B. L'ÉMERGENCE D'UN BARREAU À DEUX VITESSES
Le barreau français connaît actuellement une triple fracture : géographique, économique et financière, fonctionnelle.
1. Une répartition du nombre d'avocats sur le territoire très inégale : l'hypertrophie parisienne face à l'atrophie de la province
La
répartition du nombre d'avocats, très inégale, fait
apparaître une hypertrophie de la région parisienne
qui
mérite d'être soulignée.
Ainsi que l'a relevé Me Paul-Albert Iweins, bâtonnier du Conseil
de l'ordre de Paris, le barreau de Paris a connu
une croissance
fulgurante
et concentre un
très grand nombre d'avocats
(
14.905
avocats, soit près de
40 %
)
127(
*
)
.
L'écart avec les autres barreaux
est particulièrement
remarquable
, puisque les deuxième et troisième barreaux de
France, respectivement Lyon et Nanterre, concentrent
des effectifs
très inférieurs
avec 1.599 et 1.522 avocats en exercice.
Plusieurs facteurs expliquent l'attractivité de la capitale :
- la formation de haut niveau dispensée à Paris jouit d'une
très bonne réputation et attire de nombreux candidats à la
profession d'avocat. En outre, contrairement à la plupart des Instituts
d'études judiciaires, rattachés à
l'Université
128(
*
)
, celui
de Paris II affiche un très bon taux de réussite à
l'examen d'entrée au centre régional de formation professionnelle
des avocats (CRFPA) ;
- les plus grands cabinets sont souvent implantés à Paris, qui
offre ainsi de nombreux débouchés aux avocats-stagiaires,
certains d'obtenir un stage à l'issue de l'obtention du certificat
d'aptitude à la profession d'avocat (CAPA).
Le taux d'avocats par habitant
129(
*
)
reflète ce
déséquilibre
. Derrière un taux moyen de
64 avocats pour 100.000 habitants se cachent en effet
d'importants
écarts d'un barreau à l'autre
, ce taux s'élevant
à 701 pour le barreau de Paris et à 8 pour celui de Montbrison.
Le barreau de Nice se place en deuxième position avec un bon taux de
couverture (145,1 avocats pour 100.000 habitants).
Ainsi que l'a relevé Me Paul-Albert Iweins, une telle situation
paraît inquiétante et risque d'aboutir à la constitution
«
d'un barreau à deux vitesses
» avec,
d'une part,
un barreau de Paris d'excellence
, en croissance constante,
captant les affaires les plus prestigieuses et les plus intéressantes
et, d'autre part,
des barreaux de province
financés
essentiellement par l'aide juridictionnelle et éprouvant des
difficultés à survivre
.
La mission partage ces préoccupations et regrette l'hypertrophie
parisienne.