C. LES PRINCIPAUX FACTEURS D'INTÉGRATION PAR LA SOCIALISATION SE SONT SINGULIÈREMENT AFFADIS
Pendant longtemps, l'intégration dans la
société française des étrangers venus s'installer
sur notre territoire a reposé sur quelques grandes institutions :
l'école, la famille, le service militaire, la religion...
- Mais l'école ne joue plus aujourd'hui le rôle de creuset -au
sein duquel se transmettaient les valeurs républicaines- qui fut
longtemps le sien.
Alors qu'elle constituait le meilleur instrument d'assimilation, elle n'est
plus en état d'intégrer de manière satisfaisante dans une
même classe des enfants d'origine trop diverse, dont certains ne
maîtrisent même pas notre langue.
- La cellule familiale est également en crise.
- Le service militaire obligatoire et universel, qui pouvait aussi constituer
un puissant facteur d'intégration, est en voie de disparition.
- Enfin, les religions implantées de longue date ont perdu de leur
influence alors même qu'une autre progresse de jour en jour.
Sans doute ces différentes mutations contribuent-elles à
expliquer que la deuxième génération d'immigrés,
loin de se fondre plus aisément que la première dans le creuset
français, s'avère celle qui a le plus de difficultés
-voire parfois de répulsion- à s'intégrer.
Or, il importe d'avoir à l'esprit que la nationalité a pu
être définie comme "
un lien juridique ayant à sa
base un fait social de rattachement, une solidarité effective
d'existence, d'intérêts, de sentiments, joints à une
réciprocité de droits et de devoirs
", selon les termes
retenus par la Cour internationale de justice dans un arrêt Nottebohm du
6 avril 1955.
L'intégration systématique de ceux qui n'ont pas manifesté
leur volonté de devenir Français -au mieux les plus
indifférents, au pire les plus hostiles-, peut-elle trouver une
justification au regard d'une telle définition ?
D. CE SUJET EST SENSIBLE ENTRE TOUS, DÈS LORS QU'IL TOUCHE AU SENTIMENT NATIONAL
Enfin, en France peut-être plus qu'ailleurs, le concept
d'Etat-Nation revêt une dimension historique et symbolique
particulièrement forte. En outre, un lien consubstantiel relie la
nationalité et la citoyenneté avec les droits et devoirs qui s'y
rattachent, notamment le droit de vote.
De ce fait et dés lors qu'il touche au sentiment national, l'enjeu du
droit de la nationalité est, en France, perçu comme un enjeu
majeur autour duquel se cristallisent de regrettables polémiques.
Une acquisition automatique de la nationalité risque dans ces conditions
d'apparaître comme une banalisation de la citoyenneté et de
nourrir les sentiments xénophobes.
Surtout, elle heurte le sentiment d'une grande majorité de nos
concitoyens. Un récent sondage montre en effet qu'à propos des
enfants nés en France de parents de nationalité
étrangère, 76 % des Français interrogés
pensent que ces enfants doivent être reconnus comme Français
seulement s'ils en manifestent la volonté, alors que 19 % seulement
des personnes interrogées considèrent que ces enfants doivent
être automatiquement reconnus comme Français
4(
*
)
.
Ce projet de loi n'aurait-il pour seule vertu que de réveiller le
sentiment national ?
*
Ainsi que l'avait souligné la Commission de la
nationalité, l'intégration à la Nation ne peut pas
résulter d'une adhésion tacite. Elle exige au contraire une
adhésion claire aux principes et aux règles de vie de la
société française, ce qui justifie que soit requise une
manifestation volontaire de cette adhésion.
A défaut, une quantité excessive d'altérités
pourrait risquer d'altérer l'identité de la Nation.