2. Un mode d'organisation sensiblement différent du schéma initial fixé par le législateur
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Les moyens de financement
Une des originalités présentées par la Fondation du
patrimoine résidait dans le statut inédit dont l'avait
dotée la loi. En effet, à la différence du droit classique
des fondations, la pérennité de la Fondation ne résidait
pas dans l'immobilisation du capital, ce qui aurait exigé des apports
initiaux d'un montant très élevé qu'il aurait
été vraisemblablement impossible de réunir sur un tel
projet, mais dans l'engagement des fondateurs d'assurer le financement de la
Fondation.
Les apports des fondateurs devaient donc financer les actions engagées
par le budget de la Fondation ainsi que son fonctionnement, ce qui exigeait, si
un nombre significatif d'opérations devaient être lancées,
un renouvellement du capital soit par des apports supplémentaires des
fondateurs, soit par des apports de nouveaux fondateurs. Compte tenu des
difficultés rencontrées dans la collecte des fonds devant
constituer le capital initial de la Fondation, ceci signifiait soit un
abondement permanent du capital -difficilement réalisable- soit plus
vraisemblablement l'épuisement, à échéance plus ou
moins lointaine, des moyens d'action de la Fondation.
Le mode de fonctionnement prévu par la loi a donc été
abandonné au profit d'un schéma plus proche de celui retenu par
le droit commun des fondations. Ainsi, il a été
décidé que le capital initial de 32 millions de francs
serait placé afin de produire des revenus destinés à
financer la structure centrale de la Fondation (frais de publicité, de
personnel et d'équipements divers) et que les opérations
menées par la Fondation seraient financées par des appels
à financement lancés à l'échelon local à
l'occasion de projets précis.
D'après les informations données à votre rapporteur par le
président de la Fondation, le capital initial devrait être
porté, au cours de l'année 1998, à 60 millions de
francs grâce à l'apport de fonds de nouveaux donateurs, ce qui
permettrait à la Fondation de bénéficier d'une
solidité financière plus grande de nature à
accroître sa force de conviction à l'égard des entreprises
appelées à participer aux projets. L'immobilisation du capital
présente l'avantage pour les entreprises donatrices d'associer de
manière permanente leur nom à l'action de la Fondation du
patrimoine alors que, dans le schéma initial, elles étaient des
partenaires parmi d'autres de réalisations cofinancées.
·
L'appel à des adhérents directs
L'article 3 de la loi précisait que "
des personnes
physiques ou morales, publiques ou privées peuvent adhérer dans
les conditions prévues par les statuts à la Fondation du
patrimoine à condition de s'acquitter d'une cotisation annuelle dont le
montant est déterminé par le conseil d'administration
".
Cette disposition audacieuse rapprochait le droit des fondations de celui des
associations afin de permettre aux citoyens de participer activement à
l'action de la Fondation, à l'image de ce qui prévaut dans le
fonctionnement du National Trust britannique. Les statuts approuvés par
le décret du 18 avril 1997 précisent que l'adhésion
est libre, posant comme seule condition l'acquittement d'une cotisation dont le
montant est fixé par le conseil d'administration.
D'après les informations qu'a pu recueillir votre rapporteur, il
apparaît que la Fondation du patrimoine n'est pas désireuse de
disposer, du moins dans la première phase de sa mise en place,
d'adhérents directs. Elle ne souhaite pas pour autant interdire
l'adhésion directe : le montant de la cotisation, très
modique, a été fixé par le dernier conseil
d'administration mais elle n'envisage pas de lancer un large appel à
cotisations pour des raisons tenant essentiellement au coût d'une telle
opération.
La Fondation associera les citoyens à ses actions mais selon un
mécanisme sensiblement différent de celui prévu à
l'origine
. En effet, a été mis en place un système
fondé non sur l'adhésion directe des citoyens à la
Fondation mais sur celle des associations elles-mêmes. Les associations
souhaitant soutenir l'action de la Fondation demandent à leurs membres
de lui verser une cotisation symbolique de 10 francs, la Fondation se
réservant le droit de les solliciter lorsqu'un projet susceptible de les
intéresser doit être lancé. Plutôt que des
adhérents directs, il s'agit de membres " dormants " qui
sont
informés des projets de nature à les concerner au plan local. Ils
sont, à ce jour, plus de 100.000 et constituent le vivier dans lequel la
Fondation puisera ses mécènes.
Ce système, qui n'était pas prévu par la loi,
présente aux yeux de votre rapporteur plusieurs avantages.
En premier lieu, il constitue la garantie que la Fondation ne se substituera
pas aux associations de protection du patrimoine. Ce souci avait
été exprimé, lors de la discussion du projet de loi, par
votre commission. La défense du patrimoine bâti et non bâti
est une cause encore étroite et un appel à adhésion
directe risquerait de priver les associations de leurs membres, risque qui est
susceptible de nourrir leur prévention à l'égard de la
Fondation, qui ne pourrait qu'en pâtir. La Fondation tirera parti du
réseau et de la mobilisation des adhérents des associations qui,
elles-mêmes, pour la réalisation de leurs projets,
bénéficieront de l'effet de levier de la Fondation.
En second lieu, ce principe d'affectation des dons à des projets
identifiés permet une plus grande transparence financière des
actions soutenues par la Fondation et l'opinion que le public aura de cette
institution s'en trouvera renforcée.
·
L'organisation interne de la Fondation
L'organisation retenue jusqu'ici se fonde, d'une part, sur une
structure
centrale s'appuyant sur une équipe de dimension réduite et,
d'autre part, sur une organisation largement décentralisée
recourant à l'appui des entreprises
.
-
Au niveau central
, la Fondation ne souhaite pas développer une
importante technostructure. Elle se réduira à une équipe
de cinq cadres -bénévoles pour quatre d'entre eux- choisis en
raison de leurs compétences et de leur personnalité et
responsables respectivement des réseaux régionaux, des
associations, des finances, de la communication et des questions techniques (M.
Marcel Jullian a été désigné en tant que directeur
de la communication). Leur rôle est conçu restrictivement :
ils n'ont vocation qu'à exercer
un rôle d'impulsion à
destination du réseau décentralisé
et à assumer
les tâches qui ne peuvent être déléguées aux
membres de ce dernier. Il faut souligner que le rôle logistique de la
structure centrale se réduira, du moins dans un premier temps, au
minimum. L'idée d'une ingénierie technique ou financière
fournie par la Fondation, qui avait été avancée lors des
débats parlementaires, ne semble pas encore pouvoir se
concrétiser.
- La Fondation s'appuiera essentiellement dans la mise en oeuvre de ses
projets sur une organisation décentralisée. Celle-ci semble
s'être dessinée non pas a priori mais au fur et à mesure
que la Fondation mesurait sa marge d'indépendance à
l'égard de l'Etat et des collectivités locales
.
Elle repose à l'échelon régional sur un " patron
régional " selon l'expression utilisée par M. de
Royère, président de la Fondation. Ce responsable régional
qui sera un chef d'entreprise ou bien une personnalité à fort
rayonnement régional aura pour mission d'aider à la mise en
oeuvre des projets. Son influence et son réseau de relations devront
permettre de mobiliser les énergies et de surmonter les
réticences psychologiques ou administratives des divers partenaires
potentiels. Il sera assisté d'un bénévole membre ou non
d'une association, qui sollicitera le soutien des chambres de commerce, des
unions professionnelles, des associations et des collectivités locales.
A l'échelon départemental, se retrouve la même organisation
: un chef d'entreprise assisté d'un bénévole. A la
différence de l'équipe régionale, à qui il revient
de nouer des contacts, celle-ci aura un véritable rôle
opérationnel. Il lui reviendra de sélectionner les projets les
plus intéressants et de recueillir les financements nécessaires.
La Fondation aura pour seul rôle de donner son accord à la
réalisation de l'opération envisagée après avoir
vérifié que son financement est assuré et que les devis et
les travaux envisagés sont fondés. Il s'agit donc d'un
contrôle souple exercé à l'échelon central qui
donnera lieu à la délivrance du label.
Cette organisation décentralisée repose sur le principe de la
régionalisation et de la départementalisation des financements.
Les projets seront financés par les sommes perçues dans le
département ou la région concernée. Il n'y aura donc
pas de péréquation entre les régions ni même
entre les départements.
Cette organisation décentralisée n'exclut pas que la Fondation
définisse des lignes directrices à son action. Il reviendra au
conseil d'orientation de
déterminer des grands thèmes
transversaux
qui commanderont, sans pour être totalement exclusifs du
choix d'autres réalisations, la sélection des projets.
Jusqu'à présent, la Fondation a préféré,
plutôt que de couvrir l'ensemble du territoire, choisir des
régions pilotes. Celles-ci seront au nombre d'une dizaine d'ici la fin
de l'année 1997.
Il est apparu à votre rapporteur que le mode d'organisation
calqué sur les méthodes de l'entreprise privée et
inspiré par l'esprit de responsabilité et d'initiative des
responsables locaux résultait non pas d'une méthode
définie a priori mais des conditions dans lesquelles la Fondation s'est
mise en place en dehors de toute orientation définie par les
ministères de tutelle.