II. AUDITIONS DU MERCREDI 29 SEPTEMBRE 1999
A. AUDITION DE M. ADRIEN BEDOSSA, VICE-PRÉSIDENT DE L'UNION NATIONALE DES PROFESSIONS LIBÉRALES (UNAPL)
Réunie le mercredi 29 septembre 1999, sous la
présidence de M. Jacques Bimbenet, vice-président
,
puis de M. Jean Delaneau, président
, la commission a
engagé son programme d'auditions sur le
projet de loi
n° 1786 (rectifié)
(AN) relatif à la
réduction négociée du temps de travail
.
M. Jacques Bimbenet, vice-président
a rappelé que M. Louis
Souvet, rapporteur de la loi du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation
relative à la réduction du temps de travail, avait
présenté le 30 juin dernier à la commission un premier
bilan d'application de cette loi ; qu'à l'issue de cette
communication, la commission avait pressenti
M. Louis Souvet
pour
rapporter le second projet de loi qui a été adopté en
conseil des ministres le 28 juillet 1999, afin qu'il puisse commencer ses
travaux dès la mi-septembre.
M Jacques Bimbenet, vice-président
, a indiqué que
naturellement cette nomination serait confirmée lorsque le texte du
projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, serait transmis
au Sénat, probablement le 19 octobre.
La commission a tout d'abord entendu
M. Adrien Bedossa,
vice-président
de l'Union nationale des professions
libérales
(UNAPL).
Dans son propos liminaire,
M. Adrien Bedossa
a rappelé que
l'UNAPL comprenait
296.000 adhérents employant 1,5 million de
salariés. Il a souligné que 50 % de ces entreprises
comprenaient moins de dix salariés et 80 % moins de vingt
salariés. Dans ces conditions, et compte tenu du délai
supplémentaire accordé aux entreprises de moins de vingt
salariés pour mettre en place la réduction du temps de travail,
il a expliqué que les entreprises du secteur libéral avaient
temporisé, sans refuser a priori de discuter de la réduction du
temps de travail dans une perspective d'accroissement de la flexibilité.
M. Adrien Bedossa
a déclaré que l'UNAPL avait
souhaité quatre mesures incitatives qui permettraient aux professions
libérales de créer davantage d'emplois.
Il lui a semblé tout d'abord que des dispositions particulières
relatives aux groupements d'employeurs devaient être adoptées. Il
a cité, à ce propos, une expérience dans le Languedoc
faisant apparaître la possibilité de créer 22 emplois
équivalents temps plein.
De même, il a souhaité que soit créé un
" chèque premier emploi " considérant qu'il
faciliterait les embauches.
Ensuite, il a estimé qu'il convenait que le statut de collaborateurs
libéraux ne fasse plus l'objet, de la part des unions de recouvrement
des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales
(URSSAF), d'une requalification en contrat de salariés, comme c'est le
cas actuellement, avec pour conséquence de freiner le mouvement des
recrutements.
Enfin, il a estimé que la question de la qualification des personnels
était cruciale pour les petites entreprises du secteur libéral,
et qu'il était par conséquent nécessaire de consacrer la
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e
heure hebdomadaire à la formation continue. Cette heure,
payée par l'entreprise, pourrait ainsi être comptabilisée
de manière à constituer un capital formation, majoré par
l'entreprise, afin de permettre aux salariés de disposer, par exemple,
d'un droit à la formation de six mois tous les dix ans.
M. Adrien Bedossa
a observé que ces revendications n'avaient pas
été reprises dans le projet de loi et, qu'en conséquence,
les entreprises du secteur restaient très attentistes voire
réticentes à s'engager dans un processus d'anticipation de la
réduction du temps de travail. Il a rappelé que depuis vingt ans,
le secteur des professions libérales avait créé des
emplois à un rythme de 3 à 3,4 % par an, sans attendre la
loi du 13 juin 1998.
En réponse à une question de
M. Louis Souvet, rapporteur
,
qui lui demandait si le projet de loi avait repris les dispositions des accords
de branche signés par les employeurs du secteur libéral,
M.
Adrien Bedossa
a déclaré que cela n'avait pas
été le cas, notamment pour les dispositions spécifiques
relatives à la formation continue.
Concernant le bilan du mandatement dans le cadre de la loi Aubry,
M. Adrien
Bedossa
a répondu à M. Louis Souvet, rapporteur, que cette
disposition n'était pas sans rappeler le délégué de
site que voulaient créer les lois Auroux. Il a observé que le
recours à un salarié mandaté extérieur à
l'entreprise se heurtait à des réticences de la part des
employeurs et du personnel.
M. Louis Souvet, rapporteur,
l'ayant interrogé sur les
dispositions prévoyant qu'un accord doit être signé par un
ou plusieurs syndicats majoritaires dans l'entreprise,
M. Adrien
Bedossa
a déclaré
que ces accords n'avaient aucun sens
dans une entreprise ne comportant que quelques salariés. Il a
rappelé que la négociation collective répondait à
des règles particulières dans ces petites entreprises, comme le
dialogue direct et l'absence de formalisme.
En réponse à
M. Louis Souvet, rapporteur,
qui
s'interrogeait sur l'éventuelle contradiction du projet de loi avec la
directive européenne relative au travail à temps partiel,
M.
Adrien Bedossa
a estimé que la nouvelle définition du travail
à temps partiel était effectivement contradictoire avec le
principe des 35 heures payées 39.
Il a ajouté que le pacte européen pour l'emploi
privilégiait l'échange d'expériences et
l'employabilité, deux concepts qui lui semblaient être
étrangers à la démarche du Gouvernement.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
a souhaité savoir combien de
salariés étaient couverts par un accord sur la réduction
du temps de travail dans le secteur des professions libérales. Elle a
souhaité connaître la position de l'UNAPL sur les
allégements de charges.
M. André Jourdain
a observé que le projet de loi ne
comportait aucune disposition relative au développement des groupements
d'employeurs et au travail à temps partagé contrairement à
ce que laissaient entendre les déclarations du Gouvernement.
M. Jacques Machet
a souligné que le coût financier du
projet de loi était estimé entre 80 et 100 milliards de
francs et que les partenaires sociaux s'opposaient au principe d'une
contribution à ce financement.
En réponse aux différentes questions des intervenants,
M.
Adrien Bedossa
a déclaré que deux branches signataires
d'accords sur la réduction du temps de travail, celle des experts
comptables et celle des agents d'assurance, comprenaient respectivement 40.000
et 30.000 salariés. Il a déclaré qu'il n'y avait pas eu
d'accord d'entreprise en expliquant ce phénomène par le lien
très fort qui unissait les entreprises et la branche dans ce secteur.
Il a confirmé que les entreprises du secteur des professions
libérales attendraient le plus possible avant de mettre en oeuvre la
réduction du temps de travail.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a observé que l'expérience
des accords signés et non repris dans le projet de loi invitait
effectivement ces entreprises à adopter un comportement attentiste.
Evoquant les allégements de charges,
M. Adrien Bedossa
a fait
part de son inquiétude que les entreprises de ce secteur soient exclues
du bénéfice de ces aides.
Il a constaté qu'il y avait une très forte demande en faveur de
dispositions particulières aux groupements d'employeurs, remarquant que
nombre d'entreprises souhaitaient partager une secrétaire ou un
informaticien.
En conclusion,
M. Adrien Bedossa
a déclaré qu'il ne
comprenait pas pourquoi le volet emploi avait été
abandonné dans le second texte relatif à la réduction du
temps de travail.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
et
M. Guy Fischer
ont
déclaré partager ce sentiment d'incompréhension.