II. L'IMPACT DE LA MODULATION GÉOGRAPHIQUE DU CRÉDIT D'IMPÔT-RECHERCHE SUR LA LOCALISATION DES ENTREPRISES
Soucieuse de mieux répartir sur le territoire la recherche française, la loi précitée d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire a institué un dispositif fiscal pour accroître la recherche dans les zones les plus fragiles du territoire. Plus précisément, l'article 15 de la loi instaurait une modulation du bénéfice du système du crédit d'impôt recherche en fonction de la localisation géographique les chercheurs de l'entreprise bénéficiaire, afin de créer une discrimination positive en faveur des zones reculées.
DISPOSITIF DE MODULATION DU CRÉDIT D'IMPÔT-RECHERCHE
L'article 15 de la loi d'orientation a modifié le
taux forfaitaire de prise en compte des dépenses de fonctionnement dans
l'assiette du crédit d'impôt-recherche.
Antérieurement fixés à 75 % celles-ci ont
été modulées en fonction de la localisation du personnel
de recherche. Les dépenses de fonctionnement sont, depuis
l'exercice 1995, prises en compte aux taux de :
- 100 % si elles correspondent aux dépenses de personnel
affectées exclusivement dans les territoires ruraux de
développement prioritaires (TRDP) et dans les zones d'aménagement
du territoire (ZAT) ;
- 65 % pour les dépenses de personnels qui exercent leur
activité en région Ile-de-France ;
- 75 % dans les autres cas.
Deux ans et demi après le vote de cette disposition, votre commission
souhaite en dresser un premier bilan. En effet, lors de l'examen du projet de
loi de finances pour 1997, il n'avait pas été possible à
l'Administration de discerner ses effets précis puisque les fiches
déclaratives correspondant à l'exercice fiscal 1996
n'avaient pas toutes été reçues. Or, cette disposition
portant sur les dépenses retenues pour le calcul du crédit
d'impôt de l'année 1995, elle s'appliquait sur les
dépenses déclarées par les entreprises en 1996.
Le premier bilan de cette mesure apparaît relativement contrasté.
L'effet sur les entreprises existantes
paraît faible : cette
mesure ne serait pour elles que peu incitative, eu égard aux contraintes
résultant d'un changement d'implantation de leurs équipes de
recherche.
Ainsi, les entreprises bénéficiaires du crédit
d'impôt-recherche déjà implantées en région
parisienne, par exemple, ne sont que dans de faibles proportions allées
s'installer dans des régions où les conditions d'application de
cette mesure étaient plus intéressantes.
Cette situation n'est pas inattendue : les entreprises
bénéficiaires du crédit d'impôt-recherche sont
à 90 % des PME, bien intégrées dans leur
région, qui ont généralement procédé
à un recrutement local de leurs salariés. Les chefs de projets
représentent bien souvent la mémoire scientifique de la
société : une délocalisation de l'entreprise aurait
nécessité une mobilité géographique de ces
personnels indispensables à la performance technique de l'entreprise.
C'est donc plus sur les créations d'entreprises
que ce
dispositif peut influer, d'autant que certaines des zones concernées
bénéficient en outre de l'exonération fiscale pour les
entreprises nouvelles. 782 entreprises nouvelles ont déposé
une déclaration de crédit d'impôt-recherche au titre de
l'année 1995.
Toutefois, les premières statistiques font ressortir un effet
d'incitation mesuré. L'administration n'a communiqué à
votre rapporteur pour avis que les données agrégées par
régions, qui font moins ressortir l'effet de cette mesure qu'une
ventilation statistique par zone concernée (Territoires ruraux de
développement prioritaires et zones d'aménagement du territoire).
La répartition régionale des bénéficiaires du
crédit d'impôt-recherche est la suivante :
Le Gouvernement n'exclut pas que ce dispositif puisse
être réexaminé, dans le cadre de la mission confiée
à M. Henri Guillaume, ancien président de l'agence nationale
de valorisation de la recherche sur le développement technologique.
Votre commission souhaite que soit menée plus avant l'indispensable
évaluation de ce dispositif avant toute décision. En tout
état de cause, il serait néfaste de remettre en cause le volet
" recherche " de la loi précitée d'aménagement
du territoire du 4 février 1995 avant même qu'il ait
été totalement mis en oeuvre. Ce serait pour les territoires
concernés un signal fort -et inacceptable- du
désintérêt du Gouvernement à leur égard.