B. EXAMEN EN COMMISSION
La
commission s'est réunie le mercredi 12 mai 1999 afin d'examiner le
présent projet de loi.
A la suite de l'exposé du rapporteur,
M. Bertrand Delanoë
a
estimé que le présent projet de loi constituait un
élément parmi d'autres dans l'indispensable reconstitution du
lien entre les citoyens et le besoin de défense. Il a indiqué que
les propositions d'amendements qu'il avait soumises au rapporteur s'inspiraient
principalement du souci de favoriser cette nouvelle donne entre les citoyens et
les armées.
M. André Dulait
s'est demandé si la faculté
laissée à l'entreprise de rémunérer ou non le
salarié réserviste pendant ses périodes, ne
créerait pas une disparité entre les grandes entreprises d'une
part et les PME-PMI d'autre part. Par ailleurs, il a relevé que le
dispositif mis en place dans le cadre de la départementalisation des
services d'incendie et de secours pourrait peut-être inspirer, à
moyen terme, l'organisation des réserves.
M. Serge Vinçon
a relevé que les réservistes
bénéficiaient pendant leurs périodes de la qualité
de militaire et de la solde correspondante. Il a souligné que la
différence de situation entre les réservistes vis-à-vis de
leurs entreprises pourrait être corrigée en partie par la
signature de conventions entre les employeurs et le ministre de la
défense. Il a précisé par ailleurs, à l'attention
de
M. Xavier de Villepin, président, et de M. André
Dulait,
que l'adoption d'avantages fiscaux au profit des entreprises ou des
réservistes sur la base d'amendements parlementaires pourrait
présenter un intérêt indéniable mais risquait de se
heurter à l'irrecevabilité prévue à l'article 40 de
notre Constitution. Il a observé, par ailleurs, que le projet de loi
réalisait dans l'ensemble un équilibre satisfaisant entre les
intérêts du réserviste et ceux de l'employeur.
M. Jean-Luc Bécart
a estimé que le projet de loi
constituait un progrès certain dans la mesure où il apportait un
certain nombre de garanties financières et sociales pour le
réserviste, même s'il ne surmontait pas toutes les
difficultés relatives notamment aux conditions de
rémunération du réserviste. Il a indiqué toutefois
que le groupe communiste serait vraisemblablement conduit à s'abstenir
lors du vote sur ce texte compte tenu de son opposition à la
professionnalisation des armées dans le cadre de laquelle s'inscrivait
le projet de loi. Il a rappelé par ailleurs les inquiétudes que
lui inspirait cette réforme au regard du lien armées-Nation.
M. Xavier de Villepin, président
, a rappelé le soutien que
la commission avait apporté à la professionnalisation des
armées tout en indiquant que, dans ce cadre nouveau, il convenait de
réaffirmer le lien entre la Nation et les forces armées.
M. Hubert Durand-Chastel
s'est demandé si le projet de loi
contenait des dispositions prenant en compte la perspective d'une
défense européenne.
M. Serge Vinçon
a
observé à cet égard qu'il proposerait un amendement
prévoyant explicitement que les réservistes pourraient participer
à des opérations sur des théâtres extérieurs.
M. Paul Masson
s'est inquiété des moyens
budgétaires dévolus aux réserves en se demandant notamment
si les dotations, à ses yeux insuffisantes, prévues par la loi de
programmation dans ce domaine pouvaient être révisées
à la hausse.
M. Serge Vinçon
a estimé que la
crédibilité de la réserve opérationnelle pourrait
effectivement rendre nécessaire une augmentation des crédits.
M. Xavier de Villepin, président
, après avoir
évoqué la confusion du débat actuel sur la défense
européenne, a demandé des précisions sur les missions
confiées aux réservistes. Le rapporteur a indiqué que la
réserve opérationnelle pourrait participer à toutes les
activités militaires, y compris à des opérations
extérieures, dans la mesure où le concept d'emploi des
réserves s'identifiait désormais complètement au concept
d'emploi des forces d'active.
La commission a alors abordé l'examen de
l'article premier
.
M. Serge Vinçon
a d'abord proposé un amendement
tendant à une nouvelle rédaction de la première phrase du
premier alinéa de cet article afin de revenir aux termes de l'article L.
111-1 de la loi portant réforme du service national qui prévoit
que " les citoyens concourent à la défense de la
Nation ". Il a relevé en effet, d'une part, que les principes
posés par les deux lois avaient le même objet et appelaient en
conséquence une rédaction identique, d'autre part, que le choix
d'un libellé commun dans les deux textes réaffirmait la
cohérence de l'oeuvre législative entreprise pour réformer
les armées et, enfin, que le choix de termes plus contraignants que ceux
retenus pour la loi sur le service national contredisait le souci
affirmé par le gouvernement de placer le volontariat au coeur du
système des réserves.
M. Bertrand Delanoë
a
regretté, pour sa part, que ne soit plus fait référence
à la notion de devoir.
M. Serge Vinçon
a observé
que la formulation proposée s'inscrivait en cohérence avec la
réforme de notre défense. La commission a alors adopté
l'amendement du rapporteur.
M. Serge Vinçon
a ensuite proposé un amendement,
adopté par la commission, rappelant le caractère volontaire de
l'adhésion aux réserves en indiquant, à la deuxième
phrase du premier alinéa, que le devoir posé au premier
alinéa " peut " s'exercer par des activités dans la
réserve. Sur une proposition de
M. Bertrand Delanoë
reprise
par le rapporteur, la commission, après un échange de vues entre
M. Serge Vinçon et M. Paul Masson
, a alors adopté un
amendement tendant à insérer un nouvel alinéa après
le premier alinéa de cet article, qui rappelle que la réserve
s'inscrit dans un parcours citoyen qui débute avec l'enseignement de la
défense et se poursuit avec la participation au recensement, l'appel de
préparation à la défense, la préparation militaire
et le volontariat. L'amendement précise aussi que ce parcours continu
doit permettre à tout Français d'exercer son droit à
contribuer à la défense de la Nation.
La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur,
complété par M. Bertrand Delanoë, et visant à
indiquer au deuxième alinéa de l'article premier, que la
réserve a aussi pour objet d'entretenir l'esprit de défense et de
contribuer au lien armées-Nation.
M. Serge Vinçon
a ensuite proposé deux amendements tendant
à modifier les termes de " première réserve" et
" deuxième réserve " en adoptant respectivement les
dénominations de " réserve opérationnelle " et
de " réserve citoyenne ". Il a en effet noté que ce
choix permettait d'affirmer d'emblée la vocation propre de ces deux
composantes et qu'il avait pour mérite également de valoriser la
deuxième réserve dont l'image ne ressortait pas clairement du
dispositif qui lui était consacré dans le projet de loi. Il a
souligné que la deuxième réserve n'avait évidemment
pas l'exclusivité de la vocation citoyenne -dimension également
présente dans la réserve opérationnelle.
M. Bertrand
Delanoë
a alors approuvé le principe d'une modification de la
désignation des deux composantes de la réserve. Il a
estimé que les propositions du rapporteur soulignaient le
caractère propre de chacun de ces ensembles tout en suggérant,
avec
M. Robert del Picchia
, que la réserve opérationnelle
puisse également bénéficier du qualificatif de
" citoyenne ". Le rapporteur a souligné la difficulté
de trouver des dénominations sur lesquelles chacun puisse s'accorder. Il
a rappelé que dans le cadre de la réserve opérationnelle,
l'activité des réservistes qui avaient alors le statut de
militaire, était tournée vers la défense de la Nation. Il
a ajouté que la deuxième réserve dont la
désignation était assez peu valorisante avait pour vocation
première le lien armées-Nation.
M. Paul Masson
a alors
proposé la désignation de " réserve
générale " pour la deuxième réserve.
M. Xavier de Villepin, président,
a indiqué que les
termes proposés par le rapporteur pour la deuxième réserve
définissaient bien le rôle de cette composante. Il a ajouté
que le débat en séance publique permettrait d'expliciter les
désignations proposées par la commission et de souligner
notamment que la réserve opérationnelle avait évidemment,
elle aussi, le caractère d'une réserve citoyenne. La commission a
alors adopté les deux amendements du rapporteur.
Dans le troisième alinéa de
l'article premier
la
commission a adopté un amendement du rapporteur tendant à
indiquer que la réserve opérationnelle se composait de
volontaires et " en fonction des besoins des armées ",
d'anciens militaires afin de souligner que la réserve
opérationnelle avait vocation à réunir principalement des
volontaires. Il convenait en effet, a précisé
M. Serge
Vinçon
, de conjurer le risque que se constitue une réserve
principalement formée de disponibles coupés de la nation, et
utilisables dans des conditions trop limitatives.
Au quatrième alinéa de cet article, la commission a
adopté, sur la proposition du rapporteur, un amendement
rédactionnel permettant de viser plus simplement l'engagement pour
servir dans la première réserve prévu à l'article 7
du projet de loi. Elle a ensuite examiné un amendement du rapporteur
tendant à l'insertion d'un dernier alinéa à
l'article
premier
afin de reconnaître aux entreprises la faculté de
conclure avec le ministre de la défense des conventions et de leur
permettre de recevoir, quand elles favorisent la mise en oeuvre du projet de
loi, la qualité de partenaire de la défense. Un échange de
vues sur le choix du verbe " favoriser " s'est alors engagé
entre
M. Paul Masson
qui privilégiait le verbe
" faciliter ",
M. Jean-Guy Branger
qui proposait le terme
" contribuer " et
MM. Serge Vinçon et Bertrand
Delanoë,
qui souhaitaient que soit conservée la
rédaction initiale de l'amendement. La commission a alors adopté
l'amendement dans les termes proposés par le rapporteur, puis
l'article premier
ainsi modifié.
Après avoir adopté conformes les
articles 2 et 3
du projet
de loi, sous réserve de la modification de désignation de la
première réserve, la commission a examiné à
l'article 4
, un amendement du rapporteur tendant à supprimer la
limite d'âge générale de soixante ans fixée à
l'activité des réservistes afin que ne soient conservées
que les limites d'âge prévues par le statut général
des militaires augmenté de cinq ans. Elle a adopté cet amendement
puis
l'article 4
ainsi modifié.
Après avoir adopté
l'article 5
sous réserve du
changement de dénomination retenu pour la première
réserve, la commission a adopté, à l'article 6, un
amendement du rapporteur tendant à permettre également que soient
agréées par l'autorité militaire les activités
bénévoles dont l'initiative pouvait revenir aux
réservistes et à leurs associations. La commission a alors
adopté
l'article 6
ainsi modifié. Elle a ensuite
examiné un amendement présenté par M. Bertrand
Delanoë et repris par le rapporteur, tendant à insérer
un
article additionnel après l'article 6
instituant une journée
nationale du réserviste.
M. Bertrand Delanoë
a
indiqué que cette initiative permettrait d'une part, de donner une forme
concrète à la reconnaissance que la Nation doit aux
réservistes et d'autre part, de faire mieux connaître les
réserves à nos concitoyens.
M. Paul Masson
a
proposé que cet article additionnel figure à la fin du projet de
loi, juste avant l'article 49. La commission a alors décidé de
reporter le vote sur cet article, après l'examen de l'article 48.
A
l'article 7
, la commission a examiné un amendement du
rapporteur prévoyant explicitement que le renfort temporaire
apporté par les réservistes aux forces armées inclut la
participation à des opérations sur des théâtres
extérieurs.
M. Paul Masson
a souhaité que cet amendement
n'ait pas pour effet d'interdire, a contrario, que l'entraînement ou la
formation des réservistes se déroule hors de nos
frontières. Tenant compte de ces observations, la commission a alors
adopté un amendement tendant à compléter
l'article
7
par un alinéa indiquant que les missions confiées aux
réservistes peuvent s'exercer en dehors du territoire national. Elle a
alors adopté
l'article 7
ainsi modifié puis, sous
réserve de changement de désignation pour la première
réserve,
l'article 8
sans autre modification.
A
l'article 9
, la commission a adopté un amendement du rapporteur
tendant à reprendre les termes du premier alinéa de l'article 11
pour former un nouvel alinéa au début de cet article afin que
l'absence de droit de cinq jours prévue par l' article 9, soit
intégrée dans la durée normale des activités
à accomplir au titre de l'engagement pour servir dans la première
réserve. Elle a alors adopté
l'article 9
ainsi
modifié.
A
l'article 10
la commission a adopté un amendement du rapporteur
indiquant que le refus de l'employeur à une demande d'absence du
salarié réserviste devait aussi être notifié
à l'autorité militaire. Elle a adopté
l'article 10
ainsi modifié.
A
l'article 11
elle a adopté un amendement du rapporteur tendant
à supprimer le premier alinéa de cet article dans la mesure
où il avait été repris à l'article 9 ainsi qu'un
deuxième amendement tendant à limiter l'ensemble des
activités dans la réserve à une durée de 120 jours
afin que les prolongations d'activité permises par l'article 11 au
titre de l'emploi opérationnel des forces et de l'encadrement de la
préparation militaire ne puissent se cumuler. La commission a alors
adopté
l'article 11
ainsi modifié.
Sous réserve du changement de dénomination de la première
réserve, la commission a alors adopté les
articles 12 à
15
sans autre modification.
La commission a alors examiné
l'article 16
qui avait pour objet
de permettre à la gendarmerie nationale de faire appel à tout ou
partie de ses réservistes soumis à l'obligation de
disponibilité afin de faire face à des troubles ou des menaces de
troubles graves à l'ordre public.
M. Paul Masson
s'est
interrogé sur la nécessité de telles dispositions au
regard des moyens dont disposait déjà le gouvernement en la
matière dans le cadre notamment de l'ordonnance du 7 janvier 1959.
M.
Serge Vinçon
a rappelé que ces dispositions reprenaient la
teneur d'un décret n° 58-454 du 18 mai 1958 dont la base
légale avait toutefois disparu à la suite de l'abrogation de la
loi du 31 mars 1928. La commission, suivant l'avis de son rapporteur, a alors
supprimé cet article afin de le réintroduire après
l'article 17
dans la mesure où celui-ci fixe un principe d'emploi
pour l'ensemble des disponibles et qu'il est préférable, par
souci de logique, de procéder du général au particulier.
Ainsi, après avoir adopté
l'article 17
sans modification,
la commission a adopté un amendement du rapporteur tendant à
insérer un article additionnel reprenant les termes de l'article 16.
Avant l'article 18
la commission a voté, sur la proposition du
rapporteur, un article additionnel dont la rédaction a été
complétée par
M. Bertrand Delanoë
afin de
définir les missions de la réserve citoyenne, cette
dernière ayant pour objet d'entretenir l'esprit de défense, de
renforcer les liens entre les forces armées et la Nation et de fournir,
dans les conditions prévues à l'article 19, les renforts
nécessaires à la première réserve.
A
l'article 18
, la commission a adopté un amendement du
rapporteur indiquant que la réserve citoyenne comprend des volontaires
qui n'ont pas reçu d'affectation au sein de la première
réserve afin de laisser aussi la faculté, pour certains
volontaires, de faire le choix d'appartenir à la réserve
citoyenne. La commission a alors adopté
l'article 18
puis,
à l'exception du changement de dénomination pour la
première réserve et la deuxième réserve,
l'article 19
sans autre modification.
A
l'article 20
, la commission a adopté un amendement du
rapporteur prévoyant que, outre une prime de fidélité, les
réservistes pouvaient bénéficier d'autres mesures
incitatives dans des conditions prévues par décret. La commission
a alors adopté l'article ainsi modifié, puis sous réserve
du changement de dénomination pour la première réserve,
les
articles 21 à 38
sans autre modification.
A
l'article 39
, la commission a adopté un amendement du
rapporteur portant sur le nouvel article L. 122-24-5 du code du travail tendant
à revenir aux termes mêmes de l'article 23 du projet de loi selon
lesquels l'employeur ne peut résilier un réserviste en raison des
absences résultant de l'application de la loi. En cohérence la
commission a adopté un amendement à l'article L. 122-24-7 tendant
à supprimer la mention " à la faute grave " comme motif
de licenciement. A l'article L. 122-24-10, en cohérence avec
l'amendement adopté à l'article 10, la commission a adopté
un amendement du rapporteur tendant à inscrire l'obligation de
notification à l'autorité militaire du refus de l'employeur, dans
le code du travail. La commission a alors adopté
l'article 39
ainsi modifié, puis sous réserve du changement de
dénomination retenue pour la première réserve, les
articles 40 à 45
.
A
l'article 46
, la commission a adopté un amendement tendant
à compléter l'article L. 121-1 du Livre Ier du code du service
national afin de rendre possible le fractionnement du volontariat militaire si
la nature de l'activité le permet. Le rapporteur a relevé
à cet égard qu'en encourageant le volontariat le fractionnement
permettrait de mieux faire connaître les armées aux jeunes
Français et pourrait ainsi leur inspirer le souhait de maintenir un lien
avec la défense sous la forme d'un engagement dans la réserve. La
commission a alors adopté
l'article 46
ainsi modifié, puis
sur proposition du rapporteur,
l'article 47
également
modifié après avoir voté un amendement tendant, en
cohérence avec l'amendement précédent, à faire
reconnaître le volontariat fractionné dans le cadre du statut
général des militaires. La commission a ensuite adopté
l'article 48
sans modification, puis un
article additionnel
instituant la journée nationale du réserviste, et enfin
l'article 49
sans modification.
La commission a alors adopté l'ensemble du projet de loi portant
organisation de la réserve militaire et du service de défense,
ainsi amendé.