III. LES INCERTITUDES QUI PÈSENT SUR LES INCITATIONS FISCALES EN FAVEUR DE L'INVESTISSEMENT IMMOBILIER PRIVÉ

A. LES INCERTITUDES QUANT AU FINANCEMENT DU DISPOSITIF DE L'AMORTISSEMENT " PERISSOL "

1. Rappel du dispositif

L'amortissement dit " Périssol ", optionnel et exclusif du dispositif " Quiles-Méhaignerie " permet aux contribuables, sur option de leur part, de déduire de leurs revenus fonciers, un amortissement sur les immeubles neufs acquis ou construits entre le 1er janvier 1996 et le 31 décembre 1998.

Le taux d'amortissement est fixé à 10 % pendant les quatre premières années et à 2 % pour les vingt suivantes. Le taux de la déduction forfaitaire est ramené à 6 %. En cas d'option, le plafond d'imputation des déficits fonciers sur le revenu global est porté de 70.000 francs à 100.000 francs. Le propriétaire doit s'engager à louer le logement pendant une durée de neuf ans. Ce dispositif induit un gain très sensible du taux de rentabilité d'une opération d'investissement locatif. Ce gain est en général de l'ordre de 2 % et peut dépasser dans certaines conditions 4 %. Il est plus intéressant que l'avantage " Quilès-Méhaignerie " dans presque tous les cas, sauf pour de petites opérations réalisées par des ménages disposant de revenus limités. Avec l'amortissement " Périssol ", les gains de rentabilité sont à peu près uniformes quel que soit le montant de l'investissement.

Sur la base des estimations effectuées à partir de l'enquête de la Fédération nationale des promoteurs constructeurs (FNPC) et des surfaces moyennes des logements vendus au cours du 4ème trimestre 1996, l'amortissement Périssol induirait un surplus d'activité de 35 % par rapport à la mesure fiscale " Quilès-Méhaignerie " en faveur de l'investissement locatif.

La construction de 10.000 logements neufs bénéficiant de l'amortissement Périssol correspondrait à 3,1 milliards de francs d'activité hors taxes et à 5.900 emplois créés ou maintenus dans les entreprises de bâtiment. Dans le cas de la déduction Quiles-Méhaignerie, le chiffre d'affaires correspondant à 10.000 logements est de 2,3 milliards de francs, soit 4.400 emplois associés dans le bâtiment.

Certaines évaluations chiffrent l'effet du dispositif d'amortissement Périssol à environ 30.000 logements acquis en année pleine.

2. L'effet report de l'amortissement Périssol

Etant donné que l'amortissement accéléré porte essentiellement sur des programmes immobiliers en état futur d'achèvement, il y a un écart de plusieurs années entre l'année d'achat d'un logement locatif neuf et celle d'encaissement des premiers loyers, ce qui décale dans les mêmes proportions l'année où se réalise la moins-value fiscale pour le budget de l'Etat.

Bien que le dispositif de l'amortissement accéléré expire le 31 décembre 1998, son coût s'étalera donc jusqu'à 2005. Pour 1998, le coût estimé de la mesure est de 1,4 milliard de francs.

Le coût fiscal de l'amortissement accéléré sera maximal en 1999, 2000 et 2001 parce qu'il se cumulera avec la fin du dispositif Quilès-Méhaignerie. En l'an 2000, l'incidence budgétaire de l'amortissement accéléré devrait s'élever à 2,7 milliards de francs ; celle du dispositif Quilès-Méhaignerie devrait être de 310 millions de francs, soit 3 milliards au total.

B. LES RÉFLEXIONS SUR LA DÉFINITION D'UN VÉRITABLE STATUT DU BAILLEUR PRIVÉ

Tout en considérant que le dispositif de l'amortissement accéléré ne peut être prorogé, en l'état, au-delà du 31 décembre 1998, les pouvoirs publics reconnaissent que l'offre du logement doit être diversifiées et " plurielle ". A côté du parc locatif social, il convient d'encourager un parc locatif privé plus social.

Lors de son audition devant la commission des affaires économiques, le secrétaire d'Etat au logement a fait état des concertations qui s'engageaient actuellement avec les professionnels et les associations de locataires afin de mettre en place un dispositif durable et équilibré.

Il est intéressant de citer les propos qu'il a tenu sur le sujet dans un article publié par " l'Information immobilière " 1( * ) .

" Notre objectif est de parvenir à un dispositif stable et équilibré, valant statut du bailleur privé, qui en reconnaisse la fonction économique. L'objectif est double :

- La pérennité : il faut bâtir pour la durée, et sortir des mesures conjoncturelles qui ont certes des effets immédiats, mais qui conduisent à des phénomènes cycliques dans l'activité de l'immobilier et la construction.

- Le souci d'équilibre : les aides majorées apportées par la collectivités doivent trouver une contrepartie sociale. Il faudrait donc aboutir à un traitement fiscal qui ne soit pas pénalisant par rapport aux autres placements.

D'autre part, à côté d'un secteur libre qui continuera d'exister et de se développer, le Gouvernement souhaite, avec bien sûr une liberté d'option, développer un secteur privé conventionné, un peu comme en matière de santé ; en contrepartie d'une modération des loyers et d'un engagement de durée de location, la collectivité pourrait apporter une aide majorée et une sécurité contre les impayés.

Nous voulons donc travailler sur plusieurs pistes : la déduction forfaitaire, l'amortissement, la garantie des loyers, la caution, etc...

En résumé, je pense qu'il faut que nous nous efforcions, collectivement, de susciter de nouvelles générations de bailleurs privés.

Notre politique qui est de veiller à rendre effectif le droit au logement en assurant une réelle possibilité de choix, doit reposer, de manière équilibrée, sur chacun des trois secteurs majeurs que sont le logement social, le parc privé et l'accession à la propriété. C'est une offre plurielle qui permettra de fabriquer la ville plurielle à laquelle chacun aspire. "

C. LES AMBIGUÏTÉS DES DISPOSITIONS FISCALES EN FAVEUR DU LOGEMENT LOCATIF PRIVÉ DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998

1. Le maintien de certaines des mesures décidées par le précédent Gouvernement

Afin d'encourager la mise en location durable des logements, de nombreuses mesures avaient été prises d'allégement de la fiscalité des revenus fonciers et elles sont maintenues dans le projet de loi de finances pour 1998.

Il en est ainsi de l'imputation sur le revenu global d'une partie des déficits fonciers réalisés au cours de l'année. Le plafond d'imputation des déficits fonciers sur le revenu global a été porté de 50.000 francs à 70.000 francs pour 1995 par l'article 64 de la loi de finances pour 1995. Le plafond est porté à 100.000 francs en cas d'option pour le régime d'amortissement.

Par ailleurs, les propriétaires bailleurs de logements situés en zone franche urbaine qui engagent des travaux en vue de réhabiliter les immeubles concernés, dans les conditions prévues par l'article 10 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996, bénéficient d'un régime de faveur tant en ce qui concerne les charges déductibles des revenus fonciers que les déficits imputables sur le revenu global pour les dépenses payées à compter du 1er janvier 1997.

Le taux de la déduction forfaitaire sur le revenu brut foncier, fixé à 13 % pour les revenus perçus à compter de 1995, par la loi de finances rectificative du 4 août 1995 a été porté à 14 % pour l'article 86 de la loi de finances pou 1997, à compter de l'imposition des revenus de 1997.

L'article 10 de la loi n° 94-1162 du 29 décembre 1994 a autorisé les propriétaires d'immeubles urbains donnés en location à déduire de leurs revenus fonciers pour leur montant réel les primes d'assurance afférentes à un contrat dont l'objet exclusif est de couvrir le risque de loyers impayés.

L'article 22 de la loi de finances initiale pour 1997 étend cette possibilité de déduction à la fraction de la prime destinée à couvrir le risque de loyers impayés, lorsque le contrat souscrit comporte également la couverture d'autres risques.

L'article 31 de la loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier du 12 avril 1996 porte de 5 à 10 ans le délai d'imputation des déficits fonciers sur les revenus fonciers des années suivantes. Cette disposition s'applique pour les déficits de 1996 et ceux constatés depuis 1991.

2. L'alourdissement de la fiscalité sur les revenus fonciers dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale

Néanmoins, le maintien en l'état de ces mesures fiscales ne permettra pas de compenser l'augmentation de 4,9 % à 10 % des contributions sociales sur les revenus fonciers qui se décompose ainsi : la contribution sociale généralisée (CSG) au taux de 7,5 %, la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) au taux de 0,5 %, et l'institution d'un prélèvement social de 2 % remplaçant les 1 % CNAF et CNAV. L'impôt sur le revenu s'applique ensuite, en tenant compte de la déduction de 5,1 % de la CSG.

Ce prélèvement supplémentaire au bénéfice des régimes sociaux s'élèvera à environ 4,6 milliards de francs.

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La Commission des Affaires économiques , dans sa majorité, a émis un avis défavorable à l'adoption des crédits consacrés au logement.

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