EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mardi 17 novembre 1998 sous la présidence de
M. Jacques Oudin, vice-président, la commission a
procédé, sur le
rapport
de
M. Philippe Adnot,
rapporteur spécial,
à
l'examen
des
crédits
de
l'aménagement
du
territoire
et
de
l'environnement : II.- environnement,
pour
1999.
Le rapporteur spécial a tout d'abord expliqué les raisons pour
lesquelles, malgré son attachement à la cause de la protection de
l'environnement, il n'était pas satisfait par la forte augmentation de
ce budget.
Il a précisé que ce dernier passait de 1.900 à
3.948 millions de francs compte tenu de la budgétisation
intégrale des ressources de l'Agence de l'environnement et de la
maîtrise de l'énergie (ADEME), et progressait de 14,8 %, soit
environ sept fois plus que la moyenne des dépenses de l'Etat, à
structures constantes.
Mais, a-t-il fait valoir, une telle augmentation est incompatible avec la
maîtrise des dépenses publiques et risque ainsi d'obérer,
en définitive, la capacité de financement des entreprises qui
supportent, en vertu du principe "pollueur-payeur", les charges liées
à l'amélioration de notre environnement naturel.
Or, a-t-il estimé, la progression des crédits de l'environnement
est d'autant plus critiquable à cet égard qu'elle repose sur une
majoration souvent excessive des taxes spécifiques acquittées par
les entreprises et se traduit par un alourdissement durable des charges de
l'Etat à travers de nombreuses créations d'emploi (29 à
l'administration centrale, 111 dans les services déconcentrés,
187 dans les établissements).
Il a redouté que le ministère de l'environnement ne perde ainsi
le caractère d'administration de mission qui devait absolument rester le
sien, en raison de la nature interministérielle et
décentralisée des actions en cause, ce qui permet d'obtenir la
meilleure adhésion possible de tous les intéressés.
Il a rappelé que les contributions environnementales de l'ensemble des
autres ministères (8,45 milliards de francs) et surtout des
collectivités locales (120,4 milliards de francs) et des agences de
l'eau (14,13 milliards de francs) étaient bien supérieures
à ce budget.
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial,
a expliqué
ensuite qu'il s'opposait également à l'augmentation
proposée du budget de l'environnement parce qu'elle s'accompagnait de la
création d'une taxe générale sur les activités
polluantes (TGAP) à laquelle il était hostile, ainsi que d'une
relance de la politique de maîtrise de l'énergie et des
énergies renouvelables, sur laquelle il était très
réservé.
Concernant la TGAP, il a tout d'abord fait observer que sa création
n'était pas neutre fiscalement, comme il avait été
prétendu, puisqu'elle s'était accompagnée d'augmentations
de taux des cinq taxes fusionnées, rapportant, au total,
613 millions de francs supplémentaires.
Il a ensuite précisé les autres raisons de son opposition
à la nouvelle taxe : meilleure possibilité d'accroître la
pression fiscale écologique, perte d'autonomie de l'ADEME puis des
agences de l'eau, déconnexion entre le fait générateur et
la dépense permettant, d'une part, le financement de mesures non
directement liées à la défense de l'environnement et,
d'autre part, des désaffectations de recettes préfigurées
par la contribution d'une majoration de la taxe sur les déchets au
financement de mesures relatives à la politique gouvernementale de
l'énergie.
Il a alors estimé que les économies d'énergie et les
énergies renouvelables ne résoudraient pas à elles seules
les problèmes qui se posent à la France en matière
énergétique et a jugé leur relance
prématurée, étant donné, d'une part, le contexte
économique actuel et en l'absence, d'autre part, d'un grand débat
national sur l'avenir du nucléaire.
A ces motifs d'opposition de principe s'ajoute, pour le rapporteur
spécial, une objection à caractère technique, relative aux
difficultés que risque d'éprouver le ministère à
maîtriser une telle augmentation de ses dépenses, au vu des
problèmes de consommation de crédits rencontrés au cours
des précédents exercices.
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial,
a ensuite
détaillé les évolutions de crédits prévues
et, notamment, les principales mesures nouvelles dans chaque agrégat.
Il a observé que le premier agrégat, par ordre d'importance des
dépenses, était celui relatif, soit à la prévention
des pollutions et des risques, soit à la protection de la nature, des
sites et des paysages, selon que l'on incluait ou non dans chacun des montants
concernés les ressources de la TGAP.
Il a précisé que les actions les plus coûteuses en
matière de prévention concernaient respectivement les
déchets (811 millions de francs), l'énergie
(293 millions de francs) et la pollution atmosphérique
(268 millions de francs).
S'agissant de la protection de la nature et des sites et paysages, il a
souligné l'importance de la création du fonds de gestion des
milieux naturels, doté de 164 millions de francs.
A propos de l'agrégat relatif à la protection de l'eau et des
milieux aquatiques, il a noté la sollicitation des agences de l'eau par
le budget de l'environnement à travers deux fonds de concours ainsi que
le poids des dépenses concernant la prévention des inondations,
du plan Loire (346 millions de francs) et, plus généralement, des
risques naturels.
Les observations finales du rapporteur spécial ont porté
sur :
- les risques de démembrement de l'Etat dans l'accomplissement des
missions de service public du ministère (recouvrement de la TGAP par
l'ADEME, financement de la police des eaux par les agences de bassin,
rôle des associations...) ;
- la nécessité de mieux contrôler les dépenses
des associations ;
- la possibilité de renforcer l'autorité du
ministère par des mesures statutaires ou des redistributions de
compétences, en évitant d'alourdir la dépense publique et
sans qu'il se départisse, pour autant, de son caractère
d'administration de mission.
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial,
a soumis à la
commission quatre amendements tendant, à chacun des titres de ce budget,
à tirer les conséquences du vote de suppression de la TGAP, et
à supprimer les créations d'emplois et leurs mesures
d'accompagnement ainsi que les mesures nouvelles accordées aux
associations.
Puis,
M. Roger Besse
s'est étonné qu'il soit aussi
facile de financer des créations d'emplois en matière de police
de l'eau, alors que les effectifs dans la gendarmerie ne sont pas suffisants
pour éviter d'envisager certains redéploiements qui pourraient
entraîner des fermetures d'unités en milieu rural.
M. Philippe Marini, rapporteur général,
a
souligné que l'évolution des crédits de l'environnement
pour 1999 soulevait un problème budgétaire fondamental qui
devrait faire l'objet d'un large débat en séance publique.
Il a évoqué les difficultés d'interprétation que
soulevait la rédaction de l'article 21 du projet de loi de finances
appliquant le taux réduit de taxe à la valeur ajoutée
(TVA) aux opérations de collecte, de tri et de traitement des ordures
ménagères.
M. Gérard Miquel
s'est demandé s'il ne conviendrait
pas d'exonérer les déchets ultimes de la taxe sur le stockage
intégrée dans la TGAP. Il s'est interrogé par ailleurs sur
l'éligibilité au taux réduit de TVA des déchets
recyclés et des équipements de traitement.
La commission a alors
voté
les
quatre amendements
proposés par le rapporteur spécial et
l'ensemble des
crédits du ministère de l'environnement ainsi modifiés.