3. L'exercice du droit de saisine du Congrès sur le GAO
En premier lieu, le Congrès dispose depuis l'origine, c'est à dire depuis 1921, d'un droit de saisine étendu sur les travaux du GAO
En effet, le GAO est légalement tenu d'inscrire à son programme de travail toutes les missions demandées par des présidents des commissions des deux chambres du Congrès.
En outre, dans un souci d'équilibre politique, le GAO accorde une faculté de saisine équivalente au responsable de la minorité de chaque commission, même si la majorité, qui contrôle l'ordre du jour des commissions, a spontanément davantage de besoins.
Enfin, tous les parlementaires peuvent à titre individuel solliciter des travaux de la part du GAO. Ces demandes, auxquelles le GAO s'efforce d'accéder de manière politiquement équilibrée, ne sont cependant prioritaires, ni pour l'allocation des moyens, ni en termes de délais.
Ce droit de saisine explique notamment que le GAO soit souvent considéré comme « le chien de garde du Congrès » ( Congressional Watchdog )
4. Une institution à l'écoute des besoins du Congrès
Au delà de la réalisation de travaux ponctuels à la demande expresse des parlementaires, le GAO s'affiche explicitement comme une institution dont l'objectif est de satisfaire les besoins de son « client » : le Congrès.
Dans la petite plaquette sur papier glacé qui résume son programme stratégique pluriannuel, le GAO souligne ainsi à chaque page que son objectif est, dans chaque grand domaine, d'aider le Congrès à répondre aux mutations du monde contemporain et surtout d'appuyer la prise de décisions par le Congrès ( to support Congress in its decision-making ).
De même, en introduction au rapport annuel du GAO pour 1999, le Comptroller General souligne son engagement personnel ( comitment ) envers cet objectif.
Ces professions de foi ne sont d'ailleurs pas sans lien avec les coupes opérées dans le budget du GAO au cours des années 1990 par le Congrès, qui lui reprochait sa faible utilité pour les parlementaires.
Concrètement, le GAO s'efforce ainsi d'anticiper les principaux besoins d'information du Congrès et d'adapter en conséquence son programme de travail.
Pour ce faire, le GAO a développé des liens de plus en plus étroits avec les parlementaires, et surtout avec les staffers des commissions du Congrès, de manière à ce que le champ et le calendrier des investigations du GAO coïncident avec l'agenda parlementaire, et, réciproquement de manière à ce que les staffers des commissions soient sensibilisés aux enjeux soulevés par les travaux du GAO.
Le GAO considère d'ailleurs le nombre annuel d'auditions de ses services par le Congrès comme un indicateur privilégié de ses performances.
En 1999, le GAO a également entrepris d'établir avec les principaux responsables du Congrès un ensemble de protocoles précis relatifs aux liens entre le GAO et ses clients, ainsi qu'à ses procédures de travail et à la transparence de ses activités.
Parallèlement, le GAO a réalisé son programme stratégique pluriannuel en collaboration étroite avec le Congrès.
Le GAO semble donc bien, de plus en plus, une administration à l'écoute du Congrès.
A titre de comparaison, on peut rappeler qu'en France le Parlement ne bénéficie d'aucun droit de tirage sur les corps d'inspection ministériels, qui sont à la disposition exclusive de leurs ministre de tutelle et ne publient ni le détail de leurs programmes de travail, même à titre rétrospectif, ni, a fortiori, la majorité de leurs rapports.
De même, le Parlement n'a pu à ce jour accéder que de manière extrêmement restreinte à l'expertise des services d'étude du ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, notamment de l'INSEE et du ministère de l'Emploi et de la Solidarité, ainsi qu'à celle du Commissariat général du Plan ou du Conseil d'Analyse Economique : les rapports réalisés par ces administrations à la demande du Parlement se comptent chaque année sur les doigts d'une seule main.
S'agissant enfin de l'institution française qui s'apparente fonctionnellement le plus au GAO, la Cour des Comptes , il convient de rappeler que nombre de ses travaux ne sont ni publics, ni transmis au Parlement, qu'elle ne publiait encore récemment aucun programme de travail et qu'elle coopérait fort peu avec le Parlement, alors même que les articles 47 et 47-1 de la Constitution disposent que la Cour des Comptes « assiste le parlement et le Gouvernement dans le contrôle de l'exécution des lois de finances » et « dans le contrôle de l'application des lois de financement de la sécurité sociale ».
Cette situation s'expliquait largement par le poids de l'histoire : la Cour des Comptes est depuis l'origine une institution au service de l'exécutif, d'ailleurs rattachée au ministère de l'Economie et des Finances, dont dépendaient jusqu'en l'an 2000 l'ensemble de ses moyens de fonctionnement. En outre, le programme de travail de la Cour des Comptes est largement contraint par ses fonctions juridictionnelles et par l'obligation qui lui est faite de juger annuellement près d'un millier de comptes publics.
Cet état de fait s'est toutefois infléchi au cours des dernières années, comme le souligne le rapport public de la Cour des Comptes pour l'an 2000.
En premier lieu, la Cour des comptes communique au Parlement en temps utile une proportion croissante du produit de ses contrôles et de ses enquêtes :
- le rapport de la Cour des Comptes sur l'exécution des lois de finances de l'année n-1 est désormais publié au mois de juin de l'année n. Ce calendrier resserré, qui soumet les magistrats de la Cour des Comptes à de fortes contraintes, fait de ce rapport une contribution essentielle à l'examen par le Parlement à l'automne du budget de l'année n+1. De même, le rapport sur l'application de la loi de financement de la sécurité sociale est à la disposition du Parlement avant le vote de la loi de financement suivante ;
- le Premier président de la Cour des Comptes transmet désormais de façon systématique les rapports particuliers de la Cour des Comptes relatifs aux comptes et à la gestion des entreprises publiques (30 en l'an 2000), ainsi que ceux sur les associations faisant appel à la générosité du public (un en l'an 2000) ;
- en application de l'article L. 135-5 du code des juridictions financières, le Premier président de la Cour des Comptes a la faculté de transmettre, outre les référés qui n'ont pas reçu de réponse au fond dans les six mois (trois en l'an 2000), des communications aux commissions des finances, ce dont il a usé huit fois en l'an 2000 ;
- en outre, en application de la nouvelle rédaction de l'article L. 135-5 du code des juridictions financières résultant de la loi de finances initiale pour 2001, les référés du Premier président de la Cour des Comptes aux ministres ainsi que les réponses desdits ministres sont désormais transmis de droit aux commissions des finances de chaque assemblée dans un délai de trois mois ;
- par ailleurs, le Premier président de la Cour des Comptes est auditionné de plus en plus souvent par le Parlement (onze fois en l'an 2000) ;
- enfin, le rapport public de la Cour des Comptes pour l'an 2000 présente pour la première fois les principaux thèmes des contrôles effectués en l'an 2000, ainsi que les grandes lignes du programme de travail de la Cour des Comptes pour les années à venir.
Au delà d'une meilleure information du Parlement, la Cour des Comptes apporte désormais son soutien à certaines activités parlementaires :
- la Cour des comptes apporte son soutien opérationnel aux activités de la Mission d'évaluation et de contrôle (MEC) à l'Assemblée nationale, notamment en participant à des séances de travail ou en diligentant des enquêtes ad hoc ;
- à la demande du Rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale et du Président de la commission des finances du Sénat, la Cour des comptes a apporté son appui, notamment sous la forme de contributions écrites, à la réflexion du Parlement sur la réforme de l'ordonnance organique de 1959 relative aux lois de finances ;
- enfin, la Cour des comptes a conduit en l'an 2000, à la demande du Parlement, des enquêtes sur l'assurance veuvage et sur les politiques conventionnelles en matière d'assurance maladie.
Ces initiatives peuvent apparaître comme l'amorce d'un rapprochement du fonctionnement de la Cour des Comptes de celui du GAO