EXAMEN EN COMMISSION

La commission a procédé, sous la présidence de M. Bernard Angels, vice-président, à l' examen du rapport de M. Jean-Philippe Lachenaud sur la proposition de résolution n° 197 (1998-1999), présentée par M. Marcel Deneux, en application de l'article 73 bis du règlement sur les propositions de directives du Parlement européen et du Conseil :

- concernant l'accès à l'activité des institutions de monnaie électronique et son exercice, ainsi que la surveillance prudentielle de ces institutions ;

- modifiant la directive 77/780/CEE visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l' accès à l'activité des établissements de crédits et son exercice (n° E-1158).

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur, a expliqué que les propositions de directive de la Commission européenne poursuivaient l'objectif de doter les institutions de monnaie électronique d'une réglementation spécifique, en matière de surveillance prudentielle en particulier. Il a précisé que ces textes soulevaient des problèmes importants sur certains points mis en exergue avec pertinence par la proposition de résolution de M. Marcel Deneux, et a ajouté que la proposition de résolution qu'il présentait à la commission rejoignait les analyses de la délégation du Sénat pour l'Union européenne mais aboutissait à une conclusion plus tranchée.

Il a expliqué que les propositions de directive couvraient une seule catégorie de monnaie électronique : les porte-monnaie électroniques qui se présentent sous la forme d'une carte à puce prépayée et qui ont un usage multiprestataire, ce qui les distingue de la carte téléphonique qui a une vocation monoprestataire. Les perspectives de développement des porte-monnaie électroniques sont assez importantes pour nécessiter une réglementation prudentielle.

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur, a indiqué que la France connaissait un retard en matière de monnaie électronique, bien que ses positions soient assez favorables dans la technologie et l'utilisation de la carte bancaire. Il a fait état des trois expériences de porte-monnaie électroniques qui sont aujourd'hui en cours de développement en France : le projet Modeus, celui de la société européenne de monnaie électronique (SEME), et enfin celui de la société, d'origine britannique, Mondex.

Il a précisé que les institutions communautaires avaient travaillé sur le sujet de la monnaie électronique depuis plusieurs années. L'Institut monétaire européen (IME) a publié un rapport sur le sujet en 1994. Puis, la Commission européenne, dans une communication d'avril 1997 relative à une initiative européenne pour le commerce électronique, avait pris l'engagement de constituer un cadre de surveillance approprié pour la monnaie électronique. La Banque centrale européenne (BCE) a élaboré son propre rapport en août 1998, dans lequel elle estime que l'émission de monnaie électronique doit être réservée aux établissements de crédit définis par la directive 77/780/CEE du Conseil du 12 décembre 1977 visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant l'accès à l'activité des établissements de crédit et son exercice, dite "première directive bancaire". Enfin, la Commission européenne a présenté, le 21 septembre 1998, deux propositions de directive qui font l'objet du présent examen. Le rapporteur a indiqué que les Etats membres avaient des positions différentes sur ce sujet, certains, comme le Royaume-Uni, le Luxembourg ou la Suède, étant opposés à toute réglementation, d'autres, comme la Belgique, l'Italie, l'Espagne ou le Portugal, adoptant une position rigoriste, d'autres, enfin, dont la France et l'Allemagne, étant favorables à un compromis sur la base du texte de la Commission.

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur, a considéré que les propositions de la Commission européenne nécessitaient un réexamen approfondi, estimant que quatre points posent problème. Il a d'abord jugé que la définition de la monnaie électronique donnée par la proposition de directive n'était pas acceptable en l'état, car elle laisse supposer que la monnaie électronique constitue à elle seule un nouveau type de monnaie, alors qu'elle n'est que la forme électronique de la monnaie scripturale. Il a ensuite considéré que la sécurité des transactions n'était pas assurée, les exigences imposées aux émetteurs de monnaie électronique en matière de fonds propres et de capital initial, dérogatoires au droit commun, entraînant un affaiblissement des normes prudentielles. En outre, les exemptions prévues pour les petits systèmes risquent de rendre inopérante la lutte contre d'éventuels abus, en raison de contrôles " allégés ". Il a également estimé que la protection du consommateur n'était pas suffisamment prise en considération, les émetteurs de monnaie électronique n'étant pas soumis aux règles édictées par la Commission européenne sur la garantie des dépôts. Enfin, il a indiqué que le risque pour les systèmes de paiement eux-mêmes - le risque systémique - était sous-estimé, l'émission de monnaie électronique pouvant avoir une conséquence sur la conduite de la politique monétaire.

M. Jean-Philippe Lachenaud, rapporteur, a ainsi proposé à la commission de demander au gouvernement de rejeter la proposition de directive de la Commission européenne relative à la monnaie électronique et de faire insérer les dispositions nécessaires à la réglementation de l'activité d'émission de monnaie électronique dans la directive 77/780/CEE, de manière à ce que cette activité soit couverte par les règles prévues par ladite directive pour les établissements de crédit.

Il a en effet considéré qu'il n'était pas acceptable de prévoir une réglementation sui generis strictement réservée aux institutions de monnaie électronique qui seraient ainsi érigés, sans véritable motif, en établissements relevant d'un statut propre distinct de celui des établissements de crédit. Il a convenu de la nécessité de réglementer l'activité des émetteurs de monnaie électronique, mais en la réservant aux établissements de crédit définis par la première directive bancaire.

Il a cependant précisé que sa proposition de résolution tendait à renforcer le gouvernement dans les négociations qu'il aurait à conduire sur ce sujet au sein du conseil des ministres de l'Union européenne.

M. Bernard Angels, vice-président, MM. Yann Gaillard et M. Jacques Chaumont, se sont déclarés convaincus par ces propos, et ont indiqué s'en remettre en l'état aux conclusions de la proposition de résolution du rapporteur.

La commission ayant adopté la proposition de résolution présentée par le rapporteur, M. Bernard Angels, président , a indiqué que le délai limite pour le dépôt auprès du secrétariat des amendements à la proposition de résolution adoptée par la commission, était fixé au mardi 6 avril 1999 à midi.

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