C. LES GRANDS ENJEUX DE L'AUDIOVISUEL EXTÉRIEUR
Régionalisation, amélioration et enrichissement des programmes, mise en cohérence des activités des uns et des autres, ces orientations s'appuient sur deux impératifs : la participation de nos opérateurs aux bouquets numériques, la mise en place d'un programme d'information française tourné vers l'international. D'autres efforts, peut-être moins visibles, doivent également être encouragés : l'aide à l'exportation de programmes français -TVFI international fait déjà un excellent travail- mais aussi l'aide au sous-titrage ou au doublage. Ce sont là des actions étroitement liées à la promotion audiovisuelle française.
1. L'introuvable chaîne d'actualité vitrine de la France
Le constat est désormais fait par beaucoup, et en tout
cas partagé par votre rapporteur, de la nécessité d'un
programme d'information télévisée spécifique dans
le cadre de notre action télévisuelle extérieure.
L'idée d'une nouvelle "chaîne-vitrine", diffusant informations et
magazines, analysée par MM. Michel Meyer et Jean-Paul Cluzel dans leurs
travaux respectifs, avait un double objectif :
- " présenter au monde une image de la France dans sa
diversité,
- donner le point de vue de la France sur l'actualité internationale
(...) "
4(
*
)
.
En effet, face à la concurrence de nos partenaires américains et
européens, BBC World, Deutsche Welle TV, RTVE espagnole ou RAI italienne
et pour le privé, Sky News, CNN, EBN, CNBC... le dispositif
français fondé sur LCI -à dominante hexagonale, ou
Euronews- apparaît faible ou inadapté.
Fort de ce constat, M. Jean-Paul Cluzel avait élaboré trois
options différenciées par leurs ambitions et évidemment
par leur coût respectif :
- un socle de " chaîne vitrine " (coût estimé 50
MF). Il s'agirait d'étoffer l'existant en regroupant les moyens
disponibles -actualités de TV5 et CFI, en ne recrutant qu'un nombre
limité de personnels supplémentaires, et recourant aux sources
d'images disponibles : France Télévision, partenaires de TV5,
Euronews, AITV, magazines de CFI... La chaîne n'aurait donc certes pas de
canal de diffusion propre mais instillerait plus d'informations (deux heures
trente par jour) au profit des programmes des opérateurs existants, en
particulier TV5.
- Une chaîne vitrine (coût estimé 220 MF). Son format serait
fondé sur un cycle horaire, diffusant 24 h/24 et présentant une
édition, des dossiers et des magazines. Des déclinaisons
régionales et des versions linguistiques différentes seraient
prévues -anglais, arabe, espagnol, portugais, chinois voire hindou,
selon les régions visées. Pour la diffusion, le recours à
l'existant TV5 serait complété par une substitution dans bien des
cas de la " chaîne vitrine " à CFI sur ses canaux de
diffusion directe.
- Une option intermédiaire entre le "socle" et la "chaîne
vitrine"
(coût estimé 171 MF) reprendrait, en réduisant sa
durée et en français uniquement, les principes de base de la
chaîne vitrine et prévoyant des rediffusions plus
fréquentes.
Ces trois propositions dont deux se heurteraient vraisemblablement à
l'obstacle financier, ont eu le mérite de clarifier un débat
récurrent, sur l'opportunité d'une chaîne francophone
spécialisée dans l'information internationale vue de France.
Pour votre rapporteur, ce type de programme doit en tout état de cause
trouver sa place au sein de l'offre française.
2. La nécessaire présence française sur les bouquets numériques
Le renforcement de l'offre de programmes par la constitution
de bouquets de programmes de radio et de télévision francophones
dans toutes les zones était une des trois priorités
énoncées par le CAEF du 23 novembre 1995. L'objectif
identifié dans le rapport précité, était de
regrouper, aux côtés d'une chaîne généraliste,
des chaînes thématiques, publiques et privées. Dans un
premier temps, l'Etat prendrait en charge les coûts de diffusion, les
droits de diffusion étant assumés par les opérateurs. La
prise en charge par l'Etat serait dégressive, au fur et à mesure
des rentrées de recettes commerciales dégagées par les
opérateurs. Cette stratégie requiert la mise en place de
ressources financières adaptées, qui font encore largement
défaut.
Pour les systèmes de satellites de réception directe, où
les capacités de diffusion sont beaucoup plus larges que sur le
câble, l'offre française type pourrait être la suivante,
telle qu'analysée dans le rapport :
- une chaîne généraliste TV5,
- (une chaîne d'information),
- une chaîne musicale (MCM International),
- une ou deux chaînes culturelles ou éducatives : Arte et la
Cinquième,
- selon les zones, des chaînes thématiques à destination
des adolescents (Teletoon de TPS, AB Cartoon d'AB Sat), ou proposant des
documentaires (Planète, Odyssée, voire Paris Première).
En
Afrique
a été mis en route, en 1997, un bouquet
francophone porté par Portinvest -filiale de la Sofirad, sur financement
conjoint du ministère des affaires étrangères et du
secrétariat d'Etat à la coopération. Ce bouquet en voie de
finalisation rassemblerait beaucoup d'intervenants Euronews, AB Jeunesse, MCM
Afrique, la Cinquième, Arte, Planète ainsi que CFI, TV5 et Canal
Horizon. La radio serait présente avec RFI et Radio Nova.
En
Europe
, les chaînes françaises présentes depuis
1995 sont en position favorable dans le bouquet regroupant TV5, MCMI, Canal
Horizon, Euronews et la Cinquième, Arte, ainsi que France-Inter, France
Info et France Culture Europe.
Aux
Etats-Unis
se dessine enfin la réalisation du projet TV5 USA
qui, sous réserve d'un financement adapté, pourrait
réunir, à terme, autour de TV5, la Cinquième, Arte, Paris
Première en version internationale et MCMI.
L'Amérique latine
peut être un tremplin pour notre
développement audiovisuel dans un continent où la demande est
forte et diversifiée. Les quelque quarante opérateurs latino
américains ont témoigné de leur intérêt pour
des programmes français sous quelques conditions : qualité,
doublage ou sous-titrage en espagnol, tarifs concurrentiels. Deux
opérateurs en satellite de réception directe, Direct TV et Sky
Latin America pourraient se voir proposer des offres françaises autour
de TV5.
En
Asie
, enfin, depuis l'été 1996, TV5 et MCMI,
bientôt rejointes par RFI, sont diffusées en numérique sur
Asiasat 2 dans le cadre d'une offre européenne regroupant la RAI, RTVE
ou Deutsche Welle. Les résultats positifs de cette diffusion sont
encourageants, surtout en ce qui concerne le Japon où des
opportunités s'ouvrent.
3. Quelle organisation pour l'audiovisuel extérieur ?
Au début de l'année prochaine, le gouvernement
décidera de la configuration institutionnelle de notre audiovisuel
extérieur sur la base des deux études successives de MM. Cluzel
et Imhaus.
Des quelques informations recueillies par votre rapporteur, il apparaît
que les ultimes propositions de M. Imhaus ne donneraient pas suite à
l'idée d'un pôle audiovisuel extérieur rassemblant les
opérateurs actuels du secteur ; l'idée serait plutôt de
fédérer les moyens et les expériences
existants :
sur le plan des opérateurs autour de France Télévision
incitée,
volens nolens,
à s'impliquer davantage dans
l'international ; sur le plan de l'autorité politique autour de la
structure intergouvernementale (le CAEF) renforcée par un comité
stratégique rassemblant opérateurs et professionnels. Le tout
serait placé sous une autorité politique unique chargée de
concevoir une stratégie et d'en assurer la mise en oeuvre.
CFI
serait -à l'exception de l'Afrique- recentrée sur sa vocation
de banque de programme.
Le projet de " chaîne info " ne serait plus aussi
privilégié que ne le préconisait M. Cluzel. On reviendrait
à un profil moins ambitieux, consistant en un enrichissement du
dispositif actuel en recourant à tous les partenaires possibles AFP,
RFO, France télévision... Enfin, Internet deviendrait un champ
systématique de développement de la présence francophone.
Votre rapporteur, à ce stade de la réflexion en cours, n'est pas
d'avis que des performances significative naîtront d'un bouleversement
des structures. A tout le moins conviendrait-il de privilégier la
cohérence des moyens -publics mais aussi privés, impliqués
dans l'international-, et de la décision, faute de quoi
l'éparpillement des responsabilités et des initiatives, aussi
méritoires soient ces dernières, se retournerait finalement
contre le dispositif actuel.