6. Rétablir les conditions d'une concurrence équitable
a) Prendre en compte les " externalités " dans la tarification des modes de transport
L'usage
des véhicules entraîne des coûts qui ne leur sont pas
directement imputés par le marché : coûts
d'infrastructure (ou de congestion), coûts d'insécurité,
coûts d'environnement local (bruit et pollution des villes, effet de
coupure), coûts d'environnement global (effet de serre).
Des travaux du Conseil général des Ponts et Chaussées, non
encore rendus publics, font ainsi valoir que les usagers du réseau
routier (non urbain) paieraient 72 % de leurs coûts totaux, mais
que, à l'intérieur de cette moyenne, les poids lourds ne
paieraient que 66 % de leurs seuls coûts d'infrastructure et
40 % des coûts totaux. Les voitures particulières paieraient
beaucoup plus que leurs coûts d'infrastructures et un peu moins que leurs
coûts totaux, mais elles ne sont pas toutes assujetties au même
régime fiscal.
Or, à défaut d'une imputation de toutes ces
" externalités " aux usagers des transports, le volume des
transports augmente au-delà de leur utilité économique et
sociale réelle, dans la mesure où la demande est très
sensible aux prix
84(
*
)
.
De plus, dans le cadre du marché unique, le souci de rapprocher la
fiscalité française de la moyenne des fiscalités
européennes a provoqué une baisse de 18 % de la
fiscalité pesant sur les véhicules entre 1988 et 1993. Le taux de
TVA appliqué aux automobiles a notamment été ramené
de 33,33 % à 18,6 %. Il semblerait que cette baisse du prix
des automobiles ait encouragé l'achat de véhicules plus
puissants, amplifiant les effets du contre-choc pétrolier.
S'il convient donc de se féliciter de la revalorisation de la grille
tarifaire de la taxe à l'essieu, qui fait l'objet de l'article 50 du
projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et
financier (DDOEF) encore en discussion, on doit regretter que l'Etat
français ait mis tant de temps à adopter des dispositions que la
directive européenne n° 93/89/CEE du 25 octobre 1993 lui
faisait obligation de transposer avant le 1
er
janvier
1995.
b) Réduire l'écart de taxation entre essence et diesel
38 % des véhicules particuliers, 68 % des
véhicules utilitaires légers et 100 % des véhicules
industriels sont équipés de motorisation diesel.
Or, la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) n'est
que de 2,4 F par litre pour le gazole alors qu'elle est de 3,84 F par
litre pour le supercarburant sans plomb pour des prix hors taxe de chacun de
ces produits sensiblement similaires. Ce différentiel en faveur du
gazole a pour effet non seulement d'encourager les particuliers à
acquérir des véhicules diesel, mais aussi de conforter l'avantage
comparatif dont bénéficient les transporteurs routiers.
En outre, le faible prix du gazole conduit les possesseurs de véhicules
diesel à les utiliser davantage : selon des études, le
kilométrage annuel des ménages qui achètent une voiture
diesel en remplacement de leur voiture à essence augmenterait de 15 % en
moyenne.
Enfin, pour l'instance d'évaluation précitée,
"
les avantages fiscaux dont bénéficient le diesel ne
sauraient être justifiés par le souci d'économiser de
l'énergie car, même si on attribue au diesel un gain
énergétique de 10 %, la tep économisée
coûterait près de 40 000 F en pertes de recettes
fiscales
. "
Il semble en conséquence légitime de rééquilibrer
la fiscalité du gazole
85(
*
)
.