Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999

DESCOURS (Charles)

RAPPORT 90 (98-99) - COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Table des matières




N° 90

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 1 er décembre 1998

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 , ADOPTÉ AVEC MODIFICATIONS PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN NOUVELLE LECTURE,

Par M. Charles DESCOURS,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean Delaneau, président ; Jacques Bimbenet, Louis Boyer, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, Louis Souvet, vice-présidents ; Mme Annick Bocandé, MM. Charles Descours, Alain Gournac, Roland Huguet, secrétaires ; Henri d'Attilio, François Autain, Paul Blanc, Mme Nicole Borvo, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux, Philippe Darniche, Christian Demuynck, Claude Domeizel, Jacques Dominati, Michel Esneu, Alfred Foy, Serge Franchis, Francis Giraud, Claude Huriet, André Jourdain, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, Dominique Larifla, Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Simon Loueckhote, Jacques Machet, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Philippe Nogrix, Mme Nelly Olin, MM. Lylian Payet, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vezinhet, Guy Vissac.

Voir les numéros :

Assemblée nationale
( 11 ème législ.) : Première lecture : 1106 , 1147 , 1148 et T.A. 192 .

Commission mixte paritaire : 1213 .

Nouvelle lecture : 1208 , 1215 et T.A. 202 .

Sénat : Première lecture : 50, 56, 58 et T.A. 22 (1998-1999).

Commission mixte paritaire : 74 (1998-1999).

Nouvelle lecture : 89 (1998-1999).


Sécurité sociale.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

Réunie le mardi 1er décembre 1998 sous la présidence de M. Jean Delaneau, président , la commission a procédé à l'examen, en nouvelle lecture du rapport de M. Charles Descours sur le projet de loi n° 89 (1998-1999) de financement de la sécurité sociale pour 1999 .

M. Jean Delaneau, président , a souhaité faire une brève communication liminaire sur l'ordre du jour.

Il a indiqué à la commission que la Conférence des présidents de l'Assemblée nationale, en date du 24 novembre, avait décidé d'inscrire le vote solennel en nouvelle lecture sur l'ensemble du projet de loi le mardi 1 er décembre à 16 heures. Il a souligné qu'étaient arrêtées depuis plus d'un mois, tant l'inscription de ce texte à l'ordre du jour prioritaire du Sénat le 2 décembre à 15 heures, que la réunion de la commission des Affaires sociales le mardi 1 er décembre à 9 heures 30.

Constatant que la commission allait délibérer sous réserve de l'adoption du projet de loi par l'Assemblée nationale et de sa transmission, il a fait part de son intention de faire valoir à M. le ministre chargé des relations avec le Parlement qu'une meilleure coordination de l'ordre du jour des deux Assemblées devait être recherchée.

M. Charles Descours, rapporteur , a présenté les grandes lignes de son rapport (cf. Avant-propos).

La commission a ensuite procédé à l'examen des articles et des amendements proposés par le rapporteur.

A l'article 2 (création d'un fonds de réserve pour les retraites), elle a adopté quatre amendements visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

A l'article 3 bis (modifications des conditions d'exonération de cotisations sociales patronales pour l'emploi d'une aide à domicile), elle a adopté un amendement reprenant les positions exprimées par le Sénat en première lecture : d'une part, le rejet du plafonnement des exonérations de charges dont bénéficient les personnes âgées de plus de 70 ans, d'autre part, l'affirmation de la compensation intégrale par l'Etat de la majoration des exonérations de charges en faveur des associations d'aide à domicile.

La commission a adopté un amendement rétablissant l'article 3 quater , introduit par le Sénat en première lecture, tendant à accorder aux associations intervenant en milieu rural l'exonération prévue à l'article 3 bis pour les associations dont les salariés relèvent du régime général.

A l'article 4 (prorogation pendant trois ans et plafonnement du dispositif d'exonération de cotisations patronales de sécurité sociale pour l'embauche du premier salarié), elle a adopté deux amendements tendant à rétablir le texte adopté par le Sénat en première lecture.

La commission a adopté un amendement de suppression de l'article 7 (suppression de la déductibilité des dépenses de recherche de l'assiette d'un prélèvement à la charge de l'industrie pharmaceutique), supprimé par le Sénat en première lecture.

A l'article 11 bis (majoration des droits sur le tabac), elle a adopté un amendement visant à rétablir le texte adopté par le Sénat en première lecture.

La commission a adopté un amendement de suppression de l'article 11 quater (prélèvement sur le fonds de compensation de congé de fin d'activité et le fonds pour l'emploi hospitalier pour financer le congé de fin d'activité pour la fonction publique territoriale et hospitalière), supprimé par le Sénat en première lecture.

A l'article 12 A (compensation intégrale des exonérations de charges résultant de l'application de la loi d'orientation et d'incitation à la réduction du temps de travail), elle a adopté un amendement tendant à rétablir le texte adopté par le Sénat en première lecture.

A l'article 12 (prévisions de recettes), elle a adopté un amendement de coordination avec les amendements précédemment adoptés.

A l'article 13 bis (maintien à dix ans et à quinze ans des majorations des allocations familiales), elle a adopté un amendement visant à rétablir le texte adopté par le Sénat en première lecture.

A l'article 16 (création d'un système national d'information inter-régimes de l'assurance maladie et d'un conseil pour la transparence des statistiques de l'assurance maladie), la commission a adopté trois amendements visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

Elle a adopté un amendement de suppression de l'article 17 (extension du champ de la négociation conventionnelle avec les médecins), supprimé par le Sénat en première lecture.

A l'article 18 (élargissement des missions des unions des médecins exerçant à titre libéral), elle a adopté un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture et un amendement satisfaisant les préoccupations exprimées à la fois par l'Assemblée nationale et le Sénat.

A l'article 19 (critères d'attribution de l'allocation de remplacement en cas de cessation d'activité des médecins (MICA) et des aides à leur reconversion), elle a adopté deux amendements visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

A l'article 20 (fonds d'aide à la qualité des soins de ville), la commission a adopté trois amendements visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

A l'article 21 (lettres-clés flottantes et reversements collectifs à la charge des médecins libéraux), elle a adopté un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

La commission a adopté un amendement de suppression de l'article 22 (sanctions financières pour les médecins au titre de 1998), supprimé par le Sénat en première lecture.

A l'article 22 bis (facturation détaillée des fournitures utilisées par les professionnels de santé), elle a adopté un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

A l'article 23 (création d'un droit de substitution au profit du pharmacien), elle a adopté trois amendements visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

Constatant que l'Assemblée nationale s'était beaucoup rapprochée, en nouvelle lecture, de la position exprimée par le Sénat en première lecture, le rapporteur a proposé un amendement de cohérence à l'article 24 (contenu des conventions passées entre le comité économique du médicament et les entreprises pharmaceutiques). M. François Autain a suggéré une rectification afin d'améliorer encore cette cohérence. La commission a adopté cet amendement ainsi rédigé.

A l'article 25 (institution d'une clause de sauvegarde applicable à la progression du chiffre d'affaires de l'industrie pharmaceutique), elle a adopté un amendement de coordination avec l'amendement adopté à l'article 24 et un amendement améliorant la définition de l'assiette de la contribution instituée par l'article.

Elle a adopté un amendement de suppression de l'article 26 bis (relations entre les agences régionales de l'hospitalisation et les cliniques privées à but lucratif), supprimé par le Sénat en première lecture.

A l'article 27 (régulation des dépenses des établissements et services sociaux et médico-sociaux financées par l'assurance maladie), la commission a adopté un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

Elle a adopté un amendement de suppression de l'article 27 bis (exercice de la médecine dans les établissements sociaux et médico-sociaux), supprimé par le Sénat en première lecture.

A l'article 29 bis (modification du régime de l'assurance veuvage), elle a adopté un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

A l'article 32 (fixation des objectifs de dépenses par branche), elle a adopté un amendement de coordination avec les amendements précédemment adoptés.

A l'article 33 (objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM)), elle a adopté un amendement réduisant d'un milliard de francs l'ONDAM voté par l'Assemblée nationale et affectant cette somme au fonds d'accompagnement social des restructurations des hôpitaux et un second amendement rétablissant, au troisième alinéa de cet article, le texte adopté par le Sénat en première lecture.

La commission a adopté un amendement de suppression de l'article 34 (ratification du relèvement du plafond des ressources non permanentes applicables au régime général) et un amendement de suppression de l'article 35 bis (gestion des excédents de trésorerie), supprimés par le Sénat en première lecture.

A l'article 36 (plafonnement des ressources non permanentes), elle a adopté un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

A l'article premier (précédemment réservé ) (approbation du rapport annexé), elle a adopté un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 comportait 36 articles dans le texte initial déposé par le Gouvernement. En première lecture, l'Assemblée nationale a introduit 12 articles additionnels tandis que le Gouvernement décidait de retirer l'article 26 du projet instituant une contribution exceptionnelle pour les entreprises pharmaceutiques.

Le Sénat a été ainsi saisi en première lecture d'un texte comportant 47 articles.

Lors de l'examen du projet de loi les 12, 16 et 17 novembre 1998, il a adopté 15 articles conformes, il a modifié 32 articles, dont 9 ont été supprimés, et a introduit 4 articles additionnels nouveaux.

Ces modifications importantes au texte adopté par l'Assemblée nationale ont traduit le souci du Sénat et de la commission des Affaires sociales :

- d'utiliser, dans le domaine de l'assurance maladie, les moyens disponibles à une adaptation de l'offre de soins de mettre en place un mécanisme de régulation des dépenses de santé simple, médicalisé, individualisé et efficace et de maintenir une véritable politique conventionnelle du médicament ;

- d'appeler à un projet cohérent et complet sur les retraites arrêtant l'ensemble des mesures structurelles nécessaires pour conforter les retraites par répartition à l'horizon des années 2005, mais incluant également les mesures permettant de faire cesser les déficits d'aujourd'hui, de clarifier la situation des régimes spéciaux, de définir enfin un véritable régime de retraite des fonctionnaires de l'Etat ;

- de traiter équitablement les familles, la situation excédentaire de la branche famille ne justifiant aucunement de nouvelles économies venant après les mesures d'une exceptionnelle gravité mises en oeuvre l'an dernier et, en premier lieu, la mise sous condition de ressources des allocations familiales abandonnée certes en 1999 mais au prix d'une aggravation des prélèvements fiscaux par le plafonnement du quotient familial ;

- d'affirmer la nécessaire clarification des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, relations marquées actuellement par l'importance des charges indues -en gestion et en trésorerie- pesant notamment sur la branche famille et la remise en cause systématique par le Gouvernement du principe affirmé par la loi du 25 juillet 1994 d'une compensation intégrale des exonérations de charges sociales décidée par l'Etat.

La discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a été l'occasion pour le Sénat de souligner la fragilité de l'équilibre financier présenté par le Gouvernement. Cet équilibre, de l'épaisseur d'un trait, repose en effet sur l'hypothèse d'une croissance forte des recettes -le volontarisme dans l'affichage de perspectives économiques optimistes 1( * ) ayant été préféré à la simple volonté de maîtrise des dépenses- et ne traduit pas l'assainissement de l'ensemble des branches de la sécurité sociale.

Ce débat a permis également de constater que le projet de loi était inabouti dans ces analyses, le Gouvernement renvoyant au premier semestre de l'année prochaine, après donc l'adoption de la loi de financement de la sécurité sociale pour cet exercice, un ensemble de réformes indispensables et urgentes : mesures structurelles dans le domaine des retraites, y compris la mise en place trop longtemps différée d'un mécanisme d'épargne retraite, institution d'une couverture maladie universelle ou réforme de l'assiette des cotisations sociales à la charge des employeurs.

Réunie le jeudi 19 novembre 1998, la commission mixte paritaire n'est pas parvenue à adopter un texte commun sur les dispositions restant en discussion en dépit du souhait de votre rapporteur d'aborder un certain nombre d'articles sur lesquels un accord apparaissait possible et souhaitable.

Lors de l'examen en nouvelle lecture le 26 novembre, l'Assemblée nationale a adopté 3 articles dans le texte du Sénat ( article 5 bis supprimant le prélèvement opéré par les services fiscaux sur certaines contributions perçues au profit des organismes de sécurité sociale, article 9 relatif à la taxation des boissons dites " premix " et article 11 ter relatif à la situation des collaborateurs occasionnels des services publics au regard des régimes de sécurité sociale).

A l'initiative de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales mais aussi, contre l'avis de cette dernière et à la demande expresse du Gouvernement, l'Assemblée nationale est revenue à son texte de première lecture sur 15 articles et a supprimé 3 des 4 articles additionnels introduits par le Sénat (article 3 quater exonérant de charges sociales au titre de leurs salariés affiliés au régime agricole les associations d'aide à domicile, article 12 A réaffirmant la compensation intégrale des exonérations de charges consenties dans le cadre de l'incitation à la réduction du temps de travail et article 13 bis maintenant à 10 et 15 ans les majorations pour âge des allocations familiales ).

L'Assemblée nationale a en outre souhaité modifier le texte, adopté par elle en première lecture de 15 articles du projet de loi, s'inspirant parfois des orientations retenues par le Sénat (articles 24 et 25 du projet de loi) .

S'agissant de l'article 21 instituant des lettres-clés flottantes et des reversements à la charge des médecins libéraux, l'Assemblée nationale n'a modifié son texte de première lecture que pour satisfaire des préoccupations d'ordre cosmétique.

Enfin, à l'initiative du Gouvernement et, en dépit de la jurisprudence récente et explicite du Conseil constitutionnel ( cf. décision n° 98-402 DC du 25 juin 1998 ), l'Assemblée nationale a introduit un article additionnel 31 bis (nouveau) comportant un dispositif important de cessation anticipée d'activité ouvert aux salariés et anciens salariés des établissements de manufacture de l'amiante ou atteints d'une des maladies professionnelles liées à l'amiante.

Votre commission des Affaires sociales vous propose en nouvelle lecture de prendre acte des modifications adoptées par l'Assemblée nationale qui vont dans le sens des préoccupations exprimées par la Haute Assemblée et, pour le reste, de rétablir le texte adopté par elle en première lecture, ouvrant ainsi à l'Assemblée nationale, lors de la procédure du " dernier mot ", la possibilité d'un nouveau pas vers les positions du Sénat.

EXAMEN DES ARTICLES
TITRE PREMIER
-
ORIENTATIONS ET OBJECTIFS DE LA POLITIQUE DE SANTÉ ET DE SÉCURITÉ SOCIALE

Article premier et rapport annexé
Approbation du rapport

Cet article propose d'approuver le rapport annexé au projet de loi.

Le Sénat a toujours marqué un certain scepticisme vis-à-vis du rapport annexé des lois de financement de la sécurité sociale, relatif aux " orientations de la politique de santé et de sécurité sociale, et aux objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale " .

Les orientations de la politique de santé, décrites en neuf pages dans un rapport qui en compte quatorze, recueillent -quand il s'agit de prévenir le suicide des jeunes ou d'améliorer la sécurité sanitaire ou la prise en charge de la douleur et des soins palliatifs- l'unanimité. Mais le cadre annuel n'est pas adapté à leur affirmation.

Le reste du rapport annexé se limite dès lors à des déclarations d'intention ou à un exposé des motifs du projet de loi. Son contenu n'a souvent aucune relation avec les dispositions présentes dans le texte.

L'adoption de ce rapport annexé, et les possibilités de l'amender, reviennent finalement à donner un statut juridique à une sorte de déclaration de politique générale du Gouvernement en matière de protection sociale, amendée à la marge pour contenter les différentes composantes de sa majorité, mais sans que leurs amendements prêtent trop à conséquence.

Dans ce cas, il apparaît clair qu'aucune loi de financement de la sécurité sociale ne pourra être adoptée en mêmes termes par l'Assemblée nationale et le Sénat, en cas de désaccord entre les majorités des deux Assemblées. Même si les deux Chambres parvenaient à un accord sur les articles du texte en discussion, le seul " blocage " viendrait du rapport annexé.

Force est d'ailleurs de constater qu'en commission mixte paritaire, votre rapporteur, appuyé par M. Jean Delaneau, président, avait souhaité réserver la discussion de l'article premier, pour commencer celle des articles, mais que les députés ont fait le choix de commencer par l'article premier.

Votre commission vous avait proposé en première lecture un texte court, directement en relation avec les dispositions amendées par le Sénat.

L'Assemblée nationale a rétabli le texte qu'elle avait adopté en première lecture, en prenant en compte un amendement déposé par le Gouvernement expliquant qu'il entend, " en concertation notamment avec les caisses nationales d'assurance maladie et les syndicats médicaux, poursuivre sa réflexion sur l'adaptation de l'objectif des dépenses médicales par spécialité ou groupe de spécialités. "

Votre commission vous propose un amendement visant à revenir au texte adopté en première lecture par le Sénat.

TITRE II
-
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

Art. 2
Affectation des excédents de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) au Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et création, au sein du FSV, d'un fonds de réserve pour les retraites

En première lecture, le Sénat avait souligné que la décision de créer un fonds de réserve pour les retraites présentait un caractère très inachevé : les objectifs de ce fonds semblaient particulièrement flous, les sommes affectées apparaissaient dérisoires par rapport aux besoins futurs, les modalités de gestion restaient à définir.

Ayant pris acte du caractère " symbolique " de cette mesure, le Sénat n'avait pas souhaité supprimer ce fonds de réserve. Il avait cependant jugé inutile de " faire semblant ", comme le faisait le projet de loi, d'attribuer à ce fonds un embryon de ressources, de peaufiner la composition du comité de surveillance du FSV ou de préciser les régimes bénéficiaires.

De telles dispositions semblaient déplacées alors même que restaient parfaitement indéterminés à la fois la nature des " vraies " ressources qui alimenteront le fonds et qui devront se chiffrer en centaines de milliards de francs, l'affectation de ces fonds, leur mode et leur horizon de placement ou enfin les modalités de gestion qui devront être cohérentes tant avec l'origine des ressources qu'avec l'objectif des emplois.

Pour notre Haute Assemblée, les différentes dispositions relatives au fonds de réserve formaient un tout dont il n'était pas possible de dissocier certains éléments.

Le Sénat avait considéré que la mise en place d'un tel fonds de réserve relevait, à l'évidence, d'un texte d'ensemble, cohérent et complet, incluant des mesures permettant de faire cesser les déficits d'aujourd'hui, de clarifier la situation des régimes spéciaux et de définir un véritable régime des fonctionnaires de l'Etat.

Sur proposition de votre commission, le Sénat avait donc supprimé en première lecture la liste des régimes bénéficiaires du fonds de réserve, les modifications de la composition du comité de surveillance du FSV et le circuit complexe permettant d'affecter au fonds de réserve une ressource symbolique.

Le Sénat avait prévu que les missions, statuts et ressources du fonds de réserve seraient déterminés par une loi tendant à assurer l'équilibre à long terme des régimes d'assurance vieillesse, portant réforme des régimes spéciaux de retraite et instituant un régime de retraite des fonctionnaires de l'Etat.

Dans le rapport de l'Assemblée nationale consacré à la nouvelle lecture du présent projet de loi, M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse, a proposé de ne pas modifier le texte adopté par le Sénat.

Toutefois, l'Assemblée nationale a choisi de rétablir en nouvelle lecture le texte qu'elle avait adopté en première lecture.

Votre commission vous propose un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

Art. 3 bis
Modification des conditions d'exonération de cotisations sociales patronales pour l'emploi d'une aide à domicile

Cet article modifie les conditions de l'exonération de cotisations sociales patronales pour l'emploi d'une aide à domicile ; il avait pour complément l'article 3 ter qui accordait aux associations prestataires de services aux personnes une exonération totale de cotisations sociales patronales sur les rémunérations des aides à domicile.

En première lecture, le Sénat avait supprimé l'article 3 bis à l'initiative de votre commission.

La Haute Assemblée avait refusé le plafonnement drastique de l'exonération de cotisations sociales dont peuvent bénéficier, pour la rémunération d'une aide à domicile, les personnes âgées de plus de 70 ans.

Soucieux de rétablir l'équité entre l'emploi direct, dit de gré à gré, et le recours à des associations prestataires de services, le Sénat était favorable à une exonération totale des cotisations sociales pour les associations. Il ne pouvait cependant accepter que l'on réduise parallèlement les avantages accordés à l'emploi direct.

Le Sénat s'était également opposé à la non-compensation par le budget de l'Etat, inscrite dans l'article, de la nouvelle exonération de cotisations sociales accordée aux associations de services à domicile.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a adopté un amendement présenté par le Gouvernement prévoyant une nouvelle rédaction de l'article 3 bis qui fusionne les anciens articles 3 bis et 3 ter du projet de loi.

L'article 3 bis adopté par l'Assemblée nationale comporte ainsi une nouvelle rédaction de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale qui intègre les modifications adoptées par l'Assemblée nationale en première lecture.

Le nouvel article L. 241-10 supprime en outre les conditions d'âge, de handicap et de dépendance auxquelles les personnes hébergées en famille d'accueil devaient satisfaire pour bénéficier de l'exonération de cotisations sociales patronales, en application de la rédaction en vigueur.

L'article 3 bis codifie dans l'article L. 177-1 du code de la sécurité sociale les dispositions relatives au contrôle par les caisses de sécurité sociale des associations et organismes chargés de l'exécution des prestations à caractère familial ou domestique dont elles assurent, en tout ou partie, le financement.

Malgré l'avis défavorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a adopté un sous-amendement présenté par la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales à l'amendement du Gouvernement, complétant l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale afin de prévoir que les rémunérations des aides à domicile ayant la qualité d'agent titulaire d'un centre communal ou intercommunal d'action sociale bénéficient d'une exonération totale de la cotisation d'assurance vieillesse due à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL).

Votre commission ne peut que regretter une nouvelle fois le caractère à l'évidence précipité et inachevé de cette réforme de l'aide à domicile, qui exclut de surcroît les entreprises agréées de services aux personnes du bénéfice des exonérations de charges sociales.

Votre commission vous propose d'adopter à cet article un amendement reprenant les positions exprimées par le Sénat en première lecture : d'une part, le rejet du plafonnement de l'exonération dont bénéficient les personnes âgées de plus de 70 ans, d'autre part, la réaffirmation de la compensation par l'Etat de la nouvelle exonération accordée aux associations d'aide à domicile.

Art. 3 ter
Exonération totale de cotisations sociales patronales pour les rémunérations des aides à domicile employées par des associations prestataires de services aux personnes

Cet article, introduit par l'Assemblée nationale en première lecture, relevait de 30 à 100 % le taux de l'exonération de charges sociales patronales dont bénéficient les associations prestataires de services aux personnes sur la rémunération des aides à domicile qu'elles emploient.

En première lecture, le Sénat avait complété cet article par un paragraphe II prévoyant que l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale - selon lequel toute mesure totale ou partielle de cotisations de sécurité sociale, instituée à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale, donne lieu à compensation intégrale aux régimes concernés par le budget de l'Etat pendant toute la durée de son application - était applicable à 70 % de l'exonération prévue par le présent article, c'est-à-dire au passage de 30 à 100 % de l'exonération accordée aux associations d'aide à domicile.

Par coordination avec l'adoption d'une nouvelle rédaction de l'article 3 bis qui intègre désormais le I du présent article, l'Assemblée nationale a supprimé cet article en nouvelle lecture.

Par coordination avec l'amendement qu'elle présente à l'article 3 bis, votre commission vous propose de maintenir la suppression de cet article.

Art. 3 quater
Exonération aux associations prestataires d'aide à domicile relevant du régime agricole de l'exonération totale de cotisations patronales prévue par le code de la sécurité sociale

Cet article, adopté par le Sénat à l'initiative de notre collègue M. Louis Boyer, vise à insérer dans le code rural un nouvel article précisant que les dispositions de l'article L. 241-10 -prévoyant à l'article 3 bis une exonération totale de cotisations patronales en faveur des associations prestataires de services d'aide à domicile- s'appliquent aux associations intervenant en milieu rural. Votre commission avait donné un avis favorable à l'amendement de M. Louis Boyer, en considérant qu'il était équitable d'appliquer la même législation à ces associations, dont les salariés sont inscrits au régime agricole.

Lors du débat en séance publique, le Gouvernement avait justifié l'avis défavorable qu'il exprimait à l'encontre de cet amendement par le fait qu'il ne s'agissait pas " d'un dispositif d'équité, mais d'un dispositif illégal " 2( * ) et que ces associations devaient inscrire leurs salariés au régime général, et non au régime agricole, puisque les tâches de ces salariés n'ont aucun caractère agricole.

L'Assemblée nationale a supprimé cet article, à l'initiative du Gouvernement, la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales ayant adopté cet article conforme.

Votre commission des Affaires sociales ne souhaite bien évidemment pas favoriser des dispositions " illégales ". Elle se borne à constater que de telles associations existent et que leurs salariés sont inscrits au régime agricole. A partir du moment où le Gouvernement juge que l'inscription au régime agricole des salariés de ces associations est " illégale " , il dispose de la tutelle s'exerçant sur la Mutualité sociale agricole et sur les URSSAF pour respectivement désinscrire ces salariés du régime agricole et les réinscrire au régime général. L'exonération spécifique prévue par cet article n'aura plus d'objet et pourra alors être supprimée.

Cette prétendue illégalité est d'ailleurs loin d'être certaine.

Juridiquement, il est intéressant de noter que l'article 1144-7° du code rural englobe parmi les assujettis du régime agricole les salariés " d'une manière générale, de tout groupement professionnel agricole " . Cette rédaction résulte de la loi n° 88-1202 du 30 décembre 1988 relative à l'adaptation de l'exploitation agricole à son environnement économique et social.

La notion de " groupement professionnel agricole " (GPA) a été précisée par la jurisprudence ; il s'agit de " tout groupement constitué principalement de membres de professions agricoles poursuivant un but d'intérêt professionnel agricole ". L'objet d'un GPA peut être ainsi très large.

Certaines associations d'aide à domicile intervenant en milieu rural sont des groupements professionnels agricoles.

D'autres associations de services aux personnes, sans être des GPA, ont été constituées par des caisses de MSA dans le cadre des missions nommées au titre de l'action sanitaire et sociale. Les salariés des caisses de MSA étant, selon la loi, affiliés au régime agricole, il serait inopportun de prévoir un traitement différencié pour les salariés d'associations dépendant des des caisses de la MSA.

Votre commission observe ainsi que l'inscription de ces salariés au régime agricole répond à un objectif de simplicité de gestion et que le régime général ne pâtit pas particulièrement de la perte de ces salariés.

Votre commission remarque enfin que les dispositions du projet de loi d'orientation agricole, actuellement en cours de discussion devant le Parlement, ont pour effet de favoriser une grande souplesse sur les critères d'affiliation au régime agricole, ce qui a entraîné une légitime inquiétude des artisans et des commerçants. La cohérence de la politique gouvernementale sur le sujet n'apparaît pas d'une clarté confondante.

Dans l'attente d'une attitude claire du Gouvernement visant à mettre en accord son discours et sa politique, votre commission vous propose d'adopter un amendement visant à rétablir le texte adopté par le Sénat en première lecture.

Art. 4
Prorogation pendant trois ans et plafonnement du dispositif d'exonération de cotisations patronales de sécurité sociale pour l'embauche du " premier salarié "

Cet article, dans sa rédaction proposée par le Gouvernement, proroge pendant trois ans la mesure d'exonération de cotisations patronales de sécurité sociale pour l'embauche d'un premier salarié, en la plafonnant au niveau du SMIC.

En première lecture, le Sénat avait souhaité ne pas plafonner cette exonération, en raison des risques pesant sur les entreprises innovantes. Il avait également précisé que la lettre, comme l'esprit de la loi du 25 juillet 1994, conduisait à ce que cette exonération soit compensée intégralement aux régimes de sécurité sociale, dès lors que le Gouvernement a décidé de proroger le dispositif au delà de la date initialement prévue.

A l'initiative de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, l'Assemblée nationale a supprimé ces deux amendements, revenant au texte initial.

Votre commission ne fait pas preuve d'irresponsabilité en souhaitant la stricte application de la loi du 25 juillet 1994.

Elle constate également que le plafonnement au niveau du SMIC de ce dispositif d'exonération pénalisera les jeunes entreprises innovantes.

Votre commission vous propose en conséquence un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

Art. 6
Obligation pour les entreprises redevables de plus de 6 millions de francs de cotisations de régler les sommes dues par virement

Cet article vise à rendre obligatoire le paiement par virement pour les entreprises redevables de plus de 6 millions de francs de cotisations par an.

Le Sénat avait modifié très légèrement cet article, afin d'inclure le paiement de la contribution sociale de solidarité sur les sociétés, perçue par l'ORGANIC, dans les contributions faisant l'objet d'un paiement par virement.

L'Assemblée nationale n'est pas revenue sur cette disposition ; elle a, en revanche, réécrit le paragraphe II de cet article, afin de prévoir le cas des entreprises utilisant déjà un autre moyen de paiement dématérialisé que le virement.

Votre commission est favorable à cette disposition. Elle constate l'intérêt de la navette parlementaire, qui permet d'enrichir le contenu d'articles, mêmes techniques.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Art. 7
(Art. 12 de l'ordonnance n° 96-51 du 24 janvier 1996)
Suppression de la déductibilité des dépenses de recherche de l'assiette d'un prélèvement à la charge de l'industrie pharmaceutique

Cet article modifie, à titre rétroactif, les règles relatives à la contribution exceptionnelle de l'industrie pharmaceutique prévue par l'ordonnance du 24 janvier 1996. A la suite d'une question préjudicielle, ces règles font actuellement l'objet d'un examen par la Cour de justice des communautés européennes.

En première lecture, le Sénat avait suivi la proposition de votre commission de supprimer cet article pour des raisons d'opportunité, mais aussi pour des raisons juridiques de fond.

En opportunité, il n'est pas apparu utile au Sénat que la France, en modifiant les dispositions de l'ordonnance du 24 janvier 1996, donne des arguments aux partisans de leur annulation.

Sur le fond, le Sénat a estimé que, au motif de rendre compatible avec le droit communautaire les dispositions de l'ordonnance du 24 janvier, le Gouvernement prenait de grandes libertés, dans cet article du projet de loi, avec les principes constitutionnels comme avec les principes du droit communautaire.

En effet, cet article relève d'une rétroactivité très particulière, dont n'a jamais eu à connaître le Conseil constitutionnel. Sa jurisprudence sur la rétroactivité des lois fiscales ne saurait s'y appliquer : en effet, il ne s'agit pas de soumettre à impôt une matière fiscale nouvelle, mais de modifier les règles d'une contribution déjà acquittée, de bouleverser des situations juridiques déjà soldées.

En outre, cet article méconnaît les principes communautaires de confiance légitime ou de sécurité juridique.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission vous propose de supprimer à nouveau cet article.

Art. 11 bis
Majoration des droits sur le tabac

L'Assemblée nationale avait adopté, en première lecture, un amendement de M. Alfred Recours, au nom de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, visant à majorer le taux des droits perçus sur le tabac.

Le Sénat n'avait pas retenu le système proposé par M. Alfred Recours. Votre commission des Affaires sociales avait estimé qu'il avait l'inconvénient de représenter une recette supplémentaire de 900 millions de francs pour le budget général et de seulement 100 millions de francs pour la sécurité sociale. Tout en partageant pleinement l'objectif de santé publique poursuivi par l'amendement de M. Alfred Recours, votre commission avait été jusqu'au bout de cette logique en créant une taxe additionnelle de santé publique sur les tabacs, reprenant le système proposé par le Gouvernement en première lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998, qui avait été écarté en nouvelle lecture. Cette taxe additionnelle avait l'avantage de représenter une recette de 1,4 milliard de francs, intégralement affectée à la CNAMTS pour des actions de prévention.

L'Assemblée nationale a consacré en nouvelle lecture une grande attention à l'article 11 bis . Sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales n'a pas proposé la suppression de l'article 11 bis . Le Gouvernement a demandé la réserve de cet article, pour finalement maintenir son amendement de suppression, c'est-à-dire non pas de revenir au texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, de préférence au texte du Sénat, mais de supprimer purement et simplement cet article.

Un double argument a été évoqué par M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé : premièrement, cette taxe additionnelle serait contraire à la réglementation européenne ; deuxièmement, l'accroissement du prélèvement risquerait d'entraîner une guerre des prix entre fabricants, qui aurait pour effet de baisser les prix, et donc de relancer la consommation.

Cette argumentation est curieuse pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, il est loin d'être certain que la taxe additionnelle de santé publique soit contraire au droit communautaire. La directive 92/12/CEE du 25 février 1992 n'autorise les Etats-membres à créer des taxes supplémentaires aux droits de consommation sur les tabacs qu'à deux conditions :

- que ces taxes soient perçues comme les droits d'accises ou la TVA (base d'imposition, calcul, exigibilité et contrôle de l'impôt) ; la taxe de santé publique proposée en première lecture par le Sénat respecte cette condition : " Elle est assise et perçue sous les mêmes règles que la taxe sur la valeur ajoutée " .

- qu'elles poursuivent une " finalité spécifique " . La taxe de santé publique proposée en première lecture par le Sénat semble respecter également cette condition, puisqu'elle est affectée aux " actions de prévention et notamment de lutte contre le tabagisme " . Les droits existants à l'article 575 du code général des impôts n'ont pas de finalité définie. Certes, une fraction (9,1 %) de ces droits, définie par la loi de finances pour 1997 modifiée par la loi de finances pour 1998, est déjà affectée à la CNAMTS. Mais cette " fraction ", comme son nom l'indique, ne peut pas être considérée comme une taxe " à part ". Il est ainsi possible d'en conclure que la fraction des droits affectée à l'assurance maladie n'a pas davantage de " finalité " que son fait générateur, l'article 575 du code général des impôts. Il n'est guère douteux que la taxe additionnelle de santé publique proposée par le Sénat poursuit, elle, une " finalité spécifique "

Force est d'ailleurs de constater que le Conseil d'Etat n'avait pas écarté cet article, proposé par le Gouvernement en première lecture du projet de loi de financement pour 1998.

L'argumentation relative à la " guerre des prix " est surprenante de la part de M. le Secrétaire d'Etat à la santé, dont les convictions constituent en la matière une référence. Elle remet en cause, en effet, toute justification d'une augmentation globale des droits sur le tabac. Le Gouvernement peut d'ailleurs choisir de diminuer les droits de consommation sur le tabac, en " compensation " de la création de cette taxe de santé publique.

M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé, a également évoqué la situation des salariés du SEITA. Votre commission ne méconnaît pas la situation difficile de ce secteur, mais constate que la recette des droits sur le tabac serait de 42 milliards de francs pour le seul budget de l'Etat. Le Gouvernement a la possibilité d'utiliser une partie de cette ressource pour financer un plan de restructuration.

Le système proposé par le Gouvernement, qui ferait l'objet d'un amendement au projet de loi de finances rectificative pour 1998, consiste à agir sur la part fixe du droit de consommation, qui serait doublée, et d'accroître les minima de perceptions qui augmenteraient de 5 % pour le tabac blond et de 10 % pour le tabac brun.

Le support législatif envisagé est doublement étonnant.

Premièrement, la discussion en première lecture du projet de loi de finances rectificative aura lieu à l'Assemblée nationale le jeudi 3 décembre 1998, le même jour que la lecture définitive du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999. Il est ainsi demandé au Parlement d'anticiper le vote d'une recette de 100 millions de francs.

Deuxièmement, cette recette pour 1999 sera votée dans le cadre d'un projet de loi de finances rectificative portant sur l'année 1998.

Le PLFSS 1999 et les droits sur les tabacs (en millions de francs)

 

Texte A.N. 1 ère lecture

Texte Sénat 1 ère lecture

Proposition du Gouvernement

Support législatif

PLFSS 1999

PLFSS 1999

PLF rectificative pour 1998

Recettes pour la sécurité sociale

100

1.400

100(*)

Recettes pour le budget de l'Etat

900

0

900

(*) Cette recette s'accompagne d'une augmentation à due concurrence de l'ONDAM et de l'objectif de dépenses de la branche maladie au profit des soins palliatifs

Les 900 millions supplémentaires dégagés pour le budget de l'Etat seraient affectés :

- au financement d'une partie du fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (200 millions de francs) ;

- à l'augmentation des crédits consacrés aux campagnes contre le tabagisme (50 millions de francs) ;

- et, par voie de conséquence, à une recette de poche pour le budget de l'Etat, dont l'affectation n'a pas été précisée (650 millions de francs).

Les dispositions annoncées par le Gouvernement ne sont pas satisfaisantes, parce qu'elles tendent à augmenter les droits sur le tabac au bénéfice quasi exclusif des recettes de l'Etat. La mission confiée à M. Alfred Recours, tendant à revoir en profondeur la fiscalité du tabac, son effet sur les prix et la répartition du produit des taxes entre l'Etat et la sécurité sociale, apparaît ainsi un " lot de consolation " bien amer.

Votre commission souhaite que la fiscalité sur le tabac profite à la principale victime financière de ses méfaits, l'assurance maladie.

Elle vous propose de rétablir cet article dans le texte voté par le Sénat en première lecture.

Art. 11 quater
Prélèvement sur le Fonds de compensation de congé de fin d'activité (FCCPA) et le Fonds pour l'emploi hospitalier (FEH) pour financer le congé de fin d'activité pour la fonction publique territoriale et hospitalière

Cet article, résultant d'un amendement du Gouvernement présenté à l'Assemblée nationale en première lecture, vise à prévoir le financement pour 1999 du congé de fin d'activité pour la fonction publique territoriale et hospitalière.

Le Sénat avait supprimé cet article en première lecture, mais l'Assemblée nationale l'a rétabli dans son texte initial.

Le dispositif de financement est particulièrement complexe et vise à creuser deux trous pour en combler un troisième.

Par ailleurs, la pérennisation du congé de fin d'activité ne relève pas d'une loi de financement de la sécurité sociale.

Votre commission vous propose d'adopter à nouveau un amendement de suppression de cet article.

Art. 12 A
Compensation intégrale des exonérations de charges sociales
accordées dans le cadre de la loi d'orientation et d'incitation
à la réduction du temps de travail

Cet article additionnel, introduit par le Sénat en première lecture, vise à prévoir explicitement l'application de l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale aux exonérations de charges sociales prévues par la loi du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation relative à la réduction du temps de travail.

L'Assemblée nationale l'a supprimé en nouvelle lecture, à l'initiative de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, celle-ci estimant que le dispositif proposé était redondant avec la loi du 25 juillet 1994.

C'est précisément cette redondance -c'est-à-dire la réaffirmation de la compensation intégrale des exonérations de charges prévue par la loi du 25 juillet 1994- que souhaitait affirmer votre commission car elle s'inquiète, d'une part, des déclarations évasives de Mme Martine Aubry, évoquant un bilan à mi-année ; elle constate, d'autre part, que les prévisions de recettes prévues par le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne prennent pas en compte la compensation totale de ces exonérations, puisqu'il n'a pas modifié les prévisions tendancielles effectuées par la Commission des comptes de la sécurité sociale, reposant sur une compensation partielle 3( * ) .

Votre commission vous propose un amendement visant à rétablir cet article dans le texte voté par le Sénat en première lecture.

Art. 12
Prévisions de recettes

Sur proposition de votre commission, le Sénat avait adopté en première lecture des prévisions de recettes prenant en compte les recettes supplémentaires pour la sécurité sociale résultant des amendements de sincérité comptable adoptés, par l'application de la loi du 25 juillet 1994 (compensation des exonérations de charges sociales par l'Etat). Ces recettes n'avaient naturellement pas été affectées à des dépenses sociales supplémentaires ; le déficit des administrations publiques au sens du Traité de Maastricht restait inchangé.

Les prévisions de recettes adoptées par le Sénat tenaient également compte de la création de la taxe additionnelle sur les tabacs prévue à l'article 11 bis .

En dépit de la suppression de l'article 11 bis , et anticipant l'adoption d'une nouvelle recette dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 1998, l'Assemblée nationale a rétabli les prévisions de recettes adoptées en première lecture, la hausse des minima de perception sur le tabac rapportant une somme identique qu'une hausse générale des droits de consommation (100 millions de francs).

Prévisions de recettes

 

Texte initial

Texte AN première lecture et nouvelle lecture

Texte Sénat première lecture

Cotisations effectives

1.063,0

1.062,9

1.068,6

Cotisations fictives

194,8

194,8

194,8

Contributions publiques

63,8

63,8

63,8

Impôts et taxes affectés

438,6

438,7

440,0

Transferts perçus

4,9

5,2

4,9

Revenus des capitaux

1,4

1,4

1,4

Autres ressources

32,6

32,6

32,6

Total des recettes

1.799,2

1.799,5

1.806,1

Votre commission vous propose à cet article un amendement de coordination avec les dispositions qu'elle vous a proposées précédemment d'adopter : compensation de l'exonération prévue pour les associations d'aide à domicile, compensation de l'exonération premier salarié, création d'une taxe additionnelle de santé publique, suppression des prélèvements alimentant de manière artificielle le FATIACL.

Votre commission, en conséquence, vous propose de revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

TITRE III
-
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES ET À LA TRÉSORERIE

Section 1

Branche famille
Art. 13 bis
(Art. L. 521-3 du code de la sécurité sociale)
Maintien à 10 ans et à 15 ans des majorations pour âge des allocations familiales

Cet article, introduit par le Sénat en première lecture sur proposition de votre commission, a pour objet d'inscrire dans la loi que les majorations pour âge des allocations familiales sont versées à partir de l'âge de 10 ans et de 15 ans.

Le Gouvernement a annoncé, lors de la Conférence de la famille du 12 juin 1998, que ces majorations pour âge seraient reportées de 10 à 11 ans et de 15 à 16 ans pour les enfants atteignant leur dixième et leur quinzième anniversaires après le 1 er janvier 1999.

Votre commission avait souligné que la seule finalité de cette mesure était financière : le recul de l'âge des majorations permettrait d'économiser 870 millions de francs en 1999 et 1,8 milliard de francs en année pleine, à partir de 2000.

Elle avait jugé cette mesure très critiquable et parfaitement injustifiée au moment même où la branche famille était excédentaire.

A l'initiative de votre commission, le Sénat avait donc adopté en première lecture cet article additionnel 13 bis qui confirme le droit existant et maintient les majorations des allocations familiales à 10 ans et à 15 ans.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a supprimé cet article.

Votre commission vous propose un amendement rétablissant cet article dans le texte adopté par le Sénat en première lecture.

Section 2

Branche maladie
Art. 16
(Art. L. 161-28-1 à L. 161-28-4 nouveaux,
art. L. 161-29 et L. 161-30 du code de la sécurité sociale)
Création d'un système national d'information inter-régimes de l'assurance maladie et d'un conseil pour la transparence des statistiques de l'assurance maladie

En première lecture, le Sénat avait considéré que, tel qu'institué par le présent article, le Conseil pour la transparence des statistiques de l'assurance maladie n'était pas totalement satisfaisant, ni en ce qui concernait son champ de compétence, ni pour sa composition.

Dans le texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, l'article L. 161-28-3 limitait en effet sa compétence aux statistiques relatives aux soins de ville. Cette limitation a semblé au Sénat sans fondement, la transparence des statistiques de l'assurance maladie constituant un objectif pour l'ensemble des dépenses des régimes.

La composition du Conseil telle que prévue par l'Assemblée nationale ne lui a pas semblé davantage satisfaisante. En effet, elle n'incluait pas les représentants des établissements de santé, ceux des établissements médico-sociaux, non plus que ceux de l'industrie pharmaceutique. En revanche, elle comprenait les présidents de commissions des Affaires sociales de l'Assemblée nationale ou du Sénat, qui n'ont pas leur place dans un Conseil placé auprès des ministres de la santé et de la sécurité sociale.

Cela ne veut pas dire, bien sûr, que le Parlement n'a pas d'avis à donner sur les statistiques de l'assurance maladie : mais il dispose des moyens institutionnels pour le faire.

C'est pourquoi le Sénat, sur proposition de votre commission, a modifié à la fois le champ de compétences et la composition du Conseil ; il a également rétabli le 3° de l'article L. 161-28-3 du code de la sécurité sociale et le paragraphe II de l'article du projet de loi initial, supprimés par l'Assemblée nationale, en première lecture, qui avait estimé que la limitation du champ de compétences du conseil aux informations relatives à la médecine de ville ne justifiait pas la suppression du comité paritaire de l'information médicale, qui s'intéresse aussi aux informations et au codage hospitaliers.

En outre, sur proposition de M. Claude Huriet, le Sénat a prévu que le Conseil puisse donner un avis sur le périmètre des différents postes de dépenses pris en considération dans la diminution et le contrôle du respect des objectifs définis à la suite du vote du Parlement, pour les soins de ville, la pharmacie et les établissements.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale, sur proposition de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, est revenue à son texte de première lecture.

Votre commission vous propose d'adopter trois amendements tendant à revenir au texte voté par le Sénat en première lecture.

Art. 17
(Art. L. 162-5 du code de la sécurité sociale)
Extension du champ de la négociation conventionnelle
avec les médecins

Cet article prévoit que les partenaires aux conventions nationales des médecins pourront, sans condition, déroger à des dispositions essentielles du code de la sécurité sociale pour définir de nouvelles conditions d'exercice offertes à l'ensemble des médecins conventionnés.

En première lecture, votre commission, suivie par le Sénat, avait proposé la suppression de cet article car il est contraire aux principes constitutionnels que le Parlement se dessaisisse aussi généralement de sa compétence en matière de droit de la sécurité sociale.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale n'a modifié que sur un point de forme le dispositif qu'elle avait adopté en première lecture : à l'initiative du Gouvernement, elle a précisé que cet article entrait en vigueur, à titre rétroactif, non plus le 3 juillet 1998 (date de l'annulation par le Conseil d'Etat de la convention des généralistes) mais du 10 juillet 1998 (date d'entrée en vigueur du règlement conventionnel minimal). En effet, la référence au 3 juillet 1998 eut pu faire courir à cet article du projet de loi des risques d'annulation par le Conseil constitutionnel pour atteinte à la chose jugée.

La modification introduite par l'Assemblée nationale n'emportant aucune conséquence de fond au regard des observations retenues par le Sénat, votre commission vous propose, comme en première lecture, de supprimer cet article.

Art. 18
(Art. 8 de la loi n° 93-8 du 4 janvier 1993,
art. L. 791-2 du code de la santé publique)
Elargissement des missions des unions des
médecins exerçant à titre libéral

En première lecture, le Sénat a approuvé le principe des dispositions de cet article tout en regrettant que les unions soient en pratique privées des moyens d'exercer les compétences qu'il prévoit.

En effet, la publication du décret d'application des dispositions issues de la loi n° 94-43 précitée, qui organisent la transmission aux unions des données saisies par les médecins à l'occasion de leur activité, semble bloquée.

Comment, dès lors, confier aux médecins des compétences d'évaluation des pratiques et d'analyse de l'évolution des dépenses de l'assurance maladie si les unions se voient privées des informations nécessaires à ces évaluations et analyses ?

Aussi, sur proposition de votre commission, le Sénat a-t-il modifié le dispositif du projet de loi en précisant que les unions établissent, chaque trimestre, avec le concours des URCAM et " en utilisant les données transmises par les médecins mentionnées au présent article " , une analyse de l'évolution des dépenses médicales.

Il a également supprimé la modification introduite par l'Assemblée nationale en première lecture, à laquelle le Secrétaire d'Etat à la santé n'était d'ailleurs pas très favorable, qui prévoyait que les nouvelles compétences d'évaluation seraient confiées, non aux unions, mais aux sections qui les composent.

Répondant au légitime souci de l'Assemblée nationale de voir organisée une synthèse nationale des travaux des unions, le Sénat a prévu que le bilan établi trimestriellement soit adressé, non à l'Etat, mais aux caisses nationales d'assurance maladie.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale est revenue à son texte de première lecture.

Votre commission vous propose d'adopter deux amendements. Le premier tend à revenir au texte voté par le Sénat en première lecture en ce qui concerne les compétences des unions régionales et la transmission aux unions des données informatisées des médecins. Le second prend en considération les préoccupations exprimées par le Sénat et par l'Assemblée nationale en prévoyant que le bilan établi par les unions sera adressé à l'Etat et à l'assurance maladie.

Votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.

Art. 19
(Art. 4 de la loi n° 88-16 du 5 janvier 1988,
art. L. 162-5 du code de la santé publique)
Critères d'attribution de l'allocation de remplacement en cas de cessation d'activité des médecins (MICA) et des aides à leur reconversion

En première lecture, le Sénat, sur proposition de MM. Bernard, Taugourdeau et Leclerc, a repoussé du 1 er juillet 1999 au 1 er janvier 2000 l'entrée en vigueur des nouvelles règles instituées par cet article qui prévoit une modulation de l'aide à la cessation anticipée d'activité des médecins en fonction de la zone géographique et de la spécialité.

Un amendement identique avait été adopté par la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales. Toutefois, M. Claude Evin, rapporteur, qui n'avait pas vu d'obstacle " à ce que l'Assemblée nationale n'adopte pas l'amendement de la commission " , a été entendu sur ce point par une majorité de députés en séance publique.

Votre commission vous propose d'adopter deux amendements tendant à revenir au texte voté par le Sénat en nouvelle lecture.

Art. 20
Fonds d'aide à la qualité des soins de ville

Tout en constatant qu'aucune des personnes auditionnées par son rapporteur n'avait pu préciser à quoi servirait concrètement le fonds institué par cet article au sein de la CNAMTS, votre commission, lors de l'examen du présent projet de loi en première lecture, ne s'était pas opposée à un dispositif susceptible de favoriser la qualité des soins, mais avait souhaité être informée précisément de l'utilisation des crédits.

Sur sa proposition, le Sénat a toutefois élargi aux médecins exerçant dans des cliniques privées le bénéfice des aides attribuées par ce fonds.

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale, sur proposition de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, est revenue à son texte de première lecture.

Votre commission vous propose d'adopter trois amendements tendant à revenir au texte voté par le Sénat en première lecture.

Art. 21
(Art. L.162-5, L. 162-5-2, L. 162-5-3 et L. 162-5-4
du code de la sécurité sociale)
Lettres-clés flottantes et reversements collectifs
à la charge des médecins libéraux

Cet article propose d'instituer, pour les médecins, un mécanisme de régulation des dépenses reposant sur la mise en oeuvre, en cours d'année, de lettres clés flottantes et, en fin d'année, sur le versement d'une contribution.

Suivie par le Sénat, votre commission avait proposé, en première lecture, de substituer à ce dispositif de régulation comptable des dépenses un mécanisme de maîtrise médicalisé et individualisé, compatible avec le respect, à la fois de la qualité des soins et des objectifs de dépenses définis à la suite du vote annuel du Parlement.

Si l'Assemblée nationale n'a pas souhaité retenir ce dispositif, elle a suivi le Gouvernement qui semble s'être souvenu, à la suite de l'exposé des arguments de la Haute assemblée, de l'existence d'instruments de maîtrise médicalisée des dépenses....

Conscient que l'institution de lettres-clés flottantes était légitimement mal perçue par les médecins, le Gouvernement a souhaité dissimuler leur institution par un artifice de rédaction. Aux termes du texte adopté par les députés en nouvelle lecture, en effet, les partenaires conventionnels ou le Gouvernement pourront décider, en cours d'année, en cas de dérapage des dépenses, toutes mesures de nature à garantir le respect de l'objectif, et notamment " des actions d'information des médecins, de promotion des références médicales opposables et des recommandations de bonne pratique " ou, le cas échéant ... " des ajustements de tarifs " !

Afin de prendre en considération les revendications d'un syndicat de médecins spécialistes, le Gouvernement a souhaité préciser que l'ensemble de ces mesures pourrait être " adapté par spécialité médicale ". Cette précision n'apporte pas grand chose, étant entendu que l'une des caractéristiques majeures d'un dispositif de lettres-clés flottantes étant de pouvoir être adapté par spécialité : elle ne saurait être comprise comme autorisant la fixation possible d'un objectif de dépenses par spécialité, qui est reconnue aux partenaires conventionnels dans le droit en vigueur comme dans le texte adopté par le Sénat qui ne le modifie pas sur ce point.

L'autre modification introduite par l'Assemblée par rapport à son texte de première lecture, elle aussi à l'initiative du Gouvernement, revêt la même portée cosmétique. Elle consiste en effet à prévoir que la contribution versée, en fin d'année, par les médecins " fera l'objet d'un abattement forfaitaire déterminé par décret en Conseil d'Etat ".

Cette précision revêt une portée d'autant plus limitée que le texte initial du projet de loi prévoyait déjà qu' " un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles le montant exigible de l'ensemble des médecins conventionnés, généralistes ou spécialistes qui ne peut excéder le montant global du dépassement constaté, est calculé en fonction des honoraires perçus et des prescriptions réalisées. "

Ainsi, non seulement les médecins seront soumis aux lettres-clés flottantes et aux reversements, mais ils pourront avoir l'impression légitime que le Gouvernement les considère comme trop naïfs pour s'en rendre compte...

Pour les mêmes raisons que celles exposées lors de l'examen du projet de loi en première lecture, votre commission vous propose de rétablir le texte adopté par le Sénat en première lecture.

Art. 22
Sanctions financières pour les médecins au titre de 1998

Cet article prévoit les sanctions financières applicables en 1998, pour les médecins libéraux, en cas de dépassement de l'objectif de dépenses.

Par rapport à son texte initial, l'Assemblée a apporté à ce texte une modification destinée, comme à l'article 17, à rendre son paragraphe IV conforme à la Constitution.

En première lecture, votre commission, suivie par le Sénat, avait proposé la suppression de cet article par lequel le Gouvernement demandait au Parlement un total blanc-seing pour sanctionner les médecins en cas de dérapage des dépenses sur l'exercice 1998..

Le Gouvernement a tenu compte, mais dans une très faible mesure, des observations formulées au Sénat. En effet, si l'Assemblée a rétabli son texte initial, il a été assorti d'une précision proposée par le Gouvernement selon laquelle " la somme mise à la charge de chaque médecin conventionné est calculée et recouvrée selon les modalités fixées aux III et IV de l'article L. 62-5-3 du code de la sécurité sociale tel qu'il résulte de la présente loi ".

Cependant, le texte ne prévoit toujours pas le seuil de déclenchement de la contribution : le paragraphe III de l'article dispose toujours qu'elle sera due si l' " écart entre l'objectif de dépenses et le montant constaté des dépenses est supérieur à un taux fixé par décret ". Votre commission ne souhaite pas que perdure une telle indétermination, surtout si elle a pour objet, comme on pourrait le penser, d'exonérer par principe les seuls médecins signataires d'une convention pour l'avenir de dérapages des dépenses intervenus au titre d'un exercice régi par d'autres dispositions conventionnelles.

Aussi, elle vous propose, comme en première lecture, de supprimer cet article.

Art. 22 bis
(Art. L. 162-1-8 du code de la sécurité sociale)
Facturation détaillée des fournitures utilisées
par les professionnels de santé

Cet article comporte deux dispositions distinctes.

La première, au paragraphe I, prévoit l'établissement d'un rapport sur l'état de la santé bucco-dentaire qui sera remis au Parlement à l'occasion de l'examen du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale. Elle avait été acceptée par la Haute assemblée en première lecture. Votre commission vous propose d'accepter aussi la modification de précision introduite à l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.

La seconde disposition, au paragraphe II, prévoit que, lorsqu'un chirurgien-dentiste ou un médecin fait appel à un fournisseur ou à un prestataire de services, il est tenu de fournir au patient un devis, puis une facture.

A l'initiative de votre commission, votre commission avait d'abord proposé d'élargir la portée de cet article à l'ensemble des professionnels de santé, considérant qu'il n'était pas opportun de montrer ainsi du doigt certains praticiens.

Surtout, le Sénat avait considéré que le Gouvernement ne pouvait demander aux professionnels des mesures de transparence lorsqu'il ne respecte pas, lui même, les engagements pris devant la profession. Aussi, le Sénat avait lié l'entrée en vigueur de la mesure prévue par le présent article à celle des mesures de revalorisation de la nomenclature prévues par la convention nationale des chirurgiens-dentistes, approuvées par le Gouvernement par arrêté ministériel, puis abrogées par le même Gouvernement par un arrêté du 26 juin 1998.

L'Assemblée nationale est revenue à son texte initial, sans tenir compte de cette légitime préoccupation.

Aussi, votre commission vous propose de rétablir le texte adopté par le Sénat

Art. 23
(Art. L. 512-3 nouveau et art. L. 601-6 du code de la santé publique,
art. L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle,
art. L. 162-16 du code de la sécurité sociale)
Création d'un droit de substitution au profit du pharmacien

Le Sénat avait apporté plusieurs modifications importantes à cet article qui institue un droit de substitution au profit des pharmaciens. Il avait notamment prévu, à l'initiative de notre collègue Claude Huriet :

- que, lorsque le pharmacien délivre par substitution à la spécialité prescrite une spécialité du même groupe générique, il indique le nom de cette dernière spécialité sur l'ordonnance et appose son nom et sa signature ;

- une meilleure définition du médicament générique, qui tienne compte des protections assurées par le code de la propriété intellectuelle et par le code de la santé publique au titre de l'autorisation de mise sur le marché ;

- qu'une annexe au projet de loi de financement de la sécurité sociale présenterait un bilan sommaire de l'application des dispositions de l'article L. 138-9 du code de la sécurité sociale sur les remises susceptibles d'être accordées aux pharmaciens.

Le Sénat avait aussi prévu, à l'initiative de notre collègue Dominique Leclerc, que la pénalité due par le pharmacien en cas de substitution d'un médicament plus onéreux peut n'être recouvrée lorsqu'elle est inférieure à un montant fixé par arrêté.

L'Assemblée nationale n'a pas souhaité que le pharmacien qui substitue appose sa signature sur l'ordonnance, ce que votre commission regrette pour des raisons de responsabilité. Elle a préféré en revenir à sa rédaction initiale, qui est imparfaite même au regard de l'objectif poursuivi : le texte adopté par les députés ne prévoit pas que c'est bien sur l'ordonnance que le pharmacien signale la substitution et mentionne le nom de la spécialité qu'il a délivrée.

Elle a tenu compte de la préoccupation du Sénat de voir mieux défini le médicament générique, mais s'est contentée de faire une référence au code de la propriété intellectuelle, ce qui ne répond qu'imparfaitement au problème posé.

Elle n'a pas accepté, enfin, que le Parlement soit informé du contrôle de l'application des dispositions de l'article L. 138-9 du code de la sécurité sociale, ce que votre commission regrette également : en effet, l'existence, désormais, d'un double taux de remise justifie que le Parlement s'intéresse à l'application du texte qu'il s'apprête à adopter.

La seule modification introduite par le Sénat qui a été retenue, bien que sous une autre forme, par l'Assemblée nationale est celle qui concerne la substitution d'une spécialité par une spécialité un peu plus chère.

Sur les trois premiers points, votre commission vous propose de rétablir le texte adopté par le Sénat en première lecture.

Art. 24
(Art. L. 162-16 et art. L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale)
Contenu des conventions passées entre le Comité économique du médicament et les entreprises pharmaceutiques

Dans cet article qui prévoit le contenu des conventions conclues entre le Comité économique du médicament et les laboratoires et le dispositif de régulation conventionnelle des dépenses de médicament, le Sénat avait cherché à faire valoir deux préoccupations qui lui apparaissaient légitimes pour concilier les objectifs de maîtrise des dépenses de l'assurance maladie et de développement industriel :

- il avait souhaité que le secteur du médicament fasse l'objet, à la suite de l'adoption de l'ONDAM par la Parlement, d'un objectif de dépenses spécifique, et qu'il soit ainsi placé dans la même situation, ni plus, ni moins, que les secteurs représentant les autres postes de dépenses de l'assurance maladie (dépenses des médecins, dépenses hospitalières, etc.) ;

- il avait également souhaité que le légitime suivi des dépenses de pharmacie assuré, en cours d'année, par le Comité économique du médicament ne donne pas lieu à des ajustements de tarifs automatiques, la responsabilité des entreprises devant être annuellement appréciée sauf à compromettre la visibilité économique qu'a vocation à procurer le conventionnement avec l'Etat.

L'Assemblée nationale a, dans une large mesure, fait siennes ces préoccupations, même si la rédaction qu'elle propose est un peu différente de celle qui avait été retenue par le Sénat. Ainsi :

- d'une part, elle a prévu que le Comité économique mettait en oeuvre les orientations qu'il reçoit du Gouvernement, et que " ces orientations portent notamment sur les moyens propres à assurer le respect de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie " . Il y a donc, pour le secteur du médicament, des orientations spécifiques, compatibles avec le respect de l'ONDAM, mais qui ne s'y réduisent pas. Et, de la même manière que le Sénat avait prévu l'ajustement annuel des conventions en fonction de l'objectif de dépenses, l'Assemblée nationale a prévu que le comité appliquerait les orientations annuelles " à la fixation des prix à laquelle il procède ".

- d'autre part, elle a déconnecté la disposition prévoyant un suivi annuel des dépenses et les deux " rendez-vous " à quatre et huit mois de la clause plus générale prévoyant que le Comité a compétence pour initier des modifications de prix en cas de dérapage des dépenses. Il n'y a donc plus d'ajustement de prix infra-annuel automatique.

Pour l'ensemble de ces raisons, votre commission ne vous proposera pas, comme elle l'a souvent fait pour les autres articles du projet de loi, de revenir à la rédaction initiale du Sénat.

Elle vous proposera un amendement de cohérence avec les dispositions introduites à l'Assemblée nationale rappelant, dans l'ensemble du texte de l'article 24, l'existence d' " orientations propres à assurer le respect de l'ONDAM ".

Votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.

Art. 25
(Art. L. 138-10 à L. 138-19 nouveaux du code de la sécurité sociale)
Institution d'une clause de sauvegarde applicable à la progression du chiffre d'affaires de l'industrie pharmaceutique

Comme elle l'a fait à l'article 24, l'Assemblée nationale a aussi tenu compte, dans l'article 25 qui prévoit une clause de sauvegarde pour l'industrie pharmaceutique, du vote du Sénat et des arguments qui l'ont sous-tendu.

Elle y a d'ailleurs procédé au point de retenir sa rédaction, à deux exceptions près :

- elle a introduit une modification de pure forme, en remplaçant le terme de " spécialité " par celui de " médicament " ;

- elle a prévu que seules de nouvelles conventions conclues après le 1 er janvier 1999 seraient " exonérantes " du paiement de la contribution instituée par l'article 25.

Votre commission ne s'oppose pas à ce qu'il soit procédé à une renégociation des conventions des entreprises pharmaceutiques afin de les adapter au nouveau mécanisme de régulation des dépenses et de les améliorer en tant que de besoin.

C'est pourquoi, comme à l'article 24, elle ne vous proposera pas de rétablir le texte initial du Sénat, mais d'améliorer encore le texte retenu dans des termes presque conformes par les deux assemblées en adoptant deux amendements. Le premier prévoit que le chiffre d'affaires retenu pour déterminer l'assiette de la contribution des entreprises redevables est calculé en tenant compte des décisions qui ont modifié, en cours d'année, le périmètre des dépenses remboursables en ville. Le second est cohérent avec les modifications introduites à l'article 24, et précise que les données de référence sont les " orientations fondées sur l'ONDAM ".

Votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.

Art. 26 bis
(Art. L. 712-12-1 du code de la sécurité sociale)
Relations entre les agences régionales de l'hospitalisation et les cliniques privées à but lucratif

Cet article, introduit en première lecture à l'initiative de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale, tend à permettre aux agences régionales de l'hospitalisation de modifier les engagements des cliniques bénéficiant d'une autorisation de changement de lieu d'activité dans le même secteur sanitaire.

Au nom de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, M. Claude Evin, rapporteur, avait estimé que " lorsqu'un établissement de santé est autorisé à changer de lieu d'implantation sans augmenter sa capacité, il peut être néanmoins tenté d'augmenter le volume de son activité pour rentabiliser son investissement " .

Lors de l'examen du présent projet de loi en première lecture, cette argumentation est apparue peu recevable à votre commission, les engagements prix par l'établissement au titre de la première autorisation valant pour la seconde autorisation entérinant le changement de lieu d'implantation.

Elle a estimé, en outre, que cet article ne répondait pas aux conditions de recevabilité posées par l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale.

Suivant sa commission, le Sénat, en première lecture, a supprimé cet article ; en nouvelle lecture, l'Assemblée nationale a souhaité le rétablir.

Votre commission vous propose à nouveau un amendement de suppression de cet article.

Art. 27
(Art. 11-1, 27-1 à 27-5 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975
et art. L. 174-7 du code de la sécurité sociale)
Régulation des dépenses des établissements et services sociaux et médico-sociaux financées par l'assurance maladie

En première lecture, le Sénat avait adopté un amendement présenté par votre commission prévoyant que les dotations régionales seraient réparties en dotations départementales non pas par le préfet de région, comme le précisait le projet de loi, mais par le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation (ARH).

Votre commission avait rappelé que l'ARH joue, dans le cadre de la réforme mise en place par les ordonnances de 1996, un rôle essentiel pour contrôler l'offre de soins au niveau régional au moyen de la planification sanitaire, de l'allocation et de la restructuration des ressources et des relations contractuelles avec les établissements.

S'agissant de dépenses d'assurance maladie à destination des personnes handicapées ou âgées, le Sénat avait jugé important que les ARH puissent, en s'appuyant sur une vision globale des dépenses de santé au niveau régional, coordonner les interventions des dépenses hospitalières avec les dépenses sociales et médico-sociales.

L'Assemblée nationale a rétabli cet article dans la rédaction qu'elle avait adoptée en première lecture.

Votre commission vous propose un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture.

Art. 27 bis
(Art. 27-6 nouveau de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975)
Exercice de la médecine dans les établissements sociaux et médico-sociaux

Cet article prévoit que les médecins exerçant à titre libéral dans des établissements médico-sociaux hébergeant des personnes âgées dépendantes pourront conclure, avec ces établissements, des contrats pouvant porter :

- sur des modes de rémunération particuliers (autres que le paiement à l'acte) ;

- sur le paiement direct par l'établissement.

Votre commission, sans se prononcer sur le fond, avait proposé en première lecture de le supprimer, car il ne répond pas aux conditions de recevabilité fixées par l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale.

Elle avait été suivie par le Sénat.

L'Assemblée nationale a rétabli son texte de première lecture sans prendre en considération les observations formulées au Sénat.

Votre commission vous propose, comme en première lecture, de supprimer cet article.

Section 3

Branche vieillesse
Art. 29 bis
Modification du régime de l'assurance veuvage

En première lecture, le Sénat avait adopté un amendement présenté par votre commission supprimant le I de cet article qui visait à subordonner le bénéfice de l'assurance veuvage à des conditions de période de référence et de durée d'affiliation fixées par décret en Conseil d'Etat.

A l'initiative de votre commission, le Sénat avait également adopté une nouvelle rédaction du IV exactement opposée à celle adoptée par l'Assemblée nationale.

Notre Haute Assemblée avait souhaité affirmer que la majoration pour enfants des pensions de vieillesse du régime général, attribuée aux personnes ayant élevé au moins trois enfants, ne devait pas être prise en compte pour déterminer la limite de cumul entre un avantage propre et un avantage de réversion. En effet, l'inclusion dans ce plafond de cumul de la majoration pour enfants aurait eu pour effet de fixer la pension de réversion de la mère de famille à un niveau inférieur à celui qui lui aurait été attribué si elle n'avait pas eu trois enfants, ce qui apparaissait contraire à la volonté du législateur lorsqu'il entendait favoriser les assurés ayant élevé trois enfants.

En inversant la rédaction proposée par l'Assemblée nationale, le Sénat confirmait de surcroît la jurisprudence de la Cour de Cassation sur ce point.

Dans le rapport de l'Assemblée nationale consacré à la nouvelle lecture du présent projet de loi, M. Denis Jacquat, rapporteur pour l'assurance vieillesse, s'est déclaré très favorable aux deux modifications ainsi apportées par le Sénat à cet article et a proposé l'adoption dudit article dans le texte du Sénat. La commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale a par conséquent adopté cet article sans modification.

Toutefois, l'Assemblée nationale a adopté en séance publique trois amendements à cet article présentés par le Gouvernement.

Les deux premiers reviennent pour le I et le IV au texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture. Le troisième complète l'article par un paragraphe V afin de préciser que les mesures prévues au I et au II de l'article entrent en vigueur le 1 er mars 1999.

Votre commission vous propose un amendement visant à revenir au texte adopté par le Sénat en première lecture et à adopter, par coordination, une nouvelle rédaction du paragraphe V.

Section 4

Branche accidents du travail
Art. 31 bis (nouveau)
Mise en place d'un dispositif de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de l'amiante

Cet article additionnel nouveau résulte d'un amendement présenté par le Gouvernement et adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture. Il instaure un dispositif de cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de l'amiante.

Ce dispositif est ouvert :

- aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante ;

- aux salariés et anciens salariés atteints d'une maladie professionnelle liée à l'amiante (asbestose, tumeur pleurale primitive, mésothéliome, cancer broncho-pulmonaire).

Les salariés atteints d'une maladie professionnelle liée à l'amiante pourront cesser leur activité à l'âge de 50 ans. Pour les salariés ayant travaillé dans des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, l'âge de cessation anticipée de l'activité sera calculé en déduisant de l'âge légal de la retraite (60 ans) un tiers des années d'activité passées dans ce secteur, le résultat ne pouvant être inférieur à 50 ans.

L'allocation versée sera égale à l'allocation de préretraite accordée dans le cadre du Fonds national pour l'emploi. Elle sera attribuée et servie par les caisses régionales d'assurance maladie ; elle cessera d'être versée lorsque le bénéficiaire remplit les conditions pour bénéficier d'une pension de vieillesse au taux plein.

Les bénéficiaires et leurs ayants droit bénéficieront en outre des prestations en nature des assurances maladie et maternité du régime général et leur couverture vieillesse (régime de base et régimes complémentaires) sera prise en charge.

Le financement de ce dispositif sera assuré par un fonds spécifique créé par le présent article et intitulé " Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ".

Ce fonds sera alimenté par une contribution de l'Etat et un versement de la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale. La gestion du fonds sera contrôlée par un conseil de surveillance composé de représentants de l'Etat, des organisations siégeant à la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles et de personnalités qualifiées.

L'exposé des motifs de l'amendement précise les modalités de financement prévues à titre transitoire pour l'année 1999. Plusieurs milliers de personnes seraient susceptibles d'être concernées par ce dispositif en 1999, pour un coût estimé à 400 millions de francs : 100 millions de francs seront pris en charge par la sécurité sociale, le solde étant couvert en 1999 par le budget du ministère de l'Emploi et de la Solidarité.

Votre commission ne saurait naturellement être défavorable à ce dispositif très attendu par les victimes de l'amiante.

Elle s'interroge toutefois sur la constitutionnalité de la procédure utilisée par le Gouvernement consistant à introduire cette disposition en nouvelle lecture.

Dans sa décision n° 98-402 DC du 25 juin 1998 sur la loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, le Conseil constitutionnel a considéré " qu'il résulte des dispositions combinées des articles 39, 44 et 45 de la Constitution que le droit d'amendement, qui est le corollaire de l'initiative législative, peut, sous réserve des limitations posées aux troisième et quatrième alinéas de l'article 45, s'exercer à chaque stade de la procédure législative ; que, toutefois, il ressort de l'économie de l'article 45 que des adjonctions ne sauraient, en principe, être apportées au texte soumis à la délibération des assemblées après la réunion de la commission mixte paritaire ; qu'en effet, s'il en était ainsi, des mesures nouvelles, résultant de telles adjonctions, pourraient être adoptées sans avoir fait l'objet d'un examen lors des lectures antérieures à la réunion de la commission mixte paritaire et, en cas de désaccord entre les assemblées, sans être soumises à la procédure de conciliation confiée par l'article 45 de la Constitution à cette commission ".

A la lumière de ce principe, le Conseil constitutionnel a conclu que " les seuls amendements susceptibles d'être adoptés à ce stade de la procédure doivent soit être en relation directe avec une disposition du texte en discussion, soit être dictés par la nécessité d'assurer une coordination avec d'autres textes en cours d'examen au Parlement ; que doivent, en conséquence, être regardées comme adoptées selon une procédure irrégulière les dispositions résultant d'amendements introduits après la réunion de la commission mixte paritaire qui ne remplissent pas l'une ou l'autre de ces conditions ".

L'article 31 bis ne semble remplir aucune des deux conditions fixées par le Conseil constitutionnel.

Votre commission s'interroge par conséquent sur la signification réelle que peut revêtir l'introduction en nouvelle lecture d'une disposition susceptible d'être annulée par le Conseil constitutionnel si celui-ci se voit saisi du texte adopté définitivement par l'Assemblée nationale.

Elle s'étonne que ce dispositif, issu d'un amendement déposé à l'Assemblée nationale en séance publique le 26 novembre, ait été annoncé par le Gouvernement à l'occasion d'une conférence de presse tenue le 19 novembre, soit le surlendemain de l'examen du présent projet de loi par le Sénat en première lecture.

Elle regrette que le Gouvernement ait attendu ainsi l'ultime étape de la navette parlementaire pour présenter cette disposition importante qui risque, dans ces conditions, de rester au stade de la gesticulation législative.

Elle constate que le Gouvernement n'a pas été à même, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, de trouver un moyen terme entre les réformes remises à plus tard (retraites, cotisations patronales...) et les amendements de séance (modification du régime des aides à domicile, réforme de l'assurance veuvage, mise en place par le présent article d'une cessation anticipée d'activité pour les travailleurs de l'amiante...).

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Section 5

Objectifs de dépenses par branche
Art. 32
Fixation des objectifs de dépenses par branche

Le seul objectif de dépenses modifié par l'Assemblée nationale en première lecture était celui de la branche " vieillesse veuvage ", majoré de 300 millions de francs :

- 200 millions de francs liés à la revalorisation de 2 % du minimum vieillesse et des minima sociaux des pensions de réversion, mesure réglementaire sur laquelle s'est engagée le Gouvernement ;

- 100 millions de francs au titre de l'allocation veuvage, revalorisée par l'article 29 bis (nouveau).

Le Sénat avait tenu compte en première lecture de son vote maintenant en l'état les majorations pour âge des allocations familiales (870 millions de francs) et de sa décision de prévoir un abattement d'un milliard de francs de frais de gestion de la CNAF au titre de la gestion et du contrôle du RMI, prestation versée par la CNAF pour le compte de l'Etat.

L'Assemblée nationale a rétabli les objectifs de dépenses votés en première lecture, à la réserve d'une majoration de 100 millions de francs de l'objectif de dépenses maladie-maternité-invalidité, tenant compte de l'augmentation des dépenses en faveur des soins d'accompagnement par coordination avec la majoration de l'ONDAM (cf. ci-dessous).

Objectifs de dépenses

 

Texte initial

Texte AN première lecture

Texte Sénat première lecture

Texte AN nouvelle lecture

Maladie-maternité invalidité-décès

697,7

697,7

697,7

697,8

Vieillesse-veuvage

781,1

781,4

781,4

781,4

Accidents du travail

53,0

53,0

53,0

53,0

Famille

256,9

256,9

256,8

256,9

Total des dépenses

1.788,7

1.789,0

1.788,9

1.789,1

Il est à noter que l'objectif de dépenses " accidents du travail " reste inchangé, malgré l'introduction en nouvelle lecture de l'article 31 bis (nouveau), relatif à la retraite anticipée des salariés et anciens salariés des établissements de fabrication des matériaux contenant de l'amiante. Cette absence de modification a ému, lors du débat à l'Assemblée nationale, le rapporteur de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, M. Alfred Recours. M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé, a précisé alors que les 200 millions nécessaires viendraient " du budget de l'Etat " 4( * ) , après avoir indiqué quelques instants auparavant que si le financement serait assuré à parité par l'Etat et par la branche accidents du travail, " en 1999, l'Etat prendrait en charge à titre transitoire la quasi-totalité du financement " 5( * ) .

Votre commission a proposé de rétablir, à l'article 11 bis , une taxe additionnelle de santé publique sur le tabac dont le produit est évalué à 1,4 milliard de francs intégralement au bénéfice de l'assurance maladie aux lieu et place d'un dispositif à venir dans le projet de loi de finances rectificatif qui ne procurerait à la sécurité sociale qu'une recette de 100 millions de francs.

Considérant que le fondement juridique de cette taxe additionnelle suppose qu'elle soit, au regard des règles communautaires, assortie d'une " finalité spécifique " votre commission estime qu'il est dès lors souhaitable qu'elle corresponde non pas à une amélioration des équilibres financiers de la sécurité sociale mais à des actions précises dans le domaine de la santé.

Pour des raisons de procédure, elle ne peut toutefois pas augmenter à hauteur de 1,3 milliard de francs l'objectif de dépense de la branche assurance maladie.

En revanche, elle émet le souhait que ce produit supplémentaire soit affecté :

- à hauteur de 300 millions de francs pour financer le développement des soins palliatifs, notamment à l'hôpital, cette enveloppe venant en complément des 100 millions de francs de dépenses de même nature inscrites dans l'ONDAM ;

- pour un milliard de francs, pour alimenter le fonds d'accompagnement social pour la modernisation des hôpitaux (ce milliard de francs supplémentaire s'ajoute aux 300 millions annoncés par le Gouvernement et au milliard de francs retiré de l'ONDAM par un amendement à l'article 33 du projet de loi).

Sous réserve de cette observation, votre commission vous propose d'adopter un amendement identique à celui voté par le Sénat en première lecture, concernant les dépenses de la branche famille.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Section 6

ONDAM
Art. 33
Objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM)

En première lecture, le Sénat, sur proposition de votre commission, avait adopté deux amendements à cet article.

Le premier a diminué d'un milliard de francs le montant de l'ONDAM 1999 afin d'abonder le Fonds d'accompagnement social pour la modernisation des hôpitaux doté, pour 1999 comme en 1998 (hors ONDAM), de 300 millions de francs seulement.

Votre commission avait estimé, comme le conseil d'administration de la CNAMTS, que les marges existantes, du fait de la croissance devaient être utilisées, non pour accompagner l'évolution spontanée des dépenses, mais pour adapter l'offre de soins, notamment l'offre de soins hospitalière.

Le second amendement complétait le dispositif introduit par l'Assemblée nationale en prévoyant que l'annexe C du projet de loi de financement de la sécurité sociale comporterait une évaluation de l'impact prévisionnel des mesures, qu'il comporte sur les comptes des régimes obligatoires de base, du régime général et sur l'ONDAM.

En nouvelle lecture, sur proposition de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, l'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à rétablir le texte adopté par elle en première lecture.

Sur proposition du Gouvernement, l'ONDAM a été majoré de 100 millions de francs par rapport tant au projet de loi initial qu'au texte de l'Assemblée nationale en première lecture. Cette somme serait consacrée -selon les explications fournies par le Gouvernement lors de l'examen de l'article 11 bis- au développement des soins d'accompagnement (création d'unités fixes dans les régions qui en sont dépourvues et des unités mobiles supplémentaires, développement des soins d'accompagnement à domicile).

Votre commission vous propose deux amendements identiques à ceux adoptés par le Sénat en première lecture : le premier minorant l'ONDAM d'un milliard de francs au profit du fonds d'accompagnement social pour la modernisation des hôpitaux, le second rétablissant le dernier alinéa de cet article dans le texte voté par le Sénat en première lecture.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Section 7

Mesures relatives à la trésorerie
Art. 34
Ratification du relèvement du plafond des ressources non permanentes applicables au régime général

Cet article vise à ratifier le décret du 26 août 1998 relevant le plafond d'avances de trésorerie au régime général de 20 à 31 milliards de francs.

Le Sénat avait supprimé cet article en première lecture. Votre commission avait précisé que les trois raisons avancées par le Gouvernement, dans le rapport adressé au Parlement pour justifier le relèvement du plafond, étaient soit irrecevable (majoration de l'allocation de rentrée scolaire), soit prévisible (effets de trésorerie de la CSG sur patrimoine et sur placements), soit due à sa propre inertie (dérapage des dépenses d'assurance maladie).

Votre commission avait souhaité ainsi affirmer la nécessaire neutralité des opérations de trésorerie entre l'Etat et la sécurité sociale et souligner le problème émanant de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire, qui pourrait faire l'objet d'un décret d'avance, au cas où le Gouvernement ne souhaite pas la prévoir en loi de finances initiale.

L'Assemblée nationale, en nouvelle lecture, a rétabli l'article 34.

Votre commission constate que le Gouvernement n'a pas pris la peine de répondre à l'argumentation développée.

Elle observe que l'article 9 du projet de loi de finances rectificative pour 1998 autorise la ratification du décret n° 98-734 du 21 août 1998 portant ouverture de crédits à titre d'avance. Ce décret d'avances est intervenu cinq jours avant le décret relevant le plafond d'avances de trésorerie au régime général. Sa lecture est instructive ; portant sur 4,8 milliards de francs, ce décret ouvre, par exemple, des crédits pour des " frais de réceptions et de voyages exceptionnels " (Affaires étrangères), pour des " interventions en faveur de l'information historique " (Anciens combattants) ou pour des " interventions culturelles d'intérêt national " (Culture et communication), à l'évidente urgence. Cette même urgence n'a pas été reconnue à la majoration de l'allocation de rentrée scolaire.

Votre commission aurait volontiers renoncé à proposer la suppression de cet article si le Gouvernement avait pris des engagements pour l'avenir : ne pas faire supporter à la sécurité sociale le coût de la procédure d'urgence adoptée et recourir ainsi à un décret d'avance permettant de mettre sans délais à la disposition de la CNAF les fonds nécessaires au paiement d'une éventuelle majoration de l'allocation de rentrée scolaire, décidée pendant l'été 1999.

En l'absence d'un tel engagement du Gouvernement, votre commission vous propose à nouveau un amendement de suppression de cet article.

Art. 35 bis
Gestion des excédents de trésorerie

Cet article, résultant d'un amendement adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, vise à interdire les branches de placer leurs excédents durables de trésorerie en dehors du " tronc commun " de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale.

Le Sénat l'avait supprimé en première lecture, avec avis favorable du Gouvernement. Votre commission avait indiqué que si l'objectif poursuivi était louable, il était prématuré de revenir sur cette possibilité offerte aux branches -d'ailleurs davantage théorique que réelle- à partir du moment où la notion d'excédents comptables n'était pas actuellement définie clairement par le code de la sécurité sociale.

Malgré l'avis défavorable du Gouvernement, estimant qu'il n'était pas souhaitable de revenir sur le principe d'autonomie financière des branches, l'Assemblée nationale a rétabli son texte de première lecture.

Votre commission partage pleinement cette position du Gouvernement.

En conséquence, votre commission vous propose d'adopter à nouveau un amendement de suppression de cet article.

Art. 36
Plafonnement des ressources non permanentes

Le Sénat avait supprimé la possibilité donnée à la CNRACL de recourir à l'emprunt. Votre commission, appuyée par un amendement présenté par le groupe socialiste, avait indiqué que la CNRACL étant structurellement excédentaire, il était absurde qu'elle ait à recourir à l'emprunt. Cette solution de facilité évite en fait au Gouvernement de réformer le système de la compensation spécifique ou " surcompensation ".

En nouvelle lecture, l'Assemblée nationale est revenue à son texte de première lecture.

Votre commission souligne qu'il est particulièrement choquant de considérer que le fait de prévoir une possibilité d'emprunter est une facilité de gestion comme une autre. Elle estime que la réforme de la " surcompensation " est urgente.

Votre commission vous propose en conséquence un amendement visant à revenir au texte voté par le Sénat en première lecture.

RAPPORT ANNEXÉ A L'ARTICLE PREMIER

I. RAPPORT ANNEXE À L'ARTICLE PREMIER ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE EN NOUVELLE LECTURE

Notre système de protection sociale assure la garantie de droits fondamentaux et constitue un outil majeur de solidarité et un puissant vecteur de cohésion sociale.

Le Gouvernement entend donc le renforcer et le consolider. Ainsi nos régimes de retraite par répartition doivent être pérennisés et des mécanismes d'épargnes privés ne sauraient s'y substituer. De même, l'introduction des assurances privées dans la couverture maladie de base est refusée par le Gouvernement, elle serait incompatible avec la volonté du Gouvernement de promouvoir un égal accès de tous aux soins. Le retour à l'équilibre financier de 1999 s'inscrit dans cette perspective; notre protection sociale serait menacée si elle devait vivre à crédit.

Le Gouvernement entend approfondir les solidarités inscrites dans notre système de protection sociale : l'instauration d'une couverture maladie universelle, les réformes de l'aide publique apportées aux familles, la loi de lutte contre l'exclusion, le progrès dans la couverture des maladies professionnelles témoignent clairement de cette volonté.

Enfin, la politique du Gouvernement en matière de sécurité sociale doit s'inscrire dans la politique générale qu'il conduit en faveur de l'emploi. Après la réforme des cotisations salariales, le Gouvernement souhaite engager une réforme des cotisations patronales favorable à l'emploi.

A. - UNE POLITIQUE DE SANTÉ AU SERVICE DES POPULATIONS

La politique de santé du Gouvernement s'organise autour de sept objectifs majeurs.

1. Associer nos concitoyens à la définition de la politique de la santé

Le Gouvernement étudiera l'opportunité de donner les moyens financiers aux observatoires régionaux de la santé pour remplir correctement leurs missions.

Les questions de santé concernent les professionnels de santé, les associations, les élus et l'ensemble de nos concitoyens. Elles sont au coeur de leurs préoccupations. Les associer à la redéfinition de notre politique de santé est essentiel pour apporter une meilleure réponse aux besoins, améliorer la qualité des prestations sanitaires, faire reconnaître les aspirations et les droits des patients. En permettant un débat public sur les enjeux de la santé, les Etats généraux constituent un élément essentiel de la démocratie sanitaire que le Gouvernement entend bâtir.

2. Faire vivre et développer les droits du malade

Le malade est un citoyen bénéficiant de l'ensemble des droits reconnus à tout être humain. Ses droits à l'information sur son état de santé, au consentement aux soins qui lui sont prodigués et au respect de sa dignité à tous les stades de son traitement nécessitent une plus grande sensibilisation et une formation adaptée des différents professionnels de santé à l'exercice de ces droits.

Le développement des procédures de conciliation doit permettre aux malades s'estimant victimes du non-respect de leurs droits de trouver le plus rapidement possible une réponse appropriée à leur situation.

L'inégalité des malades victimes d'accidents sanitaires devant l'origine ou la nature de ces accidents nécessite d'être étudiée ainsi que l'indemnisation de l'aléa thérapeutique.

3. Renforcer la politique de santé publique

a) Accroître la sécurité sanitaire

Les trois institutions créées par la loi du 1er juillet 1998 - l'Institut de veille sanitaire, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments - permettront de mettre en oeuvre une politique active et cohérente de sécurité sanitaire.

La sécurité et la qualité des actes de soins seront renforcées par une politique active de lutte contre les infections nosocomiales, par le renforcement des normes pour les activités de soins (périnatalité, réanimation), par la diffusion de recommandations de bonnes pratiques tant en ville qu'à l'hôpital.

Le Gouvernement s'engage à présenter au Parlement un programme de lutte contre les infections nosocomiales dès le début de l'année 1999.

b) Accroître les efforts de prévention des causes de morbidité et de mortalité évitables

Le Gouvernement a engagé une politique de lutte contre le saturnisme ; les mesures qui nécessitent une intervention législative ont été intégrées dans la loi de lutte contre l'exclusion.

La prévention du suicide chez les jeunes fait l'objet d'un programme triennal de prévention chez les adolescents et les adultes jeunes, lancé début 1998. L'objectif retenu est de réduire de 10 % en l'an 2000 le nombre de décès par suicide.

Le Gouvernement mettra en place au début de l'année 1999 un dispositif d'informations concernant la contraception et un programme de prévention des grossesses non désirées des adolescentes.

La prévention des dépendances (alcoolisme, tabagisme, toxicomanie) sera renforcée. S'agissant de l'alcool, les centres d'hygiène alimentaire et d'alcoologie seront renforcés par leur prise en charge par l'assurance maladie à compter du 1er janvier prochain.

Un programme national de dépistage des cancers a été engagé. La loi de financement prévoit à cet égard la prise en charge à 100 % des actes de dépistage. Le dépistage des cancers féminins sera généralisé dans les trois ans et le dépistage du cancer du colon étendu. Ce dépistage reposera sur une organisation permettant un contrôle de sa qualité à toutes les étapes.

La France a été le premier pays à rendre disponibles à l'été 1997 les traitements prophylactiques contre le sida. Progrès majeurs pour les patients, les thérapies anti-rétrovirales sont maintenant dispensées en officine de ville. Ces avancées sur le plan thérapeutique n'autorisent aucun relâchement de l'effort en matière de prévention et d'information.

L'année 1999 donnera lieu à un plan d'ensemble de lutte contre l'hépatite C. Ce plan se fonde sur de nouveaux moyens consacrés à la recherche, un élargissement des campagnes de dépistage, un accès facilité aux traitements. La politique de lutte contre l'hépatite C sera organisée autour de pôles de références associant établissements hospitaliers et médecins de ville.

La lutte contre le dopage est reconnue comme une priorité nationale de protection sociale et de la politique de santé publique.

Dans le domaine de la protection de la santé des sportifs, le Gouvernement étudiera s'il convient de procéder au remboursement de la consultation médicale nécessaire à l'obtention de la première licence sportive. Cette préoccupation permettrait de donner une vraie dimension de prévention à cette première consultation. Celle-ci doit répondre à un cahier des charges précis.

c) Mieux prendre en charge la douleur et les soins palliatifs

Le Gouvernement a mis en place un plan sur trois ans pour développer les soins palliatifs et améliorer la prise en charge de la douleur. Ces deux plans comportent à chaque fois une information large du public, un renforcement de la formation initiale et continue des professionnels de santé et une amélioration de l'organisation des soins. En ce qui concerne la lutte contre la douleur, le carnet à souches sera supprimé à la fin de l'année et remplacé par des ordonnances sécurisées qui seront utilisées pour toutes les prescriptions. Des protocoles de traitement de la douleur, déléguant aux infirmiers la prescription d'antalgiques, seront affichés dans les services d'urgence et de chirurgie. Les outils permettant d'apprécier l'intensité de la douleur seront généralisés.

d) Mieux prendre en charge la compensation du handicap auditif

Le handicap auditif est aujourd'hui mieux maîtrisé tant par la précision audiométrique que par l'évolution des techniques mises en oeuvre. Mais, en revanche, le cadre réglementaire relatif à la prise en charge des matériels de compensation du handicap auditif (audio-prothèses) reste insatisfaisant. C'est pourquoi le Gouvernement a engagé une étude permettant de dresser un bilan des prix et des marges réellement pratiqués dans ce secteur qui sera prochainement élargie à l'ensemble des problèmes posés par la prise en charge actuelle de ces matériels. A partir des résultats de cette étude, des propositions visant à améliorer la prise en charge des appareils destinés à compenser le handicap auditif seront élaborées.

e) Développer la prévention et les soins dentaires

Sont étendus aux centres de santé et plus généralement aux structures de soins salariés des mesures équivalentes aux dispositions régissant les actions de soins et de prévention prévues par la convention du 18 avril 1997, en particulier l'actuel bilan de prévention et de suivi des soins dentaires gratuits pour les jeunes de quinze ans.

f) Engager une véritable politique gérontologique

Le Gouvernement s'engage en 1999 à définir une véritable politique de gériatrie et de gérontologie s'appuyant sur la formation de l'ensemble des personnels de santé et sur la coordination des acteurs intervenant dans le soin aux personnes âgées.

4. Permettre à tous d'accéder aux soins

La poursuite de cet objectif suppose de stabiliser, voire d'accroître dans la mesure du possible, les niveaux de remboursement de l'ensemble de la population mais également d'apporter une attention particulière aux personnes exclues de l'accès aux soins.

Le Gouvernement présentera un projet de loi instaurant une couverture maladie universelle. Dans le cadre de ce projet de loi, le Gouvernement n'entend pas se limiter à garantir à tous les résidents une affiliation à un régime de base. Il entend permettre réellement un égal accès aux soins en assurant, aux plus modestes, le bénéfice d'une couverture complémentaire et du tiers payant.

Le rapport de M. Jean-Claude Boulard, parlementaire en mission, rendu public en septembre, permet d'éclairer le choix entre les diverses options pour la mise en oeuvre du projet. Une concertation est engagée sur la base de ce rapport avec l'ensemble des parties prenantes à ce projet. Le Gouvernement déposera un projet de loi au cours de l'automne 1998.

5. Améliorer la sécurité au travail et mieux prendre en charge les maladies professionnelles

Les cas de maladies professionnelles reconnues sont passés d'environ 5 000 en 1990 à 12 700 en 1996. Il n'en demeure pas moins que les maladies professionnelles sont actuellement sous-déclarées et que la complexité des procédures contrarie leur reconnaissance. Cette situation est inacceptable car elle fait obstacle à l'organisation de la prévention et, pour certaines victimes, à l'exercice de leurs droits.

Le Gouvernement entend donc :

- Améliorer la sécurité au travail. La protection des travailleurs contre les risques chimiques et cancérigènes sera consolidée ; les dispositions relatives à la protection contre les rayonnements ionisants seront réaménagées. L'action des médecins du travail dans la prévention des risques professionnels doit être réaffirmée et développée. Les conditions de gestion et de fonctionnement des services de médecine du travail seront clarifiées et adaptées à partir de la concertation engagée avec les partenaires sociaux.

- Garantir les droits des victimes. Le Gouvernement propose de revoir les règles de reconnaissance des maladies professionnelles. La prescription qui éteint les droits d'une victime ne doit plus courir à partir de la date de la première constatation médicale de la maladie, mais à partir de la constatation de l'origine professionnelle de la maladie. Les droits des victimes de l'amiante seront réouverts. Les délais de réponse aux demandes de réparation au titre des maladies professionnelles seront raccourcis.

- Améliorer la réparation des maladies professionnelles. Le barème d'invalidité en matière de maladies professionnelles sera rendu opposable aux caisses de sécurité sociale. Ce document qui souffre de nombreux et importants défauts sera réactualisé ; le haut comité médical de sécurité sociale en est saisi. La réparation des pneumoconioses sera instruite selon le droit commun de la réparation des maladies professionnelles. Les dispositions dérogatoires qui figurent actuellement dans le code de la sécurité sociale seront supprimées. Les tableaux des maladies professionnelles seront adaptés pour tenir compte de l'évolution des connaissances notamment en matière de cancers professionnels. Le tableau relatif aux lombalgies sera publié et entrera en application. Les rentes accidents du travail seront mensualisées dès lors que le taux d'incapacité du bénéficiaire est égal ou supérieur à 50 %.

6. Améliorer la qualité des soins et utiliser de manière optimale les ressources consacrées à la santé

a) Médecine de ville : moderniser notre système de soins avec les professionnels de santé

Promouvoir le juste soin, améliorer la coordination des soins entre les divers professionnels, évaluer la pertinence des pratiques tant individuelles que collectives, adapter l'offre aux besoins, telles sont les politiques structurelles qui permettront, en médecine ambulatoire, à la fois d'améliorer la qualité des soins et d'utiliser de manière optimale les ressources consacrées à la santé.

La mise en oeuvre de ces politiques doit reposer sur une politique conventionnelle forte. Un partenariat actif entre caisses et professionnels de santé libéraux, au niveau national mais aussi, au plus près du terrain, dans chaque circonscription de caisse, est à cet égard nécessaire.

Le Gouvernement entend poursuivre la politique qu'il a engagée autour des axes suivants :


• La connaissance de l'activité de notre système de soins ambulatoire doit être améliorée. La réalisation d'une classification commune des actes est accélérée. L'objectif est de pouvoir procéder au codage de l'ensemble des actes et des prestations au cours de l'an 2000. Une commission pour la transparence de l'information médicale est constituée afin de garantir la fiabilité et la pertinence des informations sur l'évolution des dépenses.


• L'informatisation de notre système de santé doit être mise au service de la qualité des soins et de la modernisation de la pratique médicale. En mettant en place une mission pour l'informatisation du système de santé, l'Etat s'est donné les moyens d'assurer la cohérence des initiatives diverses qui concourent à ce projet. Le réseau santé social a été mis en place. Les applications proposées sur ce réseau vont se développer, leur qualité sera garantie par une procédure d'agrément. Le Gouvernement proposera au Parlement les dispositions législatives nécessaires au développement de Vitale 2.


• L'évaluation des pratiques médicales et paramédicales doit être développée. Les modalités d'action du contrôle médical sont en cours de rénovation. L'évaluation des pratiques par les professionnels de santé sera développée en s'appuyant notamment sur les unions régionales de médecins et les instances professionnelles propres aux professions paramédicales. Le développement de l'évaluation s'appuiera sur les recommandations de bonnes pratiques établies par l'ANAES.


• Rendue obligatoire, la formation médicale continue des médecins n'a pas connu les développements souhaitables. Le Gouvernement proposera au Parlement les dispositions législatives nécessaires pour lui donner une nouvelle impulsion. Une concertation est engagée sur ce thème avec les représentants des médecins libéraux mais également avec les médecins hospitaliers et salariés.


• Notre système de santé souffre de cloisonnements excessifs qui nuisent à la qualité des soins et sont source de dépenses inutiles. Le Gouvernement entend soutenir et favoriser les initiatives visant à une meilleure coordination des soins. Par ailleurs, le développement des réseaux pouvant associer médecine de ville et hôpital, professions médicales et paramédicales, permet d'améliorer la prise en charge des patients, de mieux concilier proximité et sécurité. La loi de financement ouvre, en ce domaine, des possibilités d'actions nouvelles aux partenaires conventionnels.


• L'exercice des professions paramédicales s'est profondément transformé au cours de ces dernières années pour répondre aux besoins de la population et à l'évolution de la science et des techniques. C'est pourquoi, le Gouvernement entend clarifier les rôles respectifs des médecins et des professions paramédicales dans la prise en charge des malades, par une adaptation des textes les rendant conformes aux pratiques et à leur évolution souhaitable. Le Gouvernement s'engage par ailleurs à doter les professions concernées de règles professionnelles et d'instances professionnelles propres permettant de favoriser les conditions d'un exercice de qualité.


• Notre système de santé est trop exclusivement centré sur l'acte curatif. La loi de financement ouvre la possibilité aux caisses de prendre en charge d'autres activités telles que la prévention, l'évaluation, l'éducation sanitaire. Il appartiendra aux caisses et aux professionnels de santé, dans le cadre conventionnel, de définir les dispositifs adaptés.


• La maîtrise de la démographie médicale est essentielle pour garantir le meilleur accès aux soins comme pour assurer la maîtrise des dépenses. Des dispositions législatives sont proposées au Parlement pour accroître la possibilité d'action des partenaires conventionnels en ce domaine et les autoriser à mener des politiques sélectives adaptées à la diversité des situations.

Des moyens sont nécessaires pour promouvoir l'ensemble de ces évolutions de notre système de soin ambulatoire. Un fonds d'aide à la qualité des soins de ville est créé et doté de 500 millions de francs.

b) Le médicament : rationaliser la prescription et les remboursements

La France se caractérise par un niveau global de consommation de médicaments très élevé, une surconsommation avérée pour certaines classes thérapeutiques telles que les antidépresseurs ou les antibiotiques, un faible développement des génériques. Cette situation est insatisfaisante au regard des exigences d'efficience de notre système de santé et préjudiciable en termes de santé publique. Les maladies iatrogènes représentent environ un million de journées d'hospitalisation.

Aussi le Gouvernement a-t-il engagé un ensemble de politiques structurelles visant à :

- lutter contre la surconsommation médicamenteuse. La taxe sur la promotion pharmaceutique a été augmentée dès 1998. La politique conventionnelle conduite par le Comité économique du médicament vise à obtenir une réduction du volume des classes où la surconsommation est avérée. Le développement des recommandations de bonnes pratiques permettra de réorienter les prescriptions ;

- développer les génériques. Un répertoire complet des génériques est disponible depuis juillet 1998. Le droit de substitution accordé aux pharmaciens, sauf refus explicite des médecins, permettra le développement de ce type de produit ;

- médicaliser le remboursement. La sécurité sociale doit concentrer ses efforts en matière de remboursement sur les médicaments dont l'efficacité médicale est avérée. Les critères de prise en charge des médicaments seront revus pour tenir compte tant de la gravité de la maladie que du service médical rendu. Une réévaluation de l'apport thérapeutique de l'ensemble des médicaments remboursables sera réalisée au cours des trois ans qui viennent.

Pour conduire l'ensemble de ces évolutions, le Gouvernement entend s'appuyer sur une politique conventionnelle active.

c) L'hôpital : promouvoir la qualité et adapter l'offre aux besoins

Promouvoir la qualité des soins, adapter notre offre hospitalière aux besoins, favoriser les coopérations entre établissements et avec la médecine de ville, améliorer l'efficience globale du système hospitalier, tels sont les objectifs généraux de la politique hospitalière du Gouvernement.

En particulier, dans un souci d'accroissement de la sécurité sanitaire et de qualité des soins, la situation des professions hospitalières à forte pénibilité (anesthésistes, urgentistes, obstétriciens) doit être prise en compte. Des améliorations des conditions de travail de ces professions doivent être envisagées, en particulier au regard de la législation européenne (directive 93/104/CE) sur la question du temps de travail. Il importe d'augmenter l'attractivité de ces professions afin d'apporter une réponse allant dans le sens des conclusions du rapport Nicolas-Duret.

La promotion de la qualité à l'hôpital passe notamment par le développement de l'accréditation. Cette procédure permettra de vérifier sur la base d'une méthodologie fiable, le niveau de performances sanitaires des établissements. L'ANAES a établi un référentiel d'accréditation. Il est en cours de test sur le terrain. Les premières démarches d'accréditation débuteront en 1999.

Notre offre hospitalière doit poursuivre son adaptation. C'est dans ce souci que la révision des schémas régionaux d'organisation sanitaire a été entreprise. Cet exercice de planification sanitaire est conduit avec le souci d'associer étroitement à la réflexion les établissements et leurs personnels, mais également les représentants des usagers et les élus locaux. Il permettra une meilleure prise en compte des besoins de santé.

La garantie offerte à tous d'un accès à des soins de qualité passe par l'organisation de réseaux entre établissements ou entre services qui garantiront à chacun une orientation vers une structure adaptée à son cas. Une telle organisation a été définie pour la sécurité périnatale et la cancérologie. Le Gouvernement entend poursuivre dans cette voie pour d'autres pathologies.

Le Gouvernement poursuivra son effort de réduction des inégalités entre régions. Les dotations régionales seront différenciées à partir des besoins régionaux, des indicateurs sanitaires et des indicateurs d'efficience. La régionalisation de l'objectif clinique privé, entamée en 1998, sera poursuivie. De même, la réduction des inégalités de dotation entre les hôpitaux, notamment à partir des indications fournies par le PMSI, sera poursuivie.

Le Gouvernement présentera un rapport sur l'évolution et la place des services de médecine non spécialisés à l'hôpital.

7. Assurer la régulation des dépenses

Le Gouvernement est convaincu que seules des politiques structurelles, destinées tant à accroître la qualité des soins qu'à assurer une utilisation optimale des ressources, permettront de maîtriser durablement l'évolution des dépenses de santé. Toutefois, elles ne pourront porter leurs fruits que progressivement.

Il est donc nécessaire de maintenir des dispositifs assurant une régulation globale des dépenses de soins, qui existent à l'hôpital depuis la mise en place du budget global en 1983 et depuis 1991 pour les cliniques privées. Il serait toutefois nécessaire d'apprécier au plus juste les dépenses hospitalières qui ont été comptabilisées dans le poste des prescriptions réalisées en ville.

Le Gouvernement propose dans le projet de loi de financement un tel mécanisme de sauvegarde à partir des principes suivants :

- la responsabilité de la régulation ne doit pas reposer sur les seuls médecins. Ainsi, l'industrie pharmaceutique sera appelée à contribuer à l'équilibre de l'assurance maladie en cas d'évolution excessive des dépenses de médicament. De même, l'évolution des dépenses du secteur médico-social sera encadrée par une enveloppe globale.

- Les mécanismes de sauvegarde économique sont des dispositifs d'ultime recours. Ainsi, la loi de financement prévoit une obligation pour les partenaires conventionnels de négocier en cours d'année pour dresser un bilan de l'évolution des dépenses et prendre les mesures correctrices qui pourraient s'avérer nécessaires.

- Le dispositif proposé pour ce qui concerne les médecins écarte toute idée de sanction individuelle et constitue un mécanisme de régulation global traduisant la solidarité économique des médecins et de notre système de protection sociale.

B.- RÉNOVER LA POLITIQUE FAMILIALE

La politique familiale du Gouvernement s'appuie sur deux convictions : la reconnaissance du rôle des familles dans la cohésion sociale, comme lieu de solidarité et de construction de repères pour l'enfant ; l'importance d'une politique d'appui aux familles, fondée sur la volonté de répondre à leurs besoins et de conforter leurs capacités à exercer leurs obligations parentales. Après une large concertation, le Gouvernement a défini les grands axes de sa politique familiale lors de la Conférence de la famille du 12 juin.

Cette politique s'articule autour de trois objectifs :

- conforter les parents dans leur rôle éducatif. Le rôle des familles sera renforcé dans tout processus éducatif, à l'école, dans le travail social, les activités socioculturelles. Un réseau d'appui, d'écoute et de conseil aux parents et aux familles, sera mis en place conjointement par l'Etat et la CNAF ;

- faciliter la vie quotidienne des familles et concilier vie familiale et vie professionnelle. Le logement est le besoin de base des familles. Afin de faciliter l'accès des familles modestes au parc privé, les loyers plafonds de l'ALF seront significativement augmentés dans les trois ans. Les aides des caisses d'allocations familiales aux communes pour le développement des crèches seront accrues et mieux orientées vers les communes les plus pauvres. Les schémas locaux de développement de l'accueil des jeunes enfants seront généralisés. Les contrats temps libres (mis en place par les caisses d'allocations familiales) et les contrats éducatifs locaux (mis en place à l'initiative du ministère de l'éducation nationale) seront développés de façon coordonnée. Le Gouvernement entend mener une réflexion sur la mise en cohérence des divers dispositifs d'aide à la garde des enfants ;

- instaurer une politique d'aide aux familles plus juste. Après une large concertation avec les associations familiales et les partenaires sociaux, le Gouvernement poursuit sa démarche vers plus de justice dans l'aide aux familles en proposant de rétablir les allocations familiales pour toutes les familles de deux enfants et en plafonnant l'avantage fiscal lié au quotient familial. L'impôt sur le revenu jouera ainsi pleinement son rôle dans la redistribution des revenus et l'universalité des prestations familiales sera rétablie. Les allocations familiales seront étendues pour tous les enfants à charge de leurs parents, jusqu'à l'âge de vingt ans. L'ARS sera versée à toutes les familles d'un enfant. Les partenaires de la politique familiale doivent engager une réflexion sur la modulation de l'ARS en fonction de l'âge de l'enfant afin de tenir compte du coût effectif de la scolarité. Les titulaires du RMI percevront les majorations pour âge. Les majorations pour âge seront exclues des ressources prises en compte pour calculer le revenu minimum d'insertion. Le Gouvernement entend mener une réflexion en profondeur sur les jeunes adultes pour définir un dispositif adapté aux besoins de cette population qui prenne en compte son nécessaire cheminement vers la pleine autonomie.

Pour mettre en oeuvre cette politique, à la fois ambitieuse, durable et cohérente, le Gouvernement a mis en place une délégation interministérielle chargée d'animer et de coordonner l'action de l'ensemble des pouvoirs publics et d'être l'interlocuteur des associations familiales et de toutes les parties prenantes de notre politique familiale.

C.- FAIRE FACE AU DÉFI DU VIEILLISSEMENT

1. Consolider nos régimes par répartition


La situation financière de nos régimes de retraite est déséquilibrée. Ceux-ci devront faire face à partir de 2005 à l'arrivée à l'âge de la retraite des générations nombreuses nées après la seconde guerre mondiale.

Le Gouvernement entend aborder les évolutions nécessaires de nos régimes de retraite sur la base d'un diagnostic précis des problèmes auxquels ils sont confrontés. L'élaboration de ce diagnostic a été confiée au Commissariat général du plan. Il portera sur l'ensemble des régimes de retraite. Les partenaires sociaux et les représentants des régimes sont associés à l'établissement de ce diagnostic afin que l'ensemble des hypothèses qui conditionnent l'avenir de nos systèmes de retraite soient prises en compte.

C'est sur la base de ce diagnostic partagé que pourra s'ouvrir un dialogue sur les réformes à entreprendre.

Le Gouvernement prendra les décisions qui s'imposent, guidé par la volonté :

- de préserver notre système de retraite par répartition, garant de solidarités essentielles entre actifs et retraités ;

- de rechercher une meilleure équité tant entre les générations qu'entre les régimes de retraite.

Dès à présent, pour consolider nos régimes par répartition, un fonds de réserve est créé. Doté initialement de 2 milliards de francs, ce fonds pourra recevoir d'autres apports de ressource dès le courant de l'année 1999.

La loi n° 97-277 du 25 mars 1997 créant les plans d'épargne retraite ne constitue pas une bonne solution pour l'avenir de notre système de retraite ; elle favorise clairement les salariés aux revenus les plus élevés, privilégie une approche individuelle et fragilise les comptes de la sécurité sociale. Elle va à l'encontre de la politique qu'entend mener le Gouvernement dans le domaine des retraites. En conséquence, le Gouvernement proposera au Parlement en 1999, dès qu'un support législatif le permettra, l'abrogation de cette loi.

2. Améliorer la prise en charge de la dépendance

La dépendance physique ou psychique touche aujourd'hui en France environ 700 000 personnes âgées. Ce chiffre est appelé à croître du fait de l'augmentation du nombre de personnes âgées. Dès l'an 2000, nous atteindrons un million de personnes de plus de quatre-vingt-cinq ans.

Or, les dispositifs actuels de prise en charge de la dépendance à domicile et en établissement apparaissent inadaptés. Ils relèvent de plusieurs autorités publiques, ils sont très complexes, bureaucratiques et mal coordonnés.

La loi du 24 janvier 1997 qui a créé la prestation spécifique dépendance (PSD) ne constitue pas une réponse à la hauteur des besoins. De plus, sa mise en oeuvre, au vu du rapport rendu public par le Comité national de coordination gérontologique, ne paraît pas pleinement satisfaisante, notamment du fait des inégalités de traitement en résultant selon les départements.

D'ores et déjà, les dispositions législatives nécessaires ont été prises pour permettre d'atténuer les différences excessives entre les montants de PSD fixés par les conseils généraux pour les personnes âgées dépendantes accueillies en établissement. Ce montant minimal ne prendra toutefois tout son sens que lorsque la réforme de la tarification des établissements pour personnes âgées dépendantes sera effective. Cette réforme, dont les décrets devraient paraître cet automne, permettra de clarifier ce qui, dans les tarifs, relève de l'hébergement, de la dépendance ou des soins.

Par ailleurs, dans le cadre d'une politique globale de prise en charge des personnes âgées, il conviendra aussi d'améliorer les conditions de fonctionnement et de financement des dispositifs d'aide à domicile à la suite du rapport de l'inspection générale des affaires sociales et de l'inspection des finances.

D.- FAVORISER L'INSERTION DES HANDICAPÉS

Le Gouvernement conduit une politique pour l'intégration des personnes handicapées qui prend en compte de manière globale, à tous les âges de la vie, les différents aspects de l'existence et de la vie quotidienne. Cette politique s'articule autour de trois axes principaux :

- une socialisation et intégration des jeunes handicapés aussi précoces que possible, en améliorant notamment leur niveau de formation générale et en modernisant les dispositifs de formation professionnelle initiale de droit commun et spécialisés ;

- le développement des différents modes de soutien dans la vie à domicile et la vie sociale, par un accès facilité aux aides techniques et par un élargissement des missions des services et des établissements spécialisés ;

- la nécessité d'apporter parallèlement une réponse adaptée et durable à l'insuffisance chronique de solutions d'accueil pour les personnes lourdement handicapées. Le Gouvernement a souhaité inscrire cet effort dans la durée en prévoyant un programme pluriannuel (1999-2003) de création de 5500 places supplémentaires de maisons d'accueil spécialisées et de foyers à double tarification, de 8500 places de centres d'aide par le travail et de 2500 places d'ateliers protégés. Ce plan est destiné notamment à mettre définitivement un terme à la situation des jeunes adultes maintenus, faute de places, dans des centres pour enfants. Les capacités rendues ainsi à nouveau disponibles dans le secteur médico-éducatif devront être mobilisées en priorité au profit des prises en charge présentant aujourd'hui le plus de difficultés (polyhandicap, autisme, handicaps rares) ou méritant d'être encore développées (services de soins et d'éducation à domicile). Par ailleurs, seront poursuivis les programmes portant sur des formes spécifiques de prise en charge encore insuffisamment développées (autisme, traumatisés crâniens, services de soins et d'éducation spécialisée à domicile en appui à l'intégration scolaire).

E.- ASSURER L'ÉQUILIBRE DU RÉGIME GÉNÉRAL ET RÉFORMER SON MODE DE FINANCEMENT

1. Assurer l'équilibre du régime général

Une sécurité sociale en déficit est une sécurité sociale affaiblie.

Le Gouvernement a entrepris le redressement du régime général. Le déficit passe de plus de 33 milliards en 1997 à 13 milliards en 1998. L'équilibre devrait être atteint en 1999 pour la première fois depuis 1985. Ce redressement, facilité par la croissance, tient pour l'essentiel aux mesures prises dans le cadre de la loi de financement pour 1998 qui ont réduit de 21 milliards le déficit tendanciel du régime général.

2. Réformer le mode de financement de la protection sociale pour favoriser l'emploi

Une réforme d'ampleur a été engagée pour le transfert des cotisations maladie vers la CSG. Cette réforme a permis :

- un accroissement du salaire net de 1,1 % pour la grande majorité des salariés ainsi qu'un accroissement du revenu de la grande majorité des travailleurs indépendants ;

- un rééquilibrage très important des contributions respectives des revenus du travail et des revenus financiers.

Cette réforme d'équité qui a contribué au soutien de la consommation et de la croissance doit se prolonger par une réforme des cotisations patronales.

Le Gouvernement souhaite engager une telle réforme avec pour objectif d'assurer un financement de la protection sociale plus juste et plus favorable à l'emploi.

Cette réforme doit s'effectuer sans en faire supporter le coût aux ménages et sans accroître globalement les prélèvements sur les entreprises. Cette réforme aura pour objet de stabiliser le financement de la protection sociale afin d'en assurer la pérennité, en recherchant une assiette moins sensible aux variations de la masse salariale des entreprises.

La concertation avec les organisations d'employeurs et de salariés sera poursuivie en vue d'en fixer les orientations et les modalités précises avec l'objectif d'aboutir à un projet de loi au premier semestre 1999. "

II. RAPPORT ANNEXÉ À L'ARTICLE PREMIER PROPOSÉ PAR LA COMMISSION

Un projet de loi de financement de la sécurité sociale se doit d'être prudent et convaincant dans les équilibres qu'il traduit, abouti dans les analyses qu'il avance, cohérent dans les propositions qu'il formule.

Compte tenu des enjeux actuels de la protection sociale, le projet de loi de financement pour 1999 doit comporter des orientations claires.

Pour l'utilisation des marges disponibles à l'adaptation de l'offre de soins.

Comme l'estime le Conseil d'administration de la CNAMTS, il convient d'utiliser les marges disponibles pour adapter l'offre de soins, plutôt que de se contenter d'accompagner l'évolution des dépenses. Aussi, est-il proposé de réduire d'un milliard de francs, par rapport à l'évolution retenue initialement, le montant de l'ONDAM, et d'affecter ces crédits à l'accompagnement social des opérations de restructuration hospitalière.

Pour la mise en place de mécanismes de régulation des dépenses simples, médicalisés et efficaces.

En matière de régulation des dépenses médicales, le dispositif de reversements en vigueur, issu des ordonnances Juppé, posait problème. Alors que le Gouvernement souhaite aller jusqu'au bout de la régulation comptable et collective que ce dispositif comportait, il est proposé au contraire d'aller jusqu'au bout de l'individualisation de la responsabilité des médecins à laquelle il faisait aussi appel.

Ainsi, tirant les leçons du passé, il est proposé d'instituer un mécanisme simple, médicalisé et efficace de maîtrise des dépenses. Collectivement organisé par les partenaires conventionnels, il laisse les médecins maîtres de déterminer les conditions d'exercice de leur responsabilité individuelle.

Garantissant le respect des objectifs tout en organisant l'amélioration des pratiques médicales individuelles et collectives, il répond au double souci de favoriser la qualité des soins dont bénéficient les français et d'en limiter le coût.

Il tourne le dos aux usines à gaz comptables proposées par le Gouvernement.

Améliorer les conditions de la maîtrise des dépenses pharmaceutiques et le bon usage des médicaments dans des conditions compatibles avec le développement industriel, de la recherche et de l'emploi, et non entériner la mort de la politique conventionnelle : tel doit également être l'objectif poursuivi par le projet de loi. Il s'agit d'améliorer cette politique conventionnelle en renforçant ses exigences pour les laboratoires dans le cadre d'un objectif opposable de dépenses pharmaceutiques défini annuellement par le gouvernement en fonction de l'ONDAM.

Sans rejeter le principe de la taxation, ni son assiette, ni son taux, le projet de loi doit en faire un instrument encourageant les entreprises à accepter une régulation conventionnelle sérieuse.

Pour un projet cohérent et complet sur les retraites.

S'il convient de prendre acte de la mesure " symbolique " que constitue la création d'un fonds de réserve pour les retraites par répartition, il est inutile de " faire semblant ", en attribuant à ce fonds un embryon de ressources, en peaufinant la composition d'un Comité de surveillance ou en précisant les régimes bénéficiaires.

Alors même que restent parfaitement indéterminés à la fois la nature des " vraies " ressources qui l'alimenteront et qui devront se chiffrer en centaines de milliards de francs, l'affectation de ces fonds, leur mode et leur horizon de placement ou enfin les modalités de gestion qui devront être cohérentes tant avec l'origine des ressources qu'avec l'objectif des emplois.

En revanche, la mise en place d'un tel fonds de réserve relève, à l'évidence, d'un texte d'ensemble, cohérent et complet, incluant des mesures permettant de faire cesser les déficits d'aujourd'hui, de clarifier la situation des régimes spéciaux et de définir un véritable régime des fonctionnaires de l'Etat.

Pour un traitement équitable de la branche famille.

La situation financière excédentaire de la branche famille ne justifie aucunement de nouvelles économies : en conséquence, doit être rejeté le décalage de la majoration d'âge pour les allocations familiales qui n'a aucun fondement au regard des objectifs de la politique familiale.

Afin de souligner le poids des charges indues pesant sur la branche famille au titre des prestations qu'elle gère pour le compte de l'Etat, il est proposé un abattement d'un milliard de francs sur les frais de gestion de la CNAF au titre de la gestion et du contrôle du RMI.

Pour l'affirmation sans ambiguïté de la compensation intégrale des exonérations de cotisations.

Doit être réaffirmé solennellement le principe, posé par la loi du 25 juillet 1994, de la compensation intégrale pour la sécurité sociale des exonérations de charges sociales postérieures à cette loi. Ce principe est l'un des fondements de la clarification indispensable des relations et des responsabilités entre l'Etat et les régimes sociaux.

La remise en cause de ce principe est inacceptable, que ce soit pour :

- les exonérations de cotisations dans le cadre d'incitation à la réduction du temps de travail, au nom d'une prétendue " neutralité " de la mesure ;

- les dispositifs, antérieurs à 1994 et donc non compensés, qui sont prorogés au-delà de leur échéance et modifiés, telle l'exonération des charges liée à l'embauche d'un premier salarié ; dès lors qu'il y a novation juridique, il doit y avoir compensation intégrale de ces nouvelles exonérations en application de la loi de 1994 ;

- les dispositifs, également antérieurs à la loi de 1994, dont le taux d'exonération est fortement majoré, telle l'exonération portée de 30 % à 100 % pour les associations d'aide à domicile ; ces exonérations doivent être compensées à hauteur de la majoration du taux.

Pour une vraie taxe de santé publique sur les tabacs.

Conformément aux objectifs de la politique de santé publique, il est proposé de substituer à une majoration du taux de la taxe sur les tabacs en l'état sans affectation précise, une " taxe de santé publique " directement affectée à la CNAMTS.

Pour un projet de loi de financement rectificatif tirant les conséquences d'un projet initial incertain.

Le respect de la lettre comme de l'esprit de la loi organique voudrait que le Gouvernement soumette au Parlement, à la fin du printemps, un projet de loi de financement rectificatif de la sécurité sociale pour 1999 :

- tirant, d'une part, les conséquences sur les équilibres de la sécurité sociale des réformes urgentes que le Gouvernement renvoie au premier semestre de l'année prochaine : mesures structurelles indispensables dans le domaine des retraites dont il est nécessaire qu'elles interviennent dès le début de 1999, projet de loi instituant une couverture maladie universelle dont le dépôt doit intervenir avant la fin de l'année, réforme de l'assiette des cotisations employeurs sur laquelle le Gouvernement annonce qu'il arrêtera sa position dans les semaines qui viennent ;

- faisant le point, d'autre part, sur l'évolution des dépenses et des recettes au vu, notamment, de l'évolution de la conjoncture, il ne serait guère acceptable qu'une nouvelle fois le Parlement ne soit saisi d'une dérive des comptes qu'à l'occasion de la seule ratification en fin d'année d'un décret majorant le plafond de recours à l'emprunt par les régimes de sécurité sociale.

Pour une réflexion sur l'évolution des lois de financement.

La réforme constitutionnelle de 1996, instituant les lois de financement de la sécurité sociale, constitue un progrès considérable et l'amorce d'une évolution profonde. A l'occasion de l'examen du troisième projet de loi depuis cette réforme, il apparaît que cet instrument est perfectible et qu'une réflexion doit être menée tendant à une amélioration de la présentation des lois de financement et, au-delà d'une multiplication vaine des annexes, de la qualité et de la cohérence des informations fournies au Parlement.



1 Cf. la déclaration de M. Lionel Jospin, Premier ministre (France Info - mardi 24 novembre 1998 - citée par Laurent Mauduit - Le Monde jeudi 26 novembre 1998 " Affirmer une perspective, si elle est raisonnable, mais en même temps si elle est un peu volontariste, c'est aussi se donner plus de chances de l'atteindre ".

2 Mme Martine Aubry, JO Débats Sénat, séance du 16 novembre 1998, p. 4543.

3 " Il a été fait l'hypothèse pour ce compte que les suppléments de recettes générés en 1999 par les emplois créés neutraliseraient les pertes de cotisations nettes des compensations prévues par l'Etat ", in Rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 1998, Tome I, p. 133.

4 AN Compte rendu analytique officiel, 3ème séance du jeudi 26 novembre 1998, p. 17.

5 AN Compte rendu analytique officiel, 3ème séance du jeudi 26 novembre 1998, p. 15.



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