CONCLUSION
La
réussite de la professionnalisation des armées devient incertaine.
Le projet de budget du ministère de la défense, comme le
précédent, donne, selon la présentation qu'en fait le
gouvernement, les moyens de réussir la réforme majeure de notre
défense que constitue le passage d'une armée mixte à une
armée professionnelle.
Cette profonde mutation des armées et de la gendarmerie constitue un
ensemble complexe dont les multiples rouages sont intimement liés.
Votre Rapporteur vous a fait part, dans son rapport d'information publié
le 20 octobre 1999 et intitulé " La professionnalisation des
armées est-elle en bonne voie ? Bilan à mi-parcours "
de ses principales inquiétudes à partir des constatations qu'il a
personnellement faites dans les unités des armées et de la
gendarmerie.
Le projet de budget du ministère de la défense accentue les
craintes déjà exprimées pour les raisons principales
suivantes.
1. La loi de programmation militaire a souligné toute l'importance que
doit revêtir un " recours accru au personnel civil ". Il doit
permettre, en lui faisant tenir des emplois de soutien à vocation
générale, d'" affecter prioritairement le personnel
militaire dans les emplois opérationnels ".
Le transfert vers les armées d'une partie du personnel de la
délégation générale pour l'armement est une des
clés de la réussite de cet aspect de la professionnalisation. Le
déficit de personnel civil dans les armées et dans certains
services, comme le service de santé des armées, devient
chronique. Plus de 5 000 emplois sont vacants qui doivent être
inéluctablement pourvus puisqu'ils conditionnent la vie même des
unités. Les conséquences de cette situation sont bien connues,
transferts de combattants vers les fonctions de soutien, désillusion des
nouveaux engagés, mécontentement des cadres militaires. La
programmation, sur ce point, n'est clairement pas respectée.
2. La décroissance de l'effectif des appelés doit être
progressive, jusqu'en 2002. La décision de suspension de l'appel sous
les drapeaux après cette date ne doit en aucune façon laisser
à penser que les armées peuvent dès maintenant, accepter
des ponctions sur leur effectif d'appelés. Or, leur sous-effectif est du
même ordre que celui du personnel civil. Il en double donc les
conséquences.
3. Le recours à des volontaires ne se fait pas aisément. La
gendarmerie, pour qui il revêt une particulière importance en
raison de leur volume et des attributions qui doivent leur être
confiées, n'a pas été en mesure d'accueillir en 1999 le
nombre de volontaires prévus et elle n'a pu que constater que leur
niveau scolaire moyen était sensiblement inférieur à celui
des gendarmes appelés.
4. La part des crédits de rémunérations et de charges
sociales dépasse pour la première fois 80 % du titre III.
Malgré cela, le gouvernement affirme qu'en raison de diverses
économies, le fonctionnement et l'entraînement des unités
s'améliorera. Dans le premier domaine on ne peut qu'espérer une
diminution de l'austérité des conditions de vie dans les
unités militaires. Dans le second domaine, celui de
l'entraînement, on sait déjà que, malheureusement, nos
forces resteront éloignées des taux d'activité de
véritables armées professionnelles. En cela également, la
réussite de la professionnalisation paraît compromise.