B. L'ORIGINALITÉ DU POINT DE VUE SÉNATORIAL
Le Sénat a très largement contribué
à enrichir le précédent projet de loi portant
réforme du service national. Il est d'ailleurs tout à l'honneur
du précédent gouvernement qu'un texte aussi décisif,
portant en lui une véritable
réforme de société,
ait suscité la recherche du plus large consensus possible au sein de
la représentation nationale et sur le plan national.
.
Votre rapporteur tient une nouvelle fois à souligner que, de
manière générale, le Sénat avait abordé la
réforme du service national proposée par le
précédent projet de loi
sans nostalgie du passé
.
Dans cet esprit, le Sénat s'est interrogé sur
l'opportunité d'inscrire dans la législation française
un" devoir de contribuer à la défense du pays " qui
incomberait à
tous
les citoyens français. Le Sénat
a, en effet, jugé paradoxal de souscrire à ce principe à
l'heure où la France faisait le choix de la professionnalisation, et
où l'armée professionnelle devenait le coeur de sa défense.
.
Le
Sénat a tenu le plus grand compte des
impératifs de la professionnalisation
et de la
priorité
qui devait s'attacher à celle-ci,
en définissant les
fondements législatifs du service national rénové.
Le contenu du " rendez-vous citoyen " a donc été
étendu à l'
information
des jeunes sur le volontariat
militaire
, ainsi que sur les perspectives d'
engagement dans les forces
armées et dans les forces de réserve
. En effet, le
Sénat a jugé indispensable de tirer parti du " rendez-vous
citoyen " pour
susciter des vocations parmi les jeunes
, eu
égard au fait qu'avec la disparition du service national obligatoire
devait prendre fin une part non négligeable du recrutement des
armées.
Dans la même logique, le Sénat a, à plusieurs reprises,
insisté sur la nécessité d'encourager la contribution du
" rendez-vous citoyen " au
renforcement de l'esprit de
défense
et au maintien du lien entre l'armée et la Nation.
Sur ce dernier point, rappelons que l'une des conclusions du débat
organisé au niveau national, au printemps 1996, sur l'avenir du service
national, était que la professionnalisation devait impérativement
être conduite de manière à
éviter de distendre le
lien entre l'armée et la Nation
.
Enfin, le Sénat a souhaité assurer la spécificité
du volontariat militaire, appelé à devenir une composante
indispensable de l'armée professionnelle, en évitant de diluer le
volontariat militaire dans un ensemble sans grande cohérence, comprenant
des misions aussi éloignées de la défense et de la
sécurité que la protection du patrimoine national.
.
Tirant les conséquences du fait que le service national
rénové s'appuyait sur des
institutions inédites, qu'il
s'agisse du " rendez-vous citoyen " ou du volontariat
,
le
Sénat a également souhaité faire preuve de
pragmatisme
dans la détermination des contours législatifs
de la réforme du service national. Il a, de manière
générale, pris le parti de laisser, quand cela paraissait
pertinent, la place à l'expérimentation, avant de figer dans la
loi des éléments de la réforme dont il paraissait
préférable qu'ils fassent leurs preuves. Il a ainsi voulu
éviter de préciser de manière contraignante la
durée du " rendez-vous citoyen "
, constatant que la
durée de cinq jours prévue par le précédent projet
de loi relevait d'une
intuition
dont il importait de
vérifier
le bien-fondé à l'épreuve de la réalité
.
Dans le même esprit, le Sénat a souligné les
difficultés susceptibles de résulter, pour les
jeunes
Français résidant à l'étranger
, de l'obligation
d'accomplir le " rendez-vous citoyen " dans les conditions
du droit
commun. En effet, le Sénat a souhaité tirer les
conséquences :
- de l'impossibilité, pour la quasi-totalité de nos
représentations diplomatiques, d'organiser des sessions du
" rendez-vous citoyen " selon les modalités prévues par
le projet de loi (durée de cinq jours, internat) ;
- de la spécificité de la population des Français de
l'étranger, constituée pour 10 % seulement d'expatriés
ayant gardé un lien régulier avec la France ;
- des contraintes susceptibles de résulter, dans certains pays, de
l'accomplissement d'une obligation légale liée à la
défense d'un autre pays ;
- des difficultés que poserait, dans certains pays, l'accomplissement de
cette obligations par des jeunes filles ;
- des difficultés financières qu'aurait notamment posé,
dans les pays les plus vastes et les plus éloignés de la France,
la prise en charge du transport des appelés depuis leur lieu de
résidence jusqu'au centre du service national, que celui-ci soit
situé à l'étranger ou sur le territoire national.
.
Enfin, l'attention du Sénat s'est portée sur
l'aménagement du
statut des volontaires héritiers du service
national en entreprise
, afin d'assurer que ces jeunes
bénéficient du statut de
droit public
indispensable
à l'accomplissement de leur mission.
Quand a été interrompu l'examen du précédent projet
de loi portant réforme du service national, les points en suspens qui
demeuraient entre les deux assemblées étaient pour la plupart des
nuances d'ordre rédactionnel
et permettaient d'envisager, la
navette ayant pleinement joué son rôle, l'élaboration d'un
texte convenant à l'Assemblée nationale comme au Sénat.