B. PLUSIEURS FACTEURS MILITENT EN FAVEUR D'UNE MEILLEURE PRISE EN COMPTE DE LA DURÉE PAR LES DOCUMENTS BUDGÉTAIRES
1. La construction européenne impose l'élaboration d'un cadre pluriannuel pour la politique budgétaire
La convergence imposée aux pays de l'Union européenne pour la mise en oeuvre de la monnaie unique a conduit la France à se placer dans une perspective pluriannuelle d'assainissement de ses finances publiques. Auparavant, il convient de rappeler que la France était l'un des seuls pays de l'OCDE à ne pas disposer d'un outil public d'analyse de la dépense à moyen terme.
La procédure des " plans de convergence " mise en oeuvre en application du traité sur l'Union européenne, a été renforcée lors du Conseil européen d'Amsterdam du 17 juin 1997. Dans le cadre de la surveillance multilatérale des politiques budgétaires en phase III de l'Union économique et monétaire - c'est-à-dire pour les Etats ayant adopté l'euro -, ceux-ci doivent présenter des " programmes de stabilité pluriannuels " indiquant les prévisions de solde des administrations publiques 11 ( * ) pour l'année en cours et, au minimum, les trois années suivantes, ainsi que les mesures devant être mises en oeuvre pour atteindre une situation budgétaire excédentaire ou proche de l'équilibre.
L'Union économique et monétaire a donc été un facteur déterminant pour la mise en oeuvre d'une programmation en matière d'évolution des finances publiques.
La présentation des programmes de stabilité s'articule néanmoins difficilement avec le vote de la loi de finances par le Parlement. Comme l'a souligné M. Christophe Blanchard-Dignac, alors directeur du budget, lors de son audition par la commission des finances, " L'articulation avec le programme de stabilité connaît un problème de date, celui-ci ne correspond pas au calendrier parlementaire ".
Votre commission incline donc à approuver la rédaction de l'article 4 de la proposition de loi organique déposée par notre collègue député Didier Migaud, qui indique que " le gouvernement transmet aux commissions compétentes de l'Assemblée nationale et du Sénat le programme de stabilité, ainsi que son actualisation annuelle. Le cas échéant, il transmet également à ces commissions, dès leur adoption par le Conseil de l'Union européenne, les recommandations adressées à la France sur le fondement des articles 99 et 104 du traité instituant la Communauté européenne ".
Votre commission considère cependant qu'à l'article 6 de la proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale, il n'est pas nécessairement opportun de rappeler que les projets de loi de finances sont préparés " au vu des orientations définies par le programme de stabilité ". Elle ne remet certes pas en cause la nécessité d'inscrire les projets de loi de finances dans une perspective pluriannuelle, mais elle considère que le calendrier budgétaire rend difficile le fait de se caler si étroitement sur les orientations définies par le programme de stabilité.
L'actualisation de ce programme a en effet lieu fin décembre, à un moment où les paramètres du projet de loi de finances de l'année suivante ne peuvent plus être modifiés. Faudrait-il donc se référer à l'ancien programme de stabilité, périmé au moment même du vote de la loi ?
Ce décalage dans le temps des deux exercices rend un renvoi trop ferme au " programme de stabilité " peu opportun.
Votre rapporteur rappelle toutefois que le Sénat avait cherché à résoudre cette difficulté par le vote d'une résolution du 23 avril 1998 12 ( * ) . Votée à une très forte majorité 13 ( * ) , cette résolution demandait notamment au gouvernement :
" - (...) de produire à l'appui du projet de loi de finances de l'année le programme de stabilité notifié par lui et, au moins une fois par an, une présentation des programmes des autres Etats membres. "
La concordance des calendriers doit donc être recherchée de manière à établir une loi de finances et un programme de stabilité cohérents entre eux, et non divergents comme c'est le cas aujourd'hui.
* 11 Soit de l'Etat, des collectivités locales et des fonds de sécurité sociale.
* 12 Résolution n° 120 - Sénat 1997/1998.
* 13 281 voix contre 31.