3. Des inquiétudes et des incohérences
a) Un juge démuni ?
En
raison du manque d'effectifs et de moyens des tribunaux, la plupart des juges
de l'application des peines exercent d'autres fonctions au sein de leur
juridiction.
La nature de leurs fonctions exige pourtant une
grande
disponibilité
face aux situations d'urgence. Les très
nombreuses mesures restrictives de liberté (130.000 actuellement)
requièrent un suivi permanent car elles doivent pouvoir être
révoquées en cas d'incident.
Le juge de l'application des peines se sent démuni face aux
établissements pénitentiaires. Souvent, des transfèrements
de détenus sont décidés sans qu'il en soit averti,
provoquant son dessaisissement. Dans bien des cas, il est dépendant de
l'offre et de la politique de l'administration pénitentiaire (places
disponibles, horaires d'ouverture...) pour la prescription de certaines mesures
telles que la semi-liberté.
De la même façon, le juge de l'application des peines entretient
des relations parfois difficiles avec la police et la gendarmerie, aux yeux
desquelles il incarne «
celui qui n'exécute pas les
peines
». Ne pouvant délivrer de commission rogatoire, il
éprouve des difficultés à obtenir leur concours. Cette
carence devrait être réparée.
La mission préconise de permettre au juge de l'application des peines
de délivrer des commissions rogatoires.
b) De trop nombreux conflits de compétences
Les
règles de répartition des compétences entre le juge de
l'application des peines et le juge des enfants mériteraient
d'être clarifiées.
Actuellement, la compétence du juge de l'application des peines
s'étend à toutes les mesures relatives à
l'incarcération d'un mineur. Il doit cependant recueillir l'avis du juge
des enfants. En revanche, il revient au juge des enfants de décider des
mesures en milieu ouvert, telles que le sursis avec mise à
l'épreuve.
L'association nationale des juges de l'application des peines a fait valoir
qu'il serait plus cohérent de confier au juge des enfants une
compétence exclusive, y compris en matière de détention
des mineurs. Le juge de l'application des peines se trouve en effet
confronté à un problème de culture car, bien souvent,
contrairement au juge des enfants, il n'a jamais de contact avec
l'éducateur.
La mission considère que la proposition de donner au juge des enfants
compétence en matière d'exécution des peines
d'incarcération mérite d'être examinée.
Elle invite également la Chancellerie à conduire une
réflexion en vue d'une simplification des règles de
répartition des compétences entre les différentes
juridictions qui conduisent à multiplier les transfèrements de
détenus qui sont dangereux et mobilisent inutilement les forces de
l'ordre.