2. Le développement de la coopération judiciaire internationale : une impérieuse nécessité
a) La multiplication des mécanismes institutionnels
L'entraide judiciaire internationale (tant pénale que
civile)
conditionne l'exécution des décisions et l'efficacité de
la justice au-delà des frontières nationales.
Comme l'a fort justement fait remarquer M. Jean-Paul Collomp, inspecteur
général des services judiciaires, au cours de son audition, les
effets de la coopération judiciaire communautaire sont plus perceptibles
en matière pénale, où l'entraide judiciaire se
développe, qu'en matière civile, pour laquelle «
il
est ici possible de comparer le droit européen à
l'Arlésienne
».
La mise en place du troisième pilier du traité de l'Union
européenne consacré à la justice et aux affaires
intérieures a permis des
avancées
dans le
domaine
pénal
. Ce troisième pilier s'appuie essentiellement sur deux
instruments :
Europol
(instance de coopération
policière) et
Eurojust
46(
*
)
, qui a vocation à coordonner
dans certains domaines (criminalité organisée, terrorisme)
l'action des autorités judiciaires des Etats parties.
Depuis mars 2001, chaque Etat membre a détaché à
Bruxelles un procureur, ou l'équivalent, afin de faciliter la
coordination des enquêtes judiciaires en matière pénale et
l'exécution des commissions rogatoires.
Les négociations entre les Etats de l'Union européenne sur
Eurojust n'ont toutefois pas abouti à la création d'un parquet
européen, mais cette idée progresse. Certains juges, lors de
l'appel de Genève de 1996, avaient souhaité l'institution d'un
parquet européen.
Le Sénat s'est d'ailleurs prononcé en faveur de l'institution
d'un procureur européen le 28 mars 2001 et la commission des
Lois a récemment adopté une résolution
47(
*
)
, approuvant dans ses grandes lignes le
dispositif proposé par la Commission européenne tendant à
réviser les traités afin de créer un procureur
européen chargé de la protection des intérêts
financiers de la Communauté
48(
*
)
.
En
matière civile
, des progrès sont perceptibles depuis
l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, le 1
er
mai
1999.
Cette nouvelle étape vers une Europe judiciaire a permis la
communautarisation des domaines civil et commercial. Au cours de
l'année 2000, deux règlements communautaires ont
été adoptés sur
la compétence, la reconnaissance
et l'exécution des décisions en matière civile et
commerciale
(Bruxelles I) et en matière matrimoniale et de
responsabilité parentale des enfants communs (Bruxelles II).
Plus récemment, une décision du 18 mai 2001 a prévu la
mise en place d'un réseau judiciaire européen dans tous ces
domaines à compter du 1
er
décembre 2002.
La constitution d'un véritable espace européen, au sein duquel
les magistrats devront trouver leur place, est donc en marche.
b) La création des magistrats de liaison
L'avènement d'une véritable culture judiciaire
européenne et internationale a enrichi l'éventail des fonctions
juridictionnelles, susceptibles d'être exercées par les
magistrats.
L'échange de
magistrats de liaison
entre les pays de l'Union
européenne a permis l'
instauration de relations de confiance
et
une meilleure connaissance des systèmes judiciaires européens.
En France, la création de tels postes date de 1993
49(
*
)
.
Sept magistrats
occupent
actuellement les fonctions de magistrats de liaison et sont installés en
Allemagne, aux Etats-Unis, en Italie, aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et en
République tchèque.
Nommés par arrêté du ministre de la Justice, ces magistrats
sont mis à la disposition du ministère des affaires
étrangères et sont placés sous l'autorité de
l'ambassadeur de France du pays d'accueil. Ils sont en général
installés dans les locaux du ministère de la justice de ce pays.
S'agissant de la gestion de ces magistrats, un
effort de transparence
mériterait d'être accompli par la Chancellerie. En effet, les
postes budgétaires sont localisés dans des juridictions et donc
prélevés sur leurs effectifs, alors qu'ils s'apparentent à
de véritables mises à disposition.
Les magistrats de liaison exercent des
missions non juridictionnelles
très diversifiées, consistant essentiellement à
favoriser :
- l'entraide judiciaire (s'agissant du suivi des commissions rogatoires
internationales, des procédures d'extradition...) ;
- la coopération judiciaire en matière de formation ;
- la communication au pays d'accueil (universités,
administrations...) des informations sur le droit et les institutions
juridiques et judiciaires françaises.
D'une manière générale, leur
présence
est
très appréciée
et permet des
échanges
fructueux
, notamment entre les Etats de l'Union européenne.