Avis N°87 tome 7 - Projet de loi de finances pour 1998 - Recherche
M. Jean-Marie RAUSCH, Sénateur
Commission des Affaires économiques et du Plan - Avis N°87 - 1997/1998
Table des matières
-
CHAPITRE IER -
LES PRIORITÉS BUDGÉTAIRES- I. LES CRÉDITS DU BUDGET CIVIL DE RECHERCHE ET DE DÉVELOPPEMENT DEMANDÉS POUR 1998
- II. LES CRÉDITS DU MINISTÈRE DE LA RECHERCHE
- III. LES CRÉDITS ATTRIBUÉS AUX GRANDS ORGANISMES PAR LE MINISTÈRE CHARGÉ DE LA RECHERCHE
-
CHAPITRE II -
UN EFFORT DE RÉGIONALISATION À POURSUIVRE -
CHAPITRE III -
FAVORISER L'ACCÈS DES PETITES ENTREPRISES À L'INNOVATION -
CHAPITRE IV -
LA POLITIQUE DE L'ESPACE - EXAMEN PAR LA COMMISSION
N° 87
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME VII
RECHERCHE
Par M. Jean-Marie RAUSCH,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM. Jean
François-Poncet,
président
; Philippe François,
Henri Revol, Jean Huchon, Fernand Tardy, Gérard César, Louis
Minetti,
vice-présidents
; Georges Berchet, William Chervy,
Jean-Paul Émin, Louis Moinard,
secrétaires
; Louis
Althapé, Alphonse Arzel, Mme Janine Bardou, MM. Michel Barnier, Bernard
Barraux, Michel Bécot, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer,
Jacques Braconnier, Gérard Braun, Dominique Braye, Michel Charzat,
Marcel-Pierre Cleach, Roland Courteau, Désiré Debavelaere,
Gérard Delfau, Fernand Demilly, Marcel Deneux, Rodolphe
Désiré, Michel Doublet, Mme Josette Durrieu, MM. Bernard
Dussaut
,
Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Hilaire Flandre, Aubert
Garcia, François Gerbaud, Charles Ginésy, Jean Grandon, Francis
Grignon, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson,
Rémi Herment, Bernard Hugo, Bernard Joly, Gérard Larcher, Edmond
Lauret, Pierre Lefebvre, Jean-François Le Grand, Kléber
Malécot, Jacques de Menou, Louis Mercier, Jean-Baptiste Motroni,
Jean-Marc Pastor, Jean Pépin, Daniel Percheron, Jean Peyrafitte, Bernard
Piras, Alain Pluchet, Jean Pourchet, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Paul
Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Roger Rigaudière, Roger
Rinchet, Jean-Jacques Robert, Jacques Rocca Serra, Josselin de Rohan,
Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, M. Henri Weber.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
230
,
305
à
310
et T.A.
24
.
Sénat
:
84
et
85
(annexe n°
16
)
(1997-1998).
Lois de finances. |
Mesdames, Messieurs,
L'effort de recherche d'un pays est le meilleur garant de son avenir. Promesse
de croissance, promesse d'innovation, promesse d'emplois, la recherche doit
être une priorité forte de toute action politique. Pour autant, la
maîtrise de la dépense publique devient plus que jamais une
nécessité pour notre économie. C'est dans cet esprit que
votre commission a examiné les crédits demandés au titre
de la recherche dans le projet de loi de finances pour 1998.
Le changement de Gouvernement s'est traduit par une modification des structures
ministérielles : le secrétariat à la recherche,
anciennement placé auprès du ministre de l'éducation
nationale, a disparu, pour laisser la place à un grand ministère
de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. En
outre, le périmètre budgétaire de ce ministère
s'est élargi puisqu'il comprend désormais les crédits
relatifs à l'espace et au bureau de recherches géologiques et
minières, qui figuraient auparavant au budget du ministère de
l'industrie.
Les crédits demandés pour 1998 au titre du budget civil de
recherche et développement s'élèvent à
53 milliards de francs, en augmentation de
1,4 %
par
rapport à la loi de finances initiale pour 1997.
Au-delà de l'analyse des évolutions budgétaires,
l'accès des petites entreprises à l'innovation, l'effort de
déconcentration de la recherche publique et la politique de l'espace
constituent cette année les trois axes majeurs de la réflexion de
votre commission.
CHAPITRE IER -
LES PRIORITÉS
BUDGÉTAIRES
L'effort budgétaire de l'État pour la recherche
ne se limite pas aux crédits du Ministère chargé de la
Recherche, qui n'en représentent qu'environ les trois-quarts. En effet,
les crédits destinés à la recherche sont répartis
entre plusieurs départements ministériels.
Aussi, la loi du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation
pour la recherche et le développement technologique de la France, que
votre rapporteur pour avis avait eu l'honneur de rapporter, avait-elle
créé le concept de "
budget civil de recherche et de
développement technologique
" (BCRD), qui rassemble l'ensemble
des crédits de l'État affectés à la recherche
civile, à l'exception de la contribution française à la
recherche communautaire et de la dépense fiscale
représentée par le crédit d'impôt-recherche.
Il paraît donc intéressant d'examiner l'évolution
budgétaire de cet agrégat, qui est aussi un instrument
interministériel de pilotage et de ne pas se cantonner aux seules
dépenses du Ministère de la Recherche.
I. LES CRÉDITS DU BUDGET CIVIL DE RECHERCHE ET DE DÉVELOPPEMENT DEMANDÉS POUR 1998
A. UN BCRD EN PROGRESSION GLOBALE DE 1,4 %
Les crédits demandés par le Gouvernement au
titre de la recherche (BCRD) pour 1997 s'élèvent à
53,05 milliards de francs (dépenses ordinaires + crédits de
paiement), soit une hausse de 1,4 % en francs courants par rapport
à la Loi de Finances initiale pour 1997.
Toutefois, 110 millions de francs ont été
transférées comptablement du budget de l'Industrie au BCRD et
40 millions de francs correspondent à un nouvel assujettissement
à la TVA, qui entraîne donc une recette équivalente pour le
ministère des finances.
Aussi l'augmentation réelle du BCRD
à pérmimètre constant n'est-elle que de 1,1 %.
Cette légère augmentation fait suite à une baisse de
1,37 % des crédits demandés par la Loi de Finances pour 1997.
L'évolution du BCRD renoue donc cette année avec la tendance des
années précédentes, comme le montre le graphique suivant :
B. UNE ÉVOLUTION CONTRASTÉE DES DIFFÉRENTES CATÉGORIES DE DÉPENSES
Les principales évolutions de crédits sont détaillées dans le tableau suivant :
BCRD - CRÉDITS DEMANDÉS POUR 1998
CATÉGORIE DE CRÉDITS |
CRÉDITS DEMANDÉS POUR 1998 |
VARIATION PAR RAPPORT À 1997 |
DÉPENSES ORDINAIRES (DO)
|
30,9
|
+ 2,6 %
|
TOTAL (DO + CP) |
53,05 |
+ 1,4 % |
AUTORISATIONS DE PROGRAMME |
22,3 |
+ 1,9 % |
(en milliards de francs)
1. Des dépenses ordinaires en augmentation
Les crédits demandés au titre des
dépenses ordinaires
augmentent de 2,6 % en francs courants
.
La part des dépenses ordinaires -soit un total de 30,9 milliards de
francs-
s'accroît au sein du BCRD
puisqu'elle représente
58,2 % des crédits demandés contre 57,8 % en 1997. Le
Gouvernement a donc choisi de faire des dépenses ordinaires des
administrations et des laboratoires le principal bénéficiaire de
l'accroissement budgétaire consenti.
2. Les dépenses en capital
Les crédits de paiement
demandés pour
1998 sont en légère régression (-0,2 %) par rapport
à 1997. Au total, les crédits de paiement demandés
s'élèvent à 22,2 milliards de francs, soit
41,7 % du BCRD.
Les autorisations de programme
augmentent de
1,9 %. Par ailleurs, le Gouvernement souligne qu'une économie de
300 millions de francs est réalisée sur les grands
équipements de recherche.
Votre commission s'inquiète du devenir de ces grands
équipements de recherche.
En effet, la décision d'implantation du projet SOLEIL a
été " gelée "
, comme l'a annoncé le
ministre au Sénat le jeudi 9 octobre dernier. Une dizaine de
régions a déjà fait part de son intérêt pour
l'accueil de ce projet, qui est un enjeu majeur pour la recherche
française. Retarder le moment du choix de son lieu d'implantation et de
son lancement ne paraît pas de bon augure à votre commission pour
l'avenir de ce projet.
LE PROJET SOLEIL
Le projet SOLEIL a pour objectif de doter la France d'une
source nationale de rayonnement synchrotron, dite " de troisième
génération ". Ce grand équipement de recherche est
conçu pour remplacer le Laboratoire d'utilisation du rayonnement
électromagnétique (LURE) d'Orsay devenu obsolète. Il
interviendra en complément de la source européenne de l'ERSF
(European Synchrotron Radiation Facility), implantée à Grenoble,
qui ne peut répondre à toutes les demandes des chercheurs du
secteur public et de l'industrie. En outre, SOLEIL doit couvrir une gamme
d'énergie de rayonnement différente de celle de l'ESRF et
permettre ainsi des travaux qui ne seraient pas possibles sur la source
européenne. Les flux de lumière des sources du LURE, environ
mille fois inférieurs à ceux des sources de troisième
génération, ne permettent pas les études de structures et
de dynamique de processus complexes vers lesquelles s'orientent les recherches
actuelles, tant en chimie qu'en physique des matériaux et en biologie.
Ce dernier secteur est devenu très demandeur, car la nouvelle
génération de sources permet d'analyser les conformations de
biomolécules de grandes dimensions ; ces nouvelles possibilités
sont d'une grande importance pour la compréhension des mécanismes
en sciences du vivant et en pharmacologie.
D'ailleurs, le conseil supérieur de la recherche et de la technologie,
dans son avis du 16 octobre dernier sur le projet de budget, regrettait la
décision de " gel " de l'implantation du projet Soleil
"
pourtant d'un grand intérêt scientifique
". Il
appelait de ses voeux "
une politique formulée sur le long
terme
" pour les grands équipements.
Bien plus, ce même avis constate que,
" bien que le
développement technologique ait souvent été
identifié comme une priorité, cela ne se traduit pas dans le BCRD
1998 de manière significative. Les crédits de soutien au
développement technologique (hors aéronautique civile)
stagnent
".
Le conseil constate, en effet, que les chapitres budgétaires 66-01 et
66-04, comprenant les dépenses en capitales relatives aux principales
aides à la recherche industrielle (ANVAR, FRT...) stagnent
(+ 0,15 % en crédits de paiement, + 0,8 % en
autorisations de programmes).
Notons toutefois que la dotation affectée aux programmes
aéronautiques civils (Airbus A340-500) progresse.
C. UNE INÉGALE RÉPARTITION DU BCRD
La ventilation par ministère des crédits
demandés fait apparaître une large prédominance des
ministères de la Recherche (74,6%) et de l'Industrie (11,91%).
Si on affine cette répartition par la mise en évidence des
dotations aux grands organismes de recherche inscrits au budget du
Ministère de la Recherche, on arrive à la ventilation suivante,
qui fait bien apparaître
les plus gros " consommateurs "
de
crédits
que sont le CNRS, le CEA, l'Espace et les autres organismes
de recherche :
II. LES CRÉDITS DU MINISTÈRE DE LA RECHERCHE
A. UN DÉPARTEMENT MINISTÉRIEL AUX ATTRIBUTIONS ET AU PÉRIMÈTRE BUDGÉTAIRE RENOUVELÉS
Le changement de Gouvernement a entraîné une
modification des structures ministérielles, puisque le
Secrétariat d'État disparaît et que la recherche se trouve
directement rattachée au Ministère de l'Éducation
nationale, de la Recherche et de la Technologie.
Ce dernier voit par ailleurs ses compétences, outre la mise en oeuvre de
"
la politique du Gouvernement dans le domaine de la recherche et
de la
technologie
" élargies à "
la politique de
l'espace
". De plus, le ministère "
participe à
la promotion et à la diffusion des nouvelles
technologies
"
1(
*
)
.
A la suite des modifications de structure intervenues, le
périmètre budgétaire du Ministère de l'Education
nationale, section " recherche ", se trouve ainsi modifié :
- inscription de la totalité des
crédits du Bureau de
Recherches Géologiques et Minières
, en provenance du budget
du Ministère de l'Industrie :
- chapitre 45-11 : 241 millions de francs de dépenses
ordinaires,
- chapitre 62-12 : 93,5 millions de francs de crédits de
paiement.
- inscription des
crédits du CNES
(Centre national
d'Études spatiales), en provenance du Ministère de la Poste, des
Télécommunications et de l'Espace :
- chapitre 36-90 : 915 millions de francs de dépenses
ordinaires ;
- chapitre 63-02 : 7,6 milliards de francs de crédits de
paiement.
- modification de la répartition de la
subvention de
fonctionnement du CEA
(Commissariat à l'Energie atomique),
répartie en 1998 à part égale entre industrie et
recherche. En conséquence, sont inscrits au budget recherche :
- chapitre 36-83 : 2,9 milliards de francs de dépenses
ordinaires (en augmentation de 828 millions, pour une baisse de
527 millions de francs de la contribution du Ministère de
l'Industrie, qui s'élève elle aussi à 2,9 milliards
de francs),
- chapitre 62-00 : 325 millions de francs de crédits de
paiement (montant égal, et en augmentation équivalente par
rapport à celui du budget de l'industrie).
- inscription des
crédits correspondants à la diffusion
des technologies du secteur spatial
, ouverts en 1997 au budget de la Poste,
des Télécommunications et de l'Espace :
- chapitre 66-04 " Soutien à la recherche et à la
technologie " : 790 millions de francs de crédits de paiement.
B. LA HAUSSE DES CRÉDITS DEMANDÉS POUR L'ADMINISTRATION DE LA RECHERCHE
Les crédits (dépenses ordinaires +
crédits de paiement) inscrits au titre de la recherche au budget
" Éducation nationale, recherche et technologie "
s'élèvent à
39,6 milliards de francs
, contre
38,4 milliards dans la Loi de Finances initiale pour 1997.
L'augmentation qui apparaît est de 3 %
mais celle-ci est peu
significative en raison des modifications de périmétre
budgétaire.
36,7 milliards
, soit 93 % du total, représentent les
dotations aux
organismes de recherche
(voir infra), en augmentation de
2,9 % ;
2,8 milliards
, soit 7 % du total sont consacrés
à
l'administration de la recherche
. Ils représentent une
augmentation de 4,4 % et se décomposent de la façon suivante
:
CRÉDITS DEMANDÉS POUR 1998 POUR
L'ADMINISTRATION DE LA RECHERCHE
(en millions de francs)
INTITULÉ |
DÉPENSES ORDINAIRES |
ÉVOLUTION 1997-1998 |
CRÉDITS DE PAIEMENT |
ÉVOLUTION |
TOTAL
|
ÉVOLUTION |
Personnel |
83,29 |
+ 1,9 % |
- |
- |
83,29 |
+ 1,9 % |
Matériel et fonctionnement |
63,00 |
+ 2,5 % |
- |
- |
63,00 |
+ 2,5 % |
Frais de justice (chapitre 37-91) |
0,20 |
+ 0,0 % |
- |
- |
0,20 |
+ 0,01 % |
Actions d'incitation d'information et de consultation (chapitre 43-01) |
122,35 |
- 1,1 % |
- |
- |
122,35 |
- 1,1 % |
Formation à et par la recherche (1) (chapitre 56-06) |
1.720,00 |
+ 6,2 % |
- |
- |
1.720,00 |
+ 6,2 % |
Prospective et études (chapitre 56-06) |
- |
- |
7,00 |
- 22,2 % |
7,00 |
- 22,2 % |
Équipement administratif et technique (chapitre 57-02) |
- |
- |
6,00 |
+ 900 % |
6,00 |
+ 900 % |
Soutien à la recherche et à la technologie (2) |
- |
- |
790,80 |
+ 2,1 % |
790,80 |
+ 2,1 % |
Information et culture scientifique |
- |
- |
43,00 |
- 10,0 % |
43,00 |
- 10 % |
TOTAL |
1.988,84 |
+ 5,3 % |
846,8 |
+ 2,1 % |
2.835,64 |
+ 4,4 % |
(1) Il s'agit des allocations de recherche, des bourses, de
l'accueil des chercheurs post-doctorants et des CIFRE.
(2) Dont FRT
Notons que l'augmentation très importante du chapitre 57-02
(+ 900 %) correspond à une dotation de 6 millions de
francs nécessaire à la rénovation de
l'amphithéâtre Raymond Poincaré, dans les locaux du
ministère.
Le fascicule budgétaire " Recherche " isole quant à lui
l'agrégat " Administration de la recherche "
qui
intéresse
le ministère de la recherche stricto-sensu
(personnel, fonctionnement courant, équipement, construction et
entretien, études, dépenses liées à la mise en jeu
de la responsabilité de l'État). Il totalise
155 millions
de crédits
demandés pour 1998,
en augmentation forte de
5,5 %
.
Ces 155 millions recouvrent les moyens alloués à
l'administration centrale, aux délégués régionaux
à la recherche ainsi qu'au comité national d'évaluation de
la recherche, soit 311 emplois (dont 28 en régions).
C. BILAN DE L'EFFORT DE RÉSORPTION DU DÉCALAGE ENTRE AUTORISATIONS DE PROGRAMME ET CRÉDITS DE PAIEMENT
Des écarts importants et croissants entre autorisations
de programme et crédits de paiement avaient été
dénoncés, lors des années précédentes, par
notre commission. Ils concernaient les dotations du fonds de la recherche et de
la technologie (FRT) ainsi que les subventions aux organismes de recherche
(CNRS notamment).
La Cour des Comptes avait confirmé cette analyse dans son rapport sur
l'exécution des lois de finances, remis au Parlement en
septembre 1996. D'après la Cour, le retard des ouvertures en
crédits de paiement au budget de la Recherche pour couvrir, selon les
échéanciers usuels, les autorisations de programme
déjà engagés s'élevait au
31 décembre 1995 à
2,9 milliards de francs.
Votre commission suit cette année encore avec vigilance l'effort de
résorption de ce déséquilibre.
DÉCALAGE ENTRE AP ET CP : BILAN ET PERSPECTIVES
Le fonds de la recherche et de la technologie
est
aujourd'hui la seule ligne du budget du Ministère de la Recherche qui
connaisse des difficultés de gestion nées de trop importants
décalages entre autorisations de programme et crédits de
paiement.
Le maximum des sommes impayées en fin d'exercice a atteint
970 millions de francs en 1994. Ce montant d'impayés,
qui
était encore de 582 millions de francs fin 1996
, devrait
connaître une nouvelle baisse cette année. Cependant, étant
donné l'ampleur du déséquilibre, la restauration des
capacités de paiement du FRT n'a pu se faire que progressivement.
A partir de 1994, le niveau des engagements a été fortement
réduit (moins de 400 millions de francs d'engagements nets). De
plus, depuis trois ans, les dotations en CP dépassent substantiellement
les AP ouvertes en lois de finances initiales : de 375 millions en 1995,
de 275 en 1996 et de 300 en 1997.
Pour 1998, le Fonds de la Recherche et de la Technologie sera doté de
473 millions de francs en AP et de 797 millions de francs en CP. Ces
chiffres prennent cependant en compte l'intégration, dans le chapitre,
sur un article 20 nouveau, des crédits destinés à la
diffusion des technologies du secteur spatial, à hauteur de
61 millions de francs en AP et 65 millions de francs en CP,
crédits jusque-là rattachés au budget du Ministère
chargé de l'Industrie.
A contenu équivalent, la dotation du FRT s'élèvera
donc, sur l'article 10, à 412 millions de francs en AP et
732 millions de francs en CP, soit un écart de 320 millions de
francs en faveur des crédits de paiement. Ce nouvel excédent
devrait permettre, s'il est reconduit en 1999, de retrouver, cette
année-là, un équilibre satisfaisant des AP et des CP.
Source : Ministère chargé de la Recherche
III. LES CRÉDITS ATTRIBUÉS AUX GRANDS ORGANISMES PAR LE MINISTÈRE CHARGÉ DE LA RECHERCHE
A. UNE SITUATION FINANCIÈRE CONTRASTÉE DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE RECHERCHE
Outre les fondations et institutions de recherche en
médecine et biologie, les dotations de la section recherche sont
affectées à deux catégories d'établissements
publics, des établissements publics à caractère
scientifique et technologique (EPST) et des établissements publics
industriels et commerciaux (EPIC).
Les établissements industriels et commerciaux sont traditionnellement
moins dépendants des subventions de l'État qui
représentent 57 % de leurs ressources que les établissements
à caractère scientifique et technologique, qui dépendent
en moyenne à 90 % de la subvention versée par l'État.
La mauvaise situation financière du CNES (Centre national
d'études spatiales) inquiète tout particulièrement votre
commission qui souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur ce point.
Votre rapporteur pour avis a pu obtenir les informations suivantes : le
déficit du CNES atteignait fin 1996 536 millions de francs. En
outre, la dette à l'égard de l'agence spatiale européenne
s'élevait fin 1996 à 1,340 milliard de francs. Le besoin de
financement total s'élevait donc à cette date à
près de
2 milliards de francs
. Un plan de redressement du
CNES prévoit un retour à l'équilibre de cet organisme en
1998. En outre, un plan de résorption de la dette à
l'égard de l'agence spatiale européenne prévoit
d'éponger cette dernière en 2002.
Votre commission juge urgente la mise en oeuvre rapide de mesures de
redressement dans le respect de l'objectif d'un emploi rigoureux et optimal des
deniers publics.
En ce qui concerne le
CNRS, sa situation financière
était, ces dernières années, une préoccupation
traditionnelle de votre commission, puisque le décalage entre
autorisations de programme (AP) et crédits de paiement (CP) -
dénoncé ci-dessus- avait atteint
un milliard de francs en
1994
, ce qui avait conduit l'organisme à une véritable crise
des paiements.
Un redressement avait été amorcé en 1995 (annulation de
200 puis 300 millions de francs d'AP, ouverture de 300 millions de
francs de CP), poursuivi en 1996 et 1997, avec un rattrapage de crédits
de paiement de respectivement 227 et 12 millions de francs.
Le projet de loi de finances pour 1998 comporte un ultime
" rattrapage " de 43 millions de francs
. Le
Gouvernement
estime donc que "
le différentiel AP/CP constaté est
comblé pour l'essentiel ".
En outre, le CNRS a réformé ses méthodes de gestion
budgétaire dans le but d'éviter un nouveau dérapage.
En effet, l'ancien mode de gestion, déconcentré, des moyens de
paiement des laboratoires permettait, jusqu'en 1995, aux unités de
recherche d'engager des autorisations de programme sans tenir compte des
crédits de paiement effectivement alloués dans le cadre de
l'annualité budgétaire.
La réforme mise en oeuvre en 1996
a consisté à
clarifier l'origine des crédits (subvention de l'État ou
ressource propre) et à généraliser dans les unités
une comptabilité des engagements liée au niveau des moyens de
paiement réellement disponibles.
B. LES DOTATIONS DEMANDÉES EN 1998 PAR LE MINISTÈRE DE LA RECHERCHE POUR LES DIFFÉRENTS ORGANISMES
DOTATIONS DEMANDÉES POUR LES ORGANISMES
(en millions de francs)
ÉTABLISSEMENT |
DÉPENSES ORDINAIRES |
ÉVOLUTION |
CRÉDIT DE PAIEMENT |
ÉVOLUTION |
TOTAL |
ÉVOLUTION |
INRA (Institut national de la Recherche agronomique) |
2.912 |
+ 2,3 % |
513 |
+ 2,0 % |
3.425 |
+ 2,3 % |
CEMAGREF (Centre national du machinisme agricole, du génie rural, des eaux et des forêts) |
211 |
+ 3,4 % |
25 |
+ 8,7 % |
236 |
+ 3,7 % |
INRETS (Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité) |
175 |
+ 2,3 % |
39 |
- 7,1 % |
215 |
+ 0,7 % |
INRIA (Institut national de recherche en informatique et en automatique) |
322 |
+ 4,9 % |
159 |
+ 1,2 % |
480 |
+ 3,1 % |
CNRS (Centre national de la Recherche scientifique) |
11.194 |
+ 2,2 % |
2.527 |
+ 1,0 % |
13.722 |
+ 2,0 % |
INSERM (Institut national de la Santé et de la Recherche médicale) |
1.960 |
+ 4,0 % |
603 |
+ 3,4 % |
2.563 |
+ 3,9 % |
INED (Institut national d'Etudes démographiques) |
62 |
+ 3,3 % |
23 |
- 3,9 % |
85 |
+1,0 % |
ORSTOM (Institut français de recherche scientifique pour le développement en coopération) |
849 |
+ 0,1 % |
182 |
- 2,7 % |
1.031 |
- 0,4 % |
Institutions de recherche biologiques et médicales |
289 |
+ 1,7 % |
629 |
+ 5,0 % |
918 |
+ 3,9 % |
CEA (Commissariat à l'énergie atomique) |
2.916 |
+ 39 % |
326 |
+ 5,39 % |
3.241 |
+ 51,5 %* |
CNES (Centre national d'études spatiales) |
915 |
0 % |
7.650 |
- 8,4 % |
8.565 |
- 7,6 % |
ADEME (Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'énergie |
49 |
+ 3,3 % |
140 |
- 17,6 % |
189 |
- 13,2 % |
IFREMER (Institut français pour l'exploration de la mer) |
498 |
+ 8,0 % |
461 |
- 4,8 % |
960 |
+ 1,4 % |
CIRAD (Centre de coopération international en recherche agronomique pour le développement) |
561 |
+ 2,8 % |
144 |
- 0,1 % |
704 |
+ 1,8 % |
IFRTP (Institut français pour la Recherche et la technologie polaire) |
55 |
+ 5,7 % |
36 |
+ 4,0 % |
91 |
+ 6,4 % |
BRGM (Bureau de Recherches géologiques et minières) |
241 |
+ 109 % |
94 |
+ 3,8 % |
335 |
+ 63,2 %* |
TOTAL |
23.225 |
+ 6,62 % |
13.550 |
- 2,8 % |
36.776 |
+ 2,9 % |
Source : Projet de loi de finances pour 1998
* à relativiser suite aux changements de
périmètre budgétaire
Le soutien du Ministère de la Recherche aux organismes progresse (de
2,2 % pour les EPST, de 3,9 % pour les EPIC).
Là encore, ce
sont les dépenses ordinaires qui progressent
(6,62 % en
moyenne),
tandis que les dépenses en capital diminuent
(de
2,8 % au total).
C. LA CRÉATION DE NOUVEAUX POSTES EN 1998
Le Gouvernement entend faire de l'emploi scientifique une priorité du budget de la recherche. En 1998, 400 postes de chercheurs seront créés, ainsi que 200 postes d'ingénieurs, techniciens ou administratifs (ITA), suivant la répartition suivante :
CRÉATIONS DE POSTES EN 1998 DANS LES ORGANISMES DE
RECHERCHE
CHERCHEURS |
ITA |
|
INRA |
14 |
|
CEMAGREF |
2 |
|
INRETS |
2 |
|
INRIA |
14 |
8 |
CNRS |
297 |
128 |
INSERM |
50 |
40 |
ORSTOM |
30 |
40 |
INED |
2 |
3 |
IFREMER |
38 |
40 |
CIRAD (transfert) |
2 |
3 |
TOTAL |
440 |
240 |
Source : Ministère de l'Éducation nationale
et de la Recherche.
Suite à cette augmentation, les
effectifs de la recherche publique
recommenceraient à croître en 1998, inversant la tendance à
la baisse observée de ces dernières années
.
Par exemple, en ce qui concerne les EPST, l'évolution des effectifs
budgétaires depuis 1988 est la suivante :
Source : Ministère de l'Education nationale et de la Recherche
En outre, comme le souligne le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie 2( * ) " La simple lecture du budget de la recherche ne permet pas de voir toute la priorité donnée à l'emploi car 1.800 postes d'enseignants chercheurs ont également été créés au budget de l'enseignement supérieur ".
D. LE NÉCESSAIRE RAJEUNISSEMENT DE LA PYRAMIDE DES ÂGES
Le comité interministériel de la recherche scientifique du 3 octobre 1996 avait lancé une série de mesures visant à rajeunir la pyramide des âges de certains organismes. Plusieurs dispositifs ont traduit cette volonté dans les faits.
a) La fin des " maintiens en surnombre " ne devrait pas nuire à la qualité des travaux de recherche
L'article 89 de la loi n° 96-1093 du 16 décembre 1996 relative à l'emploi dans la fonction publique et à diverses mesures d'ordre statutaire a mis fin au maintien en surnombre jusqu'à 68 ans des directeurs de recherche .
LE MAINTIEN EN SURNOMBRE DES DIRECTEURS DE RECHERCHE
La loi n°86-1304 du 23 décembre 1986
avait prévu que les professeurs de l'enseignement supérieur et
les directeurs de recherche des établissements publics à
caractère scientifique et technologique, lorsqu'ils atteignent la limite
d'âge de 65 ans,
seraient, sur leur demande, maintenus en
activité, en surnombre, jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge
de 68 ans.
Des dispositions analogues ont été prises pour les membres du
Conseil d'État, de la Cour des Comptes, de l'Inspection
générale des Finances, ainsi que pour les magistrats hors
hiérarchie de la Cour de Cassation.
L'article 89 de la loi précitée n° 96-1093 a
mis fin à cette possibilité
.
Les personnes concernées par cette abrogation sont les directeurs de
recherche de première classe et les directeurs de recherche de classe
exceptionnelle du CNRS et de l'INSERM, qui ont bénéficié
de cette disposition.
En 1996, le " surnombre " représentait 100 personnes,
pour un coût de 73 millions de francs. D'après les
informations communiquées par le Gouvernement, avec l'augmentation
prévisible des départs à la retraite, si le maintien en
activité jusqu'à 68 ans n'avait pas été
supprimé, les surnombres auraient représenté
150 chercheurs en 2000 et 250 chercheurs en 2004
.
Le maintien du système aurait donc été lourd de
conséquences pour les deniers publics et la santé
financière des organismes de recherche.
Pour la période transitoire, une réduction progressive de la
durée des " maintiens en activité " a été
mise en place. Ces derniers disparaîtront totalement au
30 juin 1998.
Les directeurs de recherche peuvent toutefois, afin de ne pas risquer
d'interrompre certains programmes de recherche en cours,
bénéficier du statut de
" l'éméritat "
. L'article 11 de la loi du
26 décembre 1985 relative à la recherche et au
développement technologique, complétée par le
décret du 17 juin 1992, a offert la possibilité de
conférer à un directeur de recherche le titre de
l'émeritat, au moment de son départ. Ce titre,
conféré pour cinq ans renouvelables, sanctionne une contribution
particulièrement importante aux travaux de recherche.
L'éméritat permet aux directeurs de recherche de participer aux
jurys de thèse, de diriger des travaux de séminaires et de
contribuer aux travaux de recherche.
Interrogé par un de nos collègues
3(
*
)
soucieux
que la suppression de la possibilité
de maintien en surnombre ne porte pas atteinte à la qualité des
travaux de recherche, le Gouvernement apporte une réponse qui permet de
lever certaines préoccupations quant aux conséquences de ces
modifications sur la qualité de la recherche.
" (...)
La suppression du maintien en activité des
directeurs de recherche au-delà de soixante-cinq ans ne conduira en
aucun cas à désorganiser les équipes de recherche par
bouleversement des directions des laboratoires concernés et dissolution
des équipes
. D'une part les directeurs de recherche maintenus en
activité en surnombre ne pouvaient exercer des fonctions de direction de
laboratoire. La situation est donc inchangée sur ce point. D'autre part,
sauf cas exceptionnel, le départ à la retraite d'un directeur de
laboratoire ne se traduit pas par la dissolution de l'équipe.
" (...)
La perspective de dissolution d'une centaine
d'équipes
de recherche, en relation avec la fin du maintien en
surnombre de chercheurs de plus de soixante-cinq ans,
n'a aucun
fondement
. Contrairement à l'information abusivement alarmiste
diffusée par quelques directeurs concernés, les effets de la
mesure prise ne peuvent être que bénéfiques pour le
fonctionnement scientifique des organismes de recherche "
.
b) La poursuite de la politique de départs anticipés
Des dispositifs d'incitation au départ à la
retraite
se sont avérés nécessaires. En effet, en
raison de leur recrutement tardif, les chercheurs peuvent rarement justifier
avant l'âge de 65 ans d'un nombre d'annuités suffisant pour
un départ à la retraite.
Instituée pour faciliter le renouvellement des générations
de chercheurs, une "
indemnité de départ
volontaire
", égale à une année de traitement
brut, existait déjà pour les chargés de recherche du CNRS,
de l'INSERM et de l'INRA qui démissionnaient de leur organisme.
Les décrets
n° 96-1242 à 96-1244 du
26 décembre 1996 créant une indemnité de
départ à la retraite anticipée des chercheurs du CNRS, de
l'INSERM et de l'INRA
ont étendu ce système aux chercheurs
demandant à faire valoir leurs droits à la retraite entre
l'âge de 60 et de 64 ans.
Le montant de l'indemnité varie
entre huit mois et deux ans de traitement brut. Il est d'autant plus
élevé que le chercheur prend tôt sa retraite.
Les décrets ont prévu de limiter l'application de ce
système à trois ans, ce qui aura pour conséquence
d'augmenter les départs à la retraite dans les années 97
à 99 par " effet d'appel " sur les chercheurs ayant entre 60
et 64 ans, lesquels représentent les tranches d'âge les plus
nombreuses.
Le CNRS
a en outre bénéficié à titre
expérimental, pour 1997, d'un dispositif particulier d'incitation au
départ anticipé à la retraite pour les
ingénieurs techniciens et administratifs, dits " ITA " et
les techniciens de physique nucléaire
, en fonction dans les
unités devant connaître une
restructuration thématique
ou géographique
. Les mesures d'incitation au départ pour les
chercheurs ont ainsi été étendues à ces personnels,
dans les mêmes conditions.
Ces mesures ont conduit, du 1er janvier au 30 septembre 1997, aux
départs suivants :
- CNRS 60 chercheurs
105 ITA
- INSERM 18 chercheurs
9 ITA
- INRA
4(
*
)
10 chercheurs
8 ITA
CHAPITRE II -
UN EFFORT DE RÉGIONALISATION
À POURSUIVRE
En dépit des efforts engagés, la recherche
française souffre encore d'une excessive concentration
géographique en Ile-de-France.
Votre commission, pour laquelle l'aménagement du territoire est une
préoccupation constante, affirme chaque année par la voix de
votre rapporteur pour avis que
sans une répartition
équilibrée de la " matière grise ", il n'y a pas
de développement harmonieux du territoire qui soit possible
.
Les pouvoirs publics en ont d'ailleurs pris conscience, puisque la
nécessité de mieux localiser la recherche, jusqu'alors trop
concentrée en Ile-de-France, a été affirmée lors
des comités interministériels d'aménagement du territoire
du 29 janvier 1992 et du 20 septembre 1994, qui
prévoyaient, à l'horizon 2000, un transfert vers les
régions de près de 2.600 emplois.
La loi du 4 février 1995 d'orientation pour
l'aménagement et le développement du territoire comporte
d'ailleurs quatre articles définissant les contours de la politique de
recherche en région pour les années 2000-2015 : les
articles 11, 13, 14 et 15.
LES DISPOSITIONS RELATIVES À LA RECHERCHE DANS LA LOI D'ORIENTATION SUR L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE DU 4 FÉVRIER 1995
L'article 11
de la loi pose le principe de
l'établissement d'un schéma de l'enseignement supérieur et
de la recherche, dont l'une des obligations majeures, prévue à
l'article 13
, sera de fixer les modalités de
réalisation d'un objectif d'installation de 65 % de l'ensemble des
chercheurs, enseignants-chercheurs et ingénieurs participant à la
recherche publique en dehors de la région Ile-de-France à
l'horizon 2005. Précisons toutefois que sa publication est
subordonnée à l'adoption par voie législative du
schéma national d'aménagement et de développement du
territoire, que le Gouvernement aurait déjà dû selon la loi
du 4 février 1995 déposer au Parlement, ce qui n'a pas
été le cas.
L'article 14
précise qu'y seront examinés
l'implantation des laboratoires et leur rôle dans le développement
scientifique régional.
L'article 15
de la loi a institué une modulation du
crédit d'impôt-recherche en fonction de la localisation des
chercheurs.
I. UNE TENDANCE À LA RÉGIONALISATION
A. LA RÉPARTITION DES ACTIVITÉS DE RECHERCHE PUBLIQUE SUR LE TERRITOIRE
Une enquête annuelle
effectuée
auprès des organismes de recherche permet de connaître la
localisation géographique des personnels de la recherche publique.
Toutefois,
certaines données ne permettent de rendre
qu'imparfaitement compte de la cartographie exacte de la recherche publique
française.
Ainsi, les données concernant les effectifs recherche du secteur de la
défense, sont estimées au niveau national, sans
" régionalisation ", c'est-à-dire sans distinction de
la localisation dans ou hors l'Ile-de-France. Il en est de même pour les
effectifs des associations, en dehors des fondations Pasteur de Paris et de
l'Institut Curie.
En outre, en ce qui concerne les enseignants-chercheurs, les chiffres
donnés par le Ministère de l'Education nationale et de la
Recherche ne sont qu'une estimation.
Les résultats de cette enquête sont retracés par le
graphique suivant qui porte sur les effectifs de recherche civile, sans
comprendre les universités :
Source : Ministère chargé de la Recherche
Malheureusement, la part " non
régionalisée " pèse d'un poids très lourd, ce
qui enlève une partie de son intérêt aux données
communiquées.
On observe toutefois
une tendance à la régionalisation
puisqu'au sein des emplois dont on connaît l'implantation
géographique, l'Ile-de-France ne représente " plus "
que 46,30 % des effectifs, alors que ce poids était de 49,1 %
en 1992.
En outre, les délocalisations de chercheurs augmentent plus vite que
celle des ingénieurs techniciens et administratifs (ITA), comme
l'indique le graphique suivant :
Source : Ministère chargé de la Recherche
Si on inclut dans ces chiffres les enseignants-chercheurs et les allocataires de recherche, la part des effectifs publics " régionalisés " situés en Ile-de-France tombe à 38 %, contre 62 % en région.
B. LA DÉLOCALISATION EN PROVINCE DES ÉTABLISSEMENTS DE RECHERCHE
Des objectifs globalement atteints
Les comités interministériels d'aménagement du territoire
de 1992 et 1994 avaient prévu, comme cela a déjà
été dit, le transfert vers la province de 2.600 emplois des
organismes de recherche.
En réponse à votre rapporteur pour avis sur les résultats
obtenus pour atteindre cet objectif, le Gouvernement a estimé que
"
la spécificité de la démarche retenue
5(
*
)
pour le redéploiement du dispositif de
recherche publique sur le territoire national a permis la mise en oeuvre
effective des décisions prises par le Gouvernement, de manière
globalement satisfaisante
".
Le bilan au 1er janvier 1997 fait apparaître un total de
transferts égal à
2.435 emplois
des organismes de
recherche ayant été transférés en région. Le
bilan au 1er janvier 1996 faisait apparaître
2.169 transferts, soit un effort annuel, en flux, de
266 postes
transférés
.
Il faudra probablement ajouter à ce chiffre
150 transferts
supplémentaires
au titre de l'année 1996, dus au CNRS
dont le bilan "
est en cours d'actualisation
", ce
qui
porterait le chiffre total à
2.585 emplois
, pour un effort
annuel en 1996 de
416 postes
.
La répartition par organisme des délocalisations est la suivante :
BILAN DES DÉLOCALISATIONS INTERVENUES
SUITE AUX
CIAT DE 1992, 1993 ET 1994
(en janvier 1997)
ORGANISMES |
EMPLOIS TRANSFÉRÉS
D'ILE-DE-FRANCE
|
MOBILITÉS
|
|
CNRS |
730 |
424 |
1.154* |
INSERM |
233 |
96 |
329 |
INRA |
188 |
111 |
299 |
INRETS |
35 |
5 |
40 |
ORSTOM |
- |
22 |
22 |
INRIA |
122 |
14 |
136 |
CEA |
60 |
150 |
210 |
CIRAD |
111 |
96 |
207 |
CEMAGREF |
27 |
11 |
38 |
TOTAL |
1.506
|
929
|
2.435 |
* actualisation en cours (chiffres au
1er janvier 1996)
Un impact réel difficile à évaluer
L'apport exact de ces délocalisations à l'économie
régionale reste toutefois difficile à mesurer.
Certes, les régions trouvent dans l'accroissement de leur potentiel
intellectuel un moteur de leur développement économique et un
levier de compétitivité qui accroît leur attrait pour les
entreprises à fort investissement intellectuel.
Mais l'impact financier direct est difficile à mesurer. Les informations
communiquées à votre rapporteur pour avis font apparaître
que les délocalisations n'impliquent pas forcément une
possibilité accrue d'emplois pour les personnels locaux, compte tenu des
spécialisations requises et du fait que les conjoints des personnels
transférés peuvent chercher un emploi dans leur nouvelle
région d'implantation.
En revanche, les délocalisations induisent un surplus d'activité
autour du centre de recherche, pour la propre activité de ce dernier
(fournisseurs), pour la vie des personnels (commerçants...). Surtout,
une dynamique locale peut être favorisée, pour le transfert
éventuel de technologie en faveur des entreprises de la région,
si le tissu industriel s'y prête.
Le Gouvernement précise que dans les contrats de plan 1994-1998, les
financements prévus pour ces transferts s'élèvent à
1 milliard de francs.
C. LE FINANCEMENT LOCAL DE LA RECHERCHE
Bien qu'il soit un peu en marge du sujet de cet avis relatif aux crédits que l'Etat consacre à la recherche, il peut sembler utile de faire le bilan du financement de la recherche par les collectivités locales.
A PROPOS DU VOLET RECHERCHE DES CONTRATS DE PLAN
ETAT-COLLECTIVITÉS LOCALES
La part de l'Etat dans les volets " recherche et
transfert de technologie " des contrats de plan atteint
2,65 milliards de francs. Les collectivités territoriales se sont
également engagées de manière très volontariste,
avec une total qui se situe à hauteur de 2,85 milliards de francs.
Par ailleurs, le financement de nombreuses opérations sera
complété par une contribution de fonds européens -Fonds
européen de développement économique régional,
(FEDER), et Fonds social européen (FSE)-.
Sur le volet " recherche proprement dite " de ces contrats
de plan,
les montants respectifs de l'Etat et des collectivités territoriales
sont très équilibrés. Ils s'élèvent à
1,76 milliards de francs pour l'Etat et à 1,78 milliards de
francs pour les collectivités.
Sur le volet " transfert de technologie " apparaît une
différence plus importante entre les contributions respectives des
partenaires des contrats. La part cumulée des collectivités sera
en effet supérieure à celle de l'Etat (1,07 milliards de
francs pour les collectivités et 870 millions de francs pour
l'Etat). Une proportion appréciable des opérations qui entrent
dans le cadre de ce volet bénéficiera d'un concours
européen.
Les organismes publics de recherche rattachés au ministère
chargé de la recherche ont pris une part très importante dans ces
contrats auxquels ils consacreront près d'un milliard de francs.
Grâce à cette participation, le plan de redéploiement de la
recherche publique en province pourra se concrétiser. A titre de
comparaison, la participation financière des organismes de recherche
s'élevait à 640 millions de francs seulement lors du plan
précédent.
De leur côté, les moyens prévus pour la recherche
universitaire connaîtront la croissance relative la plus forte, passant
de 254 millions de francs dans la période 1989-1993 à
450 millions pour le nouveau plan. Ceci correspond à un
accroissement de 80 % par rapport à l'exercice
précédent.
Enfin, ces contrats de plan comprennent un volet culture scientifique et
technique qui s'élève à 61,2 millions de francs.
L'engagement déjà effectué pour les
années 1994 à 1996 est de 59 % des engagements totaux,
ce qui correspond globalement à un taux d'exécution convenable.
Certains retards financiers, notamment sur le chapitre 43.01 relatif aux
conseillers technologiques et sur l'équipement en matière de
recherche universitaire, ont commencé à être
rattrapés en 1997. L'effort devant se poursuivre en 1998, le respect des
engagements de l'Etat sur la période 1994-1998, allongée de
un an (1999), sera assuré.
Source : Ministère chargé de la Recherche
Pour ce qui concerne le financement par les conseils
régionaux de la recherche, qui fait partie de leur domaine d'action
habituel, il atteint actuellement près d'
1,5 milliards de
francs
. Après une forte augmentation en 1994-1995, due à la
mise en place des contrats de plans actuels, on constate une stabilisation en
termes de poids de la recherche dans les budgets régionaux à
2,24 % du budget en moyenne en métropole et 0,64 % dans les
DOM-TOM.
En montant absolu, les dotations régionales consacrées à
la recherche varient entre 171 millions de francs (budget 1997 de la
région Rhône-Alpes) et 2 millions (Guyane), comme l'illustre
ce graphique :
II. L'IMPACT DE LA MODULATION GÉOGRAPHIQUE DU CRÉDIT D'IMPÔT-RECHERCHE SUR LA LOCALISATION DES ENTREPRISES
Soucieuse de mieux répartir sur le territoire la recherche française, la loi précitée d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire a institué un dispositif fiscal pour accroître la recherche dans les zones les plus fragiles du territoire. Plus précisément, l'article 15 de la loi instaurait une modulation du bénéfice du système du crédit d'impôt recherche en fonction de la localisation géographique les chercheurs de l'entreprise bénéficiaire, afin de créer une discrimination positive en faveur des zones reculées.
DISPOSITIF DE MODULATION DU CRÉDIT D'IMPÔT-RECHERCHE
L'article 15 de la loi d'orientation a modifié le
taux forfaitaire de prise en compte des dépenses de fonctionnement dans
l'assiette du crédit d'impôt-recherche.
Antérieurement fixés à 75 % celles-ci ont
été modulées en fonction de la localisation du personnel
de recherche. Les dépenses de fonctionnement sont, depuis
l'exercice 1995, prises en compte aux taux de :
- 100 % si elles correspondent aux dépenses de personnel
affectées exclusivement dans les territoires ruraux de
développement prioritaires (TRDP) et dans les zones d'aménagement
du territoire (ZAT) ;
- 65 % pour les dépenses de personnels qui exercent leur
activité en région Ile-de-France ;
- 75 % dans les autres cas.
Deux ans et demi après le vote de cette disposition, votre commission
souhaite en dresser un premier bilan. En effet, lors de l'examen du projet de
loi de finances pour 1997, il n'avait pas été possible à
l'Administration de discerner ses effets précis puisque les fiches
déclaratives correspondant à l'exercice fiscal 1996
n'avaient pas toutes été reçues. Or, cette disposition
portant sur les dépenses retenues pour le calcul du crédit
d'impôt de l'année 1995, elle s'appliquait sur les
dépenses déclarées par les entreprises en 1996.
Le premier bilan de cette mesure apparaît relativement contrasté.
L'effet sur les entreprises existantes
paraît faible : cette
mesure ne serait pour elles que peu incitative, eu égard aux contraintes
résultant d'un changement d'implantation de leurs équipes de
recherche.
Ainsi, les entreprises bénéficiaires du crédit
d'impôt-recherche déjà implantées en région
parisienne, par exemple, ne sont que dans de faibles proportions allées
s'installer dans des régions où les conditions d'application de
cette mesure étaient plus intéressantes.
Cette situation n'est pas inattendue : les entreprises
bénéficiaires du crédit d'impôt-recherche sont
à 90 % des PME, bien intégrées dans leur
région, qui ont généralement procédé
à un recrutement local de leurs salariés. Les chefs de projets
représentent bien souvent la mémoire scientifique de la
société : une délocalisation de l'entreprise aurait
nécessité une mobilité géographique de ces
personnels indispensables à la performance technique de l'entreprise.
C'est donc plus sur les créations d'entreprises
que ce
dispositif peut influer, d'autant que certaines des zones concernées
bénéficient en outre de l'exonération fiscale pour les
entreprises nouvelles. 782 entreprises nouvelles ont déposé
une déclaration de crédit d'impôt-recherche au titre de
l'année 1995.
Toutefois, les premières statistiques font ressortir un effet
d'incitation mesuré. L'administration n'a communiqué à
votre rapporteur pour avis que les données agrégées par
régions, qui font moins ressortir l'effet de cette mesure qu'une
ventilation statistique par zone concernée (Territoires ruraux de
développement prioritaires et zones d'aménagement du territoire).
La répartition régionale des bénéficiaires du
crédit d'impôt-recherche est la suivante :
Le Gouvernement n'exclut pas que ce dispositif puisse
être réexaminé, dans le cadre de la mission confiée
à M. Henri Guillaume, ancien président de l'agence nationale
de valorisation de la recherche sur le développement technologique.
Votre commission souhaite que soit menée plus avant l'indispensable
évaluation de ce dispositif avant toute décision. En tout
état de cause, il serait néfaste de remettre en cause le volet
" recherche " de la loi précitée d'aménagement
du territoire du 4 février 1995 avant même qu'il ait
été totalement mis en oeuvre. Ce serait pour les territoires
concernés un signal fort -et inacceptable- du
désintérêt du Gouvernement à leur égard.
CHAPITRE III -
FAVORISER L'ACCÈS DES
PETITES ENTREPRISES À L'INNOVATION
L'accès des petites entreprises à l'innovation
et un enjeu majeur pour notre économie. En effet, celles-ci sont le
principal levier des créations d'emplois et d'activité.
Aussi, divers dispositifs ont-ils été progressivement mis en
place pour les aider à accéder à la recherche et à
l'innovation, dont certains sont financés sur des crédits du
Ministère chargé de la Recherche.
RECHERCHE ET PME : DES AIDES DIVERSES
Recruter un chercheur
- Aide au recrutement pour l'innovation (géré par l'ANVAR) :
subvention plafonnée à 200.000 francs, jusqu'à
50 % des dépenses liées à la première
année de recrutement d'un chercheur ;
- Convention industrielle de formation par la recherche (CIFRE) :
subvention annuelle de 94.200 francs HT versée pendant trois ans
pour l'embauche d'un jeune doctorant ;
- Convention de recherche pour les techniciens supérieurs
(CORTECHS) : subvention forfaitaire de 82.260 francs versée pour
l'embauche d'un technicien supérieur sur un projet innovant.
Bénéficier de transferts de technologie
- Aides de l'ANVAR pour le transfert de technologie ;
- CRITT : centres régionaux d'innovation et de transfert de
technologie
- Fonds de la recherche et de la technologie : aide à la recherche
des entreprises industrielles, en liaison avec les pouvoirs publics (dont
grands programmes industriels réactif, télécommunications,
biotechnologie).
Innover
- Aide au projet d'innovation : avance remboursable de l'ANVAR,
jusqu'à 50 % du montant, aide à la diffusion ces
technologies, technolgies-clés ;
- Crédit d'impôt-recherche.
Se financer
En plus des aides traditionnellement destinées aux PME (SOFARIS, BDPME,
exonérations fiscales, etc...) on peut signaler plusieurs dispositions
destinées spécifiquement aux entreprises innovantes.
- FCPI : fonds communs de placement dans l'innovation, dont la
détention par les particuliers est assortie d'avantages fiscaux et qui
permet d'augmenter les fonds propres des entreprises innovantes ;
- Création du nouveau marché financier ;
- Régime fiscal favorable de l'apport en société des
brevets pour la création d'entreprise par un chercheur.
I. LA POURSUITE DE L'INCITATION FISCALE À LA RECHERCHE EN ENTREPRISE : LE CRÉDIT D'IMPÔT-RECHERCHE
L'article 67 de la loi n° 82-1126 du
29 décembre 1982, codifié à
l'article 244 quater du code général des
impôts
, a institué une mesure fiscale en matière de
développement de l'effort de recherche scientifique et technique, sous
forme de crédit d'impôt.
Rappelons que celui-ci consiste en une
réduction
de l'impôt
sur les sociétés ou de l'impôt sur le revenu dû par
les entreprises ou en une
restitution
, représentant la
moitié de l'accroissement en volume de leur effort de recherche et de
développement
d'une année par rapport à la moyenne des
deux années précédentes.
A. UN DISPOSITIF EFFICACE
1. Plusieurs milliers d'entreprises bénéficiaires
Huit types de dépenses
ouvrent droit au
crédit d'impôt-recherche :
- Les dotations aux
amortissements des immobilisations
affectées à la recherche et développement ;
- Les
salaires
des ingénieurs et techniciens de recherche ;
- Les
frais de fonctionnement
, forfaitairement, à un taux
qui, communiqué précédemment, oscille entre :
. 100 % pour les dépenses de personnel qui se rapportent aux
chercheurs et techniciens de recherche affectés exclusivement dans les
territoires ruraux de développement prioritaire et les zones
d'aménagement du territoire ;
. 65 % des dépenses du personnel de recherche localisés en
Ile-de-France ;
. 75 % dans les autres cas.
- La
sous-traitance de recherche
effectuée par des
organismes agréés ;
- Les frais de dépôt et de maintenance des
brevets
;
- Les dotations aux amortissements des
brevets acquis
en vue de la
recherche ;
- Certaines dépenses de
normalisation
;
- Les dépenses liées à l'élaboration des
nouvelles collections des entreprises individuelles du
secteur textile
.
Le
montant par an
du crédit d'impôt-recherche est
limité à 40 millions de francs par entreprise.
En 1996, 7.497 entreprises ont souscrit une déclaration de
crédit d'impôt au titre de l'année 1995 et
3.740 parmi celles-ci ont déclaré un crédit
positif pour un montant cumulé de 2.943 millions de francs
.
L'évolution est la suivante, par rapport à l'année
précédente :
CRÉDIT D'IMPÔT-RECHERCHE
1995 |
1996 |
ÉVOLUTION |
|
Nombre de déclarations |
7.959 |
7.497 |
- 5,8 % |
Nombre de crédits d'impôts " positifs " |
4.277 |
3.740 |
- 12,5 % |
Montant total du crédit d'impôt (en millions) |
2.633 |
2.943 |
+ 11,7 % |
2. Des avantages indéniables
L'avantage du crédit d'impôt-recherche
réside dans le fait qu'il s'agit d'une mesure fiscale d'ordre
général, non discriminatoire, assurée d'une certaine
pérennité, ce qui offre aux entreprises un environnement stable
pour leurs stratégies d'innovation. Cette sécurité est
accrue par le caractère non discrétionnaire du dispositif :
l'allégement fiscal est de droit, sur simple déclaration, sans
qu'aucune autorisation préalable soit requise.
En outre, ce système n'implique pas d'ingérence extérieure
et permet à l'entreprise de rester maîtresse des contours et du
rythme de développement de son projet.
De plus, le crédit d'impôt-recherche est neutre vis-à-vis
des choix technologiques, même s'il comporte une dimension incitative
à l'implantation des unités de recherche en zone à moindre
densité, comme cela a été décrit au chapitre
précédent.
Il est également neutre vis-à-vis des secteurs d'activité
des entreprises concernées : il s'applique à toutes les
entreprises industrielles, commerciales et agricoles soumises à
l'impôt. L'ensemble des dépenses de recherche est pris en compte,
et non seulement telle ou telle catégorie. Les entreprises sont donc
laissées libres de choisir la forme de développement de leur
activité de recherche qui leur paraît la mieux adaptée.
B. UNE MESURE BIEN CIBLÉE SUR LES PME ET LA CRÉATION D'EMPLOIS
1. La part importante des entreprises moyennes et petites
Le crédit d'impôt-recherche touche dans une proportion plus importante les entreprises moyennes. En effet, la part de crédit d'impôt sui leur est allouée représente 2,3 fois leur poids dans les dépenses globales de recherche et développement. A l'inverse, les grandes entreprises (de plus de 500 millions de chiffre d'affaires) qui réalisent près des trois quarts des dépenses de recherche ne bénéficient que d'environ la moitié du crédit d'impôt :
2. Une incitation à l'embauche
L'examen de la ventilation des dépenses de recherche et développement déclarées confirme que le crédit d'impôt-recherche constitue une incitation en faveur de l'embauche de chercheurs et de techniciens ; les frais de personnel constituant à eux seuls près de 40 % des dépenses brutes de recherche (avant déduction des subventions) et environ 69 % de celles-ci si on leur ajoute les frais de fonctionnement.
II. LES PERSPECTIVES OFFERTES PAR LE PROJET DE BUDGET POUR 1998
Le projet de loi de finances comporte cette année
encore une innovation fiscale destinée à faciliter la
création d'entreprise innovante, pénalisée par le
récent changement intervenu dans le régime de taxation des
" stock options ", lesquelles permettaient jusqu'alors une
rémunération intéressante et peu taxée du
créateur d'entreprise. Ce changement avait entraîné une
véritable fuite de cerveaux de la part des créateurs, vers des
pays comme les Etats-Unis ou le Royaume Uni.
Dans le dispositif prévu par
l'article 50 du projet de loi de
finances
, les créateurs d'entreprise pourraient
bénéficier de " bons de souscription de parts ",
émis par leur société, à un prix fixé
définitivement lors de leur attribution.
Le gain net
réalisé lors de la cession de ces titres serait soumis au taux
privilégié de 16 %
, ou de 30 % si le
bénéficiaire exerce son activité depuis moins de deux ans
dans la société émettrice.
CRÉATION DE BONS DE SOUSCRIPTION DE PARTS DE CRÉATEUR D'ENTREPRISE
Il est inséré dans le code général
des impôts un article 163 bis G ainsi rédigé
:
"
Art. 163 bis G. - I. Le gain net réalisé
lors de la cession des titres souscrits en exercice des bons attribués
dans les conditions définies aux II et III est imposé dans les
conditions et aux taux prévu aux articles 92 B, 92 J ou
160, ou au 2 de l'article 200 A.
Par dérogation aux dispositions du précédent
alinéa, le taux prévu au 6 de l'article 200 A
s'applique lorsque le bénéficiaire exerce son activité
dans la société depuis moins de deux ans à la date de la
cession.
II. Les sociétés par actions dont les titres ne sont pas admis
aux négociations sur un marché réglementé peuvent,
à condition d'avoir été immatriculées au registre
du commerce et des sociétés depuis moins de cinq ans,
attribuer aux membres de leur personnel salarié, ainsi qu'à
leurs dirigeants soumis au régime fiscal des salariés, des bons
de souscription de parts de créateur d'entreprise
, incessibles, et
émis dans les conditions prévues à l'article 339-5 de
la loi n° 66-537 modifiée du 24 juillet 1966 sur les
sociétés commerciales (...).
III. Le prix d'acquisition du titre souscrit en exercice du bon est fixé
au jour de l'attribution par l'assemblée générale
extraordinaire, sur le rapport du conseil d'administration ou du directoire, et
sur le rapport spécial des commissaires aux comptes. Il est au moins
égal au prix d'émission des titres fixé lors de la
dernière augmentation de capital à laquelle la
société émettrice a procédé dans les six
mois précédant l'attribution du bon. (...)
"
Source : projet de loi de finances
En outre, l'article 51 du projet de loi de finances instaure
un report d'imposition des plus-values de cession de droits sociaux en cas de
réemploi dans les PME nouvelles.
Cette disposition apour objet d'inciter les dirigeants de société
à mettre leur capacité d'investissement au service d'entreprises
nouvelles non côtées, comme cela se passe aux Etats-Unis où
des " Business Angels ", plus expérimentés, apportent
des capitaux pour les créations d'entreprises innovantes.
Par ailleurs, votre commission déplore que le cadre réglementaire
français ne favorise pas assez la " porosité " entre
les laboratoires et l'entreprise.
Comme l'a mis récemment en lumière la Cour des Comptes
6(
*
)
, le statut général des fonctionnaires et
le code pénal comportent des dispositions restrictives quant aux liens
qui peuvent s'établir entre un fonctionnaire chercheur et une entreprise.
L'article 25 du code de la fonction publique affirme notamment que les
fonctionnaires ne peuvent exercer à titre professionnel une
activité privée lucrative. Les traditionnelles exceptions
à ce principe ne concernent que la production d'oeuvres
littéraires et l'enseignement.
Les chercheurs, comme tous les fonctionnaires, ne peuvent pas, non plus,
prendre de participation dans les entreprises soumises au contrôle de
l'administration à laquelle ils appartiennent.
Deux articles du code pénal (l'article 432-12 du nouveau code
pénal et l'article 432-13) punissent en outre les prises
d'intérêt dans les entreprises auparavant contrôlées
par des fonctionnaires.
Mise en place pour éviter les abus de certains
" pantouflages ", cette réglementation se révèle
peu adaptée au monde de la recherche.
Votre Commission souhaite que ce sujet fasse l'objet d'une réflexion
approfondie afin de pouvoir donner aux chercheurs et aux établissements
de recherche l'indispensable souplesse dont ils ont besoin pour jouer
pleinement leur rôle d'irrigation de l'économie et de valorisation
de la recherche publique.
CHAPITRE IV -
LA POLITIQUE DE L'ESPACE
Le changement de gouvernement a entraîné un
nouveau changement du département ministériel chargé de
l'Espace.
Au cours des dix dernières années, le Ministère
chargé de l'Espace a été successivement :
- le Ministre de l'Industrie,
- le Ministre des Postes et Télécommunications,
- le Ministre de l'Equipement, des Transports et de l'Espace,
- le Ministre de la Recherche et de l'Espace,
- le Ministre de l'Industrie, des Postes et
Télécommunications et du Commerce extérieur,
- le Ministre des Technologies de l'information et de La Poste,
- le Ministre de la Poste, des Télécommunications et de
l'Espace,
- le Ministre de l'Education nationale, de la Recherche et de la
Technologie.
I. LES MOYENS DE LA POLITIQUE SPATIALE
Les crédits affectés à l'Espace (au total
8,6 milliards de francs) sont de deux ordres :
Les crédits du
Centre national d'études spatiales
, soit
dans le projet de budget pour 1998, 9,065 milliards de francs (en DO + CP).
Les crédits de
diffusion des technologies du secteur spatial
,
soit 64,8 millions de francs (CP).
S'y ajoute un
transfert du Ministère de la Défense
au
titre de la recherche duale, prévu pour 500 millions de francs en
1998, contre 1,12 milliards de francs en 1996 et 1997.
LE BUDGET SPATIAL
7(
*
)
CIVIL
1997 |
1998 |
évolution |
|
Centre national d'études spatiales : dépenses ordinaires (DO) |
915 |
915 |
0 |
CNES, subvention
d'investissement
(en crédits de
paiement - CP)
|
7.230
|
7.650
|
+ 5,8 %
|
TOTAL CNES |
8.145 |
8.565 |
+ 5,1 % |
Diffusion des technologies au secteur spatial (crédits de paiement) |
64 |
64,8 |
+ 1,25 % |
TOTAL (DO + CP) |
8.209 |
8.629,8 |
+ 5,1 % |
II. LE PROGRAMME SPATIAL CIVIL FRANÇAIS
La politique française de l'Espace s'exerce d'une part
au moyen d'une contribution aux programmes et activités de l'agence
spatiale européenne et, d'autre part, au travers d'un programme national
comportant de nombreuses coopérations bilatérales. Il est mis en
oeuvre par le CNES.
Les grands objectifs de la politique spatiale française ont
été fixés aux réunions du Conseil de l'Agence
spatiale européenne à Toulouse en 1995 et à Paris en 1997.
LE PROGRAMME SPATIAL CIVIL FRANÇAIS
I - Moyens d'accès à l'espace
Systèmes de transports spatiaux
: Ariane 4 et Ariane 5.
La famille de lanceurs Ariane a permis de disposer d'un moyen de transport
performant. Les lanceurs Ariane totalisent 100 lancements. Le Vol 502
(2e lancement d'Ariane 5) est intervenu le 30 octobre dernier.
Infrastructure orbitale :
la station spatiale internationale.
L'Europe est associée aux Etats-Unis pour la construction du laboratoire
orbital, du développement du véhicule de transport orbital et du
véhicule de transport de passagers. La station devrait démarrer
en 2001.
II - Les applications
Les radiocommunications spatiales :
- programme " Artemis " : mission liée au
développement des données DRS devant offrir un service de
transmission de données à et vers les satellites en orbite basse.
- programme " EGNOS " complément européen aux
systèmes de navigation par satellite.
- programme " STENTOR " : programme technologique en
télécommunications.
L'observation de la terre : SPOT
La lancement du satellite Spot 4 devrait intervenir début 98.
La finalité est stratégique mais aussi industrielle et
commerciale.
III - Le programme scientifique
Astronomie et exploration du système solaire
Le programme " Horizon 2000 " est coordonné par
l'Agence
spatiale européenne.
Sciences de la terre et environnement
Plusieurs programmes sont en cours : ERS-1 et ERS-2, 2 satellites
d'étude de l'environnement terrestre seront suivies par le satellite
ENVISAT. Le satellite TOPEX-POSEIDON est développé avec les
Etats-Unis.
Sciences physiques et sciences de la vie en micro-pesanteur
Le programme du CNES dans ce domaine comprend des développements
instrumentaux, souvent sur les vols habités.
III. QUINZE ANS D'AIDE AU DÉVELOPPEMENT DE L'INDUSTRIE SPATIALE
L'industrie spatiale française représentait fin
1996 15.000 emplois directs environ.
Des crédits d'intervention inscrits au budget du Ministère en
charge de l'Espace permettent de contribuer au soutien des industries
françaises dans ce domaine. Ces crédits sont des aides
remboursables attribuées aux industriels pour leur apporter un
complément de développement ou d'industrialisation pour un
produit pour lequel un débouché commercial est prévisible.
Le Gouvernement estime que
" le financement apporté aux
industriels leur permet de présenter sur le marché international
une offre plus compétitive face à leurs concurrents
d'Outre-Atlantique, en particulier, dont l'essentiel des coûts de
développement sont assurés par des programmes
militaires ".
A. LES DOTATIONS DEMANDÉES POUR 1998
Depuis la première convention d'octroi de crédits de politique industrielle, attribuée en 1982, ces crédits ont connu une évolution contrastée, détaillée ci-dessous :
lfr : loi de finances rectificative
lfi : loi de finances initiale
plf : projet de loi de finances
Le montant demandé pour 1998 s'élève à
60,7 millions de francs en autorisations de programme et
64,8 millions en crédits de paiement, inscrits au
chapitre 66-04-20.
L'aide est accordée par le Ministère après sollicitation
du CNES pour examen technique du dossier. Le montant des avances
s'élève au maximum à 40 % du coût total du
programme. Il doit être remboursé lorsque le programme entre en
phase de commercialisation et ce au prorata des ventes effectuées.
B. LES PROGRAMMES SOUTENUS
Les programmes aidés peuvent se classer en quatre
catégories :
Les produits spatiaux
, plate-formes de satellites de
télécommunications, propulseurs, transporteurs, viseurs
d'élite, etc...
Les produits ayant une application au sol
qui concernent
essentiellement la réception et l'exploitation des données des
satellites d'observation, tels que les stations au sol de réception
d'images satellitaires, les stéréo-restituteurs appliqués
au tracé des routes et à l'implantation de bâtiments.
Les produits connexes au secteur spatial
, c'est-à-dire
essentiellement les moyens d'essais nécessaires à la
qualification des programmes spatiaux.
La fertilisation du programme STENTOR
Dans le cadre du programme technologique de télécommunications
STENTOR
8(
*
)
décidé par le Premier
ministre le 4 octobre 1994, un plan de
" fertilisation "
est prévu. L'objectif de ce programme est d'assurer le retour
d'information, de procédés et d'équipements du programme
technologique vers les filières commerciales de plates-formes de
satellites de télécommunications EUROSTAR (Matra Marconi Space)
et SPACEBUS (Aérospatiale). Ce retour technologique vers les produits
commerciaux proposés à l'exportation est essentiel : sur lui
repose la valorisation de l'ensemble du financement accordé par l'Etat
au programme technologique (de l'ordre de 2,5 milliards de francs).
*
* *
Suivant les conclusions de son rapporteur pour avis, votre commission s'en est remis à la sagesse du Sénat pour l'adoption des crédits consacrés à la recherche dans le projet de loi de finances pour 1998.
EXAMEN PAR LA COMMISSION
Au cours de sa réunion du mercredi 19 novembre 1997
sous la présidence de M. Jean François-Poncet, président,
la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de
M. Jean-Marie Rausch sur la recherche
dans le projet de loi de finances
pour 1998.
M. Jean-Marie Rausch, rapporteur pour avis,
a
considéré que l'effort de recherche d'un pays était le
meilleur garant de son avenir. Promesse de croissance, promesse d'innovation,
promesse d'emplois, la recherche était, a-t-il jugé, la
sève de notre économie, la clé de toute conquête
industrielle.
Rappelant que la France consacrait actuellement 2,34 % de son produit
intérieur brut à la recherche, ce qui situait notre pays au 3e
rang mondial, il a toutefois fait valoir que ce chiffre était en-dessous
de l'objectif de 2,5 % fixé par la loi du 15 juillet 1982
d'orientation et de programmation pour la recherche, qu'il avait eu l'honneur
de rapporter.
Si la recherche publique était à un bon niveau par rapport aux
autres pays, la France souffrait, a-t-il considéré, d'un
déficit sensible dans le financement de la recherche par les
entreprises, souligné chaque année par la commission.
M. Jean-Marie Rausch, rapporteur pour avis,
a indiqué que
les crédits demandés pour 1998 au titre du budget civil de
recherche et développement, qui regroupe l'ensemble des crédits
de l'État affectés à la recherche civile,
s'élevaient à 53,05 milliards de francs, en progression de
1,4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997. Il a
rappelé que le budget 1997 avait été, quant à lui,
en baisse de 1,37 %. En ce qui concerne les crédits du seul
ministère chargé de la recherche, il a précisé
qu'ils s'élevaient à 39,6 milliards de francs, en
augmentation de 3 %.
Estimant que le Gouvernement souhaitait donner la priorité aux
dépenses ordinaires par la création de 400 postes de
chercheurs et de 200 postes d'ingénieurs, techniciens et
administratifs dans les établissements de recherche,
M. Jean-Marie Rausch, rapporteur pour avis,
a indiqué que le
budget de l'année dernière avait au contraire supprimé des
emplois.
Quant aux dépenses en capital, il a précisé que les
crédits de paiement du budget civil de recherche et développement
diminuaient de 0,2 %.
Le rapporteur pour avis a considéré qu'un coup d'arrêt
était donné aux très grands équipements de
recherche, pour lesquels le budget 1998 proposait d'économiser
300 millions de francs, alors que ces derniers contribuaient pourtant au
progrès de la recherche scientifique dans de nombreuses disciplines et
nécessitaient un étalement pluriannuel de leur financement. La
décision d'implantation du projet Soleil, par exemple -synchrotron de
troisième génération, nécessaire à la
recherche en chimie, en physique des matériaux et surtout dans les
sciences du vivant et la pharmacologie-, qui devait intervenir cette
année, avait été, a-t-il souligné, repoussée
à une date ultérieure.
M. Jean-Marie Rausch, rapporteur pour avis,
a ensuite
insisté sur deux
préoccupations fortes de la commission :
la contribution de la recherche à l'aménagement du territoire et
l'accès des petites entreprises à la recherche.
Rappelant que la trop grande concentration géographique des chercheurs
en Ile-de-France avait été régulièrement
dénoncée par la commission, il a estimé que sans une
répartition équilibrée de la matière grise, il n'y
avait pas de développement harmonieux du territoire qui soit possible.
Il a indiqué que la loi d'orientation pour le développement et
l'aménagement du territoire du 4 février 1995 et les
comités interministériels d'aménagement du territoire de
1992 et 1994 avaient prévu un ensemble de mesures pour
régionaliser davantage les équipes de recherche, décisions
qui commençaient à porter leurs fruits puisque une enquête
du ministère de la recherche -ne portant malheureusement pas sur tous
les chercheurs- indiquait que la région Ile-de-France
représentait 46,3 % des effectifs des organismes de recherche,
contre 49 % en 1992.
Au 1er janvier 1997, a-t-il précisé, 2.585 emplois
de chercheurs publics avaient été délocalisés en
province depuis 1992, conformément aux engagements pris lors des CIAT
successifs.
En ce qui concerne l'accès des petites entreprises à la
recherche,
M. Jean-Marie Rausch, rapporteur pour avis,
a
précisé qu'en France, la recherche était trop
majoritairement le fait du secteur public, et trop souvent, pour le reste,
réalisée par de grands groupes plutôt que par des PME.
Il a rappelé que le précédent Gouvernement avait
créé un instrument financier intéressant, les fonds
communs de placement dans l'innovation, visant à améliorer
l'accès aux fonds propres des entreprises innovantes réalisant de
fortes dépenses de recherche, et que le projet de loi de finances pour
1998 comportait deux dispositions dont l'objet était similaire : des
bons de souscription de parts de créateur d'entreprise seraient
créés afin de mettre fin à la fuite des cerveaux
français vers les États-Unis ; un report d'imposition des
plus-values de cession d'actions en cas de réemploi des fonds dans les
PME nouvelles serait mis en place pour développer ce qui existait
déjà aux États-Unis, où ceux qu'on appelait les
" Business Angels " apportaient des capitaux aux entreprises
innovantes en création.
M. Jean-Marie Rausch, rapporteur pour avis,
a souhaité que
cet effort soit poursuivi et que soit renforcée l'osmose entre la
recherche publique et les entreprises, au moyen d'une systématisation
des échanges entre ces deux mondes, encore trop étrangers l'un
à l'autre. Il a insisté sur la rigidité du statut des
chercheurs publics, qui leur interdisait, comme venait de le rappeler un
récent rapport de la cour des comptes, d'exercer cumulativement une
activité en laboratoire public et en entreprise, ce qui paraissait peu
adapté à la nécessaire valorisation de la recherche
française. Il a jugé que la recherche publique avait besoin d'un
décloisonnement accru et de plus de souplesse.
M. Henri Revol
a rappelé que le souhait, louable, de la
commission de voir la recherche mieux décentralisée et plus
accessible aux PME, ne devait pas conduire à une réduction ni
à une dispersion excessive de la recherche, qui lui seraient
préjudiciables. Il a estimé que l'effort français en
matière de recherche fondamentale devrait être
préservé, faute de quoi la France perdrait la bonne position qui
était la sienne dans ce domaine. Il a jugé que la décision
de différer l'engagement du projet de nouveau synchrotron était
une erreur.
M. Jean-Marie Rausch, rapporteur pour avis,
a relevé que la
position du ministre, qui avait récemment reçu les rapporteurs
spéciaux et pour avis du Sénat au sujet du budget, lui semblait
souffrir d'une sorte de contradiction entre l'effort engagé de
décentralisation des chercheurs, qui serait poursuivi, et la politique
d'implantation des grands équipements, qui concernerait
vraisemblablement en premier lieu la région Ile-de-France.
M. Henri Revol,
rappelant l'importance des travaux conduits à
Cadarache, ainsi qu'à Grenoble, a jugé qu'une localisation en
province était pleinement compatible avec une utilisation optimale des
équipements.
Revenant sur le cloisonnement français des recherches privée et
publique et l'opposant à la situation américaine,
M. Roger
Rinchet
a jugé que cet état de fait découlait souvent
de l'éloignement géographique, au sein des villes, entre les
parcs d'activités et les universités, empêchant ainsi une
symbiose pourtant féconde et nécessaire.
M. Jean-Marie Rausch, rapporteur pour avis,
a déclaré
partager ce point de vue. Il a rappelé que la technopole de Metz
réunissait non seulement plusieurs grandes écoles et
universités françaises et américaines, mais aussi plus de
200 petites et moyennes entreprises, ce qui avait conduit à la mise
en place, le 6 novembre dernier, d'une expérimentation, essentielle
pour la diffusion des nouvelles technologies en France, réalisée
pour la première fois au monde, de fourniture d'Internet aux
particuliers sur le réseau câblé de la ville, au moyen d'un
simple téléviseur et au prix d'un abonnement forfaitaire, peu
coûteux pour les usagers.
Répondant à
M. Francis Grignon,
qui l'interrogeait sur le
nombre de chercheurs du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et
sur l'importance de leurs éventuels transferts vers le secteur
privé, le rapporteur pour avis a rappelé les dispositions du
statut des chercheurs, qui freinait leur départ vers les entreprises.
Après l'intervention de
M. Jean François-Poncet,
président
, sur ce même sujet et sur l'organisation de la
recherche en Allemagne,
M. Jean-Marie Rausch, rapporteur pour avis,
a précisé que Mme Catherine Bréchignac, directeur
général du CNRS, consciente de ces faiblesses, souhaitait
développer les échanges entre les chercheurs de
l'établissement et les entreprises.
M. Charles Revet
, évoquant ses récents entretiens avec des
cadres supérieurs désireux d'émigrer aux Etats-Unis pour
créer leur entreprise, a demandé au rapporteur pour avis si le
secteur de la recherche souffrait de ce même phénomène de
fuite des cerveaux. Aquiescant,
M. Jean-Marie Rausch, rapporteur pour
avis,
a rappelé les dispositions des projets de loi de finances pour
1997 et 1998 visant à favoriser la création d'entreprises
innovantes en France, dont il a jugé qu'elle était encore
insuffisante, au regard par exemple de la situation du Massachusetts institute
of technology (MIT) à Boston dont les chercheurs étaient
encouragés à créer leur propre entreprise, ce qui avait
entraîné ces dernières années de nombreux
départs de cerveaux français et notamment de chercheurs en
informatique.
M. Louis Moinard
a redouté que les transferts vers le
privé ne concernent que les meilleurs d'entre les chercheurs, les autres
restant dans le secteur public. Revenant au problème de l'évasion
des cerveaux, il a jugé que le régime d'imposition
français en était responsable.
En réponse,
M. Jean-Marie Rausch, rapporteur pour avis,
a
indiqué qu'il interrogerait le ministre sur ce point. Il a, par
ailleurs, précisé que M. Claude Allègre
suggérait aux régions de mettre en place des instituts
d'innovation favorisant la création d'entreprises innovantes.
Suivant les conclusions de son rapporteur pour avis, la commission s'en est
ensuite
remis à la sagesse du Sénat pour l'adoption des
crédits consacrés à la recherche dans le projet de loi de
finances pour 1998.
1
Voir Décret n° 97-707
du 11 juin 1997 relatif aux attributions du Ministère de
l'Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie, Journal
officiel du 12 juin 1997.
2
Dans son avis sur le projet de BCRD rendu le 10 octobre 1997.
3
M. Alex Türk, question écrite n° 690,
3 juillet 1997.
4
Données annualisées pour toute l'année 1997.
5
Un nombre significatif d'opérations a été
intégré dans le contrat de plan Etat-régions 1994-1999, en
raison du cofinancement souvent indispensable des investissements immobiliers.
6
Dans son rapport particulier de juin 1997 sur la valorisation de
la recherche dans les établissements publics à caractère
scientifique et technologique
7
Hors subvention du Ministère de la Défense. Il
s'agit des crédits dorénavant inscrits au fascicule
budgétaire " Recherche ".
8
Le programme STENTOR comprend un lancement de satellite au premier
semestre 2000 et une phase d'expérimentation en vol des technologies
nouvelles pendant les deux premières années.