CHAPITRE III :
LES GROUPEMENTS LOCAUX
D'ÉPARGNE
ARTICLE 8
L'objet et le statut des groupements
locaux d'épargne
Commentaire : Le présent article précise la
nature et l'objet des groupements locaux d'épargne. Les GLE seront des
sociétés coopératives chargées de favoriser la
détention la plus large du capital des caisses d'épargne en
animant le sociétariat.
Le présent article révèle la véritable nature des
groupements locaux d'épargne : dénués d'objet
économique, les GLE seraient de simples structures de portage du capital
des caisses d'épargne permettant la mutualisation immédiate de
ces dernières.
Si le présent article précise en effet que les GLE sont des
sociétés coopératives soumises aux dispositions de la loi
du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, il dispose dans
son troisième alinéa qu'ils ne peuvent faire d'opérations
de banque et qu'ils sont dispensés de l'immatriculation au registre du
commerce et des sociétés.
Ils sont ainsi privés d'objet social, par dérogation à
l'article premier de la loi de 1947 précitée qui suppose une mise
en commun des moyens et une activité exercée au sein de la
coopérative. La mission de favoriser la détention la plus large
du capital de la caisse d'épargne à laquelle ils sont
affiliés en animant le sociétariat ne saurait, en effet, entrer
dans les missions d'une coopérative telles qu'elles sont définies
à l'article premier précité.
Votre rapporteur a par ailleurs rappelé dans le commentaire de l'article
4 combien les arguments avancés par le gouvernement pour justifier la
création des GLE étaient dénués de fondement. Le
placement direct des parts sociales des caisses d'épargne auprès
des sociétaires lui semble de bien meilleure politique et serait seul de
nature à créer une véritable
affectio societatis
entre les caisses d'épargne et leurs futurs sociétaires. Les
caisses d'épargne ne seraient en outre pas entravées pour tisser
des liens de partenariat en capital avec d'autres établissements
financiers.
Enfin, il n'y aurait pas de problème de correspondance entre la
rémunération des parts sociales des caisses d'épargne et
celle des parts sociales des GLE. Observons que ce problème a
donné l'occasion aux députés d'adopter un amendement au
présent article tendant à préciser que le niveau de la
rémunération des parts sociales des groupements locaux
d'épargne était fixé par l'assemblée
générale de la caisse d'épargne à laquelle ces GLE
sont affiliés.
On peut sérieusement douter de la conformité de cette
disposition à la loi du 10 septembre 1947.
En effet, on ne voit pas
comment l'assemblée générale d'une société
coopérative pourrait s'arroger le droit de fixer le niveau de
rémunération des parts sociales d'une autre
coopérative ! Une telle disposition ne fait que prouver une fois de
plus, s'il en était besoin, que les GLE sont des coquilles vides
simplement destinées à porter le capital des caisses
régionales d'épargne.
Votre commission vous proposera donc de supprimer les GLE, sources
d'inutiles complications, et de confier la mission d'animation du
sociétariat au niveau local à des
sections locales
d'épargne
. L'article 10 de la loi du 10 septembre 1947
précitée permet en effet aux sociétés
coopératives qui l'auraient prévu dans leurs statuts, de
répartir leurs associés en sections délibérant
séparément dont les délégués formeraient
l'assemblée générale de la coopérative.
Les sections locales auraient deux points communs avec les groupements locaux
d'épargne :
- leur mission consisterait à favoriser la détention la plus
large du capital social des caisses d'épargne en animant le
sociétariat ;
- elles devraient rassembler au moins 500 sociétaires personnes
physiques ou 10 sociétaires personnes morales (voir commentaire de
l'article 25).
On observera que cette solution est celle qui avait initialement la faveur de
Raymond Douyère, avant que le député ne se laisse
convaincre de la nécessité de créer une structure à
capital variable entre les caisses d'épargne et les sociétaires,
pour permettre aux caisses qui le souhaiteraient de demeurer à capital
fixe pour pouvoir émettre des certificats coopératifs
d'investissement (voir sur ce sujet le commentaire de l'article 21).
Il écrit ainsi dans son rapport au premier ministre :
" La section locale, circonscription électorale et lieu de
débat, si elle pâtit de l'inconvénient d'une plus grande
abstraction quant à l'exercice des pouvoirs du sociétariat,
présente en contrepartie l'avantage de sa souplesse et de sa
simplicité de mise en oeuvre. Elle correspond en outre davantage au
souhait de renforcer la dimension régionale des caisses en mettant en
évidence la solidarité des sociétaires au sein de la
caisse régionale.
Les assemblées locales, dont le rôle pourra être plus ou
moins fort selon la volonté de décentralisation exprimée
par le réseau, contribueraient à préparer les
assemblées générales qui se tiendraient au niveau de la
caisse régionale, ce qui permettrait d'éviter les
assemblées générales trop nombreuses, donc ingouvernables,
ou trop restreintes, donc peu représentatives. "
Sur les caisses locales - prémices des GLE - dont il avait
envisagé la création pour les caisses d'épargne, le
député écrit :
" La mise en place des caisses locales serait une organisation lourde.
En effet, celles-ci doivent être dotées de la personnalité
morale. Cela suppose que le sociétariat soit organisé au niveau
de la caisse locale pour dévolution d'une part des fonds propres de la
caisse régionale. Si cette attribution de pouvoirs effectifs à un
niveau proche et concret a le mérite d'être valorisante et
mobilisatrice pour les sociétaires, elle impose un schéma
complexe dont il n'est pas certain qu'il soit le mieux à même de
garantir le dynamisme et le développement de la caisse régionale.
Au demeurant, il présente l'inconvénient de démultiplier
le problème de la constitution du sociétariat de départ
par le nombre de caisses locales, puisque les sociétaires seraient
propriétaires des caisses locales qui elles-mêmes
détiendraient les caisses régionales. "
Décision de la commission : votre commission vous propose de
supprimer la division " chapitre III " et son intitulé, et
d'adopter le présent article ainsi amendé.
ARTICLE 9
Le sociétariat des groupements
locaux d'épargne
Commentaire : Le présent article définit les
personnes autorisées à souscrire les parts sociales des
groupements locaux d'épargne créés à l'article
précédent.
Pourront être sociétaires de GLE en vertu du présent
article :
- les
clients
de la caisse d'épargne à laquelle le GLE est
affilié, c'est-à-dire les personnes physiques ou morales ayant
effectué avec elle une des opérations visées aux articles
1
er
, 5, 6 et 7 de la loi bancaire de 1984 ;
- les
salariés
de la caisse d'épargne à laquelle le
GLE est affilié ; ils pourront bénéficier de
conditions préférentielles d'acquisition des parts sociales en
vertu de l'article 23 du présent projet de loi ;
- les
collectivités territoriales
; toutefois, ces
dernières ne pourront détenir plus de 10 % du capital de
chacun des GLE (pourcentage porté à 20 % par le
député Jean-Pierre Brard) ;
-
toutes les autres personnes
physiques ou morales qui, sans être
nécessairement clientes des caisses d'épargne,
entendent
contribuer par l'apport de capitaux à la réalisation des
objectifs des caisses d'épargne
. L'article 3
bis
de la loi du
10 septembre 1947 portant statut de la coopération précise
toutefois que ces personnes ne peuvent détenir ensemble plus de
35 % du total des droits de vote.
Par cohérence avec les amendements de suppression des GLE qu'elle vous
propose, votre commission vous proposera de supprimer le présent
article. Votre rapporteur souligne toutefois que les personnes
évoquées au présent article pourront, dans le
schéma proposé par votre commission, devenir les
sociétaires directs des caisses d'épargne.
Décision de la commission : votre commission vous propose de
supprimer le présent article.