B. EVOLUTION DES INTERVENTIONS DES AGENCES DE L'EAU DE 1992 À 2001
5. Intervention de M. Daniel BOULNOIS, directeur de l'agence de l'eau Rhin-Meuse
Les agences de l'eau sont beaucoup évoquées depuis le début de ce colloque. En effet, le projet de réforme gouvernementale les pousse aujourd'hui sur le devant de la scène. Selon moi, l'avenir des agences n'est absolument pas menacé. Le travail qu'il reste à accomplir va nécessiter, bien au contraire, qu'on y consacre toute notre énergie.
Comment définir l'action des agences depuis une dizaine d'années ? Elles ont été créées à la fin des années 1960. Les vingt premières années de leur existence, c'est-à-dire de 1970 à 1990 environ, ont permis leur mise en place, leur appropriation et leur reconnaissance par les différents acteurs de l'eau. Il est clair aujourd'hui que leurs méthodes de travail sont complètement intégrées à la politique de l'eau. La signature des contrats pluriannuels avec les collectivités, les programmes de branche sont autant de procédés reconnus qui ont depuis longtemps démontré leur mérite et leurs résultats.
Après avoir connu une sorte d'essoufflement au début des années 1990, le système a été totalement relancé avec la loi de 1992. Ce nouvel élan s'est traduit dans le VI e programme des agences par un doublement de leurs capacités d'intervention. Du reste, ce niveau a été maintenu pour le VII e programme, en vigueur jusqu'à la fin 2001 et, certainement, 2002. Dans ces conditions, elles ont soutenu un grand nombre d'investissements engagés par les collectivités, les industriels ou d'autres acteurs à hauteur de 100 milliards de francs, ce qui représente 180 milliards de francs de travaux sur 10 ans dans des domaines aussi étendus que la collecte et le traitement des eaux usées, l'alimentation en eau potable, la gestion des milieux naturels ou les aides au fonctionnement.
Par ailleurs, la majorité des recettes enregistrées par les agences proviennent des collectivités par le biais de la contre-valeur. Les collectivités contribuent ainsi à hauteur de 60 % aux recettes des agences, 10 % proviennent des industriels, 14 % sont issus des ressources en eau et 14 % des retours de prêts et avances remboursables.
Les collectivités ont réalisé un nombre d'investissements importants au cours de ces dernières années. Ainsi, entre 1990 et 1997, 58 millions d'équivalents habitants de pollution brute auraient dû être traités. Or la moitié seulement a pu l'être malgré un investissement de 50 milliards de francs et une progression de 7 % par an. Ces facteurs expliquent également les évolutions à la hausse du prix de l'eau. Bien entendu, les élus sont très sensibles à ce type de situation.
Entre 1974 et 1997, les groupes industriels ont, en revanche, réussi à enregistrer de forts taux de dépollution, avec des abattements compris entre 60 et 75 % sur les matières oxydables et les matières toxiques Ces bons résultats ont nécessité, par exemple en 1997, un investissement de 9 milliards de francs avec une progression annuelle de 1,5 %.
L'agriculture représente, pour sa part, un total d'environ 72 millions d'équivalents habitants en termes de pollution brute générée par l'activité d'élevage. Cette quantité de pollution est supérieure au total rejeté par les collectivités et les industriels réunis. Les agences ont mis en place, notamment dans le cadre du PMPOA, un système d'aide dans le VII e programme à hauteur de 3 milliards de francs. Cependant, ces aides ne sont pas encore suffisantes car les investissements se montrent plus élevés que ceux qui avaient été initialement envisagés.
Les efforts consentis par les agences et leurs partenaires portent leurs fruits et des résultats encourageants peuvent être observés directement sur le milieu naturel . A titre d'exemple, sur le Rhin, le pourcentage des points de mesures satisfaisant l'objectif de qualité est passé de 30 % (période 1985-1990) à 80 % en 1999. Les investissements et les actions entreprises ont donc un réel effet sur la qualité des ressources en eau.
On a beaucoup parlé au cours de cette matinée du vote par le Parlement des programmes d'intervention des agences de l'eau. Je rappelle simplement que, dans le système actuel, les programmes des agences de l'eau font déjà l'objet d'une approbation par les cabinets concernés (environnement, budget, Premier ministre) sous une forme qu'il est convenu d'appeler un " bleu de Matignon ". Je ne sais si, entre le dispositif en vigueur et le système futur, le directeur d'agence que je suis doit craindre ou espérer.