B. L'ORDONNANCE N° 98-582 DU 8 JUILLET 1998 RELATIVE AU RÉGIME DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR DANS LES TERRITOIRES D'OUTRE-MER DU PACIFIQUE
Constituée de trois articles, cette ordonnance, prise en
application du point 12° de l'article premier de la loi d'habilitation du
6 mars 1998, constitue, du moins faut-il l'espérer, le dernier
épisode d'un feuilleton législatif qui a trouvé son
origine dans deux arrêts du tribunal administratif de Papeete du 29 mai
1995 ayant reconnu, par voie d'exception, l'illégalité du
décret
n° 87-360
du 29 mai 1987
modifié
portant statut de l'Université française du Pacifique en raison
de l'incompétence de son auteur.
Tirant les conséquences de ces décisions juridictionnelles, la
loi
n° 96-609
du 5 juillet 1996
portant dispositions
diverses relatives à l'outre-mer, par son article 14 issu d'un
amendement du Gouvernement, a conféré à cette
université un nouveau statut par extension des dispositions de la loi
n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur. Cet
article 14 prévoyait en outre certaines adaptations, inscrites aux
articles 71, 72 et 73 de la loi de 1984, ainsi qu'une entrée en vigueur
différée devant permettre l'adoption des décrets
d'application et la mise en place des nouveaux organes.
Le délai de quinze mois prévu par cette loi ayant expiré
le 9 octobre 1997 sans que les mesures réglementaires aient
été prises, l'Université française du Pacifique se
trouvait derechef confrontée à un vide juridique et à une
situation de blocage.
La loi d'habilitation, sur le fondement de laquelle l'ordonnance aujourd'hui
soumise à ratification a été prise, a ménagé
une nouvelle période de transition permettant à
l'Université de continuer à fonctionner selon les
modalités prévues par le décret du 29 mai 1987.
L'ouverture de cette période transitoire, entérinant le rejet du
dispositif adopté en 1996 jamais entré en vigueur, devait, selon
l'exposé des motifs du projet de loi d'habilitation, permettre au
Gouvernement de "
reprendre une réflexion globale sur l'avenir
de l'enseignement supérieur dans le Pacifique
".
Cette réflexion a conclu à la nécessité de
"
rapprocher le fonctionnement de l'enseignement supérieur dans
les territoires d'outre-mer du droit commun applicable à l'ensemble des
universités métropolitaines et de l'université
Antilles-Guyane
", le nouveau cadre juridique devant néanmoins
"
prendre en compte les spécificités des territoires
d'outre-mer et notamment la faiblesse des effectifs d'étudiants et
d'enseignants, la nécessité d'une ouverture vers les pays de la
zone
".
La durée de la période de transition ainsi définie avait
été fixée à trente mois maximum à compter de
la publication de la loi d'habilitation qui l'instaurait, soit jusqu'au mois de
septembre 2000. Ce délai, certes confortable, n'a pas été
épuisé puisque la présente ordonnance du 8 juillet 1998
relative au régime de l'enseignement supérieur dans les
territoires d'outre-mer du Pacifique est venue y mettre un terme.
•
L'article 1
er
de cette ordonnance modifie le
dispositif de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 sur l'enseignement
supérieur introduit par l'article 14 de la loi du 5 juillet 1996 pour
créer
deux universités distinctes
implantées
respectivement en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie
française
et
rapprocher le régime applicable à ces
universités du régime de droit commun tout en prenant en compte
les spécificités locales
, en particulier la faiblesse des
effectifs qu'il s'agisse des étudiants ou des enseignants
3(
*
)
.
Ces adaptations consistent essentiellement en une simplification de
l'organisation, le conseil d'administration assumant, outre ses propres
missions, celles confiées par la loi de 1984 au conseil des
études et de la vie universitaire, et dans l'adaptation de la
composition du conseil d'administration et du conseil scientifique afin de
réserver une place significative aux représentants du territoire
ou de la collectivité. Sur ce dernier point,
l'Assemblée
nationale
, en adoptant un amendement présenté par M. Michel
Buillard,
a fait passer de deux à quatre le nombre minimal de
représentants du territoire siégeant au conseil
d'administration
dont l'effectif total est plafonné à trente
membres.
S'il est justifié de prévoir une représentation
significative des autorités territoriales au sein de l'organe
décisionnel, on peut cependant observer que le dispositif ainsi
adopté par l'Assemblée nationale pourrait aboutir dans certains
cas de figure, par exemple l'hypothèse d'un effectif total de vingt
membres et d'une proportion de personnalités extérieures
fixée à 20 %, à une absence de personnalités
extérieures autres que politiques telles qu'un représentant d'un
laboratoire de recherche extérieur à l'université, un
membre du conseil économique, social et culturel local ou encore un
membre d'une association culturelle implantée localement.
Ce dédoublement de l'université française du Pacifique en
deux établissements publics séparés paraît en
cohérence avec l'évolution statutaire et institutionnelle de la
Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française qui
n'appartiennent plus à la même catégorie juridique. Seul
l'institut universitaire de formation des maîtres du Pacifique,
créé par un décret du 30 octobre 1992, resterait
commun aux deux universités. La participation des îles
Wallis-et-Futuna à ces universités est
préservée : il est prévu qu'un représentant de
ce territoire siège au conseil d'administration.
•
L'article 2
de l'ordonnance complète la loi du 26
janvier 1984 par un article 74 pour tenter d'organiser une
coordination
entre les laboratoires dépendant de l'université et les autres
organismes de recherche
installés sur le territoire
calédonien ou polynésien. Il est ainsi prévu que chaque
université organise une conférence trimestrielle devant favoriser
les échanges entre les différentes instances de recherche
implantées localement. Si le contenu normatif et surtout la valeur
législative d'une telle disposition paraissent discutables, on peut
souhaiter qu'elle ait une portée incitative bénéfique.
•
L'article 3
énonce la formule exécutoire en
chargeant chaque ministre concerné de l'exécution de l'ordonnance.
Observons que
plusieurs
décrets d'application
de la
présente ordonnance ont déjà été
publiés
: décret n° 99-445 du 31 mai 1999
portant création de l'université de la Polynésie
française et de l'université de la
Nouvelle-Calédonie ; décret n° 99-721 du 3 août
1999 modifiant le décret n° 92-1180 du 30 octobre 1992 portant
création et organisation de l'institut universitaire de formation des
maîtres du Pacifique ; décrets n° 99-819 portant
extension et adaptation aux territoires de la Polynésie française
et des îles Wallis-et-Futuna et à la Nouvelle-Calédonie de
dispositions relatives à l'enseignement supérieur et n°
99-820 portant dispositions diverses relatives au régime de
l'enseignement supérieur dans le Pacifique du 16 septembre 1999.