TROISIÈME PARTIE : LE CONTENU ET L'ÉVALUATION DES ACTIONS FINANCÉES PAR LE FIDOM
I. L'INFORMATION DISPONIBLE
A. LES RAPPORTS PRÉVUS PAR LE DÉCRET DU 17 JUILLET 1984
1. Une évaluation inexistante
Le décret du 17 juillet 1984 portant réforme du fonds d'investissement dans les départements d'outre-mer prévoit la réalisation annuelle de trois types de rapports :
- l'article 5 dispose que « chaque année, en fin d'exercice , le président du conseil général et le président du conseil régional adressent au préfet un état détaillé de la réalisation du programme d'investissement de l'exercice et de l'utilisation des dotations reçues » au titre des sections décentralisées .
Le secrétariat d'Etat à l'outre-mer n'a pas été mesure de communiquer les rapports transmis aux préfets depuis 1995, indiquant que « les régions et les départements n'ont pas tous systématiquement transmis directement les états détaillés prévus. Toutefois, des états détaillés ont été reconstitués ». Les états reconstitués présentent un bilan de la consommation des crédits des sections décentralisées, mais ne mentionnent ni la nature des opérations financées, ni le bilan de l'utilisation des crédits ;
- l'article 10 prévoit que le ministre chargé des départements d'outre-mer « présente chaque année au comité directeur un rapport sur l'exécution des opérations de la section générale , visé par le contrôleur financier du fonds ». Le secrétariat d'Etat à l'outre-mer n'a pas pu communiquer les rapports présentés par le ministre depuis 1995 car « la réunion du comité directeur ne s'étant pas tenue depuis 1994, il ne lui a donc pas été présenté de rapport » ;
- l'article 10 prévoit aussi que les préfets « transmettent au ministère chargé des départements d'outre-mer un rapport sur l'exécution de l'ensemble des opérations du FIDOM réalisées l'année précédente dans leur département ».
Par la circulaire du 24 juillet 1995, le ministre de l'outre-mer, insatisfait de la qualité des rapports transmis par les préfets, a précisé les règles devant présider à leur élaboration :
Les instructions données aux préfets par le ministre de l'outre-mer pour l'élaboration des rapports d'exécution (circulaire du 24 juillet 1995) « Le caractère disparate et incomplet des rapports établis actuellement nécessite une harmonisation de leur présentation et de leur teneur afin de permettre une exploitation au niveau central de données homogènes. Le bilan quantitatif des engagements et paiements de l'année écoulée devra être établi selon le cadre joint en annexe. Ce cadre vous permettra d'établir au 31 décembre de l'année la situation comptable des autorisations de programme reportées sur l'exercice suivant et des crédits de paiement sans emploi, visées par le Trésorier payeur général afin d'attester la concordance des écritures comptables au plan local. Il permettra de connaître précisément d'une part, les opérations en cours engagées antérieurement (et non pas seulement les masses financières globalisées) ainsi que le taux de réalisation effectifs des projets et d'autre part, l'affectation des crédits délégués au cours du dernier exercice. Le rapport ne peut se borner à la production d'un état quantitatif, il doit comporter un volet qualitatif par des commentaires explicatifs sur les résultats de la gestion annuelle. Désormais, ces rapports devront impérativement m'être adressés avant la fin du mois de février afin de me mettre en mesure de remplir mes obligations d'information. » |
La situation n'a pas évolué depuis 1995. Les rapports transmis par les préfets n'ont pas retenu la présentation homogène qui leur était demandée, si bien que les comparaisons restent difficiles, voire impossibles. Les documents transmis ne constituent d'ailleurs pas vraiment des rapports mais une accumulation de données comptables ou de « fiches projets », sans qu'aucun sommaire permette de s'y retrouver. Les données présentées ne sont pas expliquées, aucune synthèse n'y figure et les principales tendances ne sont pas explicitées. Aucun bilan qualitatif n'est réalisé.
Les délais, quant à eux, sont rarement respectés. En 2001, le secrétariat d'Etat à l'outre-mer a reçu le rapport d'exécution relatif à la gestion 2000 de Saint-Pierre-et-Miquelon le 19 janvier, de la Guadeloupe le 4 avril, de la Réunion le 11 juin, de Mayotte et de la Martinique le 18 juillet et de la Guyane le 26 juillet.
2. Des procédures qui pourraient être améliorées
Dans sa circulaire aux préfets du 24 juillet 1995, le ministre de l'outre-mer soulignait que « l'obligation de transmettre chaque année au ministère un rapport sur l'exécution des opérations du FIDOM a tendance à être perdue de vue et gêne le ministère , lui-même astreint à la présentation annuelle d'une synthèse au comité directeur et de compte rendus aux commissions parlementaires dans le cadre du projet de loi de finances ».
Aujourd'hui, le ministère s'est largement affranchi de ses obligations d'information mais la gêne reste réelle.
Sans retour des préfectures, le secrétariat d'Etat à l'outre-mer est incapable de suivre l'évolution des engagements et de procéder au « pointage » de la consommation des autorisations de programme. Pour réaliser ces opérations, le secrétariat d'Etat ne dispose aujourd'hui que de moyens « artisanaux ». Un agent s'atelle à « éplucher » les documents transmis par les préfectures, en relevant les incohérences et les points qui suscitent des interrogations. L'examen des engagements d'un seul département d'outre-mer peut l'occuper pendant plusieurs semaines. Une fois cette étape terminée, une lettre est adressée aux préfectures leur demandant de justifier les différents points relevés. Les dernières lettres envoyées portent sur la gestion 1999 16 ( * ) . A ce jour, aucune réponse n'est parvenue au secrétariat d'Etat à l'outre-mer.
La défaillance des préfectures s'explique notamment par le fait que le suivi des crédits et l'évaluation de leur impact figurent toujours au bas de la liste des priorités des services de l'Etat . A la Réunion, au mois de juillet 2001, les procédures d'évaluation des contrats de plan, auxquelles des crédits sont pourtant réservés 17 ( * ) , n'avaient toujours pas commencé à être mises en oeuvre.
Votre rapporteur considère qu'il appartient à l'administration centrale d' apporter aux services déconcentrés les outils nécessaires au changement de culture que constitue la transition d'une logique de dépense vers une logique de résultat . Il observe que l'administration du secrétariat d'Etat n'adresse pas chaque année aux préfectures d'instructions sur la nature des informations à faire remonter, contrairement par exemple à la délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR), qui adresse chaque année aux préfectures une circulaire relative à la préparation du rapport annuel au Parlement sur la gestion du fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT). Ce document, qui reste insuffisant car ne comportant aucune évaluation de l'impact de l'emploi des crédits, présente néanmoins l'avantage de procurer une vision d'ensemble (bien que peu précise) de ce à quoi servent les crédits du fonds.
A cet égard, il serait bienvenu que le secrétariat d'Etat adresse chaque année aux préfectures des tableaux standardisés, que les préfectures se contenteraient de remplir.
Il serait également heureux que les agents de l'administration centrale qui gèrent le FIDOM puissent se rendre sur place et avoir un contact direct avec les services déconcentrés. Aucun des gestionnaires actuels du FIDOM au niveau central ne s'est jamais rendu à titre professionnel dans les collectivités locales éligibles au FIDOM. Pourtant, la récente visite à la Réunion du contrôleur financier du secrétariat d'Etat à l'outre-mer été jugée très utile par les agents des services déconcentrés.
En tout état de cause, il est nécessaire de revoir les méthodes de collecte d'information, afin que la qualité de la gestion du FIDOM ne repose plus, comme c'est le cas actuellement, sur la seule bonne volonté des agents mais sur des procédures bien établies.
* 16 Fax du département des financements publics à la préfecture de Guyane du 18 août 2000, courrier au préfet de la Martinique du 10 janvier 2001, fax à la préfecture de Guadeloupe du 15 août 2000, courrier au préfet de la Réunion du 26 septembre 2000, courrier au préfet de Mayotte du 4 août 2000.
* 17 Le contrat de plan Etat-région de la Martinique fixe à 1,5 million de francs le montant de l'enveloppe réservée au financement de l'évaluation.