B. LA QUESTION DE PRINCIPE : LES CONDITIONS D'ORGANISATION DES SECONDS TOURS

1. Les seconds tours d'élections législatives ou cantonales avec un seul candidat

Afin d'éviter la présence au second tour d'un trop grand nombre de candidats, de nature à réduire le nombre de voix et donc la représentativité de l'élu et à obscurcir le choix des électeurs, le code électoral conditionne la possibilité de se maintenir au second tour à l'obtention d'un seuil minimum de suffrages, à savoir 12,5 % du nombre des électeurs inscrits pour les élections législatives et 10 % du même nombre pour les élections cantonales.

L'institution de seuils pour le maintien des candidatures au second tour, à partir de 1966, était aussi motivée par un souci de moralisation destiné à limiter les risques de " marchandage " entre les deux tours.

Par suite d'une grande dispersion des suffrages sur un nombre important de candidats au premier tour, ces seuils peuvent n'être atteints que par un seul candidat, voire par aucun d'entre eux.

Aussi, les articles L. 162 (élections législatives) et L. 210-1 (élections cantonales) prévoient-ils que si un seul candidat remplit la condition requise, celui arrivé en deuxième position peut aussi se maintenir au deuxième tour.

De même, dans le cas où aucun candidat n'a recueilli le nombre de suffrages requis, les deux premiers candidats du premier tour sont autorisés à se présenter au deuxième tour.

Ces dispositions n'ont pas pour effet de supprimer en toute hypothèse l'organisation d'un second tour avec un seul candidat.

En effet, l'un des candidats autorisés à se maintenir bien qu'il n'ait pas atteint ce seuil peut décider de se retirer au profit de l'autre candidat.

Dans ce cas, le candidat arrivé en troisième position n'est pas pour autant autorisé à se maintenir et le second tour est organisé avec un seul candidat.

Ceci peut ne pas être bien perçu par l'électeur auquel aucun choix n'est alors présenté, et l'organisation d'un second tour avec un seul candidat, dépourvu de toute signification, ne peut manifestement qu'encourager l'abstention.

Selon les indications communiquées à votre rapporteur par le ministère de l'Intérieur, lors des élections législatives de 1997, dans 12 circonscriptions le second tour a été organisé avec un seul candidat .

Pour les élections cantonales de 1998, 32 cantons ont été pourvus à l'issue d'un second tour avec un seul candidat (sur 3.856 cantons renouvelables et 1.513 élections au second tour).

2. Les seuils d'accès au second tour

Votre rapporteur a exposé que l'instauration de seuils pour pouvoir se maintenir au second tour des élections législatives et cantonales (respectivement 12,5 % et 10 % du nombre des électeurs inscrits) était destiné à limiter les risques de " marchandage " entre les deux tours et à éviter la présence au second tour d'un trop grand nombre de candidats, susceptible d'obscurcir le choix décisif de l'électeur.

Un seuil inférieur (10 % des suffrages exprimés) conditionne, pour les élections municipales dans les communes d'au moins 3.500 habitants, la recevabilité des candidatures au second tour. Cette différence tient à la nécessité d'assurer une plus large représentation des divers courants d'opinion au conseil municipal, sachant que la " prime majoritaire " permet généralement de dégager une majorité stable au sein de ce conseil.

Pour les élections régionales, la loi n° 99-36 du 19 janvier 1999, par laquelle une prime majoritaire a également été instituée, fixe le seuil d'accès au second tour à 5 % des suffrages exprimés.

On notera que tout relèvement du seuil, dans les scrutins avec prime majoritaire, ne peut qu'accroître l'effet de cette prime, puisque toutes les listes ayant recueilli au tour décisif 5% des suffrages exprimés (élections municipales) ou 3% des mêmes suffrages (élections régionales) sont admises à la répartition des sièges.

Des modes de scrutin différents ont donc conduit, dans chaque cas, à l'établissement de seuils particuliers.

Les dispositions récemment adoptées par le Parlement ne vont d'ailleurs pas dans le sens d'une harmonisation des seuils, puisque, lors des débats parlementaires sur la loi n° 99-36 du 19 janvier 1999 relative au mode d'élection des conseillers régionaux, le seuil pour le maintien au second tour et celui pour la fusion, proposés respectivement à 10 % et 5 % des suffrages exprimés dans le projet initial du Gouvernement, ont été abaissés respectivement à 5 % et 3 % des mêmes suffrages par l'Assemblée nationale, malgré l'opposition du Sénat.

Il reste cependant à savoir si ces conditions de seuil sont adaptées ou ne mériteraient pas d'être révisées, puisqu'elles ne permettent pas, dans tous les cas, d'éviter l'élection au second tour d'un candidat avec une majorité relative, à l'issue d'une triangulaire, voire d'une quadrangulaire.

Votre rapporteur a tenu à mesurer l'ampleur de la difficulté à partir des chiffres des derniers scrutins.

Lors des élections législatives de 1997, dans 79 cas l'élection a été acquise à l'issue d'une triangulaire.

Sur les 1.513 cantons dans lesquelles un second tour a été organisé en 1998, on en a dénombré 314 avec 3 candidats et 13 avec 4 candidats, la grande majorité de ces cantons (1.154) ayant été renouvelés avec 2 candidats au second tour.

Pour les élections municipales de 1995, dans les communes d'au moins 3.500 habitants, dans 818 cas, le second tour a été organisé avec au moins 3 listes, contre 291 fois avec 2 listes.

Les propositions de loi, qui tentent de répondre à de telles situations, méritent réflexion.

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