D. DES ACTIVITÉS TRÈS SURVEILLÉES
1. L'importance du rôle des renseignements généraux
La
surveillance des casinos
est assurée, pour l'essentiel, par les
Renseignements généraux du département.
Formés à cette tache, présents sur le terrain, au minimum
une fois par semaine le jour ou la nuit, sur rendez vous ou de manière
impromptue, les commissaires assurent :
*la surveillance du comportement du personnel et des joueurs, l'ambiance et la
fréquentation ;
*le respect de la réglementation (prévention et
information) ;
*les enquêtes pour la sous-direction des courses et jeux (SDCJ) et la
sous-direction des libertés publiques (SDLP) du ministère de
l'intérieur ;
*les contacts nécessaires avec leurs collègues du
département ou des départements voisins ; il existe une fois par
an des réunions régionales de perfectionnement ;
*le commissaire vise les carnets d'avances des tables de jeux et le grand Livre
où ils sont collationnés ;
*il vérifie les cartes, les jetons et les plaques ;
*il supervise les échéances mensuelles des contributions du
casino à l'Etat ;
*il vise le registre d'exploitation et peut y inscrire des remarques ;
*il contrôle le fonctionnement du circuit de surveillance
vidéo ;
*Il reçoit, instruit, contrôle et achemine les demandes
d'interdiction de jeux émanant des joueurs ;
*il veille lui même à la destruction des jeux de cartes
réformés ;
*il adresse un rapport hebdomadaire au ministère de
l'intérieur ;
De l' opinion de ces agents
-
•
La profession de casinotier est la plus contrôlée de
France
.
• La direction d'un casino ne peut frauder ; le personnel dispose de quelques astuces pour le faire, mais cela suppose des complicités difficiles à réunir.
• En cas de flagrant délit, le commissaire prend les mesures conservatoires qu'il estime nécessaires et confie l'enquête à la section judiciaire de la SDCJ.
• Sur les machines à sous aucune fraude n'est possible.
La brigade des jeux de Paris effectue un contrôle inopiné par an.
D'autres administrations effectuent des contrôles : le Trésor public, les trésoreries générales, les chambres régionales des comptes.
La Police judiciaire fait vérifier les machines à sous et les cylindres des tables de jeux.
2. Blanchiment d'argent et fraudes
Le
blanchiment d'argent avec des casinos a incontestablement existé.
Fin 1980, la tentative de prise de contrôle du casino de Menton a bien
démontré et prouvé l'intervention de la Camorra ; tout y
était, à commencer par une Société écran (la
Sofextour), dont les actionnaires étaient tous des prête-noms,
contrôlée de fait par des intérêts italiens (Mr
Gianni Tagliamento, collaborateur de Michel Zaza), des résidents
monégasques et des représentants du milieu corse, dont J C Orsini
et Jules Tramoni.
Cette affaire a, selon les services du ministère de l'intérieur,
signé la fin des intérêts italiens dans les casinos
français.
Depuis cette date, la fermeture en 1988, 1989 et 1991 de quatre casinos dans
l'hexagone a sans doute parachevé ce travail.
Aujourd'hui, s'il persiste, ici où là, quelques soupçons
de mouvements de capitaux suspects sur trois casinos, les concentrations dans
les mains de plusieurs grands groupes hôteliers et touristiques, leur
arrivée en Bourse, sont des facteurs favorables à
l'assainissement de cette profession.
Par contre, deux affaires récentes pourraient bien refroidir ce bel
optimisme.
Il y a une enquête en cours sur les conditions d'achat, de
création et de vente du casino d' Annemasse.
En effet, après l'achat, en 1993, pour une bouchée de pain, du
projet de ce casino et l'arrivée en avril 1994 de l'autorisation de sa
création par le ministère de l'intérieur (contre l'avis de
la commission supérieure des jeux !), le titulaire de l'autorisation, au
lieu d'exploiter, préféra revendre l'établissement pour
100 MF !! au groupe Aaron.
Cet enchaînement de faits a intéressé la Justice.
L'étude des méandres compliqués suivis par l'argent de
cette revente, l'identité des divers bénéficiaires du
partage et les éventuelles implications de partis politiques ne
relèvent pas du présent rapport, mais il est fâcheux de
constater qu'il n'aura pas suffi de contrer l'intrusion de l'argent de la
pègre dans les casinos. D'autres dérives, tout aussi dangereuses,
peuvent se produire à tout instant, justifiant pleinement la vigilance
des autorités qui exigent à bon droit d'être
informées de toute modification chez les actionnaires.
La deuxième affaire concerne une
information contre X pour
« blanchiment », ouverte le 14 août 2000 au casino
d'Ajaccio
(le seul établissement de Corse).
C'est TRACFIN (Traitement du renseignement et action contre la circulation
financière clandestine) qui avait donné l'alerte et
signalé des retraits de plus de 11 MF entre 1994 et 1997 pour une
destination pour l'instant inconnue mais activement recherchée.
Le fait de retrouver plusieurs noms identiques dans les deux affaires laisse
craindre qu'elles soient liées.
Quoi qu'il en soit, en définitive, il y a blanchiment et blanchiment.
Si l'on parle des blanchiments d'argent provenant du trafic de drogue, de la
prostitution et d'autres activités criminelles, on désigne des
masses financières considérables que les milieux
« investissent » dans l'achat de casinos comme celui
d'autres entreprises commerciales.
Cette possibilité permanente justifie pleinement la vigilance des
autorités.
Si l'on parle du blanchiment de « petites » sommes à
travers le jeu lui même dans les salles de casinos, rien ne prouve que
cela soit possible autrement que de manière occasionnelle et à
une échelle réduite.
Car tenter de blanchir de l'argent en jouant expose d'abord à en perdre
beaucoup, à en gagner peut être, mais plus sûrement à
être repéré.
De par la loi, l'identité de toute personne qui mise ou qui perd plus de
10.000F doit être relevée.
Dans ces conditions, encore une fois, s'il y a blanchiment il ne peut
être ni organisé ni massif.
Dans un autre ordre d'idées, puisqu'il y a argent et mouvements
d'argent, il ne faut pas s'étonner de voir des activités de
« services » assez étranges se développer
à l'extérieur des casinos : ainsi, en 1998, la sous direction des
courses et jeux, associée à la Guardia Financiera italienne, a
mis fin aux activités, sur la Côte d' Azur, de prêteurs
changeurs qui avançaient de l'argent aux joueurs à des taux
usuraires et récupéraient leurs créances par des moyens
musclés.
Pour les opérations de blanchiment, la complicité des casinos
s'avère indispensable alors même que ces établissements
sont astreints à une « déclaration de soupçon de
blanchiment d'argent » (12 juillet 1990).
De telles déclaration, collectées par TRACFIN (service du
ministère des finances), sont répercutées vers les
procureurs, la PJ et les douanes.
Dans tous les cas de figure, l'efficacité du travail des services de
l'Etat s'avère réelle.
3. Le contrôle des jeux traditionnels
Les
tables des jeux traditionnels, autour desquelles les joueurs se rassemblent,
vont et viennent, étaient, avant l'apparition des machines à
sous, le moteur des casinos.
Une description sommaire en est donnée plus loin.
Leur fonctionnement réclame un personnel nombreux,
expérimenté et bien entendu insoupçonnable, qu'il s'agisse
des casinos ou des cercles de jeux.
Leur recrutement n'est autorisé qu'après enquête du
ministère de l'intérieur et une habilitation individuelle
révocable ad nutum.
Les salles de jeux ne sont accessibles qu'après un filtrage payant
(droit d'entrée) du bureau d'accueil ; une tenue décente est
exigée et le joueur ne doit pas figurer sur la liste des Interdits de
jeux.
Au fil du temps, ces jeux ont connu une vraie désaffection et ont vu, en
particulier, disparaître une certaine clientèle huppée ou
très fortunée, et si les machines à sous ont sauvé
les casinos, l'afflux brutal d'une nouvelle et importante clientèle dans
ce secteur n'a pas pour autant revigoré les jeux traditionnels.
Le secteur des jeux traditionnels d'un casino
est toujours
déficitaire
.
Pourtant, législation et réglementation françaises restent
sur un point intransigeantes : un casino qui sollicite une autorisation de jeux
(ou son renouvellement) doit obligatoirement créer (ou conserver) des
salles de jeux.
En conséquence, qu'il y ait des clients ou pas, les salles doivent
fonctionner et le personnel doit être en place.
En outre un casino doit ouvrir et fonctionner au moins un an avec les seuls
jeux traditionnels s'il veut pouvoir un jour accueillir des machines à
sous.
Les contraintes sont lourdes et tendent à plutôt favoriser les
groupes qui ont seuls les moyens d'attendre en perdant de l'argent.
Inversement, on peut sans doute comprendre les raisons de l' Etat : si de
telles obligations n'existaient pas, la tentation serait très forte pour
les casinos de fermer leurs salles de jeux déficitaires pour n'exploiter
que des machines à sous incomparablement plus rentables et moins
difficiles à gérer.
4. Le régime des machines à sous
Fonctionnement et usage
« Pour l'apparence, une machine à sous a les boutons d'un juke
box, les clignotants lumineux et les musiques d'un flipper, la stature d'un
réfrigérateur et la vitrine d'un distributeur
automatique. »
Elle coûte 50.000 F en moyenne.
Sa durée de vie est de plus en plus courte en raison des effets de la
mode et des progrès de la technologie.
Il faut vérifier si la France est vraiment le seul pays qui doive
acheter ses machines à sous.
Baptisées slots machines, reel slot machines, video poker games,
machines à sous (MAS, mas), bandits manchots, ce sont
des machines
à rouleaux ou des video pokers
qui fonctionnent avec des
pièces ou des « tokens » que le joueur introduit
dans une ou plusieurs fentes de la machine.(voir plus bas : produit
théorique).
Suivant les casinos, les joueurs disposent soit de pièces (1F, 2F, 5F,
10F, 20F), soit de jetons ayant les mêmes valeurs, plus des 100 F.
L'administration française est très exigeante pour la fabrication
de ces tokens et en particulier pour les alliages métalliques.
S'agissant de la monnaie ou des jetons utilisés,
le passage à
l' EURO
a été préparé avec beaucoup de soins
et, bien qu'extrêmement coûteux, sans aide du ministère
analogue à celle dont a bénéficié la
Française des jeux, qui aurait obtenu, à ce titre, un
allègement de 1 point du prélèvement de l' Etat sur
l'exercice concerné.
Sur la « face » de la machine sont affichées les
combinaisons gagnantes et les gains possibles.
L'affichage du taux de
redistribution de la machine n'est pas obligatoire et laissé à la
discrétion du Casino.
Les joueurs chevronnés utilisent
les boutons
et n'ont recours au
« bras »
unique, placé sur le coté
droit et qui fait partie de l'imagerie populaire (
d'où le nom de
bandit manchot
) qu'en cas d'exaspération contre une malchance
persistante et dans l'espoir (tout à fait illusoire) d'obtenir d'autres
tirages et de « réveiller le hasard ».
Ce levier a une valeur symbolique et ne saurait disparaître en
dépit du fait qu'il est devenu aujourd'hui totalement inutile.
Derrière cette façade rutilante et bruyante se cache le coeur de
la machine
,
le « Time Random
Generator (TRG),
véritable horloge électronique
.
Avec les 32 symboles de la machine, le TRG possède 32.768 écrans
différents, tournant au rythme de 1/1.000 de seconde (!)
Chaque 1/1.000° de seconde, les 32.768 combinaisons ont exactement les
mêmes chances de sortir.
Dans le programme du bandit manchot se trouve la table des paiements.
Quand le joueur introduit une pièce, une combinaison se
concrétise sous la forme de symboles que la machine affiche.
Contrairement à ce que croit le joueur, la machine ne contient pas de
combinaisons préenregistrées et ne comporte pas de
périodes gagnantes, de zones ou de cycles gagnants.
Rien ne prouve qu'une machine qui vient de délivrer un « jack
pot » ne réitérera pas son geste très vite.
Rien ne prouve qu'une machine qui n'a rien donné depuis longtemps finira
par faire gagner son client.
Le système est génial car tout est possible et rien n'est
certain
.
La passion des joueurs pour ces machines répond bien à leur
caractères si particulier.
Le bruit
que fait la machine est un facteur très important : avec
des « accents », des mélodies différentes, il
signale un gain particulièrement intéressant, les crédits
versés au compte du joueur (voir Martignoni Hutin : la fonction
crédit des mas), les débits prélevés ; une
sirène stridente (cri de souffrance du casino ?) annonce
un jack
pot
et provoque un attroupement joyeux et les congratulations de la
communauté joueuse.
La machine se doit de faire beaucoup de bruit, surtout si le joueur ne gagne
pas, l'incitant ainsi à persévérer ; d'ailleurs si la mas
est silencieuse le joueur s'inquiète et soupçonne la panne.
Il faudrait un volume pour traiter
des comportements des joueurs face aux
MAS.
En fait, l'ouvrage existe ; c'est l'«
Ethnosociologie des machines
à sous »
que l'on doit au professeur J
P Martignoni
Hutin, sociologue de l' Université de Lyon
(voir Bibliographie).
L'état des comportements des joueurs révèle une foule de
choses qui font prendre conscience de la nature très particulière
de ce petit monde clos et des risques de dérives du comportement qu'il
peut générer.
Retenons déjà avec Martignoni Hutin, que sur 54.743.576
entrées au casino en 96/97, 98, 48 % concernaient les salles de mas
(contre 5,18 % pour les jeux traditionnels).
Retenons aussi qu'aux premières machines de 1987 ont
succédé à un rythme d'escargot dû à la
circonspection des pouvoirs publics, les 11.301 de 1994-1995, puis les 13.557
de 1999-2000, présentes dans 95,5 % des établissements, ce qui
paraît très raisonnable devant les chiffres américains :
417 casinos et 210.000 bandits manchots dans le seul État du Nevada
(principalement à Las Vegas et Reno et dans leurs environs).
L'organisation des salles de machines à sous, ou MIX, est tout
à fait différente de celle des jeux traditionnels
.
Le directeur du casino est responsable de cette organisation. La recherche du
« Mix » c'est-à-dire de la meilleure disposition des
machines, de leur nombre, de leurs emplacements mais aussi les proportions
entre video poker et reel slots, les positions respectives des machines
à 1F, 2F, etc, les places de la caisse, du bar, etc, fait l'objet d'une
étude très attentive ; elle peut être longue et
tâtonnante.
Les statistiques sont importantes : exemple, 69 % des
« slotistes » préfèrent les machines à
rouleaux (reel slot) 19 % les video poker, l2 % jouent aux deux.
Les joueurs estiment que le jeu « le plus intelligent » est
le video poker ; nous dirions plutôt que c'est le jeu qui a
l'interactivité la plus forte.
5. Les dispositions relatives au personnel des casinos et des cercles
a) Si
l'initiative du
recrutement
reste aux directeurs des casinos et aux
directeurs de jeux des Cercles, la totalité des personnels de ces
établissements doit recevoir un agrément du ministère de
l'intérieur, après enquête des renseignements
généraux du département.
Rappelons que la nomination des directeurs eux mêmes est soumise à
l'agrément du ministère après enquête de
moralité.
A tout instant ces habilitations peuvent être retirées à
ces employés à la suite d'une plainte ou d'un rapport des RG.
b) Par ailleurs, de très nombreux
détails du
fonctionnement des établissements
qui concernent le personnel sont
réglés par la législation française des jeux : le
plus pittoresque et le mieux connu concerne l'interdiction faite aux
vêtements des croupiers de posséder des poches et des revers aux
pantalons mais il y en a une foule d'autres.
c) Au 1er novembre 1998, les casinos français en métropole
et dans les DOM TOM
employaient 12.600 salariés
, dont 11.054
à plein temps (87,75 %) et 1.543 à temps partiel (12,25%),
87,2 % de ces
emplois
en CDI et 2,8 % en CDD et une ancienneté
moyenne de 5 ans et 8 mois.
Les casinos employaient 146 personnes handicapées (soit 1,15 % ).
49 % des salariés sont affectés aux jeux traditionnels,
24,8 % à la boule et 19,5% aux machines à sous.
d)
Les salaires des employés des casinos
sont très
difficiles à détailler dans le cadre de ce rapport, compte tenu
de ce qu'il existe 4 catégories d'établissements (très
grands, grands, moyens et petits casinos), et trois hiérarchies
différentes pour les jeux traditionnels, la boule et les machines
à sous, avec entre 7 et 4 niveaux d'emplois suivant ces
hiérarchies.
Catégories
PNJ en MF
Nombre
%
Très grands casinos
A > 80 11 6,9
Grands casinos
B >40 <80 30 18,9
Moyens casinos
C > 20 <40 45 28,3
Petits casinos
D < 20 73 45,9
(PNJ = Produit net des jeux c'est-à-dire le produit total réel
des jeux diminué des prélèvements de l'Etat et des
communes.
Les salaires varient donc d'abord en fonction de la taille de
l'établissement.
Le rapport de branche de casinos de France 1998 rend compte parfaitement de la
hiérarchie des salaires.
Il faut commencer par dire qu'il n'y a, conformément à la loi,
pas d'intéressement aux jeux pour le personnel des casinos et cercles de
jeux.
Les pourboires sont un élément excessivement important dans la
mesure où ils représentent une part considérable de la
rémunération des salariés des casinos et des cercles,
qu'ils soient spécialisés ou non.
Par rapport à la rémunération des salariés d'autres
secteurs
, la proportion entre salaires et pourboires dans les casinos est
très particulière et crée un mode de
rémunération absolument spécifique de la
profession.
Les pourboires sont distribués et répartis entre les
différentes catégories de personnel suivant un barème
établi et respecté. Il en est tenu une comptabilité
spéciale très rigoureuse.
Ils sont inscrits sur l'état DAS I et sont compris dans les bases de la
taxe professionnelle.
Dans cette matière, il existe toutes sortes d'usages, de coutumes et une
véritable mythologie entretenue autour de
« l'influence » (supposée) des croupiers sur le
déroulement du jeu, sur la nécessité
« d'être bien vu » de ceux-ci,
« d'être dans leurs petits papiers », sur une
relation hypothétique entre la générosité des
joueurs gagnants et leurs chances ultérieures de continuer à
gagner, etc.
La satisfaction d'avoir gagné et le désir d'être
« bien avec le croupier » (comme s'il était possible
à celui-ci d'avantager un joueur), la superstition et la
convivialité font ici bon ménage.....
Voilà pour les fantasmes !
e) Dans cet univers clos,
les relations sociales
étaient
jusqu'ici guidées par les usages et les accords appliqués
essentiellement aux pourboires des tables de jeux traditionnels.
L'arrivée de nouvelles activités, des machines à sous, le
développement des restaurants et des spectacles aboutissent à une
plus grande pluralité des métiers.
En conséquence, les casinos travaillent à la mise en place d'un
statut des personnels en cohérence avec les évolutions
économiques du secteur.
En raison de la très grande diversité des horaires de travail qui
existe, la loi de réduction du temps de travail (RTT) à 35 heures
n'est pas encore mise en place partout mais les établissements s'y
emploient.
Formation
. Il a déjà été dit que la
profession n'organise pas de formation spécifique autre que celle qui
est dispensée sur place et avec les moyens du bord.
Il existe cependant un accès au FAFIH auquel adhèrent les casinos.
Il existe dans la réglementation des casinos une disposition
coûteuse et anti-économique que dénoncent avec virulence
les Groupes de Casinos.
Si dans un casino X, appartenant à un groupe, un employé,
spécialisé ou non, est malade ou indisponible, il est interdit au
directeur du casino ou au président du groupe de pourvoir à son
remplacement en mutant, même à titre provisoire, un employé
venant d'un autre casino du même groupe.
L'Administration considère en effet que chaque établissement est
une société distincte même quand il fait partie d'un
ensemble comme un groupe et refuse le remplacement pour cette raison.
Cette
limitation majeure à un certain degré de
mobilité
à l'intérieur de l'entreprise est durement
ressentie par la profession car elle gêne considérablement la
gestion quotidienne et a un coût certain.
Cette disposition a certes pour effet de figer les effectifs et peut être
d'éviter des restructurations a minima.
Elle paraît à votre rapporteur peu compréhensible, tout
à fait excessive, coûteuse sans aucun doute, mais peut être
aussi sans précédent et sans références comparables
dans d'autres activités économiques.
6. Les interdits de jeux dans les casinos et cercles
La
plupart des joueurs, qu'ils fréquentent les salles de jeux traditionnels
ou les salles de machines à sous, contrôlent plus ou moins
aisément leur passion pour le jeu. Certains s'efforcent de tenir un
budget et de limiter leurs pertes quand le sort leur est défavorable,
mais d'autres n'y parviennent pas, dépassent leurs possibilités
et se mettent dans des situations inextricables.
Or, tout est prévu dans la réglementation française pour,
avec leur consentement, ou plus exactement à leur demande, interdire
l'accès aux casinos à certains joueurs dits
« compulsifs ».
Littré :"compulsif " :"Qui oblige, qui contraint "
Autres termes utilisés : Compulsivité, rémanence, Prévalence, maladie, accros , addictifs.....
a) les interdictions volontaires
Les
directeurs de casinos ou de cercles, qui connaissent très bien leur
clientèle, s'emploient à aider les joueurs les plus
dépendants ou les plus « sinistrés ».
« Aider » signifie, de nos jours, dans ce cas inciter
à moins jouer et dans les cas extrêmes à solliciter une
demande d'interdiction. (c'est une intervention d'assistance assez modeste !).
La plupart des interdits de jeux (95 % selon le ministère) le sont
à leur propre demande. Les demandes émanent donc de joueurs qui
sont conscients de leur situation et de leur incapacité à
s'éloigner des tables de jeux traditionnels.
La demande d'interdiction fait l'objet d'une enquête confiée au
commissaire des renseignements généraux local
en charge du
contrôle permanent du casino.
L'enquête est transmise à la sous-direction des courses et jeux
à l'intention de la sous-direction des libertés publiques qui
décide de l'interdiction.
C'est donc une procédure lourde et complexe, mais elle conduit à
une décision irrévocable d'interdiction pour cinq ans, valable
pour le joueur dans tous les casinos français. Cette décision
oblige les casinos et les cercles à tenir à jour
un fichier
informatique des interdits
, conforme à celui du ministère de
l'intérieur en ce sens que le fichier du casino est la copie exacte de
celui du ministère.
Décision irrévocable, car toutes les demandes de levées de
l'interdiction sont systématiquement déboutées ; en outre,
au bout des cinq ans, la sous-direction des libertés publiques peut
parfaitement, de sa propre autorité, maintenir l'interdiction s'il y a
triche ou ruine du joueur.
Le joueur, pour protéger sa famille, peut accepter une
« curatelle aggravée pour prodigalité ».
b) les interdictions autres que volontaires
En
dehors des interdits volontaires, sont frappés de refus
d'admission : les incapables en tutelle ou en curatelle, sur la demande de
leur représentant légal, et certains condamnés sur la
demande du juge d'application des peines.
Aucun autre tiers ne peut mettre en oeuvre cette procédure et en
particulier pas les familles (!).
S'appuyant sur l'éthique de leur entreprise, certains
établissements, casinos ou cercles, sur décision du conseil
d'administration, peuvent, de leur propre initiative, prononcer l'exclusion et
le refus d'admission, établissant
leur propre fichier des
« Personnes à ne pas recevoir » ( ANPR)
.
Cette pratique n'a, paraît-il, aucun fondement juridique dans la mesure
où la marge de manoeuvre de la direction pour ces problèmes n'est
pas précisée par les textes ; mais la décision doit
être obligatoirement communiquée aux RG et elle peut être
attaquée par un client mécontent devant le Juge judiciaire qui
appréciera la validité des motifs du directeur.
L'ANPR est strictement locale et non limitée dans le temps.
La Direction des courses et jeux peut utiliser « en
urgence » l'ANPR dans l'attente de la conclusion de l'enquête
sur une interdiction effective.
c) conformément à la loi, les casinos et les cercles sont interdits aux mineurs
Pour les
salles de jeux traditionnels, le respect de cette règle à la
responsabilité des établissements est assuré sous le
contrôle de l'Etat.
Ce n'est pas du tout le cas pour les salles de machines à sous,
réputées incontrôlables par les autorités
elles-mêmes, qu'il s'agisse des mineurs ou des interdits de jeux.
Il a été affirmé à un syndicat de casinos que le
ministère étudiait une méthode pour assurer ce
contrôle dans l'avenir.
d) le rôle du ministère de l'intérieur
Il
gère les demandes, décide les interdictions et administre le
fichier national informatisé des interdits de la sous-direction des
libertés publiques.
Mais pour quelle raison, bien qu 'informatisé, le fichier du
ministère de l'intérieur n'est il pas connecté avec
l'informatique des casinos ?
Faute de cette liaison informatisée, les mises à jour des
fichiers des casinos ne peuvent s'effectuer en temps réel et
nécessitent de ressaisir les informations sur les nouveaux interdits
fournis par le ministère sur des listes papier.
Ces listes parviennent par la Poste (!) à un rythme très lent,
trimestriel il y a peu, mensuel aujourd'hui.
Ce fonctionnement tout à fait anachronique occasionne beaucoup de
travail inutile, des retards gênants et d'autant plus nocifs qu'un grand
nombre d' interdits ne cesse de tenter de contourner l'interdiction, alors
même qu'ils l'ont demandé : la vigilance des casinos pour les
détecter est donc fortement sollicitée.
Votre rapporteur insiste pour demander
une rapide modernisation de ce
système qui dessert à l'heure actuelle l'excellent travail
effectué par ailleurs par les services du ministère.
Le fichier national des interdits de jeux compterait 2.000 noms (30.000 pour
Sylvie Guyoni du « Monde »).
MAIS
CETTE PROCEDURE NE CONCERNE QUE LES JEUX
TRADITIONELS
ET
NE TOUCHE PAS LES MACHINES A SOUS
Aucun
dispositif, aucune réglementation, aucune approche du problème
n'existent pour étendre le dispositif aux machines à sous.
Pourtant, dans les salles qui accueillent ces slots machines, il y a
déjà, c'est notoire, nombre de « joueurs »
compulsifs « et de sur endettés » ; les
directeurs les connaissent, les observent, tentent de les aider mais n'ont pas
à leur disposition de réglementation adaptée.
e) en France, aucune statistique officielle sur la proportion de joueurs compulsifs
Il
n'existe, en France, aucune statistique officielle qui permette
d'évaluer la proportion de joueurs compulsifs des casinos et des
cercles, pas plus d'ailleurs que pour les autres grands jeux FDJ et PMU
Le psychiatre Marc Valleux du centre Marmottan de Paris estime pour sa part
leur nombre à 300.000 en 1999 -un nombre équivalent à
celui des toxicomanes- ! (« Le jeu Pathologique » - Que
sais je 1999).
L'absence de statistique officielle est très regrettable mais peu
surprenante quand on connaît le
désert français
pour
tout ce qui concerne les connaissances modernes, sérieuses et
scientifiques du jeu et des joueurs dans notre pays.
Votre rapporteur reviendra sur ce problème dans ses conclusions.
Ce fait est d'autant plus regrettable que d'autres pays sont plus
avancés que la France dans ce domaine, montrant l'importance qu'ils
accordent au phénomène du jeu.
Ainsi, grâce à la Harvard Médical School, nous savons qu'en
1997, aux USA, on évaluait le nombre des joueurs compulsifs
américains à 1,14 % des joueurs de toutes les formes de jeux
d'argent confondues.
D'autres études américaines fournissent les chiffres de 1,5
à 3 % avec un taux nettement supérieur chez les jeunes.
Au Canada, le taux est estimé à 1,14 % en moyenne (de 0,9
à 1,38 %) avec, pour les jeunes (Youth Général
Population), un chiffre cinq fois supérieur 5,77 % (de 3,17 à
8,37 %).