RAPPORT N° 162 - PROJET DE LOI, ADOPTE PAR L'ASSEMBLEE NATIONALE, APRES DECLARATION D'URGENCE, RELATIF A LA NATIONALITE


M. Christian BONNET, Sénateur


COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LEGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL, DU REGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GENERALE - RAPPORT N° 162 - 1997/1998

Table des matières






N° 162

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 10 décembre 1997.

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, relatif à la nationalité ,

Par M. Christian BONNET,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, Charles Jolibois, Robert Pagès, Georges Othily, vice-présidents ; Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, Paul Masson, secrétaires ; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, José Balarello, François Blaizot, André Bohl, Christian Bonnet, Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel Charmant, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Jean Derian, Michel Dreyfus-Schmidt, Michel Duffour, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Lucien Lanier, Guy Lèguevaques, Daniel Millaud, Jean-Claude Peyronnet, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre Schosteck, Alex Türk, Maurice Ulrich, Robert-Paul Vigouroux.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 328 , 443, et T.A. 41 .

Sénat : 145 (1997-1998).
Nationalité.

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le mercredi 10 décembre 1997 sous la présidence de M. Jacques Larché, président, la commission des Lois du Sénat a examiné, sur le rapport de M. Christian Bonnet, le projet de loi relatif à la nationalité.

M. Christian Bonnet, rapporteur, a rappelé que, moins de cinq ans après le vote de la loi du 22 juillet 1993 réformant le droit de la nationalité, ce projet tendait à remettre en cause le fondement de cette réforme -à savoir l'exigence d'une manifestation de volonté entre 16 et 21 ans pour l'acquisition de la nationalité française par les enfants nés en France de parents étrangers- pour en revenir au principe d'une acquisition automatique de la nationalité française par ces jeunes à l'âge de leur majorité.

Le rapporteur a jugé que ce projet de loi n'était ni nécessaire, ni opportun.

· Pas nécessaire, parce que le droit du sol issu de la tradition républicaine n'avait aucunement été remis en cause par la loi de 1993 et que rien ne justifiait de toucher au principe de la manifestation de volonté, même si l'application -d'ailleurs globalement satisfaisante- de la loi du 22 juillet 1993 pouvait sans doute être améliorée, en corrigeant certains dysfonctionnements constatés dans sa mise en oeuvre.

La commission a vivement regretté ces dysfonctionnements, imputables pour l'essentiel à l'administration, ainsi que la très nette insuffisance de l'information dispensée auprès des jeunes concernés.

· Pas opportun parce que :

- c'étaient essentiellement des préoccupations relatives au service militaire qui avaient autrefois conduit à l'instauration, par la loi du 26 juin 1889, d'une acquisition automatique de la nationalité française par les immigrés de la " deuxième génération ";

- les flux d'immigrés appelés à acquérir la nationalité française, autrefois à dominante européenne et de culture proche de la notre, avaient désormais une origine tant géographique que culturelle plus lointaine ;

- les principaux facteurs d'intégration -l'école, la famille, le service militaire ou la religion- s'étaient singulièrement affadis, au détriment de la capacité d'intégration de la société française.

Ni opportun non plus parce que le projet de loi heurtait le sentiment d'une grande majorité de Français, au vu des résultats d'un récent sondage.

Le rapporteur a pleinement souscrit à la protestation élevée auprès du Premier ministre par M. René Monory, Président du Sénat, contre la déclaration d'urgence sur le projet de loi, d'autant moins justifiée qu'un bilan définitif de la réforme de 1993 ne pouvait même pas être établi pour une génération entière de jeunes concernés par la manifestation de volonté et que, paradoxalement, le Gouvernement proposait de différer de six mois l'entrée en vigueur de la nouvelle loi.

En conséquence, la commission des Lois du Sénat a rejeté toutes les dispositions du projet de loi remettant en cause l'exigence d'une démarche volontaire pour l'acquisition de la nationalité française par les jeunes nés en France de parents étrangers.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est aujourd'hui saisi, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi relatif à la nationalité, adopté par l'Assemblée nationale le 28 novembre 1997.

Moins de cinq ans après le vote de la loi du 22 juillet 1993 réformant le droit de la nationalité, le projet de loi présenté par le Gouvernement tend à remettre en cause le fondement de cette réforme, à savoir l'exigence d'une manifestation de volonté, entre 16 et 21 ans, pour l'acquisition de la nationalité française par les jeunes nés en France de parents étrangers.

En effet, il nous est proposé de revenir au principe d'une acquisition automatique de la nationalité française par ces jeunes à l'âge de leur majorité, qui prévalait avant la réforme de 1993, les conditions de résidence en France traditionnellement exigées étant par ailleurs assouplies.

L'acquisition de la nationalité française pourrait en outre être anticipée par une démarche volontaire de l'intéressé lui-même à partir de l'âge de 16 ans, ou de ses parents en son nom et avec son consentement personnel, dès l'âge de 13 ans, ainsi que l'a souhaité l'Assemblée nationale.

Tel est le coeur du dispositif du projet de loi, auquel l'Assemblée nationale a ajouté un certain nombre de dispositions diverses et qui comprend en outre quelques aménagements techniques tendant notamment à faciliter la preuve de la nationalité française.

A la lumière des riches informations recueillies au cours d'une journée d'auditions publiques 1( * ) , votre commission des Lois s'est interrogée tant sur la nécessité que sur l'opportunité d'une nouvelle réforme du droit de la nationalité.

I. CE PROJET DE LOI EST-IL NÉCESSAIRE, QUI PLUS EST EN URGENCE ?

A l'appui d'une nouvelle réforme, le Gouvernement invoque, d'une part, un prétendu retour à la tradition républicaine du droit du sol et, d'autre part, les difficultés d'application de la loi du 22 juillet 1993.

Ces arguments ont-ils quelque fondement ?

A. LE DROIT DU SOL ISSU DE LA TRADITION RÉPUBLICAINE N'A AUCUNEMENT ÉTÉ REMIS EN CAUSE EN 1993

Contrairement à ce qui est trop fréquemment affirmé, le droit du sol n'a pas été modifié, dans son principe, par la réforme de 1993 qui s'était inspirée des propositions largement consensuelles de la Commission de la nationalité réunie en 1987 sous la présidence de M. Marceau Long.

1. Le droit du sol n'a pas été modifié dans son principe

En dépit des interprétations confuses qui ont pu en être faites, la loi du 22 juillet 1993 n'a pas mis en cause le droit des jeunes nés en France de parents étrangers à acquérir la nationalité française.

En effet, ainsi que le reconnaît lui-même M. Patrick Weil 2( * ) dans un rapport intitulé " Des conditions d'application du principe du droit du sol pour l'attribution de la nationalité française ", réalisé à la demande du Gouvernement et dont les propositions ont servi de base à l'élaboration du présent projet de loi : " La tradition républicaine du droit du sol est, depuis 1889, fondée sur un principe : l'enfant né en France d'un parent lui-même né en France est Français à la naissance, car deux générations nées sur le sol de France ont permis une totale assimilation ; en outre, l'enfant né en France de parents étrangers non nés en France est Français à sa majorité c'est-à-dire au moment où, grâce notamment à l'école, l'influence de la société est censée l'emporter sur celle éventuellement contraire de la famille. Or, ce principe n'a pas été mis en cause par la nouvelle loi puisque cet enfant a toujours le droit de devenir Français ".

Saisi d'un recours contre la loi votée par le Parlement en 1993, le Conseil constitutionnel a d'ailleurs reconnu que cette loi n'avait pas contrevenu à un principe fondamental reconnu par les lois de la République, dans une décision n° 93-321 DC du 21 juillet 1993 aux termes de laquelle : " Considérant que la loi déférée dispose que l'acquisition de la nationalité française doit faire l'objet d'une manifestation de volonté de la part de l'intéressé ; que s'agissant d'une telle condition mise à l'acquisition de la nationalité française par l'effet de la naissance sur le territoire français, il était loisible au législateur de l'édicter sans porter atteinte à un principe de valeur constitutionnelle ".

2. La loi du 22 juillet 1993, résultant d'une initiative sénatoriale, s'est fondée sur les propositions largement consensuelles de la Commission de la nationalité réunie en 1987

Il n'est pas inutile de rappeler que la loi du 22 juillet 1993 trouve son origine dans les travaux de la Commission de la nationalité, réunie en 1987 à l'initiative de M. Jacques Chirac, alors Premier ministre, et qui avait été chargée de procéder à une large concertation en vue de dégager un consensus sur les orientations d'une réforme du droit de la nationalité.

Ainsi que l'a rappelé son président, M. Marceau Long, devant votre commission des Lois, la Commission de la nationalité, composée de 19 membres -historiens, sociologues, philosophes, médecins et juristes-, effectua de très nombreuses auditions publiques et télévisées au cours desquelles elle entendit près d'une centaine de personnalités de tous horizons et de sensibilités les plus diverses. A l'issue des ces auditions, elle adopta à l'unanimité son rapport intitulé " Être français aujourd'hui et demain ", traduisant un large accord sur les orientations souhaitables d'une réforme.

Privilégiant une conception élective de la nationalité, ce rapport, considéré depuis lors comme un document de référence, mettait l'accent sur la reconnaissance d'une part plus large à l'expression de la volonté individuelle pour l'accès à la nationalité française : la Commission considérait que l'acquisition de la nationalité française devait être le résultat d'une démarche volontaire de l'intéressé et non lui être imposée à son insu ou même contre son gré. Elle soulignait en effet le caractère peu satisfaisant d'une situation où beaucoup de jeunes devenaient Français sans le vouloir, parfois même sans le savoir, en raison de l'automaticité de l'acquisition de la nationalité.

Aussi, sans remettre en cause le droit du sol tel qu'issu de la tradition républicaine -c'est-à-dire le droit de devenir Français à l'âge de la majorité reconnu aux jeunes nés en France de parents étrangers et présumés suffisamment intégrés à la communauté nationale du fait de l'exigence d'une condition de résidence de cinq ans-, la Commission était-elle amenée à proposer que ces jeunes manifestent leur volonté de devenir Français par une démarche individuelle. Selon elle, l'expression de cette décision individuelle devait pouvoir être précoce tout en restant possible pendant une période suffisamment étendue, d'où la proposition que la décision soit prise entre 16 et 21 ans. L'expression de la volonté individuelle devait prendre la forme d'une démarche administrative la plus simple possible, grâce à la mise en place " d'un système très complet d'information et d'organisation administrative " jugé indispensable à la nécessité de la réforme. En outre, dès lors qu'étaient réunies les conditions de naissance et de résidence en France, la décision des intéressés ne devait plus être qu'exceptionnellement contestée par l'Etat.

Estimant que l'expression de la décision individuelle devait être personnelle, la Commission proposait en même temps de supprimer la procédure qui permettait alors aux parents de demander la nationalité française aux lieu et place de leurs enfants mineurs âgés de moins de seize ans (article 54 du code de la nationalité).

Tel était l'axe essentiel des propositions de la Commission de la nationalité qui traçaient par ailleurs le cadre d'une réforme beaucoup plus vaste de l'ensemble du droit de la nationalité.

Cette réforme avait pour objet de permettre une meilleure intégration des immigrés et de leurs enfants qui, selon la Commission, passait par un renforcement de la conscience d'identité de la Nation française.

La proposition de loi sénatoriale dont est issue la loi du 22 juillet 1993 n'a fait que reprendre les principales suggestions de nature législative de la Commission de la nationalité.

Cette proposition de loi, déposée sur le bureau du Sénat le 7 juin 1990 par MM. Charles Pasqua, Ernest Cartigny, Daniel Hoeffel et Marcel Lucotte, avait été adoptée par le Sénat en première lecture le 20 juin 1990, soit plus de deux ans après l'achèvement des travaux de la Commission de la nationalité. Elle a par la suite été examinée en première lecture par l'Assemblée nationale les 11, 12 et 13 mai 1993, puis en deuxième lecture par le Sénat les 15, 16 et 17 juin 1993, avant d'être adoptée définitivement par l'Assemblée nationale en deuxième lecture le 24 juin 1993 et de devenir la loi du 22 juillet 1993.

Or, les raisons qui avaient conduit la Commission de la nationalité à préconiser l'exigence d'une manifestation de volonté pour l'acquisition de la nationalité française conservent aujourd'hui toute leur pertinence.

Il est d'ailleurs frappant de constater que les critiques les plus fréquemment adressées à la loi du 22 juillet 1993 (insuffisance de l'information des jeunes, voire des administrations concernées, difficultés des intéressés à apporter la preuve de leur résidence en France...) tiennent plus aux conditions d'application de la loi qu'au principe même de la manifestation de volonté.

B. L'APPLICATION GLOBALEMENT SATISFAISANTE DE LA LOI DU 22 JUILLET 1993 PEUT SANS DOUTE ÊTRE AMÉLIORÉE MAIS RIEN NE JUSTIFIE DE REMETTRE EN CAUSE LE PRINCIPE DE LA MANIFESTATION DE VOLONTÉ

Le bilan de l'application de la loi du 22 juillet 1993 justifie-t-il une remise en cause du principe de la manifestation de volonté ?

A l'évidence non, car même si l'on manque encore de recul pour en apprécier les résultats, la réforme fonctionne, et même mieux qu'on ne pouvait l'espérer. Les dysfonctionnements administratifs qui ont pu apparaître dans l'application de la loi peuvent facilement être corrigés sans pour autant modifier la législation en vigueur.

1. Faute de recul suffisant et d'étude globale, le bilan ne peut être que partiel

Pour ce qui concerne la procédure de la manifestation de volonté, la réforme résultant de la loi du 22 juillet 1993 n'est entrée en vigueur que le 1er janvier 1994. On manque donc encore de recul pour en apprécier l'application, d'autant que les jeunes concernés disposent de cinq ans pour procéder à la manifestation de volonté, qui peut être souscrite entre 16 et 21 ans.

Ce n'est qu'à la fin de 1999 que l'on pourra faire un bilan complet de la nouvelle procédure sur une cohorte de jeunes qui, de 16 à 21 ans, y aura été soumise pendant cinq années, car la première génération ayant eu la possibilité de manifester sa volonté dès l'âge de 16 ans est constituée par les jeunes nés en 1978 qui ne " sortiront " du dispositif que fin 1999. En attendant, il n'est pas possible de dresser un bilan exhaustif de l'application de la nouvelle procédure.

En outre, il n'existe pas d'étude globale permettant d'apprécier le comportement des jeunes concernés par la procédure de la manifestation de volonté dans la France entière. En effet, il semblerait que seules deux études partielles aient été réalisées à ce jour.

L'une de ces études a été réalisée pour le ministère de la justice, par le centre de droit de la famille de l'Université de Lyon III, sous la direction du professeur Hugues Fulchiron qui en a présenté les principaux résultats devant votre commission des Lois ; elle portait sur quelques sites témoins correspondant aux ressorts des tribunaux d'instance de Lyon, de Villeurbanne, de Marseille, de Puteaux et de Clichy, l'échantillon retenu portant au total sur 1.303 dossiers ouverts en 1994 et 1995.

La seconde concerne la région Alsace et a été effectuée par l'Observatoire régional de l'intégration et de la ville 3( * ) .

2. En dépit de l'incertitude des statistiques, il apparaît que la très grande majorité des jeunes intéressés demandent la nationalité française et que peu de décisions de refus leur sont opposées

On ne peut que déplorer les incertitudes et le caractère lacunaire des statistiques disponibles relatives à la manifestation de volonté ; de l'aveu même de Mme Elisabeth Guigou, Garde des sceaux, ministre de la justice, " il faut être très prudent " en la matière.

Les statistiques disponibles font cependant apparaître qu'une très grande majorité des jeunes intéressés demandent à acquérir la nationalité française. Selon les chiffres du ministère de la justice cités par M. Marceau Long dans son intervention devant votre commission des Lois : " la manifestation de volonté a donné lieu en 1994, à 33.255 acquisitions, en 1995 à 30.526 acquisitions, en 1996 à 29.845 acquisitions. Il apparaît que les jeunes nés en 1977 et 1978 ont à plus de 90 % manifesté leur volonté de devenir français, ceux nés en 1979 l'ont fait dans une proportion de plus de 80 % et ceux nés en 1980 s'étaient déjà manifestés à concurrence de 47 % dès la première année " (sous-direction statistique du ministère de la justice, juillet 1997).

Les jeunes effectuent de plus en plus souvent cette démarche assez tôt, entre 16 et 18 ans, l'âge moyen des déclarants étant légèrement supérieur à 17 ans ; chaque année, davantage de jeunes déposent leur demande dès 16 ans : 32 % en 1994, 43 % en 1995 et 46 % en 1996.

Il semblerait cependant, selon M. Paul Lagarde, professeur de droit à l'université de Paris I, comme selon le Garde des sceaux, qu'environ 10 à 15 % des jeunes susceptibles d'acquérir la nationalité française selon cette procédure ne l'auraient pas demandée, mais parmi ceux qui se sont abstenus de toute démarche, il est impossible de distinguer ceux qui n'auraient pas été en mesure de manifester leur volonté faute d'information par exemple, de ceux qui refusent délibérément de devenir Français.

Peut-on soutenir, dans ces conditions, que l'ensemble de ces jeunes auraient été " laissés au bord de la route ", selon l'expression du Garde des sceaux ?

En tout état de cause, le taux de refus d'enregistrement des manifestations de volonté est très faible : 1,6 % en 1994 (644 refus sur 40.915 souscriptions), 2,5 % en 1995 (814 refus sur 32.222 souscriptions), 2,5 % en 1996 (809 refus sur 31.963 souscriptions). Encore faut-il déduire, parmi ces refus, ceux qui résultent du seul fait que les intéressés étaient déjà Français sans le savoir (et qui représenteraient 30 % de l'ensemble des refus selon M. Marceau Long).

Les autres refus sont essentiellement motivés par l'insuffisance de preuve de la résidence en France des intéressés au cours des cinq années précédant la manifestation de volonté.

Or, la condition de résidence étant maintenue par le projet de loi, dans l'hypothèse où l'on reviendrait à une acquisition automatique de la nationalité française à la majorité, les intéressés devraient justifier de la preuve de cette résidence lorsqu'ils seraient amenés à demander un certificat de nationalité française ; ils risqueraient alors de se voir opposer la même proportion de refus pour cette même raison.

3. Les dysfonctionnements administratifs apparus dans l'application de la loi peuvent être corrigés sans en remettre en cause les principes

Certes, ainsi que le montrent les différentes études réalisées et ainsi que l'ont souligné plusieurs des personnalités auditionnées par votre commission des Lois, des dysfonctionnements administratifs ont pu apparaître ici ou là dans l'application de la loi, tenant selon M. Marceau Long, " à la faiblesse de la qualité de l'information, à l'inertie administrative, au faible engagement des services des différents ministères, au manque de formation des acteurs locaux, à l'insuffisance de l'effort des établissements scolaires, sans oublier le génie de l'administration à compliquer ce qui pourrait être simple, en exigeant des pièces justificatives non mentionnées dans les textes ".

C'est bien l'insuffisance de l'information fournie aux jeunes et à leurs familles, voire l'insuffisance de l'information des administrations elles-mêmes sur les procédures et le droit en vigueur, qui est le plus souvent dénoncée.

En effet, il semble qu'après les campagnes d'information lancées en 1994, l'effort d'information se soit relâché ; par exemple, l'Education nationale a mis en place des " correspondants nationalité ", mais ceux-ci ne sont pas présents partout.

L'information est diffusée de façon inégale sur l'ensemble du territoire, ce qui pourrait expliquer les variations importantes des taux de manifestation de volonté constatées d'une agglomération à l'autre (en Alsace, 68 % à Mulhouse contre 42 % à Strasbourg).

Mais, comme l'a souligné M. Marceau Long devant votre commission des Lois, " ces défaillances peuvent être corrigées sans remise en cause des principes ".

De fait, les remèdes aux dysfonctionnements constatés ne relèvent pas d'un changement de législation mais d'une amélioration concrète des modalités d'application de la loi.

Quelques pistes très pertinentes ont été évoquées par M. Marceau Long en vue de parvenir à une telle amélioration, dont on constate qu'elles relèveraient du pouvoir réglementaire, pour peu qu'il souhaite réellement les explorer :

- instructions précises des ministères intéressés ;

- organisation de cycles de formation des personnels administratifs ;

- information obligatoire dans les établissements scolaires.

M. Paul Lagarde a pour sa part suggéré qu'une information individualisée des jeunes étrangers sur le droit de la nationalité soit organisée, par exemple en utilisant, comme pour l'inscription d'office sur les listes électorales, les fichiers de l'INSEE et ceux de la sécurité sociale.

4. La nécessité de procéder à des démarches administratives et les difficultés liées à la preuve de la nationalité subsisteraient même si l'on revenait au principe d'une acquisition automatique de la nationalité

Il est enfin à souligner qu'un retour au principe d'une acquisition de plein droit de la nationalité française à la majorité ne simplifierait pas forcément les démarches administratives à accomplir par les jeunes nés en France de parents étrangers.

En effet, dans cette hypothèse, le jeune ayant acquis la nationalité française serait un jour ou l'autre amené à faire des démarches pour se voir reconnaître la qualité de Français, par exemple à l'occasion de la demande d'un certificat de nationalité ou d'une carte nationale d'identité.

Or, à l'occasion de cette démarche, il lui faudrait bien apporter la preuve que la condition de résidence préalable en France est remplie, et cette preuve risque d'être de plus en plus difficile à établir au fur et à mesure que le temps s'écoulera.

Les éventuelles disparités qui pourraient aujourd'hui exister d'un tribunal à l'autre, dans l'appréciation par le juge de la valeur de preuve de la résidence de tel ou tel document, subsisteraient donc.

Au total, ainsi que l'a souligné devant votre commission des Lois M. Hugues Fulchiron, professeur de droit à l'Université de Lyon III, " la mise en oeuvre de la loi s'est effectuée dans des conditions globalement satisfaisantes ".

On n'a pas constaté de réaction de refus des jeunes. Ainsi, le journal Le Monde a-t-il pu écrire, le 6 février 1996 : " La " manifestation de volonté ", instaurée en 1993 pour les jeunes nés en France de parents étrangers, paraît bien acceptée "

M. Patrick Weil a lui-même reconnu dans son rapport que : " Les craintes souvent exprimées au moment de la loi de 1993 que les jeunes pourraient boycotter la nouvelle procédure paraissent aujourd'hui non fondées ".

Tout au plus peut-on noter des interrogations des intéressés sur leur identité, liées aux craintes de perdre leur nationalité d'origine en devenant Français. Or, ces craintes, infondées, pourraient facilement être dissipées, car, à la différence du droit allemand par exemple, le droit français ne subordonne jamais l'acquisition de la nationalité française à la perte de la nationalité antérieure.

C. UN RECOURS INJUSTIFIÉ À LA PROCÉDURE D'URGENCE

Votre commission des Lois souscrit pleinement à l'initiative de M. René Monory, Président du Sénat, qui a récemment écrit au Premier ministre afin d'élever une protestation solennelle contre la déclaration d'urgence sur ce projet de loi.

Au cours de l'audition de Mme Elisabeth Guigou, Garde des sceaux, ministre de la justice, le président Jacques Larché a fait valoir que, d'une manière générale, le recours à la procédure d'urgence réduisait gravement le débat parlementaire.

Or, la question de la nationalité comporte des enjeux fondamentaux pour l'avenir de la Nation. Aussi, un tel sujet appelle-t-il une réflexion parlementaire approfondie incompatible avec la procédure d'urgence, singulièrement depuis la révision constitutionnelle emportant session unique.

Il convient à cet égard de rappeler que la réforme du droit de la nationalité de 1993 n'avait pas donné lieu à déclaration d'urgence, pas davantage d'ailleurs que la dernière loi relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France présentée par M. Jean-Louis Debré, alors ministre de l'intérieur.

Peut-on d'ailleurs raisonnablement envisager de réformer une loi dont un bilan définitif ne peut même pas encore être établi pour une génération de jeunes étrangers nés en France, puisque ceux-ci disposent de cinq années pour manifester leur volonté de devenir Français ?

II. CE PROJET DE LOI EST-IL OPPORTUN ?

Si ce projet de loi n'est à l'évidence pas nécessaire, est-il davantage opportun ?

Est-il opportun de rétablir l'acquisition automatique de la nationalité française par les étrangers de la " deuxième génération ", instituée en 1889, alors que la situation actuelle n'a plus rien de comparable avec celle de cette époque ou même avec celle de l'après-guerre ?

A. LES PRÉOCCUPATIONS QUI ONT AUTREFOIS CONDUIT À PRÉVOIR UNE ACQUISITION AUTOMATIQUE DE LA NATIONALITÉ FRANÇAISE PAR LES ENFANTS NÉS EN FRANCE DE PARENTS ÉTRANGERS ÉTAIENT CELLES D'UNE TOUTE AUTRE ÉPOQUE

Le droit de la nationalité est le produit d'une évolution pragmatique au cours de laquelle les législations successives ont toujours pris en compte les intérêts nationaux tels qu'ils étaient alors perçus.

1. Les préoccupations militaires étaient dominantes en 1889

Ainsi, la loi du 26 juin 1889, contemporaine de la loi du 15 juillet 1889 sur le service militaire, était-elle même très marquée par des préoccupations liées à la défense nationale, dans la perspective de la " revanche ", et plus particulièrement par la volonté d'assurer l'égalité devant la loi sur le service militaire.

En effet, les Français, alors soumis à des obligations militaires strictes et de longue durée, supportaient mal l'avantage dont bénéficiaient les enfants nés de parents étrangers à travers l'exonération du service militaire.

Au-delà des besoins de la conscription, c'est le souci de mettre un terme à cette exonération alors ressentie comme un privilège intolérable qui animait le législateur de 1889, ainsi que le rappelle d'ailleurs M. Patrick Weil dans son rapport.

Tel était donc l'objet essentiel de l'adoption d'un texte qui a pu être considéré comme fondateur d'une tradition républicaine du droit du sol : " Est Français tout individu né en France d'un étranger et qui, à l'époque de sa majorité est domicilié en France, à moins que, dans l'année qui suit sa majorité..., il n'ait décliné la qualité de Français et prouvé qu'il a conservé la nationalité de ses parents par une attestation en due forme de son gouvernement, laquelle demeurera annexée à la déclaration, et qu'il n'ait en outre produit, s'il y a lieu, un certificat constatant qu'il a répondu à l'appel sous les drapeaux, conformément à la loi militaire de son pays, sauf exceptions prévues aux traités " (article 8-4° du code civil, tel qu'il était rédigé par la loi du 26 juin 1889).

2. Les législations ultérieures qui ont confirmé le principe institué en 1889 s'inscrivaient dans des contextes bien différents de ceux d'aujourd'hui

Lorsque par la suite la loi du 10 août 1927 est venue confirmer le principe posé en 1889 en prévoyant que l'enfant né en France de parents étrangers devenait Français à sa majorité s'il était alors domicilié en France, les préoccupations démographiques dominaient, avec le souci de compenser, si peu que ce soit, l'hémorragie de la guerre de 1914-1918.

En 1945, le maintien de ce principe dans l'ordonnance du 19 octobre 1945 portant code de la nationalité française s'inscrivait dans le contexte d'une époque dominée par l'ampleur des tâches de reconstruction ; il s'accompagnait toutefois de la substitution à la simple condition de domicile d'une condition de résidence habituelle en France au cours des cinq années précédant la majorité (article 44 du code de la nationalité).

Enfin, la consécration de ces règles par la loi du 9 janvier 1973 survenait au terme d'une période faste marquée par une forte croissance et une situation de plein emploi.

En revanche, en 1993, et plus encore en 1997, la France est confrontée à une situation nouvelle, ainsi que l'a souligné M. Marceau Long au cours de son audition par votre commission des Lois.

B. LES FLUX D'IMMIGRES APPELÉS À ACQUÉRIR LA NATIONALITÉ FRANÇAISE ONT CHANGÉ DE NATURE

Sans chercher à mêler le débat sur la nationalité avec celui sur l'immigration -on notera d'ailleurs qu'en choisissant de présenter concomitamment deux projets de loi sur ces sujets forts différents, le Gouvernement porte une lourde responsabilité dans une confusion trop fréquemment entretenue-, force est de constater que la population étrangère appelée à acquérir la nationalité française par le droit du sol n'est plus la même que celle qui fut intégrée sans heurt majeur à la communauté nationale au XIXème siècle et au début du XXème siècle.

A la faveur des nouvelles facilités de circulation, ainsi que des moyens modernes de communication et d'information susceptibles d'éveiller, partout dans le monde, l'espoir d'être accueilli, puis intégré, dans un pays développé, nous sommes passés d'une immigration de proximité à une immigration de distance, au sens figuré comme au sens propre, sur le plan culturel comme sur le plan géographique.

1. D'une immigration de proximité...

L'immigration de proximité était une immigration européenne issue de pays où dominait la civilisation judéo-chrétienne ou gréco-latine. La Nation française intégrait alors rapidement les italiens, espagnols, portugais, russes blancs, ou encore diverses populations d'Europe centrale, venus s'installer sur son territoire.

Or ce temps est révolu.

2. A une immigration de distance

Cette immigration à dominante européenne a aujourd'hui fait place à une immigration d'origine plus lointaine, de cultures et de religions diverses et différentes, qui rencontre, par conséquent, plus de difficultés à s'intégrer à la communauté nationale.

La part des européens parmi les étrangers présents en France a ainsi régulièrement décliné, passant de 88,7 % en 1946 à 60 % en 1975 et à 47,6 % en 1982, date à laquelle la part des Africains atteignait déjà 42,8 %, d'après les chiffres cités par Philippe Bataille dans un ouvrage intitulé " Le racisme au travail ".

La population étrangère appelée à accéder à la nationalité française comporte désormais des ressortissants relevant de communautés attachées à des valeurs radicalement différentes des nôtres quand elles ne leur sont pas antinomiques.

Or, en même temps, la capacité d'intégration de la nation française s'est affaiblie et fragilisée, dans un climat économique et social de plus en plus incertain qui ne permet plus d'assurer des emplois aux nouveaux immigrés. L'immigration de travailleurs est ainsi devenue une immigration d'allocataires.

C. LES PRINCIPAUX FACTEURS D'INTÉGRATION PAR LA SOCIALISATION SE SONT SINGULIÈREMENT AFFADIS

Pendant longtemps, l'intégration dans la société française des étrangers venus s'installer sur notre territoire a reposé sur quelques grandes institutions : l'école, la famille, le service militaire, la religion...

- Mais l'école ne joue plus aujourd'hui le rôle de creuset -au sein duquel se transmettaient les valeurs républicaines- qui fut longtemps le sien.

Alors qu'elle constituait le meilleur instrument d'assimilation, elle n'est plus en état d'intégrer de manière satisfaisante dans une même classe des enfants d'origine trop diverse, dont certains ne maîtrisent même pas notre langue.

- La cellule familiale est également en crise.

- Le service militaire obligatoire et universel, qui pouvait aussi constituer un puissant facteur d'intégration, est en voie de disparition.

- Enfin, les religions implantées de longue date ont perdu de leur influence alors même qu'une autre progresse de jour en jour.

Sans doute ces différentes mutations contribuent-elles à expliquer que la deuxième génération d'immigrés, loin de se fondre plus aisément que la première dans le creuset français, s'avère celle qui a le plus de difficultés -voire parfois de répulsion- à s'intégrer.

Or, il importe d'avoir à l'esprit que la nationalité a pu être définie comme " un lien juridique ayant à sa base un fait social de rattachement, une solidarité effective d'existence, d'intérêts, de sentiments, joints à une réciprocité de droits et de devoirs ", selon les termes retenus par la Cour internationale de justice dans un arrêt Nottebohm du 6 avril 1955.

L'intégration systématique de ceux qui n'ont pas manifesté leur volonté de devenir Français -au mieux les plus indifférents, au pire les plus hostiles-, peut-elle trouver une justification au regard d'une telle définition ?

D. CE SUJET EST SENSIBLE ENTRE TOUS, DÈS LORS QU'IL TOUCHE AU SENTIMENT NATIONAL

Enfin, en France peut-être plus qu'ailleurs, le concept d'Etat-Nation revêt une dimension historique et symbolique particulièrement forte. En outre, un lien consubstantiel relie la nationalité et la citoyenneté avec les droits et devoirs qui s'y rattachent, notamment le droit de vote.

De ce fait et dés lors qu'il touche au sentiment national, l'enjeu du droit de la nationalité est, en France, perçu comme un enjeu majeur autour duquel se cristallisent de regrettables polémiques.

Une acquisition automatique de la nationalité risque dans ces conditions d'apparaître comme une banalisation de la citoyenneté et de nourrir les sentiments xénophobes.

Surtout, elle heurte le sentiment d'une grande majorité de nos concitoyens. Un récent sondage montre en effet qu'à propos des enfants nés en France de parents de nationalité étrangère, 76 % des Français interrogés pensent que ces enfants doivent être reconnus comme Français seulement s'ils en manifestent la volonté, alors que 19 % seulement des personnes interrogées considèrent que ces enfants doivent être automatiquement reconnus comme Français 4( * ) .

Ce projet de loi n'aurait-il pour seule vertu que de réveiller le sentiment national ?

*

Ainsi que l'avait souligné la Commission de la nationalité, l'intégration à la Nation ne peut pas résulter d'une adhésion tacite. Elle exige au contraire une adhésion claire aux principes et aux règles de vie de la société française, ce qui justifie que soit requise une manifestation volontaire de cette adhésion.

A défaut, une quantité excessive d'altérités pourrait risquer d'altérer l'identité de la Nation.

III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : LE REJET DES DISPOSITIONS QUI REMETTENT EN CAUSE LA LOI DU 22 JUILLET 1993

Au terme de cet examen, il apparaît à votre commission des Lois que la réforme de l'acquisition de la nationalité française par les jeunes étrangers nés en France, que nous propose aujourd'hui le Gouvernement n'est, dans son principe, ni nécessaire ni opportune.

Dès lors, votre commission la considère parfaitement inacceptable.

Elle vous propose donc d'en rester à la loi du 22 juillet 1993 et de repousser toutes les dispositions qui tendent à la remettre en cause.

Quelques améliorations purement techniques du droit de la nationalité incluses dans le projet de loi peuvent toutefois être maintenues, comme par exemple les dispositions qui tendent à faciliter la preuve de la nationalité française.

Votre commission vous proposera, en outre, de compléter ces améliorations par un amendement qui a pour objet de simplifier la preuve de leur nationalité à nos compatriotes d'Alsace-Moselle.

* *

*

EXAMEN DES ARTICLES

Intitulé du projet de loi

Suivant la proposition de sa commission des Lois, l'Assemblée nationale a modifié l'intitulé initial du projet de loi : " Projet de loi relatif à la nationalité et modifiant le code civil ", afin d'y supprimer les mots : " et modifiant le code civil ".

Elle a en effet estimé que cette mention ne se justifiait pas dans la mesure où plusieurs articles du projet de loi portent sur des dispositions ne figurant pas dans le code civil.

Votre commission n'a pas jugé utile de modifier ce nouvel intitulé.

CHAPITRE PREMIER
DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE CIVIL
SECTION 1
Dispositions modifiant les règles d'acquisition
de la nationalité française

Article 1er A
(art. 21-2 du code civil)
Délai préalable à l'acquisition de la nationalité française
à raison du mariage

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale suivant la proposition de sa commission des Lois, a pour objet de réduire de deux ans à un an le délai préalable à l'acquisition de la nationalité française par déclaration à raison du mariage.

*

Dans sa rédaction actuelle, issue de la loi du 22 juillet 1993, l'article 21-2 du code civil permet à l'étranger marié avec un conjoint de nationalité française d'acquérir la nationalité française par déclaration après un délai de deux ans à compter du mariage, à condition qu'à la date de cette déclaration la communauté de vie n'ait pas cessé entre les époux et que le conjoint français ait conservé sa nationalité ; toutefois, le délai de deux ans est supprimé lorsque naît, avant ou après le mariage, un enfant dont la filiation est établie à l'égard des deux conjoints, si les conditions relatives à la communauté de vie et à la nationalité du conjoint français sont satisfaites.

La déclaration est enregistrée par le ministre chargé des naturalisations qui dispose d'un délai de six mois pour prendre une décision de refus d'enregistrement si elle ne satisfait pas aux conditions légales, en application de l'article 26-3 du code civil ; cependant l'enregistrement peut encore être contesté par le ministère public en cas de mensonge ou de fraude dans le délai de deux ans à compter de leur découverte, la cessation de la communauté de vie entre les époux dans les douze mois suivant l'enregistrement de la déclaration constituant une présomption de fraude.

En outre, le Gouvernement peut s'opposer par décret en Conseil d'Etat, pour indignité ou défaut d'assimilation, à l'acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger, dans le délai d'un an à compter de la souscription de la déclaration, conformément à l'article 21-4 du code civil.

Le nombre des déclarations enregistrées à raison du mariage avec un conjoint français est resté relativement stable au cours des dernières années : 15 601 en 1992, 15 246 en 1993, 19 493 en 1994, 16 659 en 1995 et 19 127 en 1996.

*

Antérieurement à la loi du 22 juillet 1993, le délai préalable à l'acquisition de la nationalité française à raison du mariage était fixé à six mois depuis la loi du 7 mai 1984.

Afin de lutter contre le développement des mariages de complaisance contractés par les étrangers dans le seul but d'acquérir la nationalité française, la loi du 22 juillet 1993 a porté ce délai à deux ans.

L'Assemblée nationale a souhaité le ramener à un an, tout en maintenant la suppression du délai déjà prévue en cas de naissance d'un enfant.

Elle a adopté à cette fin un amendement tendant à modifier l'article 21-2 du code civil et devenu l'article 1er A du projet de loi.

Votre commission des Lois, qui avait approuvé en 1993 l'allongement du délai préalable à l'acquisition de la nationalité française par le mariage dans le souci de dissuader plus efficacement les mariages de complaisance, souhaite maintenir ce délai de deux ans. En effet, un raccourcissement de ce délai risquerait d'accroître le nombre des mariages de complaisance.

Elle a par ailleurs observé que plusieurs Etats européens voisins imposent un délai plus long pour l'acquisition de leur nationalité par mariage 5( * ) .

Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement de suppression de l'article 1 er A.

Article 1er
(art. 21-7 du code civil)
Acquisition de la nationalité française à raison
de la naissance et de la résidence en France

Cet article tend à supprimer l'exigence d'une manifestation de volonté souscrite entre 16 et 21 ans pour l'acquisition de la nationalité française par les jeunes nés en France de parents étrangers et y résidant, qui constituait la principale innovation de la réforme de 1993, pour revenir au principe d'une acquisition automatique de la nationalité française par ces jeunes à l'âge de leur majorité.

*

Dans le droit actuel, le texte de l'article 21-7 du code civil, issu de la loi du 22 juillet 1993 et entré en vigueur le 1er janvier 1994, prévoit la possibilité pour tout étranger né en France de parents étrangers d'acquérir la nationalité française entre 16 et 21 ans par une manifestation de volonté, sous la double condition :

- de résider en France à la date de la manifestation de volonté ;

- et de justifier d'une résidence habituelle en France pendant les cinq années qui la précèdent.

Toutefois, cette dernière condition de résidence habituelle n'est pas exigée d'un étranger francophone au sens de l'article 21-20 du code civil, c'est-à-dire d'une " personne qui appartient à l'entité culturelle et linguistique française, lorsqu'elle est ressortissante des territoires ou Etats dont la langue officielle ou l'une des langues officielles est le français, soit lorsque le français est sa langue maternelle, soit lorsqu'elle justifie d'une scolarisation minimale de cinq années dans un établissement enseignant en langue française ".

L'article 21-7 du code civil renvoie en outre à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les conditions d'information du public (en particulier des jeunes concernés par la manifestation de volonté) sur le droit de la nationalité, par les organismes et services publics, notamment les établissements d'enseignement, les caisses de sécurité sociale et les collectivités territoriales ; ces conditions ont été précisées par le décret n° 94-698 du 16 août 1994 relatif à l'information du public en matière de droit de la nationalité.

Cet article instituant l'exigence d'une démarche volontaire pour l'acquisition de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France, tout en maintenant les conditions traditionnellement requises pour cette acquisition, constituait la principale innovation de la réforme du droit de la nationalité mise en oeuvre par la loi du 22 juillet 1993. On ne reviendra pas ici sur son application concrète, dont un premier bilan a été dressé dans le cadre de l'exposé général du présent rapport.

On rappellera seulement qu'ont été souscrites 40.915 manifestations de volonté en 1994, 32.222 en 1995 et 31.963 en 1996 ; le taux de refus d'acquisition de la nationalité s'étant stabilisé à un peu plus de 2,5 % en 1995 et 1996. Au 31 décembre 1996, avaient acquis la nationalité française par manifestation de volonté 15.512 jeunes nés en 1976, 21.104 nés en 1977, 23.048 nés en 1978, 20.453 nés en 1979 et 13.508 nés en 1980.

*

L'article 1er du projet de loi tend à revenir, dans son principe, au système d'acquisition automatique de la nationalité française par les jeunes nés en France de parents étrangers à l'âge de leur majorité (18 ans), qui prévalait avant la réforme de 1993, en application de l'ancien article 44 du code de la nationalité, sous réserve d'une double condition de résidence en France à cet âge et au cours d'une période préalable de cinq années.

Il conserve l'exigence traditionnelle de la justification d'une résidence habituelle de cinq années en France, requise avant comme après la réforme de 1993 pour l'accès à la nationalité française, mais il assouplit néanmoins cette condition sur deux points :

- d'une part, la période de résidence de cinq ans serait désormais appréciée à partir de l'âge de 11 ans, donc entre 11 et 18 ans (et non plus entre 13 et 18 ans comme antérieurement à la réforme de 1993) ;

- d'autre part, cette période pourrait être continue ou discontinue ; par conséquent, une brève absence du territoire français au cours des cinq années précédant la majorité ne constituerait plus un obstacle à l'acquisition de la nationalité française.

Ainsi que le précise l'exposé des motifs du projet de loi, cet assouplissement a notamment pour objet de remédier aux difficultés pratiques qui sont parfois rencontrées par les jeunes manifestant leur volonté de devenir Français pour apporter la preuve de leur résidence en France au-delà de l'âge de 16 ans. En effet, la scolarité étant obligatoire jusqu'à 16 ans, la preuve de la résidence en France entre 11 et 16 ans peut facilement être apportée par des certificats de scolarité, alors que ce moyen de preuve ne peut plus être utilisé par des jeunes ayant quitté le système scolaire dès 16 ans pour justifier de leur résidence en France entre cet âge et celui de leur majorité.

Cependant, si une période de résidence discontinue pouvait être prise en compte, la condition traditionnelle de résidence s'en trouverait affadie : en effet, si le jeune étranger retourne fréquemment dans son pays d'origine, c'est la preuve qu'il n'est pas réellement fixé en France.

Enfin, la nouvelle rédaction de l'article 21-7 du code civil proposée par le présent article prévoit l'obligation pour les tribunaux d'instance, les collectivités territoriales, les organismes et services publics et notamment les établissements d'enseignement, d'informer le public et en particulier les jeunes concernés par l'acquisition automatique de la nationalité, sur le droit de la nationalité, les conditions de cette information étant renvoyées à un décret en Conseil d'Etat. Cette information serait notamment destinée à permettre aux jeunes concernés de décliner la qualité de Français en application de l'article 2 du projet de loi s'ils ne souhaitent pas devenir Français ou encore d'acquérir par anticipation la nationalité française en application de l'article 5 si telle est leur volonté. Cependant, la nouvelle rédaction proposée par le projet de loi au sujet de l'information ne modifie pas substantiellement le droit actuel, une information du public en matière de droit de la nationalité étant déjà prévue.

L'Assemblée nationale a adopté l'article 1er du projet de loi sous réserve d'un amendement rédactionnel.

*

Pour toutes les raisons qui ont été présentées dans le cadre de l'exposé général du présent rapport, votre commission des Lois estime qu'il n'est ni nécessaire, ni opportun de supprimer l'exigence d'une manifestation de volonté pour l'acquisition de la nationalité française par les jeunes nés en France de parents étrangers.

Elle vous propose donc d'adopter un amendement de suppression de cet article.

Article 2
(art. 21-8 du code civil)
Faculté de décliner la qualité de Français

Cet article a pour objet de permettre au jeune étranger né et résidant en France, qui remplit les conditions prévues à l'article 1er pour l'acquisition automatique de la nationalité française à sa majorité, de décliner la qualité de Français par déclaration entre 17 ans et demi et 19 ans.

A cette fin, il propose une nouvelle rédaction de l'article 21-8 du code civil qui prévoit actuellement la perte du droit à la manifestation de volonté de devenir Français par le jeune étranger qui a fait l'objet de certaines condamnations pour des faits graves commis entre 18 et 21 ans. Ces dernières dispositions deviennent en effet sans objet dans le cadre du projet de loi qui prévoit dans son article 1er la suppression de la procédure de manifestation de volonté à laquelle serait substituée l'acquisition automatique de la nationalité française à 18 ans.

La nouvelle rédaction proposée pour l'article 21-8 du code civil prévoit la possibilité, pour le jeune étranger susceptible d'acquérir automatiquement la nationalité française à sa majorité, de refuser cette nationalité, comme le prévoyait le droit en vigueur antérieurement à la réforme de 1993.

Cependant, l'article 2 du projet de loi prévoit d'ouvrir à l'intéressé cette faculté de décliner la qualité de Français dans les six mois qui précèdent sa majorité ou dans les douze mois qui la suivent, alors que l'ancien article 45 du code de la nationalité ne permettait de la décliner que dans l'année précédant la majorité et sous réserve de l'autorisation du ou des titulaire(s) de l'autorité parentale.

Le renoncement à l'acquisition de la nationalité française ferait donc désormais l'objet d'une démarche volontaire et personnelle de l'intéressé, qui ne serait plus soumise à l'autorisation des parents et qui pourrait être effectuée à partir de l'âge de 17 ans et demi jusqu'à l'âge de 19 ans, sous la seule condition de prouver la possession d'une autre nationalité (afin d'éviter l'apatridie).

Cette démarche prendrait la forme d'une déclaration reçue par le juge d'instance (ou éventuellement par le consul à l'étranger), dans les conditions prévues aux articles 26 et suivants du code civil.

D'un point de vue pratique, on voit mal comment ces dispositions pourraient être mises en oeuvre car s'il est concevable d'imposer une démarche auprès d'un juge pour bénéficier d'un avantage ou pour exercer un droit, il est en revanche assez illusoire d'attendre des intéressés qu'ils l'accomplissent pour y renoncer. En d'autres termes, soit par négligence, soit par indifférence, tout laisse à penser que beaucoup de jeunes qui ne souhaiteraient pas acquérir la nationalité française s'abstiendraient de manifester leur refus, d'autant que les obligations liées à la nationalité française seront désormais considérablement réduites en raison de la suppression du service national dans sa forme actuelle. Les intéressés deviendraient de ce fait Français, à la fois sans le vouloir et sans le savoir.

L'article 2 du projet de loi précise en outre explicitement que, dans l'hypothèse où cette déclaration serait souscrite par l'intéressé après sa majorité -c'est-à-dire à une date à laquelle l'acquisition automatique de la nationalité serait en principe déjà intervenue-, celui-ci serait réputé n'avoir jamais acquis la qualité de Français.

En résumé, alors que dans le droit actuel une démarche volontaire (la manifestation de volonté) est exigée pour l'acquisition de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France, l'abstention de procéder à cette démarche présumant le renoncement à cette nationalité, le projet de loi prévoit à l'inverse que ce renoncement serait subordonné à une démarche volontaire en l'absence de laquelle serait présumée l'acceptation de la nationalité française.

L'Assemblée nationale a adopté l'article 2 sans modification.

Votre commission des Lois souhaite le maintien de la manifestation de volonté, et donc de l'article 21-8 du code civil dans sa rédaction actuelle.

Par coordination avec la suppression de l'article 1 er du projet de loi, elle vous propose donc de supprimer également l'article 2.

Article 3
(art. 21-9 du code civil)
Perte de la faculté de décliner la qualité de Français

Cet article a pour objet de prévoir la perte de la faculté de décliner la qualité de Français (dans les conditions prévues à l'article 2) en cas d'engagement dans les armées françaises, tout en précisant que dans ce cas l'acquisition de la nationalité française intervient à la date de l'incorporation si l'intéressé est mineur.

Il propose à cette fin une nouvelle rédaction de l'article 21-9 du code civil concernant les modalités de la manifestation de volonté d'être Français, dont les dispositions deviendraient sans objet dans la mesure où la manifestation de volonté serait supprimée.

Cette nouvelle rédaction s'inspire des dispositions des anciens articles 47 et 48 du code de la nationalité qui réglaient, avant la réforme de 1993, les conséquences de la participation éventuelle à la défense nationale sur l'acquisition de la nationalité française par les jeunes nés en France de parents étrangers.

Dans la rédaction initiale du projet de loi, le premier alinéa du texte proposé pour l'article 21-9 du code civil prévoyait ainsi la perte de la faculté de répudier la qualité de Français par un jeune remplissant les conditions prévues par l'article 1er pour l'acquisition de la nationalité française, qui contracterait un engagement dans les armées françaises ou qui, sans exciper de son extranéité, participerait volontairement aux opérations de recensement en vue de l'accomplissement du service national.

L'Assemblée nationale, suivant la proposition du Gouvernement, a cependant supprimé la référence à cette seconde éventualité afin de prendre en compte les conséquences de la loi du 28 octobre 1997 portant réforme du service national qui a substitué aux obligations du service national dans sa forme actuelle un simple " appel de la préparation à la défense " d'une durée d'une journée. Elle a en effet estimé que la participation volontaire aux opérations de recensement en vue de cette journée ne justifiait pas que l'intéressé soit ultérieurement privé du droit de décliner la nationalité française.

L'Assemblée nationale a en revanche maintenu sans modification, sous réserve d'un amendement rédactionnel, le second alinéa du texte proposé pour l'article 21-9 du code civil qui prévoit l'acquisition de la nationalité française, à la date de son incorporation, par tout mineur né en France de parents étrangers incorporé dans l'armée française en qualité d'engagé. Cette acquisition automatique de la nationalité française par le mineur né en France de parents étrangers qui s'engage dans l'armée française est déjà prévue dans le droit actuel par l'article 21-11 du code civil. On observera qu'aucune condition de résidence n'est alors exigée pour l'acquisition de la nationalité française.

Votre commission des Lois souhaite le maintien de l'article 21-9 du code civil, relatif à la manifestation de volonté, dans sa forme actuelle.

Par coordination avec la suppression de l'article 1 er du projet de loi, elle vous propose donc d'adopter un amendement de suppression de l'article 3.

Article 4
(art. 21-10 du code civil)
Acquisition de la nationalité française par les enfants
de diplomates étrangers, nés et résidant en France

Cet article tend à écarter les enfants de diplomates étrangers nés et résidant en France du champ d'application de l'acquisition automatique de la nationalité française, tout en leur permettant d'acquérir volontairement cette nationalité entre 16 et 18 ans.

Pour régler ce cas particulier de l'acquisition de la nationalité française par les enfants nés en France des agents diplomatiques et des consuls de carrière de nationalité étrangère, le projet de loi propose une nouvelle rédaction de l'article 21-10 du code civil dont les dispositions actuelles, assimilant la participation volontaire aux opérations de recensement en vue de l'accomplissement du service national ou la demande de certificat de nationalité française, à une manifestation de volonté d'être Français, perdraient leur raison d'être si la procédure de la manifestation de volonté était supprimée. Le texte proposé pour l'article 21-10 du code civil tend ainsi à rétablir l'exception à la règle de l'acquisition automatique de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France qui était traditionnellement prévue par l'ancien article 51 du code de la nationalité dans le cas particulier des enfants de diplomates étrangers.

Ainsi que le rappelle l'exposé des motifs du projet de loi, cette exclusion des enfants de diplomates étrangers du bénéfice de l'acquisition de plein droit de la nationalité française " obéit à un principe de courtoisie internationale qui s'apparente aux privilèges et immunités diplomatiques par lequel un pays s'interdit de réclamer comme son ressortissant l'enfant qui est né sur son sol d'une personne qui s'y trouve pour le service de son propre pays ".

L'article 4 du projet de loi prévoit cependant la possibilité pour les enfants de diplomates étrangers, nés en France et y ayant leur résidence habituelle pendant une période continue ou discontinue d'au moins cinq ans depuis l'âge de onze ans, d'acquérir volontairement la nationalité française par une déclaration souscrite entre 16 et 18 ans, dans les conditions prévues par l'article 5 ci-après.

L'Assemblée nationale a adopté l'article 4 sans modification.

Par coordination avec la suppression de l'article 1 er relatif à l'acquisition automatique de la nationalité française, votre commission des Lois vous propose de supprimer également l'article 4.

Article 5
(art. 21-11 du code civil)
Anticipation de l'acquisition de la nationalité française
à raison de la naissance et de la résidence en France

Cet article, dans sa rédaction initiale, avait pour objet de permettre au mineur né en France de parents étrangers d'acquérir la nationalité française par anticipation par une déclaration souscrite à partir de l'âge de 16 ans à la double condition :

- de résider en France au moment de la déclaration ;

- et d'avoir eu sa résidence habituelle en France pendant une période continue ou discontinue d'au moins 5 ans depuis l'âge de 11 ans.

L'Assemblée nationale l'a complété par un alinéa prévoyant la possibilité pour les parents étrangers d'un enfant mineur né en France et âgé de plus de 13 ans, de réclamer la nationalité française pour cet enfant, en son nom et avec son consentement personnel, sous réserve qu'il ait eu sa résidence habituelle en France depuis l'âge de huit ans.

Ces nouvelles dispositions seraient substituées aux dispositions actuelles de l'article 21-11 du code civil, relatives aux conséquences de l'incorporation dans l'armée française sur l'acquisition de la nationalité française, qui sont transférées par l'article 3 du projet de loi, moyennant adaptation, à l'article 21-9 du même code.

*

Dans le droit actuel, issu de la réforme mise en oeuvre par la loi du 22 juillet 1993, les jeunes nés en France de parents étrangers peuvent acquérir la nationalité française dès l'âge de 16 ans par une démarche volontaire et personnelle (non soumise à l'autorisation des parents) : la manifestation de volonté, à la double condition de résider en France à la date de la manifestation de volonté et de justifier d'une résidence habituelle en France pendant les cinq années qui précèdent. En revanche, ils ne peuvent accéder à la nationalité française avant cet âge, sauf si l'un de leurs parents est lui-même né en France, auquel cas la nationalité française leur est attribuée dès la naissance par l'application de la règle du double droit du sol.

*

Si le projet de loi tend à substituer à la procédure de la manifestation de volonté une acquisition de plein droit de la nationalité française à l'âge de la majorité (cf. article 1er), il prévoit cependant, dans son article 5, le maintien de la possibilité pour les jeunes nés en France de parents étrangers d'acquérir volontairement la nationalité française dès l'âge de 16 ans par déclaration.

Cette faculté d'anticiper l'acquisition de plein droit de la nationalité française est motivée, selon l'exposé des motifs du projet de loi, par le " souci de préserver la volonté individuelle et de favoriser l'intégration des jeunes étrangers ".

La rédaction initiale de l'article 5 du projet de loi limitait le champ d'application de l'acquisition anticipée de la nationalité française aux mineurs nés en France de parents étrangers, âgés de plus de 16 ans et remplissant des conditions de résidence analogues à celles prévues à l'article 1er pour l'acquisition de plein droit de la nationalité française : résidence en France à la date de la déclaration et résidence habituelle en France pendant une période continue ou discontinue d'au moins cinq ans depuis l'âge de 11 ans (ce qui représente un assouplissement de la condition de résidence habituelle de cinq ans exigée dans le droit actuel, ainsi qu'on l'a déjà observé à l'article 1er).

Cette acquisition anticipée de la nationalité française devait faire l'objet d'une démarche volontaire et personnelle du mineur, non soumise à l'autorisation des parents (comme dans le droit actuel mais contrairement aux dispositions de l'ancien article 53 du code de la nationalité en vigueur avant la réforme de 1993) et prenant la forme d'une déclaration reçue par le tribunal d'instance dans les conditions de droit commun prévues aux articles 26 et suivants du code civil.

Suivant la proposition de sa commission des Lois, l'Assemblée nationale a cependant souhaité abaisser de 16 à 13 ans l'âge à partir duquel les jeunes nés en France de parents étrangers pourraient acquérir la nationalité française par anticipation. Elle a donc complété l'article 5 du projet de loi par une disposition permettant aux parents étrangers d'un enfant né en France et âgé de plus de 13 ans de réclamer la nationalité française pour cet enfant, en son nom et avec son consentement personnel, " la condition de résidence habituelle en France devant alors être remplie à partir de l'âge de 8 ans ".

On soulignera néanmoins que l'Assemblée nationale s'est refusée à aller jusqu'à rétablir les dispositions de l'ancien article 54 du code de la nationalité qui permettaient, avant la réforme de 1993, aux parents étrangers d'un enfant né en France âgé de moins de 16 ans de réclamer en son nom la nationalité française pour cet enfant, à condition d'avoir eu eux-mêmes leur résidence habituelle en France depuis au moins cinq années.

*

Défavorable à la suppression de l'exigence d'une manifestation de volonté pour l'acquisition de la nationalité française, votre commission des Lois est également défavorable au rétablissement d'une possibilité pour les parents de demander la nationalité française au nom de leurs enfants mineurs.

De même qu'en 1987 la Commission de la nationalité et aujourd'hui le Haut Conseil à l'Intégration, votre commission estime qu'il est préférable de laisser le choix de la nationalité aux intéressés eux-mêmes et non à leurs parents.

L'abaissement à 13 ans de la possibilité d'acquisition anticipée de la nationalité française lui apparaît contraire au respect de l'autonomie de la volonté de l'enfant qui, à cet âge, n'a pas tout le discernement nécessaire pour apprécier les conséquences du choix d'un élément d'identité aussi déterminant que sa nationalité, sans compter les pressions de toute sortes et les manipulations familiales auxquelles il peut être soumis.

A cet égard, il n'est pas inutile de rappeler qu'aux termes du préambule de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant, ratifiée par la France en 1990, " l'enfant, en raison de son manque de maturité physique et intellectuelle, a besoin d'une protection spéciale ", alors que l'article 8 de la même convention stipule que " les Etats parties s'engagent à respecter le droit de l'enfant de préserver son identité, y compris sa nationalité, son nom et ses relations familiales, tels qu'ils sont reconnus par la loi, sans ingérence illégale ".

Or, on ne peut exclure que les parents demandent la nationalité française pour leur enfant mineur non pas dans son intérêt, mais avant tout dans le leur, par exemple pour régulariser leur situation, obtenir un titre de séjour et éviter l'expulsion, comme on avait fréquemment pu le constater sous l'empire de la législation antérieure à 1993.

Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement de suppression de l'article 5 du projet de loi.

Article 5 bis
(art. 21-12 du code civil)
Acquisition de la nationalité française par un mineur
ayant fait l'objet d'une adoption simple par un Français
établi hors de France

Cet article, introduit par l'Assemblée nationale sur la proposition de sa commission des Lois et malgré l'avis défavorable du Gouvernement, tend à permettre à un enfant mineur ayant fait l'objet d'une adoption simple par un Français établi hors de France, d'acquérir la nationalité française par simple déclaration sans être soumis à une obligation de résidence en France au moment de cette déclaration.

L'adoption simple par une personne de nationalité française n'emporte aucun effet de plein droit sur la nationalité de l'adopté.

Cependant, l'article 21-12 du code civil, dans sa rédaction actuelle, permet à ce dernier d'acquérir la nationalité française par simple déclaration jusqu'à sa majorité, à condition toutefois qu'il réside en France à la date de la déclaration.

Cette disposition ne peut à l'heure actuelle bénéficier aux enfants adoptés par des Français résidant à l'étranger, car, à la différence des enfants adoptés par des Français résidant en France, ils ne remplissent généralement pas la condition de résidence en France exigée pour l'acquisition de la nationalité française par déclaration.

Afin de permettre aux enfants mineurs adoptés par les Français établis hors de France de bénéficier eux aussi de cette faculté d'acquisition de la nationalité française, l'article 5 bis du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale tend donc à supprimer l'obligation de résidence " lorsque l'enfant a été adopté par une personne de nationalité française n'ayant pas sa résidence habituelle en France ", par l'insertion d'un second alinéa à l'article 21-12 du code civil.

Votre commission des Lois s'en remet à la sagesse du Sénat sur cet article.

Article 6
(art. 21-19 du code civil)
Coordination avec la suppression de la manifestation
de volonté d'être Français
Dispense de stage pour la naturalisation des réfugiés

Dans sa rédaction initiale, cet article avait pour simple objet d'abroger une disposition rendue sans objet par la suppression de la manifestation de volonté d'être Français prévue à l'article 1er.

Il s'agit de l'article 21-19 du code civil qui prévoit actuellement une dispense de la condition de stage de cinq années normalement exigée pour la naturalisation, en faveur des étrangers nés en France qui auraient laissé passer l'âge de 21 ans sans procéder à la manifestation de volonté de devenir Français bien qu'ils en eussent rempli les conditions.

Dans la mesure où la manifestation de volonté serait supprimée et où les jeunes concernés deviendraient automatiquement Français à l'âge de leur majorité, cette disposition n'aurait plus de raison d'être.

L'Assemblée nationale en a donc maintenu l'abrogation ; elle a toutefois adopté à cet article un amendement tendant à compléter la liste des bénéficiaires de la dispense de stage pour la naturalisation, énumérée à l'article 21-19 du code civil, en y ajoutant les étrangers " ayant obtenu le statut de réfugié en application de la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 portant création d'un office français de protection des réfugiés et apatrides ".

Cet amendement permettrait donc aux réfugiés statutaires d'être naturalisés sans condition de stage. Selon le rapport établi par M. Louis Mermaz, au nom de la commission des Lois de l'Assemblée nationale, cet amendement est justifié par la référence à l'esprit de l'article 34 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 sur les réfugiés.

Or, cet article prévoit seulement que " les Etats contractants faciliteront, dans toute la mesure du possible, l'assimilation et la naturalisation des réfugiés. Il s'efforceront notamment d'accélérer la procédure de naturalisation et de réduire, dans toute la mesure du possible, les taxes et les frais de cette procédure ".

Votre commission des Lois constate que cette Convention ne contraint aucunement la France à supprimer toute condition de stage pour la naturalisation des réfugiés, mesure peu opportune à une époque où le droit d'asile a donné lieu à de nombreux abus.

Elle vous propose donc de maintenir l'article 21-19 du code civil dans sa rédaction actuelle en adoptant un amendement de suppression de cet article.

Article 6 bis
(art. 21-26 du code civil)
Coordination avec la réforme du service national

Cet article, résultant d'un amendement du Gouvernement adopté par l'Assemblée nationale, a pour objet de tirer les conséquences de la loi du 28 octobre 1997 portant réforme du service national dans la rédaction de l'article 21-26 du code civil qui assimile le séjour hors de France au sein de l'armée française à la résidence en France, s'agissant de l'appréciation des conditions requises pour l'acquisition de la nationalité française.

Dans sa rédaction actuelle, le 3° de l'article 21-26 du code civil assimile ainsi à la résidence en France, pour l'acquisition de la nationalité française, " la présence hors de France, en temps de paix comme en temps de guerre, dans une formation régulière de l'armée française ou au titre du service national actif ".

Afin de prendre en compte les incidences de la réforme du service national, l'article 6 bis du projet de loi modifie la rédaction de ce 3° en substituant à la mention du service national actif celle des " obligations prévues par le livre II du code du service national " dont on rappellera qu'il maintient à titre transitoire l'application des obligations du service national dans sa forme actuelle aux Français nés avant le 1er janvier 1979 ; en outre, il ajoute un 4° tendant à assimiler à la résidence en France " le séjour hors de France en qualité de volontaire du service national ".

Votre commission des Lois constate que cet article se limite à une simple disposition de coordination technique avec la réforme du service national. Elle ne vous en propose donc pas la suppression.

Article 7
(art. 21-27 du code civil)
Obstacles à l'acquisition de la nationalité française

Cet article a pour objet, selon l'exposé des motifs du projet de loi, de prévoir " de manière plus explicite qu'auparavant que sont supprimées des cas d'empêchement à l'acquisition de la nationalité française, les condamnations prononcées alors que l'intéressé était encore mineur ".

A cette fin, il tend à modifier l'article 21-27 du code civil qui énumère les cas d'empêchement à l'acquisition de la nationalité française.

Selon les dispositions de ce dernier article, nul ne peut acquérir la nationalité française (ou être réintégré dans cette nationalité) :

- s'il a été condamné soit pour un crime ou un délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de l'Etat ou un acte de terrorisme, soit à une peine égale ou supérieure à six mois d'emprisonnement, non assortie d'une mesure de sursis ;

- ou s'il a fait l'objet soit d'un arrêté d'expulsion non expressément rapporté ou abrogé, soit d'une interdiction du territoire français non entièrement exécutée ;

- ou encore si son séjour en France est irrégulier au regard des lois et conventions relatives au séjour des étrangers en France.

Toutefois, l'article 21-27 du code civil ne s'applique actuellement que sous réserve des dispositions prévues à trois autres articles du même code :

- l'article 21-7 (acquisition de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France par une manifestation de volonté entre 16 et 21 ans) ;

- l'article 21-8 (énumération des condamnations pour des faits commis entre 18 et 21 ans faisant obstacle à l'acquisition de la nationalité française par une manifestation de volonté) ;

- et l'article 22-1 (acquisition de la nationalité française par les enfants mineurs dont l'un des parents acquiert la nationalité française, s'ils ont la même résidence habituelle que ce parent).

Dans un souci de clarification, l'article 7 du projet de loi, après avoir supprimé ces trois références par son paragraphe I , précise expressément dans son paragraphe II que les cas d'empêchement à l'acquisition de la nationalité française prévus à l'article 21-27 du code civil ne sont pas applicables à l'enfant mineur susceptible d'acquérir la nationalité française en application de articles suivants du même code :

- l'article 21-7, dans sa nouvelle rédaction résultant de l'article 1er du projet de loi (acquisition automatique de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France) ;

- l'article 21-11, dans sa nouvelle rédaction résultant de l'article 5 du projet de loi (acquisition volontaire de la nationalité française entre 16 et 18 ans à raison de la naissance et de la résidence en France) ;

- l'article 21-12 (acquisition de la nationalité française par un enfant adopté par un Français) ;

- et l'article 22-1 précité (effet collectif de l'acquisition de la nationalité française).

L'Assemblée nationale a adopté l'article 7 du projet de loi sans modification.

Votre commission des Lois ne juge pas nécessaire de modifier l'article 21-27 du code civil relatif aux cas d'empêchement à l'acquisition de la nationalité française, dès lors qu'il apparaît suffisamment explicite que les condamnations prononcées alors que l'intéressé était encore mineur ne font pas obstacle à l'acquisition de la nationalité française.

Elle vous propose donc d'adopter un amendement de suppression de l'article 7 du projet de loi.

Article 8
(art. 22-1 du code civil)
Effet collectif de l'acquisition de la nationalité française

Cet article tend à étendre l'effet collectif de l'acquisition de la nationalité française, prévu par l'article 22-1 du code civil, à l'enfant mineur ayant fait l'objet d'une adoption plénière, dont l'un des parents acquiert la nationalité française, à condition qu'il ait la même résidence habituelle que ce parent.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 22-1 du code civil prévoit l'acquisition de plein droit de la nationalité française par l'enfant mineur, légitime ou naturel, dont l'un des parents acquiert la nationalité française, à condition qu'il ait la même résidence habituelle que ce parent et sous réserve que son nom soit mentionné dans le décret de naturalisation ou dans la déclaration de nationalité.

L'article 8 du projet de loi maintient ces dispositions relatives à l'effet collectif de l'acquisition de la nationalité, mais il en étend le bénéfice aux enfants mineurs ayant fait l'objet d'une adoption plénière (on rappellera que l'adoption simple n'exerce pour sa part aucun effet de plein droit sur la nationalité de l'adopté, conformément à l'article 21 du code civil).

Par coordination avec la suppression de la possibilité d'acquérir la nationalité française par une manifestation de volonté et son remplacement par une acquisition automatique de la nationalité, prévus à l'article 1er, l'article 8 du projet de loi procède en outre à une modification de la rédaction de l'article 22-1 du code civil afin de préciser que l'exigence de la mention du nom de l'enfant mineur, bénéficiaire de l'effet collectif, sur le décret de naturalisation ou la déclaration de nationalité ne s'applique qu'en cas d'acquisition de la nationalité par décision de l'autorité publique (naturalisation) ou par déclaration ; en effet, cette exigence ne peut s'appliquer dans le cas d'une acquisition automatique de la nationalité à 18 ans, qui ne donne lieu à aucun document écrit.

L'Assemblée nationale a adopté à cet article un amendement tendant à préciser que l'effet collectif de l'acquisition de la nationalité française bénéficie à l'enfant mineur qui " réside alternativement " avec le parent qui acquiert la nationalité française " dans le cas de séparation ou divorce ". M. Jean-Pierre Brard, à l'initiative de cet amendement, l'a justifié par les difficulté d'établir la preuve de la résidence habituelle chez un parent en cas de garde alternée par l'un et l'autre parent à la suite d'un divorce.

Cependant, ainsi que l'a fait observer M. Paul Lagarde, professeur de droit à l'Université de Paris I, devant votre commission des Lois, la notion de garde alternée n'est pas reconnue dans le code civil et il serait sans doute hasardeux de la consacrer au détour d'un texte sur la nationalité.

En revanche, votre commission ne voit pas d'objection à étendre l'effet collectif de l'acquisition de la nationalité aux enfants mineurs ayant fait l'objet d'une adoption plénière.

Elle vous propose donc d'adopter un amendement répondant à ce seul objet.

Article 9
(art. 26, 26-3, 26-4 et 26-5 du code civil)
Coordination avec la suppression de la manifestation
de volonté d'être Français

Par coordination avec la suppression de la procédure d'acquisition de la nationalité par une manifestation de volonté, prévue à l'article 1er, cet article prévoit la suppression des références actuelles à la manifestation de volonté dans divers articles du code civil relatifs aux déclarations de nationalité.

- Le paragraphe I tend à supprimer la référence à la manifestation de volonté figurant actuellement à l'article 26 du code civil qui donne compétence au juge d'instance (ou aux consuls à l'étranger) pour recevoir les déclarations de nationalité.

- Le paragraphe II a pour objet de modifier la rédaction du dernier alinéa de l'article 26-3 du code civil, qui définit le délai d'enregistrement des manifestations de volonté et des déclarations d'acquisition de la nationalité à raison du mariage, afin d'en limiter la portée à ces dernières déclarations, souscrites en vertu de l'article 21-2 du code civil.

- Le paragraphe III propose de supprimer la mention de " la pièce consignant la manifestation de volonté " figurant actuellement dans le texte de l'article 26-4 du code civil, relatif à l'enregistrement des déclarations de volonté.

- Enfin, le paragraphe IV tend à abroger le second alinéa de l'article 26-5 du code civil qui renvoie actuellement à l'article 21-9 du même code les conditions de la prise d'effet de la manifestation de volonté.

L'Assemblée nationale a adopté l'article 9 sans modification.

Votre commission des Lois souhaite le maintien de la procédure d'acquisition de la nationalité par une manifestation de volonté.

Par coordination avec la suppression de l'article premier, elle vous propose donc de supprimer cet article 9.

SECTION 2
Dispositions modifiant les règles
d'attribution de la nationalité française

Article 10
(art. 19-1 du code civil)
Attribution par défaut de la nationalité française à l'enfant
ne pouvant être rattaché à aucune autre nationalité

Cet article a pour simple objet de réparer une omission de l'article 19-1 du code civil concernant le cas particulier de l'attribution par défaut de la nationalité française par le simple fait de la naissance en France lorsque l'intéressé ne peut être rattaché à aucune autre nationalité.

Deux articles du code civil prévoient actuellement l'attribution de la nationalité française, dès la naissance de l'enfant et à raison de sa seule naissance sur le territoire français, lorsqu'aucune autre nationalité ne peut lui être attribuée, afin de limiter les cas d'apatridie.

Il s'agit, d'une part, de l'article 19, qui confère la nationalité française aux enfants nés en France de parents inconnus et, d'autre part, de l'article 19-1, qui attribue la nationalité française aux enfants nés en France de parents apatrides, ainsi qu'aux enfants nés en France de parents étrangers et à qui n'est attribuée par les lois étrangères la nationalité d'aucun des deux parents.

Cependant, alors que l'article 19 précise que l'enfant né en France de parents inconnus " sera réputé n'avoir jamais été français si, au cours de sa minorité, sa filiation est établie à l'égard d'un étranger et s'il a, conformément à la loi nationale de son auteur, la nationalité de celui-ci ", la rédaction actuelle de l'article 19-1 rend irrévocable l'attribution de la nationalité française aux enfants nés en France de parents apatrides ou à qui n'est attribuée la nationalité d'aucun des deux parents.

Afin d'unifier le régime de ces différents cas d'attribution par défaut de la nationalité française, l'article 10 du projet de loi propose d'établir un parallélisme entre la rédaction de l'article 19-1 et celle de l'article 19 du code civil, en ajoutant à l'article 19-1 un alinéa tendant à préciser que l'enfant, né en France de parents apatrides ou à qui n'est attribuée la nationalité d'aucun des deux parents, " sera réputé n'avoir jamais été français si, au cours de sa minorité, la nationalité étrangère acquise ou possédée par l'un des parents vient à lui être transmise ".

Dans chacun des cas envisagés : parents inconnus, parents apatrides ou parents ne transmettant à l'enfant aucune nationalité, l'enfant serait donc désormais réputé n'avoir jamais été français si la cause d'apatridie ayant motivé l'attribution de la nationalité française venait à disparaître au cours de sa minorité.

L'Assemblée nationale a adopté l'article 10 sans modification.

Votre commission des Lois s'est interrogée sur cette disposition.

Le Président Jacques Larché a fait valoir qu'elle pourrait introduire, peut-être inutilement, un élément de complexité, dans la mesure où le droit français admettait la double nationalité.

M. Robert Badinter a fait observer que cette disposition avait un effet rétroactif pouvant emporter des conséquences préjudiciables pour les intéressés.

Votre rapporteur a néanmoins rappelé qu'une disposition analogue était déjà prévue s'agissant des enfants nés en France de parents inconnus.

En conséquence, suivant sa proposition, la commission a adopté sans modification cet article.

Article 11
(art. 20-5 du code civil)
Non-application du double droit du sol
aux enfants de diplomates étrangers

Cet article a pour objet de procéder à une coordination rendue nécessaire par la suppression, prévue à l'article 1er, de la procédure d'acquisition de la nationalité française par une manifestation de volonté d'être Français, en ce qui concerne la rédaction de l'article 20-5 du code civil, excluant de l'application de la règle du double droit du sol les enfants nés en France de diplomates ou agents consulaires étrangers.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 20-5 du code civil, en son premier alinéa, écarte du champ d'application de la règle du double droit du sol, prévue aux articles 19-3 et 19-4 du code civil, les enfants nés en France des agents diplomatiques ou des consuls de carrière de nationalité étrangère : ainsi, les enfants de diplomates étrangers nés en France dont l'un des parents est lui-même né en France ne bénéficient pas de l'attribution de la nationalité française à la naissance, pour les mêmes raisons que celles qui ont traditionnellement conduit à exclure les enfants de diplomates étrangers du bénéfice de l'acquisition automatique de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France (cf. commentaire de l'article 4 du projet de loi).

Toutefois, dans un second alinéa, le même article 20-5 du code civil autorise ces enfants de diplomates étrangers, nés en France d'un parent lui-même né en France, à acquérir volontairement la nationalité française par une manifestation de volonté souscrite entre 16 et 21 ans, conformément aux articles 21-7 et suivants du code civil.

Dans la mesure où la manifestation de volonté d'être Français serait supprimée par l'article 1er du projet de loi, il conviendrait néanmoins de préserver en faveur de ces enfants une possibilité d'acquisition volontaire de la nationalité française.

C'est pourquoi l'article 11 du projet de loi tend à modifier la rédaction du second alinéa de l'article 20-5 du code civil afin de leur permettre d'acquérir volontairement la nationalité française par une déclaration souscrite entre 16 et 18 ans, à condition qu'ils aient leur résidence en France au moment de cette déclaration et qu'ils y aient eu leur résidence habituelle pendant une période continue ou discontinue d'au moins cinq ans depuis l'âge de 11 ans, suivant les conditions prévues à l'article 21-11 du code civil, dans sa rédaction résultant de l'article 5 du projet de loi.

L'Assemblée nationale a adopté l'article 11 du projet de loi sans modification.

Par coordination avec la suppression de l'article premier, votre commission des Lois vous propose de supprimer cet article 11.

Article 11 bis
(art. 21-25 du code civil)
Délai d'instruction
des demandes de naturalisation

Cet article inséré par l'Assemblée nationale a pour objet d'instituer un délai maximum de 18 mois pour l'instruction des demandes de naturalisation.

La naturalisation peut être accordée par une décision discrétionnaire de l'autorité publique aux étrangers remplissant un certain nombre de conditions prévues aux articles 21-15 à 21-25 du code civil. Aucun délai n'est actuellement imposé pour l'instruction des demandes qui est confiée à la sous-direction des naturalisations du ministère de l'emploi et de la solidarité.

Dans le souci de réduire la durée des procédures de naturalisation, qui atteint en moyenne deux ans, l'Assemblée nationale, s'inspirant d'une recommandation de la Commission nationale consultative des droits de l'homme, a prévu l'insertion d'un article 21-25-1 nouveau dans le code civil tendant à contraindre l'administration à statuer dans un délai de 18 mois à compter de la constitution complète du dossier, le cas échéant prorogeable de trois mois par décision motivée.

Toutefois, le dépassement éventuel de ce délai n'étant sanctionné d'aucun effet, une telle disposition risque de n'avoir qu'une faible portée pratique car, comme l'a souligné M. Paul Lagarde devant votre commission des Lois, il ne serait guère concevable d'admettre que le dépassement du délai entraîne de droit la naturalisation.

La réduction des délais de traitement des demandes de naturalisation relève plutôt d'un renforcement des moyens des services de la sous-direction des naturalisations, actuellement confrontée à une augmentation des flux de demandes de naturalisation de 5 à 10 % par an.

A cet égard, Mme Elisabeth Guigou, garde des Sceaux, a indiqué devant l'Assemblée nationale que Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, s'était engagée à doter dans les plus brefs délais la sous-direction compétente de 20 emplois supplémentaires, ce qui devrait diviser les délais par deux à échéance de deux ans.

Tout en estimant que les délais d'instruction des demandes de naturalisation sont effectivement excessifs et que les moyens des services compétents gagneraient sans doute à être renforcés, votre commission des Lois considère que le règlement de cette question ne relève pas d'une disposition législative.

Elle vous propose donc d'adopter un amendement de suppression de l'article 11 bis.

SECTION 3
Dispositions modifiant les règles de preuve
de la nationalité française

Article 12
(art. 28 du code civil)
Mention de la première délivrance d'un certificat
de nationalité française en marge de l'acte de naissance

Cet article a pour objet de faciliter la preuve de la nationalité française en prévoyant la mention systématique de la première délivrance d'un certificat de nationalité française en marge de l'acte de naissance.

En application de l'article 28 du code civil, sont déjà mentionnés, en marge de l'acte de naissance, les actes administratifs et les déclarations ayant pour effet l'acquisition, la perte de la nationalité française ou la réintégration dans cette nationalité, ainsi que les décisions juridictionnelles ayant trait à cette nationalité.

L'article 12 du projet de loi propose de compléter cette liste en ajoutant à ces mentions celle de toute première délivrance de certificat de nationalité française.

Cette mesure est destinée à simplifier la preuve de la nationalité française afin de remédier aux difficultés qui sont souvent rencontrées par les Français pour apporter la preuve de leur nationalité, notamment lorsqu'ils ne sont pas Français d'origine ou lorsque leurs parents sont nés à l'étranger.

Elle reprend ainsi, en en généralisant la portée, une suggestion formulée dans le rapport établi par M. Patrick Weil. Celui-ci préconisait en effet que le jeune bénéficiaire de l'acquisition automatique de la nationalité française à sa majorité puisse demander au juge d'instance que la mention de cette acquisition soit portée en marge de son acte de naissance, de manière à ce qu'il dispose d'une preuve préconstituée de sa nationalité.

Telle qu'elle est prévue par le projet de loi, la mention de " toute première délivrance de certificat de nationalité française " en marge de l'acte de naissance concernerait non seulement les personnes ayant acquis de plein droit la nationalité française à la majorité à raison de la naissance et de la résidence en France, mais également toutes celles qui se verraient délivrer pour la première fois un certificat de nationalité française quel qu'en soit le fondement (autre mode d'acquisition, ou nationalité française d'attribution depuis la naissance).

Ce système devrait permettre de diminuer notablement, voire de supprimer, les demandes ultérieures de délivrance de certificat de nationalité française.

On peut ainsi espérer remédier, par une diminution substantielle des flux, à l'engorgement des tribunaux d'instance pour les affaires de ce type et aux longs délais d'attente qui résultent actuellement du nombre très élevé de demandes de certificats de nationalité. En 1996, on a ainsi enregistré 247.042 demandes et 233.209 délivrances de certificat, le " stock " en cours d'instruction à la fin de l'année s'élevant à 108.263.

L'Assemblée nationale a adopté l'article 12 sans modification.

Votre commission des Lois n'ignore pas, comme le souligne l'étude d'impact du projet de loi, que la mesure proposée conduirait à un accroissement des missions et de la charge de travail incombant aux greffiers des tribunaux d'instance compétents en matière de nationalité, aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance auxquels il appartiendrait de demander aux officiers de l'état civil l'apposition de la mention en marge des certificats de nationalité française qui leur auraient été transmis par les tribunaux d'instance, et enfin aux officiers de l'état civil eux-mêmes. Cette charge nouvelle serait particulièrement importante pour le Parquet de Nantes, compétent pour exercer le contrôle des certificats de nationalité à mentionner sur les actes de naissance des personnes nées à l'étranger.

Votre commission des Lois est cependant particulièrement sensible aux fréquents problèmes de preuve de la nationalité française, rencontrés notamment par les Français de l'étranger ou les Alsaciens-Mosellans, qui ont fréquemment été évoqués au cours des auditions.

Elle approuve donc le souci d'une simplification de cette preuve par la mesure proposée à l'article 12 du projet de loi, tout en faisant siennes les recommandations de Mmes Claude Fournier et Laurence Pécaut-Rivolier, juges d'instance entendues par la commission, sur la nécessité que la mention prévue de la première délivrance du certificat de nationalité en marge de l'acte de naissance soit suffisamment précise pour permettre ultérieurement la délivrance de nouveaux certificats de nationalité sans exiger la production de documents supplémentaires ou de nouvelles démarches.

Au bénéfice de ces observations, votre commission a adopté l'article 12 du projet de loi sans modification.

Article 13
(art. 28-1 du code civil)
Inscription des mentions relatives à la nationalité
sur les extraits des actes de naissance et sur le livret de famille

Cet article complémentaire du précédent a également pour objet de faciliter la preuve de la nationalité française, en prévoyant l'inscription des mentions relatives à la nationalité sur les extraits des actes de naissance ou sur le livret de famille, à la demande des intéressés.

Conformément à l'article 28-1 du code civil, les mentions relatives à la nationalité : actes administratifs, déclarations ou jugements ayant pour effet l'acquisition, la perte ou la réintégration dans la nationalité, sont actuellement portées sur les copies des actes de naissance, mais non sur les simples extraits.

Le projet de loi propose de modifier la rédaction de cet article afin que ces mentions puissent également être portées sur les extraits des actes de naissance ou sur le livret de famille.

Cette inscription serait en principe subordonnée à la demande de l'intéressé. Toutefois, dans l'éventualité où une personne ayant antérieurement acquis la nationalité française ou s'étant vu reconnaître judiciairement celle-ci ou ayant obtenu la délivrance d'un certificat de nationalité française, et en ayant alors demandé l'inscription, viendrait ensuite à perdre la nationalité française, le projet de loi dispose que la mention de cette perte serait portée d'office sur les extraits des actes de naissance ou sur le livret de famille de l'intéressé.

L'Assemblée nationale a précisé que cette mention d'office devrait être portée non seulement en cas de perte de la nationalité " stricto jure " mais également dans tous les autres cas où une personne cesse d'avoir la qualité de Français : déclination, déchéance, opposition à l'acquisition de la nationalité française, retrait du décret de naturalisation ou de réintégration, décision judiciaire ayant constaté l'extranéité.

Les nouvelles dispositions prévues à l'article 13, conjuguées à la mention de la première délivrance de certificat de nationalité en marge de l'acte de naissance, prévue par l'article précédent, devraient permettre de simplifier considérablement la preuve de la nationalité française lorsque celle-ci doit être apportée à l'occasion de l'accomplissement de diverses formalités administratives.

En particulier, ainsi que le précise l'étude d'impact relative au projet de loi, " la simple production d'une pièce d'état civil, portant mention de ce certificat de nationalité française, suffira pour que l'usager se fasse délivrer une carte nationalité d'identité ou un passeport, sans qu'il ait besoin de demander la délivrance d'un nouveau certificat de nationalité française ".

Cette mesure permettrait ainsi de mettre fin à l'exigence par les services compétents d'un certificat de nationalité française, notamment pour le renouvellement de la carte nationale d'identité, qui est souvent perçue par les intéressés comme une tracasserie administrative inutile.

Approuvant le souci de simplification de la preuve de la nationalité française, votre commission des Lois a adopté cet article sans modification.

SECTION 4
Dispositions modifiant les règles de perte
de la nationalité française

Article 14 A
(art. 20-4 du code civil)
Perte de la faculté de répudier la qualité
de Français

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, est destiné à adapter la rédaction de l'article 20-4 du code civil aux conséquences de la réforme du service national résultant de la loi du 28 octobre 1997.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 20-4 du code civil prévoit que le Français auquel une faculté de répudiation de sa nationalité est offerte (cf. infra commentaire de l'article 14) perd cette faculté s'il contracte un engagement dans les armées française ou s'il participe volontairement aux opérations de recensement en vue de l'accomplissement du service national.

La nouvelle rédaction de l'article 20-4 du code civil proposée par l'article 14 A du projet de loi tend à supprimer la mention de cette deuxième hypothèse.

En effet, l'Assemblée nationale a estimé que compte tenu de l'allégement considérable des charges liées au service national entraîné par la loi du 28 octobre 1997 et de l'abaissement de l'âge du recensement, la simple participation aux opérations afférentes à celui-ci ne justifiait plus que l'intéressé soit privé de son éventuelle faculté de répudiation de la nationalité française.

Votre commission des Lois estime cependant que la participation aux opérations de recensement en vue du service national traduit très clairement une volonté d'adhésion à la communauté nationale et qu'il n'y a pas lieu de prévoir le maintien de la faculté de répudiation dans cette éventualité.

Elle vous propose donc de supprimer l'article 14A du projet de loi.

Article 14B
(art. 23-2 du code civil)
Nécessité d'avoir satisfait les obligations
du service national pour souscrire une déclaration
en vue de la perte de la nationalité française

Cet article, inséré comme le précédent par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, a également pour objet de procéder à une adaptation rendue nécessaire par la réforme du service national.

Cette adaptation concerne l'article 23-2 du code civil qui interdit actuellement aux Français de sexe masculin âgés de moins de 35 ans, qui acquièrent volontairement une nationalité étrangère, de souscrire une déclaration en vue de perdre la nationalité française s'ils n'ont pas satisfait aux obligations de service actif imposées par le code du service national, sauf dispense ou exemption.

L'article 14 B du projet de loi propose une nouvelle rédaction de cet article 23-2 du code civil destinée :

- à limiter cette interdiction de perte de la nationalité française au non-respect des obligations prévues au livre II du code du service national (c'est-à-dire de celles correspondant au service national dans sa forme actuelle), sans la maintenir en cas de non-respect des obligations relatives à l'appel de préparation à la défense ;

- tout en étendant le champ d'application de cette disposition à l'ensemble des Français de moins de 35 ans (de sexe masculin ou féminin), afin de préserver la possibilité d'une éventuelle extension aux jeunes filles des obligations du service national actif en cas de rétablissement de celui-ci.

Votre commission a adopté sans modification cet article de coordination avec la réforme du service national.

Article 14
(art. 23-3 du code civil)
Perte de la nationalité française en cas de répudiation
de la qualité de français acquise par effet collectif

Cet article a pour simple objet de réparer un oubli en complétant l'article 23-3 du code civil afin de préciser que la répudiation de la qualité de Français acquise par effet collectif de l'acquisition par un parent entraîne la perte de la nationalité française.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 23-3 du code civil prévoit la perte de la nationalité française par " le Français qui exerce la faculté de répudier cette qualité dans les cas prévus aux articles 18-1 et 19-4 ".

Dans le premier cas, il s'agit de la faculté de répudiation de la qualité de Français offerte à l'enfant français par filiation qui n'est pas né en France et dont un seul des parents est français (art. 18-1 du code civil).

Le second cas concerne l'enfant français par l'application de la règle du double droit du sol dont un seul des parents est né en France, auquel est également offerte une faculté de répudiation de la qualité de Français (art. 19-4 du code civil).

Cependant, il existe un troisième cas dans lequel une faculté de répudiation de la qualité de Français est prévue par le code civil : celui de l'enfant devenu français en même temps que l'un de ses parents ayant acquis la nationalité française, s'il n'est pas né en France (art. 22-3 du code civil).

Or, ce dernier cas n'est pas visé à l'article 23-3 du code civil bien qu'il apparaisse évident que l'exercice de cette faculté de répudiation entraîne la perte de la nationalité française.

L'article 14 du projet de loi répare cette omission en ajoutant à cet article une référence à l'article 22-3 du code civil.

On rappellera que la faculté de répudiation s'exerce dans tous les cas par une déclaration (art. 20-2 du code civil) souscrite au cours des six mois précédant la majorité ou des douze mois la suivant, la perte de la nationalité prenant effet à la date de la déclaration (cf. art. 23-9 du code civil) ; en outre, les intéressés peuvent renoncer à leur faculté de répudiation à partir de l'âge de 16 ans dans les mêmes conditions.

L'Assemblée nationale a adopté l'article 14 sans modification.

Votre commission des Lois a adopté sans modification cet article.

Article 14 bis
(art. 23-5 du code civil)
Nécessité d'avoir satisfait les obligations du code du service national
pour répudier la nationalité française à raison du mariage
avec un étranger

Cet article, ajouté par l'Assemblée nationale sur la proposition du Gouvernement, tend à procéder à une nouvelle adaptation du droit de la nationalité à la réforme du service national, analogue à celle précédemment proposée par l'article 14 B.

Il s'agit cette fois-ci de l'article 23-5 du code civil qui prévoit, dans son premier alinéa, la possibilité pour un Français ayant épousé un étranger de répudier la nationalité française à condition qu'il ait acquis la nationalité étrangère de son conjoint et que la résidence habituelle du ménage ait été fixée à l'étranger ; toutefois, le second alinéa de l'article interdit aux Français de moins de 35 ans d'exercer cette faculté de répudiation s'ils n'ont pas satisfait aux obligations du service actif imposées par le code du service national, sauf dispense ou exemption.

C'est pour adapter à la réforme du service national les dispositions de ce second alinéa que l'article 14 bis du projet de loi en propose une nouvelle rédaction ayant, comme l'article 14 B, un double objet, à savoir :

- d'une part, la limitation de la portée de cette interdiction de répudiation de la nationalité française au non respect des obligations du service national dans sa forme actuelle ;

- et d'autre part, l'extension de son champ d'application à l'ensemble des Français de moins de 35 ans, de sexe masculin ou féminin.

Votre commission a adopté sans modification cet article.

Article 14 ter
(art. 24-2 du code civil)
Réintégration dans la nationalité française par déclaration

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des Lois, tend à modifier l'article 24-2 du code civil afin de permettre aux personnes n'étant pas Françaises depuis la naissance mais ayant acquis cette nationalité d'y être réintégrées par simple déclaration si elles l'ont par la suite perdue en raison du mariage avec un étranger, ou de l'acquisition par mesure individuelle d'une nationalité étrangère.

La réintégration dans la nationalité française relève en principe d'une décision discrétionnaire de l'autorité publique prise par décret et est soumise aux mêmes conditions que la naturalisation, notamment la condition de résidence en France à la date de la signature du décret, à l'exception de la condition de stage (article 24-1 du code civil).

Toutefois, l'article 24-2 du code civil prévoit une procédure de réintégration par déclaration en faveur des Français d'origine qui ont perdu leur nationalité à raison du mariage avec un étranger ou de l'acquisition par mesure individuelle d'une nationalité étrangère, à condition qu'ils aient conservé ou acquis des liens manifestes avec la France, notamment d'ordre culturel, professionnel, économique ou familial.

Cette déclaration pouvant être souscrite en France ou à l'étranger, la procédure prévue à l'article 24-2, permet la réintégration dans la nationalité française de personnes résidant à l'étranger, à la différence de la réintégration par décret.

Cependant, le bénéfice de la réintégration par déclaration est actuellement réservé aux personnes qui s'étaient vu attribuer la nationalité française dès leur naissance.

L'article 14 ter du projet de loi a pour objet de supprimer cette limitation en étendant le bénéfice de cette procédure aux personnes qui n'étaient pas Françaises à la naissance mais ont acquis postérieurement la nationalité française, notamment par naturalisation, déclaration ou effet collectif.

Cette mesure devrait permettre à tous les Français établis à l'étranger qui ont perdu leur nationalité française, notamment par le mariage avec un ressortissant de leur pays de résidence, d'être réintégrés dans cette nationalité s'ils le souhaitent, alors qu'aujourd'hui seuls ceux qui étaient Français d'origine peuvent être réintégrés, les autres n'ayant accès ni à la réintégration par déclaration, ni à la réintégration par décret.

Votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 14 quater
(art. 25 du code civil)
Déchéance de la nationalité française

Cet article introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement a un double objet :

- d'une part, il tend à interdire toute mesure de déchéance de la nationalité française qui ferait de l'intéressé un apatride ;

- d'autre part, il tend à abroger la possibilité de déchoir de la nationalité française une personne condamnée pour un crime à une peine d'au moins cinq ans d'emprisonnement.

Prévue par les articles 25 et 25-1 du code civil, la déchéance de la nationalité française résulte d'un décret pris après avis conforme du Conseil d'Etat.

Elle peut être prononcée à l'égard d'une personne ayant antérieurement acquis la qualité de Français dans les cas suivants, énumérés à l'article 25 du code civil :

1° condamnation pour un crime ou un délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ;

2° condamnation pour un crime ou un délit prévu et réprimé par le chapitre II du titre III du livre IV du code pénal (atteintes à l'administration publique commises par des personnes exerçant une fonction publique) ;

3° condamnation pour s'être soustrait aux obligations résultant du code du service national ;

4° actes incompatibles avec la qualité de Français et préjudiciables aux intérêts de la France, commis au profit d'un Etat étranger ;

5° condamnation en France ou à l'étranger à une peine d'au moins cinq années d'emprisonnement pour un acte qualifié de crime par la loi française.

La déchéance n'est encourue que pour des faits commis dans un délai de dix ans à compter de la date de l'acquisition de la nationalité française et ne peut être prononcée que dans un délai de dix ans après ces faits.

Dans la pratique, les mesures de déchéance sont exceptionnelles : deux ont été prononcées en 1990, aucune en 1991, deux en 1992, aucune en 1993, deux en 1994 et une en 1995.

L'article 14 quater du projet de loi tend à apporter deux modifications à ce régime :

- afin d'éviter l'apatridie, aucune mesure de déchéance qui aurait pour résultat de rendre l'intéressé apatride ne pourrait plus être prononcée ;

- la déchéance ne serait plus encourue à raison des condamnations visées au 5° précité de l'article 25 du code civil.

Mme Elisabeth Guigou, garde des Sceaux, a justifié ces deux modifications, devant l'Assemblée nationale, par un souci de conformité avec les conventions internationales tendant à éviter l'apatridie, notamment la Convention des Nations-Unies du 30 août 1961 sur la réduction des cas d'apatridie et la Convention européenne sur la nationalité du Conseil de l'Europe (convention n° 166 du 6 novembre 1997).

Cependant, la première de ces conventions n'a pas été ratifiée par la France et la seconde n'a pas encore été signée par la France.

Aussi votre commission ne juge-t-elle pas fondé de modifier le régime actuel de la déchéance.

Elle vous propose donc d'adopter un amendement de suppression de l'article 14 quater.

CHAPITRE II
DISPOSITIONS DIVERSES ET TRANSITOIRES

Article additionnel avant l'article 15 A
Preuve de la nationalité française
des Alsaciens-Mosellans

Votre commission des Lois vous propose d'insérer dans le projet de loi un article additionnel concernant le problème particulier de la preuve de la nationalité française auquel sont souvent confrontés les habitants de l'Alsace et de la Moselle.

Ainsi qu'il a été rappelé à plusieurs reprises au cours des auditions, notamment par MM. André Bohl et Daniel Hoeffel, à l'occasion de diverses démarches administratives, les Alsaciens-Mosellans se voient encore trop fréquemment réclamer des certificats de réintégration dans la nationalité française de leurs ascendants, pour apporter la preuve de leur nationalité française.

Cette situation particulière héritée de l'histoire s'explique par le statut de territoire étranger qui a été celui des actuels départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle entre le 20 mai 1871 et le 11 novembre 1918, ainsi que l'ont reconnu le traité de Francfort du 10 mai 1871 et le traité de Versailles du 28 juin 1919, le second ayant prévu la réintégration dans la nationalité française de ceux qui l'avaient perdu en application du premier.

Par la suite, l'article 27 de la loi n° 73-42 du 9 janvier 1973 a permis de considérer les personnes réintégrées de plein droit en application du traité de Versailles comme des Français d'origine pour l'application des dispositions du droit de la nationalité qui exigent la possession de la nationalité française à titre de nationalité d'origine.

Le législateur a ensuite entendu faciliter la preuve de la nationalité française de ces personnes et de leurs descendants : ainsi, l'article 7 de la loi n° 61-1408 du 22 décembre 1961, modifiée par la loi n° 71-499 du 29 juin 1971, a-t-il prévu de tenir pour établie la nationalité française des personnes nées dans les départements concernés antérieurement au 11 novembre 1918, ainsi que celle de leurs descendants, pour peu qu'ils puissent justifier avoir joui de façon constante de la possession d'état de Français. On rappellera que celle-ci résulte de la production de documents administratifs divers, tels que carte d'identité, documents militaires, passeport...

Par une circulaire du 1er décembre 1993, ces dispositions ont été rappelées à l'ensemble des tribunaux d'instance, auxquels il a été demandé de ne plus exiger, en règle générale, la production de certificats de réintégration.

Cependant, il semble bien que des difficultés fréquentes subsistent dans la pratique, des certificats de réintégration étant encore exigés.

Votre commission vous propose de mettre fin à cette formalité vexatoire et généralement inutile en considérant comme établie la nationalité française d'origine des descendants des personnes nées sur le territoire des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin ou de la Moselle antérieurement au 11 novembre 1918, lorsqu'ils sont eux-mêmes nés en France.

Elle vous propose donc d'adopter un amendement rédigé en ce sens.

Article 15 A
(art. 23 de la loi n° 73-42 du 9 janvier 1973)
Application du double droit du sol aux enfants nés en France
d'un parent né sur le territoire des anciens départements
français d'Algérie

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale sur la proposition de sa commission des Lois, a pour objet de supprimer la condition de résidence régulière en France depuis cinq ans requise des personnes nées en Algérie avant le 3 juillet 1962 pour que leurs enfants nés en France se voient attribuer la nationalité française dès la naissance par l'application du double droit du sol.

En application de la règle du double droit du sol définie par l'article 19-3 du code civil, est Français l'enfant né en France d'un parent qui y est lui-même né.

L'article 23 de la loi n° 73-42 du 9 janvier 1973 avait rendu cette règle applicable à l'enfant né en France d'un parent né sur un territoire qui avait au moment de la naissance de ce parent, le statut de colonie ou de territoire d'outre-mer de la République française.

Toutefois, la loi du 22 juillet 1993 a ensuite limité la portée de cette disposition aux seuls enfants nés en France avant le 1er janvier 1994.

Elle a en outre inséré un second alinéa à l'article 23 de la loi du 9 janvier 1973 afin de restreindre le champ d'application du double droit du sol, s'agissant des enfants nés en France d'un parent né sur le territoire des anciens départements français d'Algérie avant le 3 juillet 1962 : ainsi, le double droit du sol reste applicable à ceux de ces enfants qui sont nés après le 31 décembre 1993, mais seulement à condition que leur parent né dans un ancien département français d'Algérie justifie d'une résidence régulière en France depuis cinq ans.

Ainsi que l'avait exposé M. Pierre Méhaignerie, alors garde des Sceaux, devant l'Assemblée nationale, cette disposition avait pour objet d'éviter " que se développent, sur la base du régime très particulier de l'Algérie, des comportements frauduleux, tendant à faire acquérir la nationalité française à des enfants n'ayant véritablement aucun lien de rattachement avec la France. Tel est le cas, par exemple, lorsque des femmes venant d'Algérie viennent séjourner en France uniquement pour la durée de leur accouchement et s'en retournent dans leur pays avec leur enfant né Français mais qui ne grandira pas en France ".

L'article 15A du projet de loi propose de revenir sur cette disposition de la loi du 22 juillet 1993 en supprimant toute restriction à l'application du double droit du sol en faveur des enfants nés en France d'un parent né sur le territoire des anciens départements d'Algérie avant le 3 juillet 1962.

Votre commission des Lois avait approuvé l'instauration d'une condition de résidence régulière de cinq années en France du parent né dans un des anciens départements français d'Algérie, pour l'attribution de la nationalité française à son enfant né en France, estimant que celle-ci répondait au souci d'une meilleure prise en considération de l'assimilation de l'enfant à la communauté nationale.

Elle ne souhaite pas revenir aujourd'hui sur cette disposition et vous propose donc de supprimer l'article 15 A.

Article 15B
Accès aux dossiers administratifs
en matière de nationalité

Cet article, résultant d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des Lois, a pour simple objet de préciser que les dossiers administratifs de nationalité sont communicables selon les modalités prévues à l'article 6 bis de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public.

A l'appui de cet amendement, M. Louis Mermaz, rapporteur de la commission des Lois de l'Assemblée nationale, a insisté sur les difficultés rencontrées par les personnes qui ont déposé une demande de naturalisation ou de réintégration dans la nationalité française, ou encore une déclaration de nationalité, pour accéder à leurs dossiers administratifs.

Une telle disposition apparaît cependant quelque peu superfétatoire eu égard au principe de droit commun de communicabilité aux intéressés des documents administratifs de caractère nominatif les concernant, posé par l'article 6 bis de la loi du 17 juillet 1978 précitée, qui dispose : " Les personnes qui le demandent ont droit à la communication, par les administrations mentionnées à l'article 2 " (parmi lesquelles figurent les administrations de l'Etat) " des documents de caractère nominatif les concernant, sans que des motifs tirés du secret de la vie privée, du secret médical ou du secret en matière commerciale ou industrielle, portant exclusivement sur des faits qui leur sont personnels, puissent leur être opposés ".

En effet, si jusqu'en 1993, la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) considérait que les dossiers de naturalisation n'étaient pas communicables, précisant que " l'acquisition de la nationalité française, qui fait l'objet d'un décret, est subordonnée à des critères d'opportunité dont la mise en oeuvre, à l'occasion de chaque dossier, relève de l'appréciation souveraine et discrétionnaire du Gouvernement ", un revirement de sa jurisprudence s'est opéré depuis la loi du 22 juillet 1993 réformant le code de la nationalité. Ainsi, la CADA a confirmé à maintes reprises depuis lors le caractère communicable des dossiers de nationalité en faveur des personnes intéressées (CADA - 10 août 1996 - Bertin/Soumare ; CADA - 14 mars 1996 -Kigan), l'obligation de communication s'imposant tant aux préfectures qu'aux greffes des tribunaux d'instance qui agissent dans cette matière dans un cadre administratif.

Votre commission des Lois vous propose donc de supprimer cet article.

Article 15 C
Motivation des décisions administratives
relatives à la nationalité

Cet article, introduit par l'Assemblée nationale sur la proposition de sa commission des Lois, a pour simple objet de préciser que les décisions rejetant une demande de naturalisation ou de réintégration par décret, ou encore de libération des liens d'allégeance, doivent être motivées selon les modalités prévues à l'article 3 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs.

La loi du 22 juillet 1993 portant réforme du droit de la nationalité a déjà prévu une obligation de motivation de ces décisions administratives défavorables relatives à la nationalité, suivant là une recommandation formulée par la Commission de la Nationalité ; ainsi, l'article 27 du code civil, dans sa rédaction issue de cette dernière loi, dispose-t-il que " toute décision déclarant irrecevable, ajournant ou rejetant une demande de naturalisation ou de réintégration par décret ainsi qu'une autorisation de perdre la nationalité française, doit être motivée ".

L'article 15 C du projet de loi reprend exactement la formulation de l'article 27 du code civil en y ajoutant seulement la précision suivant laquelle la motivation doit revêtir les modalités prévues à l'article 3 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs, c'est-à-dire être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision.

M. Louis Mermaz, rapporteur de la commission des Lois de l'Assemblée nationale, a justifié cette précision par une interprétation restrictive donnée par l'administration à la notion de motivation prévue à l'article 27 du code civil ; celle-ci n'aurait, suivant cette interprétation, pas à être aussi précise que celle imposée par la loi du 11 juillet 1979 aux décisions qui refusent un droit.

L'article 15 C du projet de loi apparaît néanmoins redondant avec les dispositions de l'article 27 du code civil.

Votre commission vous propose donc de supprimer cet article.

Article 15
(art. L. 15 et L. 16 du code du service national)
Coordination avec le code du service national

Cet article a pour objet de tirer les conséquences de la suppression de la procédure d'acquisition de la nationalité française par une manifestation de volonté, prévue à l'article 1er, dans la rédaction des articles L. 15 et L. 16 du code du service national.

· L' article L. 15 de ce code concerne les obligations de recensement auxquelles sont soumises les jeunes Français du sexe masculin âgés de 17 ans en vue de l'accomplissement du service national.

Dans sa rédaction actuelle, il comporte un second alinéa prévoyant la possibilité pour les jeunes étrangers mentionnés à l'article 21-7 du code civil, c'est-à-dire ceux qui remplissent les conditions exigées pour l'acquisition de la nationalité française par une manifestation de volonté, de participer volontairement aux opérations de recensement, cette participation constituant une manifestation de volonté aux termes de l'article 21-10 du code civil.

Le paragraphe I de l'article 15 du projet de loi tend à abroger ce second alinéa de l'article L. 15 du code du service national, qui n'aurait plus de raison d'être dans la mesure où l'article 1er ferait disparaître la manifestation de volonté.

· L' article L. 16 du code du service national règle au regard des obligations de recensement la situation des jeunes Français du sexe masculin auxquels une faculté de répudiation de la nationalité est offerte (au titre des articles 18-1, 19-4 ou 22-3 du code civil - cf. commentaire de l'article 14 du projet de loi) et qui n'y ont pas renoncé. Ceux-ci sont soumis aux obligations de recensement à l'expiration du délai dont ils disposent pour exercer leur faculté de répudiation. Toutefois, ils peuvent sur leur demande se faire inscrire sur les listes du recensement avant cet âge, mais ils perdent alors de ce fait la faculté de répudier la nationalité française.

Le paragraphe III de l'article 15 du projet de loi tend à compléter cet article L. 16 du code du service national afin d'en étendre la portée aux jeunes Français qui auraient désormais la possibilité de décliner la nationalité française dans les six mois qui précèdent leur majorité et dans les douze mois la suivant, en application de l'article 2 du projet de loi, c'est-à-dire aux jeunes Français ayant acquis la nationalité française à leur majorité à raison de la naissance et de la résidence en France. Ces derniers seraient donc soumis aux obligations de recensement à l'expiration du délai de déclination, c'est-à-dire à 19 ans.

L'Assemblée nationale a adopté l'article 15 du projet de loi sans modification.

En conséquence de la suppression de l'article premier, votre commission des Lois vous propose de supprimer cet article.

Article 15 bis
Titre d'identité républicain

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale sur la proposition de sa commission des Lois, prévoit la délivrance d'un " titre d'identité républicain " à tout mineur né en France de parents étrangers titulaires d'un titre de séjour.

Suivant les explications fournies devant l'Assemblée nationale par M. Louis Mermaz, rapporteur, cette disposition a pour objet de remédier à la situation de relatif " vide juridique " dans laquelle se trouvent les enfants nés en France de parents étrangers qui ont vocation à devenir Français, par la délivrance d'un titre leur permettant de justifier de leur identité et de circuler librement dans les pays de l'espace Schengen. Ce " titre d'identité républicain " serait délivré à la demande des intéressés, sur présentation du livret de famille.

On observera cependant que, dans le droit actuel, les mineurs étrangers nés en France et y résidant, s'ils ne sont pas tenus d'être titulaires d'un titre de séjour, peuvent néanmoins dans certains cas se voir délivrer une carte de séjour temporaire ou une carte de résident, à défaut desquelles ils peuvent bénéficier d'un document de circulation délivré en application de l'article 9 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France, et dans les conditions prévues par un décret n° 91-1305 du 24 décembre 1991.

En particulier, le mineur étranger qui justifie par tout moyen avoir sa résidence habituelle en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans bénéficie de la délivrance de plein droit d'une carte de séjour temporaire (article 12 bis, 2° de l'ordonnance du 2 novembre 1945).

Le mineur étranger âgé de plus de seize ans qui remplit les conditions d'acquisition de la nationalité française prévues à l'article 21-7 du code civil bénéficie pour sa part de la délivrance de plein droit d'une carte de résident (article 15, dernier alinéa de l'ordonnance du 2 novembre 1945).

A défaut de l'un ou l'autre de ces titres de séjour, le mineur étranger né en France peut se voir délivrer un document de circulation sur présentation du titre de séjour de l'un de ses parents, conformément à l'article 2, dernier alinéa, du décret du 24 décembre 1991 précité.

Le document de circulation facilite le retour sur le territoire français, après un déplacement hors de France, du mineur étranger qui y réside, dans la mesure où sa présentation permet à l'intéressé d'être admis en France en dispense de visa.

Il répond donc à la préoccupation qui est à l'origine de l'adoption de l'article 15 bis par l'Assemblée nationale.

Au surplus, cette disposition relève plutôt de la législation sur l'entrée et le séjour des étrangers en France.

Votre commission vous propose donc de supprimer cet article.

Article 15 ter
(art. l. 40-1 du code du service national)
Assimilation des obligations du service national dans l'Etat d'origine
aux obligations imposées par le code du service national

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, a pour objet de tirer les conséquences de la suppression, prévue par l'article premier, de la procédure de la manifestation de volonté d'être Français dans la rédaction de l'article L.40-1 du code du service national, relatif aux obligations du service national imposées aux hommes devenus Français entre 17 et 50 ans.

Dans sa rédaction actuelle issue de la loi du 28 octobre 1997 portant réforme du service national, l'article L 40-1 précité prévoit que les jeunes gens visés à l'article L.17 du même code (c'est-à-dire les hommes devenus Français entre 17 et 50 ans, ou dont la nationalité française a été établie entre ces deux âges) sont considérés comme ayant satisfait aux obligations imposées par le code du service national si " au moment de leur naturalisation, de leur intégration ou de leur déclaration ", ils ont satisfait aux obligations du service national à l'égard de leur Etat d'origine, dans les conditions prévues par la législation de cet Etat.

Afin de prendre en compte la substitution à la manifestation de volonté d'être Français, d'une acquisition automatique de la nationalité française à leur majorité par les jeunes étrangers nés et résidant en France, l'article 15 ter du projet de loi tend à modifier la rédaction de l'article L 40-1 du code du service national en substituant à la référence du moment de la naturalisation, de l'intégration ou de la déclaration, celle du moment " de l'acquisition de la nationalité française ou de l'établissement de celle-ci ".

En conséquence de la suppression de l'article premier du projet de loi, votre commission vous propose de supprimer cet article 15 ter.

Article 15 quater
(art. L. 113-3 du code du service national)
Obligation de recensement imposée aux personnes qui n'ont pas exercé
la faculté de répudier ou de décliner la nationalité française

Cet article, également inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, a pour objet de tirer les conséquences de la suppression de la procédure d'acquisition de la nationalité française par une manifestation de volonté, dans la rédaction de l'article L 113-3 du code du service national, relatif à l'obligation de recensement imposée aux personnes devenues françaises entre leur seizième et leur vingt-cinquième anniversaire.

Dans sa rédaction actuelle, issue de la loi du 28 octobre 1997 portant réforme du service national, l'article L 113-3 du code du service national prévoit dans un premier alinéa que les personnes devenues françaises entre 16 et 25 ans, ainsi que celles dont la nationalité française a été établie entre ces deux âges à la suite d'une décision de justice, sont soumises à l'obligation de recensement dès l'acquisition ou l'établissement définitif de la nationalité française.

Le second alinéa du même article précise en outre que les jeunes étrangers mentionnés à l'article 21-7 du code civil, c'est-à-dire ceux qui sont susceptibles d'acquérir la nationalité française par une manifestation de volonté, peuvent participer volontairement aux opérations de recensement.

- Le paragraphe I de l'article 15 quater du projet de loi tend à supprimer cette dernière disposition et à y substituer un alinéa prévoyant un report de l'obligation du recensement en faveur des personnes bénéficiant d'une faculté de répudiation de la nationalité française (en application des articles 18-1, 19-4 et 22-3 du code civil) ou de déclination de cette nationalité (en application de l'article 21-8 du code civil, dans sa rédaction résultant de l'article 2 du projet de loi), jusqu'à l'expiration du délai ouvert pour exercer cette faculté.

- Le paragraphe II de l'article 15 quater du projet de loi tend en outre à compléter l'article L 113-3 du code du service national afin de préciser qu'à l'expiration de ce délai les intéressés n'ayant pas exercé leur faculté de répudier ou de décliner la nationalité française seraient soumis à l'obligation de participer à l'appel de préparation à la défense et seraient alors convoqués à cet appel dans un délai de six mois, dans les conditions fixées à l'article L.114-4 du même code (choix parmi trois dates au moins proposées par l'administration chargée du service national).

Le projet de loi tend donc ainsi à reporter à l'âge de 19 ans (correspondant à l'expiration du délai de déclination de la nationalité française) les obligations de recensement et de participation à l'appel de préparation à la défense auxquelles seraient soumises les jeunes ayant bénéficié de l'acquisition automatique de la nationalité française à leur majorité à raison de la naissance et de la résidence en France.

En conséquence de la suppression de l'article 1er, votre commission des Lois vous propose de supprimer cet article.

Article 16
Régime juridique applicable aux manifestations de volonté
déjà souscrites mais non encore enregistrées à la date d'entrée
en vigueur de la loi

Cet article, ainsi que les deux suivants, a pour objet de définir le régime transitoire nécessaire pour l'organisation du passage du système actuel d'acquisition de la nationalité française par une manifestation de volonté au système de l'acquisition automatique de la nationalité à l'âge de la majorité.

Il tend à préciser que le régime juridique actuel de la manifestation de volonté, résultant des articles 21-9 et 26-1 à 26-5 du code civil, continuera de s'appliquer après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi en ce qui concerne les manifestations de volonté déjà recueillies, mais non encore enregistrées, à la date de cette entrée en vigueur.

Cette disposition transitoire est destinée à préserver les droits des jeunes étrangers qui auraient procédé à une manifestation de volonté sur la base du droit actuel mais dont la démarche n'aurait pas encore abouti à la date d'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Ainsi, les procédures en cours ne seraient pas affectées par le changement de législation.

L'Assemblée nationale a adopté l'article 16 sans modification.

Ce régime transitoire serait rendu sans objet par la suppression de l'article premier. Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement de suppression de l'article 16.

Article 17
Régime transitoire d'acquisition de la nationalité française
par certaines catégories de jeunes nés en France de parents étrangers

Cet article tend à définir un régime transitoire d'acquisition de la nationalité française par les jeunes nés en France de parents étrangers et y résidant de manière à ce que ceux-ci ne soient en aucun cas lésés par le changement de législation et en particulier par la modification de la tranche d'âge d'accès à la nationalité française (16-21 ans dans le droit actuel et 16-18 ans dans le nouveau système prévu par le projet de loi).

A cette fin, trois catégories de jeunes sont distinguées.

· Le premier alinéa concerne de jeunes étrangers nés en France de parents étrangers, âgés de 18 à 21 ans et résidant en France à la date d'entrée en vigueur de la loi.

Il prévoit en leur faveur une acquisition automatique de la nationalité française à cette date, sous réserve qu'ils remplissent une condition de résidence analogue à celle prévue à l'article 1er, c'est-à-dire qu'ils aient eu leur résidence habituelle en France pendant une période continue ou discontinue d'au moins cinq ans depuis l'âge de onze ans ; une faculté de décliner la qualité de Français par déclaration leur serait toutefois ouverte dans le délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la loi.

Cette première disposition est donc destinée à permettre l'acquisition de la nationalité française par les jeunes étrangers âgés de 18 à 21 ans qui n'auraient pas encore procédé à la manifestation de volonté prévue par le droit actuel et qui ne pourraient bénéficier du nouveau dispositif d'acquisition automatique à la majorité car ils auraient dépassé cet âge, alors que dans le droit actuel ils auraient pu souscrire une manifestation de volonté d'être Français jusqu'à l'âge de 21 ans.

· Le deuxième alinéa concerne également de jeunes étrangers nés en France de parents étrangers, âgés de 18 à 21 ans et résidant en France à la date d'entrée en vigueur de la loi mais, à la différence du premier, il tend à régler la situation de ceux de ces jeunes qui ne rempliraient pas la condition de résidence habituelle en France de cinq années.

Dans le droit actuel, ces jeunes pourraient acquérir la nationalité française par une manifestation de volonté jusqu'à l'âge de 21 ans s'ils venaient à remplir avant cet âge la condition de résidence habituelle en France de cinq années prévue par l'article 21-7 du code civil.

Le projet de loi propose donc de maintenir en leur faveur cette possibilité d'accès à la nationalité française, en leur permettant de réclamer la nationalité française par déclaration s'ils remplissaient cette condition de résidence et au plus tard à l'âge de 21 ans.

· Le troisième alinéa règle pour sa part le problème posé par la situation de ceux des jeunes étrangers nés en France de parents étrangers, âgés de 16 à 18 ans et résidant en France à la date d'entrée en vigueur de la loi, qui ne rempliraient pas à leur majorité la condition de résidence habituelle en France de cinq années requise par le projet de loi pour l'acquisition automatique de la nationalité française.

Dans le droit actuel, ces jeunes pourraient acquérir la nationalité française par une manifestation de volonté jusqu'à l'âge de 21 ans s'ils venaient à remplir cette condition de résidence avant cet âge. Le projet de loi prévoit donc de conserver cette faculté d'accès de ces jeunes à la nationalité française en leur permettant de réclamer la nationalité française par déclaration s'ils remplissaient cette condition de résidence et au plus tard à l'âge de 21 ans.

· Le quatrième et dernier alinéa de l'article 17 du projet de loi précise toutefois que les modalités transitoires d'acquisition de la nationalité française prévues à cet article en faveur des étrangers majeurs âgés de 18 à 21 ans ne seraient pas applicables à ceux d'entre eux qui auraient fait l'objet, pour des faits commis entre 18 et 21 ans, de condamnations constituant aujourd'hui un empêchement à l'acquisition de la nationalité française par une manifestation de volonté, aux termes de l'article 21-8 du code civil.

Là encore, il s'agit donc du maintien, à titre transitoire, du droit actuel, l'ensemble des dispositions de cet article étant justifié par le souci de préserver les droits d'accès à la nationalité française qui auraient été ceux des jeunes étrangers si la procédure de la manifestation de volonté avait été maintenue.

L'Assemblée nationale a adopté l'article 17 du projet de loi sans modification.

Votre commission vous propose d'adopter un amendement de suppression de cet article rendu sans objet par la suppression de l'article premier.

Article 18
Maintien de la dispense de stage pour la naturalisation
des personnes nées en France de parents étrangers
et âgées de plus de 21 ans à la date d'entrée en vigueur
de la loi

Cet article a pour objet de maintenir à titre transitoire une dispense de la condition de stage normalement exigée pour la naturalisation, en faveur des étrangers âgés de plus de 21 ans à la date de l'entrée en vigueur de la loi qui n'auraient pas souscrit de manifestation de volonté en vue de devenir Français bien qu'ils en aient rempli les conditions.

Dans le droit actuel, le 7° de l'article 21-19 du code civil permet aux étrangers qui ont " laissé passer " l'âge de 21 ans sans procéder à la manifestation de volonté d'être Français alors même qu'ils remplissaient les conditions de naissance et de résidence en France requises pour cette acquisition, de bénéficier d'une dispense de stage s'ils demandent par la suite leur naturalisation, celle-ci constituant la seule voie d'accès à la nationalité française qui leur reste alors ouverte.

Cependant, le projet de loi prévoit, par son article 6, l'abrogation de cette disposition qui perdrait sa raison d'être dans la mesure où la manifestation de volonté disparaîtrait au profit d'une acquisition automatique de la nationalité française.

Il convient néanmoins de faire en sorte de ne pas léser les étrangers qui auraient omis ou se seraient abstenus de procéder à une manifestation de volonté d'être Français et qui ne pourraient bénéficier de l'acquisition automatique de la nationalité ni au titre des dispositions nouvelles ni au titre du régime transitoire prévu par l'article 17.

C'est pourquoi l'article 18 du projet de loi tend à conserver pour ces étrangers le bénéfice de la dispense de stage s'ils demandaient à être naturalisés.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

Votre commission vous propose d'adopter un amendement de suppression de cet article rendu sans objet par la suppression de l'article premier.

Article 19
Application dans les territoires d'outre-mer
et à Mayotte

Cet article a pour simple objet d'étendre l'application des dispositions du projet de loi aux territoires d'outre-mer et à la collectivité territoriale de Mayotte, " dans les conditions prévues au chapitre VIII du titre Ier bis du livre Ier du code civil ".

Ce chapitre, intitulé " Dispositions particulière concernant les territoires d'outre-mer ", comporte trois articles (33, 33-1 et 33-2) prévoyant des dispositions particulières pour l'application du droit de la nationalité dans les territoires d'outre-mer afin de tenir compte des spécificités de leur organisation judiciaire. Ainsi, par dérogation aux dispositions de droit commun, les déclarations de nationalité y sont reçues par le président du tribunal de première instance ou par le juge chargé de la section détachée, qui est par ailleurs seul compétent pour la délivrance des certificats de nationalité dans ces territoires.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

Cependant, il convient de rappeler qu'une loi du 9 juillet 1970 a prévu que les textes relatifs au statut civil de droit commun, et notamment à l'état des personnes, s'appliquaient de plein droit outre-mer.

Les lois relatives à la nationalité s'appliquent donc de plein droit dans les territoires d'outre-mer sans qu'il soit besoin de le préciser dans une disposition législative spécifique.

La loi du 22 juillet 1993 portant réforme du droit de la nationalité ne comportait d'ailleurs pas d'article d'extension aux territoires d'outre-mer.

Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter un amendement de suppression de cet article.

Article 20
Date d'entrée en vigueur de la loi

Cet article tend à fixer la date d'entrée en vigueur de la présente loi au premier jour du sixième mois suivant sa publication au Journal officiel.

Ce report de l'entrée en vigueur de la loi -qui peut paraître singulier pour un texte sur lequel l'urgence a été déclarée- est justifié, selon l'exposé des motifs du projet de loi, par la nécessité d'élaborer d'importantes mesures réglementaires d'accompagnement portant sur les points suivants :

- renforcement de l'information du public en matière de nationalité ;

- organisation procédurale de la faculté de décliner la qualité de Français ;

- organisation procédurale de la faculté d'anticiper l'acquisition de la nationalité française ;

- désignation de l'autorité compétente pour procéder à la mention en marge des actes d'état civil de toute première délivrance de certificat de nationalité française.

On rappellera que la loi du 22 juillet 1993 avait de même différé de plusieurs mois l'entrée en vigueur des dispositions concernant la manifestation de volonté d'être Français, reportée au 1er janvier 1994 afin de permettre la mise au point des décrets d'application et du dispositif d'information relatifs à cette nouvelle procédure.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

Votre commission vous propose de supprimer cet article rendu sans objet par la suppression de l'article premier et le maintien des dispositions actuelles relatives à la manifestation de volonté d'être français.

*

* *

ANNEXES

CODE CIVIL

Art. 18-1 - Toutefois, si un seul des parents est français, l'enfant qui n'est pas né en France a la faculté de répudier la qualité de Français dans les six mois précédant sa majorité et dans les douze mois la suivant.

Cette faculté se perd si le parent étranger ou apatride acquiert la nationalité française durant la minorité de l'enfant.

Art. 19-3 - Est français l'enfant, légitime ou naturel, né en France lorsque l'un de ses parents au moins y est lui-même né.

Art. 19-4 - Toutefois, si un seul des parents est né en France, l'enfant français, en vertu de l'article 19-3, a la faculté de répudier cette qualité dans les six mois précédant sa majorité et dans les douze mois la suivant.

Cette faculté se perd si l'un des parents acquiert la nationalité française durant la minorité de l'enfant.

Art. 21-7 - Tout étranger né en France de parents étrangers peut, à partir de l'âge de seize ans et jusqu'à l'âge de vingt et un ans, acquérir la nationalité française à condition qu'il en manifeste la volonté, qu'il réside en France à la date de sa manifestation de volonté et qu'il justifie d'une résidence habituelle en France pendant les cinq années qui la précèdent.

La condition de résidence habituelle en France pendant cinq ans n'est pas exigée pour l'étranger francophone au sens des dispositions de l'article 21-10.

Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles les organismes et services publics, et notamment les établissements d'enseignement, les caisses de sécurité sociale et les collectivités territoriales, informent le public, et en particulier les personnes concernées par le présent article, des dispositions en vigueur en matière de droit de la nationalité.

Art. 21-8 - Toutefois, l'étranger perd le droit qui lui est reconnu à l'article précédent s'il a fait l'objet pour des faits commis entre l'âge de dix-huit ans et celui de vingt et un ans :

- d'une condamnation à une peine quelconque d'emprisonnement pour crimes ou délits constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou un acte de terrorisme ;

- d'une condamnation à une peine égale ou supérieure à six mois d'emprisonnement non assortie d'une mesure de sursis pour atteinte volontaire à la vie, violences ayant entraîné la mort, trafic de stupéfiants ou proxénétisme ;

- d'une condamnation à une peine égale ou supérieure à six mois d'emprisonnement non assortie d'une mesure de sursis pour toute atteinte volontaire à la vie ou à l'intégrité d'un mineur de quinze ans ou pour toute atteinte sexuelle à la personne d'un mineur de quinze ans.

Il en est de même de celui qui a fait l'objet soit d'un arrêté d'expulsion non expressément rapporté ou abrogé, soit d'une interdiction du territoire français non entièrement exécutée.

Art. 21-9 - La manifestation de volonté est recueillie soit par le juge d'instance, soit par une autorité administrative désignée par décret en Conseil d'Etat à l'occasion d'une démarche accomplie devant elle et relevant de sa compétence. Il en est donné acte dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. L'autorité administrative transmet la pièce consignant la manifestation de volonté au juge d'instance.

Le juge d'instance délivre un récépissé après la remise des pièces nécessaires à la preuve de la recevabilité et procède à l'enregistrement conformément aux articles 26-1 et suivants.

L'intéressé acquiert la nationalité française à la date de la manifestation de volonté.

Art. 21-20 - Peut être naturalisée sans condition de stage la personne qui appartient à l'entité culturelle et linguistique française, lorsqu'elle est ressortissante des territoires ou Etats dont la langue officielle ou l'une des langues officielles est le français, soit lorsque le français est sa langue maternelle, soit lorsqu'elle justifie d'une scolarisation minimale de cinq années dans un établissement enseignant en langue française.

Art. 22-3 - Toutefois, l'enfant français en vertu de l'article 22-1 et qui n'est pas né en France a la faculté de répudier cette qualité pendant les six mois précédant sa majorité et dans les douze mois la suivant.

Il exerce cette faculté par déclaration souscrite conformément aux articles 26 et suivants.

Il peut renoncer à cette faculté à partir de l'âge de seize ans dans les mêmes conditions.

Art. 23 - Toute personne majeure de nationalité française, résidant habituellement à l'étranger, qui acquiert volontairement une nationalité étrangère ne perd la nationalité française que si elle le déclare expressément, dans les conditions prévues aux articles 26 et suivants du présent titre.

Art. 23-1 - La déclaration en vue de perdre la nationalité française peut être souscrite à partir du dépôt de la demande d'acquisition de la nationalité étrangère et, au plus tard, dans le délai d'un an à compter de la date de cette acquisition.

Art. 26 - Les déclarations de nationalité sont reçues, sous réserve des dispositions de l'article 21-9, par le juge d'instance ou par les consuls suivant les formes déterminées par décret en Conseil d'Etat.

Il en est délivré récépissé après remise des pièces nécessaires à la preuve de leur recevabilité.

Art. 26-1 - Toute déclaration de nationalité doit, à peine de nullité, être enregistrée soit par le juge d'instance, pour les déclarations souscrites en France, soit par le ministre de la justice, pour les déclarations souscrites à l'étranger.

Art. 26-2 - Le siège et le ressort des tribunaux d'instance compétents pour recevoir et enregistrer les déclarations de nationalité française sont fixés par décret.

Art. 26-3 - Le ministre ou le juge refuse d'enregistrer les déclarations qui ne satisfont pas aux conditions légales.

Sa décision motivée est notifiée au déclarant qui peut la contester devant le tribunal de grande instance durant un délai de six mois. L'action peut être exercée personnellement par le mineur dès l'âge de seize ans.

La décision de refus d'enregistrement doit intervenir six mois au plus après la date à laquelle a été délivré au déclarant le récépissé constatant la remise de toutes les pièces nécessaires à la preuve de recevabilité de la déclaration.

Le délai est également de six mois pour les manifestations de volonté exprimées en application de l'article 21-7. Il est porté à un an pour les déclarations souscrites en vertu de l'article 21-2.

Art. 26-4 - A défaut de refus d'enregistrement dans les délais légaux, copie de la déclaration, ou de la pièce consignant la manifestation de volonté prévue à l'article 21-9, est remise au déclarant revêtue de la mention de l'enregistrement.

L'enregistrement peut encore être contesté par le ministère public en cas de mensonge ou de fraude dans le délai de deux ans à compter de leur découverte. La cessation de la communauté de vie entre les époux dans les douze mois suivant l'enregistrement de la déclaration prévue à l'article 21-2 constitue une présomption de fraude.

Art. 26-5 - Sous réserve des dispositions du deuxième alinéa (1°) de l'article 23-9, les déclarations de nationalité, dès lors qu'elles ont été enregistrées, prennent effet à la date à laquelle elles ont été souscrites.

Les manifestations de volonté prennent effet dans les conditions fixées à l'article 21-9.

LOI N°78-753 DU 17 JUILLET 1978 PORTANT DIVERSES MESURES D'AMÉLIORATION DES RELATIONS ENTRE L'ADMINISTRATION ET LE PUBLIC ET DIVERSES DISPOSITIONS D'ORDRE ADMINISTRATIF, SOCIAL ET FISCAL.

Art. 2 - Sous réserve des dispositions de l'article 6 les documents administratifs sont de plein droit communicables aux personnes qui en font la demande, qu'ils émanent des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics ou des organismes, fussent-ils de droit privé, chargés de la gestion d'un service public.

ANNEXE I :

COMPTE-RENDU DE L'AUDITION DE M. PATRICK WEIL LE MERCREDI 26 NOVEMBRE 1997

##Mercredi 26 novembre 1997## - Présidence de M. Jacques Larché, président . La commission a procédé à l'audition de M. Patrick Weil , responsable de la mission d'étude des législations de la nationalité et de l'immigration .

M. Patrick Weil a tout d'abord présenté le premier des deux rapports remis au Premier ministre au nom de la mission, relatif à la législation de la nationalité.

En préambule, il a précisé que ce rapport ne portait que sur un aspect du droit de la nationalité, à savoir les " conditions d'application du principe du droit du sol pour l'attribution de la nationalité française ".

Retraçant ensuite l'évolution historique du droit de la nationalité français et la manière dont y était pris en compte le droit du sol, M. Patrick Weil a rappelé que si ce droit était à la base de l'attribution de la nationalité sous la monarchie et l'époque révolutionnaire, le code civil de 1804 avait marqué une rupture en faisant du " jus sanguinis " le mode d'attribution principal de la nationalité française.

Il a cependant indiqué qu'au XIXè siècle, le droit du sol était redevenu un principe républicain, avec dans un premier temps, en 1851, l'institution de la règle du double droit du sol, conférant la nationalité française aux enfants nés en France d'un parent étranger lui-même né en France et dans un deuxième temps, en 1889, l'adoption du principe de l'acquisition de la nationalité française à leur majorité par les enfants nés en France de parents étrangers et y résidant, sous réserve de la faculté de décliner la qualité de Français au cours de l'année suivant la majorité. Il a, à cet égard, considéré que les débats parlementaires de l'époque faisaient apparaître la volonté de faire Français par le droit des enfants considérés comme Français dans les faits afin notamment qu'ils ne tirent plus de cette situation le " privilège " d'échapper au service militaire.

Après avoir noté que la loi de 1927 avait ensuite élargi les conditions d'attribution de la nationalité française pour des raisons démographiques, M. Patrick Weil a précisé qu'en 1945, le principe institué en 1889 avait été maintenu mais que la faculté de renonciation à la nationalité française avait été modifiée, celle-ci étant désormais ouverte au cours d'une période précédant la majorité et non plus au cours de l'année la suivant.

Il a enfin constaté que la réforme de 1973 s'était limitée à tirer les conséquences du principe de l'égalité entre l'homme et la femme, et entre l'enfant naturel et l'enfant légitime, tout en rendant l'attribution de la nationalité française plus aisée pour les descendants de personnes nées dans les anciennes possessions françaises.

Puis, M. Patrick Weil a déclaré que le législateur de 1993 avait été animé, d'une part, par le souci de tenir compte des incidences du droit de la nationalité sur la législation sur l'entrée et le séjour des étrangers en France -d'où une restriction de l'acquisition de la nationalité française par le mariage et des conditions d'application de la règle du double droit du sol en faveur des personnes originaires des anciennes colonies- et, d'autre part, par la volonté d'améliorer l'intégration des jeunes d'origine étrangère qui devenaient parfois Français sans le savoir. Il a précisé que cette dernière préoccupation avait conduit à exiger des jeunes nés en France de parents étrangers une démarche volontaire entre 16 et 21 ans pour l'acquisition de la nationalité française, suivant les recommandations de la commission de la nationalité présidée par M. Marceau Long.

M. Patrick Weil a estimé que différentes études réalisées sur l'application de cette dernière loi, notamment dans la région Alsace, montraient que ses résultats ne correspondaient pas à la volonté du législateur, des inégalités géographiques apparaissant dans l'accès à la nationalité en particulier en ce qui concernait l'interprétation par les juges des conditions de résidence en France.

Afin de remédier à cette situation, il a proposé de rétablir un système universel d'accès à la nationalité française à la majorité en faveur des jeunes nés en France de parents étrangers et y résidant, sous réserve d'une possibilité d'acquisition volontaire de la nationalité entre 16 et 18 ans, ou de refus de cette nationalité au cours de l'année suivant la majorité.

En conclusion, M. Patrick Weil a déclaré qu'avec ce système, nul ne serait devenu Français sans le vouloir ou sans le savoir, mais que nul ne resterait non plus étranger sans le savoir ou sans le vouloir.

Constatant qu'il était trop tôt pour dresser un bilan complet de l'application de la loi de 1993, M. Jean-Jacques Hyest s'est interrogé sur l'opportunité de modifier une législation dont on ne connaissait pas encore exactement les effets. Il a en outre rappelé que la commission présidée par M. Marceau Long avait considéré qu'une manifestation de volonté était plus favorable à l'intégration qu'une acquisition automatique de la nationalité.

Constatant par ailleurs qu'en tout état de cause, les jeunes seraient amenés à un moment ou à un autre à effectuer une démarche pour obtenir la preuve de leur nationalité française, il s'est finalement demandé si une amélioration des conditions d'application de la législation actuelle ne serait pas la meilleure solution.

M. Jacques Larché, président, a souhaité obtenir des statistiques sur le nombre d'étrangers susceptibles d'acquérir la nationalité française par une manifestation de volonté, le nombre de demandes et le nombre de refus.

En réponse, M. Patrick Weil a reconnu qu'il n'existait pas de statistiques précises permettant d'évaluer avec exactitude le nombre de jeunes potentiellement concernés et le nombre de jeunes s'étant abstenus de toute démarche.

Rappelant que les modifications de la législation relative à la nationalité avaient toujours été étroitement liées à l'évolution des motivations de l'Etat, M. Patrice Gélard s'est interrogé sur la motivation actuelle qui pourrait conduire à favoriser le droit du sol.

Il a par ailleurs souhaité obtenir des informations sur les législations relatives à la nationalité en vigueur dans les autres pays européens.

Enfin, il a posé le problème de la situation des doubles nationaux, en particulier des jeunes originaires d'Afrique du Nord, qui risquaient de se voir imposer leur service militaire dans leur pays d'origine nonobstant la suppression du service national en France.

Après avoir cité les propos tenus par M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur, à propos de la nation française, communauté de citoyens, M. Paul Masson a demandé à M. Patrick Weil si, pour lui, le principal acte d'intégration ne résidait pas dans la demande d'acquisition de la nationalité du pays dans lequel l'intéressé souhaitait s'intégrer.

M. Charles Jolibois a fait observer que selon M. Patrick Weil, la principale justification d'un changement de la législation tiendrait à l'insuffisance de l'information dispensée aux jeunes.

Considérant qu'il existait un lien logique entre le droit du sol et la plus ou moins grande facilité de l'accès des étrangers au territoire national, il s'est interrogé sur l'importance des flux d'immigration qui pouvaient exister lors de l'adoption de la loi de 1889, soulignant qu'aujourd'hui, les flux étaient massifs et pratiquement incontrôlables.

M. Michel Dreyfus-Schmidt a évoqué certaines difficultés insolubles posées par la législation actuelle, par exemple le cas d'un incapable majeur qui ne pouvait procéder lui-même à une manifestation de volonté, la jurisprudence refusant que l'intéressé puisse dans cette éventualité être représenté pour cette démarche.

M. Robert Badinter a questionné M. Patrick Weil sur l'évolution du nombre des manifestations de volonté.

Après avoir indiqué qu'avaient acquis la nationalité français par manifestation de volonté 15.512 jeunes nés en 1976, 21.104 nés en 1977, 23.048 nés en 1978, 20.453 nés en 1979 et 13.508 en 1980, M. Patrick Weil a considéré que ces variations étaient difficiles à interpréter.

Soulignant que l'étude effectuée dans la région Alsace avait fait apparaître un taux de manifestation de volonté allant de 42 % à Strasbourg à 68 % à Mulhouse, il a déploré que les conditions d'acquisition de la nationalité française puissent ainsi varier d'une localité à l'autre et en particulier dépendre de la plus ou moins bonne qualité de l'information assurée par le Gouvernement.

M. Patrice Gélard s'est interrogé sur le point de savoir si les inégalités constatées dans le taux de manifestation de volonté ne s'expliquaient pas par des différences dans la volonté d'intégration.

M. Patrick Weil a souligné la difficulté d'assurer une information satisfaisante des jeunes dans la mesure où les enseignants ne souhaitaient pas toujours remplir cette mission. Admettant que la nationalité était effectivement attribuée par l'Etat en fonction de ses intérêts, il a estimé qu'à cet égard la logique suivant laquelle devait être attribuée la nationalité française n'était pas fondamentalement différente aujourd'hui de ce qu'elle était en 1889.

M. Paul Masson a de nouveau souligné que la volonté d'intégration devait être manifestée par des actes, dont le principal était la demande d'acquisition de la nationalité.

M. Patrick Weil a alors précisé que suivant ses propositions de réforme, une démarche resterait nécessaire pour obtenir un certificat de nationalité ou des papiers d'identité français et qu'en outre l'intéressé conserverait une possibilité de refus.

Par ailleurs, il a souligné que le droit du sol strict n'avait jamais fait partie de la tradition républicaine qui avait toujours subordonné son application à des conditions de résidence.

Après avoir fait part de ses réserves vis-à-vis de certains amendements de la commission des lois de l'Assemblée nationale, notamment le rétablissement de l'application du double droit du sol en faveur des descendants de personnes nées dans les anciennes colonies, M. Patrick Weil a enfin formulé quelques suggestions en vue d'un rapprochement du droit français de la nationalité avec les autres législations européennes. Il a ainsi constaté que le caractère indissoluble du mariage s'étant affaibli, l'attribution automatique de la nationalité par le mariage était de moins en moins fréquente dans les pays européens. Il a en outre proposé que la France s'inspire de la législation allemande qui, depuis 1990, ouvrait l'accès à la nationalité allemande, par une procédure de naturalisation simplifiée, aux enfants nés à l'étranger ayant accompli huit années de scolarité en Allemagne.

ANNEXE II

COMPTE-RENDU DES AUDITIONS PUBLIQUES
DU MERCREDI 3 DÉCEMBRE 1997

##Mercredi 3 décembre 1997## - ** Présidence de M. Jacques Larché, président . La commission a procédé à des auditions publiques sur le projet de loi n° 145 (1997-1998), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à la nationalité.

La commission a tout d'abord entendu M. Paul Lagarde, professeur de droit à l'Université de Paris I.

Replaçant le droit du sol dans son cadre historique, M. Paul Lagarde a rappelé qu'il avait été la règle sous l'ancien régime jusqu'à ce que le Code Napoléon, contre l'avis de Bonaparte lui-même, donne une priorité au droit du sang en n'accordant la nationalité française aux étrangers nés en France que sur leur déclaration à leur majorité et sous condition de résidence en France. Il a indiqué que, dans un premier temps, le droit du sol avait concerné de nombreuses familles déjà assimilées et permis d'inclure les intéressés dans le tirage au sort pour le service militaire, mais que, dans un second temps, avec la crise démographique, l'octroi de la nationalité française était devenu le point de départ de l'assimilation des étrangers.

Il a précisé que la naissance en France pouvait avoir trois conséquences sur le droit de la nationalité :

- depuis 1851, le droit du sol double, c'est-à-dire la naissance en France de parents nés en France procurait une nationalité française d'origine ;

- la simple naissance en France ne conférait la nationalité française que dans le cas où il était nécessaire d'éviter l'apatridie, cette disposition n'étant pas remise en cause par le projet en discussion ;

- la simple naissance en France de parents étrangers avait en revanche produit des effets variables suivant les législations.

Sur ce dernier point, il a rappelé que sous l'empire de la loi du 26 juin 1889 et de l'article 44 du code de la nationalité de 1945, la nationalité française était accordée de plein droit à la majorité sans demande particulière mais sous condition de résidence. Il a souligné qu'il était alors possible d'anticiper l'acquisition de la nationalité française par réclamation effectuée par les parents, sur qui était reportée la condition de résidence.

Il a indiqué que la loi du 22 juillet 1993 -conforme en grande part aux conclusions de la commission de la nationalité présidée par M. Marceau-Long- avait supprimé l'acquisition de plein droit de la nationalité française à la majorité, en conditionnant l'acquisition de cette nationalité à une manifestation de volonté entre seize et vingt-et-un ans, tandis qu'elle avait supprimé la possibilité de réclamation de cette nationalité par les parents pour leur enfant mineur.

M. Paul Lagarde a souligné que le texte du projet de loi initial tendait à rétablir l'acquisition de plein droit de la nationalité française à la majorité, mais pas la possibilité de réclamation par les parents.

Il a en effet précisé que l'article premier (article 21-7 du code civil) revenait au principe contenu dans l'article 44 de l'ancien code de la nationalité, prévoyant l'acquisition automatique de la nationalité française à la majorité.

Il a rappelé que l'institution de l'obligation d'une manifestation de volonté en 1993 répondait à une conception élective de la nationalité selon laquelle la Nation n'existait que par le consentement de ceux qui la composent.

Il a cependant souligné que cette conception élective était à sens unique puisqu'aucun consentement n'était exigé pour l'acquisition de la nationalité française par les enfants nés à l'étranger d'un parent français.

Aussi a-t-il considéré que la loi de 1993 avait rompu avec une tradition concrète de " nationalité de proximité " reposant sur les liens objectifs de l'étranger avec la France, tels la filiation, la naissance, la résidence ou le mariage.

Il a considéré que les critiques des opposants à une nouvelle réforme -pour être Français, il faut le vouloir et il ne faut pas qu'il y ait de Français sans le savoir- tournaient autour des principes de la volonté et de l'information.

S'agissant de l'information, il a rappelé qu'avant 1993, 5 à 6 % des jeunes usaient de la possibilité de renoncer à la nationalité française. Il a indiqué que, depuis l'entrée en vigueur de la loi de 1993, certains travaux, notamment ceux du professeur Fulchiron, révélaient que 10 à 15 % des étrangers n'auraient pas été en mesure de manifester leur volonté par manque d'information, des disparités très grandes apparaissant entre les différentes régions et entre les villes et campagnes. Il en a déduit que l'application de la loi de 1993 avait pêché par défaut d'information, un décret du 16 août 1994 ayant amorcé un effort réel mais qui n'avait pas été soutenu.

M. Paul Lagarde a tout particulièrement insisté sur la nécessité d'une information individualisée, à laquelle l'administration semblait réticente, estimant que si cette obligation était inscrite dans les textes, aucun étranger ne pourrait devenir français sans le savoir, ce qui suffirait à dépassionner le débat. Il a remarqué que, sur ce point, le projet de loi n'améliorerait guère la situation.

M. Jacques Larché, président, a pleinement souscrit au principe de la nécessité d'une information à la fois meilleure et plus personnalisée.

M. Paul Lagarde a suggéré que l'on s'inspire des dispositions du décret du 28 novembre 1997 prévoyant l'usage des fichiers de l'INSEE et de la sécurité sociale pour l'application de la loi du 10 novembre 1997 sur l'inscription d'office des jeunes de dix-huit ans sur les listes électorales. Il a en effet considéré que rien ne s'opposerait à l'usage de ces fichiers pour prévenir individuellement les enfants étrangers concernés. Aussi a-t-il proposé d'amender en ce sens le deuxième alinéa de l'article 21-7 du code civil, en précisant qu'un décret en Conseil d'Etat fixerait les conditions dans lesquelles les personnes concernées seraient individuellement informées des dispositions en vigueur en matière de nationalité.

A propos de l'article 5 du projet de loi (anticipation volontaire de l'acquisition de la nationalité française), M. Paul Lagarde a considéré que l'anticipation à seize ans, à la demande du jeune lui-même, sans assistance obligatoire de son représentant légal, n'aurait pas grand effet pratique, compte tenu des délais administratifs prévisibles. Il a regretté que le projet ne revienne pas au principe contenu dans l'article 54 de l'ancien code de la nationalité, attribuant aux parents répondant à une condition de résidence en France la possibilité de réclamer la nationalité pour leur enfant mineur dès son plus jeune âge. Il a considéré qu'après la suppression totale de cette possibilité par la loi de 1993, le rétablissement par l'Assemblée nationale de cette procédure à partir de 13 ans n'était qu'une demi-mesure ne répondant pas à la préoccupation d'intégrer les enfants dès l'âge scolaire. Il a rappelé qu'avant l'entrée en vigueur de la loi de 1993, 150 000 déclarations étaient effectuées chaque année par les parents, soit 60 à 65 % d'une classe d'âge concernée, l'acquisition automatique de la nationalité à 18 ans présentant de ce fait le caractère d'une " acquisition-balai ".

Il a réfuté les deux motifs allégués pour le non-rétablissement par le projet du droit de réclamation des parents dès le plus jeune âge de l'enfant -la nécessité de respecter la volonté de l'enfant et les risques de fraude des parents qui demanderaient la nationalité française pour leurs enfants dans l'unique but de bénéficier pour eux-mêmes d'un titre de séjour- considérant, pour la première, qu'il suffirait d'accorder à l'enfant une faculté de répudiation à sa majorité et, pour la seconde, qu'il suffirait de réserver cette possibilité aux parents déjà possesseurs d'une carte de résident.

M. Paul Lagarde a ensuite fait part de quelques interrogations techniques sur plusieurs dispositions du texte adopté par l'Assemblée nationale :

- l'article 11 bis ne prévoyant pas de sanction au non-respect du délai maximum de réponse à une demande de naturalisation, il lui a semblé impossible d'admettre que le dépassement du délai entraîne de droit la naturalisation ;

- l'article 15 C sur la motivation des décisions négatives en matière de nationalité, faisant double emploi avec des dispositions de l'article 27 du code civil ;

- l'article 8 sur l' " effet collectif " de l'acquisition de la nationalité française, en cas de garde alternée de l'enfant à la suite d'un divorce, le difficile problème de la garde alternée ne lui paraissant pas devoir être traité au détour d'un texte sur la nationalité ;

- l'article 14-A relatif à la perte de la faculté de répudiation de la nationalité en cas d'engagement militaire, mal situé dans le projet de loi ;

- les effets juridiques incertains attachés au titre d'identité républicain institué par l'article 15 bis ;

- la suppression par l'article 14 ter d'une discrimination entre les Français d'origine et les Français par acquisition concernant la réintégration par déclaration.

Il a estimé souhaitable que soit également supprimée la discrimination entre Français d'origine et Français d'acquisition, quant à la déchéance de nationalité susceptible de toucher les seuls Français par acquisition.

M. Jacques Larché, président, a relevé dans l'exposé de M. Paul Lagarde que les critiques adressées à la loi de 1993 résultaient pour l'essentiel de dysfonctionnements administratifs dans son application et considéré que s'il convenait d'y remédier, il n'était pas nécessaire de légiférer pour cela.

En réponse à une question de M. Guy Allouche , M. Paul Lagarde a considéré que la loi de 1993 n'avait pas facilité l'intégration des étrangers et avait généré une catégorie de jeunes restés étrangers sans le savoir en raison du défaut d'information qu'il avait déjà signalé. Il a indiqué qu'à la limite, si le chiffre avancé lors des débats à l'Assemblée nationale de 95 % de jeunes ayant manifesté leur volonté était exact, on pouvait s'interroger sur la nécessité de maintenir cette formalité.

En réponse à une question de M. Patrice Gélard quant à la compatibilité du projet de loi avec la réglementation européenne, et quant à ses effets sur la double nationalité, M. Paul Lagarde a indiqué que le droit de la nationalité ne relevait pas du droit communautaire. Il a par ailleurs considéré que le problème de la double nationalité relevait de la législation propre de chaque Etat ou de conventions.

En réponse à M. Robert Badinter qui se demandait si un référendum sur cette question pourrait être proposé aux Français sur la base de l'article 11 de la Constitution, M. Paul Lagarde a estimé qu'à son avis, la nationalité ne faisait pas partie des matières énumérées par cet article.

Mme Monique Cerisier-Ben Guiga, en sa qualité de sénateur représentant les Français établis hors de France, a considéré qu'il n'était pas souhaitable de supprimer l'acquisition par filiation de la nationalité française pour les enfants nés à l'étranger dans la mesure où, après un délai de cinquante ans, la clause de désuétude permettait de déchoir de la nationalité des personnes qui n'auraient gardé aucun lien avec la France. Elle a néanmoins admis que cette clause jouait très rarement, sans doute en raison de la distension rapide des liens avec la France des enfants élevés à l'étranger.

**La commission a ensuite entendu M. Marceau Long, ancien président de la Commission de la nationalité et ancien président du Haut conseil à l'intégration, qui a tout d'abord rappelé que la commission de la nationalité, installée par le Premier ministre et le garde des sceaux en juin 1987, avait formulé soixante propositions dont la plus importante prévoyait la manifestation de volonté des personnes dont les liens de rattachement à la nation n'avaient pas la force de l'évidence.

Il a insisté sur le souci de transparence qui avait animé les travaux de la commission, lesquels avaient donné lieu à vingt heures de retransmission télévisée et à l'audition publique d'une centaine de personnes appartenant à toutes les sensibilités politiques, sociales et religieuses.

Il a également mis en avant la diversité et le pluralisme de cette commission, composée notamment d'historiens, de sociologues, de philosophes, de médecins et de juristes.

Il a précisé qu'elle avait pour mission de faire connaître son sentiment, non seulement sur la manifestation de la volonté d'acquérir la nationalité française, considérée par le garde des sceaux de l'époque, M. Albin Chalandon, comme le coeur de la réforme envisagée, mais également sur d'autres thèmes relatifs au même sujet.

M. Marceau Long a fait observer qu'après avoir étudié l'évolution des lois de nationalité dans plusieurs pays d'Europe, la commission avait constaté que ces pays avaient su adapter leur législation à l'évolution de leur place dans le monde. Il en a conclu qu'il n'y avait aucune raison pour que la France considère la sienne comme immuable et refuse de s'interroger sur son adaptation au monde d'aujourd'hui.

Il a rappelé que la France avait toujours accueilli sur son sol une importante population étrangère qu'elle s'était efforcée d'intégrer dans les meilleures conditions.

Il a toutefois estimé que notre pays était confronté à une situation différente de celle de l'immédiat après-guerre et que si l'intégration restait la philosophie de notre droit, c'était dans des conditions nouvelles liées notamment au changement des flux migratoires ou au regard différent porté par la France sur le monde.

Il a ensuite présenté les trois principes retenus par la commission, selon lesquels :

- la politique de la nationalité devait jouer un rôle capital dans le processus d'intégration, même si l'acquisition de la nationalité n'était pas à elle seule une garantie d'intégration ;

- le code de la nationalité, dans la mesure où il serait sinon l'aboutissement de l'intégration du moins une clé de celle-ci, devait poser des règles d'accès cohérentes avec la culture française et les aspirations de nos concitoyens ;

- puisque l'intégration à la Nation impliquait une adhésion claire aux principes et aux règles de vie de la société française, une manifestation volontaire de cette adhésion pouvait être retenue.

M. Marceau Long a ensuite détaillé les critères sur lesquels s'était fondée la commission pour établir ses propositions.

Il a ainsi estimé que la querelle entre droit du sang et droit du sol avait paru sans fondement à la commission, pour laquelle le lien de filiation et le lieu de naissance ne représentaient que des présomptions d'acculturation.

Il a considéré que la filiation avait sa justification non en tant que telle mais en raison de l'éducation parentale donnée au jeune, alors que la naissance en France n'avait pas de sens sans une longue résidence dans ce pays.

Aussi a-t-il estimé que droit du sang et droit du sol étaient complémentaires.

Il a ajouté que la manifestation de la volonté individuelle pouvait également constituer un signe d'intégration et donc une condition de l'acquisition de la nationalité française.

Il a précisé que, dans cet esprit, la commission avait préconisé qu'un certain nombre d'actes significatifs ou de démarches simples tiennent lieu de déclaration positive, par exemple la participation volontaire aux opérations de recensement en vue du service national, la demande d'une carte nationale d'identité ou celle d'un certificat de nationalité.

Il a insisté sur le fait que, pour constituer une présomption claire d'intégration, la manifestation de la volonté devait émaner de l'individu lui-même, ce qui excluait la volonté formulée par ses parents lorsque ceux-ci n'avaient pas eux-mêmes souhaité acquérir la nationalité française.

M. Marceau Long a souligné que la loi de 1993 reprenait dans une large mesure les propositions de la commission, à deux différences près :

- l'une relative au délai pour souscrire la déclaration d'acquisition de la nationalité par le mariage, porté à deux ans après le mariage alors que la commission avait préconisé une année ;

- l'autre relative à l'application de la règle du double droit au sol aux enfants nés en France de parents algériens, un amendement ayant, alors que la commission avait préconisé le statu quo, introduit une condition de cinq années de résidence en France du parent algérien pour que l'enfant obtienne à la naissance la nationalité française.

Il a regretté la confusion dans le débat parlementaire entre le projet de loi sur la nationalité, défendu par le garde des sceaux M. Pierre Méhaignerie, et le projet de loi sur les conditions d'accès et de séjour des étrangers en France, présenté par le ministre de l'intérieur M. Charles Pasqua.

M. Jacques Larché, président , a estimé que les différents gouvernements avaient une responsabilité dans cette confusion dans la mesure où ils présentaient concomitamment des réformes législatives sur ces deux sujets.

Estimant que la loi sur la nationalité ne devait pas être modifiée à chaque alternance, M. Marceau Long s'est interrogé sur les raisons de fond qui pourraient conduire à revenir sur la loi de 1993.

A cet égard, il a récusé l'argument d'un soi-disant retour au droit du sol, précisant que la commission de la nationalité n'avait en aucune manière proposé d'abandonner ce critère. Il a ajouté que, dans son rapport au premier ministre, M. Patrick Weil avait reconnu que ce critère n'avait pas été mis en cause par la loi de 1993, l'enfant né en France de parents étrangers ayant toujours le droit de devenir français.

Il s'est également inscrit en faux contre l'affirmation selon laquelle la démarche volontaire serait contraire à la tradition républicaine, soulignant que l'automaticité de l'accession ne constituait pas un principe fondamental reconnu par les lois de la République, le Conseil constitutionnel ayant d'ailleurs rejeté le recours formé contre la loi de 1993.

Il a rappelé que la législation révolutionnaire, issue notamment de lois de 1790 et 1791, exigeait la prestation d'un serment civique pour devenir français.

M. Marceau Long a ensuite fait observer que la législation de 1993 fonctionnait mieux que ce que l'on avait pu craindre à propos d'une démarche nouvelle demandée chaque année à plus de 25.000 jeunes sur l'ensemble du territoire. Il a rappelé dans cette optique les résultats statistiques, d'autant plus satisfaisants que le délai de cinq années donné pour la manifestation de volonté n'était pas expiré au moment de la réalisation de ces études.

Il a ainsi indiqué que 32.000 demandes avaient été présentées en 1995 ainsi qu'en 1996 et que les jeunes se manifestaient en général assez vite, sans attendre la fin du délai, ce qu'ils n'auraient point manqué de faire si la démarche leur avait répugné. Il a indiqué que la manifestation de volonté avait donné lieu à 33.255 acquisitions de nationalité en 1994, à 30.526 en 1995 et à 29.845 en 1996. Il a également fait valoir que les jeunes nés en 1977 et 1978 avaient à plus de 90 % manifesté leur volonté de devenir français, les taux de refus d'enregistrement de la manifestation de volonté se situant dans une fourchette de 1,90 % à 2,60 % et tenant le plus souvent au manque de preuve de la résidence en France mais aussi, pour 30 % de ces refus, au fait que le demandeur était déjà français sans le savoir. Il a précisé que plus de la moitié des demandes étaient adressées aux tribunaux, 40 % à la mairie et seulement 10 % dans les gendarmeries ou dans les préfectures. Il a indiqué que le délai de réponse moyen avait été de 46 jours en 1996.

M. Marceau Long a ensuite relaté les conclusions d'une enquête régionale réalisée par l'observatoire régional de l'intégration et de la ville d'Alsace, laquelle avait permis de mettre en avant certaines difficultés pratiques, notamment la faiblesse de l'information, l'inertie administrative, le manque de formation des acteurs locaux ou l'insuffisance de l'effort des établissements scolaires. Il a également fait observer que l'administration avait tendance à exiger des pièces justificatives non mentionnées dans les textes, soulignant " le génie de l'administration à compliquer ce qui est simple ".

Il a toutefois jugé possible de remédier à ces défaillances sans remettre en cause les principes législatifs, par exemple grâce à des instructions précises des ministères intéressés ou à une meilleure information des élèves dans les établissements scolaires.

Il a également estimé souhaitable, pour corriger des dysfonctionnements tenant aux difficultés de prouver l'établissement en France, de faire droit à une proposition du professeur Fulchiron consistant à donner aux certificats de scolarité entre onze et seize ans la valeur de preuve de la résidence en France.

M. Marceau Long a par ailleurs mis en avant le problème particulier de l'accord militaire franco-algérien de 1983, lequel permettait aux personnes ayant la double nationalité d'opter pour le service militaire en Algérie, ce que choisissaient 10 à 20 % d'entre eux. Il a cependant considéré que la situation actuelle en Algérie et la suppression du service militaire en France atténuaient considérablement ce problème.

Il a enfin insisté sur le souci des enfants nés de parents étrangers de ne pas devoir choisir entre la culture française et leur culture d'origine, faisant cependant observer que l'intégration, qui n'était pas l'assimilation, respectait leurs racines.

M. Robert Badinter a souhaité savoir si, selon M. Marceau Long, l'article 11 de la Constitution permettait de recourir au référendum sur le sujet de la nationalité.

M. Marceau Long lui a répondu par la négative, le champ du référendum ne lui paraissant pas recouvrir l'ensemble des lois fondamentales.

M. Patrice Gélard a noté qu'il s'agissait d'une des questions les plus difficiles sur l'interprétation de la Constitution, soulignant que les juristes étaient loin d'être d'accord sur la portée de l'article 11. Il a ajouté que pour certains d'entre eux, le champ du référendum n'était aucunement limité dans la mesure où la Constitution ne prévoyait aucune sanction.

M. Luc Dejoie a estimé qu'il ne fallait pas avoir peur du choix effectué par le peuple.

M. Philippe de Bourgoing a estimé que les problèmes d'information pourraient trouver une réponse dans un lien entre l'inscription automatique des jeunes sur les listes électorales et la manifestation de la volonté d'acquérir la nationalité française, les services compétents pouvant interroger, au moment de l'inscription, le jeune né de parents étrangers sur sa volonté de devenir français.

M. Christian Bonnet a souhaité connaître le sentiment de M. Marceau Long sur un amendement voté par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission des lois selon lequel les parents d'un enfant âgé de 13 ans pourraient demander pour celui-ci, et avec son consentement, la nationalité française.

M. Marceau Long a fait part de ses réserves sur cet amendement au motif notamment que l'âge retenu lui paraissait trop bas. Il a fait observer qu'à 13 ans, les jeunes, et notamment les filles, étaient particulièrement sensibles à d'éventuelles pressions des parents.

**La commission a ensuite entendu M. Jean Kahn , président de la commission nationale consultative des droits de l'homme, accompagné de MM. Jacques Ribs et Laurent Giovannoni , membres de cette commission.

M. Jean Kahn , après avoir décrit la composition pluraliste de cette commission, a rendu compte de l'esprit dans lequel elle avait adopté son avis du 1er octobre 1997. Il s'est référé à l'image de la France, prônant l'intégration de ceux qui choisissent d'y vivre, et a marqué la préférence de la commission pour le droit du sol. Il a regretté que le débat sur la nationalité devienne un enjeu politique et a souhaité qu'il ne soit pas utilisé comme argument électoral.

Il a indiqué que pour la commission, l'action de l'Etat devait être guidée par les principes de l'Etat de droit et par le respect de l'éminente et égale dignité de tous les êtres humains quels qu'ils soient.

M. Jacques Ribs a mis l'accent sur la nécessité de réaliser l'intégration heureuse des étrangers qui, pour certains, pouvaient avoir vocation à acquérir la nationalité française. Il a souligné la volonté de la commission de rechercher les meilleures solutions concrètes pour réaliser cet objectif.

Sur le droit du sol, il a précisé que la sous-commission qu'il animait avait jugé satisfaisantes les dispositions proposées par le projet de loi initial mais que l'assemblée plénière de la commission consultative s'était prononcée pour le droit du sol intégral sous réserve de conditions de résidence, en raison des difficultés pratiques et des incertitudes générées par la législation actuelle qui ne seraient que partiellement réglées par le projet de loi.

Il s'est prononcé en tout état de cause pour le retour à la situation antérieure à 1993 qui permettait aux parents intégrés dans la société française de demander la nationalité pour leurs enfants nés en France. Il a considéré que cette disposition avait dans le passé permis l'intégration de générations d'étrangers, notamment originaires d'Europe centrale. Il a estimé infondées les critiques admises à son encontre, considérant que l'exigence d'une résidence antérieure prolongée excluait les risques de fraude. Il s'est inquiété en revanche des choix que pourraient opérer les parents parmi leurs enfants.

Par ailleurs, il a proposé la suppression de toute restriction à l'acquisition de la nationalité française par les enfants de parents naturalisés (article 8 du projet de loi).

S'agissant des dispositions transitoires, il s'est prononcé contre la mesure d'exclusion prévue à l'encontre des étrangers condamnés à six mois d'emprisonnement et qui ne jouerait que pour des jeunes n'ayant pu accéder à la nationalité dans le cadre de la loi de 1993 (article 17 du projet de loi).

Il a jugé qu'en l'absence de statistiques sur les mariages blancs, imposer un délai pour l'acquisition de la nationalité par mariage était contraire à la dignité humaine et discriminatoire à l'égard des couples dont l'un des conjoints est étranger.

Faisant état des difficultés administratives constatées par les organisations non gouvernementales membres de la commission consultative, il a demandé l'encadrement dans un délai légal de la procédure de naturalisation.

M. Laurent Giovannoni, président de la CIMADE , a confirmé qu'au-delà du débat théorique, des difficultés pratiques étaient rencontrées par les jeunes nés et scolarisés depuis toujours en France qui, se sentant Français, percevaient la démarche volontaire imposée par la loi de 1993 comme une marque de suspicion de la France à leur égard. Il a également souhaité voir simplifier et encadrer par un délai légal la procédure de naturalisation.

M. Christian Bonnet s'est interrogé sur les risques d'abus pouvant résulter d'une part de la suppression de la condition de résidence pour l'acquisition de la nationalité française par les enfants dont l'un des parents acquiert cette nationalité, d'autre part, de l'absence de délai préalable à l'acquisition de la nationalité par mariage.

M. Daniel Hoeffel, évoquant l'obligation trop souvent faite aux alsaciens-mosellans nés avant 1918 de fournir des certificats de réintégration dans la nationalité française, a estimé qu'une pareille formalité était davantage une aberration administrative qu'une marque de suspicion.

M. Jacques Larché, président, s'est déclaré convaincu qu'en votant la loi de 1993, les parlementaires n'avaient eu ni le sentiment ni l'intention de porter atteinte à la dignité humaine en demandant aux jeunes d'exprimer leur volonté d'acquérir la nationalité française.

M. Jean Kahn a précisé que pour la commission consultative, la réalisation de l'objectif de totale intégration, par opposition au modèle du communautarisme, impliquait de ne pas instaurer une discrimination jusqu'à l'âge de dix-huit ans.

M. Laurent Giovannoni , en réponse à M. Daniel Hoeffel , a estimé que ce n'était pas tant la mesure elle-même que son contexte qui pouvait faire ressentir une réaction de rejet d'une partie de la population.

M. François Blaizot s'est élevé contre l'idée que ce dispositif puisse être considéré comme discriminatoire car les jeunes issus de parents étrangers, dont ils avaient la nationalité par l'effet du droit du sang, se voyaient au contraire reconnaître la faculté de choisir en hommes libres la nationalité française, ce qui devait être un motif de fierté et non d'humiliation.

M. Jean Kahn a convenu que le mot " humiliation " ne rendait pas compte de la situation. Il a toutefois estimé que la multiplication des démarches instaurait un climat de discrimination.

M. Guy Allouche s'est préoccupé des risques de discrimination au sein d'une même famille, par exemple entre garçons et filles, si ceux-ci à l'âge de 13 ans devaient obtenir l'accord de leurs parents pour devenir français.

M. Jacques Ribs a considéré que cet écueil ne pourrait être évité que par l'acquisition automatique de la nationalité. Il a estimé que toutes les options pouvaient être présentées dans le cadre de ce débat majeur mais que si l'objectif était d'aider à l'intégration, il était préférable de réduire les obstacles plutôt que d'élever des restrictions et des réserves.

En réponse à M. Michel Dreyfus-Schmidt, M. Jean Kahn a rappelé que la situation particulière de l'Alsace-Moselle résultait de dispositions anciennes et ne concernait plus aujourd'hui que ses habitants les plus âgés.

M. Jacques Ribs a noté que les rapatriés rencontraient des difficultés comparables pour l'application des textes postérieurs à 1962.

**La commission a ensuite entendu M. Hugues Fulchiron, professeur de droit à l'Université de Lyon III .

M. Hugues Fulchiron a d'abord rappelé que l'une des innovations majeures ayant suscité de vives discussions lors de l'examen de la réforme du droit de la nationalité en 1993 avait été le changement des règles relatives à l'acquisition de la nationalité française par les jeunes étrangers nés et résidant en France et l'instauration d'une manifestation de volonté entre seize et vingt-et-un ans, modification à la fois juridique et symbolique.

Il a indiqué que le ministère de la justice avait confié au centre de droit de la famille de l'Université de Lyon III la mission d'étudier la mise en oeuvre de ces dispositions nouvelles sur quelques sites témoins correspondant aux ressorts des tribunaux d'instance de Lyon, de Villeurbanne, de Marseille, de Puteaux et de Clichy, l'échantillon retenu portant au total sur 1.303 dossiers ouverts en 1994 et 1995. Il a précisé que cette enquête sur pièces avait été complétée par plusieurs séries d'entretiens avec les acteurs concernés, juges d'instance, personnels de greffes, agents municipaux et préfectoraux, gendarmes, travailleurs sociaux, responsables associatifs et des enseignants. Il a ajouté que l'enquête avait permis de recueillir des informations concernant aussi bien la pratique de la manifestation de volonté que les refus d'enregistrement de la manifestation de volonté.

Il a indiqué que l'âge moyen des personnes ayant manifesté la volonté d'acquérir la nationalité française s'élevait en 1995 à un peu plus de dix-sept ans, l'étude révélant cependant une forte augmentation du nombre des jeunes de moins de dix-sept ans ayant effectué cette démarche en 1994 et 1995. Il a rappelé que cette démarche était strictement personnelle, le jeune n'ayant ni à solliciter une autorisation de ses parents ni à se faire représenter par eux, et qu'en pratique il se faisait rarement accompagner par eux, la démarche étant en revanche parfois effectuée en groupe.

Après avoir observé que certains jeunes, en particulier des jeunes filles, subissaient quelquefois des pressions hostiles de leur famille -ou tout au moins paraissaient les craindre-, il a indiqué que les autorités compétentes s'efforçaient en pareil cas de se procurer les pièces justificatives nécessaires sans que les parents en soient informés.

S'agissant des autorités chargées par la loi de 1993 de recueillir la manifestation de volonté, il a observé que si le jeune pouvait s'adresser indifféremment au juge d'instance, au préfet, au maire ou à un commandant de brigade de gendarmerie, la démarche était le plus souvent effectuée en pratique auprès du tribunal d'instance vers lequel les administrations renvoyaient volontiers le déclarant, attitude contraire à l'esprit de la loi et pouvant paraître paradoxale dans la mesure où la mairie constituait le lieu naturel d'expression de la citoyenneté de proximité. Il a cependant nuancé ce constat en précisant que les situations locales étaient variables et que dans certaines villes la pratique tendait à évoluer.

Rappelant que la loi de 1993 avait organisé une procédure en trois étapes, avec dans un premier temps la délivrance immédiate d'un justificatif dès la manifestation de volonté, suivie de l'octroi d'un récépissé par le juge d'instance lorsque l'ensemble des pièces étaient réunies et enfin la réalisation de l'enregistrement, il a observé que souvent, l'autorité chargée de recueillir la manifestation de volonté n'ouvrait le dossier que lorsque l'intéressé se trouvait en mesure de fournir toutes les pièces demandées, ce qui renforçait le caractère bureaucratique de la démarche, contrairement à la volonté exprimée par le législateur.

Soulignant que le juge d'instance ne disposait d'aucun pouvoir d'appréciation en opportunité pour refuser l'enregistrement dès lors que les conditions légales étaient satisfaites, il a indiqué que sur l'ensemble des sites étudiés seulement 95 refus avaient été prononcés, soit 2,5 % des dossiers examinés, ce qui correspondait à la moyenne nationale évaluée à 2,6 % en 1995. Il a cependant précisé qu'une analyse qualitative plus fine révélait des pratiques disparates, certaines mairies et certains greffes écartant d'emblée des dossiers manifestement irrecevables, d'autres se contentant de recueillir la manifestation de volonté sans vérifier si les conditions élémentaires telles que celles relatives à l'âge de l'intéressé ou à son lieu de naissance étaient satisfaites.

Il a distingué deux causes principales de refus d'enregistrement : d'une part, le fait que le demandeur possède déjà la nationalité française (16 dossiers de l'échantillon étudié), ce qui traduisait les hésitations de certains jeunes face à la complexité du droit applicable ; d'autre part, l'absence de résidence habituelle en France pendant les cinq années précédant la manifestation de volonté (59 dossiers). Concernant cette seconde cause de refus, il a constaté qu'un jeune ayant effectué un séjour -parfois prolongé- à l'étranger pendant la période de référence ne répondait pas, de ce seul fait, aux prescriptions légales. Il a estimé que, dans ce cas précis, la condition d'une résidence continue constituait un obstacle à l'acquisition de la nationalité française, difficilement justifiable dès lors que l'intéressé avait vécu en France et y avait été scolarisé. Il a également souligné les difficultés fréquemment éprouvées par les intéressés, en particulier ceux ayant quitté très tôt le système scolaire, pour apporter la preuve de leur résidence continue en France pendant la période de cinq ans précédant la manifestation de volonté.

Relevant que la loi de 1993 était néanmoins appliquée de façon globalement satisfaisante, il a observé que si l'enquête n'avait pas eu pour objet d'analyser la réaction des jeunes étrangers quant à l'exigence d'une manifestation de volonté pour accéder à la nationalité française, les témoignages recueillis auprès des autorités interrogées n'avaient révélé aucune hostilité particulière de leur part alors que des réactions de cette nature avaient été constatées chez certains Français nés à l'étranger tenus de fournir un certificat de nationalité à l'occasion du renouvellement de leurs papiers d'identité.

M. Hugues Fulchiron a ensuite présenté une série d'observations mettant les résultats de l'enquête en perspective avec les modifications proposées par le projet de loi.

Il a estimé que la disposition prévoyant le retour à l'acquisition automatique de la nationalité française ne devait pas faire illusion, les exigences liées à la preuve des conditions légales requises, en particulier la condition de résidence, subsistant. Il a cependant reconnu que les assouplissements proposés seraient de nature à atténuer ces difficultés.

Il a observé que la suppression, opérée par la loi de 1993, de la possibilité pour les parents des enfants nés et résidant en France d'effectuer la déclaration d'acquisition de la nationalité française au nom de leur enfant mineur, sur laquelle le projet de loi ne revenait pas, obligeait l'enfant étranger à attendre l'âge de seize ans pour devenir français.

Il a estimé que deux systèmes seulement répondaient à une véritable logique, les autres n'étant que des compromis marqués par la complexité : permettre aux parents d'obtenir la reconnaissance de la nationalité française de leur enfant dès sa naissance, ou bien exiger une manifestation de volonté de l'intéressé.

Constatant que les jeunes venant s'informer des conséquences d'une manifestation de volonté exprimaient souvent la crainte qu'elle n'entraîne la perte de leur nationalité d'origine, il a estimé nécessaire d'améliorer leur information en amont afin que leur choix soit totalement éclairé.

Répondant à M. Michel Dreyfus-Schmidt , M. Hugues Fulchiron a indiqué que l'article 17-3 du code civil avait été complété par la loi du 8 février 1995 pour prévoir la possibilité, pour le mineur dont le handicap empêche l'expression de la volonté, de se faire représenter.

M. Michel Dreyfus-Schmidt ayant estimé que le système de la manifestation de volonté empêchait certains jeunes d'accéder à la nationalité française par crainte de la réaction de leurs parents, M. Hugues Fulchiron a observé que la loi ménageait un délai suffisant pour leur permettre de surmonter leurs éventuelles craintes révérencielles, puisqu'il leur était possible d'effectuer cette démarche entre seize ans et vingt-et-un ans.

M. Michel Duffour a vu un paradoxe dans l'argument selon lequel la demande d'acquisition de la nationalité française effectuée par des parents étrangers pour leur enfant tendrait le plus souvent à leur faciliter l'obtention d'un titre de séjour, alors que les pressions familiales qui avaient pu être constatées s'exerçaient plutôt contre l'acquisition de cette nationalité. M. Hugues Fulchiron a fait valoir que ces réactions ou intentions restaient difficilement mesurables et qu'en tout état de cause ces considérations ne devaient pas peser de manière décisive dans le choix du système d'acquisition de la nationalité.

Il a ensuite indiqué à M. Patrice Gélard que l'enquête n'avait pas permis de déceler de disparité de comportement des autorités municipales selon l'importance démographique de la commune ou son caractère rural ou urbain.

En réponse à M. Jacques Larché, président , il a de même précisé qu'aucune distinction significative entre filles et garçons d'une même classe d'âge n'avait été relevée concernant le recours à la procédure de manifestation de volonté.

M. Guy Allouche s'interrogeant sur la pertinence de la relation établie entre l'objectif d'intégration et l'exigence d'une démarche volontaire de l'intéressé, M. Hugues Fulchiron a regretté que les modalités de mise en oeuvre de la manifestation de la volonté aient accentué le caractère administratif de la procédure au détriment de sa portée solennelle.

M. Robert Badinter a observé que " le parcours bureaucratique " auquel l'intéressé devrait se plier resterait le même, que le dispositif exige ou non une manifestation de volonté.

**Puis la commission a entendu Mmes Claude Fournier et Laurence Pécaut-Rivolier, vice-présidentes de l'Association nationale des juges d'instance .

M. Jacques Larché, président , a souligné l'importance d'entendre les juges d'instance, du fait qu'ils recueillaient beaucoup plus de manifestations de volonté que ce qui avait été imaginé lors du vote de la loi de 1993.

Mme Claude Fournier a tout d'abord rappelé que le greffier en chef était désormais lui-même chargé de la délivrance des certificats de nationalité française à la place du juge d'instance.

Sans ignorer certaines critiques qui avaient pu être formulées sur les conditions de réception dans les tribunaux des personnes souhaitant manifester leur volonté de devenir français, Mme Fournier a fait valoir que ces critiques portaient sur des points mineurs.

Elle a rappelé que les juges d'instance n'étaient pas souverains en matière de nationalité, car s'ils disposaient en effet d'un pouvoir d'enregistrement des déclarations de nationalité, un recours contre les refus d'enregistrement pouvait toujours être présenté devant le tribunal de grande instance, même si cette faculté était rarement mise en oeuvre.

S'agissant des modalités de manifestation de volonté du mineur dont les facultés mentales sont altérées, elle a souligné que cette question ne concernait pas seulement les manifestations de volonté mais aussi, d'une manière plus générale, les déclarations de nationalité. Elle a confirmé que l'article 17-3 du code civil permettait à l'entourage du mineur de solliciter une reconnaissance de l'altération de ses facultés mentales, ajoutant que cette reconnaissance relevait de la compétence du juge des tutelles dont la décision revêtait un caractère juridictionnel et était donc susceptible de recours devant le tribunal d'instance, le parent ou le tuteur du mineur incapable pouvant ensuite effectuer la manifestation de volonté à la place du mineur.

Elle s'est interrogé sur l'opportunité d'étendre cette disposition aux majeurs.

Mme Claude Fournier a ensuite insisté sur le fait que l'accueil des personnes concernées s'avérait souvent difficile sur un plan psychologique. Pour illustrer ce propos, elle a évoqué les déclarations d'acquisition de la nationalité française par les personnes justifiant d'une possession d'état de Français depuis dix ans. Elle a constaté que ces personnes éprouvaient, lorsqu'elles remplissaient les formulaires requis, les plus grandes réticences à mentionner leur nationalité étrangère car elles estimaient avoir été toujours françaises.

Elle a évoqué également les difficultés suscitées par l'application des dispositions assimilant à la résidence en France pour l'acquisition de la nationalité française dans divers cas, les années d'études effectuées dans des établissements français situés dans les pays francophones. La loi exigeant aussi que le pays dans lequel les études ont été suivies soit un pays où le français est l'une des langues officielles, elle a précisé que ces dispositions privaient les jeunes marocains et tunisiens du bénéfice de la dispense de stage en France, ce qu'ils avaient quelques difficultés à comprendre.

Traitant ensuite du problème de la preuve, après avoir rappelé que l'autorité judiciaire recevait toutes les déclarations de nationalité à l'exception de celles concernant les acquisitions à la suite d'un mariage avec un ressortissant français, Mme Claude Fournier a fait valoir qu'il n'existait pas de définition légale des modes de preuve et notamment de celle de la résidence en France.

Mme Laurence Pécaut-Rivolier , évoquant à son tour le problème des preuves, a observé qu'il se posait aussi pour les Français par filiation nés à l'étranger, qui devaient rassembler des documents d'état civil prouvant la naissance en France de leurs ascendants, avec parfois l'obligation de remonter à plusieurs générations. Elle a souligné que pour ces personnes dont la nationalité française pouvait ne pas faire de doute, les démarches à entreprendre s'avéraient parfois lourdes. Elle a indiqué que la preuve de la résidence en France était d'autant plus difficile à établir que cette résidence remontait à une époque ancienne.

Elle a aussi rappelé que les mentions relatives à l'acquisition ou à la perte de la nationalité française figuraient en marge des actes et des copies d'actes de naissance, faisant observer que cela permettait dans de nombreux cas de faciliter l'établissement de certificats de nationalité française. Relevant que le projet de loi proposait de faire mention également de la toute première délivrance de certificat de nationalité française sur les mêmes documents ainsi que sur les extraits d'actes de naissance, elle a souligné l'importance de la précision des mentions qui seraient portées. Elle a rappelé en effet que l'acte de naissance ne constituait pas en lui-même une preuve formelle de la nationalité, ajoutant que l'exhaustivité de ces mentions serait de nature à éviter la production de documents supplémentaires pour la délivrance de certificats de nationalité française.

Puis, Mme Laurence Pécaut-Rivolier a évoqué le problème de l'enfant susceptible d'acquérir la nationalité française en même temps que le parent devenant Français à sa majorité s'il résidait avec ce dernier. Elle a considéré que si l'existence de l'enfant n'était pas signalée au moment de l'acquisition, se poserait nécessairement, plus tard, la question d'une preuve de résidence avec le parent, probablement plus difficile à apporter.

Mme Claude Fournier a recommandé que la mention de la première délivrance du certificat de nationalité qui figurerait en marge de l'acte de naissance, tout en restant discrète, soit suffisamment précise pour permettre aux greffiers en chef de délivrer un nouveau certificat de nationalité sans avoir à imposer au demandeur des démarches trop lourdes. Elle a rappelé qu'un décret du 16 septembre 1997 permettait au greffier en chef d'obtenir directement un extrait d'acte de naissance des personnes majeures.

Mme Laurence Pécaut-Rivolier a souhaité qu'il soit systématiquement demandé aux personnes acquérant la nationalité française si leurs enfants mineurs résidaient avec eux afin de leur faciliter, le cas échéant, le bénéfice de l'effet collectif de l'acquisition de leur parent. Elle a souligné que lorsque l'enfant mineur était né à l'étranger, l'acte de naissance établi à l'étranger devait nécessairement être transcrit sur les registres français de l'état civil. Elle a souhaité que cette disposition, souvent ignorée des intéressés, leur soit rappelée systématiquement.

Mme Monique Cerisier-ben Guigua a insisté sur les grandes difficultés que rencontraient trop souvent les Français établis hors de France pour rassembler les éléments de preuve nécessaires à la délivrance d'un certificat de nationalité, ces démarches étant ressenties par les intéressés comme une persécution. Par comparaison, elle a évoqué la situation des personnes nées en Alsace-Moselle avant 1918.

Mme Claude Fournier a rappelé que les Français résidant à l'étranger pouvaient désormais obtenir un certificat de nationalité, non seulement auprès des consulats, mais aussi du tribunal d'instance de leur lieu de naissance.

Puis, en réponse à une question de M. Jacques Larché, président, Mme Claude Fournier a indiqué que pour des raisons de moyens, il n'était pas envisageable de généraliser la remise individuelle des certificats de nationalité aux personnes ayant manifesté la volonté de l'acquérir à la majorité.

Mme Laurence Pécaut-Rivolier a cependant indiqué qu'elle avait pour pratique d'organiser une audience spéciale de remise des certificats de nationalité, par groupes d'une vingtaine de personnes environ. Elle a précisé, d'une part, que toutes les personnes convoquées participaient effectivement à cette audience mais, d'autre part, que cette pratique demeurait peu fréquente.

Elle a ajouté que cette procédure solennelle avait le mérite de bien faire prendre conscience aux intéressés de l'importance décisive du document qui leur était remis.

** Au cours d'une seconde réunion qui s'est tenue dans l'après-midi , la commission a tout d'abord accueilli une délégation parlementaire sud-africaine composée de M. Steytler, directeur du Community law center, M. Pravin Gordhan, président de la commission des lois et des affaires constitutionnelles de l'Assemblée sud-africaine, M. Langa, vice-président de la Cour constitutionnelle, M. Ngcula, vice-président du Sénat sud-africain.

Puis, la commission a poursuivi ses auditions sur le projet de loi relatif à la nationalité. Elle a entendu Mme Simone Veil, présidente du Haut conseil à l'intégration .

A titre liminaire, Mme Simone Veil , après avoir indiqué qu'elle s'exprimerait en sa qualité de présidente du Haut conseil à l'intégration, composé de personnalités de sensibilités très diverses, a estimé que l'équilibre du projet de loi initial avait été remis en cause par les délibérations de l'Assemblée nationale.

Elle a fait observer que le Haut conseil avait privilégié l'objectif d'intégration, prioritaire dès lors que les personnes concernées étaient en situation régulière.

Considérant que le projet de loi était susceptible de favoriser l'intégration des étrangers en France, Mme Simone Veil a en premier lieu fait valoir que l'accès à la nationalité française des étrangers souhaitant adhérer à la communauté nationale était l'une des composantes essentielles de la politique d'intégration. Elle a souligné qu'une telle politique ne pourrait recueillir l'adhésion d'une majorité de Français que si elle s'accompagnait d'un renforcement de la lutte contre l'immigration irrégulière et le travail clandestin.

Elle a néanmoins souligné que la recherche de " l'immigration zéro " était illusoire dans un contexte d'instabilité politique et économique mondiale. Elle a relevé que la mise en oeuvre d'un tel objectif exigerait en tout état de cause de renier des principes fondamentaux de notre Etat de droit, notamment le droit d'asile et le droit à une vie familiale normale.

Mme Simone Veil a jugé nécessaire de rechercher un équilibre entre le renforcement de la lutte contre l'immigration irrégulière et la possibilité d'intégrer des personnes en situation régulière.

Exposant alors les observations spécifiques du Haut conseil à l'intégration sur le projet de loi, Mme Simone Veil a souligné le décalage entre l'exposé des motifs, qui présentait le projet de loi comme tendant à " restaurer l'automaticité de l'acquisition de la nationalité française pour l'enfant né en France de parents étrangers ", et le dispositif qui s'inscrivait au contraire et à juste titre dans notre tradition juridique issue de la loi de 1889 en ne proposant pas qu'un enfant né en France de parents étrangers soit Français dès sa naissance.

Faisant observer que depuis 1889 la législation en matière de nationalité n'avait pas connu de bouleversement radical, Mme Simone Veil a regretté que les textes successifs soient systématiquement présentés comme des ruptures par rapport aux législations antérieures. Elle a ainsi relevé la continuité de l'application du droit du sol qui n'avait pas été remise en cause en 1993.

Elle a estimé que cette volonté de radicaliser le débat autour de la nationalité avait des conséquences dommageables sur le processus d'intégration.

Mme Simone Veil a ensuite souligné que le Haut conseil n'était pas parvenu à dégager une position unanime sur l'abandon partiel de la règle posée par le législateur de 1993, subordonnant l'acquisition de la nationalité française à une manifestation formelle de volonté.

Elle a fait observer que, contrairement à une idée trop répandue, la législation n'avait jamais consacré un droit automatique à la nationalité française. Elle a ainsi relevé l'existence de conditions précises à cette acquisition de la nationalité française, telle que la durée de résidence antérieure et la résidence à la date de l'acquisition, et l'inexistence d'un droit du sol qui s'appliquerait dès la naissance.

Elle a considéré que les difficultés de preuve seraient plus sensibles avec le nouveau dispositif qu'avec celui issu de la loi du 22 juillet 1993.

Mme Simone Veil a par ailleurs indiqué que le Haut conseil à l'intégration avait souhaité que l'acquisition de la nationalité française puisse être entourée d'une certaine solennité, par exemple à l'occasion de l'appel de préparation à la défense.

Elle a également précisé que le Haut conseil avait relevé la situation très difficile, du point de vue de l'intégration, des jeunes nés à l'étranger, mais arrivés très jeunes en France et y ayant suivi leur scolarité, qui étaient contraints de recourir à la procédure de naturalisation alors même que, parfois, leurs frères et soeurs étaient français.

Mme Simone Veil a déclaré que le Haut conseil, sans se prononcer sur l'acquisition automatique de la nationalité française à dix-huit ans, s'était déclaré favorable au maintien d'un dispositif d'adhésion volontaire des jeunes à compter de l'âge de seize ans.

Elle a précisé que le Haut conseil était cependant hostile à la possibilité pour les parents de demander la nationalité française pour le compte de leurs enfants, soulignant les risques de distorsions en fonction de la situation des parents qui pourraient résulter de cette mesure.

En conclusion, Mme Simone Veil a indiqué que le Haut conseil avait insisté sur les problèmes de preuve et avait exprimé le souhait qu'un dispositif permette aux jeunes concernés de disposer rapidement d'une carte nationale d'identité.

Faisant valoir que dans un très grand nombre de situations les parents étaient appelés à prendre des décisions pour le compte de leurs enfants, M. Michel Dreyfus-Schmidt s'est demandé si la question de la nationalité n'était pas suffisamment importante pour qu'une même faculté leur soit également ouverte dans ce cas. S'agissant de la solennité de l'entrée dans la nationalité française, il a estimé que la situation des enfants nés en France de parents étrangers n'était pas différente de celle des personnes nées en France de parents français ou de celle des Algériens qui, avant l'indépendance, étaient français par la volonté du législateur. Il a en outre fait valoir que les personnes dont les parents avaient une résidence de longue date en France se trouvaient dans une situation spécifique.

A propos des enfants nés hors de France mais qui y avaient fait leurs études, Mme Monique Cerisier-Ben Guiga a souhaité savoir quelle disposition pourrait être adoptée en leur faveur, soit en alignant leur statut sur celui des enfants nés en France de parents étrangers, soit en leur permettant de souscrire une déclaration de nationalité française. Elle a par ailleurs fait valoir que les procédures simplifiées de naturalisation n'étaient pas suffisamment développées. S'agissant de la preuve de la nationalité française, elle a souhaité avoir des précisions sur les difficultés qui pourraient se présenter dans le cadre d'une acquisition de plein droit. Elle a enfin demandé quelle mesure pourrait être envisagée pour permettre aux jeunes concernés de disposer d'une carte nationale d'identité dès l'âge de dix-huit ans.

Faisant observer que le projet de loi était fondé sur le constat d'une prétendue mauvaise application de la loi du 22 juillet 1993, M. Pierre Fauchon a souhaité connaître le bilan de la mise en oeuvre de cette législation.

Tout en jugeant nécessaire de rappeler qu'il avait toujours existé des conditions préalables à l'acquisition de la nationalité française, M. Guy Allouche a estimé que celles qu'avait fixées la loi du 22 juillet 1993 étaient contraignantes et pénalisaient les jeunes concernés. Il a souhaité savoir si le Haut conseil avait eu l'occasion de s'intéresser aux cas de jeunes nés en France de parents étrangers, qui, durant leurs études, avaient dû quitter la France avant leur majorité et qui n'avaient pu obtenir la nationalité française à leur retour.

En réponse, Mme Simone Veil, s'agissant tout d'abord de la possibilité pour les parents de demander la nationalité française pour le compte de leurs enfants, a fait valoir que la question de la nationalité ne pouvait être comparée avec d'autres questions telle que le choix de l'école ou celui de la religion. Elle a souligné qu'avant 1993, une fois le choix de la nationalité française opéré, il était en principe impossible pour l'enfant d'y renoncer. Elle a également relevé que, dans certains cas, les parents faisaient pour leurs enfants un choix conduisant à ce que ces derniers aient une nationalité différente de la leur.

Elle a de nouveau souligné que pour le Haut conseil, il était préférable de laisser le choix de la nationalité aux intéressés eux-mêmes et non à leurs parents.

S'agissant de la solennité de l'entrée dans la nationalité française, Mme Simone Veil a d'abord considéré qu'il était difficile d'établir un parallélisme entre la situation des enfants nés en France de parents étrangers et celle des personnes nées en France de parents français. Elle a de même écarté la comparaison entre la situation de ces enfants et celle des personnes qui, avant l'indépendance de l'Algérie, étaient françaises par la volonté du législateur.

Rappelant que l'idée selon laquelle le droit du sol aurait été remis en cause en 1993 entretenait une confusion, préjudiciable aux jeunes concernés, Mme Simone Veil a fait valoir que ceux-ci avaient besoin d'avoir une vision claire de leur situation. Elle a rappelé qu'avant 1993 les jeunes nés en France de parents étrangers avaient jusqu'à leur majorité la nationalité de leurs parents, sauf déclaration de ceux-ci pour leur faire obtenir la nationalité française, ou acquisition de celle-ci par les parents. Elle a également noté que la question pouvait confronter les intéressés au problème de la double nationalité.

Mme Monique Cerisier-Ben Guiga a fait observer à ce propos qu'à l'exception des incidences de la convention du Conseil de l'Europe de 1963 relative à la réduction des cas de pluralité de nationalité, il n'y avait pas d'empêchement à la possession d'une double nationalité.

Mme Simone Veil a ensuite fait valoir qu'aucune raison ne pouvait justifier de mettre en cause le principe de la solennité de l'entrée dans la nationalité française, une telle solennité n'étant d'ailleurs pas contraignante.

Elle a indiqué que le Haut conseil à l'intégration avait souhaité que les jeunes puissent recevoir à l'occasion de l'appel de préparation à la défense un document leur permettant d'obtenir facilement par la suite une carte nationale d'identité.

M. Jacques Larché, président, a alors fait observer que certains tribunaux d'instance avaient spontanément organisé des manifestations solennelles pour l'entrée dans la nationalité française de jeunes nés en France de parents étrangers, ajoutant qu'à ses yeux cette solennité était indispensable.

Mme Simone Veil a pour sa part rappelé que la remise officielle des certificats de naturalisation avait été organisée il y a quelques années, mais qu'elle avait donné lieu à des pratiques très différentes selon les départements.

S'agissant des enfants nés hors de France, Mme Simone Veil a indiqué que le Haut Conseil à l'intégration avait simplement signalé les problèmes posés par leur situation sans proposer de solutions particulières.

Puis, examinant le problème des procédures en matière de naturalisation, elle a fait valoir que le grand nombre de demandes pouvait expliquer certains retards mais que, dans l'ensemble, ces procédures étaient plus légères que dans les Etats voisins. Elle a rappelé que les dossiers posant des problèmes spécifiques étaient soumis au ministre compétent et que le Conseil d'Etat avait en outre élaboré dans ce domaine une jurisprudence précise.

Mme Monique Cerisier-Ben Guiga a cependant fait observer que l'instruction des demandes était souvent beaucoup trop longue, celles-ci étant examinées à la fois par les préfectures -qui avaient souvent une attitude restrictive- et par la Direction de la population et des migrations.

S'agissant de l'application de la loi du 22 juillet 1993, Mme Simone Veil a relevé que cette législation n'avait pas été appliquée de manière homogène dans tous les départements, voire à l'intérieur d'un même département selon les juridictions. Elle a cependant considéré que dans l'ensemble cette loi avait été assez bien appliquée, même si on manquait encore du recul nécessaire pour en faire un bilan complet.

Elle a souligné que des problèmes d'information avaient pu être relevés, en particulier pour les jeunes filles, dont certaines subissaient en outre des pressions de la part de leur famille. Elle a rappelé que lorsqu'elle était ministre chargé des affaires sociales, elle avait porté une attention particulière à ces problèmes d'information, plus ou moins sensibles selon les populations concernées.

Mme Simone Veil a enfin indiqué que le Haut conseil à l'intégration n'avait pas examiné la situation des jeunes nés en France de parents étrangers qui avaient quitté la France au cours de leurs études avant leur majorité et n'avaient pu obtenir la nationalité française à leur retour en France. Elle a néanmoins relevé que le projet de loi prévoyait des critères de résidence plus souples qui pouvaient permettre de mieux répondre à certaines situations particulières et au souci d'intégration.

**La commission a ensuite procédé à l'audition de Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Regrettant les polémiques auxquelles la discussion du projet de loi sur la nationalité avait donné lieu à l'Assemblée nationale, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a émis le souhait que le Sénat, selon sa tradition, se concentre sur un travail de fond.

Elle a considéré que légiférer était nécessaire, d'une part pour régler la situation des jeunes étrangers nés en France qui auraient omis, faute d'information, d'accomplir la manifestation de volonté de devenir français instituée par la loi de 1993 et, d'autre part, pour remplir l'engagement du Gouvernement de permettre une acquisition de plein droit de la nationalité française à dix-huit ans par les jeunes étrangers nés en France aux conditions traditionnelles.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a considéré que le projet de loi renouait avec une tradition historique suivie sous la Monarchie, pendant la Révolution puis, après une interruption en 1804, reprise en 1851 et 1889.

Le ministre a ensuite rappelé que la loi de 1973 avait consacré cette tradition en prévoyant deux procédures d'acquisition de la nationalité française des étrangers nés en France sous condition de cinq ans de résidence en France, à savoir l'acquisition automatique à la majorité et l'acquisition à la demande des parents après la naissance, la loi de 1993 ayant remplacé ces deux procédures par l'acquisition volontaire de la nationalité entre seize et vingt-et-un ans mais toujours sous condition de cinq ans de résidence.

Elle a souligné que le projet de loi permettait l'acquisition de la nationalité française non pas automatiquement mais de plein droit. Elle a estimé en effet qu'un enfant né en France, élevé dans nos écoles, ne parlant que notre langue et ne pouvant imaginer de vivre dans un autre pays, avait en fait choisi volontairement la France.

Elle a cependant précisé que le Gouvernement n'avait pas souhaité rétablir la possibilité pour les parents de demander la nationalité française en faveur de leurs enfants mineurs, supprimée en 1993, pour deux raisons :

- d'abord le souci de privilégier la volonté du jeune, celui-ci pouvant anticiper l'acquisition de plein droit par une déclaration à partir d'un âge fixé à seize ans par le projet initial et ramené à treize ans par l'Assemblée nationale avec l'accord du Gouvernement. Elle a fait valoir que la préférence donnée à la volonté de l'enfant était conforme à la Convention sur les droits de l'enfant ;

- en deuxième lieu, le fait que les personnes devenues françaises à la demande de leurs parents sous l'empire de la loi de 1973 ne disposaient pas de la possibilité de décliner la nationalité française, ces jeunes étant devenus français sans l'avoir voulu. Elle a relevé que certains parents ne demandaient la nationalité pour leurs enfants que dans le but de trouver une solution à leur problème de séjour en France, indiquant que parfois les parents ne demandaient pas la nationalité pour tous leurs enfants.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a souligné que le risque de voir certaines personnes écartées de la nationalité française faute d'information devait être pris en considération par principe, indépendamment du nombre des personnes effectivement concernées. Elle a rappelé que pour celles-ci, la procédure de naturalisation, qui leur était certes ouverte, apparaissait beaucoup plus aléatoire.

Elle a précisé que le choix du Gouvernement résultait de sa conception de la nationalité, reposant sur la culture, la langue et l'intégration, ajoutant que la manifestation de volonté ne pouvait se limiter à l'accomplissement d'une simple formalité administrative.

Le ministre a souhaité que le débat sur la nationalité ne soit pas confondu avec celui sur l'immigration, faisant valoir que le projet de loi sur la nationalité n'avait pas trait à l'acquisition de la nationalité par tous les étrangers mais seulement par les personnes qui résideraient déjà en France puisqu'elles y étaient nées.

M. Jacques Larché, président , a estimé que le débat se serait engagé dans de bien meilleures conditions si le Gouvernement n'avait pas déclaré l'urgence sur ce texte, ajoutant que d'une manière générale, l'urgence sur des textes de cette importance réduisait gravement le débat parlementaire.

Il a indiqué que le président du Sénat avait fait valoir ce point de vue dans un courrier adressé récemment au Premier ministre.

Il a ajouté que le risque d'interférences entre les débats sur la nationalité et sur l'immigration était avant tout imputable à la décision du Gouvernement d'imposer l'examen en urgence de deux projets de loi sur les deux sujets, pratiquement en même temps.

M. Georges Othily s'est inquiété de l'application du projet de loi en Guyane. Faisant valoir que ce département d'outre-mer était peuplé de 54 % d'étrangers dont 30 % nés en France, il a indiqué qu'un grand nombre d'entre eux pourraient devenir français sans manifestation de volonté. Craignant que cette situation ne remette en cause l'équilibre économique et social du département, il a demandé au ministre si d'éventuelles modalités particulières d'application du texte seraient prévues pour la Guyane.

M. Daniel Hoeffel a demandé si la fixation à treize ans de l'âge à partir duquel le jeune pourrait solliciter la nationalité française permettrait de réellement prendre en considération la volonté de l'enfant.

M. Jean-Jacques Hyest , déplorant une mauvaise application de la loi due à une information insuffisante des personnes concernées, a demandé pourquoi il n'avait pas été prévu de coordonner la procédure d'inscription automatique sur les listes électorales avec celle d'acquisition de la nationalité française à la majorité. Il a estimé qu'on aurait pu ainsi maintenir la manifestation de volonté prévue par la loi de 1993 et, dans le cadre de l'inscription automatique sur les listes électorales, contraindre l'administration à rappeler systématiquement aux jeunes concernés la possibilité qui leur était offerte de réclamer la nationalité française.

M. Robert Pagès , déplorant la confirmation du refus par le Gouvernement de permettre l'acquisition de la nationalité française dès la naissance en France, a fait valoir que nul ne choisissait de naître de parents français ou étrangers. Il s'est interrogé sur l'" espace de non-droit " dans lequel vivrait le jeune étranger né en France jusqu'à 13, 16 ou 18 ans suivant les cas. Il a demandé au ministre de poursuivre sa réflexion sur ce sujet.

M. Christian Bonnet a interrogé Mme Elisabeth Guigou sur les statistiques relatives à la manifestation de volonté en demandant que soit distinguées, d'une part, les personnes qui avaient omis de réclamer la nationalité française faute d'information et, d'autre part, celles qui ne voulaient pas devenir françaises.

Mme Monique Cerisier-Ben Guiga a considéré préjudiciable à l'intérêt des enfants de ne pas autoriser leurs parents à réclamer la nationalité française en leur faveur dès leur naissance. Elle a estimé que l'intérêt des enfants devait passer avant l'expression éventuelle de leur volonté.

Elle s'est par ailleurs interrogée sur les conséquences en matière de preuve d'une acquisition de la nationalité française de plein droit et donc sans constitution concomitante d'une preuve irréfragable de ladite acquisition. Elle a souligné les difficultés pour les Français établis hors de France d'apporter la preuve de leur nationalité française, difficultés qui pourraient être accrues dans le système proposé.

M. Guy Allouche a d'abord interrogé Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la Justice, sur les différences d'appréciation de la condition de cinq ans de résidence dans le projet de loi et dans la législation en vigueur.

Il a ensuite demandé pourquoi les mentions relatives à la nationalité ne seraient, selon le projet de loi, portées sur l'extrait d'acte de naissance ou sur le livret de famille qu'à la demande de l'intéressé.

Abordant lui aussi la question de la condition de cinq ans de résidence, M. Lucien Lanier s'est interrogé sur la situation du jeune qui aurait effectué un séjour dans son pays d'origine au cours de cette période.

M. Michel Dreyfus-Schmidt , évoquant l'exemple de la législation allemande, a demandé s'il ne conviendrait pas de réfléchir à la possibilité de faciliter l'acquisition de la nationalité française par des enfants nés à l'étranger mais arrivés en France au cours de la petite enfance et ayant effectué dans notre pays un certain nombre d'années de scolarité.

Puis, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a répondu aux questions posées par les membres de la commission.

A propos de la déclaration d'urgence sur le projet de loi, elle a invoqué l'encombrement de l'ordre du jour du Parlement et la volonté du Gouvernement de remplir rapidement ses engagements.

Au sujet de l'application de la loi en Guyane, elle a rappelé qu'il n'était pas de tradition de prévoir une application différenciée de la loi sur le territoire de la République. Elle a cependant ajouté, en réponse à une question de M. Georges Othily , que l'aménagement du régime des jugements déclaratifs de naissance permettrait à l'administration de lutter contre certaines fraudes.

S'agissant de la capacité pour un enfant d'exprimer sa volonté à partir de l'âge de treize ans, elle a rappelé que la législation en vigueur reconnaissait aux jeunes de cet âge une certaine autonomie de la volonté, notamment en matière d'adoption ou de garde après le divorce des parents, ou encore en matière pénale. Elle a considéré qu'à l'âge de treize ans un enfant pouvait assumer certaines responsabilités et que cette possibilité constituerait un facteur d'intégration et de structuration de sa personnalité.

Soulignant que les taux de refus d'enregistrement des manifestations de volonté variaient sensiblement selon les tribunaux, elle a estimé que dans ce domaine la marge d'appréciation des magistrats devait être aussi réduite que possible.

M. Jean-Jacques Hyest , ayant fait observer que ces disparités risqueraient de subsister lorsque les étrangers ayant vocation à devenir automatiquement français seraient amenés à demander un certificat de nationalité, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a estimé que l'automaticité de l'acquisition réduirait ces difficultés.

M. Jacques Larché, président , a jugé paradoxal que le projet ouvre un choix aux enfants à l'âge de treize ans alors qu'à l'âge de dix-huit ans l'acquisition serait automatique. Il a rappelé que le législateur de 1993 avait en vue une démarche solennelle et intégrante du nouveau Français.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a affirmé que le jeune garderait un choix à dix-huit ans puisqu'il pourrait décliner la nationalité française. Elle a ajouté qu'un étranger ne pourrait pas devenir français sans l'avoir désiré puisque la possibilité pour les parents de réclamer la nationalité française au bénéfice de leurs enfants dès la naissance ne serait pas rétablie.

Elle a déclaré qu'à ses yeux la volonté d'être français devait se manifester par l'intégration dans la vie quotidienne et par l'école de la République, plutôt qu'en remplissant un formulaire administratif.

Elle a en outre précisé que la loi de 1973 prévoyait elle aussi une possibilité de demande d'acquisition anticipée de la nationalité française dès l'âge de seize ans, sans pour autant que celle-ci ait pu apparaître contradictoire avec une acquisition de plein droit à la majorité.

M. Jacques Larché, président , a souligné la différence fondamentale entre une démarche pour demander la nationalité française, témoignant d'une réelle volonté, et la simple possibilité de la refuser.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a rappelé que le droit du sol intégral n'avait jamais été appliqué en France et qu'il ne lui paraissait pas possible d'envisager l'attribution de la nationalité française à raison de la seule naissance en France.

Elle a cependant indiqué que le Gouvernement s'était effectivement interrogé sur la situation des enfants âgés de moins de treize ans qui ont vocation à devenir Français.

Elle a précisé que des négociations étaient en cours avec les principaux Etats d'origine des intéressés afin que ceux-ci puissent bénéficier de papiers d'identité et que l'Assemblée nationale avait en outre prévu qu'un " titre d'identité républicain " serait délivré aux enfants nés en France de parents étrangers titulaires d'un titre de séjour.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a ensuite indiqué que l'on ne disposait pas de statistiques précises concernant le nombre des personnes n'ayant pas manifesté leur volonté de devenir françaises et qu'il n'était en tout état de cause pas possible de déterminer le motif de leur abstention. Elle a cependant évalué entre 10 et 20 % la proportion des jeunes susceptibles d'acquérir la nationalité française qui n'en avaient pas manifesté la volonté, sur 25.000 par an au total.

Elle a par ailleurs précisé que les mentions, sur le livret de famille et les extraits de l'acte de naissance, des informations relatives à la nationalité ne seraient pas portées systématiquement pour des raisons tenant à la protection de la vie privée.

A propos de la condition de résidence, elle a souligné que les législations de 1973 et de 1993 prévoyaient une obligation de résidence en France au cours d'une période de cinq années continue et contiguë à l'âge de la majorité tandis que le projet de loi tendait à prendre en compte une période continue ou discontinue d'au moins cinq ans de résidence entre les âges de onze et de dix-huit ans. Elle a fait observer que cet assouplissement répondait à la situation d'enfants effectuant de courts séjours dans leur pays d'origine ou même de certains d'entre eux renvoyés par leurs parents dans ce pays contre leur volonté, notamment certaines jeunes filles contraintes à se marier. Elle a ajouté que ce nouveau régime permettrait d'établir plus facilement la réalité des cinq années de résidence en permettant de les faire coïncider, le cas échéant, avec des années de scolarité obligatoire, ce qui faciliterait la démonstration de la preuve de cette résidence en France.

S'agissant des jeunes arrivés en France peu après leur naissance, elle a indiqué, sans nier le problème posé, que le projet de loi entendait se limiter strictement aux enfants nés en France.

Enfin, en réponse à M. Patrice Gélard , Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a précisé que d'éventuelles condamnations pénales ne constitueraient un obstacle à l'acquisition de la nationalité française que pour les majeurs et non pour les mineurs, comme dans le régime actuel issu de la loi de 1993. Elle a par ailleurs fait valoir que de jeunes étrangers résidant en France mais suivant leur scolarité dans des établissements scolaires non français refuseraient très probablement de devenir français.

ANNEXE III
LE DROIT DE LA NATIONALITÉ DANS
QUELQUES ETATS DE L'UNION EUROPEENNE :
ÉLÉMENTS DE COMPARAISON

Le droit de la nationalité dans les Etats de l'Union européenne, et plus généralement dans les pays étrangers, se caractérise par une grande diversité.

En effet, dans chaque pays le droit de la nationalité est le produit d'une évolution empirique, largement liée aux circonstances historiques, ce qui explique que chaque Etat combine de façon spécifique les différents critères pouvant être attributifs du lien de nationalité : filiation ( jus sanguinis ), naissance sur le territoire ( jus soli ), résidence, mariage...

On se limitera dans le cadre du présent rapport à fournir quelques éléments de comparaison tirés de l'étude de la législation des Etats européens suivants : Belgique, Royaume-Uni, Italie, Espagne, Portugal, République fédérale d'Allemagne, Pays-Bas.

1. L'attribution de la nationalité par filiation

La filiation est reconnue comme un critère attributif de la nationalité à la naissance dans tous les Etats de l'Union européenne précités , qui confèrent donc leur nationalité aux enfants nés d'un de leurs ressortissants.

Cependant, pour ce qui concerne les enfants nés à l'étranger, certains Etats n'attribuent pas automatiquement la nationalité et imposent alors une formalité préalable : enregistrement de la naissance ou déclaration par les parents ; tel est le cas en Belgique (si le parent belge n'est pas lui-même né en Belgique), au Portugal et au Royaume-Uni (à condition que l'un des parents ait résidé au moins trois ans au Royaume-Uni avant la naissance de l'enfant).

2. Le droit du sol double

Aux Etats-Unis, tout enfant né sur le sol américain est citoyen de naissance 6( * ) ; de même beaucoup de pays d'Amérique latine attribuent leur nationalité par la seule naissance sur leur territoire.

En revanche, aucun des pays européens précités n'applique le jus soli simple , suivant lequel la naissance sur le sol du pays suffit à attribuer la nationalité, sauf dans des cas très particuliers. Ainsi, tous les Etats européens étudiés confèrent leur nationalité aux enfants trouvés sur leur territoire ou de parents inconnus, tandis que la majorité d'entre eux l'attribuent aux enfants de parents apatrides ou aux enfants auxquels les lois étrangères n'attribuent la nationalité d'aucun des deux parents.

Cependant, une minorité de pays européens pratique, comme la France, le double jus soli , c'est-à-dire la règle selon laquelle la naissance dans le pays d'un enfant dont un parent y est lui-même né entraîne l'attribution à la naissance de la nationalité du pays. Il s'agit, outre la France, de l'Espagne et de la Belgique (sous réserve d'une condition de durée de résidence pour les parents dans ce dernier Etat).

Les Pays-Bas appliquent un système un peu analogue: la nationalité est attribuée automatiquement aux enfants dont l'un des parents résidant dans le pays est lui-même né d'une mère résidant dans ce pays.

Ces Etats attribuent donc automatiquement leur nationalité aux enfants dits de la " troisième génération ".

3. L'attribution ou l'acquisition de la nationalité en raison de la naissance et de la résidence dans le pays

En ce qui concerne les enfants dits de la " deuxième génération ", quelques Etats attribuent leur nationalité dès la naissance aux enfants nés dans le pays de parents étrangers, sous réserve d'une condition de résidence s'appliquant aux parents .

Ainsi, en Grande-Bretagne, la nationalité britannique est conférée automatiquement à tout enfant né au Royaume-Uni lorsque l'un des parents y est lui-même régulièrement établi.

En Belgique et au Portugal, l'attribution de la nationalité est soumise à une déclaration des parents et joue en faveur :

- de l'enfant né en Belgique lorsqu'il y réside et que ses parents y résident eux-mêmes depuis 10 ans ;

- de l'enfant né au Portugal de parents qui y ont leur résidence habituelle depuis au moins 6 ans, s'ils sont ressortissants de pays de langue officielle portugaise, ou depuis au moins 10 ans dans les autres cas.

Plus fréquemment, les Etats européens prévoient, comme la France, une acquisition possible de la nationalité par une démarche volontaire : manifestation de volonté, déclaration, option... en faveur des enfants nés dans le pays de parents étrangers, à partir d'un certain âge (le plus souvent autour de la majorité) et sous réserve d'une condition de résidence .

Ainsi, un étranger né en Belgique et y ayant sa résidence depuis sa naissance peut acquérir la nationalité belge par déclaration souscrite entre 18 et 30 ans. Un étranger né en Italie qui y a résidé légalement sans interruption jusqu'à sa majorité peut déclarer vouloir acquérir la nationalité italienne dans l'année suivant sa majorité. Un étranger majeur né aux Pays-Bas qui, depuis sa naissance, y a son domicile ou son lieu de séjour réel peut de même acquérir la nationalité néerlandaise par une déclaration souscrite avant l'âge de 25 ans.

Par ailleurs, le mineur né au Royaume-Uni de parents étrangers et y résidant depuis plus de dix ans peut bénéficier d'une procédure d'enregistrement.

L'Allemagne ne reconnaît en revanche en aucun cas le droit à devenir allemand par la naissance en Allemagne . Les jeunes étrangers nés en Allemagne bénéficient cependant d'une procédure de naturalisation simplifiée ; ils obtiennent en principe la naturalisation, s'ils satisfont aux conditions suivantes :

- déposer leur demande entre 16 et 23 ans ;

- résider légalement sur le territoire fédéral depuis 8 ans ;

- avoir accompli en Allemagne 6 années de scolarité (dont 4 ans dans un établissement d'enseignement général) ;

- n'avoir encouru aucune peine majeure prévue par la loi.

Encore doivent-ils accepter de perdre leur nationalité antérieure ou d'y renoncer.

4. Le mariage

Dans les pays européens précités, le mariage avec un national n'entraîne jamais de plein droit l'acquisition de la nationalité.

Cependant, un droit d'option pour la nationalité du conjoint, en général par voie de déclaration, est fréquemment prévu comme en France, tout en étant notamment subordonné à une condition de durée minimum du mariage ou du séjour dans le pays : ainsi, sont requis avant une telle déclaration :

- deux ans de mariage en France ;

- trois ans de résidence commune en Belgique (ou six mois seulement si l'intéressé y réside régulièrement depuis au moins trois ans) ;

- trois ans de mariage ou six mois de résidence en Italie ;

- trois ans de mariage en Espagne.

Dans les autres pays, une procédure de naturalisation simplifiée est ouverte à l'étranger ayant épousé un national (à condition de justifier de trois ans de résidence régulière en Grande-Bretagne, d'un an de mariage en Espagne, de trois ans de mariage aux Pays-Bas).

5. La naturalisation

La naturalisation, décision discrétionnaire de l'Etat, ne constitue jamais un droit pour l'étranger qui demande à en bénéficier.

La procédure de naturalisation est généralement ouverte aux étrangers majeurs justifiant d'une durée de résidence minimum dans le pays, le plus souvent fixée au moins à cinq ans comme en France (sous réserve de réductions de délais ou de dispenses spécifiques), cette durée pouvant parfois atteindre dix ans. Des conditions supplémentaires sont toujours exigées, concernant par exemple l'assimilation et la connaissance de la langue (France, Grande-Bretagne, Portugal, Pays-Bas, Espagne), la moralité ou l'absence de condamnations pénales ou d'obstacle au séjour (France, Grande-Bretagne, Allemagne, Pays-Bas), l'indépendance économique (Allemagne, Portugal)...

Certains Etats exigent l'abandon de la nationalité antérieure (Allemagne, Espagne, Pays-Bas) et parfois une prestation de serment (Espagne, Italie).

Le plus souvent, l'acquisition de la nationalité bénéficie également aux enfants mineurs du naturalisé, le cas échéant sous certaines conditions (notamment la France et l'Italie exigent qu'ils aient la même résidence que leur parent).

*

* *

TEXTES DE RÉFÉRENCE

- France : code civil dans sa rédaction résultant de la loi n° 93-933 du 22 juillet 1993

- Belgique : code de la nationalité belge (loi du 28 juin 1984 modifiée en dernier lieu par la loi du 13 avril 1995)

- Royaume-Uni : British Nationality Act 1981 (modifié pour la dernière fois en 1985)

- Italie : loi du 5 février 1992 modifiée en dernier lieu le 18 avril 1994

- Espagne : code civil modifié en dernier lieu par la loi 29/1995 du 2 novembre 1995

- Portugal : loi n° 37/81 du 3 octobre 1981 modifiée en dernier lieu par la loi n° 25/94 du 19 août 1994

- Allemagne : loi du 22 juillet 1913 sur la nationalité modifiée en dernier lieu par la loi du 30 juin 1993 et loi du 29 juillet 1990 modifiant la loi sur les étrangers

- Pays-Bas : loi du 19 décembre 1984 modifiée en dernier lieu par la loi du 12 décembre 1985










ATTRIBUTION DE LA NATIONALITÉ PAR FILIATION

France

Belgique

Grande-Bretagne

Italie

Espagne

Portugal

R.F.A.

Pays-Bas

Enfant (légitime ou naturel) dont l'un des parents au moins est français.

Pour l'enfant né à l'étranger d'un seul parent français, possibilité de répudier la qualité de Français dans les six mois précédant sa majorité et les douze mois la suivant.

Enfant (légitime ou naturel) dont l'un des parents au moins est belge.

Mais,
s'il est né à l'étranger , il faut :

-
ou que le parent belge soit né en Belgique ;

- ou que ledit parent fasse une déclaration dans les cinq ans pour réclamer la nationalité belge pour l'enfant ;

- ou que l'enfant n'ait pas d'autre nationalité .

Enfant légitime dont l'un des parents au moins est citoyen britannique.

Le père illégitime ne peut pas transmettre la citoyenneté britannique.

Pour l'enfant né à l'étranger d'un parent citoyen britannique par la seule filiation, l'attribution de la nationalité n'est pas automatique mais des racines suffisantes au Royaume-Uni peuvent justifier un enregistrement.

Pour l'enfant né à l'étranger d'un parent citoyen britannique par la seule filiation, la nationalité peut être acquise par enregistrement si la demande est formulée dans les douze mois suivant la naissance et si l'un des parents a résidé au moins trois ans au Royaume-Uni avant la naissance de l'enfant.

Enfant de père ou de mère italien.

Est espagnol l'enfant d' au moins un parent espagnol quel que soit son lieu de naissance.

Sont portugais d'origine :

a) les enfants de père ou de mère portugais, nés en territoire portugais, ou sous administration portugaise ou à l'étranger lorsque leur auteur -portugais- y est au service de l'État portugais ;

b) les enfants de père ou mère portugais, nés à l'étranger, si les parents déclarent qu'ils veulent que leur enfant soit portugais ou s'ils ont fait l'inscription de la naissance sur le registre d'état civil portugais.

Enfant dont l'un des parents possède la nationalité allemande.

Enfant dont le père ou la mère est néerlandais au moment de la naissance et enfant d'un néerlandais décédé avant sa naissance.

ATTRIBUTION DE LA NATIONALITÉ PAR LA NAISSANCE SUR LE TERRITOIRE DU PAYS

France

Belgique

Grande-Bretagne

Italie

Espagne

Portugal

R.F.A.

Pays-Bas

Enfant né en France :

- de parents inconnus ;

- de parents apatrides ;

- de parents étrangers si les lois étrangères ne lui attribuent la nationalité d'aucun des deux parents ;

Enfant né en Belgique :

qui serait

apatride

s'il n'avait

pas la natio

nalité belge ;

Enfant né au Royaume-Uni :

- de parents inconnus ;

- de parents apatrides ;

- de parents étrangers
si les lois étrangères ne lui attribuent la nationalité d'aucun des deux parents ;

Enfant né en Italie :

- de parents inconnus
;

- de parents apatrides ;

-
de parents étrangers dont la loi nationale ne prévoit pas l'attribution automatique de la nationalité en cas de naissance à l'étranger

Enfant né en Espagne :

- de parents inconnus (sont également espagnols les mineurs trouvés en Espagne dont les parents et le lieu de naissance sont inconnus) ;

- de parents apatrides ;

- de parents étrangers quand leur législation nationale n'attribue pas la nationalité à l'enfant.

Enfant né en territoire portugais :

- quand ils n'ont pas d'autre nationalité.

A défaut de preuve contraire, sont présumés nés en territoire portugais ou sous-administration portugaise, les nouveaux-nés abandonnés en territoire portugais.

Enfant trouvé sur le territoire d'un Etat fédéré : considéré comme allemand (car présumé descendant de parents allemands), sauf preuve contraire.

Enfant trouvé sur le territoire des Pays-Bas sauf s'il s'avère dans un délai de 5 ans que l'enfant possède une nationalité étrangère.

- lorsque l'un au moins de ses parents y est né lui-même (dans ce cas, possibilité de répudiation dans les six mois précédant sa majorité et les douze mois la suivant
(droit du sol double).

-

 
 

- lorsque l'un de ses parents y est né lui-même.
(droit du sol double).

 
 
 

ATTRIBUTION OU ACQUISITION AUTOMATIQUE (OU PAR DÉCLARATION DES PARENTS) DE LA NATIONALITÉ
EN RAISON DE LA NAISSANCE SUR LE TERRITOIRE ET DE LA RÉSIDENCE DES PARENTS SUR LE TERRITOIRE

France

Belgique

Grande-Bretagne

Italie

Espagne

Portugal

R.F.A.

Pays-Bas

 

Enfant né en Belgique

- lorsque l'un de ses parents y est né lui-même et y a eu sa résidence principale durant 5 ans au cours des 10 ans précédant la naissance de l'enfant.

- lorsqu'il a sa résidence principale en Belgique depuis sa naissance et que ses parents ont leur résidence principale en Belgique depuis 10 ans et font une déclaration pour réclamer l'attribution de la nationalité belge pour l'enfant avant ses douze ans.

Enfant né au Royaume-Uni :

lorsque l'un des parents est régulièrement établi au Royaume-Uni.

 
 

- Enfant né au Portugal

- de parents étrangers qui y ont leur résidence habituelle depuis au moins 6 ans s'ils sont des ressortissants des pays de langue officielle portugaise ou 10 ans dans les autres cas et qui n'y sont pas au service de leur Etat.

 

Enfant d'un père ou d'une mère qui au moment de la naissance de cet enfant réside aux Pays-Bas si ce père ou cette mère est lui-même né d'une mère résidant dans ce pays.

ACQUISITION DE LA NATIONALITE PAR MANIFESTATION DE VOLONTÉ,
DÉCLARATION OU OPTION DE L'INTERESSÉ EN RAISON DE LA NAISSANCE ET DE LA RESIDENCE SUR LE TERRITOIRE

France

Belgique

Grande-Bretagne

Italie

Espagne

Portugal

R.F.A.

Pays-Bas

Manifestation de volonté :

- entre 16 et 21 ans , souscrite par l'étranger né en France de parents étrangers s'il justifie d'une résidence habituelle en France pendant les 5 années précédentes (sauf si certaines condamnations entre 18 et 21 ans)

- Déclaration souscrite entre 18 et 30 ans par l'étranger né en Belgique et y ayant sa résidence principale depuis sa naissance .

- Par option, entre 18 et 22 ans , sous diverses conditions de résidence.

- Mineur né au Royaume-Uni de parents étrangers et y résidant depuis plus de 10 ans (sauf pour les résidents à Gibraltar).

- Étranger né en Italie qui y a résidé légalement sans interruption jusqu'à sa majorité s'il déclare vouloir acquérir la nationalité italienne dans l'année de cette majorité

- Étranger dont le père ou la mère ou l'un des ascendants en ligne directe au second degré sont italiens à raison de la naissance :

 
 
 

- Étranger majeur né au Pays-Bas qui depuis sa naissance y a son domicile ou son lieu de séjour réel, à condition qu'il n'ait pas encore atteint l'âge de 25 ans .

- Apatride né au Pays-Bas qui y a eu son domicile ou son lieu de séjour réel pendant au moins trois ans , à condition qu'il n'ait pas encore atteint l'âge de 25 ans .

 

- Possibilité de refus du tribunal de première instance pour faits personnels, manque de volonté d'intégration ou pour caractère insuffisant de la possession d'état alléguée.

 

- s'il accomplit son service militaire en Italie et déclare auparavant désirer acquérir la nationalité italienne ;
-s'il occupe un emploi public et déclare vouloir acquérir la nationalité italienne ;
- si à sa majorité, il réside légalement depuis au moins 2 ans en Italie et déclare vouloir acquérir la nationalité italienne, au cours de l'année suivante

 
 
 
 

ACQUISITION DE LA NATIONALITÉ EN RAISON DU MARIAGE

France

Belgique

Grande-Bretagne

Italie

Espagne

Portugal

R.F.A.

Pays-Bas

Aucun effet de plein droit.

Aucun effet de plein droit.

Aucun effet de plein droit.

Aucun effet de plein droit.

Aucun effet de plein droit.

Aucun effet de plein droit.

Aucun effet de plein droit.

Aucun effet de plein droit.

Mais possibilité d'acquisition par déclaration de la nationalité française par l'étranger ou l'apatride marié avec un conjoint français

Mais possibilité d'acquisition par déclaration de la nationalité belge par l'étranger marié avec un conjoint belge ou acquérant la nationalité belge pendant la durée du mariage.

Mais possibilité d'acquisition sur demande, à la discrétion du ministre de l'Intérieur.

Mais possibilité d'acquisition de la nationalité italienne par le conjoint étranger ou apatride.

Mais le conjoint d'un citoyen espagnol peut être naturalisé après seulement un an de résidence en Espagne.

Mais possibilité d'acquisition par déclaration faite pendant le mariage par l'étranger marié avec un conjoint portugais.

La déclaration de nullité ou d'annulation du mariage est sans objet sur la nationalité acquise par le conjoint de bonne foi.

Mais possibilité d'acquisition par naturalisation facilitée (même après le décès du conjoint allemand ou même après divorce si le demandeur a la charge d'un enfant allemand né du mariage : dans le délai d'un an).

Mais possibilité de naturalisation sans condition de stage.

Condition : deux ans de mariage et maintien de la communauté de vie (sauf si naissance d'un enfant).

Condition : trois ans de résidence commune en Belgique (ou six mois seulement si l'intéressé a été admis au séjour en Belgique
depuis au moins trois ans).

Condition : trois ans de résidence régulière.

Condition : au moins six mois de résidence en Italie ou trois ans de mariage.

Condition : un an de mariage.

Condition : trois ans de mariage.

Conditions :

- celles de la naturalisation ;

Condition : trois ans de mariage avec un néerlandais.

France

Belgique

Grande-Bretagne

Italie

Espagne

Portugal

R.F.A.

Pays-Bas

 
 
 
 
 
 

- en outre :

. perdre ou abandonner la nationalité anté-rieure ;

. être intégré à la vie allemande ;

. que les intérêts supérieurs de la RFA ou les relations entre États ne s'y opposent pas.

 

Possibilité d'opposition du Gouvernement pour indignité ou défaut d'assimilation.

Possibilité pour le tribunal de première instance de surseoir (pour deux ans maximum) pour apprécier la volonté d'intégration.

 

L'acquisition de la nationalité est exclue si l'intéressé a été condamné par l'autorité judiciaire italienne.

 
 
 
 

ACQUISITION DE LA NATIONALITÉ PAR UN MINEUR PAR EFFET COLLECTIF D'UN ACTE D'ACQUISITION PAR UN PARENT

 
 
 
 
 
 
 

France

Belgique

Grande-Bretagne

Italie

Espagne

Portugal

R.F.A.

Pays-Bas

L'acquisition de la nationalité par un parent emporte de plein droit attribution de la nationalité à l'enfant mineur (légitime ou naturel) s'il a la même résidence habituelle que ce parent .

L'acquisition volontaire de la nationalité emporte de plein droit attribution de la nationalité à l'enfant mineur (y compris adopté).

L'acquisition de la nationalité par un parent ou son établissement permet l'enregistrement de plein droit des enfants mineurs aux fins d'acquérir la nationalité britannique sous condition qu'ils aient passés les dix premières années de leur vie sur le territoire britannique.

Acquisition de la nationalité italienne par les enfants mineurs de celui qui acquiert la nationalité italienne, s'ils habitent avec lui (mais ils peuvent y renoncer après leur majorité).

Pas d'effet automatique mais droit d'option ouvert à ceux qui sont ou ont été assujettis à la puissance paternelle d'un espagnol.

Acquisition de la nationalité portugaise par déclaration.

La naturalisation, sauf réserve dans l'acte de naturalisation, produit ses effets à l'égard des enfants du naturalisé, sauf à l'égard de ses filles mariées ou qui l'ont été.

Obtention de
la nationalité néerlandaise par l'enfant mineur
(y compris adopté) d'un parent à qui a été octroyée cette nationalité, sauf réserve dans le décret.

ACQUISITION DE LA NATIONALITÉ PAR DÉCISION DE L'AUTORITÉ PUBLIQUE : NATURALISATION

 
 
 
 
 
 

France

Belgique

Grande-Bretagne

Italie

Espagne

Portugal

R.F.A.

Pays-Bas

- Décision : décret

- Décision : vote du Parlement (après enquête, faite par le parquet du tribunal de première instance du lieu de résidence, sur l'existence éventuelle de faits personnels graves et sur la volonté d'intégration).

- Décision : ministre de l'Intérieur.

- Décision : Président de la République , par décret, sur avis obligatoire mais non contraignant du Conseil d'État.

- Décision : ministère de la justice

- Décision : Gouvernement.

- Décision : autorités administratives
(au niveau des Länder).

- Décision : Gouvernement.

- Conditions de naturalisation :

. 18 ans au moins  ;

. bonne vie et moeurs ;

. absence de condamnation ;

. assimilation, connaissance de la langue ;

- Conditions de naturalisation : .

. 18 ans au moins

- Conditions de naturalisation :

. 18 ans au moins

. assimilation, connaissance de la langue

. intention de fixer sa résidence habituelle au Royaume-Uni.

- Conditions de naturalisation :

. être né en Italie ou avoir un ascendant italien et y résider légalement depuis au moins trois ans ou avoir été adopté par un Italien et résider légalement en Italie depuis au moins cinq ans ;

- Conditions de naturalisation :

. fournir des titres exceptionnels. Dans ce cas la décision est du ressort discrétionnaire du Chef de l'État ;
ou
. bonne conduite civique et degré suffisant d'intégration ;

- Conditions de naturalisation :

. majeurs ou émancipés
. disposer des capacités morales et civiles :
. avoir une connaissance suffisante de la langue et justifier d'un lien effectif avec la communauté nationale ;

- Conditions de naturalisation :

.
avoir la pleine capacité d'exercice des droits d'après les lois de son État d'origine ou être susceptible d'avoir cette capacité aux termes des lois allemandes ;

- Conditions de naturalisation :

. être majeur ;

. pas d'objection au séjour d'une durée indéterminée ;

. assimilation (connaissance de la langue)

 
 
 
 
 
 
 
 

France

Belgique

Grande-Bretagne

Italie

Espagne

Portugal

R.F.A.

Pays-Bas

 
 
 

. ou avoir servi pendant cinq ans l'État italien, même à l'étranger ;

 

disposer des facultés pour mener sa vie et assurer sa substance.

. ne donner lieu à aucun motif d'expulsion selon la loi sur les étrangers

 
 
 
 

. ou être ressor-tissant de la CEE et y résider légalement depuis au moins quatre ans ;
. ou être apatride et résider légalement en Italie depuis au moins 5 ans ;
. ou résider légalement en Italie depuis au moins 10 ans

 
 

. être propriétaire d'un appartement ou avoir un logement ; . être en état de pourvoir à ses besoins et à ceux de sa famille

 

. cinq ans au moins de résidence (ce stage peut être réduit à deux ans ou ne pas être exigé, sous diverses conditions).

. cinq ans au moins de résidence (ce stage peut être réduit à trois ans si la personne est reconnue réfugié ou apatride).

. cinq ans au moins de résidence régulière.

 

. dix ans au moins de résidence ;
. deux ans seulement de résidence pour les ressortissants des Républiques ibéroaméricaines, d'Andorre, des Philippines, de Guinée Équatoriale et du Portugal.

. six ans au moins de résidence sur le territoire ou sous l'administration portugaise pour les ressortissants des pays de langue portugaise,10 ans au moins pour les autres ;

Pas de durée minimale de séjour fixée par la loi mais durée d'au moins 10 ans prévue par les directives administratives.

Naturalisation facilitée pour les jeunes étrangers âgés de 16 à 23 ans à condition :

. cinq ans minimum de séjour aux Pays-Bas immédiatement avant la demande (ou deux ans avant la demande si séjour total d'au moins dix ans ou trois ans si cohabitation avec un néerlandais) ;

 
 
 
 
 
 
 
 

France

Belgique

Grande-Bretagne

Italie

Espagne

Portugal

R.F.A.

Pays-Bas

 
 
 
 

Les ressortissants d'autres pays d'origine séphardite sont aussi compris dans cette exception ;
. cinq ans pour les réfugiés ;

- un an pour ceux qui sont nés en territoire espagnol, ceux qui sont nés à l'étranger d'un parent au moins qui aurait été espagnol d'origine et ceux qui n'ont pas exercé à temps leur droit d'option (et ceux qui sont mariés depuis plus d'un an avec un Espagnol ou veuf ou veuve d'un(e) Espagnol).

 

-de résider légalement en Allemagne depuis 8 ans

-d'avoir accompli en Allemagne 6 années de scolarité, dont 4 dans un établissement d'enseignement général;

-de n'avoir encouru aucune peine majeure prévue par la loi.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

France

Belgique

Grande-Bretagne

Italie

Espagne

Portugal

R.F.A.

Pays-Bas

 
 
 

- Le Gouvernement a la faculté dans des cas exceptionnels et des circonstances particulières

 

- Les conditions de résidence et de connaissance de la langue peuvent ne pas être exigées

- La réunion de ces conditions ne donne aucun droit à la nationalité dont l'octroi dépend

Refus si présomptions sérieuses de danger pour ordre public et bonnes moeurs ou si

 
 
 

d'accorder la nationalité à des personnes ne rentrant pas dans les cas ci-dessus visés.

 

pour ceux qui avaient eu la nationalité portugaise, qui sont descendants de Portugais et pour les étrangers qui ont rendu ou sont appelés à rendre des services notables à l'État portugais.

toujours de l'appréciation discrétionnaire des autorités et ne se justifie que par l'existence d'un intérêt public.

- L'intéressé doit renoncer à sa nationalité d'origine.

le demandeur n'est pas disposé à faire ce qui est possible pour perdre sa nationalité d'origine

- Effets de la naturalisation : tous les droits et obligations.

- Effets de la naturalisation : tous les droits et obligations.

- Effets de la naturalisation : tous les droits et obligations.

- Celui qui est naturalisé doit prêter serment de demeurer fidèle à la République et d'observer les lois de l'État.

- Trois conditions doivent être remplies dans les 180 jours qui suivent la notification de naturalisation :
- renonciation
à la nationalité antérieure ;
- inscription au registre d'état-civil ;

- prestation de serment de fidélité.

 

- Effets de la naturalisation : tous les droits et obligations.

Perte de la nationalité d'origine.


                                                        

RECOUVREMENT DE LA NATIONALITÉ

France

Belgique

Grande-Bretagne

Italie

Espagne

Portugal

R.F.A.

Pays-Bas

- Par décret :

.
si l'intéressé établit avoir possédé la qualité de Français ;

. mêmes règles que pour la naturalisation mais aucune condition d'âge et de stage.

- Par déclaration :

. conditions :

- avoir été belge de naissance ;

- être majeur ;

- avoir résidé en Belgique durant les douze mois qui précèdent (le recouvrement est cependant possible même en cas de résidence à l'étranger, mais alors sous réserve d'une enquête spéciale).

- Par décision du ministre de l'Intérieur :

. si l'intéressé établit avoir possédé la qualité de citoyen britannique ;

. mêmes règles que pour la naturalisation mais aucune condition de durée de résidence.

Acquiert de nouveau la nationalité italienne après l'avoir perdue :

- celui qui accomplit son service militaire en Italie ou devient fonctionnaire de l'Etat italien ;

- celui qui déclare vouloir l'acquérir à nouveau et qui, dans l'année de cette déclaration, a fixé ou fixe sa résidence personnelle en Italie ;

Acquiert de nouveau la nationalité espagnole après l'avoir perdue :

- celui qui réside légalement en Espagne (sauf émi-grants et enfants d'émigrants) et déclare sa volonté de récupérer la nationalité espa-gnole et sa renonciation à la nationalité anté-rieure (et s'il fait inscrire la récupération dans le registre de l'état civil).

Les personnes majeures qui ont eu la nationalité portugaise ou sont réputées être descendantes de portugais peuvent être dispensées des conditions de résidence au Portugal, de connaissance de la langue et de justification d'un lien effectif avec la communauté portugaise qui sont normalement exigées pour la naturalisation.

Un ancien ressortissant allemand, ou son descendant, ou une personne adoptée par lui, peut être naturalisé sur sa demande si :

- il a la pleine capacité d'exercice de ses droits d'après les lois de sa patrie actuelle ou l'aurait aux termes des lois allemandes ;

- il ne donne lieu à aucun motif d'expulsion selon la loi sur les étrangers.

Naturalisation sans condition de stage.

 
 
 

- celui qui a établi sa résidence depuis plus d'un an en Italie, sauf renonciation expresse dans le même délai ;.

Autorisation préalable du Gouvernement nécessaire si condamnations ou service militaire non effectué.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

France

Belgique

Grande-Bretagne

Italie

Espagne

Portugal

R.F.A.

Pays-Bas

- Par déclaration :

. conditions :

- être français d'origine ;

- avoir perdu la nationalité par mariage ou acquisition d'une nationalité étrangère par mesure individuelle ;

- avoir des liens manifestes avec la France.

. Empêchement si certaines condamnations ou mesures d'éloignement.

 
 

- celui qui réside depuis deux ans en Italie si la perte de la nationalité italienne résulte de services civils ou militaires pour un Etat étranger, à condition qu'il ait abandonné l'emploi public ou les obligations militaires ayant entraîné la perte de la nationalité.

Dans les trois derniers cas, le Gouvernement peut faire opposition, sur avis conforme du Conseil d'Etat.

 
 
 
 


1 Le compte-rendu de ces auditions figure en annexe du présent rapport.

2 On trouvera en annexe du présent rapport le compte-rendu de l'audition de M. Patrick Weil par votre commission des Lois.

3 L'acquisition de la nationalité française par la procédure de manifestation de volonté pour les jeunes étrangers âgés de 16 à 21 ans. Synthèse de l'état des lieux en Alsace - Cahiers de l'observatoire régional de l'intégration et de la ville - n° 22 - mai 1997

4 Sondage réalisé par l'IFOP et publié dans Le Figaro daté du 1er décembre 1997.

5 cf. annexe III du présent rapport.

6 Il est vrai que le mode de peuplement des Etats-Unis explique pour une large part cette option.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page