TITRE III
DISPOSITIONS TENDANT A PRECISER CERTAINES REGLES D'INELIGIBILITES PREVUES PAR LE CODE ELECTORAL

Article 14 et 15
(articles L. 195 et L. 205 du code électoral)
Suspension des fonctions d'ordonnateurs
en cas de gestion de fait

Les articles 14 et 15 de la proposition de loi modifient respectivement les articles L. 195 et L. 205 du code électoral, afin d'aménager certaines règles d'inéligibilités qui trouvent notamment à s'appliquer en cas de gestion de fait.

L'objet de la procédure de gestion de fait est de rétablir la règle fondamentale de la séparation des ordonnateurs et des comptables.

Comme le rapport du groupe de travail sur les chambres régionales des comptes l'a mis en évidence, la diversification très grande des activités locales et la nécessité pour les collectivités locales de répondre aux demandes multiples de la population exposent davantage les ordonnateurs au risque de la gestion de fait. Les chambres régionales des comptes opèrent entre 35 et 40 déclarations provisoires de gestion de fait par an.

Le plus souvent, ces gestions de fait concernent des ordonnateurs qui, sans que leur bonne foi ne soit en cause , se sont placés en dehors du cadre prévu par la loi.

Or l'élu déclaré définitivement gestionnaire de fait est soumis à la démission d'office , en application des dispositions du code électoral relatives aux inéligibilités.

Lorsque la situation du comptable de fait est constituée postérieurement à l'élection, les articles L. 205 (pour un conseiller général) , L. 236 (pour un conseiller municipal) et L. 341 (pour un conseiller régional) du code électoral prévoient, en effet, la démission d'office de l'intéressé.

Cette démission d'office est prononcée par le préfet du département pour les conseillers municipaux, par le conseil général pour les conseillers généraux et par le préfet de région pour les conseillers régionaux.

Cependant, depuis la loi du 26 juillet 1991, l'élu déclaré comptable de fait peut recevoir quitus de sa gestion dans les six mois de l'expiration du délai de production des comptes imparti par le jugement définitif du juge des comptes. Dans ce cas, la procédure de démission d'office n'est pas mise en oeuvre.

De l'avis même des magistrats financiers entendus par le groupe de travail, ce régime automatique d'inéligibilité et de démission apparaît très lourd et inadapté à l'objet même de la procédure de gestion de fait qui est de rétablir la règle de séparation des ordonnateurs et des comptables.

Il place la chambre régionale des comptes qui prend une décision de gestion de fait dans la position d'être juge non seulement de la régularité comptable mais aussi du mandat de l'ordonnateur.

Le délai de six mois prévu pour permettre à l'ordonnateur de régulariser la situation et éviter, en conséquence, la démission d'office apparaît, en outre, très court et mal adapté à la diversité des situations rencontrées.

Au total, l'application aux comptables de fait des inéligibilités que le code électoral prévoit pour les comptables publics patents ne constitue en aucun cas des sanctions complémentaires que le juge des comptes déciderait de mettre en oeuvre. Elle est au contraire une sanction automatique la plupart du temps extrêmement lourde et disproportionnée à la nature des irrégularités constatées.

Cette situation heurte les principes fondamentaux de notre droit. La jurisprudence du Conseil constitutionnel établit clairement que " le principe de nécessité des peines implique que l'incapacité d'exercer une fonction publique élective ne peut être appliquée que si le juge l'a expressément prononcée, en tenant compte des circonstances propres à l'espèce " (décision n° 99-410 DC du 15 mars 1999).

C'est pourquoi, reprenant une suggestion du groupe de travail, l'article 15 de la proposition de loi prévoit de remplacer la démission d'office par une procédure de suspension des fonctions de l'ordonnateur jusqu'à l'apurement de la situation de la gestion de fait.

Il modifie à cette fin l'article L. 205 du code électoral relatif aux conseillers généraux.

L'article 14 tire pour sa part les conséquences de cette modification à l'article L. 195 du code électoral qui énonce les différents cas d'inéligibilités au conseil général, notamment celui des comptables dans le département où ils exercent ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter les articles 14 et 15 devenus respectivement les articles 10 et 11 dans les conclusions qu'elle vous soumet, sans modification.

Articles 16, 17 et 18
(articles L. 231, L. 236 et L. 341 du code électoral)
Coordinations

Les articles 16, 17 et 18 de la proposition de loi étendent aux conseillers municipaux et aux conseillers régionaux la règle de suspension des fonctions d'ordonnateurs en cas de gestion de fait.

Les articles 16 et 17 , qui concernent les conseillers municipaux, modifient à cette fin, respectivement les articles L. 231 et L. 236 du code électoral.

L'article 18 , relatif aux conseillers régionaux, modifie dans le même sens l'article L. 341 du code électoral.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter les articles 16, 17 et 18 devenus respectivement les articles 12, 13 et 14 dans les conclusions qu'elle vous soumet, sans modification.

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