II. LA PROPOSITION DE LOI : UNE NOUVELLE TENTATIVE DE TRANSPOSITION EN DROIT INTERNE DE LA DIRECTIVE DU 25 JUILLET 1985
Présentée dès le mois de juillet 1993
-soit très rapidement après l'ouverture de la dernière
législature- la proposition de loi de Mme Nicole Catala tend à
assurer cette transposition en reprenant la plupart des solutions issues des
travaux de la commission mixte paritaire. Néanmoins, contrairement au
texte élaboré par cette dernière et à la position
retenue par le Sénat lors de la deuxième lecture du projet de
loi, elle permet au producteur de s'exonérer des risques de
" développement " (
article 12
) ce qui -votre
rapporteur
y reviendra- constitue une divergence majeure.
En outre, les éléments et produits du corps humain seraient
exclus du champ d'application du nouveau dispositif et resteraient en
conséquence soumis aux régimes de responsabilité de droit
commun (
article 4
).
Sous cette double réserve -dont la portée est loin d'être
négligeable- l'économie du dispositif proposé est pour
l'essentiel une reprise du texte issu des travaux de la Commission mixte
paritaire.
En conséquence, inséré après l'article 1386 du code
civil, il repose sur les principes suivants :
- le producteur sera responsable du dommage causé par un défaut
de son produit qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime
(
article 2
) ;
- la réparation concernera les dommages qui résultent d'une
atteinte à la personne ou à un bien autre que le produit
défectueux lui-même (
article 3
) ;
- un produit sera défectueux lorsqu'il n'offrira pas "
la
sécurité à laquelle on peut légitimement
s'attendre
" (
article 5
) ;
- le demandeur devra prouver le dommage, le défaut et le lien de
causalité entre le défaut et le dommage (
article 10
) ;
- le producteur pourra être responsable du défaut alors même
que le produit a été fabriqué dans le respect des
règles de l'art ou de normes existantes ou qu'il a fait l'objet d'une
autorisation administrative (
article 11
) ;
- outre des risques de " développement " le producteur
pourra
s'exonérer s'il prouve qu'il n'a pas mis le produit en circulation, que
le défaut ayant causé le dommage n'existait pas au moment
où il a mis le produit en circulation, que le produit n'a pas
été destiné à la vente ou à toute autre
forme de distribution, que le défaut est dû à la
conformité du produit avec des règles impératives d'ordre
législatif ou réglementaire (
article 12
) ;
- néanmoins, ces causes d'exonération ne pourront être
invoquées par le producteur lorsque celui-ci, en présence d'un
défaut qui s'est révélé dans le délai de dix
ans après la mise en circulation du produit, n'aura pas pris les
dispositions propres à prévenir les conséquences
dommageables
(article 12 bis)
;
- les clauses exonératoires ou limitatives de responsabilité
à l'égard des particuliers seront réputées non
écrites (
article 16
). Cependant, la faute de la victime pourra,
dans certaines conditions, réduire ou supprimer la
responsabilité du producteur (
article 13
) ;
- la responsabilité de plein droit du producteur pour défaut de
sécurité des produits s'éteindra
dix ans
après la mise en circulation du produit (
article 17
). Les
victimes auront
trois ans
pour la mettre en oeuvre (
article 18
).
Ce nouveau régime de responsabilité, conformément à
l'article 13 de la directive, ne portera pas atteinte aux droits dont la
victime peut se prévaloir au titre du droit de la responsabilité
contractuelle ou extra-contractuelle ou au titre d'un régime
spécial de responsabilité (
article 19
). D'où il
ressort que le régime légal et jurisprudentiel en vigueur
continuera à s'appliquer.
Enfin, la présente proposition de loi reprend plusieurs dispositions du
projet de loi précité qui -hors du cadre de la directive-
modifiaient sous certains de ses aspects, le régime de la garantie des
vices cachés afin de renverser la charge de la preuve de
l'antériorité du vice à la vente (
article 21
) qui
pèse actuellement sur les victimes ; de fixer à
un an
le
délai de l'action en garantie des vices cachés
(article
23
) ; de préciser les modalités de réparation du
préjudice subi par la victime, lorsque la vente a été
faite par un professionnel
(article 22)
et les limites dans lesquelles
la forme judiciaire de la vente exclut la garantie du vendeur
(article
24).
On relèvera qu'une proposition de directive du Parlement européen
et du Conseil relative à la vente et aux garanties des biens de
consommation a été publiée au Journal officiel des
Communautés européennes du 16 octobre 1996.
La proposition de loi est applicable aux territoires d'outre-mer et à la
collectivité territoriale de Mayotte (
article 25).
En outre, en marge de ce dispositif, le régime des garanties
immobilières prévues notamment par le code civil est
étendu à certains territoires d'outre-mer et à la
collectivité territoriale de Mayotte (
article 26
).