N°
430
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 16 juin 1999
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi, MODIFIÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, portant création de l' Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires ,
Par M.
Jean-François LE GRAND,
Sénateur.
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Jean François-Poncet,
président
; Philippe François, Jean Huchon,
Jean-François Le Grand, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Marc Pastor, Pierre
Lefebvre,
vice-présidents
; Georges Berchet, Jean-Paul Emorine,
Léon Fatous, Louis Moinard,
secrétaires
; Louis
Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM.
Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean
Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye,
Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland
Courteau, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Marcel
Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Xavier Dugoin, Bernard
Dussaut
,
Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain
Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard,
Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis,
MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain
Journet, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Edmond Lauret, Gérard
Le Cam, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis
Mercier, Bernard Murat, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron,
Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult,
Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Jean-Jacques
Robert, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette
Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Henri Weber.
Voir les numéros :
Sénat
: Première lecture :
8, 204
,
et
T.A.
71
(1998-1999).
Deuxième lecture :
358
(1998-1999).
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1399, 1502
et T.A.
309
.
Environnement. |
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Le projet de loi qui nous est soumis en deuxième lecture résulte
d'un engagement pris par le ministre chargé de l'aviation civile lors de
l'annonce, le 23 septembre 1997, du lancement des travaux pour la construction
des deux nouvelles pistes sur l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle. Le
Gouvernement s'engageait à cette date dans la voie tracée par la
mission Douffiagues, à laquelle votre rapporteur a eu l'honneur
d'appartenir : celle de la création d'une autorité
indépendante pour contrôler les nuisances sonores,
préalable apparu comme nécessaire au développement du
trafic aérien.
Le texte présenté par le Gouvernement avait été
corrigé et enrichi par votre Haute Assemblée lors de la
première lecture : l'indépendance et les pouvoirs de
l'Autorité avaient été renforcés, son action
coordonnée avec celle des acteurs déjà en
place -notamment les commissions consultatives de l'environnement- et
un volet urbanistique avait été inséré, sur
proposition de votre rapporteur, pour améliorer l'information des
riverains potentiels des aéroports et doter l'administration d'outils
préventifs en cas d'extension ou de création de plans
d'exposition au bruit, pour éviter que ne s'accroisse le nombre de
personnes susceptibles d'être exposées aux nuisances sonores.
Tout en rendant hommage au travail du Sénat, l'Assemblée
nationale, si elle a conservé de nombreux apports de votre Haute
Assemblée -et notamment le principe d'un volet urbanistique-, a
sensiblement modifié le texte aujourd'hui à nouveau soumis
à l'examen de votre commission. En particulier, le mode de nomination
des membres de l'autorité a été revu, ses pouvoirs ont
été renforcés, le rôle et la composition des
commissions consultatives changées. De plus, les articles
intéressant le droit de l'urbanisme ont été
modifiés.
Votre rapporteur, après avoir rappelé succinctement les positions
respectives des deux assemblées en première lecture, vous
proposera ensuite, dans le cadre d'un dialogue qui se veut constructif avec
l'Assemblée nationale, d'adopter le texte du projet de loi avec un
certain nombre de modifications.
I. RAPPEL DE LA POSITION DU SÉNAT EN PREMIÈRE LECTURE
Un
accord de principe
En première lecture, le Sénat avait estimé que la
création de cette nouvelle autorité indépendante, attendue
par l'ensemble des parties concernées depuis que la mission Douffiagues
l'avait proposée en 1996, était nécessaire à la
pérennité et à la qualité de la concertation autour
des aéroports, en vue de mieux maîtriser les nuisances sonores. La
Haute Assemblée avait donc manifesté son accord sur le principe
du texte qui lui était soumis.
Une volonté d'instituer une autorité morale plus qu'un
organisme coercitif
Le Sénat était conscient du fait que les pouvoirs qui seraient
conférés à la nouvelle autorité seraient moins
étendus que ceux d'autres autorités administratives
indépendantes (le CSA, la COB, l'ART, ou la future Commission de la
régulation de l'électricité
1(
*
)
...) qui disposent d'un éventail
de pouvoirs allant d'un pouvoir réglementaire d'application à la
délivrance d'autorisations individuelles pour l'attribution de licences,
à l'arbitrage ou à la sanction administrative.
En effet, les missions dévolues en première lecture par le
Sénat à la nouvelle autorité (information, conciliation,
garantie de la fiabilité des mesures du bruit...), semblaient
répondre aux attentes des différents acteurs de voir mis en place
un tiers objectif, à l'autorité morale incontestable.
Pour autant, le Sénat avait renforcé, dans le cadre des pouvoirs
de médiation qu'il lui avait dévolus, les compétences de
cet organisme, en adoptant des amendements accroissant ses missions :
- d'information des riverains ;
- de recommandation aux pouvoirs publics ;
- de conciliation entre les parties en cas de désaccord sur
l'application d'engagements définis dans les "
chartes de
maîtrise de l'environnement sonore
".
Afin d'insister sur le renforcement de ce rôle de médiation et de
conciliation, le Sénat avait supprimé les termes, trop
restrictifs, de "
contrôle technique
" dans le nom de
l'autorité, pour faire de cette dernière
"
l'Autorité de régulation et de contrôle de
l'environnement sonore aéroportuaire
" (ARCESA).
Un souci d'améliorer le fonctionnement de l'autorité et
d'accroître ses garanties d'indépendance
Le Sénat avait clarifié le mode de nomination des membres de
l'Autorité. Pour renforcer les garanties d'indépendance de
celle-ci, il avait adopté des amendements inscrivant dans le texte de
loi des dispositions qui existent pour certaines autres autorités
indépendantes comme le CSA, l'ART ou la CNIL :
- une incompatibilité du statut de membre de l'autorité avec
la détention d'intérêts dans une entreprise
aéronautique ;
- une limite d'âge (65 ans) pour être nommé ;
- des dispositions précisant le montant du traitement des membres,
comme c'est le cas pour les autres autorités ;
- un statut et une obligation de confidentialité pour le personnel.
Le Sénat avait voulu une autorité forte, incontestée,
impartiale, disposant des moyens de son indépendance et
constituée de membres exerçant leur activité à
plein temps.
Dans un souci d'efficacité, le Sénat avait adopté des
amendements pour
mieux coordonner
les actions respectives de
l'autorité et des commissions consultatives de l'environnement, ce qui
lui paraissait d'autant plus important que ces dernières avaient vu leur
rôle et leurs moyens renforcés par le Sénat, à
l'article 2 du projet de loi, dans le respect, toutefois, des
prérogatives dévolues à l'autorité. En particulier,
le Sénat avait imposé que les commissions se réunissent
au moins une fois par an.
Un impératif : la prise en compte des problèmes de
santé humaine.
Le Sénat avait introduit, au sein de l'autorité, une personne
qualifiée en matière de
santé humaine
, à
côté des experts en matière acoustique et
aéronautique.
Une volonté : maîtriser l'urbanisme et mieux informer les
riverains.
Sur proposition de votre commission, le Sénat avait adopté en
première lecture trois articles additionnels dont deux reprenaient les
dispositions d'une proposition de loi
2(
*
)
déposée par votre
rapporteur, tendant à :
- informer clairement les riverains potentiels, à peine de
nullité du contrat de vente ou de location, lorsqu'un bien immobilier
qu'ils s'apprêtent à louer ou à acheter est situé
dans un plan d'exposition au bruit ;
- étendre cette obligation d'information au-delà du plan
d'exposition au bruit (jusqu'à la courbe isopsophique 69) , sous
peine de s'exposer au versement de dommages et intérêts ;
- instaurer une procédure conservatoire en matière de droit
de l'urbanisme, pour éviter que ne soient construites les zones
susceptibles d'être incluses, à court terme, à
l'intérieur du périmètre d'un plan d'exposition au bruit
en cours de révision ou d'élaboration.
Les principaux amendements de première lecture de votre Haute
Assemblée sont résumés dans l'encadré
ci-dessous :
AMENDEMENTS DE PREMIÈRE LECTURE DU SÉNAT
-
le titre du projet de loi
a été
modifié pour tenir compte du nouveau nom de l'autorité
(Autorité de régulation et de contrôle de l'environnement
sonore aéroportuaire) ;
-
la mission générale
de l'autorité a
été définie dès le premier article, créant
cet organe, et un délai de six mois après la promulgation de la
loi a été imposé pour la mise en place de
l'autorité ;
-
le mode de nomination
des membres de l'autorité a
été précisé, en confiant au Parlement la nomination
de deux membres et à un décret du Président de la
République celle des cinq autres membres, dont le Président et
les quatre experts. Concernant la qualification de ces membres, le Sénat
a introduit, parmi les experts, un expert en santé humaine. Pour
renforcer l'indépendance de l'autorité, le Sénat a
introduit une incompatibilité supplémentaire liée à
la détention, directe ou indirecte, d'intérêts dans une
entreprise de secteur de l'aéronautique, une limite d'âge de
65 ans pour la nomination des membres, la précision du montant du
traitement de ses membres et une obligation de confidentialité incombant
au personnel.
- le pouvoir de
recommandation concernant les mesures du bruit
sur
tous les aéroports a été étendu à la mesure
des nuisances sonores occasionnées par l'ensemble des activités
aéroportuaires et à la définition des indices de
mesure ;
- la fonction de " contrôle du respect des engagements
pris " sur les neuf principaux aéroports a été
transformée en
fonction " d'évaluation "
d'engagements qui n'ont pas de valeur juridique (chartes de l'environnement
sonore ), l'autorité devant rendre publics les résultats de
l'évaluation ;
- la mission d'évaluation a été accompagnée,
en cas de désaccord sur l'exécution des engagements, d'un
pouvoir de médiation et de conciliation
entre les parties,
conféré à l'autorité ;
- la mission de
diffusion des informations
sur les données
recueillies par les réseaux de mesure du bruit a été
étendue et précisée.
- dans un but de
coordination
des rôles entre
l'autorité et les commissions consultatives de l'environnement, le
Sénat a précisé que, dans le cadre de sa mission de
recommandation, l'autorité indépendante pouvait être saisie
par ces commissions, d'autre part, que ces commissions doivent transmettre
leurs propres recommandations à l'autorité. Le Sénat a, en
outre, confié aux commissions consultatives de l'environnement une
mission de coordination de la mise en oeuvre des chartes de l'environnement
sonore ;
- pour les dispositions relatives au
trafic
d'hélicoptères
, le ministre s'est vu confier, par
décret, un pouvoir de limitation au cas par cas du trafic ;
- en matière de
droit de l'urbanisme
, trois articles
additionnels, correspondant au texte d'une proposition de loi
déposée par votre rapporteur, ont été introduits
par le Sénat :
.
L'article 5 (nouveau) obligeant le vendeur ou le bailleur d'un bien
immobilier situé dans le périmètre d'un plan d'exposition
au bruit à
stipuler explicitement
, dans le contrat de vente ou de
location, la zone de bruit dans laquelle est situé le bien, sous peine
de nullité de l'acte ;
.
L'article 6 (nouveau) créant la même obligation pour les
biens immobiliers situés
dans un rayon élargi
par rapport
au plan d'exposition au bruit ;
.
L'article 7 (nouveau) permettant
d'anticiper une
révision
en cours de ce plan en prévoyant que le
préfet puisse, pour une durée maximale de deux ans,
étendre aux zones incluses dans le projet de plan, les prescriptions
d'urbanisme applicables à la zone C.