D. LES « OUTILS » OFFERTS PAR L'ORDONNANCE DE 1945
L'ordonnance de 1945 permet au juge des enfants ou au tribunal pour enfants de prendre diverses mesures à l'égard des mineurs, même très jeunes, dont certaines sont qualifiées d'éducatives cependant que les autres sont proprement pénales.
1. Responsabilité pénale et discernement
L'exposé des motifs de l'ordonnance de 1945 évoque un « régime d'irresponsabilité pénale » pour l'ensemble des mineurs, susceptible de dérogations exceptionnelles s'agissant des mineurs de plus de treize ans.
Aussi, pendant longtemps, a prévalu l'interprétation selon laquelle les mineurs de treize ans étaient totalement irresponsables.
En réalité, l'ordonnance de 1945 précise seulement que les mineurs de treize ans ne peuvent se voir appliquer une peine (amende, travail d'intérêt général, emprisonnement...).
En revanche, tout enfant peut théoriquement être déféré devant le tribunal pour enfants et reconnu coupable d'une infraction. La Cour de cassation a précisé que l'enfant devait avoir un discernement suffisant pour faire l'objet de poursuites.
2. Les mesures provisoires
En cours de procédure, le juge des enfants peut ordonner des mesures d'investigation destinées à le renseigner sur la situation du mineur et son environnement. L'article 8 de l'ordonnance prévoit que le juge des enfants « recueillera, par une enquête sociale, des renseignements sur la situation matérielle et morale de la famille, sur le caractère et les antécédents du mineur, sur sa fréquentation scolaire, son attitude à l'école, sur les conditions dans lesquelles il a vécu ou a été élevé ».
Le juge peut également ordonner un placement provisoire du mineur, qui peut être confié à une personne digne de confiance, à un centre d'accueil, à une section d'accueil d'une institution publique ou privée habilitée à cet effet, au service de l'aide sociale à l'enfance ou à un établissement hospitalier, à un établissement ou à une institution d'éducation, de formation professionnelle ou de soins, de l'Etat ou d'une administration publique habilitée.
Le juge des enfants peut ordonner un contrôle judiciaire dans les mêmes conditions que pour les majeurs. En revanche, le placement en détention provisoire est très strictement encadré. S'il est possible pour les mineurs de 16 à 18 ans, il est interdit pour les mineurs de treize à seize ans sauf en matière criminelle. Il est totalement exclu pour les mineurs de moins de treize ans.
Matière |
Age du mineur |
Durée maximale
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Délit |
Moins de 16 ans 16 ans au moins |
Détention provisoire impossible - un mois + une prolongation d'un mois si la peine encourue n'excède pas 7 ans d'emprisonnement - un an (prolongation comprise) dans les autres cas |
Crime |
13 - 16 ans 16 ans au moins |
- 6 mois + 6 mois de prolongation - deux ans (prolongation comprise) |
Enfin, le mineur peut être placé sous le régime de la liberté surveillée , c'est-à-dire faire l'objet d'un accompagnement éducatif, soit dans son milieu familial soit dans le cadre d'un placement. Un délégué à la liberté surveillée est appelé à suivre le mineur et à rendre compte au juge des enfants des difficultés qu'il rencontre.
Cette mesure peut être ordonnée au cours de la procédure, mais également lors du jugement, que celui-ci intervienne en audience de cabinet ou en audience du tribunal pour enfants. La mesure de liberté surveillée peut être ordonnée pour une période allant jusqu'à la majorité du mineur.
Une mesure de réparation peut être ordonnée à tout moment de la procédure, soit en cours d'instruction soit lors du jugement.