ARTICLE 5
Prélèvement sur les réserves de
l'Institut national
de la propriété industrielle
(INPI)
Commentaire : le présent article tend à
opérer, pour 1997, un prélèvement exceptionnel de 120
millions de francs sur les réserves de l'Institut national de la
propriété industrielle (INPI), au profit du budget de l'Etat.
I. - L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE
A. SES MISSIONS ET SON ACTIVITÉ
En vertu de l'article L 1411-1 du code de la propriété
intellectuelle, l'Institut national de la propriété industrielle
(INPI) - créé par la loi du 19 avril 1951 - est un
établissement public doté de la personnalité civile et de
l'autonomie financière, placé auprès du ministre de
l'industrie.
Cet établissement a pour mission :
- de centraliser et diffuser toute information nécessaire pour la
protection des innovations et pour l'enregistrement des entreprises, ainsi que
d'engager toute action de sensibilisation et de formation dans ces domaines ;
- d'appliquer les lois et règlements en matière de
propriété industrielle, de registre du commerce et des
sociétés et de répertoire des métiers ; à
cet effet, l'INPI pourvoit, notamment, à la réception des
dépôts de demandes des titres de propriété
industrielle ou annexes à la propriété industrielle,
à leur examen et à leur délivrance ou enregistrement et
à la surveillance de leur maintien ; il centralise le registre du
commerce et des sociétés, le répertoire des métiers
et le bulletin officiel des annonces civiles et commerciales ; il assure la
diffusion des informations techniques, commerciales et financières
contenues dans les titres de propriété industrielle et
instruments centralisés de publicité légale ;
- de prendre toute initiative en vue d'une adaptation permanente du droit
national et international aux besoins des innovateurs et des entreprises ;
à ce titre, il propose au ministre chargé de la
propriété industrielle toute réforme qu'il estime utile en
ces matières ; il participe à l'élaboration des accords
internationaux ainsi qu'à la représentation de la France dans les
organisations internationales compétentes, c'est-à-dire
l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI),
l'Office européen des brevets (OEB), et l'Office d'harmonisation du
marché intérieur (OHMI).
L'article R. 411-1 du code de la propriété intellectuelle
précise les attributions de l'INPI.
L'Institut national de la propriété industrielle a
notamment pour attributions :
1° l'examen des demandes de brevets d'invention et la délivrance
des brevets, ainsi que de tous documents les concernant ;
2° l'enregistrement et la publication des marques de fabrique, de commerce
ou de service ;
3° la délivrance de certificats d'identité et de
renseignements concernant las antériorités en matière de
marques de fabrique, de commerce ou de service ;
4° la centralisation et la conservation des dépôts de dessins
et modèles, ainsi que leur publication ;
5° l'enregistrement et la conservation du dépôt des
enveloppes doubles destinées à faciliter la preuve de la
création des dessins et modèles ;
6° la tenue des registres de brevets, des marques et des dessins et
modèles, l'inscription de tous actes affectant la
propriété des brevets d'invention, des marques de fabrique, de
commerce ou de service et des dessins et modèles ;
7° l'application des dispositions contenues dans les lois et
règlements sur la protection temporaire de la propriété
industrielle dans les expositions, sur les récompenses industrielles et
sur les marques d'origine ;
8° l'application des accords internationaux en matière de
propriété industrielle, et notamment les relations
administratives avec le bureau international pour la protection de la
propriété industrielle à Berne et l'Institut international
des brevets à La Haye ;
9° la tenue du registre national du commerce et des
sociétés et du répertoire central des métiers ;
10° la conservation du dépôt des actes constitutifs et
modificatifs de sociétés déposés dans les greffes
des tribunaux de commerce et des tribunaux civils en tenant lieu ;
11° la centralisation des renseignements figurant dans les registres
du commerce et des métiers et le Bulletin officiel desdits registres ;
12° la centralisation, la conservation et la mise à la
disposition du public de toute documentation technique et juridique concernant
la propriété industrielle ;
13° la gestion du Bulletin officiel de la propriété
industrielle.
L'INPI a poursuivi et intensifié ses actions de sensibilisation et de
formation à la propriété industrielle, notamment en
matière de brevets.
L'INPI a également développé des actions de communication
externe comme les "Trophées de l'Innovation", à vocation
régionale et nationale, ou encore l'organisation de "tables rondes sur
l'innovation et la propriété industrielle" dans les
régions.
Après l'ouverture fin 1995 de la dixième délégation
régionale à Toulouse qui a été pleinement
opérationnelle en 1996, l'INPI s'apprête à en ouvrir une
onzième dans l'ouest de la France.
Il participe activement à la lutte contre la contrefaçon, en
coopération étroite avec d'autres administrations.
L'INPI, en coopération avec la Direction des relations
extérieures et de l'expansion économique (DREE) du
ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, a un
programme de mise à disposition d'experts en propriété
industrielle auprès des postes d'expansion économiques à
l'étranger. Le premier expert est en poste à Bangkok depuis la
fin du mois de septembre 1997.
A ce jour, l'INPI a conclu des accords bilatéraux de coopération
avec quatorze pays et négocie actuellement trois nouveaux accords.
B. L'ETAT DES DÉPÔTS DE BREVETS EN FRANCE
Le dépôt d'une demande de brevet pour une protection en France
peut se faire selon trois voies :
- la voie nationale (la demande est déposée par l'INPI),
- la voie européenne (la demande est déposée à
l'OEB),
- et, la voie internationale (la demande est déposée à
l'OMPI).
Le nombre de dépôts de brevets pour une protection en France est
en forte augmentation (+ 10 % en 1995 et 1996). La voie internationale de
dépôts (+ 22 %) est depuis 1995 la voie de dépôt la
plus utilisée. Les voies de dépôts nationales et
européennes se stabilisent après plusieurs années de
baisse.
Les dépôts d'origine française connaissent une hausse
sensible ; en particulier, les dépôts passant par la voie
nationale sont en augmentation (+ 4 % entre 1995 et 1996), pour la
première fois depuis plus de 10 ans, pour atteindre leur niveau le plus
élevé depuis 1973. Il est toutefois trop tôt pour savoir si
ce phénomène d'augmentation est de nature purement conjoncturelle
ou s'il s'agit d'un phénomène tendanciel.
Les dépôts d'origine américaine, en constante augmentation,
sont à l'origine de la forte progression de la voie internationale.
Les principaux partenaires de la France continuent de vouloir protéger
leurs inventions sur le territoire français, et cela dans une proportion
croissante.
Inversement, les déposants français ne se limitent pas à
une protection sur le territoire français : plus de quatre
dépôts sur dix donnent lieu à une extension de la
protection à l'étranger.
Le nombre de brevets délivrés en 1995, en France, était de
12.500, soit moins, a priori qu'en 1960 (15.000)
Cependant, deux confusions sont à éviter.
D'une part, tous les brevets déposés au cours d'une année
ne sont pas délivrés la même année. Il existe en
effet un délai d'environ trois ans entre le dépôt et la
délivrance d'un brevet, dont un délai de publication
incompressible de 18 mois.
D'autre part, si le nombre de dépôts de brevets en France diminue
effectivement, cela tient à la création, en 1978, de l'Office
européen des brevets. Ainsi, la diminution continue, sur le long terme,
des dépôts de brevets en France est compensée par la
progression de ces dépôts par la voie européenne.
Quelques chiffres significatifs de l'exercice 1996
Brevets
16.400 demandes de brevet déposées en France
36.646 demandes européennes désignant la France
45.626 demandes internationales (PCT) désignant la France
Soit un total de 98.672 demandes pour un effet en France.
Marques
51.932 demandes de premier enregistrement national
20.666 demandes de renouvellement national
10.374 demandes de premier dépôt international
2.611 demandes de renouvellement international
Soit un total de 85.583 demandes d'enregistrement en France.
Dessins et modèles
7.454 dépôts de un ou plusieurs modèles comprenant au
total 62.952 reproductions
26.855 dépôts d'enveloppes Soleau
RNCS
282.357 immatriculations
678.758 inscriptions modificatives
181.807 radiations
574.156 actes déposés en annexe au registre
709.914 comptes annuels déposés
Répertoire des métiers
98.408 immatriculations
73.045 inscriptions modificatives
97.924 radiations
II. LE PRÉLÈVEMENT SUR LES RÉSERVES DE L'INPI
Les dépenses de l'INPI, en 1996, ont été
inférieures à 950 millions de francs (dépenses de
fonctionnement et d'équipement, et frais entraînés par la
participation de la France aux organismes internationaux de
propriété industrielle).
Ses ressources comprennent essentiellement les redevances de procédure
qu'il perçoit (plus de 78 % des recettes).
Principales redevances de procédure
Brevets
Dépôt d'une demande 250 F
Rapport de recherche 4.500 F
Délivrance et impression du fascicule 560 F
Annuité de maintien en vigueur de 190 F à 3.815 F selon le
quantième
par exemple : 2ème annuité 190 F
5ème annuité 335 F
10ème annuité 1.305 F
15ème annuité 2.315 F
20ème annuité 3.815 F
Marques
Premier dépôt jusqu'à 3 classes 1.250 F
Renouvellement jusqu'à 3 classes 1.400 F
Par classe au-delà de 3 (dépôt ou renouvellement) 250 F
Dessins et modèles
Déclaration de dépôt 250 F
Par reproduction en noir et blanc 150 F
Par reproduction en couleur 300 F
Enveloppe soleau 55 F
RNCS
Immatriculations
Personnes morales 75 F
Personnes physiques 38 F
Inscriptions modificatives 38 F
Dépôts d'actes de sociétés 38 F
Dépôts de bilans 35 F
Les tarifs de redevances de brevets ont augmenté depuis 1988 de
3,75 % en moyenne par an. Depuis 1992, l'augmentation moyenne annuelle est
de 1,8 %.
Les tarifs des redevances relèvent de la compétence
réglementaire (ils sont fixés par arrêté).
Le tableau ci-après compare les tarifs en vigueur en France et dans
d'autres pays européens en 1996 :
|
Suède |
RoyaumeUni |
Italie |
France |
Suisse |
Pays
|
Allemagne |
|
Redevances de dépôt et de délivrance |
1.728 |
2.237 |
559 |
5.310 |
9.695 |
4.701 |
2.472 |
|
Maintien en vigueur pendant 20 ans |
23.149 |
30.381 |
34.149 |
31.130 |
23.149 |
64.752 |
77.281 |
|
Total sur 20 ans |
24.876 |
32.619 |
34.717 |
36.440 |
49.906 |
69.453 |
79.699 |
|
Le coût global de dépôt de brevet en France se situe donc sur une position médiane. Le coût français des redevances de dépôt et de délivrance peut paraître important, sans être le plus élevé, mais il tient compte de la production du rapport de recherche européen qui est valable, sans coût supplémentaire, dans le cas où un déposant par la voie française souhaite procéder à une demande de brevet européen. |
Au 31 décembre 1996, le fonds de roulement de l'INPI
était constitué d'une réserve de 143 millions de
francs et d'une provision pour rapport de recherche de 126 millions de
francs, soit un total de 269 millions de francs.
Il convient cependant de préciser que la provision pour rapports de
recherche résulte d'une charge certaine, bien que décalée
dans le temps, correspondant à une prestation de service
sous-traitée à l'Office européen des brevets (OEB). Cette
prestation de service donne lieu au paiement d'une redevance par le
déposant au moment du dépôt de la demande de brevet.
Par conséquent, l'INPI ne peut pas disposer librement de cette partie
du fonds de roulement.
Les réserves disponibles
de l'Institut étaient donc de
143 millions de francs au 31 décembre 1996 et devraient, selon
des projections récentes, avoisiner 185 millions de francs à
la fin de l'exercice 1997.
Le prélèvement envisagé ramènerait les
réserves disponibles à environ 65 millions de francs, et
rendrait plus difficile l'exécution des projets de l'INPI, notamment :
- la délocalisation à Lille de certains services
(100 transferts d'emplois et 50 créations de postes), dont le
coût pour le bâtiment -acquisition et rénovation- est de
l'ordre de 71 millions de francs ;
- le projet de regroupement des services de Paris et Nanterre en un seul
lieu situé dans l'est de Paris ; ce projet est actuellement
estimé entre 100 et 200 millions de francs (solde entre le
coût d'un bâtiment neuf et la revente des bâtiments actuels) ;
- le projet de rénovation et de modernisation de la gestion des
ressources humaines, chiffré à 23 millions de francs en
année pleine.
En outre, les usagers de la propriété industrielle, notamment
les entreprises, pourraient considérer que l'INPI n'a pas vocation
à prélever de l'argent pour le compte du budget
général et qu'il serait plus conforme à ses missions
d'utiliser les disponibilités qu'il dégage pour le moderniser,
améliorer la qualité des services rendus aux clients, participer
au financement de la recherche et de l'innovation, ou minorer les redevances
liées à la propriété industrielle et contribuer,
dans son domaine, à l'allégement des charges des entreprises.
Il faut noter que le prélèvement envisagé serait le
troisième, le premier ayant été opéré en
1991 à hauteur de 550 millions de francs, et le second en 1995 pour
215 millions de francs.
Or, ces prélèvements, associés à l'obligation
faite à l'établissement de présenter des budgets en
équilibre, ont conduit à relever très sensiblement les
tarifs de redevances, notamment après le prélèvement de
1991.
Du reste, ces trois prélèvements, qui représentent un
total de 885 millions de francs -soit une moyenne annuelle de
125 millions de francs- reviennent à augmenter de 25 % les
redevances payées par les inventeurs. Ils sont donc
préjudiciables à l'innovation.
En outre, la France risque ainsi de se retrouver à contre-courant de la
tendance européenne : le conseil d'administration de l'Office
européen des brevets (OEB) a en effet décidé, le
1er juillet 1997, de diminuer certaines de ses redevances pour aboutir
à une baisse moyenne de l'ordre de 15 %.
Enfin, un tel prélèvement -véritable incitation à
la mauvaise gestion- n'aurait aucune raison d'être en l'absence de
réserves, qui peuvent se constituer en raison du montant trop
élevé des redevances.
Par conséquent, la commission sera vigilante quant aux mesures
gouvernementales tendant à réduire le tarif de ces redevances.
Décision de la commission : sous le bénéfice des
observations précédentes, votre commission vous propose de
supprimer le présent article.