2. Un juge désormais placé sous le regard du juge des libertés et de la détention
Jusqu'à la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000
renforçant la protection de la présomption d'innocence et les
droits des victimes, le juge d'instruction avait le pouvoir de placer en
détention provisoire les personnes mises en examen lorsqu'il estimait
cette mesure indispensable pour la suite de son instruction.
Désormais, la loi a
séparé le pouvoir d'instruire et
celui d'ordonner la détention
, confiant ce dernier à un
magistrat de rang plus élevé, appelé juge des
libertés et de la détention, seul habilité à placer
les personnes sous mandat de dépôt dans les cas prévus par
la loi.
Lorsque le procureur de la République a requis cette mesure et que le
juge d'instruction l'estime nécessaire, le juge des libertés et
de la détention statue après un débat contradictoire qui,
si la personne mise en examen le demande, peut être public. Il peut
estimer inutile toute mesure restrictive de liberté, auquel cas la
personne reste libre ; il peut la placer sous contrôle judiciaire et
lui imposer des interdictions ou des obligations particulières ; il
peut, enfin, ordonner son placement en détention provisoire. De telles
ordonnances sont susceptibles d'appel devant la chambre de
l'instruction
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*
)
.
Ce magistrat peut encore intervenir dans le cours des enquêtes lorsque la
personne qui en fait l'objet (pourvu qu'elle ait été
placée en garde à vue) demande au procureur de la
République d'y mettre un terme. Si ce dernier estime que les
investigations doivent encore se poursuivre sous la forme d'une enquête
de police judiciaire, il doit en demander l'autorisation au juge des
libertés et de la détention qui apprécie au terme d'un
débat contradictoire.
Le juge peut alors soit refuser la poursuite de l'enquête ce qui impose
au procureur de la République ou bien de classer l'affaire ou bien de
saisir une juridiction de jugement, voire le juge d'instruction, soit de
l'accorder mais pour une durée qui ne peut excéder six mois.
On notera que le juge des libertés et de la détention a
également compétence pour trancher toute contestation susceptible
de survenir si le bâtonnier s'oppose à la saisie et à la
mise sous scellés de documents découverts lors d'une perquisition
dans le cabinet d'un avocat. Et c'est à lui que les agents des
administrations (services fiscaux, douanes, par exemple) doivent demander
l'autorisation de pratiquer des visites domiciliaires. Enfin, en matière
de terrorisme ou de trafic de stupéfiant, ce magistrat peut autoriser
des perquisitions dans tout domicile en dehors des heures légales.
La création du juge des libertés et de la détention
n'a
pas entraîné de diminution significative de la détention
provisoire puisqu'il semblerait que la quasi-totalité des demandes
des juges d'instruction soient acceptées.
Certes, le seul fait de l'existence d'un « double regard »
a certainement contribué à réduire en amont le nombre de
demandes de mise en détention présentées les juges
d'instruction, au moins dans les premiers mois d'application de la loi.
Toutefois il semble que cet effet induit ne soit plus désormais
très significatif, tout en alourdissant et allongeant les
procédures. Ce constat incite à s'interroger sur l'avenir du juge
d'instruction.