sont succédées depuis 1993 dans le cadre des contraintes imposées par l'assainissement des comptes publics d'abord et par le Pacte intérieur de stabilité ensuite. Ce dernier, introduit en 1998, engage les collectivités locales à contribuer aux objectifs de finances publiques fixés à niveau national. Notamment les collectivités doivent réduire leur déficit annuellement de 0,1 point de PIB. Toute réalisation partielle de cette baisse doit être rattrapée l'année suivante.
Les innovations concernent :
-
• L'élargissement de l'autonomie fiscale régionale (IRAP,
taux additionnel de l'IRPP, accise sur l'essence) ;
• L'amplification des compétences en termes de dépenses (autonomie en matière de transports locaux, d'environnement, de tourisme) ;
• La simplification de la structure des transferts ;
• L'objectif est celui de permettre aux régions d'assurer leurs propres ressources, l'incertitude sur le montant des transferts à la discrétion de l'Etat ayant conduit à l'irresponsabilité financière des collectivités ;
• Le fonds de péréquation institué en 1996 établissait uniquement une participation des régions sur les recettes centrales de l'accise sur l'essence, sans péréquation de la base imposable. Le fonds de compensation interrégional introduit avec l'IRAP se limitait à ajuster ce dernier avec les nouvelles ressources (10 % de l'IRAP non destinés à la santé).
-
• Le taux additionnel de l'IRPP (à 0,5 % lors de son
introduction en 1998) augmenté à 0,9 % avec réduction
parallèle du taux national, et possibilité pour les
régions de l'augmenter à 1,4 % ;
• La participation aux recettes de l'accise sur l'essence, qui est doublée;
• La participation aux recettes de la TVA.
Le gouvernement Berlusconi a présenté une proposition de révision de la Constitution pour que chaque région puisse exercer une compétence exclusive en matière de santé, éducation et sécurité. Sous l'hypothèse que l'Etat fournisse aux régions la responsabilité financière de ces fonctions, les ressources à financer par les régions seraient de 3,5 points de PIB, c'est à dire un transfert de ressources de 40 % supérieur à celui réalisé par la loi de 2000 (2,5 points de PIB). Dans ce cas le taux de participation à la TVA devrait augmenter de 38,55 % à 93,46 % pour pouvoir financer les nouvelles compétences régionales. Cela reviendrait à régionaliser complètement la TVA, mais aussi à réduire le degré d'autonomie fiscale des régions. Une augmentation du taux de l'IRAP et du taux additionnel de l'IRPP, dans les limites consenties jusqu'ici, permettrait des recettes additionnelles de 13 %. D'un autre côté l'élargissement de l'intervalle de variation de ces taux pourrait provoquer le risque de compétition fiscale entre régions.
Tableau 14 : Degré d'autonomie financière des collectivités locales*
1990 |
1995 |
2000 |
14,5 |
25,7 |
44,6 |
* Rapport entre les recettes fiscales propres et les dépenses des collectivités locales
FINANCEMENT DU FONDS DE PEREQUATION
Le fonds
est financé par une participation prédéterminée
égale à 38,55 % des recettes nationales de la TVA (0,5 point
de PIB). Un quota de ce montant est attribué à chaque
région sur la base du niveau de consommation dans les trois
années précédentes,
étant
la part de la consommation de chaque région dans la consommation
nationale,
Le système de péréquation est donc horizontal entre
régions riches et régions pauvres à partir de ce fonds
prédéterminé. Le niveau du transfert entre régions
dépend de la différence entre le quota de participation aux
recettes
et celui qui dérive de la
péréquation
. Les régions pour
lesquelles cette différence est positive financent la redistribution. Le
fonds prévoit une phase transitoire (jusqu'en 2012) durant laquelle on
garantit les dépenses historiques
en
finançant la partie de celles-ci non couverte par les nouveaux
impôts additionnels
introduits lors de la
suppression des transferts d'Etat. Cette garantie est rendue temporaire par un
coefficient décroissant avec le temps, jusqu'à son annulation en
2012.
Ensuite
le critère des dépenses historiques est remplacé par un
critère mixte de péréquation des besoins de services et de
la capacité fiscale. Ce critère corrige la différence
entre la capacité financière et la moyenne des recettes fiscales
des principaux impôts propres (IRAP) et de la participation aux recettes
des impôts nationaux (taux additionnel IRPP et accise sur l'essence)
, selon un coefficient de
« solidarité »
égal
à 90 %. De plus il garantit prioritairement la couverture des
besoins de santé
, notamment toute
différence par rapport à la moyenne nationale
. La péréquation des besoins hors
santé
n'est que partielle avec
égal à 70 %. Le plafond imposé
aux transferts au fonds par la fixation du taux de participation aux recettes
de la TVA éloigne de l'objectif de péréquation. L'abandon
du critère des dépenses historiques déterminera une
moindre différence entre
et
, donc une contraction des ressources destinées
à la péréquation. Les régions les plus riches,
notamment les grandes régions du Nord de l'Italie, capables satisfaire
leurs besoins en termes de santé seront capables de retenir des
ressources supérieures à leurs besoins hors santé. Les
régions les plus pauvres (où celles pour qui la croissance du
revenu est moins rapide que l'évolution des dépenses de
santé), notamment les régions méridionales, devront
utiliser le levier du taux des impôts propres, étant donné
la limite à l'endettement établie par le Pacte intérieur
de stabilité. Se pose alors le problème de l'éloignement
des ces nouveaux instruments par rapport aux politiques de création
d'impôts propres poursuivies depuis 1998 et du manque d'autonomie par
rapport à la fixation des éléments constitutifs de
l'impôt.
IX. La fiscalité écologique
L'écotaxe, levée sur les émissions polluantes des gaz
carboniques a été introduite en 1999 pour financer la baisse des
cotisations employeur. Elle a assuré en 1999 une recette de 0,1 %
du PIB. Depuis elle a été suspendue à cause de la hausse
des prix du pétrole.
Références bibliographiques
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ulteriore razionalizzazione del sistema pensionistico
obbligatorio ? » Commissione per l'analisi delle
compatibilità macroeconomiche della spesa sociale.
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Working
Paper
n.65, Econpubblica, Université Bocconi, Milan.
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regionale in Italia ? », mimeo.
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lavoro
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CASTELLINO O.et E. FORNERO, 1997 : « Privatizzare la previdenza
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Politica
Economica
, n°1, avril.
FRANCO D., 2000 : « Italy : a never-ending pension
reform
»
, NBER mimeo.
FORNI L. et R. GIORDANO, 2000 : « Can Italy Fund its Social
Security System ? », Division des Finances Publiques,
Département de Recherche de la Banque d'Italie, mimeo.
GRONCHI S. et R. APRILE, 1996 : « La riforma delle
pensioni : equità, sostenibilità e
indicizzazione »
Economia e Lavoro
, n° 4.
MESSINA G., 2001 : « Decentramento fiscale e perequazione
regionale. Efficienza e redistribuzione nel nuovo sistema di finanziamento
delle regioni a statuto ordinario »
Temi di Discussione
n° 416, Banca d'Italia
MINISTÈRE DES FINANCES : « Guida del contribuente :
la tassazione delle rendite finanziarie »
MODIGLIANI F.et M. CEPRINI, 1998 : « Social Security
Reform : a Proposal for Italy
», Review of Economic
Conditions in Italy
, n° 2.
STADERINI A., 2001 : « Tax reforms to influence corporate
financial policy: the case of the Italian business tax reform of
1997-98 »
Temi di Discussione
n. 423, Banca d'Italia.
Chapitre 3. 5 : Les réformes fiscales en Espagne
Sabine Le Bayon
Alors
qu'auparavant, les réformes fiscales avaient visé la
modernisation du système fiscal pour financer l'augmentation des
dépenses publiques, dont le niveau était relativement faible par
rapport aux autres pays européens, l'accent a été mis dans
la deuxième moitié des années 1990 sur la maîtrise
des dépenses publiques plutôt que sur l'augmentation de la
pression fiscale pour assainir les finances publiques et respecter ainsi le
critère de déficit de Maastricht. Les réformes successives
de l'impôt sur les sociétés ont visé à
accroître la neutralité entre les sources de revenus d'une part et
entre les instruments de financement d'autre part, à soutenir les
petites et moyennes entreprises par le biais de la création d'un taux
d'imposition réduit et à encourager l'investissement, notamment
dans les nouvelles technologies. L'impôt sur le revenu des ménages
a été réformé en profondeur, afin de traiter plus
équitablement les revenus du travail et du capital, de stimuler la
natalité, l'épargne et l'offre de travail (en particulier
féminin). La réduction de la charge fiscale a été
compensée par l'élargissement de l'assiette. La simplification du
système fiscal et de la perception de l'impôt a permis de
libérer des ressources pour mieux lutter contre la fraude fiscale.
L'Espagne s'est engagée dans un processus de décentralisation
à plusieurs vitesses. Afin d'assurer aux régions des sources de
revenu stables, leurs prérogatives en matière de gestion fiscale
se sont accrues au fur et à mesure que des transferts de
compétences leur étaient accordés. Les régions
perçoivent aujourd'hui tant des impôts indirects que directs et
peuvent modifier dans une certaine mesure les taux de ces derniers. Elles
doivent désormais respecter la loi de stabilité budgétaire
qui impose l'équilibre budgétaire à tous les niveaux de
l'administration.
I. Un historique
1. Evolution des taux de prélèvements obligatoires
L'Espagne a un des taux de prélèvement obligatoire les
plus bas de l'Union européenne (35,1 points contre 40,8 points en
moyenne en 2000). Seules l'Irlande et la Grèce ont des taux
inférieurs. Parti d'un niveau très bas (24,6 points en 1980), le
taux de prélèvement obligatoire a augmenté jusqu'en 1992
(34,8). Il a ensuite diminué jusqu'en 1995 (32,7), avant de repartir
à la hausse.
Sous les gouvernements socialistes (1982-1996), le taux de
prélèvement obligatoire a d'abord augmenté de 9 points de
1982 à 1992, puis a baissé jusqu'en 1995 pour soutenir
l'activité (graphique 1). La hausse des années 1980 a
été liée à l'accroissement des dépenses
publiques, qui étaient relativement faibles par rapport aux autres pays
européens à la fin des années 1970. L'arrivée du
Parti populaire au gouvernement en mars 1996 a coïncidé avec une
reprise de la hausse du taux de prélèvement obligatoire :
l'effort d'assainissement budgétaire, entrepris pour respecter les
critères de Maastricht, a permis à l'Espagne d'atteindre un
déficit inférieur à 3 % en 1998 pour la
première fois depuis le début des années 1980.
Graphique 1. Taux de prélèvements obligatoires en Espagne (en points de PIB)
Source : INE.
L'Espagne se caractérise, comme le Portugal et la Grèce, par un
impôt sur le revenu des ménages plus faible que dans le reste de
l'Union européenne (6,6 % du PIB en Espagne en 2000, contre
10,1 % pour l'UE).
De 1982 à 2000, les poids de la fiscalité indirecte et des
impôts sur les revenus se sont nettement accrus (de 3,9 et de 4,4 points
de PIB respectivement), celui des cotisations obligatoires augmentant
légèrement (de 0,8 point de PIB). Après avoir
augmenté par paliers jusqu'en 1992, le poids des impôts sur les
revenus a eu tendance à légèrement diminuer. La part des
cotisations sociales dans le PIB, qui était restée quasiment
stable jusqu'en 1988, a ensuite augmenté. Elle est repartie à la
baisse en 1994, avant d'augmenter progressivement à nouveau (tableau 1
et graphique 2). La part de la fiscalité indirecte a fortement
augmenté jusqu'en 1986, année durant laquelle fut introduite la
TVA, puis a connu une légère tendance à la baisse, avant
de repartir à la hausse en 1996. Le poids de la fiscalité locale
a augmenté par paliers, avec une hausse sensible au début des
années 1980, puis une quasi-stagnation de 1985 à 1996 et enfin
une forte augmentation depuis 1997 avec le nouveau système de
financement des communautés autonomes.
Tableau 1 : Structure des prélèvements obligatoires en Espagne 154
|
En % du PIB |
En % des recettes |
||||||||
|
1982 |
1992 |
1995 |
2000 |
1982 |
1992 |
1995 |
2000 |
||
Impôts sur la production et les importations 2 |
7,8 |
10,5 |
10,2 |
11,7 |
30,3 |
30,1 |
31,1 |
33,4 |
||
dont :TVA |
0 |
5,1 |
4,8 |
5,8 |
0,0 |
14,6 |
14,8 |
16,6 |
||
Impôts courants sur le revenu, le patrimoine 3 |
6,1 |
11,1 |
10,1 |
10,5 |
23,5 |
31,8 |
31 |
29,9 |
||
Cotisations sociales obligatoires effectives 4 |
11,7 |
12,9 |
12,0 |
12,5 |
45,3 |
37,2 |
36,9 |
35,6 |
||
Impôts en capital 5 |
0,2 |
0,3 |
0,3 |
0,4 |
0,8 |
0,8 |
1 |
1,1 |
||
Total des
prélèvements obligatoires
|
25,7 |
34,8 |
32,7 |
35,1 |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
||
|
22,2 |
30,4 |
28,2 |
29,1 |
|
|
|
|
Prélèvements perçus par les administrations locales |
|
3,6 |
4,4 |
4,5 |
6,0 |
|
|
|
|
|
1.
Selon la décomposition du SEC95 ; 2.
Opération D2 ; 3. Opération D5 ; 4. Opération
D611 ; 5. Opération D91.
Source : INE.
Graphique 2 : Structure des recettes des administrations publiques en Espagne (en % du PIB)
Source : INE.
En 2000, les principales sources de recettes en 2000 sont les cotisations
sociales (35,6 %), puis la fiscalité indirecte (33,4 %) et les
impôts sur les revenus (29,9 %)(tableau 1). Depuis 1982, la part des
cotisations sociales a baissé (- 9,7 points), tandis que la
fiscalité indirecte et les impôts sur les revenus se sont alourdis
(+ 3,1 et + 6,4 points respectivement).
2. Principales mesures fiscales prises sous les gouvernements socialistes (1982-1996)
Dans les
années 1980, l'Espagne a fortement augmenté ses dépenses
publiques, qui étaient en 1975 relativement faibles par rapport aux
autres pays européens. Les réformes fiscales durant cette
période ont visé la modernisation du système fiscal, pour
faire face au besoin croissant de recettes publiques. Par la suite, les
réformes avaient plutôt pour but d'accroître la
neutralité du système fiscal et de favoriser la création
d'entreprise.
La réforme de l'IRPP
, mise en oeuvre en 1988, comportait une
baisse du nombre de tranches, une réduction du taux marginal maximum de
66 à 56 %, l'application d'un taux nul aux revenus jusqu'à
600 000 pesetas, la non exigibilité de déclaration de revenus
au-dessous de 840 000 pesetas (au lieu de 500 000 précédemment).
L'assiette fiscale a été élargie en 1992.
La réforme de l'IS
en 1996, comportait la modification de la base
d'imposition et limitation de la double imposition des dividendes (cf. chapitre
suivant II.1).
La TVA
a été introduite en 1986 lors de l'adhésion
à l'UE.
La baisse du taux de cotisations sociales
de 32,1 % en 1982
à 28,3 % en 1996 (pour favoriser l'emploi) a été
contrebalancée par la hausse du taux de cotisations d'assurance
chômage de 5,4 % en 1982 à 7,8 % en 1996. De plus,
l'assiette des cotisations a été élargie et les taux des
régimes particuliers ont été augmentés pour les
rapprocher de ceux du Régime général.
3. Orientations fiscales des gouvernements de droite depuis 1996
Les
réformes ont visé la simplification du système fiscal, la
neutralité fiscale et l'incitation au travail, à l'épargne
et à l'investissement notamment dans les nouvelles technologies. Selon
le Parti populaire, la baisse des impôts doit soutenir la consommation et
contribuer à dynamiser l'économie et l'emploi. Pour assainir les
finances publiques et respecter le critère de déficit de
Maastricht, l'accent a été mis sur la limitation de la hausse des
dépenses plutôt que sur l'augmentation de la pression fiscale.
L'Espagne a adopté en 2001 une loi de stabilité budgétaire
pour imposer l'équilibre des comptes à tous les niveaux de
l'administration (administration centrale, régions, collectivités
locales). Les déficits ne devront être que temporaires,
exceptionnels et justifiés. Cependant, un fonds de réserve sera
créé pour faire face à d'éventuelles
dépenses publiques imprévues.
II. Analyses des principales réformes
1.
Fiscalité des entreprises
Réformes
La réforme de l'impôt sur les sociétés élaborée par les socialistes et mise en oeuvre en 1996 poursuivait plusieurs objectifs :
-
Accroissement de la neutralité vis-à-vis des diverses sources
de revenus.
Réduction des distorsions affectant les décisions d'investissement.
Renforcement de la neutralité vis-à-vis des divers instruments de financement.
Allègement des contraintes fiscales pesant sur l'internationalisation des entreprises.
Favoriser les petites et moyennes entreprises.
Encourager la prise de risque et la création d'entreprises.
-
Le compte de résultat était désormais la seule base
d'imposition. Il n'y avait donc plus de règles fiscales
différentes pour le bénéfice d'exploitation, les
plus-values nettes et l'augmentation nette de l'actif.
L'amortissement d'actifs intangibles (brevets, marques commerciales) était autorisé.
Pour limiter la double imposition des dividendes versés sur les participations intra-groupe, le seuil de participation fut réduit de 25 à 5 % pour bénéficier de l'exonération sur les dividendes à percevoir au titre d'une participation dans une autre entreprise.
La mesure corrective visant la double imposition internationale des dividendes et plus-values fut appliquée aux entreprises détenant 5 % du capital d'entreprises étrangères (au lieu de 25 % prévus par la loi de 1978).
Les PME bénéficièrent d'une plus grande marge de manoeuvre pour étaler dans le temps les frais d'amortissement du capital.
La période durant laquelle les entreprises peuvent reporter en avant des pertes passa de 5 à 7 ans.
Après son arrivée au pouvoir, la droite a renforcé en juin 1996 certaines mesures prises par les socialistes. Les mesures correctives visant la double imposition internationale des dividendes et plus-values et la double imposition des dividendes versés sur les participations intra-groupe furent étendues aux détentions d'au moins 1 an (au lieu de 2 précédemment). Par ailleurs, les entreprises ont eu la possibilité de réévaluer leurs actifs productifs sur l'inflation pour que leurs amortissements fiscaux soient plus conformes au coût réel du capital, moyennant une taxe de 3 % sur les plus-values résultant de cette opération.
Depuis 1997, il existe un taux réduit de 30 % pour les petites entreprises, dont le champ fut progressivement étendu. Actuellement, il concerne les 90 000 premiers euros de bénéfices pour les PME dont le chiffre d'affaires ne dépasse pas 5 millions d'euros.
En 1999, le gouvernement a augmenté la période durant laquelle les entreprises peuvent reporter en avant des pertes qu'elles peuvent imputer sur leurs bénéfices futurs qui passe de 7 à 10 ans. Elle a ensuite réduit en 2001 le taux d'imposition sur les plus-values détenues pendant au moins un an à 18 % (contre 20 % pour les actifs détenus pendant au moins 2 ans précédemment).
La réforme de l'IS, prévue initialement pour 2003, a été avancée au 1 er janvier 2002, en raison du ralentissement économique. De nombreuses mesures fiscales ont été adoptées en faveur des PME, de l'investissement, de la modernisation et de l'internationalisation de l'économie :
Les entreprises alimentant un fonds de pension de retraite pour leurs travailleurs peuvent déduire 10 % des fonds de leur base imposable et les limites d'apport de fonds pour la constitution de plans de retraites privés sont assouplies.
Le taux d'imposition sur les plus-values obtenues par les entreprises lors de la vente d'actifs est réduit de 35 % à 18 %, à condition que celles-ci soient réinvesties et non pas redistribuées aux actionnaires.
Un abattement fiscal de 10 % est accordé sur les investissements consacrés à l'achat de brevets jusqu'à 500 000 euros (au lieu de 300 000 euros précédemment).
Un dégrèvement supplémentaire de 10 % est établi pour les investissements en matière de recherche ou d'innovation technologique.
En 2003, des facilités fiscales pour les nouvelles PME sont envisagées, comme l'exonération d'IS pendant les 2 premiers exercices. Par ailleurs, la suppression de l'impôt local sur les affaires (IAE), perçu par les municipalités, est prévue en 2003, conformément au programme électoral de 2000 du Parti populaire. Il pourrait être remplacé par une nouvelle taxe municipale payée par les groupes de télécommunications sur l'installation d'antennes et par les compagnies électriques pour les « droits de passage ».
Système en 2001
Les entreprises sont soumises à l'impôt sur les sociétés (IS : impuesto sobre sociedades ) et à un impôt local sur les affaires (IAE : impuesto de actividades economicas ). Le Pays Basque et la Navarre ont leur propre système d'imposition.
Impôt sur les sociétés
Le taux général est de 35 %, mais il existe un taux réduit de 30 % (tableau 2). Divers crédits d'impôts sont accordés : investissements à l'étranger (25 % du total investi), investissements en R&D (30 %), dépenses de formation professionnelle (5 %) et investissements culturels (15 %). La somme de ces 4 crédits ne peut excéder 35 % de l'impôt sur les sociétés. Un crédit d'impôt correspondant à 10 % des investissements pour préserver l'environnement et à 10 % des investissements liés à Internet peut être déduit.
Tableau 2 : taux selon le chiffre d'affaires et le bénéfice en 2001
Chiffre d'affaires (euros) |
Bénéfice (euros) |
Taux |
< 5 000 000 |
< 90 000 |
30 % |
< 5 000 000 |
> 90 000 |
35 % |
> 5 000 000 |
> 0 |
35 % |
Source : Ministerio de economia y hacienda.
Impôt local sur les affaires
La base de cet impôt dépend de l'activité et de la surface de l'entreprise. Cet impôt est déductible de l'IS. Il devrait disparaître en 2003.
Impôts sur le revenu du capital
Les
plus-values des entreprises sont traitées comme un revenu ordinaire et
assujetties au taux général de l'impôt sur les
sociétés. Dans le cadre de la réforme de 2002, le taux
d'imposition est réduit de 35 à 18 % sur les plus-values
réalisées sur des actifs détenus pendant moins d'un an,
mais réinvesties. Les plus-values réalisées sur les actifs
détenus pendant plus d'un an sont taxées à un taux unique
de 18 %.
Une retenue à la source de 18 % s'applique sur les
intérêts et les dividendes. Cette retenue à la source est
portée au crédit de l'impôt final dû par
l'investisseur résident.
L'Espagne pratique un système d'imputation partielle : une partie
de l'impôt sur les sociétés prélevé sur les
bénéfices distribués (50 %) est portée au
crédit de l'impôt final sur les sociétés dû
par l'investisseur résident (tableau 3). Ce crédit est de
100 % pour les dividendes inter entreprises quand une entreprise a
détenu au moins 5 % d'une filiale pendant au moins 1 an.
Tableau 3 : Taxation des dividendes : exemple d'application pour une entreprise actionnaire en 2001
|
|
IS actionnaire versé + IS versé + retenue à la source |
46,37 |
Double imposition |
11,37 |
Source : Ministerio de economia y hacienda.
2.
Cotisations sociales
Réformes
Le taux de cotisations de Sécurité sociale a été abaissé pour favoriser l'emploi, mais le taux de cotisations d'assurance chômage a dû être augmenté (tableaux 4 et 5). Les assiettes minimum et maximum des différentes catégories professionnelles ont été unifiées progressivement.
Tableau 4 : Evolution du taux de cotisations d'assurance chômage
|
A la charge des employeurs |
A la charge des salariés |
1992-1993 |
6,2 |
1,1 |
1994-2001 |
6,2 |
1,6 |
Source : Ministerio de trabajo y asuntos sociales.
Tableau 5 : Evolution du taux de cotisations de sécurité sociale
|
A la charge des employeurs |
A la charge des salariés |
1992 |
24 |
4,8 |
1993-1994 |
24,4 |
4,9 |
1995-2001 |
23,6 |
4,7 |
Source : Ministerio de trabajo y asuntos sociales.
Système en 2002
Six régimes principaux coexistent : le Régime général et cinq régimes particuliers (travailleurs indépendants, agriculteurs, marins, mineurs et employés de maison). Les fonctionnaires et les militaires disposent par ailleurs d'un régime spécifique. Les taux de cotisations d'assurance chômage et de sécurité sociale sont actuellement de 37,15 % (tableau 6). Pour les travailleurs indépendants, les taux de cotisations sociales sont en général de 28,3 %.
Tableau 6 : Taux de cotisations à la charge des employeurs et des employés du régime général en 2001
|
Cotisations employeurs |
Cotisations employés |
Cotisations de sécurité sociale |
23,6 % |
4,7 % |
Cotisations d'assurance chômage |
6,2 % |
1,55 % |
Formation professionnelle |
0,4 % |
0,1 % |
Fonds de garantie des salaires |
0,6 % |
-- |
Total des cotisations |
30,8 % |
6,35 % |
Source : Ministerio de trabajo y asuntos sociales.
Une partie seulement du salaire est soumise à cotisation. Les
salariés dont la rémunération est supérieure au
plafond ou inférieure au plancher versent des cotisations de
Sécurité sociale correspondant respectivement à la
cotisation maximale ou minimale. L'assiette minimum de cotisations varie selon
la catégorie professionnelle de l'employé (tableau 7).
Tableau 7 : Assiettes de cotisations selon les catégories professionnelles (en % du salaire moyen)
|
Assiette minimum |
Assiette maximum |
Employés et coursiers |
24,1 |
119,1 |
Techniciens qualifiés et assistants |
29,8 |
119,1 |
Ingénieurs et autres diplômés |
35,9 |
119,1 |
Source : Ministerio de trabajo y asuntos sociales.
3.
Fiscalité des ménages
Réformes
Depuis
1990, les couples mariés ont la possibilité de remplir des
déclarations individuelles, et non plus nécessairement
conjointes.
La réforme menée en 1992 par les socialistes avait pour but un
élargissement de l'assiette fiscale et une incitation à
l'épargne de long terme. Pour cela, de nouvelles sources de revenus,
comme les avantages en nature, ont été intégrées
dans la base imposable. L'Espagne s'est alignée sur les modalités
d'imposition des bénéfices non distribués des fonds
d'investissement privés des autres pays de l'UE : leurs
bénéfices non distribués et leurs plus-values ont
été exonérés et les plus-values n'étaient
plus imposées, à moins que les ressources ne soient
retirées du fonds. Enfin, les plus-values sur les placements
détenus pendant au moins 10 ans ont généralement
été exonérées.
En 1997, la droite a réduit de 16 à 10 le nombre de tranches de
l'IRPP.
La réforme de l'impôt sur le revenu des personnes physiques mise
en oeuvre en 1999 poursuivait plusieurs objectifs :
-
Réduire la charge fiscale et élargir les mesures encourageant
le travail.
Accroître la neutralité envers les divers types de revenus et de placements.
Remplacer un ensemble d'exonérations par un revenu minimal exonéré.
Abaisser le coût de perception de l'impôt et libérer des ressources pour mieux lutter contre la fraude fiscale.
-
Les taux marginaux ont été réduits de 56 à
48 % pour la tranche supérieure et de 20 à 18 % pour la
tranche inférieure, tandis que le nombre de tranches a diminué de
10 à 6.
Les revenus du capital et du travail étaient désormais traités plus équitablement. Ainsi, la majorité des exonérations partielles et des crédits sur les revenus de l'épargne financière furent réduits. A l'exception des plus-values à LT, les revenus du capital étaient intégrés dans l'assiette fiscale avec une possibilité de compensation entre pertes et gains. La plupart des exonérations partielles sur les plus-values et les revenus du capital furent supprimées.
Un revenu exonéré assurant un niveau de vie minimal ( minimo exento ), prenant en compte les caractéristiques de l'unité fiscale, remplaça la plupart des allègements fiscaux précédents qui étaient sources d'inégalités horizontales (dépenses de santé ou d'éducation, loyers, prise en charge des personnes handicapées, frais de garde d'enfants...).
La modification des retenues à la source visait à mieux prendre en compte les caractéristiques des personnes physiques et à mieux refléter les charges fiscales effectives. Le seuil à partir duquel il faut remplir une déclaration a été relevé à 21 035 euros (au lieu de 7 212 euros en 1998). Ceci devrait réduire de 5 millions le nombre de déclarations (soit d'environ un tiers) et donner lieu à des remboursements d'impôts. L'Espagne a renoncé à imposer le revenu imputé des logements occupés par leurs propriétaires. Les ressources ainsi libérées par la diminution du coût de la perception serviront à lutter contre la fraude fiscale et à conseiller les contribuables.
Tableau 8 : Effets de la réforme de 1999 de l'IRPP
Revenu (en euros) |
Contribuables concernés (en %) |
Réduction de la charge fiscale au titre de l'IRPP(en %) |
< 12 020 |
60,3 |
29,7 |
12 020-18 030 |
19,8 |
15,0 |
18 030-30 051 |
14,3 |
8,3 |
> 30 051 |
5,6 |
6,2 |
Total |
100 |
11,1 |
Source : Ministerio de economia y hacienda.
La nouvelle réforme de l'IRPP qui entrera en vigueur en 2003 vise
à stimuler la natalité, l'épargne et l'offre de travail
(en particulier féminin). Les principales mesures prévues
sont :
Les taux d'imposition marginaux maximum et minimum baissent respectivement
à 45 % et 15 %, au lieu de 48 % et 18 %
actuellement. Le nombre de tranches passe de 6 à 5.
Les abattements personnels et familiaux sont augmentés. L'abattement
familial devient progressif à partir du deuxième enfant et non du
troisième comme aujourd'hui. Le gouvernement a annoncé une hausse
de 16 % de l'abattement fiscal pour le premier enfant, de 25 % pour
le deuxième, de 22 % pour le troisième et de 27 % pour
les suivants. L'abattement additionnel pour enfant à charge de moins de
3 ans est multiplié par 4.
Une aide de 1 200 euros par an est mise en place pour les mères qui
travaillent et ont un enfant de moins de 3 ans. Cette mesure devrait concerner
460 000 femmes.
L'abattement pour les familles ayant une personne de plus de 65 ans à
charge augmente de 33 %. En outre, une aide est créée pour
assister les personnes de plus de 75 ans et les aides pour les
handicapés sont augmentées.
Pour favoriser l'immobilier locatif et la mobilité géographique
des travailleurs, des abattements compris entre 25 et 50 % des revenus des
loyers, selon que les logements sont occupés ou non actuellement, sont
mis en place.
Pour favoriser le travail, l'abattement sur les revenus du travail est
augmenté de 17 % pour les bas salaires et de 7 % pour les plus
élevés. Cette aide est multipliée par 2 pour les plus de
65 ans continuant de travailler et pour les chômeurs acceptant un emploi
dans une autre ville.
Pour faciliter le financement de l'économie et encourager
l'investissement productif, les plus-values de plus d'un an seront
imposées à 15 % au lieu de 18 %
précédemment et les limites d'apports à des fonds de
pensions seront augmentées. De plus, pour favoriser l'épargne
à long terme, l'impôt sera réduit de 40 % pour une
épargne mobilisée plus de 2 ans et de 75 % pour plus de 5
ans.
Selon les estimations officielles, ces réformes devraient
représenter une économie moyenne de 11 % pour les
contribuables (tableau 9). Les contribuables devraient ainsi
bénéficier d'une réduction d'impôts de 3,6 milliards
sur deux ans.
Tableau 9 : Effets de la réforme de 2003 de l'IRPP
Revenu (en euros) |
Contribuables concernés (en %) |
Réduction de la charge fiscale au titre de l'IRPP(en %) |
< 12 020 |
55,6 |
38,14 |
12 020-18 030 |
18,52 |
18,41 |
18 030-30 051 |
17,16 |
10,51 |
> 30 051 |
8,72 |
6,39 |
Total |
100 |
11 |
Sources : Ministerio de economia y hacienda (2002).
Système en 2001
Les personnes physiques sont soumises à un impôt sur le revenu (IRPF : impuesto sobre la renta de las personas fisicas ) prélevé par l'administration centrale et par les communautés autonomes. Les communautés autonomes prélèvent aussi un impôt sur le patrimoine (IP : impuesto sobre el patrimonio ) et un impôt sur les successions et les donations (ISD : impuesto sobre sucesiones y donaciones ). Le Pays Basque et la Navarre ont leur propre système d'imposition.
IRPP
L'imposition se fait selon 2 barèmes permettant de calculer l'impôt revenant à l'administration centrale et celui affecté aux communautés autonomes. Le barème de ces dernières peut être modifié par les régions dans certaines limites. Il y a 6 tranches, comprises entre 18 et 48 %. Le prélèvement s'effectue à la source sur les revenus du travail. Les pensions sont traitées comme des revenus du travail. L'imposition est au choix soit séparée, soit conjointe (ce qui n'est intéressant que si un des conjoints est sans ressource). Les bases et les taux indiqués dans le tableau 10 s'appliquent à tous les contribuables, qu'ils optent ou non pour une déclaration conjointe.
Tableau 10 : Tranches et taux d'imposition de l'IRPP en 2001
Base imposable (en euros) |
Taux d'imposition |
0-3 678 |
18 % |
3 678-12 874 |
24 % |
12 874-25 134 |
28,3 % |
25 134-40 460 |
37,2 % |
40 460-67 434 |
45 % |
> 67 434 |
48 % |
Source : Ministerio de economia y hacienda.
Chaque contribuable bénéficie d'un abattement personnel de 3 300
euros (6 600 euros pour les couples optant pour une déclaration
conjointe). De plus, il existe un abattement sur les revenus du travail
dégressif avec le salaire. La prise en compte de la situation familiale
s'effectue par le biais d'abattements (tableau 11). Les cotisations sociales
sont déductibles, tout comme les cotisations à des fonds de
pension privés, dans la limite de la somme la plus faible entre
25 % des revenus du travail et 7 212 euros pour chaque contribuable de
moins de 52 ans. Les contribuables bénéficient aussi de
crédits d'impôts immobiliers (tableau 12).
Les plus-values des particuliers sont traitées comme un revenu ordinaire
et assujetties au taux général de l'impôt sur le revenu.
Les plus-values et les moins-values sur les cessions d'actifs détenus
pendant au moins 1 an sont taxées à un taux de 18 %
(15,3 % pour l'Etat et 2,7 % pour les communautés autonomes).
Une retenue à la source de 18 % s'applique sur les
intérêts et les dividendes. Cette retenue à la source n'est
pas libératoire.
Tableau 11 : Système d'abattements en 2001
Individuels (doublé pour un couple en déclaration conjointe) |
En euros |
En % du salaire moyen |
Moins de 65 ans |
3 300 |
13,1 |
Plus de 65 ans |
3 900 |
15,5 |
Revenus du travail |
|
|
< 8 110 euros |
3 000 |
11,9 |
8 110-12 020 euros |
3
000-0,1923*
|
|
> 12 020 euros |
2 250 |
8,9 |
Familiaux |
|
|
Chacun des deux premiers enfants à charge de moins de 25 ans |
1 200 |
4,8 |
Chaque enfant à charge de moins de 25 ans à partir du troisième enfant |
1 800 |
7,2 |
Chaque enfant de moins de 2 ans |
300 |
1,2 |
Chaque enfant entre 3 et 16 ans |
150 |
0,6 |
Ascendant à charge de plus de 65 ans dont le revenu ne dépasse pas le salaire minimum |
600 |
2,4 |
* Le
salaire minimum mensuel est de 442,2 euros en 2002.
Source : Ministerio de economia y hacienda.
Tableau 12 : Système de crédits d'impôts immobiliers en 2001
En euros |
Crédits d'impôts (en %) |
Acquisition ou rénovation du logement principal |
|
0-9 015 |
15 |
Remboursement du principal et intérêts |
|
0-4 508 (les deux premières années) |
25 |
0-4 508 (les années suivantes) |
20 |
4 508-9 015 |
15 |
Dépôts d'épargne logement (résidence principale) |
|
0-9 015 |
15 |
Source : Ministerio de economia y hacienda.
Les personnes physiques actionnaires bénéficient d'un
système d'avoir fiscal partiel (égal à 40 % du
dividende) (tableau 13).
Tableau 13 : Taxation des dividendes : exemple
d'application
pour une personne physique actionnaire en 2001
Bénéfice |
100 |
IS versé (35 %) |
35 |
Dividende reçu |
65 |
Retenue à la source versée (18 % de 65) |
11,7 |
Dividende - retenue à la source |
53,3 |
Avoir fiscal (40 % de 65) |
26 |
Dividende + avoir fiscal |
91 |
Calcul IR actionnaire (48 % de 91) |
43,7 |
IR actionnaire effectivement versé (IR actionnaire - avoir fiscal - retenue à la source) |
6 |
IR actionnaire versé + IS versé + retenue à la source |
52,7 |
Double imposition |
4,7 |
Source : Ministerio de economia y hacienda.
Impôt sur le patrimoine
L'impôt sur le patrimoine est prélevé par les communautés autonomes sur tous les actifs détenus par les personnes physiques résidentes. Chaque contribuable peut déduire de sa base imposable un montant de 0,108 million d'euros (montant modulable par la région). Les communautés autonomes peuvent mettre en place leur propre barème dans certaines limites. Si elles ne le font pas, des taux standards sont appliqués. Il y a 8 tranches et les taux varient entre 0,2 et 2,5 %.
Impôt sur les successions et les donations
L'impôt sur les successions et les donations est prélevé par les communautés autonomes sur la propriété, espagnole ou étrangère, acquise par le biais d'un transfert gratuit. Les non résidents sont soumis à cet impôt sur les actifs espagnols. Des abattements, fonction des liens de parenté, sont déduits de la base imposable. Les communautés autonomes peuvent mettre en place leur propre barème dans certaines limites. Si elles ne le font pas, des taux standards sont appliqués. Il y a 16 tranches et les taux varient entre 7,65 et 34 %.
4. Fiscalité indirecte
La TVA (IVA : impuesto sobre el valor anadido ) a été créée en 1986 au moment de l'adhésion à l'Union européenne. Elle remplaçait un ensemble compliqué de taxes sur le chiffre d'affaires brut qui faussaient les prix relatifs et rapportaient peu à l'Etat. Depuis lors, la plupart des changements de taux ont été liés à l'effort d'harmonisation communautaire (tableau 14). Trois taux existent aujourd'hui : le taux super réduit de 4 % (pour les produits de première nécessité), le taux réduit de 7 % (pour la nourriture, le logement, le transport et le tourisme notamment) et le taux standard de 16 %.
Tableau 14 : Evolution des taux de TVA depuis 1992
Années |
Mesures |
Janvier 1992 |
Augmentation du taux standard de 12 à 13 %
|
Juillet 1992 |
Augmentation du taux ordinaire de 13 à
15 %
|
1993 |
Disparition
du taux maximum de 28 %
|
1995 |
Hausse du taux super-réduit, du taux réduit et du taux standard de 1 point |
Source : Ministerio de economia y hacienda.
Dans le cadre de la TVA réduite pour les activités de
main-d'oeuvre, le taux de 7 % s'applique à la rénovation de
logement et aux services de coiffure.
5. Fiscalité locale
L'Espagne s'est engagée, après le retour de la
démocratie, dans un processus de régionalisation à
plusieurs vitesses. La constitution de 1978 prévoyait le transfert
progressif de différentes compétences aux régions, mais de
façon différenciée étant donnée la
diversité des 17 communautés autonomes. On distingue trois
groupes de communautés :
La Navarre et le Pays Basque bénéficient d'un régime
d'autonomie fiscale spécifique. Outre les compétences
accordées aux régions autonomes par l'article 151 de la
constitution, ces deux régions bénéficient d'une autonomie
totale en matière de prélèvement d'impôts. Tous les
impôts sont perçus par la région, à l'exception des
taxes aux frontières et des recettes procurées par les monopoles
d'Etat. En contrepartie, ces communautés autonomes versent une
contribution forfaitaire à l'administration centrale, pour couvrir les
dépenses qui ne relèvent pas des régions (défense,
politique étrangère et certaines infrastructures comme les
aéroports et les ports), financer les dépenses de
solidarité destinées aux régions
défavorisées et financer le service de la dette contractée
avant la décentralisation. Les transferts liés aux services
assurés par l'Etat représentent un certain pourcentage du
coût de ces services et sont pondérés en fonction de la
valeur ajoutée relative de chaque région par rapport au PIB
national. Alors que le Pays Basque a assumé immédiatement la
totalité des compétences accordées par la constitution, la
Navarre ne gère l'éducation et la santé que depuis 1990.
Les 5 régions ayant obtenu leur autonomie au sens de l'article 151 de la
constitution (Andalousie, îles Canaries, Catalogne, Galice et Valence)
ont choisi d'obtenir le maximum de compétences en un minimum de temps.
Les 10 régions ayant obtenu leur autonomie au sens de l'article 143 de
la constitution (Asturies, Cantabrie, La Rioja, Aragon, Castille-Leon, Madrid,
Castille-La Manche, Estrémadure, Murcie, Baléares) ont connu un
transfert progressif des pouvoirs.
Réformes
Des
accords quinquennaux règlent le processus de décentralisation.
Chaque nouveau système s'applique à toutes les communautés
autonomes, à l'exception de celles qui n'ont pas accepté cet
accord et restent soumises à l'ancien accord.
De 1987 à 1991, l'Etat conserve la plupart de ses pouvoirs fiscaux,
notamment en ce qui concerne la taxation directe et la TVA. Le système
de financement pour la période 1992-1996 vise à renforcer la
discipline budgétaire des régions, à réduire le
déficit des différentes administrations publiques pour respecter
les critères du traité de Maastricht et à accroître
leurs pouvoirs discrétionnaires. Les régions doivent
désormais soumettre un calendrier annuel d'endettement et des plans de
financement. De 1997 à 2001, les ressources fiscales des régions
sont accrues.
Quote-part régionale des recettes de l'Etat
La
quote-part régionale des recettes de l'Etat est la part des recettes
fiscales de l'Etat versée aux régions. Elle est
déterminée en fonction du coût estimé des
compétences assumées par les régions, à l'exception
des services sociaux et de la santé, qui ne sont pas financés par
des impôts mais par des transferts de la Sécurité sociale.
Elle représente 60 % des recettes des régions sur la
période 1987-1991. Le système adopté en 1987
représente un progrès par rapport au système
précédent, dans le sens où il est automatique et ne
nécessite plus de négociations entre l'Etat. On calcule d'abord
le montant total des ressources nécessaires aux régions. Celui-ci
est ensuite divisé en 2 blocs pour les régions au sens de
l'article 143 et pour celles au sens de l'article 151, afin de traiter de la
même manière les communautés autonomes disposant des
mêmes responsabilités. Puis, ce montant est réparti entre
les régions selon plusieurs variables
« distributives », comme la population (poids de 94 %
pour les régions gérant l'éducation et de 64 % pour
les autres) ou la superficie (poids de 3,5 % pour les régions
gérant l'éducation et de 16,6 % pour les autres). Une fois
que la part de chaque région dans les ressources nécessaires a
été calculée selon les variables distributives, il y a une
redistribution : 2,7 % du total est versé aux régions
à faible revenu et 1,82 % aux régions où le rendement
de l'impôt est le plus élevé. Pour la période
1992-1996, on calcule en 1992 le besoin de financement de chaque région
B, auquel on soustrait les ressources propres des régions P, à
savoir les recettes issues des taxes cédées. Une fois
déterminé ce montant pour l'année de base (PIE :
participacion en los ingresos del Estado
, soit la somme issue des
recettes de l'Etat et attribuée aux régions), on le rapporte aux
recettes fiscales de l'Etat (ITE :
ingresos tributarios del estado
,
c'est la somme des recettes des impôts directs et indirects, et des
cotisations de Sécurité sociale et d'assurance chômage),
pour déterminer la quote-part régionale des recettes de l'Etat
Q :
Q= PIE / ITE, avec PIE= B - P
Le calcul de la PIE pour les années suivantes s'effectue à partir
de la quote-part de l'année de base et des ITE de chaque année.
La PIE a été divisée en 2 parties en 1994 à la
demande des régions plus riches désirant disposer librement d'une
plus grande part des impôts prélevés sur leur
territoire : la 1
ère
correspondant à la
précédente PIE au sens strict, moins 15 % des recettes
perçues par chaque région au titre de l'IRPP, la 2
e
consistant en 15 % des recettes de l'IRPP. Malgré la réforme
de 1997, cette part du PIE représentant 15 % de l'IRPP fut
maintenue le temps que le domaine de l'éducation soit
transféré complètement aux régions. De plus, 15%
supplémentaires de l'IRPP furent affectés aux régions.
Quand l'éducation fut transférée aux régions, la
part du PIE attribuant 15% de l'IRPP aux régions disparut et la part de
l'IRPP cédée aux régions passa de 15 à 30 %
(avec une modification du barème spécifique). Le calcul de la PIE
pour la période 1997-2001 au sens strict s'est effectué de telle
manière que les sommes reçues avec le nouveau financement soient
égales à celles obtenues avec le précédent
financement.
Impôts rétrocédés et levés par les régions
Les impôts rétrocédés et les impôts levés par les régions représentent 20 % des recettes sur la période 1987-1991. Seules les taxes sur les successions et donations, la fortune, les transactions foncières, les actes juridiques et les jeux sont cédées. Les ressources fiscales des régions furent accrues en 1997, ce qui permis une augmentation de la part de ces ressources dans les recettes totales des régions de 1/4 à 1/2. Initialement, 15 % de l'IRPP perçu dans leur juridiction fut cédé aux communautés autonomes. La cession de l'IRPP se fit par la division du barème initial de l'IRPP en deux barèmes. Le 1 er égal à 85 % était destiné à l'Etat, le 2 e était le barème régional correspondant aux 15 % restants. Ce pourcentage passa à 30 % avec le transfert de l'éducation aux communautés autonomes (en 1998). Les régions eurent par ailleurs la possibilité de créer leurs propres déductions sur l'IRPP et d'en modifier les taux marginaux, qui peuvent varier de plus ou moins 3 %. Depuis 1997, les régions peuvent modifier, dans une certaine mesure, les taxes cédées précédemment. Elles peuvent aussi créer des taxes, du moment qu'il n'y a pas de double imposition d'une même activité économique.
Fonds de compensation inter territorial
Le FCI ( fondo de compensacion interterritorial ) est alimenté par l'administration centrale et vise à aider les régions défavorisées, notamment dans le cadre de nouveaux investissements d'infrastructure. Son système a été modifié en 1990 pour que seules les régions ayant un PIB/habitant inférieur à 75 % de la moyenne européenne puissent en bénéficier. Auparavant, toutes les régions pouvaient obtenir des fonds du FCI et les modalités du système de distribution et les coefficients de pondération étaient tels que les régions les plus développées obtenaient des sommes assez importantes. Ainsi le FCI, qui était initialement utilisé pour financer les nouveaux investissements concernant les services transférés aux régions, a bénéficié aux régions développées qui ont pris en charge de nombreuses compétences. Par ailleurs, un poids important était accordé au solde migratoire (20 %), ce qui a favorisé certaines régions riches avec un solde négatif, en raison du retour dans les années 1980 dans leur région d'origine de personnes ayant émigré dans les communautés prospères dans les années 1970. Le partage de ce fonds entre les régions se fait désormais selon les pondérations suivantes : 87,5 % pour la population, 1,6 % pour l'émigration nette, 1 % pour le taux de chômage, 3 % pour la superficie, 6,9 % pour la dispersion de la population. Le FCI reçoit chaque année une dotation au moins égale à 35 % des dépenses d'investissement civil approuvées dans le budget national.
Les autres transferts comprennent :
Les
transferts de la communauté européenne, en particulier en
provenance du fonds européen de développement régional
(FEDER).
Les subventions et les transferts en capital de l'Etat aux régions, dans
le cadre de programmes spécifiques, les aides à l'investissement
pour des projets d'intérêt national et les subventions
accordées aux gouvernements régionaux pour les compétences
sociales dont elles ont la charge (y compris la santé pour les
régions concernées).
Une garantie est prévue pour ajuster les revenus des régions, si
les recettes fiscales au niveau national ou les recettes des régions
tirées de l'IRPP n'augmentent pas autant que le PIB
national.
Système en 2002
En
juillet 2001, le système de financement des communautés autonomes
a été réformé en profondeur, avec l'adoption d'un
régime de financement stable, en remplacement des accords quinquennaux
en vigueur depuis le début du processus de décentralisation en
1980. Par ailleurs, en décembre 2001, un accord a organisé
le transfert de la gestion des dépenses de santé aux 10
régions qui ne les contrôlaient pas encore (Aragon, Asturies, Iles
Baléares, Cantabrie, Castille-La Manche, Castille-Léon,
Estrémadure, La Rioja, Murcie, Madrid). Le fait que seules les
régions acceptant d'assumer la santé puissent
bénéficier du nouveau modèle de financement a
incité les régions à accepter ce transfert de
compétences. Afin d'assurer aux régions des sources de revenu
stables, leurs prérogatives en matière de gestion fiscale sont
augmentées.
Les régions perçoivent désormais 33 % de l'IRPP
(contre 30 % auparavant pour la plupart des régions) et la
totalité des impôts sur le patrimoine, les successions et les
donations. Elles bénéficient de plus pour la première fois
d'une partie des impôts indirects : 35 % de la TVA, 100 %
des taxes sur l'électricité et l'immatriculation des
véhicules, et 40 % des taxes sur les alcools, les carburants et les
tabacs.
Un impôt spécifique est créé pour financer le
transfert des dépenses de santé aux communautés autonomes.
Il s'agit d'une taxe de 2 centimes d'euro par litre sur les hydrocarbures. Les
gouvernements régionaux peuvent l'augmenter de 1 centime d'euro à
partir du 1
er
janvier 2002, puis en 2003 et en 2004.
L'objectif de ce système est de renforcer la coresponsabilité
fiscale des régions, qui continueront de pouvoir modifier les taux des
impôts directs et le système de déductions. Ceci leur
permet donc d'avoir, non seulement un large pouvoir sur les dépenses
(elles vont gérer 51,5 milliards d'euros), mais aussi sur les recettes.
Pour respecter la loi de stabilité budgétaire qui entre en
vigueur le 1
er
janvier 2002 et impose l'équilibre
budgétaire à tous les niveaux de l'administration, les
régions désirant dépenser plus, devront accroître
leur pression fiscale.
Outre les anciens impôts sur lesquels le pouvoir des régions
s'accroît et les nouveaux impôts cédés aux CA, un
fonds de suffisance a pour but de compléter les besoins des
différentes communautés. Il doit couvrir la différence
entre les besoins des régions et les ressources fiscales de
l'année de base (1999 ici). Cette somme évolue ensuite chaque
année de façon à rester constante en pourcentage des ITE
(
ingresos tributarios del estado
). Le calcul des besoins de chaque
communauté repose sur différentes variables en fonction des
compétences gérées :
-
Pour les compétences générales, les critères sont
la population (94 %), la superficie (4,2 %), la dispersion de la
population (1,2 %) et l'insularité (0,6 %).
Pour le domaine de la santé, les besoins sont calculés en fonction de la population couverte (75 %), de la population de plus de 65 ans (24,5 %) et de l'insularité (0,5 %).
Enfin, la seule variable influant sur les besoins de services sociaux est la population de plus de 65 ans.
Par ailleurs, un fonds de déplacement est mis en place afin de tenir compte des régions soignant des malades d'autres communautés. Les régions continueront de recevoir des transferts de l'Etat et de bénéficier des mécanismes de redistribution (FCI et fonds structurels de l'UE).
Désormais, les dépenses publiques des régions autonomes (45 % des dépenses publiques totales) sont plus importantes que celles de l'administration centrale (40 %), les municipalités conservant les 15 % restants.
Références bibliographiques
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et P. HERNANDEZ DE COS, 2001 :
The financing arrangements for the
regional autonomous governments for the period 1997-2001
, Banco de Espana,
Documento de trabajo n°0003.
INE (Instituto nacional de estadistica).
INTERNATIONAL BUREAU OF FISCAL DOCUMENTATION, 2001 :
European tax
handbook
, Amsterdam.
MINISTERIO DE HACIENDA, 2000-2001 :
presentacion del proyecto de
presupuestos generales del estado 2001
.
MINISTERIO DE HACIENDA, 2001 :
Stability programme update kingdom of
spain
2001-2005.
MINISTERIO DE HACIENDA, 2001 :
renta 2000 manual practico
, Agencia
tributaria.
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el gobierno informa
, 10 septiembre
2001.
MINISTERIO DE HACIENDA, 2001 :
el gobierno informa
, 22 noviembre
2001.
MINISTERIO DE HACIENDA, 2002 :
el gobierno informa
, 20 avril 2002.
OCDE, 1984-2001 : Etudes économiques de l'OCDE : Espagne,
Paris.
Chapitre 3. 6 : Les réformes fiscales aux
Pays-Bas
Odile
Chagny
Les
Pays-Bas ont un taux de prélèvement obligatoire proche de la
moyenne de l'UE. Depuis 1990, ils ont réussi à améliorer
leur solde public tout en réduisant leur taux de
prélèvement obligatoire par une stricte politique de
dépenses publiques. Depuis la réforme fiscale de 2001, leur
système fiscal présente quatre originalités :
l'impôt sur le revenu est cédulaire, progressif pour les revenus
du travail, proportionnel pour les revenus du capital ; un crédit
d'impôt sur les revenus du travail vise à augmenter l'incitation
au travail et au travail à temps plein ; l'impôt sur les
revenus du capital porte sur un revenu fictif uniforme de 4 % du
patrimoine net ; enfin, la fiscalité écologique monte en
puissance.
I. Une mise en perspective
Les Pays-Bas se caractérisent par un taux de prélèvement
obligatoire proche de la moyenne des pays de l'UE (42,4 % en 1999 contre
43 % dans l'UE), une part relativement élevée des
prélèvements sociaux (39,4 % contre 30,6 % en moyenne
dans l'UE en 2000), qui s'explique par un niveau de protection sociale
élevé, ainsi que par une part faible de l'impôt sur le
revenu (25,2 % contre 32,3 % en moyenne dans l'UE en 2000), reflet
des allégements mis en oeuvre au début des années 1990. La
part de la fiscalité locale est minime (5 % des recettes
fiscales) : le principal impôt local est l'impôt
foncier ; il n'existe pas d'impôt local sur les entreprises.
Les Pays-Bas sont avec l'Irlande l'un des rares pays de l'UE où, dans
les années 1990, l'amélioration du solde public s'est
accompagnée d'une réduction du taux de prélèvement
obligatoire (tableau 1). La consolidation budgétaire mise en oeuvre
par la coalition de centre gauche au pouvoir de 1994 à 2002 est
passée essentiellement par un contrôle des dépenses
(46,4 % du PIB en 1991, 40 % en 2000),
via
la mise en place de
règles budgétaires strictes. L'évolution des recettes
fiscales a été pour beaucoup conditionnée dans les
années 1990 par les effets de la grande réforme fiscale de 1990,
mise en oeuvre à la suite des recommandations de la Commission Oort.
L'objectif de cette réforme était de mener de front l'abaissement
des taux de l'impôt sur le revenu (le taux marginal supérieur a
ainsi été abaissé de 72 % à 60 %) et la
suppression de certains avantages fiscaux. La base imposable a
été élargie d'un tiers ; l'objectif de simplification
du système fiscal est également passé par une
réduction du nombre de tranches (de 9 à 4). L'allégement
net pour les ménages s'est monté à 1 % du PIB (Bach,
2000). La simplification du système fiscal souhaitée par la
réforme de 1990 était cependant inachevée, le recours
accru aux exemptions (régime d'assurance-vie et
déductibilité des intérêts sur les crédits
à la consommation par exemple) se traduisant par une érosion de
la base imposable. La réforme de 1990 s'est accompagnée d'une
réduction des taux de cotisation sociale employeur (de 40 à
20 %), le financement de la Sécurité sociale ayant
été intégré dans l'impôt sur le revenu, ce
qui est conforme à son caractère béveridgien.
La combinaison de taux marginaux supérieurs élevés et de
prestations sociales forfaitaires reste considérée par certains
comme un frein à l'incitation au travail, au moment même où
un certain nombre de mesures d'incitation à l'offre (durcissement des
conditions d'éligibilité au régime d'invalidité) et
à la demande de travail (réduction de cotisations sociales en
faveur des bas salaires pour les employeurs, réductions d'impôts
pour l'embauche de chômeurs de longue durée) étaient mises
en oeuvre.
Enfin, les Pays-Bas se sont lancés dès la fin des années
1980 dans le développement de taxes écologiques et ce mouvement
s'est poursuivi depuis.
La grande réforme fiscale entrée en vigueur en janvier 2001
(accord en 1998, vote au parlement en septembre 1999) accentue radicalement les
réformes engagées au début des années 1990 :
simplification, incitation au travail, réduction du coût du
travail, promotion d'une politique de développement durable. Les trois
objectifs mis en avant sont la simplification, la justice et la
stabilité.
Tableau 1 : Structure des prélèvements obligatoires
|
En % du PIB |
En % du prélèvement des APU |
||||||||||
|
1991 |
1992 |
1995 |
1998 |
2000 |
2001 |
1991 |
1992 |
1995 |
1998 |
2000 |
2001 |
Total prélèvements |
41,8 |
41,5 |
39,2 |
39,1 |
40,4 |
39,2 |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
Total fiscalité : |
26,5 |
25,8 |
23,1 |
23,7 |
24,3 |
24,8 |
63,6 |
62,2 |
59,1 |
60,8 |
60,1 |
63,3 |
dont Impôts directs |
16,1 |
15,2 |
12,4 |
12,2 |
12,1 |
12,4 |
38,6 |
36,5 |
31,7 |
31,1 |
29,9 |
31,7 |
- Entreprises |
3,3 |
3,0 |
3,2 |
4,4 |
4,2 |
4,4 |
8,0 |
7,2 |
8,1 |
11,2 |
10,5 |
11,1 |
- Ménages |
12,6 |
12,0 |
9,1 |
7,6 |
7,6 |
7,8 |
30,3 |
29,0 |
23,3 |
19,4 |
18,8 |
20,0 |
dont Impôts indirects |
10,4 |
10,7 |
10,7 |
11,6 |
12,2 |
12,4 |
24,9 |
25,7 |
27,4 |
29,6 |
30,2 |
31,6 |
Cotisations sociales |
15,2 |
15,7 |
16,0 |
15,3 |
16,1 |
14,4 |
36,4 |
37,8 |
40,9 |
39,2 |
39,9 |
36,7 |
Hors
cotisations sociales fictives.
Source : OCDE.
Graphique 1 : Taux de prélèvements obligatoires aux Pays-Bas
En % du PIB
Source : OCDE.
II. Les réformes des années 1990
1. L'imposition des sociétés
L'imposition des sociétés, qui n'a pas fait l'objet de réformes spécifiques dans les années 1990, repose sur un système de double imposition des bénéfices (tableau 2). Les bénéfices sont imposés à un taux de 35 %, un taux réduit de 30 % étant appliqué aux petits bénéfices. Plusieurs dispositifs sont mis en place pour compenser la double imposition. En particulier, les dividendes interentreprises tirés de participations substantielles dans des entreprises néerlandaises ou étrangères sont exonérés de l'impôt.
Tableau 2 : Imposition des entreprises
Système classique :
|
Taux
:
|
Gains
en capital interentreprises :
|
Mécanismes de compensation de la double imposition :
|
Dividendes :
|
Source : Ministère des finances.
Le taux d'imposition effectif moyen (celui que supporte un investissement
type), qui rapporterait avant impôt une rentabilité de 20 %,
se situe avec 31 % dans la moyenne européenne et est donc
supérieur à celui de l'Irlande et des pays du Nord de l'Europe.
En revanche, un certain nombre de dispositifs du droit fiscal des
sociétés sont très favorables à l'implantation de
holdings
aux Pays-Bas. Les entreprises faisant partie d'un groupe
international peuvent ainsi constituer des réserves spéciales
allant jusqu'à 80 % du revenu financier qualifié
(essentiellement intérêts et royalties). Par ailleurs, les gains
en capital tirés de participations substantielles (5 % et plus du
capital) dans d'autres entreprises, néerlandaises ou
étrangères, sont exonérés de l'impôt sur les
sociétés.
2. Les réformes de l'impôt sur le revenu
L'imposition des revenus a fait l'objet d'une réforme d'envergure en 2001, qui modifie radicalement le traitement des différents types de revenus.
L'imposition des revenus avant la réforme de 2001
L'impôt sur le revenu reposait avant la réforme de 2001
sur un barème progressif par tranches appliqué à
l'ensemble des revenus (salaires, pensions, revenus du capital, revenus d'une
activité indépendante, autres revenus courants).
Les contribuables bénéficiaient d'un abattement de base (8 950
florins, soit 4 061 euros). Les couples sont imposés
séparément, mais un conjoint de revenu nul ou inférieur
à 8 523 florins, peut transférer sur l'autre conjoint un
abattement de ce montant. Pour un couple où l'un des deux conjoints seul
travaille, l'abattement se montait donc à 17 473 florins (soit 7 929
euros). Un abattement de 12 % était accordé aux
salariés à titre de compensation des frais professionnels. Les
personnes âgées bénéficiaient d'abattements
spécifiques. Les enfants ne donnaient pas droit à
réduction d'impôt, sauf pour les parents célibataires.
Depuis 1990, les cotisations sociales générales, qui financent
l'assurance vieillesse, les pensions de réversion, les allocations
familiales et les prestations maternité, sont supportées par
l'ensemble des contribuables, et donc intégrées dans les deux
premiers taux de l'impôt sur le revenu. Les autres cotisations sociales
ne sont supportées que par les salariés (assurance maladie,
invalidité et chômage).
Les dividendes provenant de participations substantielles (participations
supérieures à 5 %) étaient soumis à un
prélèvement à la source libératoire de 25 %,
l'application d'un taux réduit étant destinée à
compenser l'absence d'avoir fiscal. Pour les mêmes raisons, un abattement
de 1 000 florins (soit 454 euros) était appliqué pour les
autres dividendes, soumis par ailleurs à un prélèvement
à la source non libératoire de 25 %. Les revenus
d'intérêts n'étaient pas imposés à la source.
La réforme de l'impôt sur le revenu de 2001
La
réforme modifie radicalement le traitement des différents types
de revenus en introduisant un système cédulaire. Elle vise d'une
part à poursuivre l'effort de simplification de la fiscalité et
à garantir la stabilité de la fiscalité. Elle est enfin
axée sur l'incitation au travail par l'introduction d'un nouveau
crédit d'impôt et la baisse des taux marginaux d'imposition.
La réforme introduit un système cédulaire dont la logique
générale est de traiter séparément les revenus du
travail et du capital. Trois boîtes sont distinguées (tableau 3),
chacune intégrant des catégories spécifiques de revenus,
imposées selon des logiques différentes, sans compensation entre
les différentes boîtes.
La première boîte couvre les revenus du travail (salarié ou
indépendant), ainsi que les loyers fictifs des résidences
principales. Ces revenus sont imposés selon un barème progressif,
qui comprend comme auparavant quatre tranches. Les taux d'imposition marginaux
sont abaissés, en particulier pour les hauts revenus.
La principale innovation relative à l'imposition des revenus du travail
réside dans le remplacement du système d'abattements par
différents crédits d'impôts, dont un crédit
supplémentaire pour les personnes ayant un emploi. Un crédit de
base est accordé à chaque contribuable. Les conjoints qui ne
travaillent pas en bénéficient (de sorte qu'ils ne sont pas
désincités à travailler). Des crédits
supplémentaires sont accordés aux contribuables ayant des enfants
à charge et aux personnes âgées. Enfin, un crédit
d'impôt est accordé à toute personne ayant un emploi,
salarié ou non. Très faible pour les revenus inférieurs
à un demi salaire minimum, il croît ensuite de manière
linéaire pour plafonner à 920 euros (en 2001) (graphique 2). Son
objectif est triple : il réduit la désincitation fiscale à
travailler pour les faibles qualifications, il accroît l'incitation pour
les bas revenus à passer d'un temps partiel à un temps plein,
tandis que sa non dégressivité atténue la
progressivité de l'impôt.
Graphique 2 : Règles de calcul du crédit d'impôt d'emploi
En euros
Source : Ministère des finances.
L'individualisation de l'impôt est renforcée, les conjoints qui
paient l'impôt sur leur revenu propre ne pouvant utiliser que les
déductions qui leur sont propres. Par contre, le partage des revenus
communs au couple (comme les loyers fictifs) et les charges communes (comme les
dépenses liées à l'éducation des enfants) est
laissé à l'appréciation du couple.
Les revenus provenant de participations substantielles (tableau 3), qui sont
inclus dans la deuxième boîte, continuent d'être soumis
à un prélèvement libératoire de 25 %. Par
contre, de profondes modifications sont introduites pour la taxation des autres
revenus du capital, qui font l'objet de la troisième boîte. Ces
revenus sont désormais imposés sur la base d'un taux de 30 %
appliqué au rendement fictif de 4 % du patrimoine net ;
l'impôt sur le patrimoine est en conséquence supprimé
155
(
*
)
. L'objectif est
d'introduire une neutralité entre placements. Le nouveau mode
d'imposition élimine l'arbitrage en faveur des placements
générant des gains en capital, auparavant exonérés
de l'impôt sur le revenu ; il est fiscalement neutre entre
dividendes et bénéfices réinvestis. Le gouvernement
escompte de cette plus grande neutralité fiscale un dynamisme plus
soutenu des marchés de capitaux, à même de favoriser les
investissements en recherche et développement. Si le nouveau mode
d'imposition garantit une plus forte stabilité des recettes fiscales, il
comporte aussi certains risques pour les contribuables, puisque le rendement
fictif ne tient pas compte de leur capacité financière effective.
Tableau 3 : Architecture générale de l'impôt sur le revenu
Boîte 1 |
Boîte 2 |
Boîte 3 |
Base
imposable : Revenus du travail (y compris les entrepreneurs individuels et
la production de services de logement pour les propriétaires
occupants) :
|
Base
imposable :
|
Base
imposable :
|
Crédits d'impôt :
|
Pertes et charges déductibles. |
Abattement :
valeur du patrimoine de 17 600 € ,
majorée de 2 349 € pour chaque enfant < 18 ans.
|
Taux
d'imposition :
|
Taux
d'imposition :
|
Taux
d'imposition :
|
Source : Ministère des finances.
Le financement de la réforme de 2001
La réforme a été financée pour partie par une augmentation de la TVA, par la majoration de l'écotaxe et par la suppression de certaines déductions, de sorte que l'allégement net est faible (tableau 4). Les allègements nets d'impôts sont importants pour les personnes célibataires ayant un emploi -- en particulier celles qui sont proches du salaire minimum, ainsi que pour les couples ayant deux revenus (OCDE 2000).
Tableau 4 : Financement de la réforme fiscale (en milliards d'euros)
Recettes |
|
Dépenses |
|
Réduction des déductions |
4,4 |
Réduction des taux d'imposition |
7 |
Augmentation de la TVA (passage du taux normal de 17,5 à 19 %) |
2 |
Crédits d'impôt |
3,6 |
Taxe environnementale (majoration) |
1,7 |
|
|
Impôt sur les revenus imputés du patrimoine |
0,2 |
|
|
Allégement net |
8,3 |
|
10,6 |
Allègement net |
2,3 |
|
|
Source : OCDE 2000.
2. Les réformes des cotisations sociales et la baisse du coût du travail
Avec un
peu moins de 40 % de la rémunération salariale (OCDE,
Taxing wages
, 2000), le niveau des charges sociales est l'un des plus
élevés des pays de l'UE. Des efforts importants ont
été entrepris dans la seconde moitié des années
1990 pour réduire le coût du travail des travailleurs peu
qualifiés, mais les dispositifs en place ont été
récemment partiellement supprimés pour être
remplacés par les mesures contenues dans la réforme de
l'impôt sur le revenu. L'allégement des charges en faveur des bas
salaires comporte deux mesures principales.
Le SPAK (abréviation pour réduction ciblée des cotisations
sociales) a été introduit en janvier 1996. Il est ciblé
sur les salaires inférieurs à 115 % du salaire minimum et
consiste en un allégement permanent des charges sociales patronales. La
réduction de charges se montait en 1996 à 538 euros par an, elle
a été progressivement relevée et atteint 1 809 euros en
2002. La réduction de coût salarial est de l'ordre de 11 %
(tableau 5).
Pour éviter les effets de seuil pour les salaires
légèrement supérieurs à 115 % du salaire
minimum, un dispositif supplémentaire a été introduit en
janvier 1997 (le SPAK transitionnel), qui permet aux employeurs de
bénéficier de la moitié du montant maximum du SPAK pour
les salaires compris entre 115 et 130 % du salaire minimum. Cette mesure
ne s'applique qu'aux salariés qui bénéficiaient auparavant
au sein de la même entreprise des allégements du dispositif
général. Le SPAK transitionnel est temporaire (limité
à deux ans à partir de l'éligibilité au dispositif
général). Ce dispositif a été supprimé en
2001 lors de la réforme de l'imposition des revenus.
Enfin, le champ d'application du dispositif SPAK général a
été restreint en 1998 aux salariés travaillant plus de 36
heures hebdomadaires (contre 32 auparavant). Pour les salariés
travaillant moins de 32 heures hebdomadaires, le seuil de 115 % a
été abaissé et appliqué sur une base horaire, afin
d'exclure du dispositif les salariés à temps partiel de
rémunérations horaires élevées et de cibler les
mesures sur les salariés à temps plein peu qualifiés.
Le dispositif d'allégement de charges sur les bas salaires est
complété par une mesure ciblée sur les chômeurs de
longue durée (de plus d'un an) ou âgés (de plus de 57,5
ans) (le VLW). Ce dispositif est limité à quatre ans. La
combinaison des deux mesures permet aux entreprises de bénéficier
d'allégements de 23 % du coût salarial. En 2001, le champ
d'application de ce dispositif a été élargi aux personnes
de plus de 50 ans et le seuil salarial d'application de 115 % a
été relevé à 130 %.
En 1997, 88 % du groupe de salariés ciblé par le dispositif
SPAK et 79,2 % du groupe ciblé par le SPAK transitionnel
étaient touchés, soit au total environ un million de personnes,
représentant respectivement 20 et 0,5 % de l'emploi salarié
privé. Les salariés à temps partiel sont
surreprésentés (76 % des salariés concernés
par le dispositif, contre 33 % dans l'ensemble de la population
salariée), ce qui s'explique par l'application récente d'un
critère horaire dans l'attribution du dispositif. 72 % des
salariés concernés ont un niveau d'éducation
élémentaire ou secondaire. Selon une étude du
Netherlands Economic Institute
, les dispositifs en faveur des bas
salaires auraient permis une augmentation de 54-64 000 personnes de l'emploi
entre 1996 et 1998.
Tableau 5 : Réduction du coût salarial (en euros par an, pour un temps plein adulte en 1999)
Salaire minimum |
Sans SPAK |
Avec SPAK |
Salaire net
|
10 177
-- |
10 177
|
Source : Ministère hollandais des affaires sociales et de l'emploi, 1999.
Tableau 6 : Taux de cotisations sociales en 2001
|
Plafond |
Employeurs
(total : 16 %)
|
57 420 florins (2001) (26 056 euros) |
Invalidité (WAO) : 6,1 % (générale) + supplémentaire (2,69 %) |
87 957 florins (39 913 euros) |
Maladie (6,25 %) |
58 986 florins (soit 26 767 euros) (les salariés qui gagent plus de 65 700 florins (soit 29 813 euros) en sont exclus) |
Salariés
(total : 36,35 %)
|
59 520 florins (soit 27 009 euros) |
Autres cotisations : |
|
Maladie (ZFW) 1,7 % |
58 986 florins (soit 26 767 euros) (les salariés qui gagent plus de 65 700 (soit 29 813 euros) en sont exclus) |
Chômage 5,25 % |
57 420 florins (soit 26 056 euros), franchise à 13 140 euros |
En ce qui concerne la réduction de la TVA sur les services à fort contenu en main-d'oeuvre, les Pays-Bas ont choisi de pratiquer le taux réduit sur les services de réparations aux ménages, de rénovation de logements et aux coiffeurs.
3. La fiscalité écologique
La
fiscalité écologique a été introduite à la
fin des années 1980. L'impôt sur les carburants a
été introduit en 1988 et son produit affecté au
financement de mesures de protection de l'environnement. Le revenu des taxes
environnementales (TIPP, taxe automobile, écotaxe) représentait
8,7 % des recettes en 1985, cette part est montée à
14,1 % en 2001.
Les années récentes ont connu de nouveaux développements
de la fiscalité écologique, qui sont allés de pair avec la
diminution de la fiscalité directe. La taxe de régulation
énergétique (l'écotaxe proprement dite) a
été introduite en 1996 et a été progressivement
relevée par la suite, le dernier relèvement ayant
été mis en oeuvre en parallèle avec la réforme de
l'impôt sur le revenu. Cet impôt est destiné à
favoriser les économies d'énergie des consommateurs et des
entreprises. Cet impôt taxe l'utilisation de gaz naturel, de fuel et
d'électricité. Pour les deux impôts écologiques, des
plafonds d'imposition sont fixés pour les gros consommateurs, afin de ne
pas compromettre la compétitivité des entreprises (voir tableau
7).
Tableau 7 : Taux (eurocent par unité) de la taxe de régulation énergétique en 2001
|
Unité |
Eurocent |
Gaz |
0 5000 m 3 |
12,03 |
|
5000 170 000 m 3 |
5,62 |
|
170 000 1 million m 3 |
1,04 |
|
>1millions m 3 |
0 |
Electricité |
0 10 000 kWh |
5,83 |
|
10 000 50 000 kWh |
1,94 |
|
50 000 10 millions kWh |
0,59 |
|
> 10 millions kWh |
0 |
Source : Ministère des Finances.
Références bibliographiques
BACH S., W. SCHEREMET, B. SEIDEL, D. TEICHMANN, 2001 :
« Internationale Entwicklungstendenzen nationaler Steuersysteme --
von der direkten zur indirekten Besteuerung ? », DIW Sonderheft
1/2 2001:
COMMISSION EUROPÉENNE, 1999 : « Reduction of non-wage labour
costs, particulary for low-paid labour ».
INTERNATIONAL BUREAU OF FISCAL DOCUMENTATION, 2001 : « European
Tax Handbook 2001 », Juhani Kesti L.L.M. Editeur.
MINISTÈRE DES FINANCES, 2001 : « Taxation in the Netherlands
2001 ».
MINISTÈRE DES FINANCES, 2001 : « Greening the tax
system ».
OCDE, 1998 : Etude économique de l'OCDE, Pays-Bas.
OCDE, 2000 : Etude économique de l'OCDE, Pays-Bas.
OCDE, 2002 : Etude économique de l'OCDE, Pays-Bas.
* 1 Rapport du Sénat n° 483 (1998-1999), M. Philippe Marini, commission des finances : « La concurrence fiscale en Europe : une contribution au débat ».
* 2 Le taux implicite de taxation des entreprises rapporte les prélèvements directs sur les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés à leur excédent brut d'exploitation.
* 3 Le taux effectif moyen d'imposition des entreprises exprime les prélèvements sur le revenu des entreprises (impôt sur les sociétés + impôts sur les revenus reçus des entreprises), estimé à partir d'un taux de rendement donné.
* 4 Le coin fiscal marginal mesure l'écart entre le rendement avant et après impôt d'un investissement en tenant compte de la fiscalité sur les entreprises mais aussi de la fiscalité pesant sur l'investisseur (fiscalité des dividendes, des intérêts, etc.).
* 5 L'imposition du revenu des ménages comprend ici les impôts sur le revenu au sens des règles de Comptabilité nationale et les cotisations sociales.
* 6 Le choix d'un revenu inférieur (à 70 % du salaire moyen environ) aurait fait apparaître des taux moyens d'imposition nuls dans un grand nombre de pays.
* 7 Sont comparés successivement les taux moyens d'imposition d'un revenu égal à 5 fois le salaire moyen ouvrier et 0,7 puis 1 fois ce salaire et les taux moyens d'imposition d'un niveau égal à 3 fois le SMO et le SMO lui-même.
* 8 Le « coin sociofiscal » représente l'écart entre la charge salariale brute et la rémunération nette réellement perçue par le salarié.
* 9 Cette augmentation masque un mouvement de reflux à partir de 1994 puisque, après avoir atteint 28,5 % du PIB, le poids des dépenses de protection sociale a été allégé en raison d'une progression moins rapide que celle du PIB.
* 10 « Une nouvelle évaluation des effets des allégements de charges sociales sur les bas salaires ». Bruno Crépon et Rozenn Desplatz, Economie et Statistique n° 238, 2001-8.
* 11 INSEE - DP - DARES, 1999.
* 12 Le taux d'emploi mesure le nombre de personnes effectivement employées par rapport à la population en âge de travailler. Le taux d'activité mesure le nombre de personnes participant d'une manière ou d'une autre (emploi, chômage, formation) au marché du travail par rapport à la population en âge de travailler.
* 13 Le salaire de réserve est le niveau de salaire pour lequel le travailleur obtient le même niveau de satisfaction qu'il soit au chômage ou pourvu d'un emploi rémunéré à ce niveau. Un demandeur d'emploi refusera un emploi rémunéré à un niveau inférieur à son salaire de réserve, et acceptera un emploi rémunéré à un niveau supérieur.
* 14 Committee on Ways and Means (1998), Green Book .
* 15 Commission des finances, rapport d'information du Sénat n° 82 (1997/1998).
* 16 Revenu des ménages correspondant à la moyenne de chaque pays, prise en compte de la totalité des prélèvements locaux et sociaux.
* 17 Commissariat général du Plan, La place des actions dans le patrimoine des ménages, mesure et comparaisons, décembre 2002.
* 18 Thierry Laurent, Yannick L'Horty, « Fiscalité de l'épargne en Europe : une comparaison multi-produits », Revue d'économie financière, n° 64.
* 19 Commissariat général du Plan, La place des actions dans le patrimoine des ménages, mesure et comparaisons, décembre 2002.
* 20 En effet : un rendement nominal de 5 %, une fois imposé à 60 %, correspond à un rendement nominal net de 2 %. Si l'inflation est de 2 %, le rendement nominal réel est donc nul.
* 21 Commissariat général du Plan, La place des actions dans le patrimoine des ménages, mesure et comparaisons, décembre 2002.
* 22 Revenu des ménages correspondant à la moyenne de chaque pays, prise en compte de la totalité des prélèvements locaux et sociaux.
* 23 Une participation est dite substantielle à partir d'une certaine proportion du capital.
* 24 Revenu des ménages correspondant à la moyenne de chaque pays, prise en compte de la totalité des prélèvements locaux et sociaux.
* 25 Commissariat général du Plan, La place des actions dans le patrimoine des ménages, mesure et comparaisons, décembre 2002.
* 26 Malgré quelques divergences découlant de différences méthodologiques (comme la prise en compte des abattements). Ainsi, selon l'OFCE, « les Pays-Bas (...) ignorent la distinction entre le court terme et le long terme » et au Royaume-Uni « l'imposition est décroissante avec la durée de détention ».
* 27 André Ferrand, rapport d'information fait au nom de la mission commune d'information du Sénat chargée d'étudier l'ensemble des questions liées à l'expatriation des compétences, des capitaux et des entreprises, rapport n°386, 2000-2001.
* 28 Commissariat général du Plan, La place des actions dans le patrimoine des ménages, mesure et comparaisons, décembre 2002.
* 29 Là encore, la méthodologie retenue peut conduire à des appréciations différentes. Ainsi, selon le rapport du commissariat général du Plan, dans le cas des Pays-Bas le taux marginal effectif de prélèvement pour un ménage de revenu moyen serait de 50 % pour les obligations et 69 % pour les dividendes.
* 30 Rapport d'information du Sénat n° 82 (1997/1998).
* 31 Selon le quatrième principe, « il vaut mieux essayer d'agir sur la structure de l'épargne que sur son volume. La fiscalité est impuissante à modifier le volume de l'épargne, en revanche elle est très influente sur la structure de l'épargne, c'est à dire sur l'orientation des placements ». Selon le sixième principe, « la fiscalité de l'épargne doit (...) favoriser les titres de fonds propres plutôt que les titres de dettes ».
* 32 Seuls le Danemark, l'Espagne, la France, les Pays-Bas et la Suède ont un système obligatoire d'échange d'information.
* 33 Dans le rapport d'information précité, notre collègue reproduisait le fac-similé d'un document publicitaire d'une banque luxembourgeoise, qui démarchait des épargnants français en leur promettant le secret fiscal.
* 34 Les trois autres (Luxembourg, Belgique, Autriche) devant instaurer une retenue à la source sur les revenus de l'épargne, dont 75 % seront reversés à l'Etat du contribuable.
* 35 « L'absence d'échange d'information, peut en dépit du pré-paiement de l'IS et de la retenue à la source, rendre dans certains cas la fraude intéressante. C'est le cas pour un épargnant français qui supporterait, en détenant des actions au Luxembourg, un taux d'IS de 30 % et une retenue à la source de 15 % en fraudant, et un taux d'IS de 30 % plus l'IR français à 52,75 % sans frauder ».
* 36 Le Figaro, 21 mai 2003.
* 37 La Community Charge (Poll Tax) était un impôt dont le montant était identique pour tous les contribuables, quel que soit leur niveau de revenu. Son montant était déterminé au niveau du district. La Community Charge a été remplacée par la Council Tax en avril 1993. La Council Tax est une taxe d'habitation, assise sur la valeur du logement (que l'occupant en soit locataire ou propriétaire). La logique de la Poll Tax n'a pas totalement disparu, la taille du ménage étant partiellement prise en compte (les ménages d'une seule personne bénéficient en effet d'une réduction de 25 %). La Council Tax correspond à 30 % des recettes des collectivités locales en Grande-Bretagne.
* 38 D'autres typologies sont possibles. Ainsi, en retenant des évaluations légèrement différentes de l'autonomie fiscale, M. Jacques Blanc propose de distinguer, outre le « modèle scandinave », un « modèle hanovrien » (Allemagne, Angleterre, Pays-Bas), où l'autonomie fiscale des collectivités locales est faible, et un « modèle latin » (Italie, France, Espagne) intermédiaire (Finances locales comparées, L. G. D. J., 2002).
* 39 Dans l'ensemble du rapport, le terme de fiscalité est utilisé pour désigner l'ensemble des prélèvements obligatoires, comprenant donc les impôts et les cotisations sociales.
* 40 De 2000 à 2040, la hausse des dépenses de retraites dans le PIB de la zone euro devrait être de 5,8 points selon Chagny et alii (2001), de 3 points selon les projections des gouvernements.
* 41 Ces systèmes, où la part des impôts indirects est plus élevée que la moyenne, peuvent être qualifiés d'archaïques puisqu'ils sont proches de ceux en vigueur dans les pays européens au début du XX e siècle, et que la part des impôts qui s'appuient sur la capacité contributive des citoyens et permettent la redistribution y est plus faible qu'ailleurs.
* 42 Voir notamment le dossier sur les évolutions et les réformes des retraites en Europe (Chagny, Dupont, Sterdyniak et Veroni, 2001). Sur les interrogations concernant l'avenir et les choix envisageables, voir par exemple, Dupont et Sterdyniak, 2000.
* 43 Sur la théorie et la réalité de la concurrence fiscale, voir Marini (1999), Hugounenq, Le Cacheux et Madiès (1999), Le Cacheux (2000).
* 44 Voir notamment Sterdyniak et Villa, 1999.
* 45 Pour une analyse plus détaillée de ces questions, voir Dupont, Le Cacheux, Sterdyniak et Touzé (2000) ; Dupont, Sterdyniak (2001).
* 46 Voir, à ce propos : Dexia, 2002 ; Dafflon, éd., 2002. Ce dernier ouvrage met en outre l'accent sur un aspect important des finances publiques locales européennes, à savoir le contrôle des déficits budgétaires et de l'endettement des collectivités locales, qui sont partout en Europe les principaux investisseurs publics. Le Pacte de stabilité impose, en effet, des limites sur le déficit du secteur public ce qui implique d'imposer aux collectivités locales une certaine discipline budgétaire.
* 47 Il est, par exemple, choquant que la France ne puisse décider seule du taux de TVA qu'elle applique aux coiffeurs, aux restaurants, aux disques... En sens inverse, les instances communautaires doivent vérifier qu'un mouvement de TVA ne masque pas une stratégie protectionniste. Le point délicat est de savoir quels doivent être les critères de décision. Un pays a-t-il le droit de favoriser la consommation de services qui, par définition, ne sont pas importés ?
* 48 Sur les risques de concurrence fiscale et sociale en Europe, voir également la discussion dans Fitoussi et Le Cacheux, éds., 2002.
* 49 Les propositions les plus récentes de la Commission (Commission européenne, 2002) privilégient l'harmonisation de l'assiette, mais celle-ci est insuffisante pour éviter la concurrence fiscale sans accord sur les taux ou sans application stricte du principe de source.
* 50 Même si ce principe est fragilisé par les pratiques d'optimisation fiscale des entreprises multinationales.
* 51 Le déficit public a été réduit de 3,8 points de PIB, grâce à une hausse des recettes fiscales de 1,8 point de PIB, une baisse des charges d'intérêt de 0,8 point, une baisse des dépenses primaires de 1,2 point.
* 52 « Les sommes réellement consacrées par les pays à la politique sociale : une étude comparative », Revue économique de l'OCDE, N°28, 1997.
* 53 Si les décisions fiscales demeurent la prérogative des nations et donc du Conseil statuant à l'unanimité, la surveillance de la mise en oeuvre du marché unique et des pratiques anticoncurrentielles est du ressort de la Commission.
* 54 On parle de situation efficace lorsque le capital est alloué aux projets qui ont les taux de rendement avant impôt les plus élevés. La création d'un nouvel espace économique suppose une réorganisation du capital sur l'ensemble du territoire qui réponde à des impératifs purement économiques. De nouvelles opportunités d'investissement apparaissent, voire certains projets peuvent avoir en fonction de leur relocalisation géographique un taux de rendement avant impôt plus élevé (main d'oeuvre plus qualifiée etc.). La présence d'écarts d'imposition importants fausse cette réorganisation en ce sens que les entreprises sont alors sensibles non plus au taux de rendement avant impôt mais au taux de rendement après impôt. La productivité du capital est réduite, ce qui nuit à la compétitivité internationale de l'Union, minore la production totale et y abaisse le niveau de vie. De façon générale, toute action motivée uniquement par des considérations fiscales entraîne une perte pour la collectivité. Cela ne signifie pas que le taux d'imposition doit être nul, mais que des mécanismes doivent être mis en place pour que les prélèvements fiscaux n'induisent pas de modifications de comportements.
* 55 Voir note (2).
* 56 Dans ce type de raisonnement, ce n'est pas le montant du prélèvement qui est source de distorsions mais sa forme. La présence de taux marginaux non nuls est susceptible de désinciter au travail ou à l'investissement.
* 57 Voir note (2).
* 58 Rapport du Sénat « Mondialisation : réagir ou subir ? La France face à l'expatriation des compétences ».
* 59 Il existe en effet en France une exception au principe de la source : le régime du bénéfice consolidé qui permet à un groupe de sociétés constitué de filiales détenues à plus de 50 % par la société mère de consolider les pertes et les bénéfices de l'ensemble de ses filiales ou succursales sur le plan mondial, c'est à dire de filiales qui, pour certaines, ne sont pas résidentes.
* 60 Les résultats d'une succursale peuvent être imposés une première fois dans son pays d'implantation (que celui-ci applique le principe de la source ou de la résidence et impose les non résidents) et une deuxième fois au niveau de la société mère. Ces cas de double imposition sont en partie résolus par l'existence de conventions bilatérales. Mais ce type de solution s'avère insatisfaisant. La multiplication de ces conventions rend peu lisible le système européen dans son ensemble.
* 61 Ce régime est assez largement répandu en France puisque, d'après les statistiques, 6 000 groupes au sens fiscal du terme -- c'est-à-dire ceux formés de filiales détenues à 95 % au moins par la société mère -- bénéficient de ce régime qui concernent ainsi 23 000 sociétés. Ce régime va très au-delà des grands groupes et s'applique tant aux groupes de petite taille qu'aux grandes PME puisque 90 % des 6 000 groupes concernés ont moins de cinq filiales et que la moitié n'en a qu'une. Il est assez comparable à celui de nos partenaires qui, en général, le réservent à leurs filiales résidentes détenues à plus de 90 %.
* 62 On pourrait rajouter qu'en outre le traitement asymétrique des filiales et des succursales n'a aucune rationalité économique, qu'il crée des distorsions quant à la structure juridique des groupes et constitue une incitation à l'optimisation fiscale.
* 63 Certains pays appliquent une version plus favorable que la directive avec des seuils de possession plus faibles (5 % ou 10 % par exemple).
* 64 Par exemple, la convention franco-italienne (qui est symétrique) stipule que le taux de retenue à la source sur les dividendes distribués par une société française à une société italienne est de 15 %. Cette retenue à la source est remboursée à la société italienne par l'Italie. La France accorde par ailleurs le bénéfice de l'avoir fiscal (au taux de 50 %) si la société italienne paie l'IS en Italie sur les dividendes reçus. Au total, ces dividendes n'ont supporté que l'IS italien et les deux pays se sont partagés les recettes. La France a perçu le taux de retenue à la source et une partie de l'IS. I'Italie a perçu une partie de son IS moins le taux de retenue à la source. Dans le cadre de la convention franco-allemande, le traitement fiscal de la circulation des dividendes entre la France et l'Allemagne est identique à celui de la convention franco-italienne, mais l'Allemagne ne pratiquant pas l'avoir fiscal, la symétrie n'est donc plus respectée. Dans ce cas de figure, la France accorde aux entreprises qui reçoivent des dividendes d'origine allemande un crédit d'impôt ne pouvant excéder l'impôt français.
* 65 D'autres techniques existent pour transférer le bénéfice : la répartition des dépenses des frais de recherche, les prêts entre filiales, la sous-capitalisation.
* 66 En France, l'administration fiscale peut réintégrer dans les résultats d'une entreprise résidente les pertes ou bénéfices résultant de manipulation des prix de transferts. Ce dispositif a été renforcé par l'allongement du délai de reprise de l'administration dans le cadre d'une procédure qui fait souvent appel à l'assistance fiscale internationale.
*
67
Rapport Charzat
« Attractivité du territoire » et Rapport de l'Etat
de l'Union 2002.
Aérospatiale Matra (France), Dasa (Allemagne) et Casa (Espagne) ont
fusionné pour donner naissance au groupe EADS, groupe européen de
l'aéronautique, l'espace et la défense localisé au
Pays-Bas.
* 68 Pour bénéficier du régime de l'exonération, les opérations de fusion doivent au préalable obtenir un agrément administratif. Dans le cadre des opérations d'apport partiel d'actifs, l'apporteur de ressources et la société bénéficiaire sont imposés. Pour les opérations de scissions, les actionnaires doivent conserver leur titre pendant trois ans, sauf ceux détenant moins de 5 % etc.
* 69 COM 2001(582).
* 70 La Commission, tout comme les entreprises, est défavorable à l'institution d'un taux unique. En 1997, la proposition d'un impôt sur les bénéfices (consolidés) européen (base et taux unique) avait été émise. Il n'en est plus question aujourd'hui.
* 71 Le plan prévoyait de faire passer les taux de {12 ; 25 ; 35 ; 45 ; 50 ; 56,8} sur les revenus de 1995 à {7 ; 20 ; 28 ; 35 ; 41 ; 47} sur les revenus de 2000.
* 72 Dans les dix dernières années, un important dispositif d'exonération fiscale a été progressivement supprimé : la déductibilité des intérêts hypothécaires ( Mortgage Interest Tax Relief , MITR) a été plafonnée dès 1974. Par la suite, le plafond a augmenté beaucoup moins rapidement que l'inflation, ce qui a mécaniquement réduit les charges déductibles en terme réel. Finalement, le MITR a été supprimé.
* 73 Cette approche stipule que chacun doit participer aux dépenses de la nation à proportion de ses capacités contributives.
* 74 Au sein du marché européen, les mouvements d'épargne peuvent générer d'autres types d'inefficacité si tous les agents économiques ne peuvent avoir accès indifféremment à l'ensemble des places financières européennes (les PME par exemple) Mais cette question, pour importante qu'elle soit, relève d'une autre problématique que celle de la fiscalité.
* 75 Avec des divergences cependant selon les pays. La plupart des pays accorde la déductibilité des intérêts d'emprunts pour les achats immobiliers de la résidence principale. La France l'a récemment supprimée mais accorde un traitement très avantageux à l'investissement immobilier locatif.
* 76 Ils dépendent en outre de la situation familiale de l'épargnant.
* 77 Les profits non distribués sont des revenus non fictifs et à ce titre doivent être imposés. D'une certaine façon, ils peuvent être comparés à des revenus distribués que l'actionnaire aurait décidé de réinvestir instantanément dans l'entreprise, la maîtrise de cette décision lui étant fictivement attribuée. Ces profits réinvestis ont pour effet d'accroître (d'un montant théoriquement égal à leur rendement actualisé) le cours de l'action. Cependant, leur montant diffère de la plus-value boursière des titres durant la même période.
* 78 Les systèmes aboutissent généralement à la surtaxation des profits distribués par rapport aux profits non distribués, ce qui induit une asymétrie dans les modes de financement, l'autofinancement étant favorisé par rapport à l'émission d'actions. Les conséquences de ce différentiel d'imposition sur le comportement des épargnants ne font cependant pas l'unanimité. Si l'on considère que la distribution de dividendes représente un signal envers les actionnaires de la bonne santé de l'entreprise, alors leur surimposition fiscale favorise les entreprises « matures » (qui s'autofinancent) par rapport aux entreprises en création. Par ailleurs, l'imposition au taux de l'IS du profit non distribué, à un taux inférieur à celui des dividendes peut se justifier par la contrainte de réinvestissement qui pèsent sur les actionnaires.
* 79 La structure de l'épargne en France est très proche de celle que l'on trouve en Allemagne. Au contraire, le Royaume-Uni se caractérise par une structure de détention relativement plus équilibrée (32 % d'action et 30 % d'obligation). Celle-ci s'explique par la forte proportion de l'épargne placée dans les fonds de pension et des compagnies d'assurance. Ces placements qui bénéficient d'avantages fiscaux par rapport au régime de droit commun sont orientés principalement vers les marchés de capitaux. Il en est de même pour les Pays-bas et la Suède.
* 80 Cette détention d'actifs français par les non résidents peut être interprétée de différentes façons. C'est d'une part le signe de la bonne rentabilité des entreprises françaises. D'un autre côté, certains regrettent que cette bonne rentabilité ne bénéficie pas aux résidents. Enfin, cette structure de détention aurait des conséquences sur le mode de gouvernance des entreprises.
* 81 Le ratio dette sur fonds propres des entreprises reste élevé en dépit de l'amorce d'une diminution depuis le milieu des années 1990 ( il est ainsi passé de 89,4 % en 1996 à 75,8 % en 2000).
* 82 Elle n'est d'ailleurs pas limitée à la réforme de l'imposition des obligations et des dividendes. L'épargne contractualisée est aussi remise en question.
*
83
La généralisation
de l'avoir fiscal est critiquée à partir de deux arguments :
1. La généralisation de ce système aurait comme effet que
plus aucune imposition ne serait retenue sur les entreprises dans le pays de la
source, ces dernières utilisant malgré tout les infrastructures
du pays. D'une part, les entreprises paient des impôts locaux. D'autre
part, les conventions prennent cet argument en compte à travers
l'application d'une retenue à la source remboursée par le pays de
résidence (encadré). Elle permet au niveau des Etats une certaine
compensation pour la présence de l'entreprise dans le pays de la source
puisque celui-ci la conserve.
2. L'application de l'avoir fiscal pose des problèmes pour les
entreprises qui sont exonérées d'IS (ou la paient à un
taux réduit) et qui distribuent des dividendes. Cela multiplie les taux
d'avoirs fiscaux à appliquer. Cependant, il ne s'agit que de
problèmes techniques qui peuvent trouver des solutions.
* 84 La future directive comporte les éléments essentiels suivants :
-
La Belgique, le Luxembourg, l'Autriche perçoivent une retenue à
la source fixée à 15 % les trois premières
années et à 20 % les années qui suivent.
75 % des recettes fiscales sont restituées à l'Etat de domicile du bénéficiaire des intérêts.
Seuls sont concernés par la directive, les intérêts placés dans des fonds de placement. Les intérêts versés sur des titres placés dans des fonds de thésaurisation ne sont concernés par la directive que si leur proportion dépasse 40 % des avoirs du fonds.
Les obligations émises avant le 1 er mars 2001 sont exclues de la directive pendant la durée de la période de transition.
* 86 Elle peut cependant avoir un effet sur les choix d'emploi en affectant les rendements de l'accumulation en capital humain.
* 87 Le non emploi volontaire signifie que les personnes ne désirent pas travailler compte tenu de leur situation familiale, de leur état de santé, du salaire auquel elles peuvent prétendre et de l'interaction des systèmes fiscal et social.
* 88 L'enquête emploi de l'INSEE ne donne que les salaires et ne dit rien quant aux prestations chômage et aux revenus non salariaux.
* 89 Dans les publications de l'OCDE, il est appelé taux moyen pour le différencier du taux marginal que supportent les individus qui travaillent déjà et qui influence le nombre d'heures de travail offert ou l'effort réalisé.
* 90 La perte du RMI, bien que lissée dans le temps par le mécanisme d'intéressement (les droits sont réduits graduellement à la suite d'une reprise d'emploi) ; la perte des droits à l'aide personnalisée au logement, qui se réalise plus ou moins rapidement en fonction de la situation familiale et de la catégorie de logement concernée ; la perte de certaines allocations familiales sous condition de ressources comme le complément familial, l'ARS (Allocation Rentrée Scolaire), ou l'APJE (allocation pour jeunes enfants). Cependant, ces suppressions n'interviennent qu'à un niveau relativement élevé de revenu : 2,5 SMIC.
* 91 Cependant, notons que les taux effectifs élevés décrits dans le tableau n° 2 ne s'appliquaient pas immédiatement après le changement de situation, en raison des mécanismes de calcul de certains prélèvements, comme l'IR, et la perte de l'APL lissée dans le temps (le droit à l'APL est calculé en juillet sur la base des revenus de l'année précédente).
* 92 La réforme 2001 des allocations a unifié les trois types d'AL : aide personnalisée au logement, allocation logement à caractère social, allocation logement à caractère familial : convergence vers un barème commun et correction du dispositif au niveau de la sortie du RMI pour encourager la reprise d'un emploi (ainsi en 2001 la masse des allocations logement augmente de 5 %).
* 93 Ce programme instauré en 1975, a été considérablement élargi par la suite. La réforme de 1996 en a fait le programme phare du dispositif social américain. En 1998, il concernait 19,5 millions de foyers pour un coût de 30 milliards de dollars, soit 1,8 % du budget fédéral (Bontout, 2000).
* 94 En Irlande, le système des abattements fiscaux a été remplacé en 2001 par un système de divers crédits d'impôt qui permettent d'alléger la charge fiscale en fonction de la configuration familiale (nombre d'enfants, personnes handicapées, âges des individus...). Néanmoins, cette réforme n'est pas orientée vers l'amélioration des incitations à travailler des travailleurs peu qualifiés dans la mesure où il n'existe pas de crédit d'impôt associé à la seule condition de travailler.
* 95 Un foyer bi-actif au Smic avec au moins un enfant obtient en 2001 une PPE de 490 euros et de 1 410 euros en 2003.
* 96 De même l'EITC vient s'ajouter au dispositif social déjà en place et ne substitue pas.
* 97 Le bouclage macro-économique est obtenu en supposant que le crédit d'impôt est financé par une taxe proportionnelle sur les salaires supérieurs à 90 % du salaire moyen.
* 98 Le salaire de réserve correspond au niveau de salaire minimal en dessous duquel un chômeur ou un inactif, refuse de travailler.
* 99 Deux facteurs principaux expliquent que la PPE affecte des déciles de niveau de vie très élevés. D'une part le seuil d'éligibilité pour chaque travailleur est élevé (1,4 SMIC qui correspond au passage du 6e au 7e décile). D'autre part les revenus d'activité au sein des couples sont hétérogènes ; de plus les concubins font deux déclarations fiscales séparées. Ceci implique que, même s'ils appartiennent à un ménage relativement aisé, ils perçoivent la PPE (Legendre et al . , 2001, p. 12). Ainsi, les derniers déciles de niveau de vie qui sont affectés par la PPE constituent des cas particuliers de ménages.
* 100 Pour cibler davantage l'aide versée par la PPE vers les familles à faibles revenus, Legendre et al (2001) proposent de modifier le dispositif de la PPE en liant le montant du crédit non plus au revenu annuel en équivalent temps plein mais au revenu annuel d'activité ainsi qu'en ramenant le seuil d'extinction du crédit à un niveau plus faible 1,2 SMIC au lieu de 1 ,4 SMIC actuellement.
* 101 Elle contribue également à la réduction de la pression fiscale supportée par les classes moyennes. En effet, le critère d'éligibilité du ménage étant assez élevé, la PPE est versée à des individus ayant de faibles revenus d'activité mais appartenant à un ménage relativement aisé. Le seuil d'extinction de la PPE assez élevé implique un effet de diffusion assez fort vers le haut de la distribution des revenus. Le WFTC est plus favorablement ciblé vers les ménages les plus pauvres que la PPE.
* 102 Le seuil d'éligibilité du ménage est fixé à 76 000francs (11 586,13 euros) par an pour un célibataire (1,54 SMIC) et à 152 000 francs (23 172,25 euros) pour un couple avec une majoration des seuils de 21 000 francs (3 201,43 euros) par demi-part supplémentaire qui s'ajoute à une part pour la personne isolée et à 2 parts pour un couple (3,08 SMIC) (exemple : le seuil de revenu au delà duquel un couple ayant 2 enfants n'est plus éligible à la PPE est de 152 000 + 21 000 + 21 000 = 194 000 francs soit 29 575,11 euros).
* 103 Doublement de la PPE en 2002 par le versement d'un complément d'en moyenne 947 francs (144,37 euros) avec un minimum par foyer éligible de 160 francs (24,39 euros). La PPE devrait être tripler en législation 2003 mais pas les majorations accordées aux couples mono-actifs et aux familles.
* 104 Le gouvernement britannique prévoit de réformer le système en 2003. Il sera remplacé par un dispositif composé de 3 éléments : Tax employment Credit destiné aux familles sans enfant, Child Credit et Pension Credit.
* 105 Les travailleurs indépendants perçoivent le crédit auquel ils ont droit directement.
* 106 Le taux de recours correspond au rapport entre le nombre de personnes éligibles à un transfert public et qui le demandent et le perçoivent effectivement et le nombre total de personnes éligibles.
* 107 Seule la Grèce ne pratique pas la couverture universelle ; l'accès aux remboursement des soins de santé est restreint à des catégories assez larges de cotisant ou d'ayant cotisé ou d'ayant droits (conjoints,enfants) source MISSOC
* 108 Il n'existe pas d'études comparant les taux de cotisations sociales agrégés aux cotisations volontaires pour les systèmes privés d'assurance vieillesse ou maladie. Il n'existe pas non plus d'études calculant la différence actualisée entre cotisations versées et prestations sociales reçues, sauf pour les Etats-Unis (Mitrusi and Poterba, 2000). Cela étant, ce type de démarche tend à négliger l'aspect redistributif des systèmes de protection sociale.
* 109 Les allègements de charges pour les bas salaires font partie des recommandations de la Commission européenne dans le cadre des stratégies pour l'emploi. Ils ont été réaffirmés au cours du sommet européen de Lisbonne en 2000. Il s'agit plus généralement d'adapter le système fiscalo-social afin qu'il augmente l'emploi. Les efforts (mesurés en point de PIB de cotisations sociales transférées) des différents pays sont très variables comme on peut le voir dans le tableau 5.
* 110 Ce dernier point ne sera traité, ici, que du point de vue de la fiscalité locale et de la marge de manoeuvre des collectivités locales sur le montant et la composition de leurs recettes. Il est, cependant, une autre dimension de l'autonomie financière des collectivités territoriales qui a pris beaucoup d'importance au cours des années récentes et a donné lieu, dans de nombreux pays, à des réformes majeures, suite à l'adoption du Pacte européen de stabilité et de croissance : le déficit public soumis à cette règle inclut en effet les soldes des budgets locaux, et plusieurs pays membres de la zone euro ont donc jugé utile de permettre un meilleur contrôle de ces soldes par le gouvernement central. La France, qui par ailleurs a adopté la pratique des lois annuelles de financement de la sécurité sociale, ne s'est pas engagée dans cette voie, pourtant cohérente avec les engagements européens des gouvernements.
* 111 Le mouvement de regroupement communal relancé depuis trois ans dans le cadre de la loi Chevènement engendre des communautés de communes qui, bien que relativement peu nombreuses et, par bien des aspects, comparables aux communes de la plupart de nos voisins européens, se superposent aux communes préexistantes, en n'assumant qu'une partie de leurs compétences.
* 112 La France est une bonne illustration de cette difficulté, puisque les valeurs locatives qui servent de base à la taxe d'habitation et à la taxe sur le foncier bâti des ménages n'ont pas été révisées depuis 1971, la réévaluation faite en 1991 n'ayant jamais été appliquée par peur des transferts de charges qu'elle ne manquera pas d'engendrer. Mais la France n'est pas la seule de son espèce : au Luxembourg, l'évaluation des bases date de ... 1941 !
* 113 Les Etats et collectivités locales américains ont, quant à eux, assez largement recours à cet impôt.
* 114 Pour une description et une analyse des conséquences de cette réforme, abandonnée dès l'arrivée au gouvernement de John Major, en 1992, voir, par exemple : Le Cacheux et Smith, 1992. La Poll tax a été remplacée par la Council tax , impôt foncier sur les occupants des immeubles, donc proche de la taxe d'habitation, même si l'évaluation des bases se fait de manière très différente, plus proche de la réalité économique du marché de l'immobilier.
* 115 Elles bénéficient aussi depuis 2001 d'une part des recettes des taxes indirectes (TVA et droits d'accise), ainsi que de la possibilité de moduler le montant de ces dernières dans des limites fixées par la Constitution. Voir la fiche « Espagne » pour plus de précisions.
* 116 C'est ce type de raisonnement, fondé sur l'idée du « vote avec les pieds » (Tiebout, 1956), qui avait inspiré l'introduction, au Royaume-Uni, de la Poll tax . Cf. supra .
* 117 Pour des évaluations de l'intensité de la concurrence fiscale entre collectivités locales françaises, voir notamment Paty (2000) et Leprince (2001), ainsi que, très récemment, Leprince, Madiès et Paty, 2003, et Madiès, Paty et Rocaboy, 2003
* 118 De nombreux Etats fédérés américains pratiquent une imposition des bénéfices des entreprises, qui utilise souvent une évaluation des immobilisations dans l'Etat considéré pour répartir le bénéfice imposable lorsque l'entreprise a des activités dans plusieurs Etats. La masse salariale locale, ou la valeur ajoutée des établissements peuvent également être utilisées comme clefs de répartition spatiale des bénéfices. Qu'il en soit ainsi ou que ces grandeurs économiques -- difficilement manipulables à court terme par l'entreprise -- soient incluses dans l'assiette de l'impôt local sur les entreprises n'introduit pas une grande différence quant aux effets économiques de l'imposition.
* 119 On peut, en outre, souligner que le mode actuel de calcul de la taxe professionnelle, en raison des décalages qu'il induit entre le fait générateur -- l'évolution des bases -- et la perception est un facteur d'évolution automatique contra-cyclique des recettes fiscales locales, comme l'illustre la relative aisance financière actuelle des collectivités locales françaises en période de basse conjoncture.
* 120 Selon l'analyse inspirée de l'économiste anglais Pigou, les pollutions et autres atteintes à l'environnement ont la nature d'externalités, ce qui signifie que le coût privé des consommations qui en sont la cause est inférieur à leur coût social. La taxation de ces consommations permet donc de rétablir l'égalité entre coût privé et coût social, en obligeant les agents privés à prendre en compte, dans leurs décisions, les coûts externes qu'ils infligent à la société, et à l'humanité tout entière.
* 121 Le marché des « permis de polluer », dont il a été beaucoup débattu en Europe à propos des négociations internationales sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, relève, contrairement aux apparences, de cette catégorie : il s'agit, en effet, pour les autorités, de fixer d'abord le niveau total des rejets polluants (CO2, par exemple) autorisé, puis d'allouer les permis individuels aux producteurs responsables des émissions polluantes, enfin de leur permettre d'échanger entre eux -- et éventuellement avec des tiers --, sur un marché organisé, ces « permis de polluer ». L'objectif est de répartir de manière économiquement efficace entre les producteurs une quantité politiquement déterminée d'émissions polluantes.
* 122 La détermination du niveau de taxation présuppose que des connaissances scientifiques fiables sont disponibles sur les causes et la nature des émissions polluantes, ainsi que sur les effets néfastes selon certains critères politiquement admis. Il faut aussi s'accorder sur les priorités et sur la dangerosité relative des divers polluants, comme l'illustre le cas, en France, de la taxation du gazole, longtemps bien inférieure à celle de l'essence parce que réputé moins polluant, puis augmentée parce que sa combustion engendre des particules nocives émises dans l'atmosphère.
* 123 L'Allemagne a exonéré l'utilisation du charbon, pourtant gros émetteur de gaz à effet de serre, en raison du poids des charbonnages dans ce pays ; les Pays-Bas ont plafonné les montants acquittés par les plus gros consommateurs des produits taxés ; la France a pratiquement exonéré l'agriculture et la plupart des secteurs consommateurs de produits polluants, de sorte que la TGAP ne concerne plus que très peu d'activités.
* 124 Les exemples de la taxation des alcools, tabacs et carburants illustrent parfaitement cette propriété, ce qui explique son rendement élevé. Toutefois, dans tous ces cas, si l'élasticité de la consommation au prix est relativement faible à court terme, elle est, semble-t-il, sensiblement plus élevée à long terme : ainsi, l'efficacité énergétique de la production en général -- et celles des moteurs de voitures et du chauffage des habitations en particulier -- est-elle sensiblement plus élevée dans les pays qui pratiquent une taxation des carburants et des hydrocarbures que dans les autres ; et elle tend à s'améliorer à long terme.
* 125 Cette solution pour lutter contre le chômage de masse en Europe était déjà préconisée par Drèze, Malinvaud et alii (1994) dans un plaidoyer pour une relance européenne de la croissance s'attaquant simultanément aux problèmes d'offre et de demande. Ironiquement, ce sont plutôt les pays qui sont proches du plein emploi (Pays-Bas, notamment) qui ont, récemment, accru le poids des écotaxes.
* 126 Sur cette importante question, un récent rapport du CAE (Guesnerie, 2002) apporte un éclairage bienvenu.
* 127 Cet impôt, qui représente environ 3 % du PIB, n'est désormais assis que sur le bénéfice des sociétés, si bien que son classement dans les impôts indirects ne se justifie plus.
* 128 Le contrôle juridictionnel de la légalité est exercé en Allemagne par cinq cours suprêmes fédérales, qui interviennent en droit public non constitutionnel et en droit privé : la Cour fédérale de justice, la Cour fédérale administrative, la Cour fédérale des finances, la Cour fédérale du travail et la Cour fédérale du contentieux social. L'ensemble du système juridique est contrôlé par la Cour constitutionnelle fédérale, qui siège à Karlsruhe.
* 129 Compte tenu de la formule de calcul de l'impôt.
* 130 En 2001, le taux maximum de l'impôt sur le revenu était de 43 % pour les revenus de l'entreprise contre 51 % pour les autres revenus.
* 131 Le Conseil des Sages est un organisme regroupant des experts reconnus en économie, qui a pour rôle de conseiller le gouvernement et le Parlement allemand sur les questions de politique économique. Il a été fondé en 1963.
* 132 Le système allemand de retraite repose sur trois piliers d'inégale importance : les régimes obligatoires, contributifs, représentent 85 % des pensions, l'assurance privée en verse près de 10 %, tandis que les régimes d'entreprises en représentent près de 5 %. Il n'existe pas de système public de solidarité, à l'exception de l'aide sociale.
* 133 La loi stipule en effet que des mesures législatives doivent être mises en place dans le cas où le taux de cotisation au régime contributif obligatoire dépasse 22 % en 2030 (19,3% en 2000), ou si le taux de remplacement de la pension « standard » passe en dessous de 67 % en 2030 (70,7 % en 2000).
* 134 Avant la réforme, la part « salaires » était égale à 18 % des salaires et rémunérations versées pendant l'avant dernière année civile précédant l'année d'imposition ou à 10 % des recettes des entreprises de moins de 5 salariés (Observatoire des finances locales 2002).
* 135 Entreprises « dont le capital entièrement libéré est détenu de manière continue, pour 75 % au moins, par des personnes physiques ou par une société répondant aux mêmes conditions ».
* 136 Baisse de cotisation maladie : 6,8 - 0,75 = 6,05 ; hausse de CSG : 0,95 * 5,1 = 4,845.
* 137 Evidemment, une telle baisse induisait une aide forfaitaire pour les salariés au-dessus du plafond de Sécurité sociale.
* 138 Les taux de cotisation indiqués dans ce paragraphe sont les taux appliqués sur la part des salaires inférieure au plafond de Sécurité sociale, hors cotisations au fonds national de garantie des salaires. Les cotisations payées sur la part comprise entre 1 et 4 plafonds sont assez proches et suivent les mêmes évolutions.
* 139 Cet abattement valait 8 000 francs (1 219,59 euros) depuis 1988.
* 140 Le passage à l'euro a été l'occasion d'une forte augmentation du plafond du PEA, qui est passé de 600 000 francs en 2001 à 120 000 euros en 2002, soit 787 148,40 francs.
* 141 3 450 euros en cas d'investissement en actions ou en certificats d'investissement de l'entreprise.
* 142 Livret A, Codevi, Livret jeune, Livret d'épargne populaire, Livret d'épargne entreprise, plus-values sur la résidence principale.
* 143 En septembre 1998, suppression de la taxe régionale sur les ventes d'immeubles d'habitation, et en septembre 1999, réduction du droit départemental d'enregistrement sur les achats de logement, qui sont passés de 4,6 % à 3,6 % en moyenne.
* 144 On suppose qu'il s'agit du SMIC 39 heures.
* 145 Taxe d'habitation, taxe professionnelle, taxe sur le foncier bâti et taxe sur le foncier non bâti.
* 146 Cette hausse a essentiellement eu lieu dans les départements (+ 3,4 %) qui l'expliquent par la nécessité de financer l'Allocation personnalisée autonomie. Il s'agit de la moyenne pondérée des taux de croissance des taux de chacun des quatre impôts. Pour la taxe d'habitation, par exemple, le taux passe de 19,43 % à 19,87 % soit une hausse de 2,3 %.
* 147 Pour faire simple, la majoration est de 1 806 euros par demi-part supplémentaire à partir de la cinquième. Les ménages de revenu inférieur à l'abattement sont exonérés.
* 148 Le WFTC est considéré comme une dépense et non un impôt, contrairement à la Prime pour l'emploi en France. A partir de 2002, toutefois, seuls les crédits d'impôt dont le montant est supérieur à l'impôt dû seront comptabilisés en dépense par l'ONS. Ils seront dans le cas contraire considérés comme un impôt négatif.
* 149 En reprenant comme Blow et al. (2002) les hypothèses du budget pour 2003 : un revenu de 14 615 sera soumis à 1 133,28 de cotisations employeurs, 973,91 de cotisations salariés et 1 720,28 d'IR.
*
150
En 2001-2002, le CTC plein vaut
520 livres. L'abattement pour le calcul du revenu imposable vaut 4 535
livres et le seuil de la tranche supérieure vaut 29 400. Si le plus
haut des deux revenus d'un couple est supérieur à 33 935
livres (4 535 + 29 400), la réduction d'impôt
est inférieure à 520 livres. Si le plus haut revenu est de
38 000 livres (soit
grosso modo
, 1,5 fois le revenu moyen), le CTC
est de 249 livres (520 - (38 000 - 33 935)*(1/15)).
Le CTC devient nul pour un revenu supérieur à 41 735 livres,
soit 1,6 fois le revenu moyen.
* 151 Si deux parents célibataires se marient, le CTC est divisé par deux...
* 152 Dans les dix dernières années, un important dispositif d'exonération fiscale a été progressivement supprimé : la déductibilité des intérêts hypothécaires ( Mortgage Interest Tax Relief , MITR) a été plafonnée dès 1974. Par la suite, le plafond a augmenté beaucoup moins rapidement que l'inflation, ce qui a mécaniquement réduit les charges déductibles en terme réel. Finalement, le MITR a été supprimé en avril 2000.
* 153 Selon les simulations de l'ISAE et de l'Université de Modène.
* 154 Ce montant n'est pas remboursable, mais peut être reporté sur un exercice ultérieur dans la limite de 7 ans.
* 155 Cet impôt avait pour base le patrimoine fiscal net. Les biens immobiliers faisaient l'objet d'une réévaluation tous les quatre ans, les résidences principales n'étaient prises en compte qu'à hauteur de 60 % de leur valeur. Après un abattement de 200 000 florins (soit 90 756 euros) (250 000 florins ,soit 113 445 euros , pour un couple), le taux appliqué était de 0,7 %. Si le taux d'imposition total (total des impôts sur le patrimoine et sur le revenu en pourcentage du revenu) dépassait 68 %, le montant excédant 68 % était remboursable.