II. RAPPORT ANNEXÉ À L'ARTICLE PREMIER PROPOSÉ PAR LA COMMISSION
Un
projet de loi de financement de la sécurité sociale se doit
d'être prudent et convaincant dans les équilibres qu'il traduit,
abouti dans les analyses qu'il avance, cohérent dans les propositions
qu'il formule.
Compte tenu des enjeux actuels de la protection sociale, le projet de loi de
financement pour 1999 doit comporter des orientations claires.
Pour l'utilisation des marges disponibles à l'adaptation de l'offre
de soins.
Comme l'estime le Conseil d'administration de la CNAMTS, il convient d'utiliser
les marges disponibles pour adapter l'offre de soins, plutôt que de se
contenter d'accompagner l'évolution des dépenses. Aussi, est-il
proposé de réduire d'un milliard de francs, par rapport à
l'évolution retenue initialement, le montant de l'ONDAM, et d'affecter
ces crédits à l'accompagnement social des opérations de
restructuration hospitalière.
Pour la mise en place de mécanismes de régulation des
dépenses simples, médicalisés et efficaces.
En matière de régulation des dépenses médicales, le
dispositif de reversements en vigueur, issu des ordonnances Juppé,
posait problème. Alors que le Gouvernement souhaite aller jusqu'au bout
de la régulation comptable et collective que ce dispositif comportait,
il est proposé au contraire d'aller jusqu'au bout de l'individualisation
de la responsabilité des médecins à laquelle il faisait
aussi appel.
Ainsi, tirant les leçons du passé, il est proposé
d'instituer un mécanisme simple, médicalisé et efficace de
maîtrise des dépenses. Collectivement organisé par les
partenaires conventionnels, il laisse les médecins maîtres de
déterminer les conditions d'exercice de leur responsabilité
individuelle.
Garantissant le respect des objectifs tout en organisant l'amélioration
des pratiques médicales individuelles et collectives, il répond
au double souci de favoriser la qualité des soins dont
bénéficient les français et d'en limiter le coût.
Il tourne le dos aux usines à gaz comptables proposées par le
Gouvernement.
Améliorer les conditions de la maîtrise des dépenses
pharmaceutiques et le bon usage des médicaments dans des conditions
compatibles avec le développement industriel, de la recherche et de
l'emploi, et non entériner la mort de la politique conventionnelle : tel
doit également être l'objectif poursuivi par le projet de loi. Il
s'agit d'améliorer cette politique conventionnelle en renforçant
ses exigences pour les laboratoires dans le cadre d'un objectif opposable de
dépenses pharmaceutiques défini annuellement par le gouvernement
en fonction de l'ONDAM.
Sans rejeter le principe de la taxation, ni son assiette, ni son taux, le
projet de loi doit en faire un instrument encourageant les entreprises à
accepter une régulation conventionnelle sérieuse.
Pour un projet cohérent et complet sur les retraites.
S'il convient de prendre acte de la mesure " symbolique " que
constitue la création d'un fonds de réserve pour les retraites
par répartition, il est inutile de " faire semblant ", en
attribuant à ce fonds un embryon de ressources, en peaufinant la
composition d'un Comité de surveillance ou en précisant les
régimes bénéficiaires.
Alors même que restent parfaitement indéterminés à
la fois la nature des " vraies " ressources qui l'alimenteront et qui
devront se chiffrer en centaines de milliards de francs, l'affectation de ces
fonds, leur mode et leur horizon de placement ou enfin les modalités de
gestion qui devront être cohérentes tant avec l'origine des
ressources qu'avec l'objectif des emplois.
En revanche, la mise en place d'un tel fonds de réserve relève,
à l'évidence, d'un texte d'ensemble, cohérent et complet,
incluant des mesures permettant de faire cesser les déficits
d'aujourd'hui, de clarifier la situation des régimes spéciaux et
de définir un véritable régime des fonctionnaires de
l'Etat.
Pour un traitement équitable de la branche famille.
La situation financière excédentaire de la branche famille ne
justifie aucunement de nouvelles économies : en conséquence, doit
être rejeté le décalage de la majoration d'âge pour
les allocations familiales qui n'a aucun fondement au regard des objectifs de
la politique familiale.
Afin de souligner le poids des charges indues pesant sur la branche famille au
titre des prestations qu'elle gère pour le compte de l'Etat, il est
proposé un abattement d'un milliard de francs sur les frais de gestion
de la CNAF au titre de la gestion et du contrôle du RMI.
Pour l'affirmation sans ambiguïté de la compensation
intégrale des exonérations de cotisations.
Doit être réaffirmé solennellement le principe, posé
par la loi du 25 juillet 1994, de la compensation intégrale pour la
sécurité sociale des exonérations de charges sociales
postérieures à cette loi. Ce principe est l'un des fondements de
la clarification indispensable des relations et des responsabilités
entre l'Etat et les régimes sociaux.
La remise en cause de ce principe est inacceptable, que ce soit pour :
- les exonérations de cotisations dans le cadre d'incitation
à la réduction du temps de travail, au nom d'une prétendue
" neutralité " de la mesure ;
- les dispositifs, antérieurs à 1994 et donc non
compensés, qui sont prorogés au-delà de leur
échéance et modifiés, telle l'exonération des
charges liée à l'embauche d'un premier salarié ;
dès lors qu'il y a novation juridique, il doit y avoir compensation
intégrale de ces nouvelles exonérations en application de la loi
de 1994 ;
- les dispositifs, également antérieurs à la loi de
1994, dont le taux d'exonération est fortement majoré, telle
l'exonération portée de 30 % à 100 % pour les
associations d'aide à domicile ; ces exonérations doivent
être compensées à hauteur de la majoration du taux.
Pour une vraie taxe de santé publique sur les tabacs.
Conformément aux objectifs de la politique de santé publique, il
est proposé de substituer à une majoration du taux de la taxe sur
les tabacs en l'état sans affectation précise, une " taxe de
santé publique " directement affectée à la CNAMTS.
Pour un projet de loi de financement rectificatif tirant les
conséquences d'un projet initial incertain.
Le respect de la lettre comme de l'esprit de la loi organique voudrait que le
Gouvernement soumette au Parlement, à la fin du printemps, un projet de
loi de financement rectificatif de la sécurité sociale pour 1999 :
- tirant, d'une part, les conséquences sur les équilibres de
la sécurité sociale des réformes urgentes que le
Gouvernement renvoie au premier semestre de l'année prochaine :
mesures structurelles indispensables dans le domaine des retraites dont il est
nécessaire qu'elles interviennent dès le début de 1999,
projet de loi instituant une couverture maladie universelle dont le
dépôt doit intervenir avant la fin de l'année,
réforme de l'assiette des cotisations employeurs sur laquelle le
Gouvernement annonce qu'il arrêtera sa position dans les semaines qui
viennent ;
- faisant le point, d'autre part, sur l'évolution des
dépenses et des recettes au vu, notamment, de l'évolution de la
conjoncture, il ne serait guère acceptable qu'une nouvelle fois le
Parlement ne soit saisi d'une dérive des comptes qu'à l'occasion
de la seule ratification en fin d'année d'un décret majorant le
plafond de recours à l'emprunt par les régimes de
sécurité sociale.
Pour une réflexion sur l'évolution des lois de financement.
La réforme constitutionnelle de 1996, instituant les lois de financement
de la sécurité sociale, constitue un progrès
considérable et l'amorce d'une évolution profonde. A l'occasion
de l'examen du troisième projet de loi depuis cette réforme, il
apparaît que cet instrument est perfectible et qu'une réflexion
doit être menée tendant à une amélioration de la
présentation des lois de financement et, au-delà d'une
multiplication vaine des annexes, de la qualité et de la
cohérence des informations fournies au Parlement.