TRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Nous sommes aujourd'hui invités à examiner trois projets de loi
autorisant l'accession de la Pologne, de la Hongrie et de la République
tchèque au
traité de Washington
du 4 avril 1949 instituant
l'Alliance atlantique.
La base légale de ce processus d'élargissement est
l'article
10
de ce traité, qui précise que "
Les Parties peuvent, par
un accord unanime, inviter à accéder au traité tout autre
Etat européen susceptible de favoriser le développement des
principes du présent traité et de contribuer à la
sécurité de la région de l'Atlantique Nord. Tout Etat
ainsi invité peut devenir partie au traité en déposant son
instrument d'accession auprès du gouvernement des Etats-Unis
d'Amérique (...)".
Cette disposition juridique s'inscrit dans le contexte politique
général établi par
l'Acte final d'Helsinki
de 1975
reconnaissant aux Etats parties le droit d'appartenir ou non à "
des
organisations internationales, d'être partie ou non à des
traités bilatéraux ou multilatéraux y compris le droit
d'être partie ou non à des traités d'Alliance
".
L'Alliance atlantique a déjà eu, par trois fois, l'occasion de
s'élargir à de nouveaux membres : à la Grèce et
à la Turquie en 1952, en 1955 à la République
Fédérale d'Allemagne et à l'Espagne en 1982.
Toutefois, l'élargissement qu'il nous est à présent
proposé d'accepter revêt une dimension historique. Il est la
spectaculaire traduction juridique, politique et militaire de l'ère
nouvelle dans laquelle notre continent est entré au début des
années 1990, après la chute de l'Union soviétique
-l'ennemi d'hier- et l'émancipation des nations qu'elle avait
dominé pendant 40 ans.
Dès le sommet de l'Alliance qui s'est tenu à Bruxelles en janvier
1994, les dirigeants des pays membres avaient donné une réponse
de principe favorable à l'accession "
d'autres Etats
européens
" en son sein. Ce n'est que plus de quatre ans plus tard,
au sommet de Madrid du 8 juillet 1997 que ces mêmes responsables ont
décidé d'inviter, parmi douze candidats, la Hongrie, la Pologne
et la République tchèque à engager les pourparlers
d'adhésion avec l'OTAN.
Ces négociations ont été l'occasion, pour les trois pays
retenus dans cette "première vague" d'élargissement, de souscrire
aux objectifs et aux valeurs de l'Alliance, de s'engager à accepter son
acquis juridique et politique, de participer pleinement à ses
activités politiques et militaires, de ne pas bloquer de futurs
élargissements et de contribuer aux dépenses communes.
C'est à la réunion de Bruxelles des ministres des affaires
étrangères de l'Alliance atlantique, le 16 décembre 1997,
que furent alors signés les trois protocoles d'adhésion, en vue
d'une entrée effective des trois pays au sein de l'Alliance avant le
sommet de Washington d'avril 1999, à l'occasion du cinquantième
anniversaire de l'Alliance.
Votre Commission des Affaires étrangères, de la Défense et
des Forces armées, pour l'examen de ces trois projets de loi, a
procédé à des auditions
1(
*
)
approfondies de représentants et
d'experts du ministère des Affaires étrangères, du
ministère de la Défense et du monde universitaire.
Lors de l'examen du présent rapport, au cours de sa réunion du
mercredi 13 mai, votre Commission des Affaires étrangères, de la
Défense et des Forces armées a été le cadre d'un
débat où se sont exprimées de vives réserves
à l'encontre du processus que traduisent ces trois textes. Plusieurs
commissaires se sont émus de voir l'Alliance atlantique évoluer
et changer d'une façon aussi significative sans que le Parlement y ait
été, préalablement, davantage associé. Des
inquiétudes se sont fait jour sur le retour à un partenariat
privilégié entre les Etats-Unis et la Russie pour la gestion de
la sécurité européenne, au détriment du cadre
spécifiquement européen que nous souhaitons promouvoir. Ne
prend-on pas un risque politique majeur à engager un processus qui
provoque une crispation aussi évidente en Russie, surtout lorsque
l'actuel exécutif aura cédé la place à de nouveaux
responsables ? N'engageons-nous pas enfin une démarche dont le
véritable objectif serait de favoriser des intérêts
politiques ou économiques américains ?
L'importance politique de l'enjeu et la prise en compte du nouveau contexte
stratégique en Europe ont conduit votre Commission des Affaires
étrangères, de la Défense et des Forces armées
à adopter les trois présents projets de loi.
C'est néanmoins à ces légitimes interrogations que votre
rapporteur se propose d'apporter des éléments de réponse
en rappelant l'évolution récente de l'Alliance atlantique et les
ambitions qu'elle se donne pour conforter la sécurité sur notre
continent.