c) La non-restitution intégrale des droits perçus
Les réponses fournies à votre rapporteur dans les quelques jours qui ont précédé l'examen du présent rapport par la commission et, pour les dernières d'entre elles, la veille de cet examen, permettent de formuler un certain nombre de constatations.
(1) Les droits fixes font l'objet d'une double ponction
Le produit des droits fixes versés par les promoteurs qui, depuis 1992, est resté stable aux environs de 15,5 millions de francs fait l'objet d'une double ponction.
Une première ponction par le ministère de l'Economie et des Finances : les crédits ouverts en faveur des comités ne sont pas égaux au montant des droits fixes dont ils sont pourtant la contrepartie. Ils subissent en effet un prélèvement de 10 % au titre, semble-t-il, des frais de gestion.
Une seconde ponction est opérée par le ministère des Affaires sociales. Selon la Direction du budget 64 ( * ) " les modalités de rattachement du produit du droit versé par les promoteurs ont été fixées (...) par l'arrêté du 28 septembre 1994. Ce dernier arrêté prévoit qu'après rattachement au chapitre 31-96 " Autres rémunérations " dans la limite des crédits inscrits au budget voté, les recettes excédant cette limite sont imputées sur le chapitre 34-98 " Moyens de fonctionnement des services ".
Il faut comprendre de cette explication que le produit des droits fixes, après le prélèvement susmentionné de 10 %, abonde deux chapitres du budget de l'Emploi et de la Solidarité : l'un couvrant à nouveau des frais de gestion (chapitre 31-96), l'autre comportant les dotations budgétaires des comités (chapitre 34-98).
Ces frais de gestion qui s'élèvent à 300.000 francs depuis 1994 (soit environ 2 % du produit brut des droits fixes) correspondent, selon la Direction générale de la santé 65 ( * ) , aux frais de personnel engagés par le ministère pour traiter -comprend-on- la répartition entre les comités des crédits du chapitre 34-98, soit :
" - un instructeur des dossiers à temps partiel (agent contractuel hors échelle B3), soit environ 195.000 francs annuels ;
" - un agent contractuel à temps incomplet pour assurer le secrétariat (IM 254 base 149 heures), soit 105.000 francs annuels ".
A la lecture de cette réponse, votre rapporteur comprend mieux les difficultés rencontrées pour obtenir une information complète sur le financement des comités. Mais il s'étonne également du poids des prélèvements (de l'ordre au total de 12 %) opérés par les administrations sur le produit du droit fixe qui devrait bénéficier intégralement aux comités.
(2) Les crédits des comités ne sont pas suffisamment identifiables
Le chapitre 34-98 précité " Moyens des services ", au sein duquel figure un article 93 consacré spécifiquement aux comités, comporte bien d'autres dépenses réparties en 23 autres articles. Les moyens des comités (14 millions de francs) sont ainsi dilués dans une masse de crédits supérieurs à 1 milliard de francs.
Ainsi que l'indique la Direction du budget 66 ( * ) :
" D'un point de vue réglementaire, les fonds de concours ne font pas l'objet d'un suivi de consommation distinct du suivi de l'exécution des crédits budgétaires, avec lesquels ils sont fongibles au sein du chapitre budgétaire de rattachement. Les crédits de fonds de concours représentent des suppléments de crédits qui s'ajoutent aux crédits budgétaires prévus par la loi de finances, l'ensemble constituant la dotation du chapitre prise en compte pour l'année considérée, dans le cadre des procédures d'ordre dont la Direction du budget à la charge.
" Les mouvements de crédits (transferts et virements) qui, sur le fondement de l'article 14 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 modifiée relative aux lois de finances, modifient la répartition des crédits entre chapitres sont examinés au vu de la dotation du chapitre après adjonction des fonds de concours et sans qu'il soit possible dès lors de déterminer la part des fonds de concours mouvementée par la modification réglementaire opérée.
" Il en va de même pour les procédures de report des crédits disponibles au titre du budget suivant, effectués en application de l'article 17 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 modifiée précitée.
Et de conclure :
" Cela étant, chaque ordonnateur peut mettre en place, à son niveau, des modalités de suivi spécifiques des divers crédits de fonds de concours bénéficiant au budget dont il est responsable, s'il juge utile de disposer de données d'analyse sur l'emploi réservé à tel ou tel versement à titre de fonds de concours. Le ministère de l'Emploi et de la Solidarité est donc peut-être en mesure de fournir les indications recherchées.
On conçoit au terme de cette explication qu'il soit fort difficile de suivre un article au sein d'un chapitre budgétaire surtout lorsque cet article ne représente que 1,4 % des crédits du chapitre et ce, en dépit du fait que cet article est alimenté exclusivement par une redevance perçue sur l'usager à l'exclusion de tout abondement par le budget général.
(3) Les crédits des comités ne leur sont pas intégralement reversés
L'apparition de crédits conservés par le budget de l'Etat et donc non distribués aux comités est un phénomène antérieur à la réforme du financement de ces derniers.
Toutefois, l'écart entre les crédits disponibles et les dotations budgétaires versées se creuse très nettement au moment de la mise en oeuvre de la réforme.
Le tableau qui suit fait apparaître au 31 décembre 2000 un montant de 12,9 millions de francs de réserves sur le chapitre 31-98. Ces crédits non versés aux comités ne s'élevaient qu'à 4,7 millions de francs fin 1997. En trois ans, cette réserve a quasiment triplé.
Chapitre 34-98 art. 93
(2)
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(3)
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(4)
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Dotations pour fonctionnement versées au CCPPRB en n |
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1993 |
14.123.250 |
nd |
nd |
nd |
1994 |
14.763.700 |
nd |
nd |
nd |
1995 |
13.450.299 |
nd |
17.187.610 |
12.184.005 |
1996 |
14.402.447 |
5.185.913 |
19.588.360 |
13.264.193 |
1997 |
13.980.254 |
6.324.167 |
20.304.421 |
15.616.640 |
1998 |
13.807.641 |
4.838.936 |
18.646.577 |
11.376.170 |
1999 |
14.298.029 |
7.327.032 |
21.625.061 |
8.645.000 |
2000 |
13.570.039 |
13.230.994 |
26.801.033 |
13.880.000 |
Source : Direction du Budget et Direction générale de la Santé (avril 2001)
Le premier enseignement tiré de ce tableau est, d'une certaine façon, rassurante : les crédits non versés aux comités sont reportés sur les exercices suivants. Ils ne sont pas détournés de leur objet ou utilisés à d'autres fins.
La rigueur des informations fournies n'est toutefois pas totale. Ainsi, la différence entre les crédits disponibles de l'exercice n et les dotations versées aux comités pour le même exercice ne correspond pas parfaitement au montant des crédits reportés. La différence reste toutefois minime (de l'ordre de 50.000 francs à 250.000 francs selon les exercices) et va de surcroît dans le bon sens : les crédits reportés sont légèrement supérieurs aux dotations non versées 67 ( * ) .
En revanche, les chiffres fournis par la Direction du budget font apparaître un écart avec ceux de la Direction générale de la santé, s'agissant des crédits ouverts pour 2000. Les premiers sont inférieurs de 500.000 francs aux seconds. Cet écart révèle en réalité une opération de plus grande ampleur ainsi décrite par la Direction générale de la santé 68 ( * ) .
" Pour l'année 2000, il a été procédé, dans le cadre d'une décision modificative et pour des raisons liées à l'urgence sanitaire en fin de gestion, à une avance à hauteur de 8 millions de francs dont 7,5 millions de francs ont fait l'objet d'un décret de virement dès le 10 novembre 2000 et dont le solde, soit 0,5 million de francs, est en cours de remboursement. Au 31 décembre 2000, les crédits disponibles représentent 26,801 millions de francs, sachant que les 0,5 millions de francs susvisés ne sont pas encore intégrés dans ce montant " .
Ainsi, selon cette explication un peu embarrassée, courant 2000, 8 millions de francs ont été " empruntés " sur les crédits destinés aux comités dont 7,5 millions de francs ont été " remboursés " en cours d'année. De sorte que la DGS fait apparaître dans le montant tant des crédits ouverts que des crédits disponibles en 2000 une " créance " de 500.000 francs que détiennent les comités sur le budget....
Cette opération " d'emprunt ", rapidement et presque complètement régularisée, est néanmoins significative des tentations que peuvent susciter les réserves constituées sur les dotations des comités, alors même que rien ne vient justifier une telle politique.
Dans ces conditions, il n'est guère étonnant que des craintes persistent car des crédits inutilisés sont rapidement considérés par les autorités budgétaires comme des crédits inutiles et donc mobilisables à d'autres fins.
La constitution de réserves sur le chapitre budgétaire consacré au fonctionnement des comités n'a fait en effet l'objet d'aucune concertation avec ces derniers, ni même d'une information ou encore d'une explication quant à la raison d'être de ces réserves ou à leurs possibles utilisations.
En outre, l'apparition concomitante d'un nouveau mode de répartition des dotations et d'une ponction sur les crédits disponibles conduit à s'interroger sur la justification des nouveaux critères de financement définis par la DGS.
En effet, l'article R. 2012 du code de la santé publique prévoit que le ministère chargé de la Santé répartit le produit du droit fixe " en fonction notamment de leurs charges et de leur activité ". L'activité doit donc être prise en compte, ce qui n'est plus le cas, puisque la DGS substitue à cette notion d'activité celle de charges et de " situation ".
Votre rapporteur observe à cet égard que l'ensemble de la réforme du financement des comités ne repose sur aucun texte 69 ( * ) . La circulaire n° 2000/537 du 25 octobre 2000 relative au financement des CCPPRB détermine le montant total de la dotation 70 ( * ) pour cette année (11,86 millions de francs) mais n'explicite ni la clé de répartition, ni les modalités de calcul de ce total.
* 64 Réponse à votre rapporteur en date du 30 mars 2001.
* 65 Réponse à votre rapporteur en date du 3 avril 2001.
* 66 Réponse précitée du 30 mars 2001.
* 67 Ainsi, les crédits disponibles pour 1999 s'élevaient (colonne 3 du tableau) à 21.625.061 francs. Les dotations versées (colonne 4) se sont élevées à 8.645.000 francs. Les crédits reportés (colonne 3) en 2000 apparaissent pour 13.230.994 francs alors qu'ils devraient s'élever à 12.980.081 francs (21.625.061 francs - 8.645.000 francs), soit une différence de 250.913 francs.
* 68 Réponse précitée en date du 3 avril 2001.
* 69 Votre rapporteur n'a en tout cas reçu aucune indication de la DGS lui permettant de penser qu'il existait une base juridique déterminant les modalités détaillées de calcul des dotations.
* 70 L'annexe n° 6 détaille la répartition de cette enveloppe par région et par comité.